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Un projet d’envergure du patronat horloger :
le Quartier-Neuf au Locle
Rue de la Concorde 21 Le Locle
Après être resté inoccupé durant quelques années, cet immeuble de
trois appartements est maintenant occupé par une seule famille. Il a
été rénové en grande partie par son propriétaire, menuisier-
charpentier.
En 1855, Henri Grandjean et Edouard Thévenaz, fabricants
d’horlogerie, créent une société par actions dont le but est la
construction de logements ouvriers pour parer aux effets de
l’augmentation des loyers qui risque d’éloigner du Locle la main
d’œuvre horlogère. Il s’agit de construire « des maisons saines et sans
luxe » dont le prix de location ne dépasse pas deux à trois cents francs
par an.
L’Association Immobilère du Locle achète un terrain à bâtir au Verger,
près de la maison qu’Henri Grandjean s’est fait construire en 1831 et
qui abrite également son comptoir d’horlogerie. Ce terrain peut
accueillir quarante maisons. Ce qui deviendra le Quartier-Neuf s’insère
dans le prolongement du plan d’alignement établi par Charles-Henri
Junod en 1836 - 1839. Le lotissement a la forme d’un rectangle. Les
constructions sont réparties en quatre rangées parallèles de massifs.
Au centre, deux massifs plus courts aboutissent à une place ornée
d’une fontaine. La rue Daniel-Jeanrichard doit conduire à une
chapelle catholique qui ne sera pas réalisée. A la différence de ce
que prévoit le plan Junod pour Le Locle, les immeubles sont dotés de
petits jardins d’agrément situés au sud. Les rues sont larges, bien
aérées.
Le Locle, Quartier Neuf en 1909
Plan du nouveau quartier au Verger (Quartier-Neuf ou du Progrès) Le Locle, 1856 par Hans Rychner
Les plus grands massifs sont composés de cinq maisons de trois
logements. Les appartements traversant sont de plan carré. Au nord,
on trouve la cage d’escaliers, les toilettes accessibles depuis cette
cage, un petit couloir, la cuisine et une chambre. Les deux dernières
chambres donnent au sud.
Quartier-Neuf, rue du Progrès 27.
Logements construits entre 1856 et 1858 pour l’Association immobilière du Locle.
Architecte Hans Rychner
Le plan des appartements de l’immeuble rue de la Concorde 21 était similaire à
celui-ci.
En haut
Le Locle, Quartier-Neuf. Elévations des façades nord et sud d’un massif par Hans Rychner.
En bas
Le Locle, Quartier-Neuf. Plan d’un massif comprenant cinq maisons, rez-de-chaussée et 1er
étage.
Le plan d’ensemble de l’architecte Hans Rychner est dessiné par
Charles Knab, l’ingénieur qui a succédé à Junod dans la supervision
des plans d’alignement du Locle et de La Chaux-de-Fonds. Une fois le
plan du quartier sanctionné par le Conseil d’Etat en mai 1856, le
chantier peut commencer. En novembre de la même année, le
quartier compte déjà dix-huit maisons. Deux cents ouvriers venant de
Suisse, de France, d’Allemagne et d’Italie sont occupés aux travaux
de construction. Lors de la cérémonie de levure des charpentes, l’un
d’entre eux déclare : « Le progrès a traversé les ténèbres du passé
(allusion à la tentative de contre-révolution royaliste de septembre
1856), comme les rayons traversent les nuages, et au lieu de faire
couler le sang, les larmes, il fait couler l’abondance, la joie. Et
maintenant, mes amis, baptisons ce nouveau village, cet enfant bien-
aimé, baptisons-le d’un nom qui ne vieillisse jamais, appelons-le
Quartier du Progrès ».
Le quartier accueille de nombreux commerces, des cafés, un cercle.
Parmi les 192 habitants on trouve des horlogers, des émailleurs, des
graveurs, des guillocheurs qui ont également établi leur atelier dans les
immeubles.
La construction du Quartier-Neuf est une opération philanthropique
destinée à freiner la spéculation immobilière menée par des patrons
horlogers qui s’assurent ainsi la présence d’une main d’œuvre
abondante sur place.
Selon l’historienne de l’architecture Nadja Maillard, le Quartier-Neuf
« représente une alternative aux propositions du socialisme utopique et
à la maison individuelle. Le Quartier-Neuf se présente comme un
compromis entre le système ternaire rue / massif / jardin de La Chaux-
de-Fonds et le modèle en bandes : la largeur des massifs avec leur
rangée de jardins est définie de manière à ne pas occuper plus de
place qu’un des anciens massifs. La distance entre les rues demeure
ainsi égale à celle du centre de la localité où les jardins sont absents ».
Ce plan de quartier restera inachevé car il subira les conséquences de
la crise économique et politique des années 1856-1857.
A. Graf, Vue du Quartier-Neuf vers 1860
Annuaire d’adresses de La Chaux-de-Fonds et du Locle, 1929
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