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Ăditionfrançaise:©2014ĂditionsFranciscaines9rueMarie-Rose75014Paris0145407351Mail:contact@editions-franciscaines.comwww.editions-franciscaines.comEANEpub:978-2-85020-476-0
Couverture:JJ.Prigent.VĂ©narsalPhoto:MosaĂŻquedelachapellepalatinedâAix-la-Chapelle
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pourindiquerlemondeetlesfrĂšresou,chezLuc,unregardquinedoitnisâarrĂȘtersurlesĂ©pulcre(24,5)nifixerlesnuĂ©es(Ac1,11).Doncunregardverslesautres.SoliditĂ©dâuneperception,celledeselaisseremporter.On comprend un peu mieux ce que Paul expose aux
Corinthiens pris entre deux mondes pleins, lâun plein de lahantisedetrouverdessignesindubitableschezlesjuifset,pourlesGrecs,unmonde remplide laquĂȘtedâune sagesse assurĂ©e.Ăvidemment,cesdeuxmondesbĂ©nĂ©ficientdâunecompacitĂ©quialiĂšne ceux quâils emprisonnent (1 Co 1, 22). Devant eux, leCrucifiĂ© fend les rochers et dĂ©chire les voiles du Temple. SacroixestuneĂ©pĂ©equiscindelessĂ©parationsetabatlesmurs(Ep2,14).ElleparaĂźtfragileethumiliante ;pourtantcâestellequinous libĂšre, Ă©largit lâespace et rĂ©unit les peuples quâelleembrasse.SafaiblesseestnotreforceparcequâellelibĂšre.
***
LafoisâappuienonpassurunesoliditĂ©humaine,maissurunrocher qui se dĂ©place, un corps transpercĂ©, un souffle quipasseâŠLafoiestpleinedetrous.CâestpourquoiellesâadresseĂ la libertĂ©de lapersonne.«Si leFils vous libĂšre, vous serezvraimentlibres»(Jn8,36):parconsĂ©quentlalibertĂ©prouvelavĂ©ritĂ© quâelle partage. Si hĂ©sitante quâelle soit parfois, cettelibertĂ©, avec les ambiguĂŻtĂ©s de ses limites, rejoint plusrĂ©ellement lâhomme que les entassements de certitudes quilâopprimentetlesscintillementsdesillusoiresprojectionsquilefascinent.CarauCrucifiĂ©dĂ©nudĂ©nepeutcorrespondrequâunefoi nue. Elle creuse en lâhomme son propre chemin dedĂ©pouillement, en sorte que finalement se rencontrent deuxpersonnesenleurradicalitĂ©.Etencore!LeChristsâestvidĂ©delui-mĂȘme (Ph2,7)plusquâunhommene le fera jamais, car il
possĂšde mieux sa propre personnalitĂ© que ne retiennent delâĂ©cumedelavielesmainshumainestropcourtespourensaisirlâampleur. Et le Christ descend en ces enfers oĂč sâĂ©garelâhumain. Il est plus humain que nous. La foi le perçoit, ledevine.CâestpourquoiellepeutsâĂ©lancerversleChrist,carenle rejoignant, lâhomme se retrouve lui-mĂȘme le plusrĂ©ellement13.
6SaintAugustincommentelarĂ©uniondesdeuxpeuplespourformerlademeuredeDieu.PointdĂ©cisif:ilparledâĂ©couterunepierre:«Vouslevoyez,lesunsviennentdupeuplede la circoncision, les autres du peuple de lâincirconcision, comme deux murs quisâavancentdecĂŽtĂ©sdiffĂ©rentsetquiserĂ©unissentparlebaiserdepaixdanslâuniquefoi au Christ ; Ă©coutons donc la voix de la pierre dâangle. » (Saint AUGUSTIN :«HomĂ©lie51surJean8»,BibliothĂšqueAugustinienne73B,1989,p.299).7 Ă la question de savoir Ă qui il donnerait sa confiance et ce que signifie cetteexpression, un jeune de 17 ans fournit cette rĂ©ponse beaucoup plus profonde quâunerevendication dâautonomie : « Câest la possibilitĂ©, si je le voulais, dâĂȘtre ce que jeveux».8 «Dans cette relation qui va naĂźtre, sâattestera quâil nây a pas de rencontre delâaltĂ©ritĂ© sans une certaine altĂ©ration (une cĂŽte, un cĂŽtĂ© de lâhomme)⊠Dans lamaniĂšrequâalâhommedeprĂ©tendrereprendrelamainenquelquesorte,enaffirmantunpeuvitequelafemmeestlâosdesesos,ilindiqueunedominancesurelle.Alorsquâellefut crĂ©Ă©e comme son vis-Ă -vis, prĂ©tendre que la femme ne viendrait que de lui, câestdonner une place au serpent. » (V.MARGRONet F. POCHĂ : «LâĂ©chec traversĂ© ».Paris,DesclĂ©edeBrouwer,2003,pp.142-143).9«Quanddoncsâest-il installĂ©encemonde,quandya-t-il faithalte,quandya-t-ilreposĂ©satĂȘte?âIlabondipourcourirsoncheminâ(Ps18,6),ilâapassĂ©enfaisantlebienâ(Ac10,38), sansmĂȘmeunnid,unantre,uneplacedans lâhĂŽtellerie, jusquâĂ ceque,ayantachevĂ© sonĆuvrequâilavaitacceptĂ©e, ilaitmĂ©ritĂ©de recevoir lâordredesâasseoir et dâentendre le Seigneur dire Ă mon Seigneur : âSiĂšge Ă ma droiteâ (Ps110/109,1)».GEOFFROYdâAUXERRE:«EntretiendeSimon-PierreavecJĂ©sus»,37,Paris,LeCerf,1990,S.C.364,p.189.10«Pierre,quivientdeconfessersonamourpourlatroisiĂšmefois,reçoitlâordredepaĂźtre les brebis et demourir pour elles.Câest pourquoi le Seigneur lui dit par troisfois : âPais, pais, paisâ, et non pas : âTonds, tonds, tondsâ. » (Saint ANTOINE dePADOUE : « Sermons pour les Dimanches et FĂȘtes », T 1. Paris, Ed. Saint Antoine,2005,p.378).THEODOREdeCYRajoutait:«âŠquetulesmĂšnesaupĂąturagecommetu y esmenĂ© et que tume rembourses Ă travers [elles] la reconnaissance que tumedois»(SurlacharitĂ©,10,dans«HistoiredesmoinesdeSyrie»,31,T.2.Paris,LeCerf,1979,S.C.257,p.285).11LâimmobilitĂ©duChristfixĂ©encroixsembleattesterlavictoiredelamort.Maiscâest
le lieu dâoĂč il se rĂ©pand en un mouvement fĂ©cond : « Tu crois que le Christ restedurablementcommelapierreimmobile,luiqui,frappĂ©parlejavelot,rĂ©pandituneondegĂ©nĂ©reuse et offrit aux siens le breuvage de sa sainte blessure. » (Saint AVIT deVIENNE:«Histoirespirituelle»,5,464-467,T.2.Paris,LeCerf,2005,S.C.492,p.201).12«MesfrĂšres,voyezlevent:QuandsonsoufflesemeutSacouleurnesevoit;ToutenserĂ©vĂ©lant,ilsegardecachĂ©:Sansquerienlâenveloppe,Sanscausemanifeste,IlexistecachĂ©Etsemontreensonsouffle»(SaintEPHREMdeNISIBE :«Hymnes sur leParadis», 15, 1. Paris,LeCerf, 1968,S.C.137,p.187).13UnhommequineprofessepasdâĂȘtrecroyantnereniepastoujourscetattraitquâexercele Christ. Ainsi Stendhal volontiers tenu pour impie. Un excellent connaisseur de cethommeetdesonĆuvrenoteeneffet:«JenelevoispasdutoutenbrebisĂ©garĂ©e,quâilfaudraitĂ toutprixrameneraubercail:missionimpossibleetdâailleursmalhonnĂȘte.Je le vois comme un frĂšre sĂ©parĂ© par des gouffres, Ă qui me relient cependant despasserelles invisiblesâŠCertains croient croire. Dâautres croient ne pas croire.MaiscâestbeaucouppluscompliquĂ©.»(PhilippeBERTHIER:«AvecStendhal».Paris,Ăd.deFallois,2013,p.162).
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effetsdoiventrechercherunqualificatifspĂ©cifiquementchrĂ©tienenretournantĂ leurorigineesttoutautrechose.Osonsledire:lafoiavanceĂ fondsperdus.Lâautonomiedesesfruitssâexprimepar leur influence : dans la pĂąte, le levain ne redevient pasfarine. Il nâexige aucun privilĂšge, cette momification dâunpassĂ©23.
***
LâĂ©chelledeJacobnetientcependantpasdanslevide,plaquĂ©esurlestĂ©nĂšbres.Commentabordersaposition?DeuxexemplesmereviennentenmĂ©moire,pristouslesdeuxaunordduSahara.Une route, qui plus est asphaltĂ©e, piquait droit vers le dĂ©sert.AprĂšs quelques kilomĂštres de dĂ©shĂ©rence, faute dâutilisation,ellebutaitsurlelitdâunouedsurplombĂ©,delâautrecĂŽtĂ©,dâunemuraille abrupte. Pour continuer la route, il eĂ»t fallu un pontsuivi dâun tunnel⊠Obstacles rĂ©dhibitoires pour une trĂšsmodestevoiedestinĂ©efinalementĂ neconduirenullepart.Nonloin de lĂ , une vĂ©ritable riviĂšre, avec son courant vif et sespoissons, se perdait en quelques dizaines demĂštres, engloutiepar une dune de sable si rapidement quâon se prenait Ă lachercherplusloinâŠLâobstacle et la perte : lâĂ©chelle du patriarche ne connaĂźt ni
lâun ni lâautre. Elle va « vers la terre » sans sây appuyer, sâyenfoncer ; et « vers le ciel » sans le percer ni sây lier.Unpurentre-deux.CommentdĂ©crire lesdeuxespacesquine sontpasde jonction mais dâapproche et de visĂ©e, aux deux bouts delâĂ©chelle ? Peut-on imaginer une ligature, un accostage, ou unĂ©vanouissement,uneliquĂ©faction?Lâimaginationresteinterdite.UnautrecasseprĂ©senteĂ lâesprit,celui,bienconnu,duBuissonardent. Chacun sait quâil ne brĂ»le pas, alors quâil devrait seconsumer. Un feu qui ne produit pas de cendres sâappelle un
Ă©clat,une lumiĂšre,unesplendeur. Ilya tellementdebeautĂ©ence resplendissementque, fascinĂ©,MoĂŻseveut sâapprocherpourmieuxvoir(Ex3,3).Pourcela,il luifautsedĂ©chausser(v.5).Danscetacte,lesPĂšresdelâĂgliseontlulefaitdesedĂ©pouillerdes vieilles peaux, de ce cuir de bĂȘtes mortes dont onconfectionne les sandales, afin de sâoffrir Ă la nouveautĂ© (lescendres sont du vieux bois), disponible pour un dĂ©partnouveau24.MoĂŻserenaĂźt.Il se passe quelque chose de semblable pour Jacob. Il Ă©tait
rĂ©ellement un fugitif, nu devant son frĂšre, officiellement partipour se marier25. DerriĂšre lui, la menace rĂ©elle dâun conflitfratricide.SaterrededĂ©partsemontreincertaineetpĂ©rilleuse:ilnepeutplussâappuyersurelle.Devantlui,uneroutedifficileetdesnomsinconnus:ilignoreoĂčleconduitsonchemin.La destination pointe vers son pays dâorigine, mais elle
sâembrume dâignorance. Le songe de lâĂ©chelle exprimeverticalementlecontenuexactdesoncheminementhorizontal.CependantlerĂȘveluiapprendcequâilnesavaitpas(28,16):
Dieu habite en ce lieu dĂ©shĂ©ritĂ© oĂč Jacob ne trouve quâunepierre pour reposer sa tĂȘte. Alors ce lieu resplendit. LâhuileversĂ©e le rend Ă©tincelant Ă la lumiĂšre du jour. Jacob est unhommeneuf.Encematinnaissant, il sedĂ©pouilledescendresdupassĂ©,ilselivreĂ unavenirĂ construire.IlaapprisĂ vivrelavaleurduprĂ©sent;souslaprotectiondeDieu,avecLui,aupointque cequâil promet ne concerne, pour son retour, que sa foi :« Le Seigneur deviendra mon Dieu » (v. 21). La stĂšle faitmĂ©moiredecettepromesse.AbrahamĂ©taitparti avec les siens,surlafoidâuneparole,versuneterresansnom.JacobsâavanceseuldanslaprĂ©sencedeDieu.FĂ©conditĂ©delamarche.
***
Envisager la foi Ă partirdeces rĂ©fĂ©rencesbibliques se rĂ©vĂšleplein dâenseignement. Les habitudes du langage opposentcroyants et incroyants. Elles distinguent entre elles plusieurssortes de foi par la divinitĂ© quâelles vĂ©nĂšrent et les contenusquâellesinspirent.Bienentendu,lesincroyantsnesontpassansconvictions,etlesdiversesreligionssanspointscommuns.Câestdâailleurs ce qui rend les dialogues possibles et souventenrichissants. Cette simplicitĂ© de langage nâest cependant passans certains inconvĂ©nients fĂącheux. Le principal oublie quelâĂ©chellenepossĂšdenipiedni tĂȘte,etquâĂ ce titreonnepeutclairementladĂ©finir.Onnâenvientpasaubout.Or, pour poser des distinctions claires et des contradictions
tranchĂ©es,ilfautdâabordtracerdesfrontiĂšresnettes.OnnepeutsansdoutepasfaireautrementpourĂ©viterconfusionetmĂ©lange.Ilconvient toutefoisdegarderprĂ©sentĂ lâespritquâenagissantde lasorte,onenclot la foibibliquedansunsystĂšmeaisĂ©mentprĂ©sentableetclairementopposable.IlsuffitdecouperpiedsettĂȘtedenotreĂ©chellepourobteniruneconstructionmanipulableentrelesmainsdesmĂ©caniciensduspiritueletdesexposantsdelâapologĂ©tique. LâarmĂ©e rangĂ©e en bataille nemanque dâaucunbouton de guĂȘtre. Il ne lui reste plus quâĂ dĂ©signer sesadversaires.Ceux-ci,dâailleurs,semontrentassezrusĂ©setbonsconnaisseurspourexciperdecequâonleurprĂ©sentelesĂ©lĂ©mentsquâonleurcache,poursâĂ©crieretsoulignerlapartirrationnelleet ombreuse de la foi. En ces tĂ©nĂšbres quâĂ©paissit ledogmatisme, ils affirment voir lâessentiel dâune foi que sesadhĂ©rentsoccultentfrauduleusementetvĂ©hĂ©mentementsouslesĂ©tendardsdâunereligion intelligible.UnefoienfermĂ©edansunsystĂšmeapparaĂźtalorscommelechevaldeTroiedelacrĂ©dulitĂ©.Ces conflits, peut-ĂȘtre moins ostensibles quâhier, restent
toutefois présents de maniÚre quasi-instinctive. Les rapports
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Apparemment,lesdisciplessâentirentbien.Ils se sortentmoins facilementde lâĂ©pisode suivant : pour le
coup, la nuit est tombĂ©e, la tempĂȘte se lĂšve quand la barquetangue aumilieu de lamer. La symbolique de lâĂ©vĂšnement estmanifeste(allonsaubut):Ă uneĂglisesecouĂ©edetoutesparts,alorsqueleJĂ©susterrestre(cf.2Co5,16)nâestplusavecelle(ilĂ©tait«lui,seul,Ă terre»:v.47)etquâellecraintdesombrer,lamarchesurleseauxmortellesdelamerannoncelaprĂ©senceduRessuscitĂ©vainqueurdelamort.Ilneprononcequâunmot:«Câestmoi»(v.50).SaprĂ©senceexorciseleurpanique.LĂ oĂčlâhommemeurt,dans
lâeau, lĂ vivent les poissons, ces signes de la PĂąque duSauveur31.
Il resteĂ comprendre le lienavec lamultiplicationdespains.Les apĂŽtres, sauvĂ©s de lâinanition puis du naufrage, respirent.Mais leur cĆur, loin de sâĂ©largir, sâendurcit â tel celui dupharaon avant lâexode (Ex 8, 15). Par la multiplication despains, ils sontpromus :assurer lâordrepuis ladistributiondespainslesmetplutĂŽtenvaleurauxyeuxdâunefouledeconvives(ce quâindique le terme de symposia, v. 39 : ils festoientensemble). PĂ©dagogiquement, le Christ les arrache Ă leursatisfactiondâunemissionrĂ©ussie(v.31a),dâavoirenfinmangĂ©(v.31b)etbiengĂ©rĂ©cettemultitude.Il les«obligeĂ partirenavantdelui»(v.45:câestunenouvellemission:6,12).Etilles tire dâaffaire une nouvelle fois. En tout cela, les disciplesrestentcentrĂ©ssurleursort.Or la multiplication des pains reprĂ©sente le contraire :
«Donnez-leurvous-mĂȘmesĂ manger»(v.37).AchetersâavĂšreimpossible.Quereste-t-il?LagĂ©nĂ©rositĂ©,ledon.Pourcefaire,ilfautabandonnerlepeuquâona,cinqpainsetdeuxpoissons.Cette largeur du cĆur fait vivre, elle humanise. En elle se
dĂ©voilelanatureprofondedeDieu:Celuiquisedonne,Celuiqui vivifie. Les Ă©vangĂ©listes ne cessent dâinsister sur cettedĂ©couverte. Aux pĂšlerins dâEmmaĂŒs, câest la fraction du painquimontreleRessuscitĂ©(Lc24,35).PoursaintJean,leChristdonne son corps : il communique sa vie (6, 51).LâEucharistielivresasignificationdanslafractionetlepartage.Alors on comprend ce que les textes indiquent : le Christ
demandeĂ sesdisciplesdefairedudon lachairde leurcorps.Dans ce but, il leur donne son propre corps livrĂ©. Il lestransformeenvivanteseucharisties.«Montrer»reprĂ©sentebienplusque fairevoir,queposer sous lesyeux.Câestunactequiengage Ă devenir ce quâon voit, Ă sâengager dans le processusduquel Ă©merge une rĂ©alitĂ© neuve, comme le calme des eaux etdes vents quand le Christ « monte auprĂšs dâeux dans labarque»(v.51).LetĂ©moinnâestpaslespectateuralĂ©atoiredâunĂ©vĂšnement.Latransformationetlaconversion,quâilconnaĂźtenlui-mĂȘme, le rendent sujet et acteur de ce que sa propre vieexprimeetrĂ©vĂšle.SaintPaulauxGalates:«IlapluĂ DieuderĂ©vĂ©lersonFilsenmoi»(1,16).Enlui,ilmontreunautrequelui:«Cenâestplusmoiquivis,câest leChristquivitenmoi(Ga 2, 20). Alors le signe devient le manifeste dâune vienouvelle.
***
Faut-il attendre des famines et des tempĂȘtes, des Ă©vĂšnementsexceptionnels, pour avoir la chance de croire ? La foi neconcernait alors quâunpetit nombredâĂ©lus, quand leChrist selivre«pourlamultitude»(Mc14,24).LâĂ©litismeest laformealtiĂšredusectarisme.Ă ce problĂšme rĂ©current, le quatriĂšme Ă©vangile apporte une
rĂ©ponse originale, car il dĂ©place la question. De maniĂšrespontanĂ©e et naĂŻve, le sujet premier de lâacte de foi se trouveplacĂ©danslapersonnequicroit.Elledit«jecrois»et,Ă partirde ce« je», elledĂ©veloppeensuiteuncontenuplusoumoinsconsistant et un degrĂ© dâadhĂ©sion variable. De lĂ Ă ce quâellepenseĂȘtreĂ lâoriginedesafoi,ilnâyaquâunpas.Pourunepart,cettepositionestjuste:câestbienunsujetquicroit.LeChristlui-mĂȘme pose la question : « Le crois-tu ? » demande-t-il Ă Marthe (Jn 11, 26). Cependant cette foi personnelle est unerĂ©ponseĂ unepropositionantĂ©cĂ©dente.En effet, lâinitiative premiĂšre vient de Dieu qui, par amour,
envoiesonFilsdanslemonde(Jn3,16).LareconnaissancedeJĂ©susnesuffitpas,encorefaut-iladmettrequâilestlâEnvoyĂ©duPĂšre(Jn17,8).CroireauChristsupposedoncderemonterdelui Ă son origine « dans le sein du PĂšre » (Jn 1, 18), sinonsâarrĂȘtersur luiseul lecouperaitdeson lienavec lePĂšre.UnepremiĂšre connaissance de Dieu â quel que soit dâailleurs lemode de cette connaissance â constitue un prĂ©alableindispensableĂ touterelationauChrist.QuelquâunquinâauraitaucuneidĂ©edeDieu,commentpourrait-ilcomprendreque«LePĂšreetmoisommesun»(Jn10,30)?Cesmotsseraientpourlui vides de sens. LâĂ©pĂźtre auxHĂ©breux rappelle ces « vĂ©ritĂ©sfondamentalesâŠfoienDieu»(6,21).Ellesdonnentuneassise,uneterre,oĂčconstruirelafoi.Fort bien, mais chacun sait que des reprĂ©sentations du PĂšre
peuventĂ©loignerdeluietagirenrepoussoir.AvantleIIIesiĂšcle,laBiblesemĂ©fiedutitredePĂšre,tropaccolĂ©Ă descultesdelanatureetdelavie.Lemot«roi»estsiambiguqueJĂ©sussâenĂ©carte(Jn6,15).MĂȘmelequalificatifde«CrĂ©ateur»recouvraitalorsdesacceptionsflouesvoiredangereuses.CesrĂ©servesvontsiloinqueJĂ©susrĂ©torqueauxresponsablesdesonpeuplequâils
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autreendroit :entre lâinfra-humain(lamaladie, lamisĂšreâŠ)etladignitĂ©propredelâhomme.Ăcettefemmequâilredresse,luipermettantdemarcherdroit,dâexerceruntravail,ilnâenjointpasdedevenirdisciple.Il lâamĂšneĂ lasantĂ©maislalaisselibrededevenircroyante.Lâannoncedelafoi,lapropositiondelafoi,correspondentau
mĂȘme objectif : montrer la gratuitĂ© de lâappel. Ce quâapportelâenvoyĂ©delâĂvangile,câestuneparoleĂ entendre,cetterĂ©alitĂ©laplusfragileetlaplusvitale.CetteparoleĂ entendre,etnonunordre Ă exĂ©cuter, ouvre un espace nouveau oĂč le dĂ©sir peutsâaventurer.AmenerĂ lafoisignifiedoncapporterlaParoleetlalaisser agir en lâhomme. Il la travaille, elle le façonne. CepĂ©trissagenepeutĂȘtrefaitqueparlâintĂ©ressĂ©.Ăuneconditiontoutefois : que cette propositionmontre sa bontĂ© et prouve sacapacitĂ©decrĂ©erdelavie.Paroleetsignesvontdepair(Mc16,20).Ilnefautdoncpasquelaviedes«tĂ©moins»dĂ©mentelafoiquâilsannoncent.Sansles«actes»,sanslesmainsdeshommes,la Parole et lâEsprit de Dieu sont relĂ©guĂ©s dans un ciellointainâŠaumieux!QuandElierĂ©animelefilsdelaveuvedeSarepta, la mĂšre sâĂ©crie en recevant son fils vivant :«Maintenant je sais que tu es un homme de Dieu et que laparoledeYahvĂ©danstaboucheestvĂ©rité»(1R17,24).RestecependantunederniĂšreprĂ©cisionĂ apporterici.Dansle
Nouveau Testament et dans les sociĂ©tĂ©s dâhier, lâappartenanceaugroupeĂ©taitpremiĂšre.DevenirchrĂ©tiencoĂŻncidait avec« sejoindre aux disciples » (Ac 2, 41 ; 6, 7). Croire Ă©quivalait Ă partagerlafoidelâĂglise.CetteinscriptionpersonnelledansuncorpsdecroyantssâĂ©cartĂšleaujourdâhuiettendĂ devenir,dansunesociĂ©tĂ©individualisĂ©e,unerelationuniqueentreleconvertietJĂ©susseul.CefaitseconstatesouventchezlescatĂ©chumĂšnes.Ils dĂ©couvrent le Christ, parfois avec force et un long
cheminement.IlssontbaptisĂ©s,trĂšsbien.Puisilsdisparaissent.Car la marque dâune foi adulte ne se constate pas dans uneadhĂ©sion privĂ©e Ă un Christ solitaire. Ce qui est fondamental,plus mĂȘme que la personne qui fait dĂ©couvrir le messagechrĂ©tien, ce qui rend la foi adulte grĂące aux sacrements delâĂglise, câest lâentrĂ©e dans la fraternitĂ© croyante et laparticipationĂ sesĂ©changes.LorsqueJĂ©rĂ©mieannoncequâ« ilsnâaurontplusbesoindâinstruirechacunsonprochainâŠcarilsme connaĂźtront tous des plus petits jusquâaux plus grands »(31,34),ildĂ©critlestempsmessianiquesnonpascommeprivĂ©sde connaissances nimanquant dâinstructeurs,mais commeunefraternitĂ©croyanteoĂčlaviedefoiserapartagĂ©eentretous.CetenracinementdupartagedĂ©livreledĂ©sirdesasolitude,opĂšrelaconversiondesoncaractĂšreindividuel.IlĂ©largitlechampdelafoiĂ ladimensiondelâĂglisequiest«mĂšredelafoi».
34 En3, 36, il prĂ©cisemĂȘme le cas de «qui refuse de croire auFils ». AuXIIIĂšmesiĂšcle, un juif converti Ă©crit : « Il faut observer quâil ne dit pas : âSâil nâa pas Ă©tĂ©baptisĂ©,ilneserapassauvĂ©â.Eneffet,sanslebaptĂȘme,unhommepeutĂȘtresauvĂ©,sicâest lanĂ©cessitĂ©quilâaempĂȘchĂ©dâĂȘtrebaptisé» (GuillaumedeBOURGES:«LivredesguerresduSeigneur»,1,145-148,Paris,LeCerf,1981,S.C.288,p.253).35Cf.cettephraseduPseudo-Denys:«CeluimĂȘmequidĂ©sirelapiredesvies,entantquâilnedĂ©sirequevivre,etdâuneviequiluisemblelameilleure,parsondĂ©sirmĂȘme,parsondĂ©sirdevivre,parsatendanceverslameilleuredesvies,ilapartlui-mĂȘmeauBien.»LesNomsdivins,20.Paris,Aubier,1943,p.114.36 On ne peut que se rĂ©fĂ©rer au dĂ©veloppement fameux de Pascal : «Lâhomme nâestquâunroseau, leplus faiblede lanature,maiscâestunroseaupensantâŠÂ» (Fragment347delâĂ©ditionBrunschvicgdesPensĂ©es).37CerepliementdudĂ©sirestainsiperçuparMauriceZUNDEL:«NousnepĂ©chonsqueparmanquedâambition,nousnepĂ©chonsqueparcequenosdĂ©sirssonttroppetits,nousnepĂ©chonsqueparcequenousnevoulonspaslâinfini».ConfĂ©renceĂ Beyrouth,1963,dans : « PrĂ©sence deMaurice Zundel », Janvier 2014, n° 85, p.6. Ainsi le dĂ©sir estbeaucoupplusunmouvementquâuncontenu.38LarĂ©plĂ©tudeest,ausensfigurĂ©,lâĂ©tatdeceluiquisecroitcomplet,plein.39Cf.Rousseau:«carlâimpulsionduseulappĂ©titestesclavage,etlâobĂ©issanceĂ laloiquâonsâestprescriteestliberté»DuContratSocialI,8.40Letextecomportenonleverbe,maislaprĂ©position«eis»,vers.OnrejointLuc4,1:
«Jésusestconduitaudésert».
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OnpenseaimerleChristOnaimeplussouventlâidĂ©e
quâonsâenfait.Commecescouplesqui,disent-ils,
nâontpasvuletempspasseretsontpassĂ©sĂ cĂŽtĂ©dutempsdelâautre,Ă cĂŽtĂ©desjoursdepossiblesespĂ©rances.
IlsontvieillicĂŽte-Ă -cĂŽte:cequinâestpassansvaleur,maisquinĂ©gligelâĂ©tonnement
deladécouverte.Selaisseraimer,
nerienamasser,pasmĂȘmelesjours,pourguetteraupremierdĂ©tour
duchemindesterresinconnues,lasurprisegratuite
etlâĂ©merveillementdâunamourĂ jamaisnouveau.
Onsâhabitueetonnevoitplusrien.CarlâautrenâestjamaissaisisansrisquedeleperdreoudesâhabituerĂ lui,
Ă cequâonsaitdĂ©jĂ delui,Ă sesrĂ©actionsprĂ©visibles,cellesquiirritent,agacent
oufontsourire.LâautreintĂ©grĂ©Ă soi,
alorsquâoncampedanslâantichambredumystĂšre,
Ă lâentrĂ©edâunjardinsecretdontonnâestquelâhumblegardien,lemendianttendudedĂ©sir,Ă laporte.
Caronnaßtvieuxetilnousfautapprendrelajeunessecommeundonimméritéquiouvre
levantaildelademeure,etsâengageraubordduseuilsansoutrepasserlamarche
paruneincarnationrespectueusedelâautre,uneattentefaitechair,
uneespĂ©rancedanssonactedâoffrande.
TABLEDESMATIĂRES
Couverture4ĂšmedecouvertureCopyrightTitre
ACCUEIL
Chapitre1LEROCHERQUIMARCHE
Chapitre2ENTRE-DEUX
Chapitre3LâĂCHELLEDEJACOB
Chapitre4MONTRERETDĂMONTRER
Chapitre5LEDĂSIRETLâOBĂISSANCE
Chapitre6ILESTGRANDLEMYSTĂREDELAFOI
LemurmureetlasourceLâEucharistiedelafoiLestracesdelafoiLepainpartagĂ©PasseulementdebellesĂąmes,maisunmondenouveau
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