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317 Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault : les apports de l’A75, tronçon Pézenas-Béziers Gilles LOISON, Muriel GANDELIN, Hélène VERGÉLY, Yves GLEIZE, Yaramila TCHÉRÉMISSINOFF, Roland HAURILLON, Romain MARSAC, Maxime REMICOURT, Loïc TORCHY et Frédéric VINOLAS Résumé : Le vaste projet d’aménagement autorouer de l’A75 et plus parculièrement de la dernière tranche des travaux relave à la poron d’autoroute reliant Béziers à Pézenas a donné lieu, entre 2006 et 2009, à une série d’opéraons archéologiques localisées sur la rive droite de la basse vallée de l’Hérault. Ces opéraons ont permis la mise au jour de nombreux témoins d’occupaons de la Préhistoire récente qui s’étagent de la fin du Néolithique ancien au début de l’âge du Bronze. Les données préliminaires, somme des travaux de terrain et des premiers résultats des études engagées, apportent un grand nombre d’informaons nouvelles. Sous divers angles, et notamment par leurs approches extensives, elles autorisent un renouvellement des connaissances sur les modes d’implantaons des anciennes communautés rurales du Languedoc central. Mots-clés : Néolithique récent, Épicardial, Chasséen, Vérazien, Bronze ancien, habitats, sépultures Abstract: From 2006 to 2009, the important A75 highway project – notably on the poron linking Béziers to Pézenas – led to a number of archaeological operaons located in the lower Hérault valley. These operaons enabled the discovery and excavaon of numerous sites of a human occupaon dang back to Recent Prehistory, extending from the Early Neolithic period to the beginning of the Bronze Age. Preliminary data, the results of work on site and inial studies already provide an important quanty of new informaon. Through an extensive approach, they allow a renewal of our knowledge concerning the selement features of the ancient rural communies in the central Languedoc area. Keywords: Neolithic, Epicardial, Chasséen, Verazien, Early Bronze Age, dwellings, graves L a dernière section de construction de l’auto- route A75 tronçon Pézenas-Béziers, reliant celui-ci à l’A9, est longue de 20 km. Elle est située géographiquement dans la partie centrale du Languedoc méridional au sein d’un triangle limité au nord par les Garrigues et la Montagne noire, à l’ouest par la vallée de l’Orb et à l’est par celle de l’Hérault. Plus précisément, ce tracé s’inscrit en rive droite de la basse vallée de l’Hérault, traversée par deux de ses affluents, la Peyne et la Thongue, ainsi que par le Libron, petit fleuve côtier. Le substrat est constitué de limons argilo- sableux d’âge miocène. Parmi les formations super- ficielles, les matériaux fluviatiles quaternaires ne sont représentés dans le meilleur des cas que sous une forme résiduelle. D’un point de vue taphono- mique, les travaux modernes de défonçage liés à la viticulture ont considérablement accentué l’érosion

Dynamiques d’occupations des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault. Les apports de l’A75, tronçon Pézenas-Béziers

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Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse

vallée de l’Hérault : les apports de l’A75, tronçon Pézenas-Béziers

Gilles LOISON, Muriel GANDELIN, Hélène VERGÉLY, Yves GLEIZE, Yaramila TCHÉRÉMISSINOFF, Roland HAURILLON, Romain MARSAC, Maxime REMICOURT, Loïc TORCHY et Frédéric VINOLAS

Résumé :Le vaste projet d’aménagement autoroutier de l’A75 et plus particulièrement de la dernière tranche des travaux relative à la portion d’autoroute reliant Béziers à Pézenas a donné lieu, entre 2006 et 2009, à une série d’opérations archéologiques localisées sur la rive droite de la basse vallée de l’Hérault. Ces opérations ont permis la mise au jour de nombreux témoins d’occupations de la Préhistoire récente qui s’étagent de la fin du Néolithique ancien au début de l’âge du Bronze. Les données préliminaires, somme des travaux de terrain et des premiers résultats des études engagées, apportent un grand nombre d’informations nouvelles. Sous divers angles, et notamment par leurs approches extensives, elles autorisent un renouvellement des connaissances sur les modes d’implantations des anciennes communautés rurales du Languedoc central.

Mots-clés :Néolithique récent, Épicardial, Chasséen, Vérazien, Bronze ancien, habitats, sépultures

Abstract:From 2006 to 2009, the important A75 highway project – notably on the portion linking Béziers to Pézenas – led to a number of archaeological operations located in the lower Hérault valley. These operations enabled the discovery and excavation of numerous sites of a human occupation dating back to Recent Prehistory, extending from the Early Neolithic period to the beginning of the Bronze Age. Preliminary data, the results of work on site and initial studies already provide an important quantity of new information. Through an extensive approach, they allow a renewal of our knowledge concerning the settlement features of the ancient rural communities in the central Languedoc area.

Keywords:Neolithic, Epicardial, Chasséen, Verazien, Early Bronze Age, dwellings, graves

La dernière section de construction de l’auto-route A75 tronçon Pézenas-Béziers, reliant celui-ci à l’A9, est longue de 20 km. Elle est

située géographiquement dans la partie centrale du Languedoc méridional au sein d’un triangle limité au nord par les Garrigues et la Montagne noire, à l’ouest par la vallée de l’Orb et à l’est par celle de l’Hérault. Plus précisément, ce tracé s’inscrit en rive droite de la basse vallée de l’Hérault, traversée par

deux de ses affluents, la Peyne et la Thongue, ainsi que par le Libron, petit fleuve côtier.

Le substrat est constitué de limons argilo-sableux d’âge miocène. Parmi les formations super-ficielles, les matériaux fluviatiles quaternaires ne sont représentés dans le meilleur des cas que sous une forme résiduelle. D’un point de vue taphono-mique, les travaux modernes de défonçage liés à la viticulture ont considérablement accentué l’érosion

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G. Loison et al. — Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault

des sites archéologiques. Ainsi, sur l’ensemble des sites reconnus, les sols d’occupation ont quasi systé-matiquement disparu et seules les structures exca-vées ont pu être partiellement préservées.

L’environnement géographique dans lequel s’inscrit ce tracé autoroutier a par le passé fait l’ob-jet de recherches archéologiques. Toutefois, pour la Préhistoire récente, outre une synthèse ancienne de T. Janin (1993), la majeure partie des données disponibles provient de prospections : travaux de G. Fédière et J. Giry (1973), ou de P.-Y. Genty, A. Cornejo et J. Grimal (1980), et dans sa partie centrale ceux de J.-L. Espérou (Espérou et Roques, 1988). Seuls de trop rares gisements, principale-ment du Néolithique final, ont fait l’objet de fouilles ponctuelles : Montrose à Tourbes, Les Hermès à Bélarga, Le Bousquetas à Paulhan, et Croix-Vieille à Montblanc (Espérou et al., 1996)… Seuls les sites de Roquemengarde à Saint-Pons-de-Mauchiens (Guilaine, 1992), éperon barré dont les objets métal-liques attestent du développement des pratiques

métallurgiques dans la basse vallée de l’Hérault aux environs de 3200-2900 avant notre ère, et plus récemment du Puech-Haut à Paulhan, vaste occu-pation ceinturée par un fossé (Carroza et al., 2006), ont fait l’objet de fouilles extensives.

Dans le prolongement de ces travaux pion-niers, les diverses opérations d’archéologie préven-tive, entreprises dans le cadre de la construction de ce tracé autoroutier, ont été une occasion exception-nelle d’ouvrir une vaste fenêtre d’observation sur cette micro-région. Les objectifs scientifiques défi-nis et développés, dans un cadre pluridisciplinaire, ont porté sur la nature et le mode d’occupation ainsi que sur les marqueurs économiques et sociaux des différentes périodes représentées pour la Préhis-toire récente.

Le programme général engagé, des étapes documentaires à la fouille, est en voie d’achèvement. Il a concerné une surface globale d’étude de 186 hec-tares, subdivisée en 11 secteurs d’intervention à partir d’une campagne de prospection pédestre (Kotarba et al., 1998). Les résultats de la phase de

0 2Km

N

Béziers

Pézenas

Montblanc

Nézignan l’EvêqueValros

Tourbes

Montferrier 2 Néo. moyen, Chasséen ancien :

Néo. �nal : Responsable : G. Loison

(Tourbes)

CabrialsNéolithique �nal :

Responsable : Y. Tcheremissino�

(Béziers)

Le PirouNéo. moyen, Chasséen ancien :

Bronze ancien : Responsable : G. Loison

(Valros)

?

Rec de LignoBronze ancien :

Responsable : G. Loison

(Valros)?

RoquessolsNéolithique �nal:

Responsable : M. Gandelin

(Valros)?

Barreau de la Devèze-sudNéo. moyen, Chasséen classique :

Bronze ancien/moyen :

Responsables : R. Haurillon, H. Vergély

(Béziers)?

?

Champ RedonNéolithique �nal :

Bronze ancien : Responsable : R. Haurillon

(Valros, Montblanc)?

Barreau de la Devèze-CabrialsNéo. moyen, Chasséen :

Néo.�nal : Responsable : M. Gandelin

(Béziers)

?

Vigne de Bioaux “Labournas” Néo. ancien de tradition cardiale :

Néo. moyen, Chasséen ancien :

Néolithique �nal :

Responsable : G. Loison

(Valros)

?

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?

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=

=

=

=

=

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Espace domestique Foyer Sépulture en fosse

Sépulture mégalithiqueExtraction de matériauxlimoneux

Rejets détritiques

Espace domestiqueprobable

Fosse de type silo

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anée

Les di�érents témoins d'occupations.

PézenasPézenasBéziersBéziers

MontpellierMontpellier

Figure 1 — Le tronçon A75 Pézenas-Béziers et les sites de la Préhistoire récente.

319

8e RMPR (Marseille 2008) — Actualité de la recherche

diagnostic ont ensuite conduit à la prescription de 9 opérations de fouille intéressant la seule Préhis-toire récente (fig. 1). Ce sont les premiers résultats

de ces découvertes que nous présentons dans le cadre des 8e Rencontres Méridionales de Préhis-toire Récente.

Figure 2 — En haut : les sites du secteur 3 à Valros (1 : le Pirou ; 2 : la Vigne de Bioaux ; 3 : Labournas ; 4 : le Rec de Ligno). En bas : les sites du Barreau de la Devèze et de Cabrials à Béziers (5 : Cabrials ; 6 : Barreau de la Devèze-Cabrials ; 7 : Barreau de la Devèze-sud).

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G. Loison et al. — Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault

De multiples découvertes

Les importants décapages entrepris sur les secteurs 1, 2 et 4, et tout particulièrement sur le secteur 3, future aire de repos de Valros (plus de 8 hectares) ainsi que sur le Barreau de la Devèze (fig. 2) ont permis la mise au jour des témoins d’occupations de la Préhistoire récente qui s’étagent de la fin du Néolithique ancien au début de l’âge du Bronze.

Le plus ancien aménagement anthropique retrouvé est une fosse isolée, mise au jour sur le site à occupations multiples de Vigne de Bioaux à

Valros. Elle a pu être attribuée à la phase épicardiale par le mobilier recueilli au sein de son remplissage.

Le Néolithique moyen 2 de tradition chas-séenne est représenté par quatre occupations cor-respondant à deux phases distinctes. Les sites du Pirou et de Vigne de Bioaux à Valros et de Montfer-rier 2 pour le Chasséen ancien (de superficies et de statuts différents) et, pour le Chasséen classique ou récent, le site du Barreau de la Devèze-sud à Béziers.

Les divers aménagements du Néolithique final, bien qu’ils ne présentent pas de fortes concen-trations, sont nombreux et présents sur la plupart

Y=124250

Y=124300

Y=124350

Y=124400

Y=124450

X=684450

X=684500

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N

0 25m

NN

Vigne de Bioaux

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p M

édite

rran

ée

Amt 2133

Amt 2133

Figure 3 — Vigne de Bioaux à Valros, fosse épicardiale.

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8e RMPR (Marseille 2008) — Actualité de la recherche

des secteurs décapés : sites de Roquessols, Champ Redon, Labournas et Vigne de Bioaux à Valros, et Barreau de la Devèze-Cabrials à Béziers. Ils corres-pondent à de petites installations de faible durée, représentatives de deux des trois grandes phases de cette période qui, ici, se rattachent au complexe vérazien (Guilaine, 1980 ; Vaquer, 1980 ; Marsac, 1990 ; Montécinos, 2005) ; il s’agit des phases ancienne et moyenne. Une tombe collective mégali-thique a de plus été découverte au lieu-dit Cabrials à Béziers, celle-ci remonte à la phase ancienne.

Le Bronze ancien est lui aussi représenté par de petites implantations qui correspondent à deux périodes distinctes. À la phase ancienne se ratta-chent un petit ensemble funéraire au lieu-dit Rec de Ligno 2, ainsi que des fosses isolées de type silo sur les sites de Rec de Ligno 1 et de Champ Redon à Valros. La phase finale est matérialisée par les occupations des sites du Pirou et du Barreau de la Devèze-sud ; toutes deux correspondent à de petites implantations, de type habitat isolé, matérialisées par diverses structures excavées, principalement de type silo. La première comportait une sépulture individuelle en fosse et la deuxième, deux fosses funéraires dont l’une comportait les dépôts de trois individus.

Les différentes occupations par période

Le Néolithique ancien

Vigne de Bioaux à Valros (34) : une fosse du Néolithique ancien de tradition cardiale

Sur l’ensemble du tracé, cette période n’est repré-sentée que par une seule structure découverte au lieu-dit Vigne de Bioaux (fig. 3). Il s’agit d’une fosse à ouverture circulaire et à profil légèrement tron-conique (Amt 2133). Sa profondeur est de 0,50 m. De nombreux blocs de basalte et de conglomérat miocène étaient disposés sur le fond sans aucune organisation particulière, certains d’entre eux ayant manifestement subi des chocs thermiques ; les parois de la fosse ne comportant aucune trace de chauffe, il s’agirait plutôt de rejets. Parmi ceux-ci, des fragments de céramique appartenant à trois récipients distincts ont été exhumés (fig. 13 A, n° 1 à 3). L’un correspond à un grand vase à provision à la paroi rectiligne décorée de cinq cordons lisses parallèles disposés verticalement sur lesquels se raccordent d’autres cordons parallèles obliques ; ils sont tous légèrement débordants. Le bord interne de ce vase comporte un cordon horizontal. Le second récipient, de taille sensiblement inférieure, porte

également des cordons, dont certains sont impres-sionnés, disposés orthogonalement. Quant au troi-sième, il s’agit un petit récipient de forme ovoïde portant une préhension massive de la forme d’une anse légèrement ensellée, mais non perforée ; cinq cordons verticaux, lisses et parallèles partent de la partie supérieure de la préhension et se prolongent très légèrement au-delà du bord. Ce vase porte égale-ment un cordon préoral interne. Il est important de souligner que l’ornementation de ces récipients que l’on retrouve aussi bien dans le Cardial récent que dans l’Épicardial ancien est constituée exclusive-ment de décors plastiques, et ne comporte de décors d’impressions que sur ceux-ci. Ces éléments de céra-mique trouvent des correspondances avec quelques rares exemplaires découverts dans l’Hérault comme notamment ceux de la grotte de Camprafaud c.19 (Rodriguez, 1984) ou sur le site de Saint-Apolis-de-Fontenille (Grimal, 1982), ainsi que dans certaines formes et décors du groupe provençal du Cardial, notamment dans le Grand abri de Châteauneuf-les-Martigues (Courtin, 1974).

Une datation isotopique place cet ensemble dans une fourchette probabiliste (à 95 %) de 5200 à 4850 av. J.-C., qui correspondrait à la transition entre les phases 2 et 3 de C. Manen (2002). Aussi, malgré sa modestie, cette découverte de plein air permet d’apporter un éclairage supplémentaire sur cette période dont les témoins restent localement rares.

Cette faible, mais réelle présence, de la fin du Néolithique ancien est confirmée par quelques tessons, en position secondaire, présents dans les contenus de fosses chasséennes des sites du Pirou et de Montferrier. Dans ce dernier, une fosse a livré quelques petits éléments de céramique à paroi épaisse et aux dégraissants de quartzite pilé, notam-ment un bord décoré associant une ligne horizontale d’impressions circulaires et un réseau de profondes cannelures verticales parallèles. Ces quelques carac-tères permettraient de les rattacher à la phase épi-cardiale (fig. 13 B1).

Le Néolithique moyen 2

Le Pirou à Valros

Cette vaste installation a été découverte sur la future aire de repos de Valros. Elle correspond à un habitat ouvert de type hameau qui occupe le versant sud d’une petite éminence miocène. Bénéficiant d’une surface de décapage de plus de 25 000 m2, le site a pu être étudié sur la quasi-intégralité de son emprise.

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G. Loison et al. — Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault

N

0 25m

SP4 CAN 3SP1

= Sépultures humaines

= Sépultures canidés

= Emplacement probable de l’habitat

SP4

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CAN 3©

Inra

p M

édite

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Figure 4 — Le site chasséen du Pirou à Valros, organisation générale et situation des sépultures humaines et canines.

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8e RMPR (Marseille 2008) — Actualité de la recherche

Les sols d’occupation ayant disparu, érodés par les travaux agricoles, seules ont été préser-vées 160 structures excavées de morphologie et de contenu très divers, qui ont fait l’objet d’une fouille systématique. Un grand nombre d’entre elles recélaient d’évidents « rejets domestiques de proximité ». La distribution spatiale de ces fosses montre des concentrations autour d’espaces semi-circulaires dépourvus d’excavation, qui pourraient correspondre à des emplacements de bâtiments dis-parus (fig. 4).

Certaines de ces excavations ont également servi de structure d’accueil à 7 sépultures indivi-duelles : 5 femmes, 1 dont la diagnose sexuelle est incertaine et 1 enfant, ainsi qu’à 10 dépôts de chiens. Les agencements et les modes de dépôt de ces tombes présentent des particularités semblables à celles rencontrées au Crès à Béziers et leur situation semble confirmer l’étroite relation qui existait entre certains défunts et l’espace domestique, qu’ils soient humains ou canins (Loison et al., 2004 ; Loison et Schmitt, à paraître).

Les résultats des premières datations radio-carbone, situés dans une fourchette probabiliste (à 95 %) de 4450 à 4050 av. J.-C., confirment la data-tion relative de l’assemblage et l’homogénéité de ce site, et montrent que cette occupation pourrait être légèrement plus ancienne que celle du Crès.

Cette importante découverte permet d’ob-server le schéma d’organisation d’un site d’habitat de cette phase constitutive du Chasséen méridional apportant de nouvelles précisions sur ses modes d’implantation et permettant d’argumenter la ques-tion des relations entre les sépultures (humaines et canines) et l’habitat (de Labriffe et al., 2007).

Les productions céramiques du Pirou

L’étude typologique a permis de rattacher avec cer-titude au Chasséen méridional une petite moitié des structures et pour les 65 fosses qui ont livré un mobi-lier permettant une attribution plus fine, celles-ci ont pu être attribuées plus précisément à la phase ancienne de cette culture. L’homogénéité de la série est bonne et ce rattachement au Chasséen ancien se fait avec certitude, car tous les critères caracté-ristiques de cette phase sont présents et même très bien représentés (fig. 13 C).

Les profils des vases sont presque exclusi-vement continus, les formes segmentées (vases à carènes anguleuses et cols segmentés) sont absentes à l’exception des assiettes à marli bien différencié et des coupes à socle. Les coupes en calotte, bien attes-tées, sont exclusivement sans sillon parfois ornées

d’un bouton ; un exemplaire orné de deux anses en ruban (fig. 13 C19) peut être comparé à un vase issu du site du Crès à Béziers (Hérault) et à un second provenant des Plots à Berriac (Aude ; Jédikian, 2004 ; Vaquer, 1990a). Les petits vases présentent le plus souvent des profils galbés. Les modes de suspension associés sont constitués fréquemment de barrettes ou de cordons multiforés placés dans la partie supérieure des vases, mais jamais directe-ment sur la lèvre comme pour les périodes légère-ment plus récentes, et notamment au Crès à Béziers. Des plaquettes horizontales larges perforées hori-zontalement ornent parfois le maximum des panses des vases à fond surbaissé dont la morphologie et la taille annoncent les formes carénées qui apparaî-tront plus tard. Sur les gros vases, la quasi-totalité des préhensions est assurée par des anses en ruban, parfois funiculaires et plus rarement par des anses en boudin. Les languettes et tétons de préhension sont totalement absents. Des bandeaux ou des épaississements viennent fréquemment renforcer les bords extérieurs des vases globuleux. Les louches à poignées plates souvent relevées sont fréquentes. Les décors, rares, se concentrent sur les marlis des assiettes et les parois des coupes à socle. Il s’agit essentiellement de motifs en sillons ou en micro-sillons figurant des triangles hachurés, des chevrons et plus rarement des damiers, un motif en échelle et de possibles fragments de décors cannelés « en guir-landes » sont également attestés.

La série du Pirou à Valros constitue à l’heure actuelle un des ensembles les plus anciens, les plus homogènes et les mieux documentés du Chasséen régional. L’important corpus céramique de ce site permet d’isoler un certain nombre de caractères dis-criminants, à valeur chronologique pour cette phase d’occupation, qui peut être confronté à celui du Crès à Béziers, inscrit (à 95 % de probabilité) dans une fourchette de 4350 à 4000 av. J.-C., et qui constitue l’autre important corpus de référence pour le Chas-séen ancien héraultais. Il est désormais possible de proposer le cadre d’une première évolution typo-chronologique de ces industries au sein du Chas-séen ancien de la basse vallée de l’Hérault. Ainsi, les premières comparaisons entre les séries du Crès et du Pirou permettent d’ores et déjà de supposer que la première phase du chasséen ancien se distingue-rait de la phase suivante, notamment par l’absence totale des carènes anguleuses et des cordons multi-forés disposés directement sur la lèvre, ainsi que par un galbe plus systématique des profils. Toutefois, les similitudes entre les deux séries restent très nom-breuses et témoignent d’une évolution relativement lente des formes entre 4400 et 4000 av. J.-C.

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G. Loison et al. — Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault

Régionalement, des affinités certaines exis-tent entre la série du Pirou et le « pré-Chasséen » de Port-Ariane 3 alors que les différences sont plus accusées avec les séries peut-être plus récentes des Jardins de Vert-Parc à Castelnau-le-Lez ou de Jacques Cœur à Montpellier (Georjon, 2003). Les convergences entre les séries du Chasséen ancien héraultais et du faciès audois du Chasséen ancien, principalement documenté par le style des Plots à Berriac semblent par ailleurs confirmées (Vaquer, 1990b).

L’industrie lithique

L’effectif des éléments lithiques du site du Pirou s’élève à 3767 pièces. Leur distribution au sein des structures est très variable. Ainsi, la structure Amt 94 en possède à elle seule 1083, et 29 structures de 50 à 200.

Au regard des matières premières, l’assem-blage lithique du Pirou se distingue par une forte proportion de matériaux locaux et proches. En effet, si l’on prend en compte le quartz et les différents silex tertiaires, ces matériaux représentent environ 82 % de l’assemblage (et 78 % si l’on ne prend pas en compte les débris de moins de 5 mm, qui sont nom-breux). Ces fortes proportions rappellent les phases anciennes du Chasséen. Du point de vue technolo-gique, ces productions, sur matériaux locaux et rela-tivement peu investies, s’opposent à une production plus complexe sur silex bédoulien de provenance vauclusienne.

Dans la série sur silex bédoulien, le traite-ment thermique n’est pas représenté comme pour le site du Crès à Béziers (Loison et al., 2003). Selon D. Binder (1990) et V. Léa (2004a), cette absence de chauffe devrait correspondre à une phase anté-rieure au Chasséen ancien, dite proto-chasséenne. Au regard des résultats des datations radiocarbone et de l’étude des industries céramique qui attestent bien que ce site s’inscrit chronologiquement dans le Chasséen ancien, il est vraisemblable que ces com-munautés de la basse vallée de l’Hérault ne soient pas encore rentrées dans les réseaux d’échanges véhiculant ces productions spécifiques.

Le débitage d’éclats sur éclats est très repré-senté sur le site. Sans être exclusif, le silex utilisé est en majorité bédoulien. Des éclats Kombewa, occasionnés par un débitage d’éclats sur éclats aux dépens de la face intérieure, sont présents sur le site du Pirou, deux sont bédouliens et quatre sont en silex tertiaire. Même si ce débitage est surtout connu dans les phases pré et proto-chasséennes, notamment au Crès (Léa, 2004 b), il est également

présent dans des phases plus récentes comme sur le site de Lattes (Léa, 2004a) et dans la zone des ate-liers, sur le site de la Combe à Caromb (Gassin et al., 2006). Les lames et les lamelles, qui sont en majo-rité sur silex bédoulien, présentent des modules très variables, leur largeur étant comprise entre 7,3 et 23,3 mm. Un fragment de très grande lame est assez exceptionnel par son module (largeur 23 mm) ; celui-ci a pu résulter d’un débitage par pression renforcée au levier. Il n’est cependant pas possible d’être assuré de ce type de débitage, car la longueur conservée n’est pas assez importante pour juger de la régularité des nervures. Des lames très régu-lières et de forts modules se retrouvent sur le site de Jacques Cœur II à Montpellier (Jallot et al., 2000) dans des phases anciennes du Chasséen.

La surreprésentation des grattoirs et des pièces esquillées, rappelle les sites de Port-Ariane à Lattes et du Crès à Béziers qui sont attribués à cette phase ancienne du Chasséen méridional (Léa, 2007). Les grattoirs sur lames présents au Pirou se retrouvent sur les sites des Plots à Berriac et de Langel à Armissan. Les armatures sont toutes réali-sées sur silex bédoulien, mais elles sont de morpho-logies très différentes.

Au regard de l’outillage, la grande quantité de grattoirs et de pièces esquillées peut refléter une activité particulière sur ce site. Le débitage d’éclats sur éclats et la production d’éclats Kombewa révèle un besoin d’éclats de petits modules sûrement pour des activités spécifiques. Le recours aux matières premières locales, silex tertiaires et quartz, pour un débitage par percussion directe peut correspondre aussi à un besoin particulier.

Vigne de Bioaux à Valros

Partiellement détruit par les terrassements du CD125, ce site est distant de 250 m de celui du Pirou , il pourrait en marquer une extension (fig. 5 A). Parmi les structures découvertes, 16 sont attribuables avec certitude à cette période. Comme au Pirou, elles se concentrent autour d’un espace semi-circulaire dépourvu d’excavation. Une sépulture en fosse a été exhumée au sein de cette concentration. Nous pen-sons qu’il pourrait s’agir là également de structures liées à un petit espace domestique (type maisonnée) de faible durée.

Les assemblages céramiques et lithiques issus du remplissage détritique de ces fosses sont très similaires à celui du Pirou. Ils permettent, en attente des résultats des datations isotopiques, d’être assuré d’une relative contemporanéité entre ses deux sites.

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8e RMPR (Marseille 2008) — Actualité de la recherche

Les productions céramiques de Vigne de Bioaux

Parmi les seize structures rat-tachées au Chasséen, huit sont considérées comme certaine-ment chasséennes et cinq sont supposées comme telles en raison d’une relative faiblesse des caractères typologiques. Les trois structures, n’ayant pu être datées avec précision, ont cependant livré des éléments qui sont techniquement et/ou typologiquement compatibles avec une datation chasséenne.

La série est relativement pauvre. Elle se compose d’un peu plus d’un millier de tes-sons (1032) ce qui représente environ 12 kg de céramique. Si la fosse la plus riche (Amt 2220) a livré 3,5 kg, la quan-tité moyenne de céramique par fosse est inférieure à 1 kg et 12 des 16 fosses en ont livré moins de 0,5 kg.

Parmi le matériel typique, exception faite des bords indé-terminés, on reconnaît une très large majorité d’anses en ruban (14 au total), souvent funicu-laires. Les seuls autres élé-ments plastiques attestés sont un cordon multiforé, un cordon peu saillant et une petite lan-guette peu saillante. Parmi les vases identifiables, on distingue une coupe restituable et quatre bords de coupes inornés, une petite écuelle à carène douce en dépôt dans la sépulture, deux vases ovoïdes dont un doté d’anses en ruban, un vase sphé-rique quasiment complet et la partie supérieure d’un vase à profil galbé. On note également la présence d’un probable frag-ment de louche à manche plat et un bord épaissi. Le seul décor est un motif composé de deux réseaux de lignes obliques inci-sées disposés en symétrie ver-ticale et se recoupant dans leur partie supérieure.

Y=126700

Y=126720

Y=126740

X=685520

X=685540

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AMT 26

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N

0 10m

= Chasséen ancien

= Néolithique final

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= Espace Chasséen ancien

Amt 2211

N

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Figure 5A : Vigne de Bioaux à Valros, fosses et sépulture du Chasséen ancien.

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A

B

Figure 5 — A : Vigne de Bioaux à Valros, fosses et sépulture du Chasséen ancien. B : Montferrier 2 à Tourbes, fosses du Chasséen ancien et du Néolithique final.

326

G. Loison et al. — Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault

Tous les éléments présents dans la série de Vigne de Bioaux se retrouvent dans la série du Pirou, exception faite de la petite languette peu saillante. Le rattachement au Chasséen ancien de l’occupa-tion de Vigne de Bioaux se fait donc sans aucune hésitation et la contemporanéité stricte ou relative des deux secteurs est probable. Comme au Pirou, la plupart des critères caractéristiques de cette phase ancienne du Chasséen sont présents :– la quasi-totalité des préhensions est assurée par

des anses en ruban souvent funiculaires ;– le seul mode de suspension attesté consiste en un

cordon multiforé ;– dans un cas un bandeau vient renforcer le bord

d’un vase ;– la famille des vases à profil galbé est présente ;– les coupes, exclusivement sans sillon sont égale-

ment bien attestées ;– la famille des louches à poignée plate est présente

à travers un fragment de manche ;– les formes segmentées sont absentes.

La prise en compte de l’industrie lithique ne fait que renforcer cette attribution. Le silex blond bédoulien du Vaucluse est largement prépondérant dans les assemblages et il n’a pas fait l’objet de trai-tement thermique (Binder, 1991 ; Léa, 2004a).

Montferrier 2 à Tourbes

Ce site a lui aussi été tronqué par des terrassements : au nord, par le chemin départemental CD39E et, à l’est, par l’exploitation d’une carrière. Une vingtaine de fosses a cependant pu être étudiée, mais sur une surface trop restreinte pour en comprendre claire-ment l’organisation (fig. 5 B). Le comblement détri-tique de certaines d’entre elles semble cependant indiquer une proximité d’habitat. Les caractères typologiques, du mobilier céramique et lithique, issu de la majorité des comblements, attestent que cette occupation peut également être attribuée de la phase ancienne du Chasséen.

Les productions céramiques de Montferrier 2

D’un point de vue technique, la céramique, lisse et polie, est majoritairement cuite en atmosphère réductrice, comme en témoigne la couleur des sur-faces, le plus souvent brune à noire. Cette proportion de céramique sombre est d’autant plus importante que la paroi des vases est fine. Cette série se distin-gue notamment par une proportion importante de vases très fins dont l’épaisseur se situe entre 0,3 et 0,4 mm. Les pâtes, toujours micacées, incluent

exclusivement un dégraissant minéral, fin à moyen, essentiellement composé de sable quartzeux ou de roche siliceuse pilée. D’un point de vue typologique, la série, quoique relativement modeste, peu sans conteste être rattachée au Chasséen ancien. Les profils sont presque toujours continus à l’exception des rares assiettes et des coupes à socles. Les coupes en calotte sont exclusivement sans sillon. Les petits vases sont généralement à profil galbé et fond par-fois surbaissé et les modes de suspension qui leur sont associés consistent le plus souvent en la pré-sence de barrettes ou cordons horizontaux multi-forés placés dans la partie supérieure des vases ou directement sur leur lèvre. Les rares exemplaires d’écuelles carénées présents témoignent peut-être d’une postériorité de cet ensemble sur celui du Pirou (Valros, Hérault) au sein duquel ce type était totale-ment absent. À l’exception des cordons multiforés, les suspensions tubulaires verticales sont absentes. Les vases globuleux présentent fréquemment des bandeaux ou des épaississements venant renforcer les bords. La quasi-totalité des préhensions qui leur sont associées est assurée par des anses en ruban, parfois funiculaires.

Cette série de Montferrier présente de fortes affinités avec les séries du Chasséen ancien connues par ailleurs dans l’Hérault : Le Crès à Béziers (Loison et al., 2003 ; Jédikian, 2004), le Pirou à Valros (travaux Gandelin, inédits), Port-Ariane (niveaux inférieurs) à Lattes (Georjon, 2003 et 2007), Encombres à Quarantes (Amiel et Jédikian, 2003) et dans l’Aude : Les Plots à Berriac (Vaquer, 1990 b), mais c’est avec la série du Crès à Béziers que les affi-nités sont les plus fortes. On y retrouve notamment les cordons horizontaux multiforés verticalement placés directement sur le bord des vases, type absent du corpus, pourtant conséquent, mais certainement plus ancien du Pirou (Valros, Hérault).

Le Barreau de la Devèze sud à Béziers 

Le site du Barreau de la Devèze sud a été décapé sur une surface de plus de 6000 m2 (fig. 6). Les struc-tures en creux reconnues, au nombre de 26 pour la période traitée, sont essentiellement des fosses subcirculaires de diamètre variable (entre 0,50 et 1,40 m). Leur distribution n’est pas uniforme : la majorité des fosses, comportant des détritus mobi-liers, se concentre dans la partie est du site. Au sud de ce secteur, deux silos ont permis, par leur état de conservation, de restituer le niveau de circulation de cette occupation, situé à quelques centimètres au-dessus du niveau de décapage. L’un deux, réuti-lisé en dépotoir, a livré un important mobilier céra-

327

8e RMPR (Marseille 2008) — Actualité de la recherche

mique (fig. 6, Amt 2002) et le second a montré, par un remontage d’éclats de façonnage de meule, une phase d’utilisation strictement contemporaine. À proximité, ont également été observées des struc-tures de combustion (blocs de grès et calcaires coquilliers chauffés), ainsi qu’une grande fosse subrectangulaire aux dimensions inhabituelles : 6 m de long pour 4 m de large et de 1,5 m de profon-deur. Celle-ci comporte deux possibles calages de poteaux et une importante quantité de mobilier très fragmentaire (remblaiement probable). De manière générale, les comblements de ces excavations se rap-portent à des activités domestiques, témoins d’un site d’habitat ouvert. De plus, dans la partie ouest du site, une fosse aménagée à des fins exclusivement funéraires comportait une inhumation accompa-gnée d’un lot de céramique singulier. Ce dernier se compose d’un vase-support circulaire, dont la base comporte quatre fenêtres, associé à un microvase et d’une écuelle carénée, à carène très basse, compor-tant deux appliques prismatiques non perforées sur sa paroi (fig. 6, Amt 3036).

Les productions céramiques

L’étude de l’assemblage céramique du site montre, d’un point de vue technique, des pâtes incluant exclusivement un dégraissant minéral, fin à grossier, dans des proportions différentes, associant sable détritique cristallin et matière carbonatée pilée. Les récipients sont plutôt cuits en atmosphère réduc-trice, comme en témoigne la couleur des pâtes et des surfaces, le plus souvent brune à noire. Les cuissons en atmosphère oxydante restent toutefois nom-breuses. Quelques vases et fragments montrent des traces de cuissons secondaires. La qualité du mode-lage semble également assez homogène, excepté le dépôt céramique funéraire montrant une maîtrise imparfaite du montage. Le taux de fragmentation est élevé. L’étude typologique révèle une nette pré-dominance de vases aux formes ouvertes notam-ment des coupes et écuelles carénées (fig. 13 D). Les coupes en calotte portent parfois un ou deux sillons internes et plusieurs exemplaires sont ornés de bou-tons uniques ou jumelés perforés horizontalement

115 a

Voie rurale N°60 de Cabrials

Amt 2002

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X=676550

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= Néolithique final

= Bronze ancien

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Amt 2050

SP 3036

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SP 3036

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Figure 6 — Les occupations successives du Barreau de la Devèze-sud à Béziers, situation générale, coupe d’un silo et sépulture en fosse du Chasséen ; dépotoir en fosse du Bronze ancien.

328

G. Loison et al. — Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault

(fig. 13 D, n° 2 et 4). Les écuelles à carène vive sont bien représentées avec une majorité d’écuelles caré-nées plus larges que hautes, à carène médiane ou basse (fig. 13 D, n° 6 à 11). Certains exemplaires à parois convergentes ou légèrement divergentes sont dotés de 2 à 4 paires de perforations verticales dans la carène, strictement sous-cutanées, présentant une parenté évidente avec plusieurs vases décou-verts sur le site d’Auriac dans l’Aude (Vaquer, 1990a et b) ou encore dans le Chasséen récent de Plaine de Chrétien à Montpellier (Georjon, 2003 ; fig. 13 D, n° 8 et 10). Deux autres exemplaires s’apparentent à des vases carénés à épaulement, dont l’un porte un « épaississement » au niveau de la carène qui évoque plusieurs vases découverts à Raffègues à Mèze (Montjardin, Rouquette, 1988). La préhension la plus fréquente sur les écuelles, mais peu présente, consiste en un bouton perforé disposé sous la carène. Les suspensions tubulaires multiples sont extrêmement rares. Les préhensions des grands vases globuleux ou tulipiformes sont assurées par des anses en ruban, mais aussi, dans une moindre mesure, par des languettes qui peuvent être perfo-rées. Les vases à col concave non segmenté de type « bouteille » (fig. 13 D, n° 18) et quelques vases à col segmenté ou à épaulement sont attestés. Un exem-plaire à col cylindrique bien différencié porte des plaquettes horizontales quadriforées verticalement disposées sur le haut de la panse. Les assiettes sont rares (fig. 13 D, n° 1) et hormis la coupe à socle circu-laire à quatre fenêtres déposée dans une sépulture, un seul autre petit fragment peu éventuellement évoquer cette famille. Les décors sont absents à l’ex-ception des sillons internes des coupes.

Cette petite série semble assez homogène. La plupart des formes spécifiques du Chasséen ancien sont ici quasiment absentes, comme les cordons multiforés, les formes à profil galbé, les bords ren-forcés ou les louches à poignée plate. Toutefois, quelques éléments comme les anses en ruban per-durent. Les carènes anguleuses sont nombreuses et les vases à col parfois segmenté sont présents, mais en faible proportion. C’est donc sans aucun doute à un Chasséen nettement plus récent qu’il faut ratta-cher cet ensemble. Des parallèles nombreux existent entre cet assemblage et celui de Plaine de Chrétien à Montpellier ; toutefois, au Barreau de la Devèze-sud, les coupes à sillons multiples sont absentes. La petite série de Port Ariane III (phase récente) pré-sente aussi une nette parenté avec cette série, on y retrouve notamment l’association des anses en ruban et des formes segmentées (Georjon, 2007). Enfin, les similitudes sont nombreuses avec les sites audois rattachés à la phase dite « classique » du Chasséen : Auriac à Carcassonne ou encore les Plots

à Ventenac-Cabardès (Vaquer, 1990a et b), toujours à l’exception des coupes à sillons multiples. On note d’ailleurs que l’évolution typomorphologique du Chasséen héraultais trouve de nombreuses corres-pondances avec ce que l’on observe dans l’Aude ou encore en Haute-Garonne.

À l’échelle régionale, cette découverte de l’oc-cupation du Barreau de la Devèze sud prend toute son importance, puisqu’elle vient combler un défi-cit de documentation archéologique pour les phases récentes du Chasséen méridional dans le Biterrois, et plus largement dans les bassins de l’Orb et de l’Hérault.

L’industrie lithique

La série lithique taillée est relativement importante et représentative. Elle a livré 346 pièces dont 78 % ont pu être rapprochées d’une source de matière première (travaux M. Remicourt). Cet ensemble est dominé par le silex blond et gris barrémo-bédoulien du Vaucluse (au nombre de 206 pièces correspon-dant à 76 % du matériel déterminé), mais quelques pièces en silex tertiaire, en quartz filonien, en quart-zite et en roche dure à grain fin sont issues de blocs et galets prélevés localement. Au sein de l’assem-blage en silex barrémo-bédoulien, la majeure partie des pièces comporte les traces d’un traitement ther-mique (fig. 13 D), seules quelques lames et lamelles en silex blond ne sont pas chauffées.

Cette série lithique est composée de 102 lames et lamelles, d’éclats, de nucléus, d’esquilles et de débris. Les lames en silex blond non chauffé ont été obtenues par percussion indirecte, les lames et lamelles en silex blond et gris chauffé ont été pro-duites par pression. Les mensurations moyennes des lamelles en silex blond chauffé sont de 1 cm de large pour 0,24 cm d’épaisseur. Les produits laminaires et lamellaires en silex blond non chauffé (au nombre de 9) et en silex gris chauffé (au nombre de 2) ont été importés sous forme de produits finis ou semi-finis, alors que les lames et lamelles en silex blond chauffé ont sans doute été produites sur place à partir d’im-portations de nucléus semi-coniques préformés et traités thermiquement et/ou de nucléus quadrangu-laires plats évoluant vers un type semi-conique en cours de débitage (fig. 13 D, n° 31). Les deux nucléus lamellaires en silex blond bédoulien chauffé, décou-verts sur le gisement ont été repris pour une produc-tion d’éclats. Cette production domine (120 pièces), et presque toutes les matières premières reconnues ont été employées, sauf le silex blond bédoulien non chauffé et le silex gris bédoulien chauffé. Dans cet

329

8e RMPR (Marseille 2008) — Actualité de la recherche

assemblage, 81 pièces ont été transformées. Les pièces en silex barrémo-bédoulien ont été privilé-giées. De même, les lames et lamelles (au nombre de 44) sont plus souvent transformées que les éclats (au nombre de 31). La série est dominée par 32 pièces à retouches latérales abruptes ou semi-abruptes (fig. 13 D, n° 26 et 27), par 13 grattoirs sur lames ou éclats, et par 11 burins surtout sur éclats (fig. 13 D, n° 24) et dans deux cas sur lame et lamelle. On retrouve 8 outils composites mixant des burins et/ou des troncatures et/ou des retouches latérales (fig. 13 D, n° 28). On note également la présence de 7 pièces appointées sur lame(lle)s et éclats (fig. 13 D, n° 23 et 29), de coches, de perçoirs (fig. 13 D, n° 21), de pièces esquillées. Les armatures de flèches sont représentées par 5 pièces, lorsque le support a pu être déterminé, il s’agit d’un éclat. Deux sont des armatures tranchantes, les trois autres sont losan-giques (fig. 13 D, n° 22 et 25).

Cet ensemble homogène présente quelques particularités reconnues dans les assemblages lithiques de la phase récente du Chasséen en Lan-guedoc oriental par V. Léa (2004a) de plusieurs gisements héraultais, comme à Lattes. La série est dominée par des importations de produits en silex barrémo-bédoulien originaires du Vaucluse. Avec d’une part des nucléus préformés et traités thermi-quement en silex blond qui ont été majoritairement utilisés pour les diverses phases du débitage sur le gisement (lames et lamelles puis éclats) et, d’autre part, des lames robustes en silex blond non chauffé et des lamelles, en silex gris chauffé, parvenues sur le site consommateur sous forme de produits finis ou semi-finis. Le reste de la série d’éclats ayant été produite à partir de matières premières dispo-nibles à proximité. Les pièces transformées (lames à retouches latérales, lames appointies, armatures de flèches, etc.) peuvent également relever d’une phase récente du Chasséen.

Le macro-outillage (meules, broyeurs, polis-soirs, lissoirs) est bien représenté, et témoigne d’activités diverses. L’étude en cours (C. Hamon) permettra d’enrichir l’étude de chrono culturelle et environnementale.

Le Néolithique final

Roquessols à Valros (Hérault)

Le site de Roquessols est implanté dans la plaine du Bas Languedoc, sur le versant d’une petite émi-nence qui culmine à 70 m d’altitude et à proximité

d’un ruisselet. L’intervention archéologique menée en 2007 a concerné une superficie relativement modeste (5600 m2), mais riche en vestiges archéolo-giques (fig. 7). Les fouilles ont révélé l’existence d’une petite occupation du Néolithique final d’affinité vérazienne, matérialisée par un ensemble de fosses, structure de combustion et silos, contenant de nom-breux restes anthropiques, notamment de torchis et de céramique. Ces témoins structuraux et mobiliers apparaissent liés à la proximité directe d’un habi-tat. La communauté qui a occupé ce site pratiquait une économie de production agropastorale comme en atteste la présence de restes carbonisés d’orge nue et, en quantité moindre, d’orge vêtue ainsi que de trois types de blé : amidonnier, engrain et blé nu. L’étude archéozoologique des restes de faune montre la pratique d’un élevage centré sur les bovins et les ovicaprins (moutons et chèvres), les porcins, vrai-semblablement domestiques, ne jouant quant à eux qu’un rôle secondaire (travaux V. Forest).

Les productions céramiques

La série est homogène (fig. 14 F) ; d’un point de vue technique, il s’agit d’une céramique peu fragile, qui semble « bien cuite ». Dans les pâtes, l’utilisation d’un dégraissant végétal, issu de glumes et glumelles de céréales, est très largement majoritaire sans être toutefois systématique. Les profils des vases sont généralement continus à fond souvent surbaissés. Les préhensions sont assurées par des languettes bilobées ou superposées verticalement par deux, par des boutons ou par des anses en ruban peu déga-gées. Un vase à profil tronconique et fond aplati porte une rangée de préhensions alternant boutons et languettes disposés horizontalement sous le bord. Une languette large adopte un bord régulièrement festonné. Les formes à carènes vives sont absentes. Les cordons horizontaux sont présents, mais géné-ralement uniques (fig. 14 F, n° 4), doubles dans un seul cas. Les grands vases à cordons superposés à plus de trois exemplaires sont absents. Les bols et les vases ouverts de petit volume adoptent par-fois un profil galbé, et ils portent fréquemment des décors composés de deux ou trois lignes horizon-tales de pastilles réalisées au repoussé (fig. 14 F, n° 2 et 3). Un petit vase ovoïde portant une ligne d’inci-sion horizontale en « coups d’ongle » (fig. 14 F, n° 1) est identique à un exemplaire trouvé au Puech Haut (Carroza, 2006). Les languettes, souvent bifides, sont le moyen de préhension le plus commun sur les grandes jarres, mais elles ne sont jamais superpo-sées à plus de deux exemplaires. Les anses en ruban sont également présentes.

330

G. Loison et al. — Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault

Cet ensemble typologique de Roquessols se rattache à une phase moyenne du Néolithique final datée entre 2900 et 2700 av. J.-C. Il pré-sente de fortes affinités avec les séries issues des fouilles récentes de l’A75 et de l’A750 : Champs-Redon, Vigne de Bioaux (phase 2) et Rec de Ligno à Valros, Cabrials à Béziers, le Puech-Haut (phase 2) à Paulhan ou encore le Lagarel (phase 2) à Saint-André-de-Sangonis (Georjon, 2007).

L’industrie lithique

Elle est très peu représentée, les seules pièces remar-quables sont une pièce en plaquette de Salinelles façonnée par retouches bifaciales semi-couvrantes à couvrantes et une pièce bifaciale entièrement retouchée sur un éclat issu d’un galet en silex céno-manien (fig. 7, n° 1, 2 et 3). Cette faible représenta-tion de l’industrie lithique s’inscrit tout à fait dans le schéma connu par ailleurs en Languedoc à cette

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Figure 7 — Roquessols à Valros, situation générale, fosse dépotoir, industrie lithique.

331

8e RMPR (Marseille 2008) — Actualité de la recherche

période. Précisons qu’aucune pièce métallique ni aucune trace d’activité métallurgique n’ont été mises au jour sur ce site.

Vigne de Bioaux/Labournas à Valros 

Les vestiges de cette occupation s’inscrivent au sein d’un décapage en continu de plus de deux hectares qui a livré de nombreuses traces agraires d’époque antique. Cette occupation qui se rattachant au Néolithique final de tradition vérazienne est caractérisée par une ving-taine de structures excavées relativement dispersées, fosses et structures de combustion (fig. 8). La plupart de ces aménagements contenaient essentiellement un matériel détritique en position secondaire, cependant deux grandes fosses à logettes ont livré, plusieurs vases de grande taille ornés de cordons superposés et dotés de languettes de préhension. Une petite fosse oblon-gue portant des traces de thermo-rubéfaction conte-

nait les fragments d’un vase portant un décor couvrant composé d’un réseau complexe de cordons sinueux en faible relief (fig. 14 B).

L’aspect particulier de la fouille a été la décou-verte d’une structure quadrangulaire faiblement exca-vée de 4,5 m de long pour 2,5 m de large, dotée d’un foyer et au centre de plusieurs creusements qui peu-vent correspondre à l’emplacement de poteaux de sou-tènement. Une meule et une molette étaient disposées en position fonctionnelle sur le fond de cette structure. Cet aménagement qui reste localement sans équiva-lent semble bien correspondre à une petite construc-tion architecturée de type cabane.

Les productions céramiques

Le mobilier de ce secteur constitue un ensemble homogène (fig. 14 A et B) que l’on peut sans diffi-culté rattacher à la première phase du Néolithique

Y=124050

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Néolithique final

Bronze ancien

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Amt 954

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Amt 954

Amt 832

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Figure 8 — Labournas à Valros, situation générale, fosse de fondation d’une construction (Amt 712), structure de combustion à radier de galets (Amt 954), fosse de stockage avec logettes (Amt 832).

332

G. Loison et al. — Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault

final d’affinité vérazienne (entre 3500 et 2900 av. J.-C.). Parmi les structures fouillées, six ont livré de façon récurrente des décors plastiques compo-sés de cordons horizontaux multiples superposés. Les décors pastillés ou incisés sont par contre tota-lement absents de ce secteur. D’un point de vue technique, les pâtes incluent un dégraissant presque exclusivement minéral associant des éléments sili-ceux (quartz pilés, sables), mais aussi une propor-tion notable d’argilite (probablement de la ruffe, provenant de la région du Salagou) qui donne à la pâte un aspect feuilleté et friable. Les inclusions car-bonatées sont également présentes, mais plus rares. D’un point de vue typologique, ce petit ensemble se caractérise principalement par des récipients épais ovoïdes décorés de cordons souvent superposés parfois associés à des languettes de préhension. Cet

ensemble évoque le Vérazien ancien audois ou le Saint-Ponien. Sa datation est probablement anté-rieure à 3000 av. J.-C.

Champ Redon à Valros

Cette implantation occupe une crête topogra-phique d’époque miocène aux limites des com-munes de Valros et Montblanc. Au sein d’un décapage de 9000 m2, qui a révélé un grand nombre de structures agraires antiques, une ving-taine de structures excavées attribuables à une implantation du Néolithique final ont pu être iden-tifiées et étudiées en détail (fig. 9). Ce sont princi-palement des fosses de formes tronconiques (type silo), subcirculaires ou oblongues (fours), dont

Zone 1

Zone 2

Amt 2067

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= Néolithique final

= Bronze ancien

Amt 2067

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Figure 9 — Champ Redon à Valros-Montblanc, situation générale, fosse dépotoir (Amt 2113), vaste fosse resserre (Amt 2067).

333

8e RMPR (Marseille 2008) — Actualité de la recherche

les profondeurs avoisinent parfois 1,5 m avec des volumes qui peuvent atteindre plusieurs mètres cubes. Outre les traces de thermo-rubéfaction sur le fond et les parois de certaines fosses, l’analyse des remplissages a révélé la présence quasi systé-matique de nombreux petits blocs chauffés issus de vidanges de structures de combustion ainsi que de nombreux fragments de terre malaxée indurés par le feu.

De plus, deux imposantes fosses subrec-tangulaires ont été mises au jour, l’une mesurait 5,5 x 4,50 m et l’autre 5 x 2,50 m pour chacune 0,90 m de profondeur. Elles possédaient, dans leurs comblements supérieurs, de lourds blocs et dalles de molasse en partie effondrés indices d’une construction interne. Ces structures, qui probablement possédaient un dispositif de cou-verture, ont servi pour le stockage, comme l’indi-quent les trois vases entiers découverts en position fonctionnelle au sein de logettes creusées dans le sol. La présence de ces artefacts céramiques et macrolithiques ainsi que l’analyse des comble-ments inférieurs nous amène à considérer que ces aménagements devaient servir de resserre. Des constructions de type similaire ont été observées aussi bien en contexte fontbuxien que vérazien (Jallot, 1992).

La distribution spatiale des structures de ce site est relativement lâche et son organisation indiquerait une occupation de type habitat isolé.

Les productions céramiques

La série céramique de Champ Redon montre clairement deux phases d’occupation dis-tinctes. La première, à laquelle cinq structures au moins (Amt 11, 15, 1002, 1024, 2026) peu-vent être rattachées, correspond à une petite occupation du début du Néolithique final, datée entre 3500 et 2900 av. J.-C. Elle se caracté-rise par une céramique à dégraissant exclusi-vement minéral qui semble encore s’inscrire dans la tradition technique chasséenne. D’un point de vue typologique, la variété des formes est importante, compte tenu de la petite taille de la série. L’ensemble de la production a géné-ralement en commun des profils continus avec des fonds souvent surbaissés, voire aplatis. Les profils ovoïdes sont dominants, mais les formes cylindriques ou à profil galbé existent égale-ment. On note la présence d’une écuelle caré-née dotée d’un bouton sur la carène. Le registre décoratif semble quant à lui se cantonner à des cordons superposés horizontaux. Les préhen-

sions sont presque exclusivement assurées par des languettes qui peuvent être associées à des cordons. Cette première phase présente des affi-nités évidentes avec les ensembles Saint-Pono-vérazien audois et héraultais : grotte du Poteau à Saint-Pons (Rodriguez et al., 1989), grotte de Resplandi (Marsac, 1990), Le Mourral à Trèbes (Vaquer et al., 2003), mais aussi avec le faciès « Mort des ânes » (Gascó, 1980) — dit du Néo-lithique récent régional — ou encore la phase 1 du site de Lagarel à Saint-André de Sangonis dans l’Hérault (Georjon, 2007). Plusieurs sites de l’A75 ont également livré une céramique com-parable : Vigne de Bioaux (phase 1), Montferrier ou encore Labournas à Valros.

Au moins quatre structures (Amt 2067, 2081, 2098 et 2113) appartiennent à une occu-pation plus récente datée entre 2900 et 2500 av. J.-C. Cette seconde phase se caractérise d’un point de vue technique par l’emploi en propor-tion importante de dégraissants végétaux dans les pâtes céramiques. Il s’agit presque toujours de chaumes de céréales broyés. D’un point de vue typologique, les formes restent majoritairement à profil continu et fond fréquemment surbaissés, mais les profils segmentés existent sur de petites écuelles carénées. Les vases plus larges que haut dominent très largement la série. Les profils peuvent être ovoïdes, cylindriques, tronconiques inverses ou presque sphériques. Si l’on excepte les cordons doubles associés à des préhensions, les décors de cordons superposés ont disparu. Les décors de pastilles réalisés au repoussé sont par contre fréquents sur les vases de petit et moyen volumes. Ils sont généralement disposés en deux lignes horizontales superposées. Les languettes constituent toujours le moyen de pré-hension le plus commun. Celles-ci sont fréquem-ment superposées par deux et parfois bilobées. Des boutons, parfois superposés, des anses en oreille perforées, en ruban funiculaire ou encore en bobine sont également attestés.

On note sur ce site, mais aussi plus lar-gement sur d’autres sites de la même période (Roquessols et Barreau de la Devèze-Cabrials) une tendance à l’exclusion entre les décors pas-tillés et les décors composés de cordons mul-tiples superposés. D’un autre point de vue, technique celui-là, si quelques vases conservent un dégraissant exclusivement minéral, l’utilisa-tion d’un dégraissant végétal composé de tiges de céréales est très majoritaire ; la présence ou non de ce dernier et sa fréquence le fait apparaître comme un marqueur chronologique au sein des assemblages du Néolithique final régional.

334

G. Loison et al. — Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault

Cabrials à Béziers (34) : une petite sépul-ture mégalithique et collective en « allée couverte »

Ce coffre dallé enterré présentait une surface interne de 1,5 m par 0,7 m et une hauteur d’environ 1 m (fig. 10). On accédait à la chambre par une fosse

accolée à son petit côté nord-ouest, qui correspond à un couloir embryonnaire. Cet accès et la chambre étaient séparés par une dalle amovible appuyée sur deux piliers. Cette tombe concerne une vingtaine de défunts, dont les inhumations ont été espacées dans le temps et remaniées. Le mobilier était principale-ment composé d’un grand vase de stockage (fig. 10, n° 1) et de quelques outils en silex. Cet ensemble

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20cm

1

0 10m

Figure 10 — Cabrials à Béziers, situation générale, la tombe mégalithique en cours de fouille et le vase reconstitué (1).

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8e RMPR (Marseille 2008) — Actualité de la recherche

funéraire se rapporte à l’horizon ancien du Néoli-thique final : 3200 à 2900 avant notre ère (Tchéré-missinoff et al., 2008).

Le Bronze ancien

Le Pirou à Valros (34) : une petite unité domestique de la fin du Bronze ancien

Les importants décapages nécessités par l’étude du site chasséen ont révélé la présence de vingt excava-tions rattachables au début de l’âge du Bronze. La majorité de ces structures s’apparentent à des fosses à profil tronconique, de type silo, mais d’autres types ont également été reconnus, parmi eux une fosse, qui aurait servi au grillage de glands, et une structure de combustion oblongue. Ces témoins qui s’inscrivent sur une aire d’environ 6000 m2 présen-tent une relative dispersion, notamment les fosses de type silo, toutefois on note une certaine concen-tration dans la partie sud-ouest du décapage.

Au fond d’une fosse silo, a été découverte une sépulture individuelle. Il s’agit de l’inhumation pri-maire d’un adulte déposé au sein d’une construction en matière périssable de type coffre, de 64 cm de côté, attestée par d’évidents effets de paroi. Préci-sons qu’une meule dormante en basalte ainsi qu’un fragment de coquille marine en forme de lunule portant un début de perforation accompagnaient ce dépôt. Une datation radiocarbone de cette sépul-ture indique qu’elle s’inscrit dans le 17e siècle avant notre ère, correspondant à la fin du Bronze ancien. S’il peut paraître vraisemblable que ces structures — dont le plus grand nombre n’ont pu être datés que par quelques rares éléments céramiques pré-sents dans leur contenu — puissent témoigner d’une implantation de type domestique, la rareté des rejets nous incline néanmoins, à ce stade de l’étude, à modérer cette interprétation. La série céramique, très réduite, se compose de fragments de jarres à cordons digités, de fonds plats et de tasses carénées.

Le Barreau de la Devèze-sud

Ce secteur, qui comme nous l’avons vu, a été marqué par une occupation du Néolithique moyen, com-porte également des vestiges du début de l’âge du Bronze (fig. 6). Parmi ceux-ci, onze structures, de répartition hétérogène, se rapportent à cette der-nière période. Elles se composent de fosses en cuvette, contenant au sein d’un comblement unique un mobilier abondant constitué presque exclusive-

ment de rejets de céramique, témoins d’une fonction de dépotoir (fig. 6, Amt 2050) et de silos, dont un de grande taille. L’analyse stratigraphique de ce dernier montre un recreusement de la structure. Son com-blement est constitué de fragments de céramiques, de macro-outillage, de restes osseux de faune ainsi que d’ossements humains épars.

Dans la partie ouest du site, une petite concentration de creusements subcirculaires à profil tronconique correspond à des fonds de silo arasés ou à des fosses dépotoirs. Ici, le mobilier est beau-coup moins abondant. Toutefois, deux aménage-ments comportent les restes de plusieurs individus inhumés. Une de ces fosses semble avoir été aména-gée à des fins exclusivement funéraires, elle contient les dépôts successifs de trois individus, la dernière inhumation présente un dispositif plus complexe avec dans une moitié de la fosse un aménagement de blocs de calcaire qui conditionne la position du défunt. Le second aménagement funéraire est inter-prété comme un fond de silo réutilisé en espace funéraire. Les études anthropologiques sont en cours (travaux en cours, C. Giraud et Y. Tchérémis-sinoff).

Les productions céramiques

L’étude préliminaire de l’assemblage céramique, montre une prédominance de grands récipients à fond plat, à paroi segmentée ou à profil sinueux. Les décors sont majoritairement constitués de cordons appliqués bien dégagés situés sur la partie supé-rieure du vase et portant des impressions digitées. Le cordon est disposé le plus souvent horizontale-ment au point de segmentation de la panse et du col auquel se rattache parfois un autre cordon en guir-lande. Ce mode de décoration est caractéristique de la phase récente du Bronze ancien rhodanien. Parmi les moyens de préhension, l’anse en ruban domine et à un moindre degré les languettes horizontales. Ces dernières sont occasionnellement situées dans le prolongement de cordons lisses à section triangu-laire. Les récipients de plus petite taille comportent plus rarement des décors comme des lignes d’impres-sions de coups de poinçon ou des digitations sur la lèvre (lèvre à cupule). Les pâtes incluent un dégrais-sant exclusivement minéral parfois très dense, fin à grossier, constitué de sable détritique cristallin ou de matière pilée carbonatée. La couleur des pâtes et des surfaces est le plus souvent brune à grise.

Ces premiers éléments typochronologiques permettent de préciser que la période d’occupation du Barreau de la Devèze sud se situerait à la phase terminale du Bronze ancien (Roudil, 1972 ; Voruz,

336

G. Loison et al. — Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault

1996). L’étude en cours des différents éléments mobiliers devrait apporter plus de précision sur la nature et sa durée.

Rec de Ligno à Valros 

Sur un petit espace de 250 m2 a été mis au jour un petit groupe de structures funéraires tout à fait remarquable (fig. 12) qui comprenait un coffre

enterré de forme rectangulaire, constitué de grandes dalles de calcaire ainsi qu’au moins trois fosses sépulcrales (Gleize et Loison, à paraître). Si le coffre de pierre ne contenait les ossements que d’un seul individu, inhumé en espace vide, les fouilles des fosses ont, quant à elles, livré les restes de plusieurs squelettes (fig. 15 A). L’étude archéo-anthropolo-gique de ces derniers a mis en évidence le fait que dans chacun des cas le dépôt primaire d’un individu était associé à des ossements d’un ou deux autres

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0 25m

Amt 1003

Amt 1003

N

Figure 11 — Barreau de la Devèze-Cabrials à Béziers, situation générale, la vaste fosse (Amt 1003) en cours de fouille.

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8e RMPR (Marseille 2008) — Actualité de la recherche

sujets déposés secondairement, ces derniers étant toujours situés au même endroit dans la tombe. L’analyse de ces dépôts a ainsi permis d’identifier des gestes particuliers (réduction, vidange) et de discuter de la réutilisation de ces emplacements funéraires. L’étude taphonomique a montré que dans ces fosses, les corps et les ossements ont été déposés au sein de contenants en matière périssable de type coffre ou coffrage (fig. 15 A). L’ordonnance-ment de cet espace funéraire présente des similari-tés avec notamment les sites de la Céreirède à Lattes

dans l’Hérault (inédit), des Julliéras à Montdragon et des Gouberts à Gigondas, dans le Vaucluse (Tché-rémissinoff, 2006).

Les résultats des datations isotopiques prati-quées sur trois d’entre elles attestent que ces dépôts s’inscrivent à 95 % de probabilité dans une fourchette comprise entre 2150 et 1900 avant notre ère, confir-mant leur appartenance au début du Bronze ancien.

L’opposition entre le fonctionnement de ces trois fosses et de celui du coffre permet de s’interroger sur la place des différentes structures et leurs liens au sein

0 50m

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Bioturbations Bioturbations

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Amt 2097

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Amt 2013

Néolithique final

Bronze ancien

A

B

Figure 12 — Rec de Ligno 2 à Valros, situation générale, coupe stratigraphique du comblement détritique d’une fosse de type silo (A) et organisation de l’espace funéraire (B).

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G. Loison et al. — Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault

40-1

Le Pirou à Valros

Montferrier à TourbesRec de Ligno à Valros

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Barreau de la Devèze-sud à Béziers

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12 13

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5 cmEch. céramique Ech. lithique

3 cm

3 cm

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Figure 13 — Les industries du Néolithique ancien et moyen.

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8e RMPR (Marseille 2008) — Actualité de la recherche

A

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Labournas à Valros

Labournas à Valros

Roquessols à Valros

Champ Redon à Valros, Montblanc

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Barreau de la Devèze-Cabrials à BéziersMontferrier à Tourbes

3 cm

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3 cm

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16

Figure 14 — Les industries du Néolithique final.

340

G. Loison et al. — Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault

de l’espace funéraire. Ces sépultures ont connu un cer-tain nombre de perturbations, le coffre a été rouvert et le squelette a subi des manipulations. De même, deux fosses (Ens 9 et Ens 11) ont été remaniées. Ce type de pratiques n’est pas un fait isolé en contexte bronze ancien

(Loison, 2003), mais faute d’élément datant, il est difficile d’en préciser l’origine. Toutefois, ces interventions sem-blent postérieures aux dépôts et, en raison de l’absence de mobilier, il n’est pas interdit de penser qu’elles puissent être liées à des récupérations d’objets métalliques.

Figure 15 — Tombe en coffre et fosse sépulcrale du Bronze ancien, outil en os (A), fragments de pichets à décor de type barbelé (B et C), fragments de jarres à cordons digités (D).

5cm5cm

A

B

C D

Rec de ligno 2 à Valros

Rec de ligno 2 à Valros Barreau de la Devèze-sud à Béziers

Champ Redon à Valros-Montblanc

10cm

0 0,50 m

0 1m

0 1m

Individu A

Co�rage en matériaupérissable

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Amt 3117-Ens 10

Amt 3117-Ens 10

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5cm

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341

8e RMPR (Marseille 2008) — Actualité de la recherche

Le seul mobilier présent dans ce contexte a été découvert dans le coffre, près de l’angle nord-est. Il s’agit d’un objet en os de forme triangulaire dont la partie pointue est en partie altérée. D’une lon-gueur conservée de 6 cm et d’une largeur de 2,5 cm, pour une épaisseur de 1,5 mm, il est confectionné sur une paroi costale de bovin adulte (détermination V. Forest). De plus, il a conservé des traces de polis-sage qui attestent de son utilisation.

À une centaine de mètres plus au sud, en situation isolée, trois grandes fosses tronconiques de type silo ont été également étudiées. Pour deux d’entre elles, leur contenu a livré de nombreux frag-ments de céramique typologiquement rattachables au Bronze ancien (Roudil, 1972 ; Gutherz, 1995 ; Loison, 2003) et notamment ceux de deux pichets carénés à décors géométriques constitués d’impres-sions de type « barbelé » (fig. 15 C). Une datation isotopique situe ces deux ensembles dans une four-chette probabiliste similaire à celle de l’ensemble funéraire (2150-1990 av. J.-C.).

Signalons également que sur le site néoli-thique final de Champ Redon à Valros, une fosse isolée découverte lors du diagnostic avait livré, comme seul mobilier, les fragments d’un pichet caréné mono-ansé à décors géométriques d’impres-sions de type barbelé (fig. 15 B).

Bilan et perspectives

Au-delà de la légitime satisfaction, pour l’en-semble de l’équipe, d’avoir assuré l’étude et la sauvegarde documentaire des nombreux témoins archéologiques menacés par la construction de ce tracé A75, il est intéressant de constater que les données préliminaires, somme des travaux de terrain et des premiers résultats des études enga-gées apportent un grand nombre d’informations nouvelles. Sous divers angles, elles autorisent un renouvellement des connaissances notamment, par leurs approches extensives, sur les modes d’implantations de ces anciennes communautés rurales.

Les décapages conduits sur les différents sec-teurs retenus, couvrant une surface globale de plus de 12 hectares, ont montré que la représentativité des vestiges et leur mode d’organisation étaient très variables d’une période à l’autre. De plus, la majorité des sites reconnus correspondent à des sites ouverts peu développés et de durée réduite, de type hameau ou unités domestiques isolées.

Concernant le Néolithique, la période ancienne, de tradition cardiale, est succinctement illustrée par la fosse de Vigne de Bioaux. Le Néoli-thique moyen 2 est quant à lui bien représenté, sur-tout pour sa phase ancienne, par trois implantations dont la plus importante est celle du Pirou contre une seule pour la phase « classique ». L’analyse détaillée de ces sites, dans le prolongement des découvertes du Crès, doit contribuer à mieux comprendre les processus de mise en place du complexe Chasséen méridional ainsi que son évolution et son mode d’organisation.

Pour le Néolithique final dans son ensemble, les structures sont moins concentrées que pour la période précédente du Néolithique moyen, mais elles sont plus imposantes et quasi systématique-ment présentes sur l’ensemble des secteurs décapés. Ces implantations ne semblent correspondre qu’à de petites unités qui diffèrent des sites de surfaces plus importantes, délimités par des fossés, comme ceux de Roquemengarde à Saint-Pons-de-Mauchiens (Guilaine, 1992), du Puech Haut à Paulhan (Carozza et al., 2006) près du cours de l’Hérault, ou de la Croix-Vieille à Montblanc (Espérou, 1989) dans la moyenne vallée de l’Hérault. Un des premiers inté-rêts de ces découvertes de l’A75 est qu’il permet de mesurer, pour cette période, une réelle densification de l’occupation des sols. De plus la mise en évidence de ces petites unités — qui n’est possible que dans le cadre de fouilles extensives – illustre cette sup-posée complémentarité entre les habitats ouverts et les habitats « fortifiés » attestant une certaine mobilité liée aux pratiques agricoles. Enfin, ces sites présentent un grand intérêt d’un point de vue typo-chronologique, car ils sont autant d’assemblages mobiliers correspondant à des occupations de faible durée et donc à des unités de temps réduites. Avec le complément des analyses radiocarbones, leur étude détaillée devrait contribuer à une meilleure périodi-sation de cette phase finale du Néolithique.

Soulignons également la découverte de la sépulture collective de Cabrials, attribuée à la phase ancienne qui représente un jalon dans l’évolution des tombes de type mégalithiques propre à cette période.

La découverte de vestiges du début de l’âge du Bronze, dans cette zone géographique où les don-nées sont encore rares (Montjardin, 1992), est une heureuse surprise. Les différents vestiges se rappor-tent d’une part, à la phase ancienne, représentée par l’ensemble funéraire du Rec de Ligno et, non loin de là, par des fosses de type silo, et d’autre part à la phase finale, par les implantations du Pirou et du Barreau de la Devèze.

342

G. Loison et al. — Dynamiques d’occupation des sols à la Préhistoire récente dans la basse vallée de l’Hérault

L’analyse des témoins structurels, correspon-dant comme pour ceux de la période précédente à des implantations de faibles importances, à laquelle s’ajoutent les données des sciences naturelles, apporte les précieuses informations sur les schémas d’occupation de ces terroirs.

L’étude des ensembles céramiques issus des fosses de ces diverses occupations, dont certaines comportaient des éléments de pichets à décors d’im-pressions de type barbelé, autorisera, en confronta-tion avec les résultats des datations radiocarbone, la

définition de corpus régionaux de référence. Ceux-ci permettront de mieux définir les évolutions stylis-tiques, en premier lieu comme marqueurs chrono-typologiques.

L’organisation des tombes et les gestes funé-raires reconnus sur l’ensemble funéraire du Rec de Ligno, illustrent le stade de passage de la gestion collective des défunts à l’apparition de la sépulture individuelle, attestant une réelle transformation des modes funéraires au début du Bronze ancien en Languedoc (Gleize et Loison, à paraître).

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