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L. Tedeschi, D. Rabreau (a cura di), L'architecture de l'Empire entre France et Italie. Institutions, pratiques professionnelles, questions culturelles et stylistiques (1795-1815),

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L’architecture de l’Empire entre France et Italie

Institutions, pratiques professionnelles,questions culturelles et stylistiques (1795-1815)

sous la direction deLetizia Tedeschi, Daniel Rabreau

Mendrisio Academy Press /

Sommaire Sommario

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Préface

MODÈLES HISTORIOGRAPHIQUES ET THÈMES DE RECHERCHEMODELLI STORIOGRAFICI E TEMI DI RICERCA

I dispositivi mitici dell’antico e i principi regolatori del moderno nell’architettura tra XVIII e XIX secoloLetizia Tedeschi

L’architecte-artiste. De l’idéologie des Lumières au pragmatisme impérial.Chronologie des symboles (1765-1815)Daniel Rabreau

France-Suisse-Italie. Le concept de transfert artistique appliqué à la période napoléoniennePascal Griener

Discours symbolique de l’ornement sous l’Empire napoléonienOdile Nouvel-Kammerer

LA CITÉ LABORATOIRE, MODÈLES CULTURELS À CONFRONTERLA CITTÀ LABORATORIO, MODELLI CULTURALI A CONFRONTO

La ville est malade. Fondamenti filosofici dell’embellissement urbano: Voltaire, Miliza, CuocoSergio Villari

La grande mutation des couvents sous l’EmpirePierre Pinon

Nuovi spazi per città nuove: Fori, piazze e giardini in Italia durante il periodo napoleonicoGian Paolo Consoli

L’amministrazione dei lavori pubblici nella Roma napoleonica. Uffici, figure, metodi di interventoFabrizio Di Marco

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Nouveaux programmes pour un empire futur. François Léonard Séheult élève de Peyre le jeune en l’an IVJean-Philippe Garric

De l’utopie urbanistique à l’utopie psychiatrique : l’Asile d’aliénés du MansJean-Michel Leniaud

LES VILLES REALISÉESLE CITTÀ REALIZZATE

Passeggi pubblici e circonvallazioni a Milano durante il Regno d’Italia Francesco Repishti

Orientamenti e controllo dell’architettura nei piani di Torino tra Consolato e ImperoElena Dellapiana

Una continuità esemplare: opere pubbliche, linguaggio e protagonisti a Parma tra Ancien Régime e RestaurazioneCarlo Mambriani

Tra Francesco Milizia e Antonio Canova: l’architettura a Roma intorno al 1800Susanna Pasquali

Il Borgo Murattiano di BariFabio Mangone

La ville nouvelle, l’État et les politiques municipales. Architecture publique et urbanisme à Bordeaux de la Révolution à la fin de l’EmpireMarc Saboya

Nantes ou La Roche-sur-Yon : recettes pour un urbanisme réussiAlain Delaval

PAYSAGE NATUREL ET PAYSAGE ARTIFICIELPAESAGGIO NATURALE E PAESAGGIO ARTIFICIALE

Inspiration botanique et jardins sous l’Empire : l’éclosion d’une vision organique du mondeIsabelle Levêque

Architecture italienne en France à l’époque napoléonienne. Une application culturelle exemplaire à Clisson, entre 1805 et 1827, dans le jardin pittoresque du sculpteur François-Frédéric LemotMarie Richard

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«Per scansare l’etichetta». Residenze suburbane e cultura dell’abitare nella Bologna napoleonicaFrancesco Ceccarelli

Osservazioni intorno al Voyage pittoresque de Genève à Milan par le Simplon (1811)Margherita Azzi Visentini

L’ANTIQUE ET LE PATRIMOINE COMME « RESSOURCE »L’ANTICO E IL PATRIMONIO COME “RISORSA”

Francesco Belloni et la naissance de l’art de la mosaïque à Paris sous la Révolution et l’Empire Henri Lavagne

Roma in rivoluzione (1798-1799): il Quirinale, il Campidoglio e la riscoperta del Foro RomanoPier Paolo Racioppi

La scène romaine à l’époque napoléonienne. Une nouvelle cérémonialité ?Martine Boiteux

Du Campo Vaccino au Forum romain : la mise en scène de l’antique à l’époque napoléonienneLuigi Gallo

La scoperta dell’antico a Trieste ed in Istria all’inizio dell’Ottocento: Pietro Nobile archeologoRossella Fabiani

L’Arco della Pace di Milano e la fortuna degli archi di trionfo in età napoleonicaStefano Bosi

LE SYSTÈME DES ARTSIL SISTEMA DELLE ARTI

Quatremère de Quincy e l’ItaliaValeria Farinati

L’architettura in mostra a Roma tra Ancien Régime ed epoca napoleonicaSusanne Adina Meyer

Il Catalogo degli artisti di Giuseppe Antonio Guattani e la promozione dell’architettura nel primo decennio del XIX secolo.Serenella Rolfi Ožvald

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Il Museo Vaticano in epoca napoleonica: oltre la forma settecentescaIlaria Sgarbozza

Gli architetti pensionati delle accademie d’Italia a Roma nel periodo napoleonicoTommaso Manfredi

La bibliothèque de l’architecte Luigi Canonica. Un instrument cosmopolite et son fonctionnementCecilia Hurley

L’Empereur et la réception des arts appliqués : le rôle des journaux entre 1800 et 1815Blanche de la Taille

English AbstractsIndex des noms

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Préface

Les textes réunis dans ce volume dérivent pour la plupart des études entreprisesdans le cadre du projet de recherche Luigi Canonica et la culture architecturale ita-lienne et française à l’époque napoléonienne, projet élaboré en 2006 par l’Archiviodel Moderno de Mendrisio (Université de la Suisse italienne) et par le CentreLedoux-Université de Paris 1 Panthéon Sorbonne, en collaboration avec l’Écoledoctorale Cultures et transformations de la ville et du territoire-Section Histoire etconservation de l’objet d’art et d’architecture de l’Université Rome III, dont les pre-miers résultats ont donné lieu au volume Luigi Canonica (1764-1844). Architetto diutilità pubblica e privata, sous la direction de Letizia Tedeschi et de FrancescoRepishti, publié en 2011, et au numéro monographique (105, 2011) de la revue «Ricerche di Storia dell’arte » consacré à La « construction » d’un style. Architectureentre l’Italie et la France à l’époque napoléonienne. Publications auxquelles s’ajoute-ra, en 2013-2014, un dernier volume, focalisé sur ce thème. Ce projet de recherche,précisons-le dès maintenant, a joué le rôle d’un catalyseur de différentes perspec-tives critiques et de divers intérêts historiographiques liés, sous bien des aspects, authème en question, comme en témoignent les essais qui suivent.Cette publication a par conséquent le mérite de relancer cette problématique et decontribuer à fédérer des chercheurs d’horizons divers, spécialistes de la périodeimpériale en France, en Italie et en Suisse, ou qui n’envisagent plus d’aborder l’artde la fin de l’Ancien Régime sans englober les résultats d’un sentiment de régéné-ration due à l’action des Lumières, de l’époque de la Révolution à la fin de l’Empire.C’est sur l’enjeu de cette périodicité unitaire d’une cinquantaine d’années, de 1765à 1815 environ, que s’impose désormais une histoire culturelle, politique, sociale,idéologique, économique et esthétique qui doit approfondir l’approche stylistiqueformelle dont on a abusé jusqu’ici, parfois en arrêtant le XVIIIe siècle en 1789, sou-vent en abordant les débuts du XIXe en termes de rupture. Or, si l’évaluation desinstitutions artistiques fondées autour de 1800 – Muséum, Conseil des Bâtimentscivils, Commissioni d’Ornato, Institut et École des Beaux-arts, écoles d’ingénieurs

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E etc. – connaît aujourd’hui un approfondissement certain grâce aux publications d’ar-chives inédites, les études thématiques détaillées et l’approche monographique desartistes, architectes et ingénieurs, accuse encore des déficits de connaissances trèsregrettables (notamment sur le rôle précis des grands architectes de l’Ancien Régimeencore actifs sous l’Empire). On doit donc admettre qu’il existe des défaillances dansle domaine historiographique en italien comme en français puisque les approfondis-sements les plus récents à cet égard témoignent d’un caractère fragmentaire problé-matique et se focalisent sur des aspects ou des singularités qui s’avèrent loin d’êtreuniques dès qu’on privilégie – comme c’est le cas en l’occurrence – la portée d’uneculture architecturale française hégémonique qui gagne peu à peu, à la suite des suc-cès napoléoniens, l’ensemble de l’échiquier européen, affirmant du même coup desmodèles architecturaux spécifiques. Le sens même de cette publication en découle,celle-ci étant motivée par la confirmation de l’exigence d’une mise à jour élaboréed’après une méthodologie appropriée de la compréhension, où les édifices pourronteux-mêmes se révéler comme des initiatives originales et déterminantes de cette nou-velle culture et de cette nouvelle société.D’autant plus que l’historiographie italienne et française ne pouvait se vanterd’avoir récemment fourni des apports susceptibles d’entraîner des lectures tout àfait inédites et à même de cerner les difficultés qui n’ont pas encore été révélées,difficultés que l’on a d’ailleurs laissées en suspens, eu égard au complexe horizonthématique mis au jour jusqu’à présent. Même si, naturellement, des progrès signi-ficatifs n’ont certes pas manqué, fussent-ils sporadiques ou ponctuels, au point demettre en évidence les problématiques les plus significatives qui sont apparuesdans les deux littératures historico-critiques. Progrès que l’on peut donc rappelerd’une manière exemplaire afin d’éviter le simple compte rendu historiographique.Une tâche qui risquerait au demeurant de se traduire par une mise à jour biblio-graphique incomplète.Il y a plus d’un quart de siècle, Werner Szambien, publiant la première monogra-phie sur J.-N.-L. Durand (Picard, Paris 1984), le grand théoricien-pédagogue de lapériode, a au moins fait progresser d’une manière décisive la connaissance de l’ar-chitecture de la période révolutionnaire, anticipant plusieurs publications, actes decolloques ou catalogues d’exposition, auxquels il participa lors des commémora-tions, en 1989, de la Révolution française. Il faut retenir quelques initiatives impor-tantes, dans le domaine de la prospection d’archives enfin publiées ou d’étudessérielles qui, dans les décennies qui viennent, permettront ces développementsd’une curiosité interprétative qui a manqué jusqu’ici. Parmi ces sources, on doitsaluer un livre fondamental : Pierre Fontaine, Journal. 1799-1853 (Paris, Ensba-IFA-SHAF, 1987), ainsi que la publication en ligne sur le site de l’INHA à Paris(http://www.inha.fr/spip.php?rubrique358), par Françoise Boudon et une équipedu Centre André Chastel (CNRS-Université Paris IV) des archives du Conseil desBâtiments civils (CONBAVIL) et, sur le même sujet, la thèse de doctorat en coursd’Emmanuel Château sous la direction de Bruno Foucart (Université Paris-IV).Parmi les études thématiques, il revient à Jean-Philippe Garric, d’avoir publié oulancé de nombreuses études et rééditions scientifiques de témoignages sur les rap-ports entre la France et l’Italie dans le premier tiers du XIXe siècle (Recueilsd’Italie. Les modèles italiens dans les livres d’architecture français, Mardaga,

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Sprimont 2004 ; Charles Percier et Pierre Fontaine, Palais de Rome. Palais, maisonset autres édifices modernes dessinés à Rome. Présentation par Jean-Philippe Garric,Mardaga, Wavre 2008) ; côté italien, un colloque a concrétisé l’apport des étudeslocales à la connaissance du rôle des Napoléonides dans l’architecture officielle dela période (Les maisons de l’Empereur. Residenze di Corte in Italia nell’étà napo-leonica, Lucca, janvier 2004, Rivista Napoleonica, 10-11, 2004-2005). Un volumede réflexion critique et de récupération des documents sauvegardés dans le cadreinternational italien et romain correspond notamment à ces études, en mettant l’ac-cent sur le front historiographique italien et en se concentrant sur une période spé-cifique qui va de 1750 à 1810, avant d’aborder la décennie suivante : Contro ilBarocco. Apprendistato a Roma e pratica dell’architettura civile in Italia 1780-1820,sous la direction d’Angela Cipriani, de Gian Paolo Consoli et de Susanna Pasquali,publié en 2007 à l’occasion de l’exposition du même nom qui se déroula àl’Accademia Nazionale di San Luca à Rome (19 avril-19 mai 2007). À l’École doc-torale de l’Université de Rome III, en collaboration avec l’Archivio del Moderno,Valeria Mirra a effectué et soutenu en 2011 une thèse intitulée Un’impresa cultura-le e commerciale : la Calcografia Piranesi da Roma a Parigi (1799-1810), qui a mispour la première fois au jour le transfert de la chalcographie Piranesi à Paris et lerôle que Francesco Piranesi a joué dans cette ville au cours de ces années crucialespour la « construction » du style Empire. Certains résultats de cette étude ont étépubliés depuis dans le dossier susmentionné de la revue « Ricerche di Storiadell’arte ». D’autres apports indirects, à même d’enrichir la relecture critiquecontemporaine de l’échange fécond entre les cultures italienne et française àl’époque napoléonienne sont aussi issus d’études comme les volumes Dal mito alprogetto. La cultura architettonica dei maestri italiani e ticinesi nella RussiaNeoclassica, sous la direction de Nicola Navone et Letizia Tedeschi (Edizionidell’Accademia di architettura, Mendrisio 2004), et La cultura architettonica italia-na in Russia da Caterina II a Alessandro I, sous la direction de PiervalerianoAngelini, Nicola Navone et Letizia Tedeschi (Mendrisio Academy Press,Mendrisio 2008), où est notamment décrite la figure de médiateur culturel inter-national qu’était l’architecte du tsar Paul III, Vincenzo Brenna.Ces nouvelles références, avec les pistes renouvelées qu’elles introduisent ou susci-tent – notamment au plan méthodologique – rendent à peu près caduques “l’his-toire stylistique” de l’Empire, telle qu’elle avait été élaborée en France dans la lignéede deux des plus fameux historiens de l’art du milieu du XXe siècle : LouisHautecœur et Pierre Francastel. Le premier, dans son Histoire de l’architecture clas-sique en France, tome V, Révolution et Empire 1792-1815 (Picard, Paris 1953), pen-sait avoir bien ciblé le passage du XVIIIe au XIXe siècle avec la notion dePréromantisme dont les grands thèmes, sur la nature, la régénération et le sublime,notamment, permettaient une commode “transition” entre l’esprit des Lumières(concept qu’il ne valorise guère) suivi du chaos révolutionnaire et de la remise enordre des valeurs sûres de l’Empire à l’industrie naissante. Dans l’introduction dece volume, Hautecœur rappelle l’évolution des formes de l’art « dans les années1785 » où un esprit « déjà romantique » contrebalance l’anticomanie effrénée de lafin de l’Ancien Régime. Il s’autorise donc à traiter, dans un tiers du livre, parexemple de l’art des jardins et des architectes visionnaires, Boullée et Ledoux actifs

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E depuis les dix dernières années du règne de Louis XV, comme des prolégomènes dela spécificité du style Empire. Ni la symbolique, ni l’idéologie – évolutive, depuisl’architecture révolutionnaire jusqu’à la chute de Napoléon – n’apparaissent éclai-rer l’origine des nouvelles institutions, le lancement et le devenir des programmesédilitaires, les profils de carrière des maîtres d’œuvre ou les fluctuations du goût etde la mode, ancrés dans la vie sociale, politique et économique du temps. À l’in-verse, Pierre Francastel, dans son livre maintes fois réédité, Style Empire, duDirectoire à la Restauration (Larousse, collection Arts, styles et techniques, Paris1939), estimant paradoxalement que « La Révolution eut, sans doute, davantage unaspect économique que politique ou idéologique », identifie essentiellement le styleEmpire à une production d’art décoratif et de mobilier, produit de luxe d’uneindustrie meilleur marché que l’artisanat passé, et propre à satisfaire cette bour-geoise profiteuse qui, sans vrai goût ni forme d’idéologie exprimée, détient le pou-voir. Pour cet auteur, d’obédience marxiste, le passage du XVIIIe siècle au XIXesiècle est celui du règne des idéologues suivi par la tyrannie des « profiteurs ».Napoléon n’a qu’à suivre et Francastel conclut : « L’Empereur a fourni à la Franceune volonté extérieure d’ordre et de puissance, non les éléments constitutifs d’ungoût nouveau » – de ce point de vue, dit-il, le triomphe officiel de l’anticomanien’est qu’une revanche du XVIIIe siècle ! Chez ces deux auteurs, l’analyse plastiqueet typologique des œuvres, comme la connaissance approfondie des éléments quirelèvent de l’imitation de l’Antiquité, n’offrent qu’un aspect répétitif confinant auponcif. Plus convaincants étaient alors les écrits pionniers de Mario Praz qui voyaitdans l’Empire l’apogée du Néoclassicisme – question évidemment à nouveau débat-tue, sinon mise en cause, aujourd’hui !Du point de vue de l’historiographie, le style Empire a donc toujours posé problè-me. Pourtant, dans le domaine de l’histoire de l’urbanisme, un récent colloque apermis de confronter les recherches les plus diverses dans les champs de la théo-rie, du projet, de la pratique et de l’art, d’une manière comparative bien inédite quienglobe l’expérience de la capitale face aux exemples provinciaux et à ceux desvilles conquises : Autour de la ville de Napoléon, (La Roche-sur-Yon, 2004, Pressesuniversitaires de Rennes, Rennes 2006). Le sujet est inépuisable et, par exemple,les réflexions ici consignées par Alain Delaval dans sa comparaison entre Nantes(le grand port de l’époque des Lumières) et La Roche-sur-Yon (ville neuve del’Empire), nuancent pour la première fois certains mécanismes de l’art urbain dansune perspective politique, certes, mais surtout idéologique, culturelle et, bien sûr,économique. D’autres travaux pionniers, comme ceux d’Isabelle Levêque, renou-vellent la connaissance de l’art du végétal appliqué, non seulement au progrès dela science de la botanique, mais à l’imaginaire de la nature qui s’illustre dans lacréation de jardins très diversifiés, de parcs, d’arborétums, et de promenades quisont du goût de l’Empereur. Le rôle des expositions dans le renouvellement desthèmes consacrés à l’Empire doit aussi être souligné ; témoins, sur le sujet de lanature, celle qui traitait de L’Impératrice Joséphine et les sciences naturelles(Malmaison, 1997), ou, sur un autre sujet, la symbolique de l’ornement, l’exposi-tion L’Aigle et le Papillon. Symboles du pouvoir sous l’Empire (Paris, Musée desArts décoratifs, 2008), conçue par Odile Nouvel-Kammerer. Cet auteur reprend iciune synthèse des thématiques portées par l’idéologie impériale qui éclaire l’usage

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de la référence antique dans l’actualité politique. D’autres sujets, comme l’attituded’architectes français en formation par rapport au modèle italien (le NantaisFrançois-Léonard Séheult), l’évolution de la fête républicaine vers le cérémonialnapoléonien (à Rome, 1798-1814), l’adaptation pragmatique des biens nationauxdans le cadre du développement de l’édilité monumentale, le renouveau d’uneforme d’art appliqué, la mosaïque, inattendue à Paris durant cette période, etc.,sont autant de sujets qui détaillent des aspects isolés ou trop ignorés jusqu’ici, etque ce volume réunit dans l’expression d’une méthode approfondie, des plus pro-metteuses. La réception des arts appliqués, notamment, s’observe à travers lesjournaux dans lesquels, à partir de la chronique de la vie artistique, s’inscrivent lapublicité pour l’art manufacturier français et l’éloge du goût directement favorisépar Napoléon Ier. La dimension culturelle de l’art impérial, qui s’expose ici sans lamoindre ambiguïté, suscite des nuances qu’ignorait l’approche de l’histoire stylis-tique : censure et propagande obligent ! Blanche de La Taille résume ainsi le résul-tat d’une réflexion sur les attendus symboliques de l’art officiel : « L’ornementdevient au “peuple” ce que l’Architecture est à Napoléon : vitrine de ses préoccu-pations, de son pouvoir et de ses moyens ». La lecture croisée des articles, auxsujets si variés, devrait tracer des perspectives nouvelles dans la reconnaissanceidentitaire de l’art de la période impériale ; qu’il s’agisse de l’art de cour ou desproductions plus utilitaires de l’aménagement de l’espace et de la mode ; qu’ils’agisse d’une expression, enfin reconnue, des mœurs parisiennes, provinciales ouultramontaines.Pour conclure, à la lumière de ce que nous venons de rappeler, un besoin urgentde nouvelles « lectures » se fait sentir, telles que, par hypothèse, une analogie méta-phorique entre le comportement architectural exercé par le croisement entre laculture architecturale française et italianisante et ce qui est exposé dans un célèbreessai de Jurij Michajlovic Lotman sur le « comportement » quotidien du révolu-tionnaire décembriste.Si l’on poursuit cette analogie métaphorique, une expression scandaleuse de l’archi-tecture se manifesterait ainsi de plus en plus, avec l’Empire, dans le cadre italien etfrançais, expression qui d’une part se décline en des ornements éphémères et en denouvelles interventions sur le bâti, en lignes droites et autres rectifications urbanis-tiques qui entrent sans cesse en concurrence avec l’ouvrage précédent, dans un butnon seulement fonctionnel mais aussi représentatif et par conséquent manifestementthéâtral, et qui heurte d’autre part, quand elle construit ex novo, le style classique enenfreignant inopinément sa grammaire et par la même en modernisant et en enri-chissant son lexique avec des inconnues que l’on ne prévoyait pas. De sorte que cequi est remis en question par cette image comparative entre l’attitude décembristeselon Lotman et cette activité architecturale de formation récente peut conduire àune inversion de perspective, en ce qui concerne l’architecte d’état Luigi Canonicanotamment. Dès lors, celui-ci n’est plus perçu – comme il l’a été – comme un pro-tagoniste d’une bourgeoisie d’entrepreneurs modérée qui le situe sur des positionsmoins hardies par rapport au jacobin ou révolutionnaire Antolini, mais comme uninterprète conscient de nouveaux paradigmes. Par exemple, l’analyse ponctuelle ducontexte ou du site où il faut intervenir donne libre cours à un rapport dialectiquerésolument moderne, à une constante recherche pour chacun des projets, si diversi-

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E fiés qu’ils soient, où Canonica se voit requis par les diverses « charges » qui incom-bent à son rôle d’architecte national, de surintendant général et enfin d’architecteroyal d’un panorama complexe comme peut l’être le Milan de Beauharnais, de four-nir des solutions aussi opportunes qu’économiques, sans renoncer pour autant auxinférences spectaculaires. C’est-à-dire, sans renoncer, dirions-nous aujourd’hui, à ladéfinition, dans la mesure du possible, d’un skyline significatif et fonctionnel quipasse avant la raison d’État, mais aussi au confort et par conséquent aux multiplessollicitations de la « vie moderne » et aux exigences qui s’imposent sur la scèneurbaine et sur les scènes suburbaines adjacentes. Exigences qui se manifestèrent àtravers l’aménagement du nœud controversé du Forum Bonaparte, et en particulierà travers des constructions comme les Arènes, ou sur des territoires qui condition-nent des cadrans topographiques entiers comme le complexe de la villa et du parcde Monza.À une idée nouvelle et de plus en plus précise de l’architecture viennent s’ajouterde nouvelles compétences et de nouvelles professions pour affronter efficacementl’actualité en revendiquant l’injonction voltairienne selon laquelle « la ville estmalade ». Ce qui contribue à reconnaître en Luigi Canonica un interprète de lamodernité non moins à l’avant-garde que d’autres architectes italiens ou françaisde sa génération. Interprètes possibles de l’affirmation montante et très actuelled’un style Empire que l’on peut lire, à l’instar de Lotman, comme un démarquagepolitisé du « manuel de savoir-vivre linguistique » du classicisme.

Les contributions qui suivent sont donc redevables, à plusieurs titres, au débat quel’on a illustré jusqu’ici dans les grandes lignes, ainsi qu’à l’apport du Colloqueinternational d’études consacré à La culture architecturale italienne et française àl’époque napoléonienne : aspects stylistiques et architecturaux, qui a eu le mérite derelancer cette problématique et de donner concrètement le départ à de nouvellesétudes. Ce symposium s’est déroulé sur deux sessions, respectivement à Ascona età Rome – la première session au Centre de séminaire de Monte Verità, à Ascona,du 5 au 8 octobre 2006 ; la seconde à l’Académie de France-Villa Médicis et àl’Institut suisse de Rome, du 4 au 6 octobre 2007. Nous remercions enfin, pour sonsoutien décisif à cette dernière session du symposium, Marc Bayard, chargé de mis-sion pour l’histoire de l’art à l’Académie de France à Rome, ainsi que ChristophRiedweg, directeur de l’Institut suisse de Rome, pour avoir agréé notre propositionet avoir ainsi permis à ce dernier acte du colloque de se réaliser emblématiquementà Rome.

Letizia Tedeschi Daniel RabreauDirectrice de l’Archivio del Moderno Directeur du Centre Ledoux