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Prise en charge des AVC ischémiques graves
Dr. Laurent Derex
Unité Neurovasculaire Hôpital Neurologique
Hospices Civils de Lyon
Les AVC, une pathologie grave
• Première cause de handicap acquis, deuxième cause de mortalité et de démence
• 10% des décès à travers le monde
• Mortalité hospitalière: 13% en France
Hommel, Accidents Vasculaires Cérébraux, Ed. Doin
Pronostic des infarctus cérébraux graves
• Thrombose basilaire – 40% de mortalité, 30% de
patients autonomes (m-RS = 0-2)
• Thrombose carotidienne – 10-30% de mortalité
• Infarctus sylviens
« malins » – 78% de mortalité si
traitement médical seul versus 29% en cas de craniectomie décompressive
Il existe deux types de variables explicatives du pronostic
1 - Caractéristiques liées à l’AVC – Gravité clinique (score neurologique NIHSS) – Taille de la lésion ischémique (IRM de diffusion) – Site de l’occlusion artérielle (carotidien…) en cas d’infarctus – Etiologie (AC/FA…)…
2 - Caractéristiques liées au patient
– Age – Sexe – Autonomie avant l’AVC (score de Rankin modifié) – Morbidités associées (ATCD d’AVC, diabète…)…
Sans oublier le traitement
Apport pronostique du score NIHSS
• Score de quantification du déficit neurologique
– 15 items – Score de 0 (examen clinique
normal) à 42
• Reproductible (intra- et inter-observateurs)
• Score ≥ 15 à l’admission: probabilité faible d’avoir un excellent pronostic à 3 mois
• Un AVC grave est un AVC dont le score NIHSS est ≥ 17 ou dont le score de Glasgow (GCS) est < 9
Indicateurs de gravité dans l’AVC Examen général, antécédents - Age - Diabète - AC/FA - Hyperglycémie > 8 mmol/L - Hyperthermie - Elévation de la créatinine - Elévation des globules blancs - Dépendance antérieure - Comorbidités, démence - Isolement social
Indicateurs radiologiques de gravité
- Volume d’infarctus en IRM de diffusion ++
- Importance de la diminution du coefficient d’ADC
- Absence de pénombre ischémique
- Présence d’une occlusion artérielle proximale
Thrombolyse IV entre 3 et 4,5 h Etude ECASS-3
N Engl J Med 2008;359:1317-29
Evolution favorable (m-RS=0-1) tPA vs placebo : 52.4% vs. 45.2%; p = 0,04
Mishra N K et al. Stroke 2010;41:2612-2617
Thrombolysis Is Associated With Consistent Functional Improvement Across Baseline Stroke Severity
Comparaison ajustée, non randomisée
Derex, Rev Prat 2012
Thrombolyse après 80 ans
Analyse ordinale IST-3: amélioration du score de handicap à 6 mois, même chez les patients âgés
AVK et thrombolyse
• Recommandations AHA/ASA – « La thrombolyse IV dans les 3 heures est possible chez
les patients sous AVK si l’INR à l’admission est ≤ 1,7 »
• Essais NINDS et ECASS III: patients sous AVK exclus quel que soit l’INR
• Quel est le risque d’hémorragie cérébrale symptomatique en cas de traitement AVK avec INR infra-thérapeutique?
Xian et al., JAMA 2012
AVK et thrombolyse cérébrale
• AHA Get With The Guidelines-Stroke Registry – Etude observationnelle
rétrospective (2009-2011) – 23 437 AIC traités / tPA IV – 1 802 (7,7%) avec INR ≤ 1,7 – INR médian = 1,2 (IQR =
1,07-1,40) – Pas d’augmentation du
risque d’HICs ou de la mortalité après ajustement pour les variables cliniques (âge, NIHSS, PAs, glycémie) Xian et al., JAMA 2012
≈ 50% des patients sous AVK avec INR ≤ 1,7 non traités par tPA IV
Les facteurs de risque clinique et biologique d’hémorragie cérébrale liée au tPA
• Dose d’agent thrombolytique (tPA,
desmoteplase, TNK) • Sévérité clinique (NIHSS > 20) • Elévation des chiffres tensionnels • Hyperglycémie, HbA1C • Biomarqueurs: MMP-9, PAI-1, TAFI et
c-FN
Score ASPECTS et thrombolyse
• Analyse des scanners de l’étude NINDS (n=608)
• ASPECTS < 10: 57% • Pas d’influence
détectable sur l’effet de la thrombolyse avant trois heures
Demchuk et al., Stroke 2005
Score ASPECTS et thrombolyse
• Tendance à une réduction de la mortalité et à une augmentation de l’efficacité si score ASPECTS favorable (> 7) – NST (m-RS 0-1 à 3 mois)
= 5 si ASPECTS = 8-10 – NST = 8 si ASPECTS =
3-7
Demchuk et al., Stroke 2005
Les facteurs de risque IRM d’hémorragie cérébrale liée au tPA
• IRM de diffusion
– Abaissement de l’ADC < 400 x 10 -6 mm2/s
– Volume lésion ischémique ≥ 100 ml
• IRM de perfusion – Effondrement du CBV
• Leucoaraïose • T2* : présence de
nombreux “microbleeds” ?
Score DWI-ASPECTS et thrombolyse
• Analyse rétrospective multicentrique
• 217 infarctus carotidiens traités par thrombolyse IV, IA, IV+IA dans les 6 heures
• Analyse de deux coupes axiales de l’IRM séquence de diffusion – Estimation semi-quantitative
du volume lésionnel DWI
Singer et al., Stroke 2009
Volume lésionnel DWI et hématome symptomatique après tPA
• Etude DEFUSE
• 74 patients traités par tPA IV entre 3 et 6 heures
• Volume lésionnel DWI: facteur prédictif indépendant d’HIC symptomatique – OR 1,77; IC 95% 1,25 à
2,50 pour 10 mL d’augmentation du volume lésionnel DWI
Lansberg et al., Stroke 2007
La résistance du thrombus cérébral à la lyse IV
• Etudes angiographiques
• Taux de recanalisation modestes en cas d’occlusion d’un gros tronc – Artère carotide interne
• 20 à 25% – Artère sylvienne
• 50 à 60% – Tronc basilaire : 50 %
Thrombolyse intra-artérielle
Etude PROACT II
– Seule étude randomisée de TIA
– Occlusion sylvienne (M 1 – M 2)
– Pro-urokinase IA + héparine (n =121) versus héparine (n = 59)
– Fenêtre thérapeutique : 6 heures
JAMA, 1999, 282 : 2003-2011
PROACT II
• Recanalisation : 66 % pro-UK versus 18 %contrôle (p < 0,001)
• A 3 mois, 40 % de patients autonomes dans le groupe thrombolyse intra-artérielle versus 25 % dans le groupe contrôle
(p = 0,04)
• 10 % d ’hémorragie cérébrale dans le groupe pro-UK
• Lenteur de l’approche intra-artérielle – Délai médian avant thrombolyse intra-artérielle = 5 heures 18 minutes
05/08/09 Recommandations HAS Prise en charge initiale des AVC
• Il est possible d’administrer le rt-PA par voie intra-artérielle (ce qui ne figure pas dans l’AMM), la décision devant être prise au cas par cas après concertation entre neurologue et neuroradiologue
• Dans ces conditions, l’administration peut se faire jusqu’à six heures pour les occlusions de l’artère cérébrale moyenne, voire au-delà pour les occlusions du tronc basilaire du fait de leur gravité extrême
IMS III • Etude arrêtée prématurément pour futilité après
l’inclusion de 656 patients – 434 patients dans le groupe traitement endovasculaire et
222 patients dans le groupe thrombolyse IV seule
• Pas de différence significative entre les deux groupes en ce qui concerne l’autonomie (score m-RS=0-2) à 3 mois – 40,8% dans le groupe traitement endovasculaire versus
38,7% dans le groupe thrombolyse IV seule
IMS III
• Joseph P. Broderick, MD, • « Ce n’est pas ce que nous
avions espéré » • « Cependant, nous restons
optimistes concernant l’embolectomie mécanique; nous devons travailler mieux pour démontrer que ces nouveaux dispositifs améliorent l’évolution des patients »
• Pas d’étude randomisée IA versus IV
• Analyse de toutes les séries publiées – Total de 420 patients
• 344 patients traités par
TIA
• 76 patients traités par TIV
Occlusion basilaire – registre BASICS
• Registre prospectif multicentrique (n=619) – Occlusion basilaire traitée par thrombolyse IV ou traitement
endovasculaire
• Patients divisés en 4 groupes en fonction du délai symptômes-début du traitement de recanalisation – ≤ 3 heures (n=134) – > 3 et ≤ 6 heures (n=151) – > 6 et ≤ 9 heures (n=56) – > 9 heures (n=68)
• Critère d’évaluation principal: mauvaise évolution clinique à 1
mois (score à l’échelle de Rankin modifiée 4-6)
• “Il n’y a pas de preuve scientifique en faveur d’une fenêtre thérapeutique étendue concernant le traitement de recanalisation des patients atteints d’occlusion basilaire en pratique clinique.”
• Le risque de mauvaise évolution clinique (m-RS = 4-6) s’accroît avec le délai avant traitement de recanalisation: – ≤ 3 heures: 62%; – > 3 to ≤ 6 heures: 67% – > 6 to ≤ 9 heures: 77% – > 9 heures: 85%
Vergouwen M D I et al. Stroke 2012;43:3003-3006
Thrombolyse en cas d’occlusion basilaire - Impact de l’étendue de la lésion ischémique et du délai avant traitement
Strbian et al., Annals of Neurology 2013
n = 184 m-RS à 3 mois
Thrombolyse en cas d’occlusion basilaire Impact de l’étendue de la lésion ischémique
et du délai avant traitement
Strbian et al., Annals of Neurology 2013
pc-ASPECTS ≥ 8 n = 132
m-RS à 3 mois
pc-ASPECTS = posterior circulation Acute Stroke Prognosis Early CT score
Prédicteurs de l’évolution vers un infarctus sylvien « malin »
- Volume d’infarctus en IRM de diffusion > 145 cm3
- Score NIHSS > 20 (15 pour l’éligibilité dans les essais cliniques)
- Baisse de la vigilance à un score de 1 à l’item 1a du score NIHSS
- Infarctus total du territoire de l’artère sylvienne
Hémicraniectomie décompressive
• Diamètre du volet ≥ 12 cm – Incluant toujours l’os frontal,
temporal et pariétal
• Ouverture de la dure-mère
• Patch dure-mèrien
• Pas de résection du tissu cérébral infarci
• Repose du volet après au moins 6 semaines
DECIMAL (n = 38/38 patients)
DESTINY (n = 32/32 patients)
HAMLET (n = 23/56 patients) 33 patients exclus pour délai > 48h ou
inclusion après Nov. 2005
3 essais thérapeutiques randomisés européens en cours à la date de l’analyse poolée : - Critères d’inclusion et d’exclusion très proches
- Critère principal de jugement identique - Critères secondaires de jugement très proches
Prise en charge médicale standard seule ( n = 42)
Prise en charge médicale standard + craniectomie décompressive (n = 51)
DECIMAL - DESTINY - HAMLET (n = 93 patients)
Critère principal de jugement : Absence de handicap
résiduel sévère à 1 an (Rankin > 4)
Conclusions L’analyse poolée DECIMAL-DESTINY-HAMLET montre
que la craniectomie décompressive dans les 48 heures d’un infarctus sylvien malin avant 60 ans :
• réduit très significativement la mortalité (RRA de 50%)
• réduit significativement le nombre de patients morts ou avec handicap neurologique modérément sévère à sévère (Rankin > 3) (RRA de 23%)
• son bénéfice s’applique à tous les sous groupes d’âge, de délai ou de type (avec ou sans aphasie)
Conclusions Décision de la craniectomie décompressive
d’un infarctus sylvien malin avant 60 ans doit être pris au cas par cas
Co-morbidités associées
Âge « physiologique »
Entourage familial et souhaits exprimés du patient
Le plus rapidement possible
Critères d’admission en réanimation en cas d’AVC - SRLF
• Tenir compte des indicateurs neurologiques du pronostic et de l’état antérieur
• Souhaits du patient ou de sa personne de confiance
• Prendre en compte le motif de la détresse vitale Bollaert et al., Réanimation 2010
Dans le cadre de l’urgence
• « L’incertitude du diagnostic et du pronostic neurologique à la phase aiguë peut justifier une réanimation dite « d’attente » dans l’intérêt du patient »
• Initier sans délai la lutte contre les facteurs d’agression cérébrale aiguë Bollaert et al., Réanimation 2010
Pour les patients déjà hospitalisés pour un AVC
• « L’éventualité d’une réanimation en cas d’aggravation pour les AVC avec signes de gravité potentielle doit faire l’objet d’une anticipation de décision concertée entre réanimateurs et neurologues »
• Conduite à tenir selon les différents motifs d’aggravation éventuelle motivée et inscrite dans le dossier médical
Bollaert et al., Réanimation 2010
Décisions de limitation et d’arrêt des thérapeutiques des AVC en réanimation
• Evolution défavorable après une réanimation d’attente (risque estimé d’un handicap sévère que le patient n’aurait pas souhaité)
• Evaluation concertée du pronostic neurologique (neurologues, réanimateurs) et de la qualité de vie future
• Information du patient (code de communication) et/ou de ses proches sur le risque de séquelles lourdes et les possibilités d’adaptation en cas de handicap très sévère
• Réévaluation régulière des décisions de LAT selon l’évolution du patient (révocabilité)
Bollaert et al., Réanimation 2010
Place du don d’organes chez les patients en coma grave à la suite d’un AVC
• En l’absence de toutes ressources thérapeutiques et lorsque l’évolution vers une mort encéphalique est probable, il est possible d’admettre un patient en réanimation dans l’optique exclusive d’un prélèvement d’organes
• Informer les proches de la gravité du pronostic et de l’absence de ressources thérapeutiques avant la recherche auprès d’eux d’une opposition du patient au don d’organes
• La recherche d’opposition du patient au don d’organes doit se faire avec la participation de la coordination hospitalière aux prélèvements d’organes
Bollaert et al., Réanimation 2010
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