12
Edité par Marc-Olivier Gonseth, Bernard Knodel, Yann Laville, et Grégoire Mayor Musée d’ethnographie, Neuchâtel · Suisse

Le discours des images: l'exemple de la photographie de skateboard à Tokyo

  • Upload
    unine

  • View
    0

  • Download
    0

Embed Size (px)

Citation preview

Edité par Marc-Olivier Gonseth, Bernard Knodel, Yann Laville, et Grégoire MayorMusée d’ethnographie, Neuchâtel · Suisse

Hors-champs Eclats du patrimoine culturel immatériel

sous la direction de Marc-Olivier Gonseth, Bernard Knodel, Yann Laville et Grégoire Mayor

Exposition 03.11.2012 - 20.10.2013

SOMMAIRE

HORS-CHAMPS

Cadrer l’immatérielMarc-Olivier GONSETH, Yann LAVILLE, Grégoire MAYOR et Bernard KNODEL

EXTRAPOLER

Hors-champ et arrière-plan: l’impliqué!et!l’impliciteFrançois NINEY

Trompe-l’œil cinématographique: l’inscription!paradoxale du!hors-champ!dans!le!champAlain BOILLAT

CLASSER

Du «blanc des cartes» au noir de la projection: le!cinéma!comme!cartographie du mondeTeresa CASTRO

Travelling sur les processus d’exclusion dans l’inventaire des traditions vivantes en Suisse: enjeux et raison d’un (out)castingFlorence GRAEZER BIDEAU

COMBLER

Du «patrimoine horloger» comme écranHervé MUNZ

Le discours des images: l’exemple de!la!photographie de skateboard à!TokyoJulien GLAUSER

4

10

16

44

50

62

106

112

120

154

160

Les publications accompagnant l’exposition Hors-champs ont été réalisées avec le soutien de La Loterie Romande et de la Société des amis du Musée d’ethnographie (SAMEN)

Edition : Marc-Olivier Gonseth, Bernard Knodel, Yann Laville et Grégoire Mayor Rédaction textes : Audrey Doyen, Marc-Olivier Gonseth, Yann Laville, Grégoire!Mayor,

Christelle!Mora Rédaction légendes : Audrey Doyen, Bernard Knodel, Christelle!Mora Traduction : Katharina Bösiger Boukar, Marie Deer, Molly Elizabeth Anne Reid Couverture : «Heavy» Jeaurs et Regula Tschumi Photographie : Alain Germond, © MEN, sauf mention contraire Concept graphique : Nicolas Sjöstedt et Jérôme Brandt Mise en pages : Atelier PréTexte Neuchâtel Relecture articles : Roland Kaehr Impression : Imprimerie Juillerat & Chervet SA, St-Imier

Tous droits réservés

© 2013 by Musée d’ethnographie 4, rue Saint-Nicolas CH-2000 Neuchâtel / Switzerland

Tél: +41 (0)32 717 8560Fax: +41 (0)32 717 8569 [email protected] www.men.ch

ISBN 978-2-88078-039-5

ESTHÉTISER

Des mots en graphes: temps de pause sur les derniers chasseurs inuitPhilippe GESLIN

Hors-champs: genèse de l’affiche de l’expositionRegula TSCHUMI

IMITER

Politique du hors-champ ou les yeux de l’ananasFrédéric LAMBERT

Dame à l’antique avec lance et bouclier: Helvetia!et!ses!déclinaisonsGianni HAVER

ENTRETENIR

Champ et hors-champ archivistique: autour!d’une!ancienne!exposition du!Musée!d’ethnographie!de!NeuchâtelVanessa MERMINOD

Le musée et le politiqueFrançois MAIRESSE

168

208

216

228

262

274

284

306

316

Chapitre 3

160 Hors-champs | Julien Glauser

Chapitre 3

Hors-champs | La photographie de skateboard à Tokyo 161 GLAUSER Julien. 2013. «Le discours des images: l’exemple de la photographie de skateboard à Tokyo», in: GoLM (éds.), Hors-champs, pp. 160-167. Neuchâtel:!Musée!d’ethnographie.

Julien GLAUSER

Un tableau ne peut jamais rendre directement le goût ou le parfum d’un fruit, le contact ou la texture d’une chair, ou la note qui dans la voix du nourrisson fait jaillir le lait du sein de la mère. Pourtant le langage comme la peinture donnent de ces faits des représentations symboliques parfois si convaincantes qu’elles suscitent des réactions proches de celles provoquées par les stimuli originaux. L’artiste est très habile et si le spectateur possède la même culture que lui, ce dernier peut suppléer ce qui manque dans le tableau. L’écrivain comme le peintre savent que leur rôle consiste à fournir au lecteur, à l’auditeur ou au spectateur des signes dont le choix est dicté par leur pertinence à l’égard, non seulement des événements décrits, mais surtout du langage implicite et de la culture de leur public. (Hall!1971:!104)

Partant du constat d’Edward T. Hall et de la profusion d’images fixes et animées que produi-sent les skateurs 1 depuis les débuts de ce sport, j’aborde ici la production de photographies chez les adeptes tokyoïtes du street, pour appréhender l’information qu’elle véhicule. A!travers le visible, ce qui est représenté, mais surtout l’invisible, le hors-champ, le praticien interprète ces clichés et les met en perspective à l’aune de ses connaissances. Pour donner corps à mes propos, j’aborde le cas de la «scène tokyoïte» comme l’appellent les skateurs de la capitale japonaise. Il est donc question de comprendre ce que disent les images paradig-matiques que la pratique ne cesse de produire et quel écho elles trouvent chez ceux qui les reçoivent. Je m’arrête à dessein sur la photographie, vecteur important de la communication, qui, avec les vidéos, fondent et réaffirment constamment le groupe 2. Les questions princi-pales s’articulent donc autour de ce que les images véhiculent chez ceux qui ont appris à les lire et de leur manière d’agir sur la pratique et la scène, offrant ainsi un accès à l’imaginaire vécu – et incorporé – que partagent les streeteurs de Tokyo.En considérant la pratique photographique des skateurs de rue, le spectateur se rend rapide-ment compte que des angles de vue particuliers et une certaine composition se répètent et donnent une grande place à l’environnement urbain. Ce constat préalable renvoie aux propos de Carole Anne Rivière (2006: 124), pour qui «[l]a photographie est toujours le résultat d’un

1 J’utiliserai ici les anglicismes de skate et skateboard comme deux synonymes pour parler de la planche à roulettes, celui de skateurs, pour désigner les acteurs et celui de skater pour le verbe traduisant la pratique. Par analogie je parlerai de streeteurs et de street pour qualifier la pratique de rue.

2 Cet article se fonde sur mon travail de doctorat mené à Tokyo entre 2006 et 2008 et soutenu en mai 2012 (Glauser 2012).

LE DISCOURS DES IMAGES: L’EXEMPLE DE!LA!PHOTOGRAPHIE DE SKATEBOARD À!TOKYO

choix volontaire, d’un tri de la perception qui résulte d’un choix plus ou moins conscient par lequel on fait exister un découpage de la réalité plutôt qu’un autre. Ce qui est photogra-phiable traduit des normes sociales plus ou moins explicites selon les contextes.»Le skateur, le photographe et le lieu fondent les images du skate et ne peuvent être disso-ciés, puisque la photographie renvoie le skateur à sa propre pratique, elle-même spatialisée. Le!photographe et vidéaste Nakamura Yukihisa 3 aulneprécise que, «dans la photographie, c’est le déclic qui doit suffire pour le tout, l’instant décisif» 4. Il ajoute que c’est la combinaison de la volonté du skateur et du «faiseur d’images» – photo ou vidéo – qui donne sa nature aux visuels du sport. En plus d’une esthétique parti-culière, la notion d’«instant décisif» est primordiale pour l’appréhension des photographies de skateboard, qui doivent permettre de lier une image fixe à l’action dont elle est issue. Le continuum que résument ces clichés s’ordonne ainsi: prise d’élan, décollage, figure – trick – et atterrissage, révélant le mouvement. Celui-ci peut être considéré comme l’élément structurant de la perception des images et des lieux – spots – chez les skateurs. Pour Alain Berthoz (2009: 84), scientifique et philosophe qui étudie le fonctionnement du cerveau, «la perception est toujours action simulée», confortant l’idée que cette pratique induit une appréhension particulière de l’urbain, en termes de spots, constamment (ré)évalués à l’aune des compétences propres à chaque skateur, ainsi qu’à travers les actions de soi et des autres mises en images. Les streeteurs développent une approche spécifique de l’environnement construit, induite par leur «pratique en mouvement». Celle-ci donne lieu à des systèmes de représentation et à une conception du paysage particuliers, incluant tous les sens: la vue à travers les trajectoires et la construction d’images types, le toucher qui absorbe les vibrations et les contacts du corps avec le bâti, l’ouïe stimulée par les bruits des roues, les claquements des planches et les indices sonores qui aident à localiser les dangers – véhicules, piétons, gardes de sécurité et policiers –, mais aussi le goût et l’odorat. Ce dernier est sollicité diffé-remment par la pratique qui conduit les skateurs dans les entre-deux spatiaux aux odeurs d’urine, enfermés entre des grandes voies de circulation routière ou exposés à la poussière. S’y ajoutent les odeurs de transpiration qu’il s’agit de maîtriser après les sessions, avant de rejoindre les autres citadins. Le goût n’est pas en reste puisque les longues heures passées à l’extérieur sont ponctuées d’en-cas de toutes sortes, de «prêt-à-manger» et de boissons achetés en passant dans un konbini 5.Si comme l’affirme encore Alain Berthoz (2009:!84): «percevoir c’est agir», les informations que les skateurs retirent de l’environnement et des images interagissent avec leur pratique et leurs productions picturales. Ce processus insuffle de la vitalité et du renouveau dans le «monde» 6 éclaté du skateboard et génère un regard particulier sur la ville: une ville pratiquée ouvrant à des imaginaires nourris par le street. D’où la troisième grande idée développée par l’auteur selon laquelle «le cerveau n’est pas une machine qui fonctionne en boucle fermée “perception-action”, etc. Au contraire, il s’est développé, au cours de l’évolution, des mécanismes internes au cerveau qui nous permettent de simuler l’action

3 Afin de respecter l’usage, les noms japonais sont écrits dans l’ordre: patronyme suivi du prénom. Ainsi, nous retrou-verons IKENOUE Keita (et non Keita Ikenoue).

4 Entretien réalisé le 24 avril 2008.5 Les konbini (terme dérivé de l’anglais convenience store) sont des supérettes ouvertes tous les jours de la semaine,

24!heures sur 24, disséminées dans tous les quartiers des villes japonaises.6 Cette notion de «monde» est empruntée à Howard S. Becker qui la décrit comme suit: «Avant tout, la métaphore

de monde n’est pas spatiale, l’analyse se centre sur une activité collective quelconque, quelque chose que des gens sont en train de faire ensemble. Quiconque contribue en quelque façon à cette activité et à ses résultats participe à ce monde. La ligne que l’on trace pour séparer le monde de tout ce qui n’en fait pas partie est une commodité pour l’analyse et non pas quelque chose qui existe dans la nature, quelque chose qui puisse être trouvé par l’investigation scientifique.» (Becker et Pessin 2005: 168)

Chapitre 3

162 Hors-champs | Julien Glauser

Chapitre 3

Hors-champs | La photographie de skateboard à Tokyo 163

sans! l’exécuter. Cela!permet la décision, la simulation, le choix, autorisant chacun d’entre nous à avoir une forme de liberté dans ses actions.» Berthoz (2009:! 84). Il éclaire ainsi les propos du skateur professionnel japonais Toeda Yoshiaki qui, dans l’interview publiée sur le site J-Skateboard.com, dit que ce qui lui plaît le plus dans le skate, avant même de pouvoir rencontrer des gens, c’est de glisser 7: «un sentiment que seuls les skateurs peuvent comprendre.» 8 Cette remarque renvoie au long apprentissage physique et aux connaissances urbaines et sociales qui accompagnent la pratique (Yabe 2004). Ces heures d’entraînement, long travail d’incorporation, lient la connaissance à l’anticipation et permettent de se repré-senter, à partir de l’instant figé, la dynamique qui a engendré une photographie. Sur l’image ci-contre (ill.!1), Hiroki Muraoka exécute un flip, aussi appelé kickflip, figure qui consiste à faire tourner la planche sur son axe longitudinal sous les pieds du skateur. Il s’agit, sur la sculpture, du plan fortement incliné sur lequel nous voyons des traces de roues en bas de l’image. Le cliché est pris au moment où le skateur est entre la détente et la réception de la planche sous les pieds. Il semble suspendu dans l’air, le corps parfaitement positionné pour que l’action soit plausible.Plutôt que de fixer l’instant et de caractériser la finitude, le cas du skateboard tend à montrer que ces images partagées, relevant d’une expérience commune, extraient les skateurs de la «contingence pure» et gagnent un pouvoir informatif et évocateur (Barthes 1980:!52). La!production et la circulation ininterrompue des actions qui légitiment la pratique reflètent alors le développement sportif de chaque sujet photographique – puisque chaque trick accompli appelle le suivant. Roland Barthes utilise le terme latin d’«interfuit» pour exprimer «cela que je vois s’est trouvé là, dans ce lieu qui s’étend entre l’infini et le sujet (operator ou spectator); il a été là, et cependant tout de suite séparé; il a été absolument, irrécusable-ment présent, et cependant déjà différé. C’est tout cela que veut dire le verbe intersum.» (1980:!121) Cette différence, cet arrêt dans l’écoulement du temps, caractérise la prise de vue aboutissant à la création de l’information visuelle. Elle a ce pouvoir d’évocation qui permet aux skateurs d’identifier le déroulement de l’action. «Le poète ne me confère pas le passé de son image et cependant son image prend tout de suite racine en moi. La communicabilité d’une image singulière est un fait de grande signification ontologique.» (Bachelard 2010:!2). Même si le philosophe s’intéresse aux images poétiques, le lien qu’elles créent avec le sujet peut s’appliquer ici. Cet interfuit, l’action ainsi résumée, ouvre sur le dynamisme du groupe où elle vient réaffirmer l’existence du monde du skateboard. Comme le propose encore Gaston Bachelard dans son approche phénoménologique de l’imaginaire poétique, advient dans le cercle de connaisseurs une «transsubjectivité» des images. «Seule la phénoménologie – c’est-à-dire la considération du départ de l’image dans une conscience individuelle – peut nous aider à restituer la subjectivité des images et à mesurer l’ampleur, la force, le sens de la transsubjectivité de l’image.» (Bachelard 2010:!3). Sans pouvoir faire le tour de la question du «départ» des images, pensé ici comme le surgissement d’une perception plus large que la simple information donnée par le cadre d’une photographie, cette perspective montre comment l’incorporation de la pratique est mobilisée pour étoffer le sujet regardé et créer un rapport personnel, sensoriel dans lequel l’imaginaire joue un rôle primordial. Photogra-phies et vidéos de skateboard sont un moteur de la pratique, elles ne se lient pas forcément au souvenir du moment mis en image, comme le ferait un souvenir visuel de l’enfance mais conditionnent le skateur et stimulent son imaginaire. Celui-ci est fortement influencé par les

7 Le verbe japonais suberu (滑る), traduit par «glisser, faire une glissade, patiner, skier, coulisser, déraper», a été adopté pour traduire la notion de faire du skate (Concorde 1990). Ce terme renvoie à la notion francophone de «sports de glisse» et recentre le regard sur le mouvement comme élément de base du skateboard.

8 http://www.j-skateboard.com/interview/ toeda/toeda_English.htm (consulté le 24 octobre 2009).

ill. 1Hiroki Muraoka, kickflip, 25 septembre 2010, quartier d’Asakusa, Tokyo (© Nobuo Iseki)

Chapitre 3

164 Hors-champs | Julien Glauser

Chapitre 3

Hors-champs | La photographie de skateboard à Tokyo 165

figures, celles qu’il maîtrise ou celles qu’il veut apprendre, mais aussi aux spots, qui permet-tent de regarder l’environnement différemment suivant les nouvelles possibilités qu’il ouvre.La photographie du skateur professionnel Yoshiaki Toeda en switch backside smith grind le montre dans une position proche de la perfection, en haut du plan incliné marqué par un muret, il doit donc avoir glissé – grindé – sur une belle longueur en montée. Manifes-tement, le décentrement corporel interdit la pose, le fait qu’il s’agisse d’un cheminement vers le haut ajoute de la difficulté: le skateur doit être plus précis et donner davantage de force afin de rester en équilibre. Son corps est alors plus tendu pour absorber l’ascension. La figure est dangereuse et demande de la précision: Toeda pose un axe de la planche sur l’arrête du muret et maintient l’autre en dessous. La position indique l’effort fourni pour exécuter la figure où tout le poids du corps en mouvement repose sur une petite partie de la planche, pas plus grande qu’un timbre-poste ! La légende vient ajouter une information sur son niveau de maîtrise, le mot «switch» indique que la figure est exécutée à l’envers de son côté de prédilection; comme si un droitier dessinait de la main gauche. Situé sur un grand pont piétonnier à Odaïba, quartier construit sur des polders, ce spot est par ailleurs un marqueur spatial dont la renommée est internationale. Permettant d’y skater la journée, il a accueilli nombre de professionnels du monde entier, véhiculant l’image des murets en brique hors des frontières nationales. En dernier lieu, le travail du photographe a su parfaitement éclairer le sujet et rendre l’ambiance nocturne de la ville, tout en laissant une belle place à la morphologie du lieu, sur lequel le spectateur peut se projeter.Pour Manuela Lienhard (2007:!29), «[…] la photographie donne corps à des événements et permet de les représenter (re-présenter dans le sens de les rendre présents à nouveau) alors que ceux-ci sont passés. Les photographies sont alors non pas seulement des empreintes, preuves de ce qu’elles représentent (rapport indiciaire), mais elles permettent de demander

“qu’est-ce qui s’est passé ?”». C’est bien cette relation à la représentation, ce «rendre présent à nouveau» à l’esprit du skateur par rapport à sa propre pratique qui est déter-minant et qui fait des images un vecteur où l’identification personnelle à la figure et au rapport à l’espace, à travers un lieu précis, devient structurante. Même si une photographie ne représente pas forcément la fois où le trick a été réussi, la position du skateur n’étant pas forcément la meilleure ou le photographe ayant déclenché trop tôt ou trop tard, c’est la probabilité de réussite qui importe. Un cliché publié reflète l’esthétique du trick recher-chée, avec une forte présomption de succès. L’éthique implicite opérant dans le monde du skateboard veut que seuls soient montrées les prises de vue de figures accomplies ne serait-ce qu’une une seule fois. La véracité du mouvement ne se vérifie pas au niveau de la photographie mais repose sur le contrat de confiance qui veut que le skateur ait «remis» son trick au moins une fois, comme il est dit dans le jargon du skate. Des récits de falsifica-tions circulent, dus notamment à la pression de l’industrie qui envoie les sportifs à travers le monde pour produire de l’image, ce qui confirme la force de cette norme. Dans bien des cas, les photographies accompagnent une production filmée qui ne permet guère la manipulation puisque tout le déroulement des figures y est représenté.Dans ce système de communication, les photographies servent souvent à annoncer la parution de vidéos, puisque le processus rédactionnel de publication des magazines est plus rapide que le montage de vidéos, diffusées sous forme de DVD. Les magazines sont les dépositaires d’une norme du sport, ils fixent les standards à travers l’évolution que donnent certains skateurs en vue, face à ce qui se fait aux Etats-Unis notamment. Pour nourrir ces médias et faire évoluer les carrières personnelles, le lien entre le sportif, le photographe et le monde médiatique est primordial. Dans les prises de vue du skateboard, tout le dispositif et les acteurs tendent vers la production de clichés reconnus par le groupe et qui marquent les compétences sportives (figures) et spatiales (originalité du lieu) du skateur. Ces supports imprimés peuvent être considérés à travers une approche sémiotique de la culture que Bernard Cherubini (1995:!84) définit comme «l’étude des systèmes de signes nécessaires à l’autodescription des sujets locaux, qui forment des “textes” donnés à la lecture de la communauté, des étrangers (et de l’ethnologie).» Dans un sens large, le suivi des médias du skateboard donne accès à la sémio-tique du sport, à travers les informations et les visuels qu’ils véhiculent. «Il s’agit d’analyser l’imaginaire social et les pratiques symboliques en étalant l’univers de signes dont se servent les sujets locaux pour décrire leur identité.» (Cherubini 1995:!85) Plus que d’une identité obligatoirement plurielle et qui résiste à l’objectivation ainsi qu’à la généralisation, il est ici question d’identification autour de symboles regroupant une diversité d’acteurs de la scène tokyoïte. Il s’agit de «regarder avec des photographies», puisque chaque image véhicule son lot d’informations objectives et subjectives, répondant à la sensibilité et à la pratique du spectateur, embrayant sur l’échange, catalyseur de la scène (Ito et Okabe 2005:!31). La photo agit également comme repère identitaire et permet la réaffirmation constante de la scène à travers l’évolution du sport, entre image fondatrice et nouveauté par nature évanescente. Les différents supports du visuel servent donc à véhiculer les valeurs communautaires et à diffuser les informations. Comme le propose Michel Agier (2009:!14) dans son approche situation-niste, les images sont alors «épistémè», «ensemble des connaissances réglées (conception du monde, sciences, philosophies…) propres à un groupe social, à une époque.» (Le nouveau Petit Robert 2001-2002)L’identification des connaissances partagées permet d’accéder au hors-champ ou à l’invi-sible, selon le vocabulaire cher à Krzysztof Pomian (1997; 2008), que véhiculent les images. Ainsi, des modèles picturaux deviennent des «sémiophores» dans le sens où les conditions qui font qu’une photographie soit réussie, dans le cadre des adeptes du street, donnent lieu

ill. 2Yoshiaki Toeda, switch backside smith grind, 11 décembre 2007, quartier d’Odaïba, Tokyo (© Nobuo Iseki)

Chapitre 3

166 Hors-champs | Julien Glauser

Chapitre 3

Hors-champs | La photographie de skateboard à Tokyo 167

à des archétypes. Dans ces corpus, deux angles de prise de vue ressortent du lot 9; ils doivent toujours représenter les points de départ et d’arrivée, et s’arrêter sur l’instant essentiel qui renvoie au mouvement dans son entier. Comme les sémiophores agissent sur ceux qui les produisent, les visuels du sport influencent à leur tour la pratique: les moments d’exception résultant d’efforts intensifs, fruits de très nombreux essais et de prises de risques hors du commun, deviennent la norme aux yeux des lecteurs de magazines, des spectateurs de vidéos et des internautes. Ces images accumulées dans les médias du sport rendent l’extra-ordinaire ordinaire et font évoluer la norme du commun des skateurs.La mise en relation particulière de lieux symboliques et de mythes véhiculés par les imaginaires vécus entraine la construction dans cet urbain éclaté d’un système de valeur spécifique aux skateurs. Si, pour Françoise Choay, la ville, entendue comme opposée à la campagne, n’existe plus, à la suite de l’urbanisation qui découle de la révolution industrielle, elle laisse la place à l’urbain qui se généralise sous différentes formes (2006). Ce dernier, dans les processus rapides de transformation qui le touchent, perd de sa signification, celle qui régissait les villes du passé où les changements plus lents intégraient chaque élément construit comme autant de syntagmes dans de nouvelles recompositions. «L’accélération de l’histoire révèle la tare de tout système construit: une permanence et une rigidité qui l’empêche de se transformer et d’évoluer par degrés insensibles, avec facilité, comme tant d’autres institutions non enraci-nées, de la langue à la peinture ou au vêtement.» (Choay 1972:!18). Cette perte sémantique des systèmes construits que dénonce l’auteur laisse la place à d’autres rapports créateurs de sens dont le street est un exemple, à côté d’une multitude de pratiques sportives, culturelles ou artistiques. Ainsi, cet investissement dans une activité qui aux yeux des skateurs est cohérente leur donne la possibilité d’habiter leur environnement, générant un territoire qu’ils partagent en partie à travers des mythes communs, créant une «hyperville» du skate qui dépasse la topographie (Corboz!2000, 2009). Elle arrange les topologies, rompant avec la contiguïté spatiale, à travers un imaginaire vécu partagé. Celui-ci renvoie à la signification philosophique du verbe habiter qui caractérise une manière d’être présent-au-monde, «être-parmi» dans la ville (Paquot 2000:!41). Le terme ville est ici pensé comme réifiant une construction séman-tique de l’urbain diffus, pour lui donner corps et l’ordonner.

9 Les prises de vue sont faites soit au fish-eye – objectif avec une distance focale extrêmement courte, entre 14 et 16!mm et couvrant un angle de champ très grand – soit avec un objectif longue focale, généralement 200!mm.

Bibliographie

AGIER Michel. 2009. Esquisses d’une anthropologie de la ville: lieux, situations, mouvements. Louvain-la-Neuve: Academia-Bruylant.

BACHELARD Gaston. 2010 [1957]. La poétique de l’espace. Paris: PUF.BARTHES Roland. 1980. La chambre claire: note sur la photographie. Paris: Gallimard/ Seuil.BECKER Howard et Alain PESSIN. 2005. «Dialogue sur les notions de Monde et de Champ», in: GAUDEZ Florent, éd.

Les mondes du jazz aujourd’hui. Paris: L’Harmattan, pp.!165-179.BERTHOZ Alain. 2009. «Alain Berthoz». Urbanisme (Paris) 368:!81-88.CHERUBINI Bernard. 1995. «L’ambiance urbaine: un défi pour l’écriture ethnographique». Journal des anthropologues

(Montrouge) 61-62:!79-87.CHOAY Françoise. 1972. «Sémiologie et urbanisme», in: CHOAY F., G. BAIRD, R. BANHAM et al. Le sens de la ville. Paris:

Seuil, pp.!11-30. 2006. Pour une anthropologie de l’espace. Paris: Seuil.CONCORDE. 1990. Dictionnaire japonais-français. Tokyo: Hakusuisha.CORBOZ André. 2000. «La Suisse comme hyperville». Le Visiteur (Paris) 6:!112-127. 2009. Sortons enfin du labyrinthe. Gollion: Infolio.GLAUSER Julien. 2012. Revers de Tokyo, images et imaginaires du skateboard: recherche en anthropologie visuelle.

Neuchâtel: Université de Neuchâtel/Paris: Université de Paris-Est.HALL Edward T. 1971. La dimension cachée. Paris: Seuil. [1re éd. en anglais 1966]ITO Mizuko et Daisuke OKABE. 2005. «Réseaux intimes: contextualiser la relation des jeunes Japonais à la messagerie

mobile». Réseaux (Cachan) 133:!15-43.LE NOUVEAU PETIT ROBERT. 2001-2002. Dictionnaire électronique. Paris: Dictionnaires Le Robert.LIENHARD Manuela. 2007. A travers la lorgnette du don H.: qu’en est-il du photographe au MEN ? Des photographies

du MEN ? Et du MEN vu à travers ses photographies ? Neuchâtel: Université de Neuchâtel.PAQUOT Thierry. 2000. Demeure terrestre: pour une philosophie de l’architecture et de l’urbain. Lausanne: EPFL,

Département d’architecture.POMIAN Krzysztof. 1997. «Histoire culturelle, histoire des sémiophores», in: RIOUX Jean-Pierre et Jean-François SIRINELLI,

éds. Pour une histoire culturelle. Paris: Seuil, pp.!73-100. 2008 [1987]. «Entre l’invisible et le visible: la collection», in: POMIAN Krzysztof, éd. Collectionneurs, amateurs

et!curieux: Paris, Venise, XVIe-XVIIIe siècle. Paris: Gallimard, pp. 15-57.RIVIÈRE Carole Anne. 2006. «Téléphone mobile et photographie: les nouvelles formes de sociabilité visuelles au

quotidien». Sociétés (Paris) 91:!119-134.YABE Tsunehiko. 2004. «スケーターが住む街 · The city where skaters live». 10+1 (Tokyo) 35:!32-33.

Alain BOILLAT, historien du cinéma, professeur ordinaire, Section d’histoire et esthétique du cinéma, Université de Lausanne; président du Réseau Cinéma CH

Teresa CASTRO, chargée de cours à l’Université Sorbonne Nouvelle, Paris 3

Philippe GESLIN, professeur HES, directeur du Laboratoire de recherches en anthropotechnologie EDANA, He-arc Ingénierie, Neuchâtel; professeur associé à l’Université de Neuchâtel

Julien GLAUSER, conservateur adjoint au Musée d’ethnographie de Neuchâtel; membre du Lab’Urba (Paris-Est) et du Gerphau (Paris 8)

Marc-Olivier GONSETH, conservateur du Musée d’ethnographie de Neuchâtel

Florence GRAEZER BIDEAU, chargée de cours à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne – EPFL, Lausanne

Gianni HAVER, professeur associé l’Institut de sociologie des communications de masse, Université de Lausanne

Bernard KNODEL, conservateur adjoint au Musée d’ethnographie de Neuchâtel; chargé d’enseignement à l’Institut d’ethnologie de l’Université de Neuchâtel

Frédéric LAMBERT, professeur à l’Institut français de presse (IFP), Université Panthéon-Assas, Paris

Yann LAVILLE, conservateur adjoint au Musée d’ethnographie de Neuchâtel; chargé d’enseignement à l’Institut d’ethnologie de l’Université de Neuchâtel

François MAIRESSE, professeur au Département de médiation culturelle, Université Sorbonne Nouvelle, Paris 3

Grégoire MAYOR, conservateur adjoint au Musée d’ethnographie de Neuchâtel; chargé d’enseignement à l’Institut d’ethnologie de l’Université de Neuchâtel

Vanessa MERMINOD,!collaboratrice scientifique au Musée d’ethnographie de Genève

Hervé MUNZ,!assistant-doctorant à l’Institut d’ethnologie de l’Université de Neuchâtel

François NINEY, philosphe, enseigne l’esthétique du cinéma à l’Ecole normale supérieure de Saint-Cloud, à la FEMIS et à l’Université Sorbonne Nouvelle, Paris 3

Regula TSCHUMI, ethnologue, Berne

AUTEURS

Ville de Neuchâtel - Direction de la Culture

Hors-champs03 novembre 2012 - 20 octobre 2013

Direction Marc-Olivier Gonseth, avec la complicité de Raphaël von Allmen, Bernard Knodel, Yann!Laville et Grégoire!Mayor

Conception Marc-Olivier Gonseth, Bernard Knodel, Yann Laville, Grégoire Mayor avec la participation de Olivier!Schinz et Regula Tschumi

Recherches documentaires Audrey Doyen, Mélanie Marchand, Christelle Mora

Scénographie Patrick Burnier, Anna Jones et Raphaël von Allmen

Réalisation Raphaël von Allmen et Serge Perret, avec l’aide de Ashleigh Blair et Maxime Fontanaz; Raphaël!Jaccot et Ellen!Whelan; Decobox: Fred!Bürki, Juan!de!Riquer, Bérénice!Baillods

Conditionnement collections Chloé Maquelin, avec l’aide de Marie Bourgnon, Barbara Güimil et Elline Aubert

Collaboration collections Bernard Knodel, Vanessa Merminod, Olivier Schinz

Administration Fabienne Leuba

Communication Valérie Chatelain, avec l’aide de Léa Rovero

Bibliothèque Raymonde Wicky, avec l’aide de Valérie!Bailat

Atelier des musées Marianne de Reynier, Nabila Mokrani, avec la participation de Elodie Ecoffey

Conception lumière Laurent Junod

Réalisation lumière Luc-Etienne Gersbach, avec l’aide de René Meillard

Son Gilles Abravanel, avec l’aide de Thomas!Leblanc et Elodie!Steen

Photographie Alain Germond

Multimédia

Documentation Audrey Doyen, Yann Laville, Grégoire!Mayor, Christelle!Mora

Réalisation Les Ateliers Modernes: Marc Wettstein avec l’aide de Alexandre Mattart et Sébastien!Baudet; Contreforme, Neuchâtel: Samuel!Rossetti, Noémie!Oulevay, Cinzia!Sigg

Site web Contreforme, Neuchâtel: Samuel Rossetti, Noémie!Oulevay, Cinzia!Sigg

Informatique Centre électronique de gestion, Christophe Pittier

Peinture scénique Ashleigh Blair, Ellen Whalen

Peinture Raffaele Bene, avec la collaboration de Mehmet Xhemali, Fehmi Sadiku et Fernando Teixeira

Graphisme Nicolas Sjöstedt

Mise en pages Atelier PréTexte, Neuchâtel: Jérôme Brandt

Traduction Katharina Bösiger Boukar, Marie Deer, Molly Elizabeth Anne Reid

Relecture Olivier Schinz (fra); Petra Koch (all); Ellen Hertz, Victoria Mann (ang)

Montages vidéo

Documentation Silke Andris, Audrey Doyen, Marc-Olivier Gonseth, Yann Laville, Grégoire!Mayor, Christelle!Mora

Réalisation Grégoire Mayor, Alice Sala

Montages sonores

Documentation Yann Laville, Grégoire Mayor

Réalisation Gilles Abravanel

Recherche d’objets Audrey Doyen, Bernard Knodel, Yann Laville, Grégoire Mayor

Menuiserie Menuiserie du service de la Culture: Philippe Joly, Daniel!Gremion, Jonas Pleschberger, avec!l’aide de Fehmi Sadiku

Travaux techniques Angelo Giostra, Mehmet Xhemali

Lettrage Decobox, Neuchâtel

Accueil Sylvia Perret, Lucinda Jurt, Patricia Rousseau

Café Stéphanie Demierre, Filomena Bernardo, Grazyna Comtesse

Cuisine Nabila Mokrani avec l’aide de Claudio Personeni, Eric Sjöstedt

Travaux divers Majed Awa, Mersha Balcha, Jean-Marc Boschung, Malika Boukdir, Mario Melcarne, Antonio!Mourao, Eric Praz, Fehmi Sadiku, N’Diouga Samb, Fernando Teixeira

Affiches et carte d’invitation

Graphisme «Heavy» Jeaurs, Regula Tschumi

Impression affiches F4 Sérigraphie Uldry, Hinterkappelen

Impression affiches A3, cartons Juillerat & Chervet, Saint-Imier

Cartes postales et MeMENto Imprimerie des Montagnes SA, La Chaux-de-Fonds

Panneaux routiers Sérigraphie Uldry, Hinterkappelen; Atelier Jeca, Carouge

Impression texpo Juillerat & Chervet, Saint-Imierainsi que les prêteurs ayant souhaité garder l’anonymat et les différents services de la Ville qui nous ont aimablement offert leur appui

Appenzeller Brauchtmuseum, UrnäschMarion Burnier, Alameda, CalifornieAlain Cavalier et Françoise Widhoff, FranceCharim Galerie, ViennePhilippe Geslin, La Chaux-de-FondsYervant Gianikian et Angela Ricci Lucchi, ItalieNamsa Leuba, NeuchâtelHervé Munz, NeuchâtelMusée d’art et d’histoire, Neuchâtel

Musée international d’horlogerie, La Chaux-de-FondsMuseum der Kulturen BaselAtaa Oko, AccraLisl Ponger, VienneJon Rafman, MontréalStan Roehrich, Plan-les-OuatesRoyal Ontario Museum, TorontoRegula Tschumi, Berne

Prêteurs

Nicolas Aliberti, Yverdon-les-BainsSilke Andris, BâleThomas Antonietti, SionAnouk van Asperen, Greenpeace Suisse, GenèveClaudine Assad, Université de NeuchâtelSamuel Bachmann, Museum der Kulturen BaselDimitri Baehler, MallerayBarbey SA, Granges-près-MarnandSamuel Barbey, Granges-près-MarnandLuciano Barisone, Visions du Réel, NyonCarole Baudin, HE-ARC, Le LocleRomain Bessire, SITEL, NeuchâtelBibliothèque de l’Université Laval, QuébecMatthias Borer, Muséum d’histoire naturelle, NeuchâtelNicole Bosshard, Musée international d’horlogerie, La Chaux-de-FondsChristophe Brandt, ISCP, NeuchâtelClaude Briggen, CoffraneRaymond Bula, Pagnot SA, BoudryGaëtan Bussy, HE-ARC, Le LocleCafé-Restaurant des Tunnels «Chez Jacques», La Chaux-de-FondsCentre multimédia de l’Université de NeuchâtelSuzanne Chappaz-Wirthner, SionClub de jeu de quilles neuchâtelois «L’Epi», La Chaux-de-FondsAlain Crettaz, NeuchâtelOctave Debary, ParisZoé Deuel, NeuchâtelFederica Diémoz, NeuchâtelRaphaëlle Donnet, LausanneJoëlle Doyen, SionDaniel Favre-Bulle, La Chaux-de-FondsEsther Ferrari, UrnäschWalter Frick, Kurator des Appenzeller Brauchtumsmuseum, UrnäschGuy Froidevaux, La Chaux-de-FondsMajan Garlinski, GenèveMatthieu Gillabert, Université de FribourgStéphane Goël, Climage, LausanneEllen Hertz, FribourgJean-Frédéric Jauslin, Office fédéral de la culture, BerneJob Eco SA, NeuchâtelValentin Jobin, Cifom-ET, Le LocleStéphanie Kauer, BoudryKurt Kupper, Reuge SA, Sainte-Croix

Christian Larqué, 4Wind, LausanneWalter Leimgruber, BâleKen Lister, Royal Ontario Museum, TorontoDora Luginbühl, Ville de NeuchâtelFrédéric Maire, Cinémathèque suisse, LausanneVincent Massot, ParisSébastien Matthey, XL Bowling, La Chaux-de-FondsMarie-Caroline Maurer, LausanneMedia Markt Marin SAFernand Melgar, Climage, LausanneMemoriav, BerneJulien Moncharmont, LausanneMusée Baud, L’AubersonMuséum d’histoire naturelle, NeuchâtelColine Niess, Musée de la Civilisation, QuébecRachel Noël, ECAL, LausanneMarco Paolini, Ville de NeuchâtelDaniel Pellaton, CernierGuillaume Perret, CormondrècheIsabelle Raboud-Schüle, Musée Gruérien, BullePatrick Rérat, NeuchâtelSerge Reubi, NeuchâtelReuge SA, Sainte-CroixBarb Rice, Royal Ontario Museum, TorontoAlice Sala, NeuchâtelMichel Schlup, La Chaux-de-FondsMaxime Schopfer, Cifom-ET, Le LocleAnna Schmid, Museum der Kulturen BaselFrancis Stähli, La Chaux-de-FondsRaphaëlle Stopin, HyèresCharles Tynowski, Le LocleLucien Tynowski, Le LocleJoël Vacheron, LondresPascale Vialatte, Reuge SA, Sainte-CroixJean-Cyrille Vinsson, Media Markt MarinJean-Charles Vuagneux, La Chaux-de-FondsTricia Walker, Royal Ontario Museum, TorontoThierry Wendling, ParisAdrian Wisler, Museum der Kulturen BaselFanny Wobmann-Richard, BrightonNicola Woods, Royal Ontario Museum, TorontoDelphine Zimmerman, RTS, Genève

Remerciements

Publications du Musée d'ethnographie

Naître, vivre et mourir – Actualité de Van Gennep (essais sur les rites de passage). 1981, 15!x!21!cm, 192!p., 22!ill. ISBN 2-88078-002-3. EpuiséCollections passion. 1982, 15!x!21!cm, 288!p., 86!ill. ISBN 2-88078-003-9. EpuiséLe corps enjeu. 1983, 15!x!21!cm, 180!p., 45!ill. ISBN 2-88078-004-7. EpuiséObjets prétextes, objets manipulés. 1984, 15!x!21!cm, 192!p., 66!ill. ISBN 2-88078-005-6Temps perdu, temps retrouvé – Voir les choses du passé au présent. 1985, 15!x!21!cm, 168!p., 33!ill. ISBN 2-88078-006-3Le mal et la douleur. 1986, 15!x!21!cm, 208!p., 47!ill. ISBN 2-88078-007 -1. EpuiséDes animaux et des hommes. 1987, 15!x!21!cm, 224!p., 40!ill. ISBN 2-88078-009-8Les ancêtres sont parmi nous. 1988, 15!x!21!cm, 120!p., 12!ill. ISBN 2-88078-010-1Le Salon de l'ethnographie. 1989, 15!x!21!cm, 120!p., 42!ill. ISBN 2-88078-012-8Le trou. 1990, 11!x!18!cm, 328!p., 46!ill. ISBN 2-88078-013-6A chacun sa croix. 1991, 11!x!18!cm, 32!p. ISBN 2-88078-014-4Les femmes. 1992, 11!x!18!cm, 336!p., 31!ill. ISBN 2-88078-016-0Si... Regards sur le sens commun. 1993, 11!x!18!cm, 252!p. ISBN 2-88078-017-9. EpuiséMarx 2000. 1994, 11!x!18!cm, 200!p., 1!ill. ISBN 2-88078-019-5. EpuiséLa différence. 1995, 11!x!18!cm, 220!p., 1!ill. ISBN 2-88078-020-9Natures en tête. 1996, 11!x!18!cm, 304!p., 10!ill. ISBN 2-88078-021-7Pom pom pom pom: musiques et cætera. 1997, 11!x!18!cm, 296!p., ISBN 2-88078-022-5Derrière les images. 1998, 11!x!18!cm, 360!p., 44!ill. ISBN 2-88078-023-3L’art c’est l’art. 1999, 11!x!18!cm, 264!p., 36!ill. ISBN 2-88078-024-1La grande illusion. 2000, 16.5!x!23.5!cm, 192!p., 1 fig. ISBN 2-88078-026-8Le musée cannibale. 2002, 16.5!x!23.5!cm, 304!p., 2!ill. ISBN 2-88078-027-6X - spéculations sur l’imaginaire et l’interdit. 2003, 16.5!x!23.5!cm, 272!p., 12!ill. ISBN 2-88078-028-4Cent ans d’ethnographie sur la colline de Saint-Nicolas 1904-2004. 2005, 24.5!x!28!cm, 648!p., 750!ill. ISBN 2-88078-030-6Figures de l’artifice. 2007, 21!x!27!cm, 240!p., 438!ill. ISBN 978-2-88078-031-9La marque jeune. 2008, 21!x!27!cm, 272!p., 549!ill. ISBN 978-2-88078-032-6Retour d’Angola. 2010, 21!x!27!cm, 344!p., 451!ill. ISBN 978-2-88078-034-0Helvetia Park. 2010, 21!x!27!cm, 376!p., 446!ill. ISBN 978-2-88078-035-7Bruits: échos du patrimoine culturel immatériel. 2011, 21!x!27!cm, 336!p., 421!ill. ISBN 978-2-88078-037-1What are you doing after!the apocalypse ? 2012, 21!x!27!cm, 128!p., 75!ill. ISBN 978-2-88078-038-8

Texpo ISSN 1422-8319

Texpo un Marx 2000, 1994, 48!p. EpuiséTexpo deux La différence, 1995, 64!p.Texpo trois Natures en tête: vom Wissen zum Handeln, 1996, 64!p.Texpo quatre Pom pom pom pom Une invitation à voir la musique, 1997, 64!p.Texpo cinq Derrière les images, 1998, 64!p.Texpo six L’art c’est l’art, 1999, 40!p. (version française/allemande/anglaise) Texpo sept La grande illusion, 2000, 48!p.Texpo huit Le musée cannibale, 2002, 64!p.Texpo neuf X - spéculations sur l’imaginaire et l’interdit, 2003, 44!p.Texpo dix Remise en boîtes, 2005, 64!p.Texpo onze Figures de l’artifice, 2006, 48!p.Texpo douze Retour d'Angola, 2007, 80!p.Texpo treize La marque jeune, 2008, 64!p.Texpo quatorze Helvetia Park, 2009, 64!p.Texpo quinze Bruits, 2010, 64!p.Texpo seize What are you doing after!the apocalypse ?, 2011, 64!p.Texpo dix-sept Hors-champs, 2011, 64!p.

Collections du Musée d'ethnographie de Neuchâtel ISSN 1420-0430

N° 1 Marceline de MONTMOLLIN Collection du Bhoutan. 1982, 17!x!24!cm, 96!p., 28!ill. ISBN 2-88078-001-2. EpuiséN° 2 Manuel Laranjeira RODRIGUES DE AREIA, Roland KAEHR, Roger DECHAMPS Collections d'Angola: les signes du pouvoir.

Préface de Marie-Louise BASTIN. 1992, 17!x!24!cm, 224!p.,221!ill., 7!dessins. ISBN 2-88078-015-2N° 3 François BOREL Collections d'instruments de musique: les sanza. 1986, 17!x!24!cm, 184!p., 105!ill., 10!dessins. ISBN 2-88078-008-XN° 4 Yvon CSONKA Collections arctiques. Préface de Jean MALAURIE. 1988, 17!x!24!cm, 216!p., 350!ill., 5!dessins. ISBN!2-88078-011-XN° 5 Roland KAEHR Le mûrier et l'épée: le Cabinet de Charles Daniel de Meuron et l'origine du Musée d'ethnographie à Neuchâtel. 2000,

17!x!24!cm, 440!p., 140!ill., 8!pl. coul. ISBN 2-88078-025-XN° 6 Jean-Claude MULLER Collections du Nigéria: le quotidien des Rukuba. 1994, 17!x!24!cm, 192!p., 171!ill., 10!dessins.

ISBN 2-88078-018-7N° 7 Manuel Laranjeira RODRIGUES DE AREIA et Roland KAEHR Collections d’Angola 2: les masques. 2009, 17!x!24!cm, 240!p., 39!ill.,

55!pl.!coul., 12!dessins. ISBN 978-2-88078-036-4N° 8 Pauline DUPONCHEL Collections du Mali: textiles bògòlan. 2004, 17!x!24!cm, 336!p., 60!ill., 44!pl. ISBN 2-88078-029-2.N° 9 Gaspard de MARVAL et Georges BREGUET Collections d’Indonésie: au fil des îles. Préface de Pieter ter KEURS. 2008, 17!x!24!cm, 408!p.,

60!ill., 137!pl. coul. ISBN 978-2-88078-033-3

DocumentsISSN 1420-1208

N° 1 Jean Louis CHRISTINAT Littérature de ficelle: O Brasil dos poetas. 1995, 16!p. EpuiséN° 2 André LAGNEAU Egypte ancienne. 1995, 32!p.N° 3 François BOREL A fleur de peau. 1991, 24!p. EpuiséN° 4 François BOREL Tuareg: nómadas del desierto. 2004, 40!p.

Avec Hors-champs, deuxième volet d’une réflexion sur le patrimoine culturel immaté-riel développée avec l’Institut d’ethnologie de l’Université de Neuchâtel et plusieurs partenaires helvétiques, l’équipe du MEN aborde le thème de la construction et de l’usage des images en anthropologie. La focale porte en premier lieu sur le dessin, la photographie et le film, dont les apports respectifs furent considérables pour la discipline, mais elle intègre également l’exposition, dans laquelle l’image est construite en trois dimensions et permet une immersion partielle ou totale du visiteur. Dans ces quatre domaines, la mise en scène est une affaire de point de vue, de cadrage, de choix et de délimitation de champs: pour différentes raisons, certaines esquisses sont abandonnées, certains événements restent dans l’ombre, certains rushs n’appa raissent pas dans le montage final, certains objets restent enfermés dans les dépôts. Le!propos suggère par conséquent la mise hors champ qu’entraîne l’exercice d’un point de vue et souligne les relations complexes entre ce qui est révélé par l’image et ce qui reste hors de son cadre. Le parcours de l’exposition aborde différentes modalités qui imprègnent profon-dément les pratiques et les représentations muséographiques: classer les objets et les personnes, évoquer le geste et le corps des absents, esthétiser les objets et les activités humaines, représenter au plus près une réalité toujours fuyante, se remé-morer les acteurs et les événements, voire transcender le banal en provoquant des chocs et des associations d’idées. L’expo sition déploie ces modalités sur trois niveaux de mise en scène contrastés: une approche analogique liée à l’histoire des musées, une!exploration digitale associée au développement des nouvelles technologies et une vision poétique associant l’art et l’ethnographie pour produire une approche critique de la représentation.Explorant la métaphore du froid associée à la congélation patrimoniale ou muséale, l’expo sition aborde également celle du réchauffement proposé par le regain d’acti-vité dans le domaine du patrimoine immatériel. Mais s’il est très présent à travers les missions de Jean Gabus, les allusions à l’expo sition Les Esquimaux hier... aujourd’hui (1976), le film mythique de Robert J. Flaherty Nanook of the North (1922) et diverses expéditions polaires, le Grand Nord n’est qu’une toile de fond, un prétexte pour dérouler la carte permettant d’investir les registres et les niveaux de réalité balisés par les images.