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Moumouni

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  • ASIAN AND AFRICAN STUDIES, 19, 2010, 2, 351-366

    ALCI-IIMIE5 rIA L IS M A N ET SA V O IR M Y STIQ U E EN A FRIQ U E DE ITO U EST

    Seym MOUMOUNI Universit Abdou Moumouni de Niamey,

    IRSFI Bp 318 N iam ey -N ig e r [email protected]

    L'alchimie est donc Icxprcssion d unc culture populaire et informelle, pratique dans des milieux dc gens de mtier (artisans, magiciens, gurisseurs, pharmaciens, etc.) qui n a pas beaucoup attir Iattention des chercheurs africanistes. Dans cette perspective seront analysee ici des rsultats dcs recherches entreprises partir des sources crites et Ies informations recueillies sur Ie savoir mystique, Ia pratique de l alchimie et Ies techniques d elaboration des recettes magiques. Le propos est de montrer travers des donnes disponibles mme partielles, l 'importance de l alchimie dans lhistoirc de l Afriquc au Sud du Sahara. A Ia source de Ia doctrine il ya cette certitude que lalchimie, tant d essence divine, procde de Ia connaissance des prophtes qui en dctiennent Ies clefs et Ies communiquent leurs adeptes. Les alchimistes ouest-africains tout comme Ieur collegues orientaux et ntaghrbins, en s islamisant et s arabisant avaient apportc Ia pratique de lalchimie un nouveau souffle issu de plusieurs civilisations. Ce travail vise identifier travers Ies pratiques anciennes et actuelles Ies perspectives spirituelles de ces pratiques magico-syncrtis tes qui constituaient Ihritage commun de Ia culture religieuse.

    M ots cls : Alchimie, Islam, Mystique, Talisman, Afrique, Manuscrits arabes, Gomancie

    Alchemy, as an expression o f an abstract and popular culture, practised in the underworlds of professionals (craftsmen, magicians, healers, pharmacists, etc.), has not as yet drawn much attention o f Africanist scholars. Making use o f hitherto available data, the aint is to show the importance o f alchemy in the history o f Africa to the South o f the Sahara. Data from written sources and information collected on the mystical knowledge will be analysed to show the practice o f alchemy and the techniques o f development o f the magic formulas.As to the source o f the doctrines it is certain that alchemy, being o f divine essence, proceeds from the knowledge o f the prophets who Iiold the keys to them and communicate them to thcir followers. Like their Eastern and Maghrebian colleagues, West African alchemists, while islamising and arabising themselves, enriched the practice o f alchemy with knowledge coming from different civilisations. The aim is to identify old and current spiritual perspectives for these magico-syncretistic practices constituting the common heritage o f the religious culture.

    Key words: Alchemy, Islam, Mystic, Talisman, Africa, Manuscripts Arab, Geomancy

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  • L alchimie dsigne Ia science ayant pour objet Ies proportions et Ies mesures imparties parmi Ies corps physiques et Ies concepts mtaphysiques, dans l ordre sensible et dans Pordre intelligible. Son pouvoir souverain rside dans Ia transmutation, c'est--dire Ie changement tats qu affecte Ia source unique (al-Layn al-whida). L alchimie est donc une science naturelle, spirituelle et divine. Elle apporte Ia stable harmonie soit par Ia production comme
  • LaKhimie: entre savoir traditionnel et islamiqucDans Ies pratiques locales, Ia relation rituelle un ftiche se laisse sans doute mterprter comme un moyen de relier Ies individus aux ides-forces une collectivit mais n en a pas moins en vue l'au-del de celles-ci. A Ia diffrence du culte des anctres et de certaines divinits lignagres, elle a vocation aider chacun surmonter sa sujtion aux modles traditionnels de comportements, 1idologte et aux representations mentales que son groupe Iui impose. Les pratiques des fticheurs ne sont pas nettement differentes de celles des adeptes d 'autres religions. Des recettes et ingrdients de toutes sortes se retrouvent dans toutes Ies pratiques: objet naturel, crature vivante, objet fabnqu, texte crit ou fix par Ia tradition, image concrete ou reprsentation mentale conforme des normes culturelles, etc. Maintes equivalences et substitutions entre Ies composants traditionnels des ftiches et Ies critures islamiques. Dans Ia magie songhay Ies objets rituels de Gangi koar (gnie des marabouts) sont des versets coramques et de tapis de prire ou des formules islamiques comme Ia basmala: bismillah que Lon trouve dans Ia plupart des paroles des gmes.Il apparait par ailleurs q u en magie islamique une transition s est produite entre un systme de rfrence essentiellement islamique. 11 n ya pas de diffrence essentielle entre un homme qui cherche oprer en profitant de Linfluence des astres et celui qui s entoure dans Ie mme but de signes ou objets appropris. L univers est un rservoir de signes ( ayt) qui manifestent Ia puissance cratrice de Dieu et Ia Sollicitude du Crateur pour Lhomme. Les cieux, Ie soleil, Ia lune, Ies toiles, Ia terre, Ie tonnerre, Ia pluie, Ies montagnes, Ia mer, Ia vgtation, Ies animaux, etc.: tout est donn percevoir non comme des tres et des phnomnes physiques concrets, rnais comme des tmoignages. Il s agit de faire mesurer Lhomme Linflnie distance entre son incapacit produire aucun de ces tres et Ia Puissance ordonnatrice qui, seule, fait exister LUnivers tel quil est. Le discours coranique instaure, donc, un regard de Ia conscience sur Ie monde extrieur. Hn effet, Lhomme est rehauss dans Ia conscience de soi en mme temps qiLil Iui est donn de dcouvrir sa faiblesse face LUnivers. ILhomme est dsign comme Is vicaire de Dieu sur terre (II, 28) ; LUmvers entier est, d une certaine fa90n, mis son service (XIV, 37). Ce privilge traduit une grace {Jad'l) qui, en re tour, exige une reco n n a issan ce (clntkr). La vision du temps de LHistoire spirituelle vient donner un sens cette perception de Lespace. Tout Ie discours c0ran1que rfre trois temps hirarchiss: Ie temps de cette vie immdiate, ou temps court de Ia mise Lpreuve de Lhomme par Dieu; Ie tcmps de Ia mort dont Ia dure est dtermine; Ie temps de Ia Vie ternelle vers lequel est tendue toute Ia cration. La valeur du pass et du prsent de Lhomme dpend strictement de Ieur lien avec Ie temps eschatologique.

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  • Chez Ies Songhay, c est travers Ie nom quil serait plus facile apprhender l me et de nuire. La possession: biya lme d un homme peut tre remplace par d autres principes. Ainsi s explique: Ies Holey ont Ia possibilit de pousser Ie biya hors de certains hommes et de Ia mettre Ieur place. L homme est alors dans une sorte de sommeil, et Ie Iloley est si puissant que Ie corps de Lhomme agit sous Ie commandement de ce maitre temporaire. A Ia mort, Ie biya ne quitte pas tout de suite Ie corps. Il reste aupres du corps en se lamentant Iui-mme sur sa propre m ort.' L me ou biya est un vritable principe spirituel de Ia personne, c'est--dire Ia base de toutes dmarches religieuses, mystiques ou magiques.

    Tres peu d aspects de Ia vie quotidienne chappent aux recours aux pratiques magico-thrapeutiques. Il y a une certaine interaction entre Ia tradition africaine et Ies pratiques musulmanes. Les rapports entre pratique locale et pratique islamique ont conduit terme l adoption de pratiques qui ont t considres comme des b id a (innovation) par certains musulmans. Cela est d certainement Lhntage animiste. Certaines de ces pratiques ont t adoptes et font partie intgrante de Ia tradition magico-thrapeutique musulmane locale. En Afrique, il n ya pas de frontire entre Ie savoir magico-thrapeutique et Ie mysticisme. Les sciences spirituelles (al-ulm ar-ruhmiyya) sont Ia source laquelle s abreuvent Ies praticiens magico-thrapeutiques. Une vie m ystique est compatible avec Lacquisition et Lexercice de pouvoirs magiques ou miraculeux. De cc fait il sc produit en islam une jonction entre soufisme et pratiques magico-thrapeutiques. Le magicien y cntend seulement faire usage de moyens d agir qui Iui ont t accords par Lassemble des saints relayant Ia volont du Crateur. Il se donne un pouvoir prolongeant celui de Dieu et don Ie bon usage Lumt en acte Dieu. Mallam: Haussa, Alfa: Zarma, Ie marabout, est aussi un korte-kom magicien, et mme s il n admet pas Ies danses de possession, il Ies toIre et cherche dcouvrir dans Ie Coran quelque verset qui reconnait Lexistence des gnies. Amsi, Ie zima travaille avec ses gmes et ne refuse pas de faire appel aux Zin, Ndebi ou Tblis, tout en suivant certams rituels islamiques.

    2 ROUCH, J. La religion et Ia M agie Songhay, p. 37.

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  • Fig I : Pratique Iiatl al-raml (trait sur Ie sable)

    Esotcrisme alchimique Chez Uthman Dan Fodio

    Uthman dan Fodio recommande aux disciples Ia pratique du ta 'w i : dgager Ie btin d un texte Zhir tait donc fondamental au t a wil. (la rvlation du texte sacr littral), et tait galement soumis Finlervention divine. Le manifeste al-Zhir dfimt Fensemble de ce qui est perceptible aux sens et Fimagination. Le cach al-btin recouvre Ies ralits perceptibles uniquement travers une me libre des contraintes du corps. Le systme btin est rgi par quatre notions essentielles: btin, ta 'wil, Khss, amin, et takiyya. Le Cheikh utilisa Ia batiniyya dans son ceuvre, comme pomt de dpart de son analyse des limites lgitimes du ta 'wil en gnral. Pour Iui Ie btin reprsentait un monde sotrique de ralits spirituelles caches, parallle Ia ralit du Zhir, Ie monde ordinaire visible, qui Ie masquait et Ie dissimulait. De ce fait, Ie sens apparent (Zhir) n cst que Ie voile du sens cach (btin). La vritable fonction de Fcriture tait attirer Fattention sur ce monde cach, tout en Ie voilant de symboles. La position du Cheikh par rapport au sens cach rejoint celle des crivains sunnites qui utilisent Ie sens apparent des textes dans des analyses thologiques.

    Le Cheikh soutenait que Ie sens propre du btin se trouve dans Ie Coran, accessible un esprit contem platifappropri; il reste prudent sur cette question pour ne pas tombcr dans Ia btiniyya isin 'ilienne. Il admet que tout texte sacr possdait un sens cach, Ie btin, qui tait mis en opposition avec Ie Zhir, non seulement dans des passages parfois mtaphoriques, mais galement dans de symboliques passages historiques, Ies exhortations morales, Ies prescriptions lgales ou rituelles. Dans Fceuvre du cheikh dan Fodio, des lments relevant de Funivers et du corps, sont prsents comme Ie rsultat d une intervention

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  • divine. L umvers et Ie corps n ont de sens que s lls sont en connexion avec Lame. Ici, on entend par me, Lentit spirituelle existant en potentialit, c est-- dire susceptible vo luer ou de se dvelopper travers diffrents niveaux. La religion musulmane comme toute religion fondatrice repose sur ce concept, ou plus bas correspond Ia perception par Ies sens physiques et l imagination Ie plus lev symbolise l ame, code accs Ia ralit inaccessible, sorte intuition rserve une m inont hom m es (al-mahdi, al-m ujaddid...).

    Au XVIIIe sicle, Ia gomancie tait largement pratique en Afrique. Les gens du peuple al-'m m tout comme Llite al-khssa y voyaient une rponse aux problmes de Ia vie quotidienne. Dans Ie lcitb: m r al-albb, Ie Cheikh dsapprouve cette pratique qu il estimait contraire Ia Charia, il tolre nanmoins ceux qui s y adonnent dans Ia cite. En dpit de cette condamnation, nous avons trouv des traces concemant Lart divinatoire dans ses textes. La science des lettres permet analyser Ie pouvoir rel dcs mots en rapport avec Lobjet ou Ia personne nomme. C est une pratique trs rpandue, que Ia diffusion ou Ia connaissance du nom un tiers peut exercer une influence sur Ic nomm, Ie nom donnant en quelque sorte Lessence.

    Le cheikh quant lui, faisait appe! pour trouver une rponse des questions lies son avenir spirituel notamment propos de Larrive de 1 7mm al-Mahdi attendu et celle du mujaddid rapport par ce haditL D ieu envoie cette comniunaut, au tournant de chaque siecle, un hoinnie charg de rnover Ia religionu.

    Dans Ie m anuscrit al-mcihzrt min alnil hurj a l-m a h d i (faits et signes lis Larrive A l-m ahdi) ou Ie cheikh tente de dcouvrir ce secret partir de cette figure:

    Ce hadith ouvre Ie kitcib al-malhn, dans Ie siinna d'Abii D u d , dout Lauthenticit est conteste par certains auteurs Voir, LANDEAU-TASSERON Ella The cyclical reform: a study o f the m uaddid tradition, in E ./, LXXX, p. 79.

  • J j e ,U ^ I ^ ll Ukaj^5

    J Af&5^ *

    4 j d ^ i J

    f > ' j i ] 4U J

    Tableau nl

    Dans Ie mme ouvrage, Ie cheikh aborde Ia question de savoir qui sera Ie rformateur mujaddid du sicle l encore pour expliquer ce mystre, il a dessin Ia figure suivante:

    Tableau n2

    j *i j | &,_____ O___

    J T ^ s ^ s

    J J l s J i ^ j j i i ! J & l l i U 3 & ,

    J a j a j dj L w e .

    J o s ^ D i D U k . D i

    h

    J j & j l l f j> * J *

    O B j aO ia A s

    t f J * '

    I f e< 3 W j k

    j A &

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  • Nous allons essayer d analyser ces deux tableaux de fagon analogique et suivant Ia science des lettres et des chiffres. A chaque lettre de l alphabet correspond un chiffre.

    Tableau 1

    11 - A i J t I l = J c-l l t I l = B j c i l 8 = J ^ ^ , M l = j ^ j ^ M 8 = ^A ^ji15 = fj*' ji! 1 15 =jh^ ji'1 1

    I ableau 2 Niveau A

    13 :::: y^* 113 j*c- t 25 -- ijlAc. i25 = ch v^Q

    Niveau BJj^ll jX*jj iJil 1 iu^ rfc. -

    (Dieu Est notre suffisance, Lui on doit se remettre)

    Al 5^Jl y^iI ^ja^si -

    1 l = yj>j^ \ i 1 1 = B j t - (Je m en remets Dieu)

    Linterprdtation des relations qui existe entre ces lments prcisera l aspect sotrique de Ia chose et permettra de sav01r Ia signification des choses caches avec exactitude, amsi dans Ie tableau 1:

    ] 8 - *tt^ Jji ^ " 18= Jjt-t^D

    11=J c "

    11 = B J c al-M ahc Ii___________________ 11

    11 = A j

    1 5 = ^ * 'jJ ^ ----------------------------------- 15j ^ j j j i

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  • Tableau n 2

    Niveau A

    25- J j ^^_* ] 3 = y*z-

    Uhmn

    U = jAz. 25 A T ^

    Niveau B

    A l t J l I 1 ^ X A J ^ j j ) l l l 1 1 lx il^ w

    Ithuten

    11

    Ces schmas reprsentent une circonfrence et des rayons. Dans Ie prem ier cas, Ie centre reprsente Al-M ahdi et Ies personnages Ies formules qui Bentourent sont Ies rayons. Toutes prennent appui sur Ia circonfrence sans jam ais se sparer elle. Le second tableau, c est identique sau que l, Ie Cheikh Uthman dan Fodio reprsente Ie centre sur lequel s appuient Ies personnages reprsents par Ie mveau A, ensuite par des formules pieuses dsignes par Ie

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  • niveau B. Le recours Ia gomancie serait pour Ie cheikh un moyen dc dmontrer l exactitude de ses propos. Cette manipulation num rologique tablie non seulement Ies relations entre diffrents lments internes un tableau donn mais surtout entre Ies deux tableaux, Ies deux centres Uthman dan Fodio - al- Mahdi.Le trait dunion dsigne sa connivence avec malgr tout ses disciples ceux qui ignorent Ies hadit..j>. Aprs tout. Ie titre de miijaddid serait indispensable (peut- tre mme plus que Ie critre filial) pour tre ou prtendre tre al-Mahdi. Dans tous Ies cas, ici il est question de Ia qute d 'une promotion spirituelle, c est Ia ralit essentielle, Ia finalit de toute voie spirituelle. Ceux qui y parviennent ticnnent un mme langage, celui de Ia perfection, de lamour et de 1'umt.

    Lc talismanLe talisman a pour vertu premiere de protger Lindividu des demons ou tres humains malfaisants; il peut tre port sur soi (amulettes, croissants de lune. gris-gris, etc.) ou bu sous Ia forme d encre ayant servi Lcriture, cLun verset (accompagn de miel). C est Lexpression d une tradition qui relve de Ia mythologie et qu 'on trouve sous diffrentes formes dans Ies cultures africaines. A Ia recherche de satisfaction leurs problmes, Ies croyants ont eu recours plusieurs reccttes qui changent cn fonction de Lefficacit Iieu Ieur mode em ploi. A chaque problme particulier correspond une ou plusieurs formules, avec plusieurs manires diffrentes de Ies excuter. Parnu Ies formulcs, on peut citer: D oitu '; Zikr, Wird, khahva retraite spirituelle, istikra Ia prire; Talisman: amulette ou gris-gris: criture Teau bnite; etc. Dans Ia fabrication Au talisman rentre plusieurs objets: Ie sang, Ie ciiir, Ie papier, Ies feuilles des plantes vgtales, Ie mtal, etc.Il se met consulter Ie ciel travers hatt raml (traits sur Ie sable: fig ...) et cherche Ia position des plantes. Il s'apeipoit que tantt Ia plante dont dpends Ic mtal considr occupe sa position normale tantt s cn carte, drivant en de9a 011 del de son point orbital. Il constate Ie lien alchimique entre l homme et Ie minral travers Ia composition de ce dernier. Le corps mtallique est devenu fer dans Ia masse du mmerai que par Leffet d une proportion dfectueuse entrant dans sa composition. Le lien est tout fait avec Lhomme malade ou malchanceux; Ia recherche de puret des mes individuelles dont Ieur essence se manifeste par truchement des corps naturels, car selon Ibn Arabi, Ia nature est Ie second pre dont Ies mes sont issues Ltat de mlange. Car Ia nature TahVa s apparente Ia mine et l me universelle s apparente aux sphres clestes ayant Ia puissance d agir et de mouvement desquelles rs.ulte Ia mise en action de Ia substance au sein des lments. Le corps mtallique occupe Ia mmc position que Ie corps humain, Ia vertu spcifique khcissiya qui constitue Lesprit de ce corps mtallique occupe Ia mme position que l me

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  • individuelle assigne au corps humain. De mme que Ies mtaux prsentent des degrs distincts en raison des vicissitudes qui Ieur sont survenues au cours de Ieur gense, de mme Phomme a t cr en vue de Ia Perfection. Or seuls Ies maux et Ies maladies survenus soit par suite d accident, soit Porigine mme de son essence Ploignent de cette Perfection.Mallam Ilabibou n en 1950 originaire de Tahoua. Artisan bijoutier traditionnel depuis 1972, a appris Ie mtier d artisan au sein de sa famille. Le travail du fer est une tradition hrit de plusieurs gnrations et se conjugue avec Ia religion islamique. L 'im tiation se fait dans Ie temps partir de quarante ans. Selon Mallam IIabibou4 dans Pesprit de Ia tradition en principe deux personnes interviennent dans Ia fabrication du talisman: Ie marabout et Partisan.- Le marabout dtient Ie savoir magico mystique, il est consult par Ies clients, il reqoit Ies clients et cherchent trouver travers des formules de pnre mystique et recettes magiques des remdes leurs angoisses. Il prpare Ia recette et dtermne dans quelle matire (cuir ou mtal) et sous quelle frome elle doit tre fabrique. C est l q u intervient Ie travail de Partisan (cordonnier pour Ie cuir et forgeron pour Ie mtal). Le marabout confie Ia recette Partisan.- LPartisan recoit Ia recette de faqon anonyme, il ne doit connaitre ni Ie nom du client m Ie problme auquel, il est cens apporter remde. Il confectionne Ie talisman en fonction de Ia demande du marabout. Le m arabout suit de prs Ia fabrication du talisman jusqP Ia finition. Il faut signaler durant tout ce processus de fabrication Partisan ne doit avoir aucun contact avec Ie client. Il y a une relation de confiance entre Ie marabout Partisan. Il appartient enfin au marabout de remettre Ie talisman au client.Alfa Saadou nous explique qu'
  • minerai de fer. Tous Ies fondeurs sont initis aux croyances en relation avec Ieur mtier. Dans Ie m anuscrit intitul maktb swibgat f, Tauteur nous dcrit Ies techniques mtallurgiques: Le Jbndeur se sert du bois pour obtenir du cendre qui sera mlang avec desproduits tels que: Ie inieI et Ie p lom b... . Ce mme manuscrit voque dans un autre chapitre de Ia teinture; dcs produits avec lesquels on fabrique Ies diffrentes couleurs ct indique avec prcission Ia combinaison de chaque couleur.

    La fabrication du talismanLa composition du talisman par Ie marabout (Alfa Zimma) commence par une longue mditation. Cette mditation prendra appui sur des spculations arithmologiques cherchant traduire Ies lettres considres en nombres Ie nombre tant Tesprit de Ia lettre. Les purifications rituelles sont reprises dans Ia prparation de Ia bague Talismanique. Les bagues talismaniques (appels zoob: Haoussa et Korbay: Zarma) se portent aux doigts.

    Fig 2: Le M arabout prpare Ie talisman

    0 M anuscrit n 2304 de Ia bibliotheque des manuscrits M amma Haidara de Tombouctou.

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  • Fig 3: L artisan fabrique Ie talisman

    La bague talismanique est fabrique partir du bronze, sa surface suprieure est revtue d inscription en caracteres arabes, de chiffres, de dessms cabalistiques et de signes mystrieux. Tres rpandue en Afrique de l Ouest, elle est confectionne par Ie marabout et utilise par Ia clientle pour assurer sa protection ou pour atteindre une russite secrete. Elles sont censes tre capables de protger contre des maux tels que Ies maladies ou Ies forces malveillantes et peuvent permettre d obtenir Ia richesse ou Ie pouvoir. De nos jours, elle est utilise grande chelle pour rellement ou prtendument prventr toutes formes de danger, toutes formes de risques. Elle consiste aussi crire des formules de prire avec leurs nombres mystiques sur une plaquette mtallique. L engouement pour Ia bague talismamque s explique par Ie fait que Ie mtal est rput plus propre conserver Ia vertu des charmes. La plupart des rites maraboutiques font appel aux fumigations. Les parfums traditionnels de toute sorte accompagnent Ies recettes de fabrications des talismans.

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    Fig 4: bague talism anique Fig 5: bague talism anique

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  • Y t Y Y t 5

    "~ ~ Y . Y Y Y i

    Y ~ ' " Y r

    iS L C

    C Ja iS L

    i_i C L$

    L5 iJ C Ji

    Tableau 1 Tableau 2

    Le tableau 1 contient l ensemble des lettres qui forment Ie nom Hafiz (le protecteur); Tun des quatre vingt dix neuf noms de Dieu. Le tableau 2 est un carr magique dc chifffes (18 25) par groupe de trois cases en lignes, en colonncs, et en diagonales.

    ConclusionLes origines prcises de Talchimie en terre d islam sont fort mal connues.8 Les sources archologiques, crites et orales permettant de Ie situer dans Ie tempts sont rares. Si en ce qui concerne Ie monde arabe Ia recherche contemporaine a pu foum ir un cerain nombre de repres considrs par Ies spcialistes comme une avance substantielle et un acquis. L exploitation des sources dans ce domaine ne fait que commencer en Afrique avec tout d abord, Ies manuscrits aricains en crire arabe et ajami mais galement avec Ies sources archlogiques et orales. Cette tude est une modeste contribution qui s appuie Ia fois sur Ies sources anciennes et contemporaines. En Afrique, Ia pratique de Talchim ie est ancienne. C est Ia rencontre et Tinterprtation, des pratiques artisans mtallurgistes, des praticiens de sciences occultes et des forgerons qui se transmettaient des procds et recettes techniques. Il ressort de cette analyse que Talchimie est une pratique qui s appuie sur une logique, un systeme intellectuel ordonn et exprim par une pense. Les signes et Ies sujets prsents sont Ie symbole des messages cods provenant du monde cach. La facult interprter ces signes symbolise Ie savoir du divin et son pouvoir, qui rpondait aux besom s et aux conditions sociales africaines et qui explique Tinfluence et Ia diffusion de Talchimie partout en Afrique.

    Al-Asm ' al-lmsn, regroupe Ies 99 plus beaux Nom s de Dieu, m diter et rciter aux grains d un chapelet.8 Lire, Pierrc, op. cit., p.lO.

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