Comment classer un sarcome des tissus mous intra-tronculaire

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altérations du chromosome 22 (22q11-12) et plus parti-culièrement du gène ini1. L’anticorps anti-ini1 est né-gatif dans ces tumeurs.

Au total, les données de la biologie moléculaire sontle plus souvent confirmatives du diagnostic histologi-que classique mais plus rarement, elles peuvent être ca-pitales quand la morphologie et l’immunohistochimiesont prises en défaut :

— synovialosarcome indifférencié à cellules rondesmimant une tumeur, de type PNET en n’exprimant pasla kératine et l’EMA ;

— tumeur de type PNET exprimant fortement lakératine ;

— lésion ambiguë entre un rhabdomyosarcomeembryonnaire de type dense très indifférencié et unrhabdomyosarcome alvéolaire ;

— tumeur desmoplastique à l’immunophénotypeincomplet, variant morphologique rare, lésions de to-pographie inhabituelle.

Des progrès ont été également réalisés dans la recon-naissance et la classification d’autres sarcomes de l’en-fant et du sujet jeune [9-11] L’hémangiopéricytome in-fantile est intégré dans les myofibromatoses infantiles.Le fibrosarcome infantile est mieux reconnu grâce à lamise en évidence d’une translocation avec un gène defusion ETV6 NTRK3, translocation présente aussi dansles néphromes mésoblastiques rapprochant les deuxentités. Le fibroblastome à cellules géantes présente lamême translocation que le dermatofibrosarcome deDarier et Ferrand en faisant une sorte de variante juvé-nile. Le sarcome fibromyxoide de bas grade, souventprésent chez le sujet jeune et de présentation morpho-logique trompeuse pseudo-bénigne, comporte lui aussi,une translocation spécifique. L’entité « tumeur myofi-broblastique inflammatoire » est mieux reconnue chezle sujet jeune et en topographie intra-abdominale grâceau réarrangement du gène ALK. Le sarcome alvéolairedes parties molles de morphologie le plus souvent ca-ractéristique mais d’immunophénotype peu spécifiquecomporte un transcrit de fusion ASPL-TFE3 retrouvédans une variante infantile de carcinome rénal, illus-trant le fait que la translocation de transcrit ne fait pastoujours l’entité.

Conclusion

L’étape d’analyse morphologique reste primordiale etne doit pas être négligée et disparaître devant les techni-

ques complémentaires. L’étude imunohistochimiqueest ciblée mais suffisamment large pour en vérifier lacohérence. Une étude en biologie moléculaire estrecommandée à titre confirmatif chaque fois que le dia-gnostic histologique est celui d’un sarcome à transloca-tion spécifique ou chaque fois qu’il existe une incertitudediagnostique, et et que l’éventualité d’un sarcome àtranslocation spécifique ne peut être exclue. Elle devradonc être anticipée au moment de la gestion initiale desprélèvements.

Dans l’avenir, il est probable que seront recherchéeschez l’enfant des anomalies moléculaires non plus seu-lement à titre diagnostique mais aussi avec un impactpronostic ou thérapeutique.

Références

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[11] Fletcher CDM, Unni KK, Mertens F. World Health Organisa-tion classification of tumours. Pathology and genetics of tumoursof soft tissue and bone. 2002 ;

Comment classer un sarcome des tissus mous intra-tronculaire

COINDRE JM

Département de Pathologie, Institut Bergonié, Bordeaux.

Les sarcomes développés à l’intérieur du tronc re-présentent plus de 30 % de l’ensemble des sarcomes de

l’adulte. Ils peuvent être développés dans les tissusmous surtout le rétropéritoine ou dans les viscères,

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principalement le tube digestif et l’utérus. Ces sarco-mes méritent d’être isolés du fait de leurs particularitéshistologique, moléculaire et évolutive.

Trois catégories principales de sarcomes sont obser-vées : les tumeurs stromales du tube digestif ou GISTau niveau du tube digestif et de la cavité péritonéale,les liposarcomes dédifférenciés et bien différenciésdans le rétropéritoine et les léiomyosarcomes dans lerétropéritoine et l’utérus.

Les GIST [1]

Elles constituent une entité anatomo-clinique et mo-léculaire récemment isolée et représentent le sarcomedigestif le plus fréquent. Environ 900 nouveaux cassont observés par an en France. Cette tumeur survientsurtout entre 40 et 60 ans, mais est possible chez l’en-fant. Elle peut être associée à une neurofibromatose deRecklinghausen ou à une triade de Carney. Des formesfamiliales ont été rapportées. Cette tumeur se localiseprincipalement au niveau de l’estomac (50 à 70 %),puis au niveau de l’intestin grêle (20 à 30 %) et plus ra-rement au niveau du côlon, du rectum, de l’œsophage,du péritoine et du rétropéritoine.

Le diagnostic repose sur trois éléments principaux :la localisation de la tumeur, son aspect histologique etla positivité pour c-kit en immunohistochimie.

Sur le plan histologique, l’aspect est habituellementtrès évocateur avec environ 70 % des cas constitués decellules fusiformes réalisant un aspect intermédiaireentre une tumeur musculaire lisse et une tumeur desgaines des nerfs périphériques. Environ 20 % des cassont constitués de cellules épithélioïdes et s’observentsurtout au niveau de l’estomac. Les formes myxoïdes ouà cellules pléomorphes sont rares. Deux éléments histo-logiques sont rares mais caractéristiques : la présence devacuoles juxta-nucléaires et la présence de fibres ské-noïdes surtout au niveau des tumeurs de l’intestin grêle.

L’immunohistochimie est déterminante pour le dia-gnostic en montrant dans 95 % des cas une positivitépour l’anti-c-kit ou CD117. Les autres marqueurs, sou-vent positifs, sont le CD34, la caldesmone et le PKC-théta. Par contre, la desmine et la protéine S100 sonten règle générale négatives ou seulement focalement etfaiblement positives. Il convient de se souvenir qu’unepositivité pour le CD117 n’est pas spécifique d’uneGIST, et peut s’observer dans les mélanomes, carcino-mes, séminomes et certains sarcomes.

Toutes les GIST sont potentiellement malignes et ledegré de malignité dépend principalement de la taillede la tumeur et de l’index mitotique évalué sur 50champs au fort grossissement. Ces tumeurs récidiventprincipalement au niveau du rétropéritoine et donnentdes métastases hépatiques.

Les GIST constituent un modèle pour les thérapeuti-ques ciblées de par la présence de mutations activatri-ces de récepteurs à activité tyrosine kinase au niveaudes gènes KIT et PDGFRA qui s’observent dans plusde 80 % des cas. La recherche de ces mutations estobligatoire en cas de GIST négatives pour c-kit en im-munohistochimie. La réponse au Glivec dépend égale-ment du type d’exon muté : une mutation de l’exon 11

de KIT s’accompagne de plus de 90 % de bonnes ré-ponses, tandis que seulement 50 % des patients répon-dent en cas de mutation de l’exon 9 de KIT et qu’il n’ya pratiquement pas de réponse en cas de mutationd’autres exons ou lorsqu’il n’existe pas de mutation.

Les liposarcomes bien différenciés et liposarcomes dédifférenciés

Ils s’observent principalement dans le rétropéritoineoù ils représentent plus de 60 % des sarcomes del’adulte. Ils s’observent également en région paratesti-culaire et plus rarement en région intrathoracique.

Les 2/3 des cas correspondent à des liposarcomes dé-différenciés. Ces tumeurs s’observent exclusivementchez l’adulte et surtout après 40 ans. Il s’agit habituelle-ment de tumeurs volumineuses dont l’aspect en imagerieest souvent évocateur de par l’association d’une compo-sante adipeuse et d’une composante tumorale pleine.

Sur le plan histologique [2], le principal critère dediagnostic pour le liposarcome bien différencié est re-présenté par la présence de cellules à noyau hyperchro-matique atypique, cellules situées au niveau des septasfibromyxoïdes. La composante dédifférenciée d’un li-posarcome présente, sur le plan histologique, une gran-de variété avec des phénotypes immunohistochimiqueségalement variés : il s’agit le plus souvent d’un sarcomede haut grade de type histiocytofibrome malin pléo-morphe ou fibrosarcome, ou hémangiopéricytomemalin, plus rarement d’un sarcome de bas grade detype myxofibrosarcome et parfois d’un sarcome aveccomposant hétérologue de type rhabdomyosarcome,léiomyosarcome, ostéosarcome ou chondrosarcome.

Cette composante dédifférenciée peut être isolée surle prélèvement parce que prédominante ou exclusive. Ilconvient, pour affirmer le diagnostic de liposarcomedédifférencié, de mettre en évidence une composantede type liposarcome bien différencié à chercher dans lacomposante adipeuse. Le diagnostic de ce type de tu-meur est actuellement aidé de par la présence d’uneamplification des gènes MDM2 et CDK4. Cette ampli-fication peut être mise en évidence par immunohisto-chimie, par technique de FISH ou PCR quantitative.

Il convient de se souvenir qu’en région intra-troncu-laire et en particulier au niveau du rétropéritoine, lediagnostic d’histiocytofibrome malin pléomorphe [3],myxoïde ou inflammatoire, le diagnostic de rhabdo-myosarcome pléomorphe et le diagnostic de mésenchy-mome malin doivent être retenus avec beaucoup deprudence et seulement après avoir éliminé formelle-ment la possibilité d’un liposarcome dédifférencié.

Sur le plan du pronostic, le liposarcome dédifférenciérécidive localement dans plus de 50 % des cas, maisdonnent des métastases à distance dans environ 10 à20 % des cas.

Les léiomyosarcomes [1]

Ils s’observent principalement au niveau de l’utérus,du rétropéritoine et du pelvis. Nous n’envisagerons ici

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que les léiomyosarcomes des tissu mous en excluant lesléiomyosarcomes utérins.

Les 2/3 de ces sarcomes surviennent chez la femme àun âge médian de 60 ans. Ils se développent principale-ment au niveau du rétropéritoine, parfois au niveau dela paroi de la veine cave inférieure, mais également auniveau du pelvis.

Sur le plan histologique, ils présentent un aspect ha-bituellement évocateur de léiomyosarcome et le profilimmunohistochimique est tout à fait caractéristiqueavec, en règle générale, une positivité diffuse pour lesanti-actine musculaire lisse, desmine et h-caldesmone.Il est de bonne règle de réaliser chez la femme une éva-luation des récepteurs progestatifs. En cas de forte po-sitivité diffuse, il conviendra alors de retenir le diagnos-tic de tumeur musculaire lisse d’origine génitale, extra-utérine et d’appliquer les critères de malignité des tu-meurs musculaires lisses de l’utérus.

Le pronostic de ces léiomyosarcomes est mauvaisavec un potentiel métastatique supérieur à 50 % descas, tandis que les récidives locales sont plus rares.

Les autres sarcomes observés en région intra-troncu-laire sont plus rares : il peut s’agir de tumeurs malignesdes gaines des nerfs périphériques, synovialosarcomes,PNET et autres.

Conclusion

Les sarcomes de l’adulte développés en région intra-tronculaire méritent une approche diagnostique parti-

culière : les sarcomes développés au niveau du tube di-gestif ou du péritoine doivent a priori être considéréscomme de potentielles GIST et les explorations orien-tées dans ce sens étant donné les implications théra-peutiques et pronostiques actuelles ; les sarcomes durétropéritoine peu différenciés, en particulier de typehistiocytofibromes malins ou fibrosarcomes, les rhab-domyosarcomes pléomorphes et les mésenchymomesmalins, doivent a priori être considérés comme des li-posarcomes dédifférenciés. Concernant les vrais léio-myosarcomes développés dans ces régions, il convientd’éliminer systématiquement chez la femme un léio-myosarcome de nature génitale.

Cette approche diagnostique est importante étantdonné les conséquences thérapeutiques et pronostiquesdifférentes concernant ces trois catégories de tumeurs.

Références

[1] Coindre JM, Emile JF, Monges G, Ranchère-Vince D, Scoazec JY.Tumeurs stromales gastro-intestinales : définition, caractéristi-ques histologiques, immunohistochimiques et génétiques, stra-tégie diagnostique. Ann Pathol 2005 ; 25 : 358-85.

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[3] Coindre JM, Mariani O, Chibon F, Mairal A, de Saint AubainSomerhausen N et al. Most malignant fibrous histiocytomas de-veloped in the retroperitoneum are dedifferentiated liposarco-mas. A review of 25 cases initially diagnosed as malignantfibrous histiocytoma. Mod Pathol 2003 ; 16 : 256-62.

Comment classer un sarcome cutané

COLLIN F

Service d’anatomie et cytologie pathologiques, Centre Georges-François Leclerc, Dijon

Les sarcomes cutanés sont des lésions rares dans lepaysage des tumeurs malignes cutanées, dominé par lescarcinomes et les mélanomes. Leur malignité s’exprimesoit sur un mode local par des récidives (cas le plus fré-quent), soit sur un mode hautement agressif par des mé-tastases à distance. Un sarcome est dit cutané lorsqu’ilnaît dans le derme. Il peut s’étendre à l’hypoderme. Lanotion de sarcome superficiel est plus large : il s’agit detoutes les tumeurs situées au-dessus de l’aponévrosesuperficielle, par rapport aux sarcomes profonds quisiègent en-dessous d’elle. L’intérêt de cette distinctionest pronostique : la survie globale à 5 ans des sarcomessuperficiels (y compris cutanés) est de 65 à 80 %, alorsque celle des sarcomes profonds, tous types et localisa-tions confondus, n’est que de 50 à 60 % [1, 2].

La présentation cutanée des tumeurs les rend plusprécocement accessibles à l’examen clinique. Bon nom-bre d’entre elles sont d’abord biopsiées par le dermato-logue, tandis que les plus volumineuses aboutiront di-rectement chez le chirurgien. L’importance du contexteclinique est grande car certains sarcomes cutanés sont

liés à des lésions précessives ou à l’intervention de fac-teurs génétiques ou encore iatrogéniques. De plus, lessarcomes cutanés les moins rares ne sont pas seulementdes « boules » à typer histologiquement, mais réalisentdes tableaux anatomo-cliniques dans lesquels intervien-nent la présentation, les antécédents du patient etl’évolutivité de la lésion. Les sarcomes cutanés usuelsse divisent en deux groupes : les tumeurs à potentielévolutif essentiellement local (dermatofibrosarcome,fibroxanthome atypique, leiomyosarcome cutané, sar-come de Kaposi), et les sarcomes agressifs à haut risquemétastatique (angiosarcome et sarcome épithélioïde).

Tumeurs à potentiel évolutif essentiellement local

Le dermatofibrosarcome de Darier et Ferrand [1] estune tumeur dermique souvent étendue à l’hypoderme.Il atteint surtout les adultes jeunes de sexe masculin. Ils’agit souvent d’une lésion connue depuis longtemps,plaque ou plage atrophique, sur laquelle apparaissent

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