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A. Les principes liés aux droits d’auteur · Les productions immatérielles, ... Les règles actuelles en matière de droit d’auteur doivent être adaptées et complétées pour

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CHAPITRE 22 LES PRODUCTIONS IMMATERIELLES SYNTHESE

Les productions immatérielles, plus particulièrement numériques, aboutissent à développer des valeurs économiques nouvelles qu’il faut encourager mais aussi protéger, dans un univers numérique en plein essor. Les activités économiques intellectuelles sont directement concernées par la dématérialisation qui s’effectue sur les réseaux numériques et peuvent aussi être le support d’une utilisation, d’une reproduction ou d’une représentation d’éléments protégés ou protégeables par le droit de la propriété intellectuelle. Il convient donc de s’interroger sur le droit de la création intellectuelle à l’heure virtuelle ainsi qu’à l’essor d’un droit de l’immatériel. Les difficultés viennent de ce que la fonction initiale du droit d’auteur est de concilier deux intérêts a priori contradictoires : la protection des droits de l’auteur sur ses œuvres, et la diffusion publique la plus large possible de ces mêmes œuvres. I. LES DROITS D’AUTEUR & L’UNIVERS NUMERIQUE

A. Les principes liés aux droits d’auteur L’auteur d’une œuvre de l’esprit détient l’exclusivité de la production, de la publication, de la vente et de la distribution de son œuvre, qu’il s’agisse d’une œuvre littéraire, musicale, cinématographique, ou encore d’un logiciel ou d’une base de données. L’œuvre est en effet protégée quel que soit sa forme d’expression et son support (support numérique par

exemple). Elle donne naissance à des droits d’auteur dès lors qu’il s’agit d’une création de l’esprit originale, même éphé-mère. Pour être protégée par le droit d’auteur, la création doit prendre une forme tangible (comme un support numérique) et être origi-nale, c’est-à-dire être le reflet d’un apport intellectuel fourni par l’auteur. Le droit d’auteur s’acquiert du seul fait de la création, sans aucune formalité de dépôt. Il confère d’une part un droit mo-ral comme le droit au respect de l’œuvre, et d’autre part des droits patrimoniaux.

1. Le droit moral

L’auteur est libre de divulguer ou non son œuvre et choisit son mode de diffusion ; il peut s’opposer à la modification de son œuvre, peut cesser de la diffuser ou la remanier librement. Ces droits personnels sont insaisissables, inalié-nables, perpétuels et imprescriptibles.

2. Les droits patrimoniaux

Ils prennent la forme de droits de reproduction et de représentation. Le droit de reproduction suppose l’accord express de l’auteur. Concernant le droit de représentation, une directive européenne de 2001 stipule que l’auteur a le droit exclusif d’autoriser ou d’interdire toute communication publique de ses œuvres (par exemple, diffusion sur Internet). Cependant, l’exception de copie privée autorise la reproduction pour un usage privée et à des fins non commer-ciales. La copie privée réalisée sous de strictes conditions (copie privée d’un DVD sur une cassette vidéo par exemple) est en effet consi-dérée comme ne portant pas atteinte à l’exploitation normale de l’œuvre et ne causant aucun préjudice injustifié au titulaire des droits.

3. La défense des droits d’auteur

L’auteur bénéficie sur son œuvre d’un monopole d’exploitation. Toute représentation ou toute reproduction intégrale ou partielle (traduction, adaptation, arrangement…) réalisée sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit (héritiers) est illicite. Une personne qui copie une œuvre protégée et la met à la disposition du public (par exemple via Internet) sans l’autorisation de l’auteur commet un acte de contrefaçon. La protection des droits patrimoniaux s’éteint 70 ans après la mort de l’auteur ; l’œuvre tombe alors dans le domaine public et devient librement utilisable. Par exemple, le personnage Peter Pan, créé par l’auteur écossais J.M. Barrie, mort en 1937, est tombé dans le domaine public le 1er janvier 2008.

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B. L’évolution des droits d’auteur dans l’univers numérique

1. Le défi du numérique

Le développement technologique augmente les possibilités de diffusion des connaissances, sans pour autant garantir plei-nement le respect de l’immatériel et sa protection par le droit d’auteur. L’exemple des logiciels peer to peer (ou P2P) permet-tant aux internautes d’échanger des fichiers en contournant le droit d’auteur illustre la difficulté de protéger aujourd’hui ce droit. L’univers numérique permet en effet de reproduire les œuvres sur des supports de plus en plus performants et difficilement contrôlables, rendant possible l’accès aux œuvres en contournant le droit d’auteur et le versement des redevances qui y sont associées. Le droit moral et les droits patrimoniaux rattachés au droit d’auteur s’en trouvent, de fait, affaiblis.

2. La réglementation

Les droits communautaire et français tentent de cadrer juridiquement cette évolution. La législation nationale s’efforce de mettre en place un dispositif de lutte contre le piratage, notamment en sanctionnant le téléchargement illégal. La Haute Autorité de la Diffusion des Œuvres et de la Protection des droits sur Internet (Hadopi), instaurée par la loi du 12 juin 2009, est l’autorité administrative chargée d’alerter les internautes suspectés de piratage. Mais ce système tarde à se mettre en place, car il soulève un problème de proportionnalité entre l’objectif poursuivi, c’est-à-dire la protection des droits des œuvres audiovisuelles, et la sanction, qui requiert l’intervention du juge (obligation rappelée par le Parlement européen). Le Conseil constitutionnel a affirmé de son côté que l’accès à Internet était une composante de la liberté d’expression, et qu’il ne pouvait donc être supprimé qu’après une procédure judiciaire. Le développement de l’immatériel s’accompagne d’objets juridiques nouveaux brouillant les cadres traditionnels et concou-rant au développement d’un droit de l’immatériel. Il en est ainsi des noms de domaine, qui sont les adresses permettant aux utilisateurs d’accéder à un site Web via Internet. Le fonctionnement des sites peer to peer, qui permettent d’échanger des fichiers numériques entre particuliers (« pair à pair »), est quant à lui menacé par une jurisprudence désormais constante condamnant la pratique du téléchargement illégal. II. LE DROIT DES CREATIONS NUMERIQUES

A. Les bases de données

1. Définition

Le Code de la propriété intellectuelle définit la base de données comme un « recueil d’œuvres, de données ou d’autres éléments indépendants, disposés de manière systématique ou méthodique, et individuellement accessibles par des moyens électroniques ou par tout autre moyen ». En vertu de la directive européenne de 1996 définissant son régime juri-dique spécifique et transposée en France en juillet 1998, une base de données est considérée comme une œuvre de l’esprit protégée par le droit d’auteur.

2. La protection des bases de données

Il convient de protéger le producteur d’une base de données ; c’est lui, en effet, qui en a pris l’initiative et qui a investi pour la créer. La base de données est protégée durant 15 ans à compter de l’achèvement de sa constitution ; toute extraction ou réutilisation sans l’accord de son auteur est interdite, de même que la mise à disposition publique de son contenu, même partiel. Toute personne qui viole les droits du producteur encourt des sanctions civiles et pénales.

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B. Les sites Internet Un site Web est un ensemble de documents et d’applications placés sous une même autorité et accessibles par la Toile à partir d’une même adresse universelle. La jurisprudence attribue souvent à son contenu le caractère d’œuvre originale, l’assimilant ainsi à une œuvre protégeable par le droit d’auteur. Il s’agit en effet généralement d’une œuvre littéraire et artistique en raison de son architecture graphique, des textes et de la musique qu’elle contient (ordonnancement des rubriques, des

couleurs, présentation générale…). Si une entreprise permet la collecte de données nominatives, elle doit respecter les dispositions de la loi Informatique et Libertés. III. LA JUSTIFICATION ET L’EFFICACITE DE LA PROTECTION NATIONALE ET COMMUNAUTAIRE

Le point d’équilibre entre les échanges sur Internet et la juste rémunération des créateurs et interprètes reste à trouver : les internautes amateurs de musique ou de cinéma doivent continuer à satisfaire leur passion et ceux qui les créent doivent continuer à en vivre. Le droit d’auteur est protégé tant au niveau national (Code de la propriété intellectuelle et loi Hadopi) qu’au niveau communautaire (direc-

tive du 22 mai 2001 sur l’harmonisation de certains aspects du droit d’auteur et des droits voisins dans la société de l’information). Le cadre juridique harmonisé du droit d’auteur se développe pour améliorer sa sécurité juridique tout en assurant un haut niveau de protection de la propriété intellectuelle. L’objectif est d’encourager les investissements dans des activités créa-trices, pour favoriser la croissance et la compétitivité de l’industrie européenne, et pour sauvegarder et encourager l’emploi. Les règles actuelles en matière de droit d’auteur doivent être adaptées et complétées pour intégrer la réalité économique de la propriété intellectuelle. Il reste cependant à le protéger réellement, car les technologies liées à Internet bousculent les pratiques plus rapidement que ne le fait la loi.