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LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
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IINNTTRROODDUUCCTTIIOONN
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
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La biologie médicale a connu des bouleversements considérables avec
l’évolution prodigieuse de ses techniques. Dans le système de santé actuel la
majorité des diagnostics médicaux sont établis à partir des analyses biologiques.
Cette évolution technologique n’est pas sans risque, d’où la nécessité d’avoir
toujours la présence d’un praticien formé et expérimenté en la qualité d’un
biologiste. Dans les laboratoires d’hématologie, les automates pour
hémogrammes permettent de mesurer le nombre d’éléments de chacune des
trois catégories de cellules que sont les globules rouges (hématies), les globules
blancs (leucocytes) et les plaquettes. La validation du taux de plaquettes indiqué
sur l’hémogramme par l’automate n’est pas systématique et devant tout cas de
thrombopénie, il faut s’assurer qu’il s’agit bien d’une vraie thrombopénie et non
d’une thrombopénie artéfactuelle. La thrombopénie artéfactuelle ou pseudo-
thrombopénie ou fausse thrombopénie est un compte plaquettaire bas observé
dans l’hémogramme, due aux conditions de réalisation de l’hémogramme et cela
lorsqu’il ya pas de diminution du taux de plaquettes in-vivo. La pseudo-
thrombopénie peut être due à plusieurs éléments comme, les conditions pré
analytiques, l’anticoagulant utilisé, les agglutinines froides, la température, la
taille des plaquettes.
Le but de cette étude est dans un premier temps de clarifier à travers une
revue de la littérature les caractéristiques pour comprendre les mécanismes des
différents éléments qui interviennent dans ce phénomène in vitro, afin dans un
second temps d’établir un arbre décisionnel en précisant la conduite à tenir
devant la découverte d’une fausse thrombopénie.
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SSuurr lleess ppllaaqquueetttteess eett lleess tthhrroommbbooppéénniieess
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I- LES PLAQUETTES SANGUINES
La mégacaryopoièse correspond à la différenciation des cellules souches
(CS) hématopoïétiques en mégacaryocytes qui sont les acteurs de la production
plaquettaire. Les progénitures mégacaryocytaires issues des CS
hématopoïétiques pluripotentes, sont capables à la fois de s’autoreproduire et de
se différencier en progénitures des lignées hématopoïétiques. Quand les CS
s’engagent dans la différenciation mégacaryocytaire, elles perdent en même
temps leur capacité d’autorenouvellement et leur propriété multipotente. Les CS
engagées sont alors appelées progéniteurs hématopoïétiques.
Le compartiment des progéniteurs est localisé dans la moelle osseuse chez
l’adulte, les progéniteurs mégacaryocytes sont des cellules non reconnaissables
morphologiquement. Après une succession de stade, les progéniteurs
mégacaryocytaires vont donner des mégacaryoblastes. Les mégacaryoblastes
déviennent morphologiquement identifiables du fait de leur augmentation de
taille, perdent leur nom de progéniteurs pour s’appeler précurseurs [1].
Le compartiment des précurseurs est le compartiment de maturation. Ce
phénomène est un processus continu qui est observé en 8 jours. Ainsi, les
mégacaryocytes sont classés en plusieurs stades de maturation. Le
mégacaryoblaste ou stade I est issu du promégacaryoblaste. Le mégacaryocyte
basophile ou stade II, le megacaryocyte granuleux ou stade III et enfin le
mégacaryocyte mature ou plaquettogénèse ou stade IV (figure 1).
La plaquettogenèse correspond à la formation et à la libération des
plaquettes à partir de la fragmentation du mégacaryocyte mature. Chaque
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mégacaryocyte donne naissance à plusieurs centaines de plaquettes. Le lieu de
formation des thrombocytes reste objet de controverse. Pour les uns, il s’agirait
de la moelle osseuse et pour les autres, ce serait après le passage des cellules
mégacaroytaires dans la circulation pulmonaire.
Toutefois, le mégacaryocyte à ce stade, par son système de démarcation très
développé, joue un rôle essentiel dans la production des plaquettes par la
formation d’extensions appelées proplaquettes. Celle-ci débute par une genèse
microtubulaire au niveau du corps cellulaire. Ces microtubules en glissant les
uns le long des autres permettent l’élongation des bras de cytoplasme. De leur
coté, l’actine et la myosine interviennent dans la formation des renflements qui
correspondent aux futures plaquettes. La fusion de vacuoles présentes de chaque
coté de ces constrictions permettra la fragmentation des proplaquettes et la
libération des plaquettes [2].
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Figure 1 : Image illustrant les différents stades de maturation des
mégacaryocytes de la moelle osseuse [2].
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A-Morphologie des plaquettes
Les plaquettes possèdent des caractéristiques morphologiques observées au
microscope. En microscopie optique, les plaquettes apparaissent comme des
fragments de cytoplasme anucléés arrondis ou ovalaires, mesurant 2à 3µm de
diamètre. Leur volume varie entre 5 et 19µm3. On distingue sur les frottis
colorés au May-Grumwald-Giemsa (MGG) deux zones distinctes, l’une
centrale : le chromomère et l’autre périphérique : le halomère.
En microscopie à contraste de phase, et à l’état vivant, elles apparaissent
discoïdes, émettant des prolongements de longueur croissante qui modifient
continuellement leur forme et leur orientation. Ce sont des formes dendritiques
qui aboutissent progressivement aux formes étalées.
Figure 2 : Image illustrant des plaquettes [3].
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B-Structure et anatomie fonctionnelle des plaquettes
Le microscope électronique, permet d’observer les différents éléments de la
plaquette. D’abord on observe la membrane, et les systèmes canaliculaires
associés à la membrane cytoplasmique. Ensuite à l’intérieur du cytoplasme, on
distingue plusieurs types d’organelles (granules denses, les lysosomes et les
microperoxysomes). A la périphérie de la cellule, se trouve groupés les
microfibrilles. Enfin, on observe que le réticulum est lisse ou granuleux et les
ribosomes sont peu abondants et que les grains de glycogène sont souvent
groupés en amas.
Les constituants biochimiques des plaquettes sont les véritables éléments de
base des propriétés physiologiques plaquettaires.
Le Glycocalix est un revêtement de surface situé à l’extérieur de la
membrane. C’est le premier site d’interaction des plaquettes avec
l’environnement extérieur. La membrane plaquettaire comporte une couche de
lipides neutres ou polaire dans laquelle peuvent se mouvoir des glycopeptides
(GP) ou d’autres protéines suffisament hydrophobes pour former des
associations lipidoprotidiques.
Les lipides sont representés par 78% de phospholipides qui sont distribués
de façon asymétrique dans la double couche membranaire. Sur la plaquette au
repos, la sphingomyéline est présente dans le feuillet externe et la
phosphatidylsérine, le phosphatidylinositol et la phosphatidyléthanolamine dans
le feuillet interne. En dehors des phospholipides, il existe des céramides, des
glycolipides neutres et acides ou des gangliosides.
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Les protéines sont constituées en particulier des glycoprotéines. Ces GP
étaient initialement classées en trois groupes majeurs appelés GPI, II et III avec
des poids moléculaires respectifs de 150, 130, 100 kDa. La description des GP
de poids moléculaires inférieurs (GP IV, V, VI) est venue compléter la
classification initiale.
Les GPIIb et IIIa interagissent pour constituer un complexe équimolaire
d’environ 40000 à 80000 sites par plaquette et dépendant du calcium. Ce
complexe constitue le site de fixation du fibrinogéne sur la plaquette ce qui
représente une étape importante de l’agrégation plaquettaire. Ces molécules sont
representées par la fibronectine, la thrombospondine (figure 3).
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Figure 3 : Schéma illustrant le rôle majeur de la GP IIb dans l’agrégation
plaquettaire [3].
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C- Fonctions plaquettaires
Les plaquettes jouent un rôle primordial de l’hémostase qui est un
phénomène physiologique qui contribue à la prévention et à l’arrêt des
saignements. Il assure le maintient de la fluidité du sang et l’intégrité des
vaisseaux. L’hémostase est subdivisée en trois étapes presque simultanées que
sont l’hémostase primaire, la coagulation et la fibrinolyse. C’est surtout les deux
premières étapes qui sont conditionnées par l’action des plaquettes sanguines.
Les plaquettes peuvent aussi amplifier une réaction inflammatoire par la
sécrétion du facteur de perméabilité vasculaire, l’aptitude à promouvoir le
chimiotactisme des polynucléaires et la synthèse des prostaglandines.
Les thrombocytes peuvent être activés par de nombreux complexes
antigène-anticorps et sont ainsi capables de fixer des Immunoglobulines (Ig) E
spécifiques antiparasitaires grâce au complexe GPIIb-IIIa [2].
Les plaquettes, par un processus similaire à celui de la phagocytose peuvent
englober des particules étrangères variées et Il est souvent difficile de faire la
distinction entre une phagocytose réelle et la fixation passive de particules à la
membrane qui borde le système canaliculaire. Elles peuvent adhérer en amas
autour des cellules métastasiques.
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II- LES THROMBOPENIES
A- Définition
Une thrombopénie est définie par un taux de plaquettes circulant inférieur à
150×109/L (150000/mm
3) indépendamment de l'âge [5].
Elle peut être d’origine centrale par défaut de production, ou périphérique
par consommation, anomalie de répartition, ou destruction immunologique. Il
est habituellement facile de connaitre le mécanisme grâce au contexte clinique et
aux résultats des examens biologiques standards et du myélogramme obtenu par
aspiration de moelle [6].
B-Numération des plaquettes
Pour toute numération plaquettaire, il faut d’abord faire un prélèvement de
sang. Le préleveur doit être d’une qualification et d’une aptitude particulière
(biologiste, infirmière ou technicien capacitaire). Les tubes de prélèvements
utilisés contiennent l’éthylène -diamine-tétra-acétique (EDTA) comme
anticoagulant [4]. Le bouchon des tubes EDTA est de couleur violette.
L’EDTA est considéré comme l’anticoagulant le plus approprié des
plaquettes en raison de sa puissante inhibition de l’agrégation plaquettaire.
L’agglutination EDTA dépendante est surmontée par l’ajout de cations divalents
ou l’excès d’EDTA. Cet anticoagulant « sec » (évitant ainsi un facteur de
dilution rencontré avec un anticoagulant liquide) empêche le calcium de
s’ioniser par chélation. Sans calcium ionisé le phénomène de coagulation ne
peut pas se produire. L’EDTA a l’avantage de très bien conserver les globules
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rouges et les globules blancs, et de permettre le comptage des plaquettes en
prévenant leur agrégation. Il existe deux méthodes de détermination du taux des
plaquettes.
Une méthode manuelle qui a recours au comptage en cellule au microscope
optique. Le coefficient de variation des résultats est important (10 à 30%). Une
méthode automatique qui utilise soit une méthode de variation d’impédance, soit
une méthode optique. Certains systèmes sont hybrides pour augmenter la
précision du comptage. Le coefficient de variation des résultats est faible, 1 à
5% selon les zones de valeurs. La méthode, la plus utilisée est la méthode
automatique à cause de son coefficient de variation faible. Mais il arrive
souvent, aux automates de fournir un taux de plaquettes bas et qui ne correspond
pas à la réalité in vivo, on parlera alors de fausse thrombopénie. Ces fausses
thrombopénies ou pseudo-thrombopénies peuvent être dues aux erreurs pré
analytiques (telles qu’un prélèvement difficile, un défaut d’anticoagulant par
excès de remplissage du tube, une absence d’agitation) [7]. Elles peuvent
également être la conséquence d’autres phénomènes, que nous allons
développer dans la suite de notre étude. Dans ces conditions il faut s’assurer de
la conformité du prélèvement en vérifiant l’identité, la nature de l’anticoagulant
et en recherchant un éventuel caillot (ne pas oublier de regarder dans le bouchon
ou peuvent restés collés certains caillots). Le site de la ponction veineuse peut
contribuer à une sous- estimation de la numération plaquettaire, parce que
correspondant à des échantillons dilués, par l’augmentation de la concentration
de l’anticoagulant au sein de l’échantillon (moins de sang en raison d’un
prélèvement difficile) [8].
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La pseudo-thrombopénie est un artéfact de laboratoire et ne s’accompagne
jamais de syndrome de syndrome hémorragique. Ce diagnostic doit toujours être
éliminé avant de commencer un bilan étiologique, surtout lorsque la
thrombopénie est de découverte fortuite, sévère et non accompagné de
saignements. Devant une thrombopénie, il faut réaliser un frottis pour vérifier
l’absence ou la présence d’agrégats plaquettaires, et mettre une goutte entre
lame et lamelle pour vérifier la présence de filament de fibrine quand on
suspecte une coagulation. Il faut faire un comptage sur unopette quand le taux de
plaquettes est très sous estimé en cas de macroplaquettes. Demander un autre
prélèvement sur tube citrate en cas de pseudo-thrombopénie EDTA dépendante
ou chauffer à 37°C pendant 1h en cas de pseudo-thrombopénies non EDTA
dépendante.
C-Etiologie des thrombopénies
C-1- Les thrombopénies périphériques
Elles sont secondaires à une hyperdestruction plaquettaire ou à une anomalie
de répartition. Le myélogramme non systématique est normal avec une richesse
en mégacaryocytes normale, voire augmentée.
La durée de vie des plaquettes est raccourcie, mais n’est étudiée qu’en cas
de difficulté diagnostique [9] (Tableau I).
- Hyperdestruction plaquettaire
Elle est d’origine immunologique ou par consommation, et dans ce cas la
thrombopénie est associé à d’autres anomalies de l’hémostase.
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- Anomalies de répartition
Elles sont presque toujours dues à un hypersplénisme. Toute splénomégalie
quelle qu’en soit la cause peut être responsable d’une augmentation de la
séquestration de plaquettes. Des thrombopénies par dilution sont observées en
cas de transfusions érythrocytaires massives. Il en est de même pour la grossesse
où une thrombopénie modérée de dilution est observée lors du dernier trimestre.
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Tableau I: Etiologie des thrombopénies périphériques
THROMBOPENIES PERIPHERIQUES
Hyperdestruction plaquettaires
-Immunologique
Auto-immunes
PTAI
Syndrome des anti-phospholipides
Lupus
Virale
Allo immunes
Médicamenteuses
Post transfusionnelle
-Consommation plaquettaire
CIVD
PTT
Syndrome de kasabach-Merritt
Circuits extracorporels
Anomalies de repartition
Dilution
Transfusion massive
Grossesse
Splénomégalie
Cas particuliers
Syndrome pseudo-Villebrand Plaquettaire
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C-2-Les thrombopénies centrales
-Les thrombopénies centrales constitutionnelles
Elles sont exceptionnelles, elles ne touchent que la lignée mégacaryocytaire
ou révèlent une aplasie médullaire globale comme la maladie de Fanconi.
Certaines sont associées à une thrombopathie [9, 10] (Tableau II).
- Les thrombopénies centrales acquises
Les thrombopénies centrales acquises sont liées à une aplasie médullaire ou
à une infiltration médullaire. Dans ces thrombopénies centrales, la thrombopénie
pas toujours isolée. Elle peut être associée à une pancytopénie (aplasie) ou à une
prolifération cellulaire anormale. Le myélogramme et (ou) la biopsie médullaire
retrouvent une absence ou une hypoplasie mégacaryocytaire isolée ou associée à
une aplasie-hypoplasie médullaire plus globale ou objectivent une infiltration
médullaire par une prolifération tumorale. La mesure de durée de vie des
plaquettes n’est pas indiquée et elle serait normale (8-10 jours).
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Tableau II : Etiologie des thrombopénies centrales
THROMBOPENIES CENTRALES
CONSTITUTIONNELLES
Amégacaryocytose congénitale
Avec aplasie médullaire
A transmission autosomale dominante
Aplasie médullaire congénitale (Fanconi)
Thrombopenies avec thrombopathies
Maladie de Jean-Bernard et Soulier
Maladie des plaquettes grises
Maladie de May-Hegglin
Syndrome de Wiskott-aldrich
ACQUISES
Amécaryocytose acquise
Aplasie médullaire acquise
Immunologique
Toxique
Carentielle
Dysmyelopoiése
Infiltration médullaire
Leucémie aigue
Tuberculose
Syndrome d’activation macrophagique
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Le chapitre suivant va nous permettre de mieux connaitre ce phénomène à
travers l’étude de ses caractéristiques, ses différents mécanismes et ses
principales circonstances d’apparition.
Les pseudo-thrombopénies se divisent en deux grands groupes : les pseudo-
thrombopénies EDTA dépendantes et les pseudo-thrombopénies EDTA
indépendantes.
I-Incidence
Le taux de prévalence de la fausse thrombopénie est estimé entre 0,07-0,2%.
Sa fréquence moyenne est estimée à 0,1% [8, 11-15].
Les pseudo-thrombopénies dues aux erreurs pré analytiques (telles qu’un
prélèvement difficile, un défaut d’anticoagulant par excès de remplissage du
tube, une absence d’agitation), aux plaquettes géantes, au satellitisme autour des
polynucléaires neutrophiles et aux agglutinines antiplaquettaires sont rares [15].
Le satellitisme des plaquettes aux polynucléaires est un phénomène rare, qui
surviendrait dans un cas sur 12000 numérations réalisées, soit 0,008% [19].
Une étude de Vicari et al [8,16-18], a donné une incidence de pseudo-
thrombopénie de 0 à 13% sur 33623 sujets visés à partir d’un hôpital général.
Cette incidence peut atteindre 1,9% pour les personnes hospitalisées. En
revanche aucune corrélation entre âge, le sexe des patients et la pseudo-
thrombopénie EDTA dépendante n’a été démontrée.
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Une étude similaire de 20761 échantillons réalisée avec l’automate a
montré que l’incidence de la pseudo-thrombopénie est de 0,15% pour les
patients externes et de 1 ,9% pour les patients hospitalisés et pour ces patients
72% sont EDTA dépendants et 28% sont dues aux macroplaquettes [18].
La pseudo-thrombopénie à froid des plaquettes EDTA indépendante est un
phénomène rare, et se produit quand les échantillons de sang sont analysés dans
les compteurs de cellules automatisés [20].
II-Les Pseudo-thrombopénies EDTA-dépendante
La pseudo-thrombopénie est un phénomène obtenu par agglutination
plaquettaire in vitro qui est liée à l’existence d’anticorps dépendant de l’EDTA
qui vont réagir avec les plaquettes dans le tube de prélèvement pour produire des
amas plaquettaires. Ce phénomène amène l’automate à une sous estimation du
nombre de plaquettes, en plus l’agrégat plaquettaire peut être aussi grand qu’un
globule blanc et être énumérer en tant que tel par les automates, ce qui peut
entrainer aussi un faux taux de globules blancs, qu’il faudra corriger [21-31].
A-Les agrégats plaquettaires EDTA dépendantes
A-1-Caractéristiques des agrégats plaquettaires
La pseudo-thrombopénie à l’EDTA est un phénomène in vitro survenant
dans le tube de prélèvement. Il est irréversible et se voit plus souvent chez les
malades porteurs d’un syndrome inflammatoire connu ou jusque la
asymptomatique et dans des états dysimmunitaires. C’est un phénomène
irréversible. La formation d’agrégats plaquettaires est presque totale environ 20
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minutes après prélèvement. A 90minutes, le processus est définitivement achevé
et stabilisé. En début du processus d’agrégation, la formation dans le temps de
micro agrégats peut majorer le chiffre de globules blancs de 10 à 100% (une
alarme du type « interférence » est signalée par les automates). Si les amas
plaquettaires sont transformés en macro agrégats, le taux de leucocytes au
comptage automatique redevient normal [8, 15, 23, 31-39].
Cet artéfact de laboratoire est d’origine immunologique. Il est dû à des
anticorps antiplaquettaires induisant la formation d’amas uniquement en
présence de l’EDTA (Figure 4) [40].
Figure 4 : Image illustrant une agrégation plaquettaire [40].
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A-2-Mécanisme de formation des agrégats plaquettaires
Après une revue de la littérature [15-62], nous avons pu déterminés trois
éléments, qui jouent un rôle primordiale dans de ce phénomène, sous l’action de
l’EDTA. Ces éléments sont les immunoglobulines, les déterminants
antigéniques des plaquettes (la GPIIb-IIIa), et le calcium.
En effet, plusieurs enquêtes [21, 40-52], ont indiqué qu’une fausse
numération plaquettaire EDTA dépendante peut être causée par des agglutinines
présentes dans le plasma. Le constat est que l’anticorps contraignant pour les
plaquettes est strictement EDTA- dépendant, et se produit même en présence
d’une faible concentration d’EDTA, indépendamment de la composition
cationique de la solution d’EDTA. Les anticorps semblent appartenir à toutes les
grandes classes d’immunoglobuline. Les iso types en cause, isolés ou parfois
associés, sont de type IgG ou IgM , plus rarement de type IgA [41].
Les agglutinines IgG, IgM, IgA sont rencontrés dans les pourcentages
respectives de 30-50%, 10-63%, et 4-40% des cas de pseudo-thrombopénies
EDTA dépendante [8, 22,41-42].
Deux éléments ont été utilisés pour mettre en évidence la participation de
l’IgG dans la pseudo-thrombopénie EDTA-dépendante. D’abord, l’étude du
phénomène par le microscope électronique [42]. Ensuite la présence de
l’activité agglutinante dans la fraction euglobuline, la fraction de l’IgG et son
inhibition par IgG anti-serums donne à penser que cette agglutinine est un
anticorps IgG mais pas un IgM [15, 44].
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L’Ig G qui a été caractérisée dans les cas de pseudo-thrombopénie EDTA-
dépendante est indépendante de la température et l’agglutination se produit
généralement en quelques minutes après échantillonnage avec l’EDTA. Elle est
plus souvent visible dans des échantillons de sang conservés à la température
ambiante. Les agrégats constatés sur frottis, sont très variables en taille
comprenant trois à cinq plaquettes, et même plus [8, 44].
L’Ig M qui a été caractérisée dans les cas de Pseudo-thrombopénie EDTA
dépendante, est dépendant de la température. En effet dans ce cas, l’agrégation
plaquettaire est accélérée par le froid [45]. Cette thermo dépendance permet
d’éviter cet artéfact en effectuant le comptage automatique immédiatement après
prélèvement. Ce phénomène n’est pas constant et pour un malade donné
l’anomalie peut disparaître en quelques semaines [11]. L’optimum thermique
quand il est précisé pouvant être de 4°C ou de 22°C. Dans 20% des cas, ils sont
actifs à 37°C. Il s’agit alors d’anticorps de type IgM entraînant la formation
d’amas plaquettaires aussi bien en présence d’EDTA qu’en présence de citrate.
Cet aspect est à rapprocher des cas d’agglutinines froides antiplaquettaires décrit
par plusieurs auteurs, la frontière entre cette entité et les pseudo-thrombopénies
strictement liées à l’EDTA est floue [45, 46].
La physiopathologie de la production de ces anticorps est mal connue, il a
été suggéré qu’elle pourrait correspondre soit à des auto anticorps ou à des
anticorps acquis, résultant de la destruction des plaquettes observés dans
certaines pathologies telle que la septicémie, la toxémie gravidique, le purpura
thrombopénique ou les myélodysplasies. Dans plusieurs cas, il a été montré que
la pseudo-thrombopénie est apparu pendant l’hospitalisation et en particulier
après une infection avec souvent les anticorps liés aux plaquettes de la plupart
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des patients [13, 47]. La cinétique d’apparition de ces anticorps et leurs cibles
antigéniques sont aussi mal connues. Ils ne semblent pas être dirigés contre des
antigènes plaquettaires spécifiques (HPA) [21]. Ces anticorps sont considérées
comme « naturels » et pourraient avoir un rôle physiologique dans l’élimination
des plaquettes âgées [48].
L’étude [40] des plaquettes agglutinées d’un patient ayant des cellules
cancéreuses, lorsque l’anticoagulant utilisé est l’EDTA, a permis à ses auteurs
d’émettre des hypothèses. Elles ont été émises pour expliquer le fait que la
réaction entre l’anticorps et les plaquettes aient été observées seulement en
présence de l’EDTA. La première c’est que l’EDTA agit directement sur les
anticorps pour parvenir à son activation. La seconde est que l’EDTA détruit un
inhibiteur de l’anticorps. Aucune de ces hypothèses ne semble probable à la
lumière des connaissances présentes. La troisième est que la structure de
surface, et donc les déterminants antigéniques des plaquettes, peut être modifiée
par un anticoagulant. L’EDTA est bien connu pour affecter la structure des
plaquettes [50]. De cette étude et bien d’autres [40, 21], la conclusion obtenue
est que le site plaquettaire de fixation des immunoglobulines en présence de
l’EDTA est l’adhésif sur les récepteurs GPIIb-IIIa, et que la fonction
plaquettaire normale est nécessaire pour l’agglutination des plaquettes.
La glycoprotéine GPIIb-IIIa est un hétérodimère calcium-dépendant. La
suppression du calcium par chélation est la cause de la perte de la fonction du
recepteur GPIIb-IIIa [21, 48,49]. Des études [50] de plasmas et de sérums des
patients indiquent que l’agglutination des plaquettes par les agglutinines est
chélateur-dépendant. Les anticorps agglutinent les plaquettes quand on est en
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présence de basse concentration de calcium, obtenu par le citrate, l’oxalate et
l’EDTA.
Le calcium est un constituant biologique important pour la membrane, il est
lié à des groupes multicarboxylates comme l’asparate, le glutamate et des
résidus de membrane protéine ou des groupes multi phosphates comme dans les
phospholipides et l’adénosine triphosphate. Additionné à des ions calcium, ce
dernier peut modifier la conformation de ces éléments. La concentration en ions
calcium est également importante pour certaines enzymes qui ont une incidence
sur la structure des membranes comme le cross linkage de protéines
membranaires par transamidation. A la surface du compartiment plaquettaire, le
calcium semble facilement échangeable avec le milieu environnant et la
concentration des ions calcium peut être affectée. Il est donc possible que la
chélation et l’épuisement de la membrane en calcium entraine un changement de
propriétés de la surface membranaire des plaquettes de sorte que des
« néoantigénes » formés réagissent avec les immunoglobulines. De telles
modifications membranaires semblent être causées par une rapide interaction
entre les agents de chélation et la membrane des plaquettes [28; 48; 49].
La liaison du calcium avec L’EDTA a aussi des répercussions sur la
formation du complexe GPIIb-IIIa.
L’ observation importante concernant le mécanisme d’ agrégation a été que
le sérum ou l’EDTA-plasma induit non seulement l’agglutination des plaquettes
du patient, mais induit également des agglutinations EDTA- plaquettes de la
quasi-totalité des personnes normales à l’ exception des plaquettes des patients
atteints de la maladie de Glanzmann. Cette maladie décrite pour la première fois
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en 1918 par Glanzmann, est caractérisée par une absence d’agrégation des
plaquettes et est liée à un déficit quantitatif ou qualitatif en sites d’amarrage du
fibrinogéne (complexes GPIIb-IIIa) [2]. Ce qui suggère que la GPIIb-IIIa est
impliquée dans le phénomène de la pseudo-thrombopénie.
La constatation que l’EDTA-anticorps ne réagit pas avec des plaquettes de
patients atteints de la maladie de Glanzmann peut être utilisée dans le
diagnostic de cette maladie [40].
Un anticorps monoclonal a été mis en évidence qui ne reconnaît qu’un
épitope sur l’alpha IIb /IIIa beta intégrin, dont l’accessibilité a été porté aux
plaquettes suite à un traitement par l’EDTA [40].
Dans la pseudo-thrombopénie EDTA dépendante les anticorps plaquettaires
sont dirigés contre un déterminant antigénique de la membrane plaquettaire, site
de liaison normalement caché (cryptique) dans la GPIIb /IIIa est modifié par
l’EDTA ou exposé seulement en présence de l’EDTA [50-52].
Certains auteurs ont observé que les anticorps antiplaquettes ont été
associés à des anticorps antiphospholipides dans la plupart des patients testés
suggérant que l’anticorps antiphospholipide chargé négativement pourrait se lier
à des antigènes modifiés par l’ EDTA sur la membrane des plaquettes et pourrait
être responsable de pseudo-thrombopénies [22].
Dans la plupart des cas, aucune anomalie de la fonction plaquettaire n’a été
rapportée en association avec la pseudo-thrombopénie. Il a été démontré que les
plaquettes anormales des syndromes myéloprolifératifs sont beaucoup plus
sensibles à l’agglutination que les plaquettes normales en présence d’EDTA[8].
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
28
Une fois apparue, la pseudothrombopénie liée à l’EDTA a tendance à persister.
Elle peut toute fois être transitoire, en particulier dans les contextes infectieux
ou de prise médicamenteuse. En effet, les drogues comme la mexilétine,
l’abciximab , l’olanzapine et l’acide valproïque ont été signalés dans des études
comme étant liées à des pseudo-thrombopénies, mais leur physiopathologie
demeurent inexpliquées [53- 61].
Les pseudo-thrombopénies peuvent apparaître « isolées » ou inversement
« associées » à des affections auto-immunes, néoplasiques, ou infectieuses. Les
liaisons réelles avec les pathologies associées sont alors très discutées. Les
conséquences directes de la présence de ces anticorps semblent nulles : in vivo,
ils ne sont pas associés à des anomalies de l’hémostase primaire ni à des
anomalies quantitatives plaquettaires. In vitro, ils semblent sans retentissement
sur les fonctions plaquettaires. Leur signification réelle reste donc discutée. Il
pourra s’agir d’anticorps capable de reconnaître des antigènes cryptiques
plaquettaires exprimés uniquement par des plaquettes circulantes âgées ou lésées
comme dans le cas d’infections sévères favorisant leur élimination. Cependant il
est démontré in vivo qu’ils ne sont pas responsables d’un turnover plaquettaire
accru [4, 15].
Plusieurs cas ont été rapporté dans la littérature tel que la pseudo-
thrombopénie chez des patients présentant diverses infections et pathologies
(virus de la rubéole, l’hépatite A, cirrhose du foie, sepsis, mononucléose
infectieuse, syndrome de Guillain-Barré, myélomes multiples, infarctus du
myocarde, syndrome 48XXYY, syndrome immunodéficient acquis) [39, 62-92].
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
29
B- Satellitisme plaquettaire
B-1-Aspects morphologiques
Il s’agit d’un aspect morphologique rare à l’origine de pseudo-
thrombopénies à l’EDTA. Le satellitisme des plaquettes ou leur disposition en
rosette autour d’un globule blanc est une image facile à identifier. Elle ne peut
être confondue avec des globules blancs noyés au milieu d’une concentration
importante de plaquettes obtenue dans les plasmas riches en plaquettes.
Le globule blanc concerné par ce satellitisme est presque toujours un
polynucléaire neutrophile, mais il peut s’agir de façon exceptionnelle de
lymphocytes atypiques, de polynucléaires basophiles ou de monocytes . C’est un
phénomène souvent en relation avec un processus auto-immun, mais dans la
plupart des cas, étranger à une maladie spécifique. Sa signification clinique n’est
pas connue [8, 11, 89].
La phagocytose des plaquettes par les polynucléaires neutrophiles a été
signalée après étude microscopique optique ou électronique des rosettes. Et
pourrait être en relation avec le dysfonctionnement plaquettaire observé dans
certains cas. Lorsque se produit le satellisme plaquettaire, le taux plaquettaire est
modérément réduit conduisant à une pseudo-thrombopénie. La courbe de
distribution des plaquettes n’est pas cohérente dans la plupart des cas. Elle est
rétablie après un examen différentiel avec la courbe de distribution des globules
blancs, parce que les polynucléaires sont anormalement situé sur les graphiques.
Si les satellitismes plaquettaires sont grands, ils ne seront pas détectés par les
automates. Cela dépend de la sévérité de l’agrégation. L’examen d’un frottis
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
30
sanguin périphérique à faible grossissement est obligatoire pour chaque
leucopénie d’un échantillon de patient inconnu ou lorsqu’ on a une chute de la
numération des globules blancs de façon spectaculaire. L’étape de l’examen à
faible grossissement est souvent nécessaire pour faire la preuve de la présence
des éléments massifs. Un faux compte de globule blanc peut être la conséquence
de la diminution de polynucléaires neutrophiles (situé au sein des massifs) ou
l’artéfact de l’agrégation plaquettaire qui donne un faux compte élevé des
globules blancs. Le phénomène décrit ci- dessus est lié à l’EDTA et se produit
in vitro, il est tout à fait différent des agrégats plaquettes globules blancs qui
apparaissent in vivo dans plusieurs conditions inflammatoires, et thrombotiques.
L’essai en cytométrie de flux a été proposé pour énumérer les agrégats
plaquettes-globules blancs [8].
Le satellitisme est observé en quelques minutes après la collecte de sang
suivie d’une migration progressive des plaquettes à un pȏ le des polynucléaires
neutrophiles après une à trois heures initiant un amas de plaquettes collé au
polynucléaire neutrophile et finalement après quatre à six heures, on aura des
amas de liaisons plaquettes-polynucléaires d’une part et des amas de liaison
plaquettes libre dans le sang d’autre part. Ainsi selon le temps écoulé après
l’échantillonnage on va observé le satellitisme ou agrégats plaquettaires.
D’autres situations liées à l’EDTA ont été décrites sous le terme de
« satellitisme », mais de telles situations correspondent soit à des massifs
lymphocytaires ou à globules rouges [8].
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
31
B-2-Caractéristiques et mécanismes de formation du satellitisme
plaquettaire
B-2-1-Mécanisme de type immunologique
L’EDTA à basse température altère la conformation des glycoprotéines
plaquettaires et du récepteur du fragment cristallisable (Fc) des globules blancs
par chélation d’ions calcium. Dans ce phénomène sont impliqués des auto
anticorps de type IgG dirigés contre la glycoprotéine IIb/IIIa exprimé sur la
membrane plasmatique après activation plaquettaire, mais aussi contre le
récepteur Fc gamma RIII (FcγRIII) (CD16) des leucocytes. Cette double
spécificité a été confirmée par l’absence de réactivité de ces auto anticorps vis-à-
vis de plaquettes chez des patients atteints de thrombosthénie de Glazmann et
vis-à-vis des leucocytes chez des patients ayant une absence congénitale de
récepteur FcγRIII. L’EDTA va démasquer des cryptoantigènes qui vont être
accessibles aux auto anticorps. Dans le satellitisme, le fragment Fab de l’auto
anticorps va se fixer à la glycoprotéine IIb/IIIa et le fragment Fc au récepteur
FcγRIII des leucocytes, entrainant ainsi la formation de ponts entre les
plaquettes et les globules blancs.
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32
B-2-1-a-Agglutination neutrophiles-plaquettes
Le satellitisme des plaquettes aux polynucléaires survient in vitro lorsque
l’échantillon sanguin est prélevé en présence d’EDTA, conservé et analysé à
température ambiante, mais ne survient pas si le prélèvement est maintenu à
37°C dès son recueil ou si le sang est prélevé en présence d’anticoagulants autre
que l’EDTA, comme l’héparine, le citrate et l’oxalate. Cependant des cas de
satellitisme plaquettaire survenus en présence de citrate et d’héparine ont été
décrits [19].
Ce phénomène n’est pas associé à une situation clinique particulière ou à
une prise médicamenteuse [89].
En outre aucune relation n’a été établie avec les anomalies de l’hémostase,
la présence d’auto anticorps spécifiques et non spécifiques d’organes, de facteur
rhumatoïdes, de cryoglubolines ou d’agglutinines froides.
Deux mécanismes sont proposés pour expliquer le phénomène de
satellitisme plaquettaire. Le premier consiste en un mécanisme immunologique
reposant sur la présence d’un auto anticorp. En effet, le phénomène est
reproductible par incubation du sérum ou du plasma EDTA provenant d’un sujet
présentant un satellitisme plaquettaire avec le sang d’un patient normal prélevé
en présence d’EDTA. Cette hypothèse est corroborée par les travaux de
Bizarraro et al [8] regroupant 14 patients ayant présenté un satéllitisme
plaquettaire. Les résultats de cette étude suggèrent que ce phénomène est médié
par des immunoglobulines d’isotypes G reconnaissant un épitope cryptogénique,
exposé en présence d’EDTA à température ambiante et localisé à la fois sur la
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
33
glycoprotéine GPIIbIIIa (CD41/61) de la membrane plaquettaire et sur le
récepteur Fcγ RIII(CD16) de la membrane du polynucléaire. La survenue du
phénomène en présence du fragment fab’2 des IgG prouve que la liaison est
indépendante du fragment Fc de l’immunoglobuline et que le même reconnu au
niveau des plaquettes et des polynucléaires.
Pour le satellitisme des plaquettes autour des monocytes, des cellules
Natural Killer (NK), des polynucléaires basophiles et des polynucléaires
éosinophiles, les renseignements obtenus dans la littérature sont contradictoires.
En effet il y’a certains auteurs qui soutiennent l’existence de satellitisme
plaquettaires au lymphocytes, des monocytes et des cellules du lymphomes avec
un mécanisme impliquant des Immunoglobulines et le récepteur CD16 en tant
que médiateurs pendant que d’ autres auteurs soutiennent que bien que le
récepteur FcγRIII soit présent à la surface des monocytes, des cellules NK et
des polynucléaires neutrophiles, seuls ces derniers sont impliqués dans le
phénomène de satellitisme plaquettaire. Deux types de récepteurs FcγRIII codés
par deux gènes différents ont été décrits. Seul le récepteur FcγRIIIb présent sur
la membrane polynucléaire neutrophile posséderait l’épitote crytogénique
reconnu par les anticorps précédemment décrit, contrairement au récepteur
FcγRIIIa existant à la surface des monocytes et des cellules NK [8, 11].
De grands agrégats contenant plusieurs plaquettes observés, semblait être la
fin d’un processus évolutif amorcé par un satellitisme plaquettaire typique
autour des polynucléaires neutrophiles. Le nombre de cas signalés est faible et
les études qui traitent de cet artéfact sont rares et ne permettent pas d’avoir une
compréhension définitive sur ce mécanisme d’agglutination. Certains auteurs
décrivent des interactions plaquettes leucocytes in vivo et leur importance bien
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
34
reconnue dans la modulation de l’inflammation et de l’hémostase [89]. De temps
en temps et seulement dans des conditions particulières, les plaquettes peuvent
agir réciproquement avec des complexes polynucléaires neutrophiles formant
des complexes qui peuvent mener à une pseudo-thrombopénie. Le phénomène
était évident quand le sang était traité avec EDTA comme anticoagulant et
incubé à température ambiante (Figure 5).
Un film capillaire de sang exécuté sans EDTA n’a pas révélé de satellitisme
plaquettaire. Le sang avec l’oxalate d’ammonium est normal [89].
Figure 5 : Image illustrant le satellitisme plaquettaire autour de deux
polynucléaires neutrophiles [39].
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
35
B-2-1-b-Satellitisme plaquettaire aux lymphocytes à grains
Certains lymphocytes semblent être impliqués dans le satellitisme
plaquettaire (figure 6A et B), en effet l’étude de Espagnol et al [8, 39] met en
évidence un satellitisme plaquettaire à la fois autour des polynucléaires
neutrophiles et de lymphocytes à grains. Ces lymphocytes (de phénotype NK)
présentent le marqueur CD16, ce qui permet de conclure à la même hypothèse
mécanique que le satellitisme autour des polynucléaires neutrophiles.
L’originalité de l’observation réside dans le fait que le satellitisme touche
exclusivement les lymphocytes atypiques, ce qui permet d’évoquer une liaison
entre le satellitisme et la pathologie lymphomateuse. Un tel phénomène a déjà
été rapporté pour un contexte du lymphome du manteau sur une population de
cellules B monoclonales exprimant les marqueurs CD5 et CD20. Les cellules
lymphomateuses des patients expriment également le marqueur CD20. Ce qui
pourrait faire évoquer la présence d’un antigène crytogénique commun à
GPIIb/IIIa et à CD20. Mais CD20 est présent sur toute la ligneée B, cette
hypothèse ne permet donc pas d’expliquer le caractère exclusif du satellitisme
vis-à-vis des lymphocytes atypique. Enfin la dernière hypothèse envisagée pour
expliquer le phénomène de satellitisme plaquettaire limité aux cellules
lymphomateuses serait la reconnaissance par l’immunoglobuline monoclonale
sécrétée par les lymphocytes atypiques, d’un antigène cryptogénique exprimé
par les plaquettes. Ce cas original de satellitisme des plaquettes aux lymphocytes
atypiques constitue un autre exemple de pseudo-thrombopénie EDTA
dépendante, à coté des agglutinations des plaquettes ou du satellitisme des
plaquettes aux polynucléaires neutrophiles [91].
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
36
Figure 6A et B : Image illustrant le satellitisme des plaquettes autour des
lymphocytes atypiques (frottis sanguin coloré au May-Grünwald-Giemsa :
grossissement x 1 000) [39].
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37
B-2-2-Mécanisme non immunologique
Le mécanisme non immunologique du satellitisme implique la
thrombospondine, mais aussi d’autres protéines des granules α des plaquettes,
telle que la P sélectine, qui sous l’effet d’un stimulus d’activation vont être
rapidement exprimées à la surface plaquettaire favorisant ainsi l’ adhésion des
plaquettes aux leucocytes[11].
En étudiant les plaquettes d’un sujet présentant un satellitisme plaquettaire,
certains auteurs ont constaté que les plaquettes impliqués dans le satellitisme
sont fortement marquées par des anticorps monoclonaux murins dirigés contre la
thrombospondine de surface et intracellulaire, alors que les plaquettes non
impliquées sont faiblement ou non marquées [11, 89].
Le stimulus d’activation est présent et est rapidement exprimé sur la surface
plaquettaire favorisant l’adhésion aux neutrophiles. Les biologistes devraient
être conscients qu’un certain nombre de thrombopénies d’étiologie incertaine
peut être artéfactuelles dans des conditions particulières telles que le satellitisme
plaquettaire.
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38
III-Les Pseudo-thrombopénies EDTA indépendantes
A-Les Pseudo-thrombopénies de nature auto-immune
A-1-Les cryoglobulines
Les cryoglobulines sont constituées d’immunoglobines monoclonales ou
polyclonales ou de complexes immunoglobuliniques qui forment un précipité à
basse température. Cette précipitation est réversible et le précipité se redissout
au réchauffement. Le mécanisme de la cryoprécipitation est mal connu, faisant
intervenir des forces d’interaction moléculaires liées aux structures tertiaires ou
quaternaires des molécules. Il existe trois groupes de cryoglobulines :
Les cryoglobulines monoclonales (type I), ce sont surtout les IgM, parfois
IgG, rarement IgA. Leur concentration est souvent élevée (> 5g /l). Elles se
voient surtout au cours des hémopathies malignes et représentent 25% des cas de
cryoglobulinémies.
Les cryoglobulines mixtes monoclonales et polyclonales (type II) sont
constituées d’Ig appartenant à deux classes différentes, l’une monoclonale,
l’autre polyclonale, formant un complexe immun. Leur concentration varie de 1
à 5g /l. Elles représentent 50% des cas de cryoglobulinémies et peuvent être soit
des IgM monoclonale plus IgG polyclonales ou l’IgM a activité anti-IgG de
type facteur rhumatoïde (les plus fréquentes), soit des IgG monoclonale plus IgG
polyclonale ou l’IgG monoclonale a activité anti-IgG, soit des IgA monoclonale
plus IgG polyclonales ou l’IgA monoclonale a une activité anti-IgG (les plus
rares).
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
39
Enfin les cryoglobulines mixtes polyclonales (type III), ce sont le plus
souvent des complexes IgM polyclonales plus IgG polyclonales avec une
activité facteur rhumatoïde des IgM. Elles sont habituellement de faible
concentration (<1g/l). Elles représentent 25% des cas des cryoglobulinémies.
Les techniques d’immunofixation mettent en évidence des cryoglobulines faites
d’Ig polyclonales associées à des Ig oligoclonales, notamment dans les
infections virales (VIH, hépatite C).
Tous les types de cryoglobulines sont susceptibles d’interférer sur
l’hémogramme. Toutefois, l’interférence est d’autant plus probable que la
cryoglobuline précipite rapidement et à température proche de la température
ambiante. La concentration de la cryoglobuline n’est pas toujours en rapport
avec le déclenchement de l’interférence.
Dans le sérum, les particules de cryoglobulines ont un volume compris
entre 3et 25fl avec un pic de fréquence entre 5et 10 fl. Dans le sang, il n’est pas
exclu que les précipités de cryoglobulines puissent incorporer d’autres cellules,
notamment des plaquettes. Les particules les plus volumineuses englobant
éventuellement des plaquettes, peuvent fausser la numération des leucocytes.
L’interférence est habituellement levée après incubation 30 minutes à 37°C, à
prolonger si besoin (nous conseillons toutefois de ne pas dépasser 2heures pour
éviter une altération des cellules du sang).
Avec les appareils Bayer Technicon™ (détection optique des cellules du
sang fondée sur le principe de la diffraction d’un rayon lumineux), les
cryoglobulines se manifestent essentiellement par une interférence au niveau de
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
40
l’origine de distribution en volume des plaquettes (événements proche de 2fl)
conduisant à un volume plaquettaire moyen anormalement bas.
Avec les appareils Coulter™ (détection des cellules du sang par variation
d’impédance), le principal indice permettant de suspecter une cryoglobulinémie
est la présence d’une numération leucocytaire élevée, constamment associée à
une alarme qui signe une interférence par des éléments de faible volume détecté
au niveau de l’histogramme différentiel des leucocytes. Une incidence sur la
distribution plaquettaire est possible mais inconstante, s’accompagnant alors de
l’alarme qui signifie que la distribution en volume des plaquettes est atypique
(prédominance d’évènements de faible volume en l’occurrence). Il est à noter
que les fausses hyperleucocytoses rapportées dans la littérature avec les
appareils Coulter™ sont parfois transitoires ou intermittentes [93].
Certaines cryoglobulines IgM monoclonales (type I) ont une activité
agglutinine froide vis-à-vis des hématies (IgM kappa anti-I), et peuvent de ce
fait interférer aussi dans leur analyse.
D’un point de vue morphologique, les cryoglobulines sont habituellement
visibles à l’état frais entre lame et lamelle. Elles se présentent comme des
particules à contours irréguliers faiblement réfringents, ou plus rarement comme
des cristaux de formes variées, aiguilles, cristaux courts « écailles ». Sur frottis
coloré au MGG, elles sont rarement identifiables. Elles prennent la forme de
petits précipités grisâtres, des sphères extracellulaires bleuâtres, de particules
amorphes rosées ou de corpuscules situés dans le cytoplasme des polynucléaires
neutrophiles. La nature des inclusions contenues dans le cytoplasme des
polynucléaires neutrophiles a été étudié pour un cas de cryoglobulinémie de
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
41
type I constituée d’une IgG monoclonale à chaine légère lambda. La technique
d’immunomarquage utilisée a permis de montrer que ces inclusions étaient
constituées de l’immunoglobuline monoclonale gamma2lambda2
cyoprécipitante[93,94].
A-2-Activité agglutinine froide des cryoglobulines IgM monoclonale
(type1) vis-à-vis des plaquettes
L’agglutinine froide est présente dans le sérum et le plasma, c’est une
immunoglobuline qui est adsorbé par les plaquettes en absence de cations
bivalents, et réagit seulement à une température inférieure à 37°C. Elle agglutine
les plaquettes mais apparait sans effet sur la fonction plaquettaire in vivo, et elle
peut être à l’origine d’une pseudo-thrombopénie [94-97].
Une étude de Watkins et Shulman [97] décrit le phénomène d’agglutination
plaquettaire responsable de la pseudo-thrombopénie chez cinq patients. Cette
agglutination est causée par une protéine anormale qui s’attache aux plaquettes à
une température inférieure à 37°C et qui a les caractéristiques physiques et
immunologiques des immunoglobulines. Cette protéine n’a aucun effet
démontrable sur la fonction plaquettaire in vivo. La présence d’un agent
agrégeant a été mise en évidence devant la discordance des comptes
plaquettaires sur automate et au microscope. Après le constat de l’agglutination
à la température ambiante, une attention particulière a été faite pour déterminer
l’agglutinine responsable. Deux des cinq patients ont un carcinome métastasique
sans anomalie protéique détectée. Les trois autres ont des pathologies associées
à un taux élevé de gammaglobulines et de cryoprotéines. Un certain nombre de
substances de bas poids moléculaire sont connus pour agglutiner les plaquettes
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
42
in vitro : adenosine diphosphate, adenosine triphosphate, norépinéphrine, 5-
hydroxytriptamine et epinephrine hydrochloride. Mais les agglutinines décrites
chez ces patients sont des substances qui ont un poids moléculaire élevé, et dont
le mécanisme ne dépend pas de la présence de calcium, ni de magnésium pour
agir. Le type d’anticoagulant utilisé n’a donc aucun effet sur l’agglutination.
L’agglutinine froide décrite est présente dans le sérum, ne requière pas de
pH acide pour son activité, elle réagit en absence de cations divalents en
s’adsorbant sur les plaquettes par ses propriétés physicochimiques coïncidant
avec les protéines de type immunoglobuline, et il est prouvé que c’est une
gammaglobuline par des techniques immunologiques.
Le mécanisme est aussi immunologique, mais non imputable à L’EDTA. La
formation d’agrégats plaquettaires est sous la responsabilité d’un auto anticorps
de type agglutinine froide qui apparait dans les maladies auto-immunes. Il s’agit
d’une thrombocytoagglutinine, car elle est dirigée contre les plaquettes.
L’agglutination des plaquettes EDTA-indépendante, est un phénomène
spontané rare et moins souvent décrit. Les agglutinines froides ont été
caractérisées par les techniques d’ELISA, immunostaining et western blott.
Aucun cas d’hémorragie, ou de thrombose n’a été rapporté en relation avec la
pseudo-thrombopénie EDTA indépendante. De précédentes études ont suggéré
l’association entre l’agglutinine froide et des maladies infectieuses. En général
la plupart des agglutinines froides ne sont pas bien caractérisés. La présence
d’agglutination plaquettaire a précédemment été visualisée seulement par
comptage manuel et par des compteurs cellulaires automatiques. Grace à
l’utilisation du cytomètre en flux, il a été possible de visualiser l’agglutination
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
43
plaquettaire à des températures inférieures à 37°C. L’anticorps responsable de
l’agglutination à froid a un titre relativement bas (réactif à la dilution 1,5 à
22°C).Dans l’étude initial du phénomène de Watkins et Shulman [110], en
compatibilité avec des études précédentes, la classe d’immunoglobuline qui a
été identifié responsable de l’attache des plaquettes et l’anticorps du sérum
comme étant IgM. Watkins et Shulman ont déterminé que l’anticorps avait un
poids moléculaire supérieur à 100kDa. En utilisant la technique de blocage
compétitif, dans une analyse de cytométrie en flux, il a été démontré
l’agglutination des plaquettes EDTA indépendante. Dans le cas actuel pourrait
être bloquée antérieurement par une addition d’Anticorps monoclonal dirigés
contre la GPIIbIIIa (antiCD41), soutenant plus loin le complex GPIIb comme le
site d’attache pour les agglutinines froides. Il a été déterminé que les plaquettes
du patient fonctionnaient essentiellement normalement. Donc ce qui met l’étude
en accords avec des rapports précédents qui n’indiquait pas d’hémorragie, ni de
thrombose en relation avec les agglutinines froides. Des études d’amplitude
thermique de ce cas étudié ont indiqués que l’anticorps avait peu d’activité au-
dessus de 30°C. C’est probablement pour cela que ces patients ne subiront pas
de complications cliniques avec les agglutinines froides. Il peut cependant poser
un problème dans les circonstances inhabituelles, comme la chirurgie cardiaque
avec hypothermie.
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
44
B-Les Pseudo-thrombopénies de nature physique
-Les macrothrombocytes ou plaquettes géantes
Par mécanisme physique il est question d’anomalies de détection des
plaquettes du fait de leur taille ou de leur volume. Les comptages par
impédancemétrie ignorent les méga ou macrothrombocytes. L’automate XE-
2100™ de Sysmex utilise une double mesure optique (une diffraction à petit
angle renseignant sur le volume et une émission de fluorescence), permettant
ainsi de supprimer ce type de piège dans la majorité des cas. En dernier recours,
seule la numération en cellule de comptage au microscope optique permet de
contrôler la numération plaquettaire [11] (Figure 7).
Dans des cas normaux et dans plusieurs situations pathologiques, certaines
plaquettes ont un grand volume. Les automates considèrent les particules ayant
un volume compris entre 30 et 36fl comme des plaquettes. En prenant en compte
ces automates et les échantillons sanguins certaines plaquettes pourront être
oubliées. Dans les situations pathologiques comme les syndromes
myélodysplasiques il faudra faire attention aux plaquettes qui sont de taille
proche des globules blancs et risquent d’être énumérer comme tel. La présence
des plaquettes géantes héréditaires peuvent être à l’origine de pseudo-
thrombopénies [99].
Cependant la non prise en compte des macroplaquettes est un défi réel dans
les états de thrombopénie comme la bonne numération plaquettaire est d’une
importance pour les hématologistes. Dans tous les cas une amélioration
considérable doit être faite pour différencier les larges plaquettes des autres
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
45
particules. Si on a un grand nombre de plaquettes l’alternative est l’utilisation
des marqueurs immunologiques qui requière l’utilisation de cytomètre en flux
avec une éventuelle utilisation en routine au laboratoire [8].
Figure 7: Image illustrant un frottis sanguin coloré au MGG (grossissement
X100) montrant une plaquette géante [99].
C-Les Pseudo-thrombopénies de nature chimique
Dans ce type de phénomène, les plaquettes in vitro chez un malade donné se
constituent aussi en agrégats. C’est un phénomène non immunologique,
indépendant de l’EDTA ou du citrate conventionnel utilisé en coagulation et
irréversible. La formation d’agrégats dans ce cas est due à une augmentation du
pH dans le tube au cours du temps correspondant à un phénomène
d’alcalinisation du milieu. Pour avoir un comptage exact, il faut prélever le sang
sur un tube avec un citrate spécial dit « citrate acide » [11,100].
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
46
TTrrooiissiièèmmee ppaarrttiiee CCoonndduuiittee àà tteenniirr ddeevvaanntt uunnee ffaauussssee tthhrroommbbooppéénniiee
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
47
I-Réalisation d’un frottis sanguin
Elle est systématique devant toute thrombopénie. Le frottis sanguin consiste
en la réalisation d'un étalement monocellulaire des éléments sanguins (figure 8).
Dans tous les cas, il faut réaliser un frottis sanguin coloré au MGG pour d’ une
part apprécier la morphologie plaquettaire et la taille (anisocytose
physiologique, macro plaquettes et plaquettes géantes) et d’autres part
rechercher des amas plaquettaires (figure 9) et enfin analyser les éléments
leucocytaires et érythrocytaires.
Figure 8 (A,B,C,D) : Etapes de réalisation d’ un frottis sanguin[101].
Placer une petite goutte de sang frais à une extrémité d'une lame de
microscope (A). A l'aide d'une seconde lame placée à un angle de degré, toucher
légèrement à la goutte jusqu'à ce que le sang s'étende sur toute la largeur de la
seconde lame (B). Puis, faire glisser la seconde lame rapidement jusqu'à l'autre
LLeess FFaauusssseess TThhrroommbbooppéénniieess
48
extrémité de la première lame (C). Le résultat devrait être un frottis mince avec
une bordure irrégulière tel qu'illustré (D).
Frottis Normal Amas de Plaquettes
Figure 9 : Image illustrant les frottis colorés au MGG montrant un frottis
normale (A) et des amas plaquettaires (B) [101].
II-Détermination du type de pseudo-thrombopénie
Le prélèvement de sang sur un anticoagulant autre que l’EDTA (citrate de
sodium, héparinate de lithium, oxalate d’ammonium ou citrate de sodium avec
un pH plus acide peut être proposé) permet de déterminer le type de pseudo-
thrombopénie. Ainsi nous aurons une pseudo-thrombopénie EDTA- dépendante
si le compte plaquettaire redevient normal avec disparition des amas
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plaquettaires après observation sur frottis, et une pseudo-thrombopénie EDTA-
indépendante si le compte plaquettaire reste bas et le maintient des amas
plaquettaires après observation sur frottis.
A-Prélèvement sur tube citrate à 10%
Le citrate de sodium neutralise les ions calcium en le liant pour former un
complexe non ionisé (citrate de calcium). Le citrate de sodium à 10% permet
d’effectuer quasi toutes les analyses sur plasma pour l’exploration de
l’hémostase. Comme c’est un anticoagulant liquide il est important que les tubes
soit correctement rempli afin de respecter le facteur de dilution.
B-Prélèvement sur tube héparine
Cet anticoagulant naturel est utilisé en thérapeutique inhibe la coagulation
en agissant comme une antithrombine en empêchant la transformation de
prothrombine (facteur II de la coagulation) en thrombine (facteur II activé). Les
tubes héparinés sont rarement utilisés (figures 12 et 13).
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Figure 10 : Image illustrant un frottis obtenu après usage de l’EDTA [10].
Figure 11: Image illustrant un frottis après usage de l’héparine de lithium
avec le même échantillon [10].
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C-Autres investigations d’une pseudo-thrombopénie induite par
l’EDTA
L’utilisation de la théophilline à une concentration supérieure à 7mg/ml chez
des patients normaux a produit un compte plaquettaire similaire à celui de la
mixture théophilline-héparine et de l’EDTA. Chez les patients qui ont présenté
une pseudo-thrombopénie avec l’EDTA, après traitement avec la théophylline
le compte plaquettaire est normal et demeure inchangé six heures après le
prélèvement. Une observation au microscope a permis d’observer des agrégats
plaquettaires sur les frottis ou l’anticoagulant utilisé est l’EDTA. Par contre
aucune agrégation dans le sang ou l’anticoagulant est la théophylline. La
conclusion est que la théophylline peut être utilisée pour l’investigation d’une
pseudo-thrombopénie quand on utilise un automate [102, 103].
Certaines études ont fait mention de l’utilisation du sulfate de magnésium
MgSO4 comme anticoagulant pour la numération plaquettaire en cas de pseudo-
thrombopénie EDTA dépendante [106].
En outre, d’autres éléments comme les antibiotiques comme la kanamycine,
et les aminoglycosides ont été répertoriés par des auteurs comme ayant des
capacités de dissociation de l’agrégation plaquettaire [104-111].
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III- Comptage manuel
Un comptage au microscope optique (cellule de Malassez après dilution à
l’aide du système unopette) peut s’avérer nécessaire en cas d’impossibilité de
l’automate à réaliser la numération plaquettaire, en particulier en cas de
macroplaquettes non comptabilisées. Bien que cette méthode ait été longtemps
reconnue comme le gold standard pour compléter les plaquettes, elle nécessite
un certain apprentissage (les plaquettes apparaissent comme des éléments
réfringents peuvent être confondus avec des débris cellulaires) et reste sujette à
une grande variabilité. D’ailleurs, le coefficient de variation rapporté dans la
littérature est situé entre 15 et 25% ce qui en fait une technique peu
reproductible.
IV-Comptage immunologique
Le comptage immunologique des plaquettes par cytométrie en flux est
maintenant proposé comme nouvelle méthode de référence. Le principe repose
sur une analyse cellulaire après marquage des plaquettes par un anticorps
spécifique (anti-GPIIbIIIa, anti-GPIb) couplé à un fluorochrome. La
quantification des plaquettes s’effectue alors, en faisant un rapport entre les
événements marqués et soit les hématies, soit des billes mises en quantité
connue dans le tube. Cette méthodologie est décrite comme plus sensible et
reproductible. Elle est utile et son utilisation est proposée afin d’affiner la
précision des valeurs rendues en cas de thrombopénie.
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V-Conduite à tenir devant une pseudo-thrombopénie EDTA-
dépendante
La réalisation du frottis sanguin et le changement d’anticoagulant sont les
deux éléments qui permettent de constater avec certitude la pseudo-
thrombopénie EDTA- dépendante.
L’observation du frottis sanguin et l’analyse du cytogramme de comptage
des plaquettes (en particulier la courbe de répartition de la taille ou de volume
de la population plaquettaire) permettront de déterminer s’il s’agit d’agrégats
plaquettaires ou de satéllitisme plaquettaire.
L’observation du frottis, le comptage manuel ou immunologique et
recomptage automatique en utilisant un autre anticoagulant sont les procédures
recommandées pour pouvoir valider le compte plaquettaire. Il faut tenir compte
du facteur de dilution si l’anticoagulant utilisé est le citrate.
VI-Conduite à tenir devant une pseudo-thrombopénie EDTA
indépendante
Dans le cas de la réalisation de frottis après un changement d’anticoagulant
qui maintient la présence d’amas plaquettaires, et le compte plaquettaire bas, il
est recommandé de chauffer le tube de prélèvement à 37°C pendant une demie
heure au bain marie. Un compte plaquettaire manuel ou immunologique et par
l’automate doit être effectué, si le phénomène persiste.
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VII-Arbre décisionnel pour la prise en charge des fausses
thrombopénies.
Compte plaquettaire bas
Réalisation d’un frottis sanguin
Amas plaquettaires sur EDTA
Numération des plaquettes sur tube
citrate
Persistance des Amas
Diagnostic de Pseudo-thrombopénie
EDTA-indépendante
Chauffer le tube à 37°C au
bain marie 30 minutes
Absence des Amas et/ou le taux des
plaquettes augmente
Diagnostic de Pseudo-thrombopénie
à l’ EDTA
Tenir compte du facteur de
dilution
Disparition des Amas Persistance des Amas
Comptage manuel et
immunologique
Diagnostic d’une
thromboagglutinine
Possible : observation des
plaquettes géantes
Diagnostic :
Micro caillots
Problémes de prélèvement
Rendre : Amas plaquettaires
Refaire le Prélèvement
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CONCLUSION
Au terme de notre travail, nous pouvons conclure que la numération
automatique des plaquettes bien qu’elle soit plus précise que les méthodes
manuelles, peut entrainer des erreurs par défaut que sont les pseudo-
thrombopénies. C’est un phénomène in vitro survenant dans le tube de
prélèvement qui n’entraine aucun risque pour le patient, c’est un artéfact de
laboratoire qui ne s’accompagne jamais de phénomène hémorragique.
Leur méconnaissance peut aboutir à des décisions d’ordre clinique inutiles
et nocives. En effet des pseudo-thrombopénies méconnues à l’EDTA ont
entrainés des investigations complémentaires dont la ponction médullaire, des
bilans d’auto-immunité itératifs, des traitements inefficaces au long cours par les
corticoïdes, voire même des cas extrêmes de splénectomie. Cependant, la
conséquence la plus fréquente est une interruption d’intervention chirurgicale ou
un report des examens invasifs par découverte d’une thrombopénie dans le bilan
préopératoire [11].
Le biologiste doit donc toujours rester vigilant à ce phénomène de fausse
thrombopénie. C’est un piège diagnostique à connaitre. Pour pouvoir se
prémunir contre ces pièges, des procédures strictes peuvent être proposées.
C’est dans cette démarche que s’est inscrit notre travail, qui après avoir expliqué
les mécanismes de ce phénomène, a proposé un arbre décisionnel. Ainsi en
présence d’agrégats plaquettaire qu’ils soient EDTA dépendant ou non EDTA
dépendant, la procédure en plusieurs étapes nous permet d’obtenir le taux réel
des plaquettes.