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K-2.STE Alexandra Le Deun

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K-2.

STE

K-2.STEAlexandra Le Deun

16.28 632599

----------------------------INFORMATION----------------------------Couverture : Classique

[Roman (134x204)] NB Pages : 204 pages

- Tranche : 2 mm + (nb pages x 0,07 mm) = 16.28 ----------------------------------------------------------------------------

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Chapitre 1

L’AIGUILLLE ressort de mon bras avec à l’intérieur, un échantillon de mon sang. La ponction veineuse est finit, Mad va aller l’analyser et me ramener les résultats, comme tous les trimestres depuis l’épidémie. Je fronce légèrement les sourcils.

– Ça va ? – Oui… simple réflexe. – J’emmène ça et je regarde comment ça a évolué

depuis la dernière fois. – Je connais la procédure lieutenant. Pourquoi tu

ne détruis pas mon dossier ? Demandais-je. – Il faut que je puisse suivre ton évolution avec, si

je le supprime, ces prises de sang ne servent plus à rien. C’est juste pour moi, pour que je contrôle que tout aille bien, m’expliqua-t-elle.

– T’as bien classé mon dossier ? Personne d’autre n’est au courant ?

– Keila ! Ça fait dix ans maintenant, si je l’avais mal classé tu serais déjà au centre de recherches,

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depuis un moment, dit-elle avec un sourire apaisant. – Ouais… – je lâche un rire nerveux – bon vas-y

je t’ai assez retardé. Mad récupère l’échantillon, m’embrasse sur le

front et part à l’hôpital faire analyser mon sang.

Ça fait dix ans maintenant.

– Dix ans… murmurais-je. Je n’ai jamais oublié ce jour, c’était la première fois

que mes parents m’autorisaient à les accompagner durant leurs travails, j’avais six ans à l’époque. Tout comme Mad, ma mère était infirmière, elle travaillait avec elle dans le même service. Mon père était infirmier avant de se voir attribuer « l’honorable » fonction de Traqueur, qui consistait à chercher les potentiels patients zéro. Il m’expliquait que des chercheurs les étudiaient et essayaient de les soigner. Maintenant je sais qu’ils les cherchent pour les tuer et qu’ils essayent, comme ils le peuvent, d’éradiquer la menace. Il se répétait tout le temps en me disant qu’ils les cherchaient juste, et que ce qu’ils deviennent après, il ne le savait pas. Comme s’il savait que j’allais finir par comprendre en grandissant, et qu’il ne voulait pas que je le tienne pour responsable. Il n’est pas responsable, ce n’est pas comme si on lui avait laissé le choix. Les fonctions qu’administre l’Etat doivent êtres respectées, ou le pire arrive…

Mes parents et moi nous dirigions plus au sud du secteur 7SG, je m’étais arrêtée pour regarder des

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marguerites qui avaient poussées dans le trou d’un pneu laissé là. Et je me demandais comment les plantes pouvaient pousser dans un milieu pareil. Je me pose toujours cette question mais cette fois-ci, les fleurs se sont changées en hommes, et restent étouffés dans cette ville. Le secteur 7SG est le dernier secteur de guérison de la ville. Les six premiers ont été éradiqué suite au grand nombre de malades ayant contractés le virus, avant que celui-ci ne prolifère trop vite et ne tuent les habitants de ces secteurs… Je ne comprends pas pourquoi les habitants de ces quartiers sont morts et qu’ils se soient arrêtés au sixième. Ce n’est pas logique, les malades atteint de la bactérie sont mis en isolement en zone 24A, pourquoi sont-ils restés dans leur secteur ? Maintenant ces zones sont fermées par des enceintes avec des officiers armés tout au tour, pour tenir la population à distance de ces zones contaminées. Le gouverneur de la ville a affirmé qu’il n’y avait plus d’habitants et qu’il coûterait plus chère à la ville de désinfecter ces zones, que de construire des enceintes avec des hommes armés. Je ne suis pas certaine que l’un coûte plus cher que l’autre.

Donc ce jour-là, mes parents s’approchèrent des bâtiments désaffectés pour faire des prises de sang aux sans-abris. Je courus pour les rattraper lorsqu’une explosion me propulsa en arrière. Des bouts de verres s’étaient logés dans mon avant-bras gauche, provenant sûrement des vitres qui s’étaient brisées. Mon père n’était pas loin de moi avant que le bâtiment n’explose.

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Je le cherchais des yeux mais tout ce que je voyais, c’était des seringues, des pansements et des gants en latex. Mon regard s’arrêta sur la trousse à pharmacie rouge qu’il tenait quelques instants plus tôt. Je me redressais en m’appuyant sur des fragments de pierre avec des bouts de verre dessus me coupant les doigts, émanent peut-être de l’immeuble qui venait de s’effondrer. J’essayais de marcher, mais mes déplacements se faisaient en titubant. Mes jambes étaient engourdies et lourdes. Je cherchais des yeux mon père, j’étais affolée et paniquée. Je fus interpellais par un bras allongé au sol, je m’avançais pour mieux voir, il était là, allongé au sol, sans vie, avec un bout de fer à travers le flanc. Je m’agenouillais, le prit dans mes bras, appuya sa tête contre mon bras gauche mais une douleur me le fit lâcher. Les débris de verres s’enfonçaient dans ma chair palpitante, mon bras tremblait et le sang me coulait sur la main. Je restais bloqué un moment sur ma blessure, à l’examiner, essayant de définir le nombre de débris de verre logés dans mon avant-bras, lorsque quelqu’un m’agrippa par les aisselles et me souleva. J’hurlais et me débâtais pour qu’on me lâche, je donnais des coups de pieds et agitais mes bras. Il fallait que je rejoigne mon père, il était seul au sol, ma mère n’était pas à ses côtés.

Ma mère….

Je me mis à la chercher du regard. De tous les côtés des gens hurlés, des sans-abris étaient blessés, des

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infirmiers avaient leurs blouses immaculées de sang. Un homme tenait un pansement couvert d’hémoglobine sur son œil, et je fus prise de hauts de cœur. Lorsqu’il le retira, des particules de son œil vinrent avec la compresse. A ce moment je me souvins avoir eu envie de vomir mais autre chose me préoccupais. L’étau exercé sur moi, et comment m’en défaire pour rejoindre ma mère et récupérer mon père. Mais rien n’y faisait. On m’allongea dans une ambulance, les portes se refermèrent et l’on m’administra un masque sur la bouche avec un gaz pour m’endormir. J’examinais l’ambulance avant que l’exhalation du propane ne parvienne jusqu’à mon cerveau. L’habitacle ressemblait à toutes les ambulances, blancs avec quelques appareils médicaux et deux infirmiers à bord. L’un d’eux se pencha vers moi, posa une main sur mes cheveux et agita ses lèvres, je ne distinguais pas ce qu’il me disait. Je compris qu’il m’occupait pendant que son collègue me soignait. Je sentis qu’on nettoyait ma plaie, le désinfectant me brûlait à vif. J’entendis le bruit des morceaux de verres tomber dans une soucoupe métallique, des bips mécaniques provenant de diverses machines et le bourdonnement du moteur. L’homme près de moi vint me murmurer des phrases à l’oreille, mais le gaz fit effet, et ma vision se troubla avant d’être dans le noir complet.

Nous avions été emmenés dans l’hôpital de la ville avec ma mère, au secteur P1SC, le premier secteur de contamination. C’est assez étonnant qu’ils n’aient pas

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pensé à renommer ce quartier après sa désinfection préventive, il y a près de dix ans. A l’époque on ne savait pas si ce virus était une réelle menace. Par mesure de précaution, le gouvernement ordonna, par le biais de L’Edit Gouvernemental de protection des populations, ou plus communément appelé EGPDP, de désinfecter des quartiers « stratégiques », établit par le gouvernement, dans toutes les grandes villes du pays. A leurs frais. Ce qui indique qu’à l’époque, Boston avait suffisamment de réserves financières pour désinfecter tout un quartier. Mais plus maintenant. L’hôpital a gardé son affectation au secteur P1SC, désinfecté qu’une fois en dix ans. Inutile de préciser que depuis, le virus a dû s’infiltrer entre ses murs.

Ma mère et moi étions à l’hôpital. Il était saturé de blessés suite aux explosions survenues à Boston. Ma mère avait des ecchymoses sur le visage et à l’abdomen. Elle avait aussi une plaie superficielle sur l’arcade sourcilière qui saignait. Mad l’avait amenée au bloc, elle se plaignait de contusions qu’elle ressentait au ventre et crachée du sang, le bébé était peut-être touché. Ni l’un ni l’autre n’avait survécu à l’accouchement d’urgence, et en l’espace d’une seconde, j’étais passée d’enfant à orpheline. La modification fut instantanée sur mon dossier numérique, je n’avais plus personne, plus de famille. J’étais devenue une sans-abri. Je me sentis vide, je ne voyais qu’une coquille vide, avec plus personne à l’intérieur…

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Ce jour-là, il y eu plusieurs explosions dans la ville, le soir même les grands journaux – à l’époque où il y en avait encore – s’étaient emparés du scandale. Le gouverneur affirma qu’il s’agissait d’une canalisation centrale de gaz qui avait cédée, provocant ainsi plusieurs explosions dans la ville. Soit disant des galeries souterraines débouchant dans plusieurs immeubles de la ville… Mais rien n’a été prouvé, et l’on ignore encore si c’est vraiment ça qui a causait les explosions.

Mad s’occupa de retirer la nanopuce de mon bras et actualisa mon dossier en « décédée ». Elle la désactiva avant de la détruire, et maintenant je dois éviter tous les contrôles d’identification. En plus d’avoir ça dans le bras, le gouvernement peut nous localiser où que nous allions, ce qui est assez ironique étant donné qu’on ne peut pas sortir de cette ville. Boston est placé en quarantaine depuis l’épidémie, officiellement déclarée depuis neuf ans et demi. La génération de mes parents a connu la liberté et celle de pouvoir circuler librement d’une ville à l’autre. Je me réconforte en me disant que ma génération n’a pas connu ce plaisir retiré. C’est en quelque sorte un bien pour un mal. Les membres du Secteur Gouvernemental peuvent sortir à leur gré, après vérification de leurs dossiers numériques pour être sûr qu’ils ne sont pas contaminés. C’est absurde, les malades sont mis en isolement, le reste des personnes vivant dans cette ville sont parfaitement sains, pourquoi rester enfermé ? La maladie ne se propage pas dans l’air mais par voie sanguine seulement, d’où les prises de

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sang trimestrielles. Donc depuis ce jour j’habite chez Mad, elle

s’occupe de moi, de mes ponctions veineuses et ajuste mon dossier numérique. Elle est la seule à y avoir accès, secrètement gardé sur une clé USB codée par ses soins et cachée quelque part.

Je passe ma main sur ma cicatrice. Je dois tout le temps la cacher par peur qu’on ne la remarque et qu’on ne me demande un contrôle d’identification, auquel cas j’aurais des ennuis, étant donné que je suis considérée comme morte sur ce fichu dossier. Ce n’est pas une mince affaire de la dissimuler, je ne l’ai jamais mesurée mais elle doit bien faire quinze centimètres. Je m’arrête devant le miroir de Mad, et constate qu’il faudrait que j’aille me laver. Mes cheveux blonds ne sentent plus le parfum artificiel que diffuse la douche, et j’ai les mains marron.

– Joyeuse journée de ponctions, me dis-je à voix haute à mon reflet.

J’arrive à la salle de bain, vérifie le réservoir d’eau de la douche, le niveau indique « cinq litres », ça suffira. Depuis l’épidémie, les besoins énergétiques sont redistribués au jour le jour, nous avons six heures d’électricité pour toute la maison et cent litres d’eau par jour, pour la vaisselle et la toilette principalement.

Je rentre dans la douche et passe devant le détecteur de mouvement qui ferme les portes et les verrouille. J’actionne le bouton « eau » et appuie mon front sur le carrelage mural. L’eau ruissèle dans mon

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dos avant de se couper, je presse mon doigt sur le bouton « shampoing » qui délivre la dose nécessaire. Je frictionne ma chevelure et lave le reste de mon corps, avant de presser à nouveau le bouton « eau ». Une fois rincée, une dose de désinfectant avec ce parfum artificiel se propage dans la douche avant de s’ouvrir pour que je sorte. Je vérifie le niveau, « trois litres ». Je me dirige vers ma chambre en laissant tomber ma serviette sur mon lit. Je choisis dans mon armoire un pull blanc avec un jeans noir et m’habille. Je cherche mes bottes noir style « ranchers », qui ressemblent aux chaussures des traqueurs, en plus usées peut-être. Les boucles de mes cheveux réapparaissent, je jette un coup d’œil dans mon miroir, avec le soleil mes yeux paraissent plus verts qu’à la normale, mais ils ont toujours cette teinte émeraude qu’appréciait tant ma mère. Je constate que ma tenue est loin d’être féminine, mais pas le temps de me changer que j’entends Blake claquer la porte et poser ses affaires.

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Chapitre 2

JE DESCENDS les escaliers si vite que j’en manque de louper une marche et saute dans les bras de Blake. Je me hisse sur la pointe des pieds et viens enfouir ma tête dans son cou. Je sens son souffle dans mon encolure, hérissant le duvet de ma nuque. Il repose sa tête sur la mienne, pose une main dans mon dos, l’autre sur le bas de mes riens. Blake a un an de plus que moi et quinze bons centimètres aussi, il doit faire environ un mètre quatre-vingt. Ses cheveux sont bruns et courts, je ne sais pas de quelle couleur sont ses yeux tellement ils sont sombres. Il a une adorable fossette au coin droit de sa bouche lorsqu’il sourit.

On se connaît depuis l’enfance. Mad nous faisait les cours quand elle n’était pas à l’hôpital, et lui m’apprenait ce qu’il avait déjà appris et ce que Mad n’avait pas eu le temps de m’expliquer. Les écoles n’existent plus depuis que la Nouvelle Génération a vu le jour, elles ont été rasées, et rare sont les chances de voir des enfants dans la rue, excepté les quelques gamins de sans-abris mal répertoriés dans les fichiers de la ville. « La Nouvelle

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Génération », ma génération, sont les enfants nés dans les quinze dernières années, ils en font partie pour leurs particularités sanguines. Les chercheurs ont remarqué qu’un grand nombre de ces nouveau-nés, voir la quasi-totalité, fabriquaient des anticorps contre le germe mais ne vivent pas au-delà des quatorze-ans, à ce que Mad m’a expliqué. J’ignore si leurs espérances de vies ont augmenté à présent. Une fois ces enfants mis au monde, les chercheurs attendent leurs troisièmes anniversaires avant de les emmener au centre, dans un dortoir commun, pour étudier leurs anticorps. Au bout d’un an d’isolement, ils sont transféraient au laboratoire, dans la zone 24A, non loin du centre. Ils sont étudiés par les scientifiques qui observent leur évolution, une fois passé une année de captivité avec d’autres enfants aux particularités sanguines intéressantes. Ils suivent des séries de tests, analyses et ponctions veineuses, avant d’être renvoyés au dortoir commun. S’ensuit de prises de sang quotidiennes, deux à trois fois par jour, où leurs échantillons sont envoyés au laboratoire pour être étudiés et permettre la création d’un vaccin.

– Salut Keila, me lance-t-il en me serrant d’avantage dans ses bras.

– Salut. Combien de temps tu restes cette fois ? – Juste deux nuits. Il relâche son étreinte et monte ses affaires en me

glissant un sourire qui laisse entrevoir sa fossette. Blake vient chez nous lorsque son père s’absente de la ville, il est le garde du corps du gouverneur O’Connel, ou du

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moins un de ses gardes du corps. Sa mère, elle, est décédée deux ans après sa naissance à cause de l’épidémie. Quand il était petit, Mad le gardait. Maintenant c’est devenu un réflexe de venir chez nous dès que son père quitte la ville. Lorsque le gouverneur doit s’absenter hors de Boston, son père doit partir aussi, pour l’escorter. Je n’ai jamais vraiment parlé à Bridger Wilson, je sais juste qu’il est le garde du corps du gouverneur et lui, il sait juste que je suis déclarée comme morte sur mon dossier. Mad a du mal à lui faire confiance, moi je suis sûr qu’il ne dira rien, enfin j’espère. Je suis tout le temps avec Blake, à réparer des trucs trouvés dans la rue, que l’on redistribue ensuite aux sans-abris. Mad déteste nous voir avec ces objets infestés de microbes, et qu’après nous paradons dans la ville pour les donner.

J’emboîte le pas et l’accompagne jusqu’à sa chambre, on ne peut plus parler de chambre d’ami depuis qu’une étagère en parpaings, ainsi que des vêtements éparpillés au sol sont présents dans la pièce. Je m’assois sur son lit.

– Ton père l’accompagne où cette fois ? – Hum… Washington je crois. Quand est-ce que

Mad rentre ? – Dès qu’elle a fini mon analyse. Ça a donné quoi

pour toi ? – Comme tous les trimestres, « corps sain », j’peux

le laisser là, ça ne va pas la déranger ? Blake sort de son sac un pistolet et le pose sur le

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bureau, je remarque qu’il s’agit d’un Sig Sauer P226, que son père a dû lui donner après avoir reçu le modèle au dessus.

– Non, j’ai le même dans ma chambre, ça ne va pas la gêner, dis-je avec un sourire.

– J’en ai un pour toi. – Sérieux ?! Le goût pour les armes est assez étrange mais c’est

rassurant d’en avoir une. Actuellement je me baladée en ville avec un canif à ma ceinture, mais j’ai vite laissé tomber quand je me suis souvenue que je savais me battre. C’est Blake qui m’apprit ses techniques, qu’il doit probablement tenir de son père également.

Il sort de son sac le même modèle que le sien et me le tend. J’hésite à le prendre, je n’ai jamais tenu d’arme de ma vie.

– Tu ne veux pas m’apprendre avant ? Il me regarde avec stupeur et hausse les sourcils. – Oui si tu veux, j’avais l’intention de te laisser

jouer avec, sans t’apprendre à t’en servir mais j’peux t’enseigner deux ou trois trucs. Bien sûr qu’il faut t’apprendre, me lance-t-il avec un sourire.

– Merci, dépêche-toi, on va aller dehors s’en servir.

Il range celui qu’il a dans son jeans, le coince dedans et replie son t-shirt dessus, je m’avance vers le bureau pour prendre l’autre mais il s’interpose, m’embrasse sur la joue, prend ma main dans la sienne et de l’autre le révolver avant de m’entrainer dehors.

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Chapitre 3

ON ARRIVE au terrain vague à quelques pâtés de maisons de notre quartier. Autrefois ça devait être un immeuble d’habitation ou d’archives peut-être. Il y a encore des restes de fragments de cet édifice, éparpillés le long d’un pan de mur, et plusieurs pièces de béton sont dispersées au sol.

Nous arrivons à ce terrain vague, en évitant les officiers armés et leur contrôle d’identification. Nous entrons dans l’ancien lieu, Blake appuie contre un reste de mur une planche en bois trouvée à côté d’un arbre. A en juger par l’aspect je devine qu’il s’agit d’une ancienne porte d’armoire grise et abîmée. Il vient me rejoindre en me tendant l’arme. Je la saisis et vise la planche.

– Attends. Il se met derrière moi, pose ses mains sur mes

hanches pour faire pivoter mon bassin, et vient placer ses mains sur les miennes. La sensation de sa peau en contact avec la mienne me provoque des frissons.

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– Fais gaffe au recul, prévient-il. – Quoi il y en a un sur cette arme ? – Sur toutes les armes il y a un recul, même sur

celle-ci, explique-t-il. – Je ne pensais pas qu’il y en avait un sur ce

flingue. – Mets-toi en place, vise la planche. Attention…

tire ! Le coup part et se loge dans la planche. J’en tire

encore, toutes dans la planche. Blake n’a pas enlevé ses mains des miennes et sa tête est appuyée contre la mienne. Il se dégage de moi, part chercher la planche et me la ramène.

– Toutes dessus ! – J’y crois pas, j’ai loupé aucune balle !

M’exclamais-je. – C’est pas mal pour une première fois. – Merci. Tu viens, il faut qu’on rentre. Mad ne va

pas tarder. En réalité, le bruit provenant des coups de feu

risque d’alerter des officiers. Et je ne tiens pas à entamer une course poursuite contre eux dans les ruelles du quartier et m’exposer à un contrôle. Je m’approche de Blake et lui tend le pistolet.

– Qu’est-ce tu veux que j’en fasse ? J’en ai déjà un. – Non t’étais sérieux, tu me le donne ? – Je préfère savoir que tu as ça sur toi quand je ne

suis pas là. Je lui réponds par un sourire et nous décidons de

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rentrer. A environ deux pâtés de maison de notre quartier, Blake me stoppe en me désignant les officiers. Il m’entraîne dans une rue voisine et vérifie leur position, ils sont de dos. Il me montre une ruelle perpendiculaire où je pourrais passer.

– Je vais aller les voir, ils vont me faire un contrôle, ça va les occuper. Toi, tu prends cette rue. Cache ton arme dans ton jeans.

Je m’exécute et la coince dans mon jeans en cachant le manche avec mon pull. J’embrasse la fossette de Blake, il pose sa main contre ma joue et m’embrasse sur l’autre. Je mets ma main sur la sienne, restée sur ma joue, appuie mon front contre lui et pars en direction de la rue. Je me cache derrière une benne à ordures, penche la tête pour voir Blake. Il marche en direction des hommes qui l’interpellent aussitôt. Il tend son bras devant l’officier, celui-ci sort son scanner et l’appui contre l’avant-bras de Blake. Il est en plein contrôle. Je jette un coup d’œil sur la rue à prendre, personne.

La voix est libre.

Je m’engouffre dedans une main sur mon arme, j’arrive à une intersection, inspecte les lieux et pique un sprinte jusqu’à mon quartier. Je vois ma maison, plus que deux cents mètres, je m’arrête d’un coup et me plaque contre un mur. Un officier rôde près des maisons, je l’observe, il regarde autour de lui comme s’il cherchait quelqu’un, pose deux doigts sur son

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oreille et agite ses lèvres, sûrement une oreillette avec quelqu’un au bout. Un bourdonnement sourd provient du ciel, je lève la tête et aperçois un aéroglisseur. Il se pose dans la rue et l’officier monte dedans avant de disparaître dans l’atmosphère. Je regarde qu’il n’y en a pas d’autres dans les parages, et cours jusqu’à la maison de Mad, ouvre la porte, la referme en m’appuyant contre elle. C’est la première fois que des officiers rôdent autour des maisons. D’ordinaire ils patrouillent, parlent quelques instants aux passants et repartent dans un autre quartier. Celui-là était seul, et observait les alentours à la recherche d’un individu avant de repartir dans un aéroglisseur. Je reste plaquée contre la porte. Des mèches de cheveux me tombe sur le visage, je les renvoie sur le côté et essaye de reprendre mon souffle. J’entends des pas rapprochés s’avançant plus près de la porte. Je me dirige à la fenêtre pour voir à travers les rideaux mais je ne vois qu’un bout de veste. La personne frappe à la porte. Mon cœur palpite. Je m’avance doucement jusqu’à entendre la voix de Blake.

– Keila, c’est moi. Tu ouvres ? Je vais à la porte et l’ouvre, le laisse entrer et la

referme aussitôt. Je regarde par le judas qu’on n’a pas été suivi. C’est bon. Je me retourne vers Blake qui penche la tête et me fixe en attente.

– Un problème ? Demande-t-il. – Tu ne l’a pas vu ? – J’étais un peu occupé à un contrôle pour te

laisser la voix libre.