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Parmi les personnes accueillies aux urgences, les patients âgés constituent un groupe spécifique mobilisant les équipes d’urgence de façon particulière. Leurs conditions de vie et les affections liées à l’âge entraînent une fragilité supplémentaire chez ces patients. Leur prise en charge comporte un nombre d’actes plus élevé, une hospitalisation plus fréquente en unité d’hospitalisation de courte durée (UHCD), et se caractérise par une durée de passage plus longue que celle des patients plus jeunes. C’est principalement la modalité de sortie qui différencie leur passage aux urgences : 56 % des patients âgés sont hospitalisés dans un service conventionnel tandis que 38 % retournent à leur domicile et 5 % dans leur établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Se dessinent ensuite plusieurs profils de patients âgés en fonction de leur provenance et de leurs pathologies. Cette étude est centrée sur les recours aux urgences des personnes âgées. L’Études et Résultats n° 1008 détaille plus spécifiquement les causes des durées de passage aux urgences plus longues pour les personnes âgées. L e taux de recours aux urgences est plus élevé aux âges ex- trêmes de la vie. Dans l’enquête nationale sur les structures des urgences hospitalières (encadré), les 6 000 patients âgés de 75 ans ou plus représentent 12 % des passages le mardi 11 juin 2013 et 17 % des passages de patients âgés de 15 ans ou plus alors que ce groupe d’âge ne constitue que 11 % des 15 ans ou plus en population générale. Parmi eux, 44 % sont âgés de 85 ans ou plus (32 % en population générale). La complexité des problèmes de santé s’ac- croît avec l’âge, en raison de la présence simultanée de plusieurs maladies chro- niques (polypathologies) et, pour les plus âgés, du risque d’une perte d’autonomie (Haute Autorité de santé, 2015 et Cour des comptes, 2012). La fragilité physique, psychique ou socio-économique augmente également avec l’âge (Sirven, 2016). L’admission en service d’urgences survient la plupart du temps à la suite d’un état de crise ayant pour origine des causes médi- cales mais également sociales (isolement social, manque de ressources, perte de mobilité…) [SFMU, 2003]. Dans cette étude, les personnes âgées de 75 ans ou plus sont comparées aux patients de 15 à 74 ans, en raison de la spécificité des passages des enfants de moins de 15 ans. La comparaison Les personnes âgées aux urgences : une patientèle au profil particulier Bénédicte Boisguérin et Léa Mauro (DREES) MARS 2017 NUMÉRO 1007

La prise en charge des personnes âgées aux urgences

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Parmi les personnes accueillies aux urgences, les patients âgés constituent un groupe spécifique mobilisant les équipes d’urgence de façon particulière. Leurs conditions de vie et les affections liées à l’âge entraînent une fragilité supplémentaire chez ces patients. Leur prise en charge comporte un nombre d’actes plus élevé, une hospitalisation plus fréquente en unité d’hospitalisation de courte durée (UHCD), et se caractérise par une durée de passage plus longue que celle des patients plus jeunes.

C’est principalement la modalité de sortie qui différencie leur passage aux urgences : 56 % des patients âgés sont hospitalisés dans un service conventionnel tandis que 38 % retournent à leur domicile et 5 % dans leur établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Se dessinent ensuite plusieurs profils de patients âgés en fonction de leur provenance et de leurs pathologies.

Cette étude est centrée sur les recours aux urgences des personnes âgées. L’Études et Résultats n° 1008 détaille plus spécifiquement les causes des durées de passage aux urgences plus longues pour les personnes âgées.

L e taux de recours aux urgences est plus élevé aux âges ex-trêmes de la vie. Dans l’enquête

nationale sur les structures des urgences hospitalières (encadré), les 6 000 patients âgés de 75 ans ou plus représentent 12 % des passages le mardi 11 juin 2013 et 17 % des passages de patients âgés de 15 ans ou plus alors que ce groupe d’âge ne constitue que 11 % des 15 ans ou plus en population générale. Parmi eux, 44 % sont âgés de 85 ans ou plus (32 % en population générale). La complexité des problèmes de santé s’ac-croît avec l’âge, en raison de la présence simultanée de plusieurs maladies chro-niques (polypathologies) et, pour les plus âgés, du risque d’une perte d’autonomie (Haute Autorité de santé, 2015 et Cour des comptes, 2012). La fragi l i té physique, psychique ou socio-économique augmente également avec l’âge (Sirven, 2016). L’admission en service d’urgences survient la plupart du temps à la suite d’un état de crise ayant pour origine des causes médi-cales mais également sociales (isolement social, manque de ressources, perte de mobilité…) [SFMU, 2003]. Dans cette étude, les personnes âgées de 75 ans ou plus sont comparées aux patients de 15 à 74 ans, en raison de la spécificité des passages des enfants de moins de 15 ans. La comparaison

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des modes de vie des patients âgés de 75 ans ou plus et des patients plus jeunes (15-74 ans) reflète en partie ces situations de fragilité accrue. Ainsi, 43 % des patients âgés vivent seuls à leur domicile contre 32 % des 15-74 ans (tableau 1). Par ailleurs, 14 % des 75 ans ou plus vivent dans une institution (24 % des 85 ans ou plus).

Avant de recourir aux urgences, les patients âgés ont souvent effectué d’autres démarches La proportion de patients qui ne sont pas en mesure de répondre, par exemple in-conscients, est trois fois plus élevée par-mi les patients âgés. Les conditions d’ar-rivée de ces patients ne sont pas connues (encadré). En lien avec leur mode de vie, caractérisé par une mobilité moindre que celle des plus jeunes, les trois quarts d’entre eux proviennent de leur domicile et 45 % sont transportés en ambulance ou en taxi. Les personnes âgées, plus inscrites dans le système de soins que les autres patients, ont entrepris davantage de dé-marches concernant leur état de santé au cours des 24 heures précédant le re-cours aux urgences, (58 % versus 35 % pour les 15-74 ans). Quatre fois sur cinq, ces démarches ont été réalisées auprès de médecins, en consultation ou par téléphone. Au total, 20 % des patients âgés étaient adressés aux urgences par un médecin libéral. En outre, ces services étaient prévenus de l’arrivée de 10 % des patients âgés pour un accès au plateau technique ou pour recevoir des soins urgents1.La traumatologie constitue le premier motif de recours des personnes âgées (25 %), suivi par les motifs cardio- vasculaires (17 %). Viennent ensuite les motifs « généraux et divers » (fièvre, al-tération de l’état général, fatigue, etc. : 12 %), avec peu d’écarts pour les 85 ans ou plus. Par rapport aux patients plus jeunes, les problèmes cardiaques, respi-ratoires ou neurologiques sont plus fré-quents tandis que les motifs de trauma-tologie le sont moins.En dépit de la variété des motifs de re-cours, les prises en charge des patients âgés aux urgences présentent des ca-

ractéristiques communes à mettre en relation avec la fragilité et les pathologies particulières de ces patients. De fait, la décision d’hospitaliser ou non un patient âgé dans un autre service présente un double risque qui peut expliquer une prise en charge plus complexe aux urgences. D’une part, l’hospitalisation d’un patient âgé peut s’avérer délétère (syndrome de glissement2 de la personne âgée). D’autre part, la décision de retour à domicile doit prendre en compte des critères médi-caux mais également l’environnement de la personne, en particulier si elle vit seule à domicile : il est important de tenir compte de l’aide, de la surveillance ou du traitement particulier que le patient devra recevoir à domicile (Maire, 2013).

Une prise en charge plus longue qui comporte plus d’actes et de séjours en UHCDLa réalisation plus fréquente d’actes à visée diagnostique pour les patients âgés est largement documentée : « La présence de multiples pathologies intri-quées implique souvent un recours aux examens biologiques et radiologiques. Comparées à une population générale, les personnes âgées ont en moyenne un tiers d’examens complémentaires en plus pour un pourcentage de diagnostics iden-tiques » (SFMU, 2003). Le 11 juin 2013, les patients âgés sont nombreux à avoir bénéficié d’examens médicaux (actes de biologie pour 74 % d’entre eux, actes

1. Les patients peuvent être atten-

dus en non program-mé pour accéder à un

plateau technique ou recevoir des soins urgents. Les services

sont prévenus par un médecin de leur

arrivée.2. Il s’agit de la

détérioration globale des fonctions intellectuelles d’une

personne âgée le plus souvent consécutive

à une maladie ou à un accident, mais

pouvant également survenir à la suite

d’une hospitalisation.

ENCADRÉ Sources, champ, méthodologie

Le protocole d’enquêteLes analyses de cette étude utilisent les données de l’enquête nationale sur les structures des urgences de juin 2013, réalisée par la DREES. Conçue en partenariat avec la Société française de médecine d’urgence (SFMU), en collaboration avec SAMU-Urgences de France (SUDF) et l’Asso-ciation des médecins urgentistes de France (AMUF), l’enquête a été réalisée un jour donné – le mardi 11 juin 2013, de 8 heures le matin au lendemain 8 heures – auprès des 736 points d’accueil d’urgences présents sur le territoire.

L’enquête comporte deux volets complémentaires : un recueil administratif sur les structures d’urgences hospitalières décrivant leur organisation et une enquête auprès des patients détail-lant leur prise en charge. La présentation de la méthodologie détaillée de l’enquête et les don-nées agrégées sont accessibles sur le site internet de la DREES1.La base finale de l’enquête comprend 734 points d’accueil sur les 736 recensés, soit un taux de réponse de 99,7 %. La collecte a fourni 48 711 questionnaires patients sur les 52 018 passages enregistrés aux urgences durant la journée, soit un taux de réponse de 93,6 %. Des traitements statistiques ont été effectués par la DREES pour corriger la non-réponse totale à l’enquête, la non-réponse partielle à certaines questions ainsi que des anomalies ou des valeurs aberrantes.

Le champ de l’étudeLe champ de l’étude porte sur tous les patients âgés de 75 ans ou plus s’étant présentés le jour de l’enquête dans un des points d’accueil recensés, hors points d’accueil pédiatriques. Au total, la collecte a permis d’obtenir près de 6 000 questionnaires de patients de 75 ans ou plus, soit 12 % des passages. Pour la description des patients âgés, tous les patients sont pris en compte. Cependant, la plupart des variables décrivant les modalités d’arrivée (provenance, mode de transports et démarches) ne sont renseignées que pour les patients en mesure de répondre ou les patients accompagnés. Les patients ayant refusé de répondre ne sont pas pris en compte. Par ailleurs, les patients transportés par les forces de l’ordre, ceux provenant d’un établissement de santé ou d’une structure médico-sociale ne sont pas interrogés sur les démarches effectuées avant leur arrivée ou leur motivation pour se rendre aux urgences. Dans les modèles décrits sur l’hospitalisation, les patients sans abri, logés à l’hôtel ou autres ne sont pas pris en compte (au total 5 146 patients pris en compte). Enfin, la classification a été construite en excluant certaines modalités rares et non-réponses, en particulier les patients n’étant pas mesure de répondre, ce qui conduit à 4 594 patients pris en compte dans cette classification. Pour cette raison, les ré-sultats de l’ensemble des patients de la classification peuvent différer légèrement de l’ensemble des patients âgés. Les 0,3 % de patients âgés qui retournent chez eux avec une hospitalisation à domicile ne sont pas considérés comme hospitalisés à la sortie des urgences et sont compta-bilisés dans les patients non hospitalisés à la sortie des urgences.

Méthodologie du modèle pour expliquer les déterminants de l’hospitalisation Le recours à l’hospitalisation a été analysé à l’aide d’une régression logistique. Les variables explicatives mentionnées sont significatives : elles ont chacune une influence, toutes choses égales par ailleurs.

1. http://drees.social-sante.gouv.fr/etudes-et-statistiques/open-data/etablissements-de-sante-sociaux-et-medico-sociaux/article/enquete-nationale-sur-les-structures-des-urgences-hospitalieres-juin-2013

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diagnostics de type électrocardiogramme [ECG] pour 68 %3). Pour la moitié d’entre eux, la prise en charge a comporté trois types d’examens cumulés (imagerie, bio-logie et autre acte diagnostic) [graphique]. On observe aussi davantage d’actes de soin (pansements, points de suture, aéro-sols, immobilisation de membres), d’avis spécialisés ou de passages par la salle d’accueil des urgences vitales (SAUV)4.Près d’une personne âgée sur cinq a séjourné dans une unité d’hospitalisation de courte durée (UHCD) pendant son pas-sage aux urgences (contre une personne sur treize chez les 15-74 ans). L’UHCD fait partie intégrante du service d’urgence, elle est destinée à hospitaliser des pa-tients pour une durée limitée. Elle permet la mise en observation avant orientation (retour à domicile ou hospitalisation) et la réalisation d’examens ou de soins. Une fois la décision prise, elle peut également être utilisée pour la surveillance néces-saire avant un retour à domicile, mais aussi de zone d’attente d’un lit en cas d’hospitalisation conventionnelle.Les durées de passage aux urgences des patients âgés sont bien plus longues que celles des autres patients. Elles se pro-longent au-delà de huit heures pour 23 % des patients âgés5 (contre 10 % pour les 15-74 ans). Leur prise en charge dure plus longtemps, notamment en raison de ces actes d’investigation et du séjour en UHCD.

Plus de la moitié des patients âgés sont hospitalisés en aval des urgencesÀ l’issue du passage aux urgences, 56 % des patients âgés sont hospitalisés dans un autre service, 38 % retournent à leur domicile6 et 5 % dans leur établisse-ment d’hébergement pour personnes âgées dépendantes d’origine (EHPAD)7. La probabilité d’hospitalisation à la sor-tie des urgences est 2,6 fois plus élevée que celle des 15-74 ans, toutes choses égales par ailleurs8. Neuf patients sur dix sont hospitalisés dans le même établisse-ment que le service d’urgence et un sur dix est transféré dans un autre établisse-ment. 68 % des personnes âgées hospi-talisées le sont en service de médecine, 21 % en chirurgie, 8 % en soins intensifs ou en réanimation et 3 % dans d’autres

3. Pour la comparai-son avec les 15-74 ans sur les actes réalisés aux urgences, voir tableau complé-mentaire A sur le site internet de la DREES.4. Les SAUV permettent de réaliser des actes de réanimation respira-toires et cardiaques.5. Pour plus de détails, voir Études et Résultats n° 1008.6. Y compris 0,3 % de retours à domicile avec hospitalisation à domicile. 7. Le reliquat correspond à des passages aux urgences écourtés : 1 % des patients âgés sont soit partis sans attendre ou contre avis médical, soit ont été orientés en maison médicale de garde, soit sont décédés.8. En tenant compte des condi-tions d’arrivée, du contenu de la prise en charge et de la pathologie ainsi que des carac-téristiques du point d’accueil.

TABLEAU 1 Modalités d’arrivée aux urgences selon l’âge des patients

En % des patients

15-74 ans75 ans ou plus

Mode de vie

seul à domicile 32 43

non seul à domicile 64 42

en institution 2 14

Mode d’arrivée

propres moyens 51 16

véhicule d’un tiers 22 15

ambulance, taxi 10 45

pompiers ou SMUR 15 23

Provenance

domicile 67 75

institution 1 11

établissement de santé 1 3

voie publique 23 5

Motif de recours

général et divers1 5 12

traumatologie 35 25

cardiologique 11 17

respiratoire 3 12

neurologique 6 9

gastrologique 11 10

autre 30 15

Démarches entreprises2 35 58

Dont auprès du médecin traitant ou d’un autre médecin (médecin de garde, SOS médecin)

25 47

1. La rubrique « général et divers » comprend les patients venus pour de la fièvre, un problème d’altération de l’état général, de la fatigue, des sutures, des pansements, etc.2. Concernant la santé, dans les 24 heures précédant le recours aux urgences.Champ • Points d’accueil des structures d’urgences ayant une autorisation d’urgences générales.Source • DREES, enquête nationale sur les structures des urgences hospitalières, juin 2013.

GRAPHIQUEContenu de la prise en charge aux urgences et modalités de sortie selon l’âge des patients

1. Imagerie, biologie, autre acte diagnostic.Champ • Points d’accueil des structures d’urgences ayant une autorisation d’urgences générales.Source • DREES, enquête nationale sur les structures des urgences hospitalières, juin 2013.

Hospitalisation

Durée de passage de 8 heures et plus

Séjour en UHCD

Cumul des trois types d’examens médicaux1

75 ans ou plus

0 10 20 30 40 50 60

15-74 ans

Proportion de patients en %

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services. Dans un quart des cas, l’équipe des urgences a dû faire appel à plus d’un service pour trouver une place d’hospitali-sation à ces patients. Le délai entre la dé-cision d’hospitalisation et l’obtention d’une place allonge également la durée du pas-sage aux urgences : il est supérieur à une heure pour 35 % des personnes âgées hospitalisées à partir des urgences.L’enquête permet de déterminer les fac-teurs de l’hospitalisation dans un autre service pour les 75 ans ou plus9. En pre-mier lieu, la probabilité d’être hospitali-sé augmente fortement avec le nombre d’examens effectués et les pathologies associées et ce, quel que soit le diagnostic principal : les patients âgés ayant béné-ficié d’analyses biologiques ont sept fois plus de chance d’être hospitalisés que les autres. D’autres éléments de la prise en charge entrent également en compte. Ainsi, le fait d’avoir bénéficié d’un autre acte à visée diagnostique (de type ECG) ou d’un avis spécialisé semblent être des indicateurs supplémentaires de l’instabilité de l’état de santé et de la nécessité d’une hospitalisation.Les personnes atteintes de pathologies cardiaques, digestives, neurologiques ou respiratoires ont plus de chance d’être hospitalisées que les patients souffrant de lésions traumatiques ou de « symp-tômes10 ». La gravité de la pathologie entre également en compte11. Les pa-tients les plus âgés (85 ans ou plus) et ceux qui vivent seuls à domicile ont aussi une probabilité un peu plus élevée d’être hospitalisés. Certaines conditions d’arrivée semblent aussi plus déterminantes comme l’arrivée en ambulance ou en taxi, la provenance du domicile ou d’un autre établissement de santé comparée à la provenance d’une institution. La faible taille du point d’accueil des urgences (approchée par le nombre de passages peu élevé, ou le fait d’être situé dans un centre hospita-lier [CH] plutôt qu’en centre hospitalier régional [CHR] pour les établissements publics) augmente la probabilité d’hospi-talisation des patients âgés. Enfin, le fait que le point d’accueil des urgences se situe dans un établissement avec un ser-vice spécialisé de gériatrie12 constitue un facteur augmentant la probabilité d’être hospitalisé.

Huit grands groupes de patients âgés aux urgences selon leur prise en charge Une typologie13 des personnes âgées distingue les parcours des patients hos-pitalisés à la suite des urgences de ceux des patients qui rentrent à domicile ou en EHPAD après leur prise en charge aux urgences. Huit « situations types » se des-sinent (tableau 2).Les quatre premiers groupes de patients très majoritairement hospitalisés à l’issue de leur passage se distinguent par une prise en charge plus lourde. Leur état de santé conduit à les soumettre à davantage d’examens complémentaires (plus des deux tiers cumulent des actes d’imagerie, de biologie, et d’autres actes diagnostics de type ECG) et bénéficient plus souvent d’actes de soins, d’avis spécialisés ou d’accueil en SAUV. Leur passage com-porte plus souvent un séjour en UHCD, en conséquence, la durée de leur passage est plus élevée (8 heures ou plus pour 25 % à 36 % d’entre eux contre 22 % en moyenne). Comme la majorité des patients âgés, ces patients viennent en grande majorité de leur domicile, pour 10 % d’EHPAD. Ces patients majoritairement hospitalisés se distinguent surtout par les diagnostics à la sortie des urgences : symptômes divers, pathologies car-diaques, respiratoires ou neurologiques.

Le groupe le plus important rassemble des patients aux symptômes divers et majoritairement hospitalisés…Parmi les quatre groupes de patients ma-joritairement hospitalisés, le groupe le plus important rassemble 39 % des patients âgés et correspond à des recours pour des pathologies diverses. Les motifs de recours énoncés par les patients à leur ar-rivée aux urgences sont variés. En dépit de la quantité d’actes exploratoires effectués, les diagnostics posés à la sortie restent peu précis et demeurent des symptômes pour la moitié des patients. Ces patients souffrent de dyspnée, d’al-tération de l’état général, de malaises sans perte de connaissance, de douleurs thoraciques, etc. Le degré de gravité des pathologies est également très hétéro-gène et les comorbidités sont relativement fréquentes. S’ajoute vraisemblablement

à ces pathologies un processus de perte d’autonomie, non observable dans les données de cette enquête mais pris en compte par les médecins urgentistes.

… qui se distinguent des 21 % de patients affectés de pathologies aiguësLes trois groupes suivants de patients ma-joritairement hospitalisés (2, 3 et 4) se diffé-rencient du premier par l’homogénéité des diagnostics. Il s’agit de pathologies précises qui, par leur sévérité, requièrent générale-ment une prise en charge hospitalière. Les patients du groupe 2 (11 % des pa-tients âgés) souffrent de problèmes cardiaques : insuffisances cardiaques, troubles du rythme, pathologies coronaires et autres thromboses ; ceux du groupe 3 (6 %) présentent des problèmes respira-toires : infections pulmonaires et bronchites aiguës ou chroniques. Un tiers des patients hospitalisés pour des raisons cardiaques ont des motifs de recours respiratoires car les symptômes de pathologies cardiaques et respiratoires se ressemblent. Pour ces deux groupes, les pathologies associées sont plus fréquentes : elles concernent quatre patients sur dix. La santé de ces patients s’est aggravée depuis plusieurs jours pour près de la moitié d’entre eux. Les patients du groupe 4 (4 %) souffrent d’affections neurologiques. Il s’agit dans 70 % des cas d’accidents vasculaires cérébraux (AVC) ischémiques. Ils se dis-tinguent des premiers groupes par la soudaineté des troubles ayant conduit aux urgences. Ainsi, ces patients ont entrepris moins fréquemment de démarches avant le recours aux urgences, ils sont moins souvent adressés par un médecin libéral et sont plus fréquemment transportés par les pompiers ou le service mobile d’urgence et de réanimation (SMUR).Enfin, 3 % des patients âgés majoritai-rement hospitalisés (groupe 5) étaient déjà pris en charge dans un établis-sement de santé avant le recours aux urgences. Parmi eux, les deux tiers viennent d’un autre hôpital. Par ailleurs, un quart vient d’une unité de soins de suite et réadaptation (SSR), un quart d’une unité de soins de longue durée (USLD) et la moitié des services de mé-decine et chirurgie. La moitié d’entre eux résident habituellement en institution.

9. Les résultats qui suivent sont pré-sentés toutes choses égales par ailleurs (encadré et tableau complémentaire B sur le site internet de la DREES).10. La catégorie « symptômes » regroupe les symp-tômes, signes et résultats anormaux d’examens cliniques et de laboratoire, non classés ailleurs.11. La gravité est approchée par un indice construit en regroupant les dia-gnostics codés dans l’enquête selon deux critères : leur sévé-rité estimée à dires d’experts (SFMU) et la proportion des patients en soins intensifs ou en réani-mation selon chaque diagnostic (étude réalisée à partir du PMSI) [Ricroch, Vuagnat, 2017].12. Pour plus de détails, voir Etudes et Résultats n° 1008.13. Une classifi-cation ascendante hiérarchique a été mise en œuvre pour obtenir cette typo-logie des personnes âgées.

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TABLEAU 2Huit profils de patients âgés pris en charge aux urgences

Modalité de regroupement principalePatients majoritairement hospitalisés

à l’issue du passage aux urgencesPatients non hospitalisés à l’issue

du passage aux urgences

Ensemble des

patients

Modalité de regroupement secondaire Pathologies des patients

Prove-nance

des patients

Patholo-gie des patients

Provenance des patients

Groupes de patients

Groupe 1 Groupe 2 Groupe 3 Groupe 4 Groupe 5 Groupe 6 Groupe 7 Groupe 8

symp-tômes divers

affections cardiaques

affections respira-toires

affections neurolo-giques

provenant d’un éta-

blissement de santé

lésions sans

gravité

provenant d’un

EHPAD

provenant de la voie publique

Répartition des patients 39 % 11 % 6 % 4 % 3 % 28 % 4 % 5 % 100 %

Variables actives dans l’analyse de données

Mode d’arrivée

propres moyens ou véhicule d’un tiers

19 28 22 25 13 62 3 17 32

ambulance taxi 57 51 54 43 75 26 80 9 46

pompiers ou SMUR 24 22 24 32 13 13 17 74 23

Provenance

domicile 89 90 84 88 0 97 13 0 81

EHPAD 11 10 16 10 0 3 86 0 11

établissement de santé 0 0 0 0 100 0 0 0 3

voie publique 0 0 0 2 0 0 1 100 5

Prise en charge

3 types d’examens médicaux 66 79 88 83 44 9 34 34 50

UHCD 27 21 26 23 13 3 11 13 18

Diagnostic à la sortie

symptômes 49 0 0 0 25 14 30 24 26

lésions traumatiques 16 0 0 0 26 47 46 62 25

pathologies cardiaques 0 100 0 0 13 1 1 5 12

pathologies respiratoires 0 0 100 0 8 0 3 0 6

pathologies neurologiques 0 0 0 100 6 0 2 1 5

pathologies digestives et du métabolisme

16 0 0 0 7 5 4 1 8

autres 20 0 0 0 15 33 13 7 19

Diagnostic associé

1 ou plus 33 39 43 24 28 14 18 24 27

Indice de gravité

0 ou 1 51 2 5 7 45 77 70 67 50

2 et plus 49 98 95 93 55 23 30 33 50

Durée du passage

inférieure à 3 h 12 19 16 17 36 62 37 47 30

de 3 h à 8 h 56 57 52 47 47 33 48 41 48

8 h et plus 33 25 32 36 17 5 15 12 22

Modalité de sortie

retour à domicile ou en EHPA ou EHPAD

22 17 18 14 29 87 100 71 44

hospitalisation 78 83 82 86 71 14 0 29 56

Des variables supplémentaires illustratives (tranche d’âge, motif de recours, mode de vie, etc.) sont présentées dans le tableau complémentaire C sur le site internet de la DREES. Toutes les modalités sont significatives au seuil de 5 %. Les chiffres en gras correspondent aux modalités dont la proportion est supérieure à celle de l’ensemble des patients.Les groupes 1, 2, 3, 4 et 6 ont comme proximité principale une pathologie précise alors que les groupes 5, 7 et 8 ont comme proximité principale leur provenance avant leur arrivée aux urgences : un établissement de santé, un EHPAD ou la voie publique. Cela n’empêche pas les patients des premiers groupes de provenir d’un établissement de santé, d’un EHPA, d’un EHPAD ou de la voie publique. De la même façon, parmi les patients des groupes 5, 7 et 8, certains souffrent également de pathologies cardiaques, respiratoires ou neurologiques.La classification a été construite en excluant certaines modalités rares et non-réponses. Pour cette raison les résultats de l’ensemble des patients de la classification peuvent différer légèrement de l’ensemble des patients âgés.Lecture • 19 % des patients du groupe 1 sont arrivés aux urgences par leurs propres moyens ou accompagnés par un tiers contre 32 % en moyenne sur l’ensemble des personnes âgées de 75 ans ou plus. De plus, les patients du groupe 1 sont significativement différents de la moyenne des patients âgés sur les modalités de la variable mode d’arrivée (valeur test inférieure à 5 %). Ils sont significativement plus pris en charge par une ambulance ou un taxi par exemple.Champ • Patients âgés de 75 ans ou plus pris en compte dans la classification.Source • DREES, enquête nationale sur les structures des urgences hospitalières, juin 2013.

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POUR EN SAVOIR PLUS• Boisguérin B., Mauro L., 2017, « Les personnes âgées aux urgences : une santé plus fragile nécessitant une prise en charge plus longue », Études et Résultats, DREES,

n° 1008.• Boisguérin B., Valdelièvre H., 2014, « Urgences : la moitié des patients restent moins de deux heures, hormis ceux maintenus en observation », Études et Résultats,

DREES, n°889, juillet.• Cour des comptes, 2012, « La prise en charge des personnes âgées dans le système de soins : des progrès trop lents » dans Le rapport public annuel 2012, février.• Haute Autorité de santé, 2015, « Prendre en charge une personne âgée poly pathologique en soins primaires » dans Note méthodologique et de synthèse documen-

taire, mars.• Maire A., 2013, « Pertinence des hospitalisations via le service des urgences chez les patients de plus de 75 ans », Thèse de médecine générale, Université Paris

Diderot – Paris 7.• Ricroch L., Vuagnat A., 2017, « Les hospitalisations après passage aux urgences moins nombreuses dans le secteur privé », Études et Résultats, DREES, n° 997, février.• Ricroch L., 2016, « Trouver un lit après les urgences : une tâche plus facile pour les petits établissements hospitaliers », Études et Résultats, DREES, n°973, septembre.• Ricroch L., Vuagnat A., 2015, « Urgences : sept patients sur dix attendent moins d’une heure avant le début des soins », Études et Résultats, DREES, n°929, août.• Ricroch L., 2015, « Urgences hospitalières en 2013 : des organisations différentes selon le niveau d’activité », Études et Résultats, DREES, n°906, mars. • Sirven N., 2016 « Vieillissement, fragilité et dépenses de santé », Questions d’économie de la santé, n°216, mai, IRDES.• Société française de médecine d’urgence, 2003, « Prise en charge de la personne âgée de plus de 75 ans aux urgences », 10e Conférence de consensus, décembre.

Plusieurs situations pourraient expliquer le passage aux urgences de ces patients préalablement hospitalisés : le besoin du plateau technique ou du médecin spécia-lisé d’un autre établissement ; une chute dans le cas des patients provenant d’USLD ou de SSR, par exemple. Les affections de ces patients sont hétéroclites (pathologies et degrés de gravité divers). À la suite de leur passage aux urgences, 71 % sont ré- hospitalisés, 29 % retournent à domicile ou en EHPAD. Leur séjour aux urgences est assez court, certainement parce que la raison de leur passage est circons-c r i t e , l eu r doss ie r méd ica l a é té préalablement transmis aux équipes soignantes et leur modalité de sortie est le plus souvent prévue. D’ailleurs,

ils sont relativement moins nombreux à bénéficier d’examens complémentaires, ces derniers ayant peut-être déjà été réalisés, mais plus nombreux à bénéficier d’un avis spécialisé.

La majorité des patients âgés qui rentrent chez eux à l’issue des urgences présentaient des lésions traumatiques peu sévèresLes trois derniers groupes de patients âgés rassemblent les passages ma-joritairement suivis par un retour à domicile ou en EHPAD. Ces patients souffrent en majorité de traumatismes peu graves : plaies et contusions ou fractures. Ils nécessitent moins d’exa-

mens, sont rarement hospitalisés en UHCD et la durée de leur passage est relativement courte. Leur provenance d i f férencie ces pat ients : ceux qui viennent de leur domicile sont davan-tage venus par leurs propres moyens, ceux qui viennent principalement d’un EHPAD sont transportés en ambulance ou taxi et ceux qui arrivent de la voie publique sont en majorité transportés par les pompiers ou le SMUR. Les pa-tients venant de la voie publique ou de leur domicile sont plus jeunes et vivent plus souvent seuls à leur domicile que les autres. Moins de la moitié avaient fait une démarche avant de se rendre aux urgences. Les patients provenant d’un EHPAD sont plus âgés.

Page 7: La prise en charge des personnes âgées aux urgences

Le temps de passage aux urgences est plus long pour les personnes âgées : sa durée médiane est de 4 heures pour les patients âgés de 75 ans ou plus, contre 2 heures et 10 minutes pour les 15-74 ans, en excluant les patients ayant séjourné en unité d’hospitalisation de courte durée. En prenant en compte ces derniers, la durée médiane s’allonge, de façon plus marquée pour les patients âgés. Elle est de 4 heures et 30 minutes, contre 2 heures et 20 minutes pour les patients plus jeunes.

Le nombre d’examens complémentaires, plus important pour les patients âgés, et les délais nécessaires à leur réalisation contribuent à augmenter la durée de passage aux urgences. À cela s’ajoutent les modalités d’hospitalisation éventuelle en aval des urgences : le délai pour obtenir un lit est plus important pour les personnes âgées.

En cas de retour à domicile, des durées de passage plus longues pour les personnes âgées sont constatées dans les points d’accueil ayant des ressources en gériatrie, en lien avec des prises en charge plus adaptées dans ces points d’accueil.

Cette étude, centrée sur les durées de passage aux urgences des personnes âgées, complète l’Études et Résultats n° 1007 « Les personnes âgées aux urgences : une patientèle au profil particulier ».

L es patients âgés de 75 ans ou plus constituent une patientèle pa r t i cu l i è r e des se r v i ces

d’urgences à plusieurs titres. La fragilité, la dépendance et les polypathologies, plus fréquentes parmi ces patients, justifient une prise en charge plus complexe que pour les autres patients et entraînent des durées de passage plus longues. L’enquête nationale sur les structures d’urgences hospitalières menée par la DREES le 11 juin 2013 (encadré 1) permet de déterminer les causes de ces durées de passage plus longues des patients âgés, selon la nature des prises en charge.

Des passages plus longs quand ils sont suivis d’une hospitalisation dans un autre service Les durées de passage des patients âgés sont plus longues que celles des autres adultes. La durée médiane de passage est ainsi de 4 heures et 30 minutes pour les premiers, contre 2 heures et 20 minutes pour les seconds. Environ 40 % des 15-74 ans restent moins de deux heures contre seulement un cinquième des 75 ans ou plus (graphique 1). Ces derniers sont plus nombreux à passer plus de 8 heures aux ur-gences : 23 % contre 10 % chez les 15-74 ans. En prenant en compte les conditions d’arrivée aux urgences, les pathologies, le contenu de la prise en charge, le séjour

Les personnes âgées aux urgences : une santé plus fragile nécessitant une prise en charge plus longue

Bénédicte Boisguérin et Léa Mauro (DREES)

m a r s

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Page 8: La prise en charge des personnes âgées aux urgences

2

Les personnes âgées aux urgences : une santé plus fragile nécessitant une prise en charge plus longue

mars

2 0 1 7n u m é r o 10 0 8

en unité d’hospitalisation de courte durée (UHCD)1, les modalités de sortie – hospi-talisation ou retour à domicile – ainsi que les caractéristiques du point d’accueil (en-cadré 1), le risque d’une durée de passage de 8 heures ou plus est plus élevé pour les patients âgés (tableau 1)2. Ceci est à relier au fait que les patients âgés sont davantage hospitalisés que les autres adultes (56 % contre 17 % des 15-74 ans). Or, quel que soit l’âge des patients, les durées de passages les plus longues sont celles des patients hospitali-sés à l’issue des urgences (durée médiane de 5 heures et 10 minutes versus 2 heures et 10 minutes). Toutefois, en cas d’hospi-talisation, la proportion de passages de 8 heures ou plus chez les patients âgés est comparable à celle des 15-74 ans : 30 % contre 27 %. Toutes choses égales par ailleurs, y compris le recours ou non à l’UHCD, cet écart n’est pas significatif. Parmi les patients non hospitalisés, on observe au contraire un écart important : 15 % des 75 ans ou plus restent 8 heures ou plus contre 6 % des 15-74 ans et toutes choses égales par ailleurs, le risque d’une durée de passage plus longue est plus élevé pour les patients âgés.

Les séjours en UHCD et l’importance des examens complémentaires sont associés à des durées de passage élevéesOutre l’issue du passage aux urgences, d’autres facteurs contribuent à expliquer les durées de passage élevées aux ur-gences. Pour tous les âges, les passages les plus longs sont fortement liés aux sé-jours en UHCD, que les patients rentrent à domicile ou qu’ils soient hospitalisés3 dans un autre service (graphique 2). Or, près d’une personne âgée sur cinq a séjourné dans une UHCD pendant son passage aux urgences, contre environ une personne sur treize pour les 15-74 ans.L’UHCD fait partie intégrante du service d’urgence, elle est destinée à hospitaliser des patients pour une durée limitée. Elle permet la mise en observation avant orien-tation (retour à domicile ou hospitalisation), la réalisation d’examens pour préciser le diagnostic, ou de soins de courte durée (in-toxications alimentaires, crises d’asthmes, par exemple).

1. L’article D.712-56 du Code de la santé

publique prévoit que les services des urgences disposent

d’une zone de surveil-lance de très courte

durée par tranche de 10 000 passages

annuels. Les zones de sur-

veillance sont donc obligatoires, avec des capacités clairement

définies.2. Les résultats

détaillés de la régression logistique

sont disponibles dans le tableau complé-

mentaire A sur le site internet de la

DREES.3. Il faut distinguer

l’hospitalisation en UHCD, qui fait partie du passage

aux urgences, et l’hospitalisation dans

un service d’aval aux urgences, qui est une

modalité de sortie des urgences de

même que le retour à domicile ou en

institution. L’hospi-talisation en UHCD

peut être suivie ou non d’une hospitali-sation dans un autre

service.

ENCADRÉ 1 Sources, champ, méthodologie

Le protocole d’enquêteLes analyses de cette étude utilisent l’enquête nationale sur les structures des urgences de juin 2013, réalisée par la DREES. Conçue en partenariat avec la Société française de médecine d’urgence (SFMU), et en collaboration avec SAMU-Urgences de France (SUDF) et l’Association des médecins urgentistes de France (AMUF), l’enquête a été réalisée un jour donné – le mardi 11 juin 2013, de 8 heures le matin au lendemain 8 heures – auprès des 736 points d’accueil d’ur-gences présents sur le territoire.

L’enquête comporte deux volets complémentaires : un recueil administratif sur les structures d’urgences hospitalières décrivant leur organisation et une enquête auprès des patients détail-lant leur prise en charge. La présentation de la méthodologie détaillée de l’enquête et les don-nées agrégées sont accessibles sur le site Internet de la DREES1.

La base finale de l’enquête comprend 734 points d’accueil sur les 736 recensés, soit un taux de réponse de 99,7 %. La collecte a fourni 48 711 questionnaires patients sur les 52 018 passages enregistrés aux urgences durant la journée, soit un taux de réponse de 93,6 %. Des traitements statistiques ont été effectués par la DREES pour corriger la non réponse totale à l’enquête, la non réponse partielle à certaines questions ainsi que des anomalies ou des valeurs aberrantes.

Le champ de l’étudeLe champ de l’étude porte sur tous les patients âgés de 75 ans ou plus s’étant présentés le jour de l’enquête dans un des points d’accueil recensés, hors points d’accueil pédiatriques. Au total, la collecte a permis d’obtenir près de 6 000 questionnaires de patients de 75 ans ou plus, soit 12 % des passages et 17 % des passages de patients de 15 ans ou plus. Dans les modèles, les patients sans abri, logés à l’hôtel ou autres ne sont pas pris en compte. Les 0,3 % de patients âgés qui retournent chez eux avec une hospitalisation à domicile ne sont pas considérés comme hospitalisés à la sortie des urgences.

Modélisation de l’hospitalisation, des passages de plus de 8 heures et des passages en UHCDL’analyse de l’hospitalisation, des passages de plus de 8 heures et des passages en UHCD se fonde sur des régressions logistiques. Les variables prises en compte sont les conditions d’ar-rivée aux urgences (le créneau d’arrivée, la provenance, le moyen de transport), le contenu de la prise en charge (examens complémentaires, radiologie, biologie, acte type ECG, séjour en UHCD), la pathologie (diagnostic posé à la sortie, degré de gravité, existence d’une patholo-gie associée) et les caractéristiques du point d’accueil (catégorie de l’établissement de santé dans lequel est situé le point d’accueil, affluence mesurée en nombre de passages le jour de l’enquête, disponibilité d’imagerie non conventionnelle et ressources en gériatrie). S’y ajoutent en cas d’hospitalisation, les modalités d’hospitalisation, le type de service, l’hospitalisation sur place ou le transfert dans un autre établissement, le délai d’obtention d’une place.

Les variables explicatives mentionnées sont significatives : elles ont chacune une influence, toutes choses égales par ailleurs, quand les autres variables ne varient pas. Les modèles varient en fonction de la variable à expliquer (durée de 8 heures ou plus, passage en UHCD) et du fait que les patients sont hospitalisés ou non. Toutefois, dans les modèles concernant les patients hospitalisés, l’influence respective des deux classes d’âge (15-74 ans et 75 ans ou plus) ne per-met pas de mesurer rigoureusement un effet « pur » de l’âge. En effet, ces modèles incluent certaines variables explicatives qui sont corrélées à l’âge des patients, en particulier le passage en UHCD et la variable « délai d’obtention d’un lit supérieur à 1 heure ».

1. http://drees.social-sante.gouv.fr/etudes-et-statistiques/open-data/etablissements-de-sante-sociaux-et-medico-sociaux/article/enquete-nationale-sur-les-structures-des-urgences-hospitalieres-juin-2013

GRAPHIQUE 1 Durée de passage aux urgences en fonction de l’âge

Champ • Patients âgés de 15 ans ou plus y compris les patients ayant séjourné en UHCD.Source • DREES, enquête nationale sur les structures des urgences hospitalières, juin 2013.

Moins de 2 h

4350

40

30

20

10

0

17

29

18

10

26

34

23

Proportion de patients en %

Durée de passage

Entre 2 h et 4 h Entre 4 h et 8 h Plus de 8 h

75 ans ou plus15-74 ans

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Les personnes âgées aux urgences : une santé plus fragile nécessitant une prise en charge plus longue

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Elle peut également être utilisée comme zone d’attente d’un lit en cas d’hospitali-sation conventionnelle. En prenant en compte les conditions d’ar-rivée aux urgences, les pathologies, le contenu de la prise en charge et les carac-téristiques du point d’accueil, les patients âgés ont plus de chances de séjourner en UHCD que les 15-74 ans quand leur passage n’est pas suivi par une hospita-lisation dans un autre service (tableau 1). À l’inverse, ils ont relativement moins de chances que les autres adultes d’y séjour-ner avant d’être hospitalisés dans un autre service, bien que les proportions de séjours en UHCD soient identiques pour les deux tranches d’âge dans ce cas-là4. Ce résultat est à relier aux conditions d’hospitalisation des personnes âgées. La modélisation indique que, pour tous les âges, le fait d’attendre longtemps un lit augmente les chances de séjourner en UHCD. Le recours accru à l’UHCD pour les personnes âgées avant leur hospitalisation serait donc surtout la conséquence d’une attente plus longue pour obtenir un lit. Mais lorsque l’on tient compte de cette dif-ficulté propre aux personnes âgées, leurs chances de séjourner en UHCD sont plu-tôt plus faibles que celles des 15-74 ans. Ce résultat suggère une utilisation de ces unités, et plus généralement des parcours intrahospitaliers, différents selon les âges de la vie.En tenant compte des autres facteurs susceptibles d’influencer ces délais (en-cadré 1), le séjour en UHCD constitue le facteur principal d’une durée plus élevée pour les personnes âgées (tableau 2). Le nombre d’examens complémentaires réali-sés allonge également la durée de passage aux urgences, en lien avec les délais né-cessaires à leur réalisation5 et les patients nécessitant plusieurs recours au plateau technique séjournent plus fréquemment en UHCD. Par ailleurs, les points d’ac-cueil où l’affluence est la plus importante ont enregistré davantage de passages de 8 heures ou plus le jour de l’enquête et leurs patients ont également plus fréquem-ment séjourné en UHCD. Parmi les autres facteurs influençant la durée de passage aux urgences des per-sonnes âgées ou leur séjour en UHCD, certains jouent plus particulièrement en cas d’hospitalisation dans un autre service,

4. Les résultats détaillés de la régression logistique sont disponibles dans le tableau complé-mentaire C sur le site internet de la DREES.5. L’imagerie non conventionnelle par exemple prend du temps et les patients des urgences n’ont pas toujours un accès prioritaire : d’après l’enquête, il n’y a pas d’imagerie par résonance magné-tique (IRM) sur le site dans lequel est implanté le service d’urgence pour 22 % des patients, un accès à l’IRM existe mais sans priorité pour les urgences pour 26 %, un accès à l’IRM avec priorité pour les urgences pour 52 %.

GRAPHIQUE 2 Durée médiane de passage aux urgences, selon la modalité de sortie et le séjour en UHCD

Champ • Patients âgés de 15 ans ou plusSource • DREES, enquête nationale sur les structures des urgences hospitalières, juin 2013.

TABLEAU 1 Hospitalisation dans un autre service à l'issue du passage aux urgences, durée de passage aux urgences de 8 heures et plus et séjour en UHCD, selon l'âge des patients

Types de parcours

Proportion de patients

de 15-74 ans (en %)

Proportion de patients de 75 ans ou plus (en %)

Odds ratio ajustés 75 ans ou plus

vs 15-74 ans (réf.)

Hospitalisation dans un autre service à la suite des urgences

17 56 2,6**

Passage aux urgences de 8 heures ou plus

tous patients 10 23 1,2**

suivi d’un retour à domicile ou en institution

6 15 1,4**

suivi d’une hospitalisation dans un autre service

27 30 ns

Séjour en UHCD pendant le passage aux urgences

tous patients 8 18 ns

suivi d’un retour à domicile ou en institution

5 12 1,2*

suivi d’une hospitalisation dans un autre service

24 24 0,8**

UHCD : unité d'hospitalisation de courte durée.** : significativité à 1 %, * à 5 %, ns : coefficient non significatif.Lecture • Chaque ligne du tableau présente les résultats d’un modèle de régression logistique qui mobilise à chaque fois d’autres variables explicatives non mentionnées ici. Le détail de chacun de ces sept modèles est disponible sur le site internet de la DREES.Pour le premier modèle, 17 % des patients âgés de 15 à 74 ans sont hospitalisés à la suite de leur passage aux urgences contre 56 % des patients âgés de 75 ans ou plus. L'odds ratio ajusté permet d'évaluer le degré d'association entre l´âge (avoir plus ou moins de 75 ans) et le fait d'être hospitalisé ou non, et donc la significativité statistique de l´écart. L'odds ratio estimé (2,6) est significatif à 1 %. Ainsi, toutes choses égales par ailleurs, on peut dire que le fait d'être hospitalisé dans un autre service est plus fréquent pour les personnes âgées que pour les patients âgés de 15 à 74 ans. Les résultats détaillés de la régression logistique sont disponibles dans le tableau complémentaire B sur le site internet de la DREES.Champ • Patients âgés de 15 ans ou plus y compris les patients ayant séjourné en UHCD.Source • DREES, enquête nationale sur les structures des urgences hospitalières, juin 2013.

Retour à domicile sans séjour en UHCD

Durée médiane de passage en heures

Hospitalisation sans séjour en UHCD

15-74 ans25

20

15

10

5

0

75 ans ou plus

Retour à domicile après séjour en

UHCD

Hospitalisation après séjour en

UHCD

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4

Les personnes âgées aux urgences : une santé plus fragile nécessitant une prise en charge plus longue

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2 0 1 7n u m é r o 10 0 8

TABLEAU 2 Probabilité de durée de passage aux urgences de 8 heures et plus et de séjour en UHCD des patients âgés de 75 ans ou plus

A. pour les patients hospitalisés dans un autre service à l'issue du passage aux urgences

B. pour les patients non hospitalisés dans un autre service à l'issue du passage aux urgences

Durée de passage

8 h et plus

Séjour en UHCD

Odds ratio Odds ratioAvec ou sans séjour en UHCD

séjour en UHCD 27,0***

sans séjour en UHCD référence

Pathologies

pathologies digestives et endocriniennes 3,2*** ns

pathologies autres 3,2*** ns

symptômes 2,2*** ns

pathologies respiratoires 2,2*** ns

pathologies cardiaques 1,7** 0,7*

pathologies neurologiques ns 0,6*

traumatologie référence référence

Contenu de la prise en charge

pas d’imagerie non conventionnelle 0,5*** ns

imagerie non conventionnelle référence référence

sans autre acte diagnostic type ECG ns 0,5***

autre acte diagnostic type ECG référence référence

Modalités d’hospitalisation

hospitalisé en chirurgie ns 0,3***

hospitalisé en soins intensifs ou bloc opératoire

0,6** 0,5***

hospitalisé en médecine référence référence

hospitalisé dans l’établissement ns 0,6***

transféré dans un autre établissement référence référence

délai d’obtention d’une place d’hospitalisation inférieur à 1h

0,4*** 0,4***

délai d’obtention d’une place d’hospitalisation d’une heure ou plus

référence référence

Caractéristiques du point d’accueil

CHR 1,8*** ns

clinique privée à but non lucratif ns 3,0***

clinique privée à but lucratif 0,5** 3,1***

CH référence référence

nombre de passages < 40 0,4** 0,5**

nombre de passages 40-79 0,5*** 0,8*

nombre de passages 80-119 0,8* ns

nombre de passages 120 et plus référence référence

pas de personnel dédié à l’inventaire des lits

0,7** 1,3*

personnel dédié à l’inventaire des lits référence référence

*** : significativité à 1 % ; ** à 5 % ; * à 10 % ; ns : coefficient non significatif.CH : centre hospitalier ; CHR : centre hospitalier régional ; ECG : électrocardiogramme ; EHPA : établissement d'hébergement pour personnes âgées ; ETP : équivalent temps plein ; UCHD : unité d'hospitalisation de courte durée.Champ • Patients âgés de 75 ans ou plus, A. hospitalisés à l'issue du passage aux urgences, B. non hospitalisés à l'issue du passage aux urgences.Source • DREES, enquête nationale sur les structures des urgences hospitalières, juin 2013.

Durée de passage de 8 h et plus

Séjour en UHCD

Odds ratio Odds ratioAvec ou sans séjour en UHCD

séjour en UHCD 41,7***

sans séjour en UHCD référence

Conditions d’arrivée aux urgences

transporté par le SMUR 0,2** 1,9*

propres moyens 0,5** 0,5**

véhicule d’un tiers ns 0,6**

transporté en ambulance taxi référence référence

enregistrement avant 16 h 0,6*** 0,4***

enregistrement après 16 h référence référence

provenant d’un établissement de santé ns 0,3*

provenant de la voie publique 0,3*** ns

provenant d’une institution (EHPA) référence référence

Mode de vie

seul à domicile 0,5***

non seul à domicile ou en institution référence

Pathologies

pathologies digestives et endocriniennes 2,1** ns

pathologies respiratoires 3,9*** ns

symptômes ns 0,6*

traumatologie référence référence

Contenu de la prise en charge

pas d’imagerie non conventionnelle 0,6*** 0,5***

imagerie non conventionnelle référence référence

pas d’analyse de biologie 0,4*** 0,1***

analyse de biologie référence référence

pas d’acte diagnostic de type ECG 0,7* 0,5***

acte diagnostic de type ECG référence référence

pas d’avis spécialisé 0,7** 0,7**

avis spécialisé référence référence

Caractéristiques du point d’accueil

CHR 1,6** ns

clinique privée à but non lucratif 3,0*** ns

clinique privée à but lucratif ns ns

CH référence référence

nombre de passages < 40 0,2*** ns

nombre de passages 40-79 0,5*** ns

nombre de passages 80-119 ns 1,4*

nombre de passages 120 et plus référence référence

équipe mobile gériatrique 4,4*** 0,5*

gériatre de l’équipe des urgences 2,7* 0,3**

appel d’un gériatre de l’établissement 2,3* 0,6*

sans gériatre ni appel référence référence

assistant de service social plus d’un ETP 1,5** 0,7**

assistant de service social moins d’un ETP

référence référence

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Les personnes âgées aux urgences : une santé plus fragile nécessitant une prise en charge plus longue

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2 0 1 7n u m é r o 10 0 8

alors que d’autres facteurs interviennent plus spécifiquement en cas de retour à do-micile ou en établissement d’hébergement pour personnes âgées.

La durée des passages et les séjours en UHCD sont liés aux conditions d’hospitalisation à l’issue des urgencesLes durées de passage supérieures à 8 heures sont plus fréquentes pour les pa-tients atteints de pathologies respiratoires, cardiaques, digestives ou de symptômes que pour ceux souffrant de traumatismes. Il est probable que la décision d’hospitali-sation est plus rapide à prendre pour ces derniers si une intervention chirurgicale est indiquée. Dans ce cas, la filière d’hospita-lisation est unique, vers l’orthopédie, alors que pour les autres pathologies, il s’agit de choisir entre une hospitalisation en géria-trie ou en service spécialisé (pneumologie, cardiologie ou médecine digestive), en fonction des disponibilités.Le service d’hospitalisation destinataire a également une influence : le passage s’allonge et comporte plus fréquemment un séjour en UHCD s’il s’agit d’une hos-pitalisation en service de médecine plutôt qu’en service de chirurgie ou en soins intensifs. De même, le délai d’obtention d’un lit augmente mécaniquement la du-rée de passage et les séjours en UHCD. Enfin, la proportion de passages dépassant 8 heures est plus élevée dans les centres hospitaliers (CH) et les centres hospitaliers régionaux (CHR) que dans les cliniques privées à but lucratif6. En revanche, les séjours en UHCD sont plus répandus en clinique privée à but lucratif ou à but non lucratif.

En cas de retour à domicile, la possibilité de recourir à un gériatre va de pair avec des durées de passage plus longues, mais un moindre recours à l’UHCDPour les patients qui rentreront à domicile ou en institution après les urgences, les durées de passage dépassant 8 heures sont également plus fréquentes en cas de pathologies respiratoires ou digestives que pour les traumatismes. Parmi les re-cours au plateau technique, les analyses

6. Toutes choses égales par ailleurs,

il est plus difficile d’obtenir une place

dans les CHR que dans les autres éta-

blissements publics. À l’inverse les établis-

sements privés, à but lucratif ou non, trouvent plus direc-

tement des places pour leurs patients,

(Ricroch, 2016).

ENCADRÉ 2 Quelle organisation des points d’accueil des urgences pour les patients âgés ?

Un point d’accueil sur quatre est situé dans un établissement de santé comportant un accès direct (sans passer par les urgences) aux services de gériatrie organisé, un sur quatre l’est dans un établissement où cet accueil est épisodique. Pour la moitié des points d’accueil, l’établissement de santé est donc dépourvu d’accès direct en service de gériatrie.

Les ressources en gériatrie sont plus fréquentes dans les points d’accueil situés en établissement de santé public63 % des points d’accueil sont situés dans un établissement comportant un ser-vice spécialisé de gériatrie, dont 50 % ont moins de 40 lits. C’est le cas de 76 % des points d’accueil publics, de la moitié des points d’accueil de cliniques pri-vées à but non lucratif et 10 % seulement des cliniques privées à but lucratif. Que les points d’accueil soient situés ou non dans un établissement avec un service spé-cialisé de gériatrie, les équipes ont souvent la possibilité de recourir à un gériatre. Trois si-tuations peuvent être distinguées. La situation la plus répandue est la possibilité de faire appel à un gériatre, soit par le recours à une équipe mobile gériatrique1 pour la moitié des points d’accueils soit par l’appel à un gériatre de l’établissement pour un tiers d’entre eux. Au total, cette première situation concerne huit points d’accueil sur dix (neuf sur dix pour les points d’accueil publics et cinq sur dix pour les cliniques privées à but lucratif). La deuxième situation, minoritaire, est celle où l’équipe des urgences comporte un gé-riatre à la journée (3 % des points d’accueil). Enfin la dernière situation regroupe les 17 % des points d’accueil qui n’ont ni gériatre dans leur équipe ni possibilité d’y faire appel. Dans la majorité des cas, la possibilité de faire appel à un gériatre est associée à l’existence d’un service spécialisé de gériatrie dans l’établissement. Inversement, les points d’accueil sans possibilité d’y faire appel sont situés dans un établissement sans service spécialisé de gériatrie (schéma). Parmi les 63 % de points d’accueil situés dans un établissement de santé avec un service de gériatrie, l’équipe des urgences a la possibilité de faire appel à l’équipe mobile gériatrique dans deux tiers des cas, à un gériatre de l’établissement dans un tiers des cas.

La part de patients âgés dans la patientèle des urgences varie selon l’envi-ronnement, la catégorie d’établissement et l’organisation des points d’accueilLa proportion de personnes âgées est en moyenne plus élevée dans les points d’accueil situés en centre hospitalier (20 % des 15 ans ou plus) que dans les CHR (17 %), les cliniques privées à but non lucratif (15 %) ou à but lucratif (14 %). Elle est plus importante dans les points d’accueil disposant de ressources ou de compétences en gériatrie. Ainsi, les per-sonnes âgées représentent 19 % des patients de 15 ans ou plus dans les points d'accueil d'établissements dotés d'un service spécialisé de gériatrie contre 16 % si l’établissement n’en a pas. Elle est également plus élevée dans les points d'accueil dont l’équipe comporte un gériatre, faisant appel à une équipe mobile gériatrique (19 %) ou à un gériatre de l’éta-blissement (18 %) que dans les points d’accueil sans gériatre ni possibilité d’appel (15 %). Ces situations peuvent résulter soit d’une orientation préférentielle des patients, soit d’une adaptation des points d’accueil recevant une proportion élevée de personnes âgées.

1.Circulaire DHOS du 28 mars 2007, « il est recommandé que l’équipe mobile gériatrique intervienne dans la structure des urgences dès l’entrée d’un patient à risque de perte d’autonomie et d’hospitalisation prolongée ».

Ressources en gériatrie des points d’accueil des structures d’urgences ayant une autorisation d’urgences générales

[Part des patients de 75 ans ou plus / patients âgés de 15 ans ou plus]Lecture • 235 points d’accueil, soit 37 % des points d’accueil des structures ayant une autorisation d’urgences générales sont situés dans un établissement de santé sans service spécialisé de gériatrie. Dans ces points d’accueil, les patients âgés de 75 ans ou plus représentent 16 % des patients âgés de 15 ans ou plus.Champ • Points d’accueil des structures d’urgences ayant une autorisation d’urgences générales.Source • DREES, enquête nationale sur les structures des urgences hospitalières, juin 2013.

Pas de service spécialisé de gériatrie dans l'établissement

N=235 points d’accueil (37 %) [+75 ans=16 %]

Service spécialisé de gériatrie dans l'établissement

N=393 points d’accueil (63 %) [+75 ans =19  %]

Possibilité d´appel à l´équipe mobile ou à un gériatre de l'établissement ou gériatre dans l´équipe des urgences

N =136 points d’accueil (22 %) [+75 ans =17 %]

Possibilité d´appel à l´équipe mobile ou à un gériatre de l´établissement ou gériatre dans l´équipe des urgences

N=388 points d’accueil (62 %) [+75 ans =19  %]

Pas d'appel possible ni de gériatre dans l´équipe N=99 points d’accueil (16 %) [+75 ans =15 %]

Pas d´appel possible ni de gériatre dans l´équipe N=5 points d’accueil (1 %)

Page 12: La prise en charge des personnes âgées aux urgences

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Les personnes âgées aux urgences : une santé plus fragile nécessitant une prise en charge plus longue

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POUR EN SAVOIR PLUS• Boisguérin B., Mauro L., 2016, « Les personnes âgées aux urgences : une patientèle au profil particulier », Études et Résultats, DREES, n° 1007.• Ricroch L., Vuagnat A., 2017, « Les hospitalisations après passage aux urgences moins nombreuses dans le secteur privé », Études et Résultats, DREES, n° 997, février.• Ricroch L., 2016, « Trouver un lit après les urgences : une tâche plus facile pour les petits établissements hospitaliers », Études et Résultats, DREES, n°973, septembre.• Ricroch L., Vuagnat A., 2015, « Urgences : sept patients sur dix attendent moins d’une heure avant le début des soins », Études et Résultats, DREES, n°929, août.• Pericaud P., 2009, « Évaluation des solutions à l’engorgement des urgences en France et à l’étranger », Thèse de médecine générale, Université Paris Descartes, Paris V.

7. Il s’agit des res-sources en gériatrie du point d’accueil. L’enquête ne permet pas de savoir si pour un patient précis il a été fait appel à ces ressources (encadré 2).8. Quand cela est possible, l’admission directe en circuits courts gériatriques, sans passage par les urgences, est même à privilégier pour éviter les risques liés au grand âge. Dans les autres cas, les équipes mobiles gériatriques des urgences servent également à aider à l’admission dans une telle structure si nécessaire et à fluidifier le parcours du patient en évitant une hospitalisation inadaptée, d’après la circulaire DHOS/02 no 2007-117 du 28 mars 2007 relative à la filière de soins gériatriques.

biologiques et l’attente des résultats ral-longent nettement la durée de passage et rendent plus fréquent le séjour en UHCD. Par ailleurs, les ressources en gériatrie dont disposent les points d’accueil sont également liées à la durée de passage et au séjour en UHCD. La possibilité7 de recourir à un gériatre de l’établissement ou de l’équipe des urgences et plus en-core s’il s’agit d’une équipe mobile géria-trique est associée à une durée de prise en charge aux urgences plus importante.

« L’interven tion gériatrique ne diminue pas systématiquement la durée du passage aux urgences, mais permet, à 90 jours, de diminuer le taux d’institutionnalisa tion, d’augmenter le nombre de retours à do-micile et d’amé liorer l’autonomie des pa-tients. En revanche, l’appel à une équipe mobile gériatrique prend du temps. » (Pericaud, 2009). Cependant, on ob-serve moins de séjours en UHCD quand le recours à un gériatre est possible. De même, l’existence d’un assistant de

service social dans la composition de l’équipe des urgences, particulièrement nécessaire pour organiser le retour à do-micile de certains patients âgés, va de pair avec une durée de passage plus longue et un séjour moins fréquent en UHCD. Les évaluations de ces personnels permettent probablement d’organiser l’orientation des personnes âgées en évitant des recours à l’UHCD, afin d’éviter les ruptures dans les parcours intrahospitaliers de ces patients plus fragiles8.