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Intervention précoce dans les troubles bipolaires: un développement justifié

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INTERVENTION PRI COCE

DANS LES TROUBLES BIPOLAIRES :

UN Dt VELOPPEMENT JUSTIFII

PHILIPPE CONUS 1, PATRICK D . McGORRY 2

1. Medecin Psychiatre, RD., Departement de Psychiatrie Adulte (Universite de Lausanne), Senior Lecturer dans le Departement Universitaire de Psychiatrie (Melbourne)

2. Professeur dans le Departement Universitaire de Psy- chiatrie (Melbourne), Directeur de ORYGEN Youth Health and ORYGEN Research Centre (comprenant EPPIC, Early Psychosis Prevention and Intervention Centre), Parkville, Australie

Correspondance :

Docteur Philippe Conus Clinique de Cery DP-CHUV 1008 Prilly, Suisse e-mail : phil [email protected]

L e traitement des psychoses a pendant longtemps ere conduit dans une perspec- tive de chronicite, et visait

avant tout a soutenir les patients dans la gestion d'un handicap. Le developpement d'un interet pour la phase precoce des troubles psycho- tiques a cependant permis, au cours des 20 dernieres annees, l'ou- verture de perspectives nouvelles et fait naitre l'espoir d'ameliorer l'evo- lution des patients en intervenant plus rapidement et de maniere plus adaptee, dans une phase de la maladie o/a l'on suppose un plus grand potentiel de recuperation.

C'est probablement le pessi- misme avec lequel on a longtemps considere la schizophrenie qui explique qu'elle ait accapare la plus grande part de l 'attention dans ce domaine, ~ tel point que par "pre- mier episode psychotique" on entend le plus souvent "premier episode schizophrenique". I1 en resuhe que les psychoses affectives, et les premiers episodes maniaques en particulier, ont ere negligees par ce type de recherche. I1 semble

cependant important de rattraper ce retard, de mani~re a faire profi- ter les patients qui en souffrent des progres qui ont ete faits dans le cadre de ces developpements et qui semblent etre en passe d'ameliorer l 'evolution potentiellement desas- treuse des troubles psychotiques [39]. Cet article passe en revue les principaux elements qui justifient le developpement d'un tel interet et esquisse les axes de recherche qui devraient etre investis.

EVOLUTION DES PATi[ENTS PRIESENTANT

UN TROUBLE BIPOLAI{RE

Jusqu'a recemment, on a considere que les troubles bipolaires etaient caracterises non seulement par leur nature cyclique, mais egalement par une recuperation complete entre les episodes ainsi qu'une evo- lution globalement favorable. Plu- sieurs travaux relativement recents ont cependant demontre que tel n'est pas le cas pour une importan- te proport ion de patients [7, 12, 18, 66, 69]. Le developpement de

cette lecture plus realiste de l'evo- lution des troubles bipolaires est lie

divers facteurs. Premierement, dans sa defini-

tion initiale de la psychose maniaco- depressive, Kraepelin [26] avait rete- nu parmi les criteres diagnostics celui justement d,une evolution favorable, induisant ainsi un biais de selection qui est probablement la racine de l 'optimisme injustifie avec lequel la maladie a longtemps ete consideree. Eabandon de ce cri- tere a permis d'elargir le diagnostic, d'etudier des populations plus representatives des diverses formes que peut prendre la maladie, et ainsi d'identifier des patients dont l'evolution est moins favorable.

De plus, les criteres d'evalua- tion de l 'evolution se sont raffines avec le temps. Alors que la plupart des etudes se limitaient jusqu'~ recemment a l 'observation de la disparition, souvent relativement rapide, des sympt6mes maniaques, Tsuang et coll. [69] parmi les pre- miers, ont observe que 2z~ % des patients conservaient une incapaci- te de travail meme 30 ans awes

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]N~} E P, VENTIf()N PR~:]COCE

RESUMI ~ _ Parmi tousles troubles psycbotiques, les psychoses affectives constituent un domaine neglige par le deve- loppement des strategies d'intervention precoce. Pourtant, l'evolution des troubles bipolaires n'est pas aussi favorable qu'on l'a longtemps cru : si le syndro- me maniaque se resout dans la quasi-totalite des cas, la majorite des patients ne retrouve pas son niveau de fonctionnement anterieur. Plusieurs donnees de la lit- terature, dont il est question dans cet article, sugge- rent que l'application des principes de base de l'in- tervention precoce (identification precoce des nouveaux cas, traitement optimal et specifique du premier episode, intervention dans la phase prepsy- chotique) soit non seulement .justifiee dans les troubles affectifs, mais qu'elle pourratt en influencer positivement l'evolution.

M O T S - C L E S Intervention precoce - Premier episode psychotique - Troubles bipolaires -Manie - Evolution

EARLY INTERVENTION IN BIPOLAR DISORDERS; A JUSTIFIED DEVELOPMENT

A B S T R A C T Among all psychotic disorders, affective psychoses are a neglected area in the development of early inter- vention strategies. However, the outcome of bipolar disorders is not as favourable as it has previously been considered. Even if the manic syndrome resolves itself in the majority of cases, most patients do not recover their former level of functioning. Several aspects of the current literature which are examined in this arti- cle suggest that the implementation of the main prin- ciples of early intervention in affective disorders is more than justified. In this perspective, the early detection of new cases, the application of optimal and specific treatments from the first episode, as well as the intervention at the pre-psychotic stage could result in a more favourable outcome in bipolar disor- ders.

K E Y W O R D S Early intervention - First episode psychosis - Bipolar disorders - Mania - Outcome

l'episode maniaque initial. De maniere similaire, Dion et coll. [12] se sont interesses a l 'evolution fonctionnelle d'un groupe de 44 patients 6 mois awes leur hospita- lisation pour un episode maniaque. Alors que 80 % d'entre eux ne pre- sentaient plus de sympt0mes, 43 % seulement avaient un emploi, et 21% seulement travaillaient a leur niveau de competence. Ces resul- tats ont et4 reproduits depuis lots plusieurs reprises [7, 16, 18, 24, 54, 64].

I1 est cependant important de relever que d'autres facteurs peu- vent avoir contribue ~ une deterio- ration du pronostic au cours du dernier siecle [72]. Parmi ceux-ci on retiendra l 'augmentation de.la prevalence d'abus de substances et le possible effet delet~re de cer- taines formes de traitements medi- camenteux. I1 semble en effet que l'exces de prescription d'antide- presseurs ait contribue a une aug- mentation des taux de rechutes maniaques [2] et a l ' induction de cycles rapides [17]. Enfin, l'exces-

sive prescription d'antipsycho- tiques typiques semble etre associee

une augmentation dn taux d'epi- sodes depressifs [27] et ~ une moins bonne recuperation fonc- tionnelle [66]. I1 est possible enfin que des modifications dans le mode de fonctionnement de la societe aient rendu progressivement plus difficile l'integration de personnes moins "competitives" dans le circuit professionnel.

gE PROBLEME DU D!{AGNOSTIC LORS DU PREMIER EPISODE

PSYC}tOT{QUE

Dans la litterature psychiatrique, il est rarement fait reference a la phase precoce des troubles bipo- laires. Outre l 'impression erronee d'une evolution toujours favorable que nous avons decrite plus haut, des facteurs diagnostiques peuvent expliquer que [e peu de recherche effectuee dans ce domaine s e t rela- tif au premier episode maniaque.

Premi~rement, dans la phase initiale des troubles psychotiques,

le tableau clinique est souvent peu clair et peut se modifier considera- blement au cours des premiers mois de traitement. I1 est donc dif- ficile d'etablir un diagnostic precis lors du premier episode, et surtout de l'inscrire dans le cadre rigide des classifications categorielles contem- poraines DSM et CIM. C'est la rai- son pour laquelle certains auteurs ont suggere qu'il etait plus adapte, dans cette phase de la maladie, de recourir a un concept plus large tel que celui de "psychose fonctionnel- le", et d'apprehender les diverses composantes du tableau clinique dans le cadre d'une lecture dimen- sionnelle plutOt que categorielle [37]. Une analyse factorielle des diverses composantes du tableau clinique observees dans une cohor- te de 509 patients t ra i tes .pour un premier episode psychotique a mis en evidence 4 facteurs ou dimensions principales (symp- tomes positifs, negatifs, depressifs et maniaques) qui ~ eux-seuls expliquaient pres de 50 % de la variance.

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~N~I EXVENTION P R E C O ( !:!

De plus, dans l'etat actuel de nos connaissances au sujet du developpement et de la phase pre- coce des troubles bipolaires, le dia- gnostic ne peut se poser qu'au moment de la survenue d'un pre- mier episode maniaque, bien que l'on puisse parfois considerer a pos- teriori que les episodes depressifs survenus prealablement en 4talent deja la manifestation. Plut0t que de se referer a un "premier episode bipolaire", on parle donc habituel- lement de "premier episode maniaque".

Pour les raisons decrites ci-des 2 sus, et plut0t que de chercher poser un diagnostic de trouble bipolaire au moment de la premie- re presentation, il semble donc plus reaiiste et approprie de recourir au diagnostic de psychose fonction- nelle et d'etudier le sous-groupe de patients caracterises par la presen- ce d'un syndrome maniaque. Ceci n'est pas sans poser de problemes puisqu'un syndrome maniaque peut s'observer non seulement dans le contexte d'un trouble bipolaire, mais 4galement dans celui d'un trouble schizoaffectif et parfois dans celui d'une schizophrenie debutante. Cependant, le syndrome maniaque, en tant que tableau cli- nique compose d'une augmentation de l'activite mentale et physique, est une des presentations cliniques les plus difficiles ~ traiter, et les patients qui le presentent ont en commun des caracteristiques qui justifient le developpement de stra- tegies therapeutiques particulieres.

ENOLU[ION APRES kE PREM!iER EPISODE I~'~ AN ~AQUE

Un nombre tres limit4 d'etudes se sont pencbees sur la question de la recuperation fonctionnelle des patients apres le premier episode maniaque. Toutes mettent en evi- dence la difference importante qui existe, tout comme dans la phase chronique, entre les taux de recu- peration symptomatique et fonc- tionnelle. Parmi les plus recentes on citera deux travaux de Tohen et coll. [64, 65], dans lesquels la recu-

peration fonctionnelle est definie par un retour au niveau occupa- tionnel atteint avant l'episode. Le premier [64] demontre que 6 mois apres l'episode maniaque initial, 33 % seulement avaient recupere fonctionnellement alors que 86 % ne presentaient plus de sympt0mes. Le second [65] revele que la situa- tion est similaire 24 mois apres l'episode initial, 40 % seulement des patients remplissant les criteres d'une recuperation fonctionnelle, alors que 98 % ne presentent plus de symptOmes. D'autres etudes, conduites aupres de populations de patients presentant un premier epi- sode psychotique, permettent d'ex- trapoler des donnees relatives aux patients bipolaires, et confirment ce type de resuhats [12, 54, 63, 67].

Compte tenu de la raise en evi- dence de cette mauvaise recupera- tion fonctionnelle chez un grand nombre de patients et ce des apres le premier episode maniaque, la necessit4 de developper de nou- velles strategies de traitement semble etre etablie. Goodwin et Jamison [1Y] relevaient deja en 1990 qu'il y a "de bonnes raisons de croire qu'un traitement agressif precoce des troubles bipolaires pourrait diminuer la morbidite subsequente' . Certains des prin- cipes de traitement developpes dans la perspective de l'interven- tion precoce semblent avoir le potentiel de nous rapprocher un peu plus de cet ideal dans le contexte des troubles psychotiques en general. I1 est donc important d'explorer s'ils peuvent s'appliquer aux troubles bipolaires en particu- lier.

OBJECTIFS DE L~[NTERVENTION PR1ECOCE

Eintervention precoce dans les troubles psychotiques s'inscrit clai- rement dans le contexte de l'essor des strategies preventives en psy- chiatrie. Eambition qui la motive est de trouver des moyens d'inter- vention qui permettent d'ameliorer l 'evolution des troubles psycho- tiques et d'en retarder ou mieux

encore d'en 4viter la survenue: Les principaux objectifs des pro- grammes d'intervention precoce, qui seront brievement decrits ci- dessous, ont ete tout d'abord la detection precoce des nouveaux cas ainsi que le traitement optimal du premier episode et de la periode qui le suit. Plus recemment on a cherche ~ developper des strategies d'intervention dans la phase pre- psychotique.

DETECTION PRECOCE

DES NOUVEAUX CA5 :

DIMINUTION DU DF_LA! ENTRE

I]APPARF171ON DES SYMPTOMES

EY L~INSTAURATION DU TRAITEMENT

Plusieurs travaux ont documente l 'importance du delai qui separe l 'apparition des symptames psy- cbotiques et l ' introduction d'un traitement. I1 a ainsi 4te demontre que les patients presentent des sympt0mes psychotiques positifs en moyenne pendant un a deux ans avant qu'un traitement ne soit ins- titue [21]. Eimpact deletere de ce delai sur l'evolution des patients est Fun des elements principaux justi- fiant le developpement de pro- grammes d'intervention precoce. Une correlation a en effet et4 mise en evidence entre la duree de psy- chose non traitee (Duration of Untreated Psychosis, DUP) et plu- sieurs aspects de l'evolution a court terme tels que le taux, le delai et le degre de remission [33], l'intensit4 des symptOmes negatifs ulterieurs et certains aspects de la qualite de vie [38], ou encore l 'importance des deficits cognitifs apres stabili- sation [1].

Dans une revue de la litteratu- re, Norman et Malla [40] concluaient qu'en depit de pro- blemes methodologiques et des resultats de quelques publications qui la remettent en question [8, 19], la relation entre DUPet evolu- tion a court terme est fermement etablie. I1 est de plus probable que le choix de variables avant tout symptomatiques ne permet pas de mettre en evidence tousles aspects de l'impact de la DUE Le premier

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~,Z~!!CO(:E

Episode psychotique survient habi- tuellement dans une phase de vie o~h se joue aussi bien l'integration sociale que professionnelle du sujet. La plupart des Etudes ne prennent par exemple pas en compte les opportunites manquees pendant la phase psychotique acti- ve, ni l 'impact que peut avoir un patient durablement decompense sur l'equilibre psychique de son entourage direct, et les conse- quences d'une longue DUP sont ainsi probablement sous-estimees.

Parmi les strategies proposees pour diminuer la DUP, on releve d'une part l 'amelioration de la reconnaissance de la psychose par le biais de campagnes d'informa- tion des professionnels de la sante, de certains professionnels qui sont en contact avec des jeunes ainsi que du grand public, et d'autre part le developpement d'un acces facilite aux soins psychiatriques (reponse rapide , disponibilite, approche flexible, soins proactifs dans la communaute).

TRAITEMENT OPTIMAL

DU PREMIER EPISODE PSYCHOTIQUE

Intervention precoce ne devrait cependant pas seulement signifier soigner plus tot que d'habitude avec les memes outils [34]. Les trai- tements actuellement proposes aux patients psychotiques ont pour la plupart ete developpes sur la base des resultats de recherches conduites dans des populations de patients se trouvant dans une phase plus tardive et souvent chronique de ]a maladie. S'il est possible que certaines interventions soient plus efficaces au debut de la maladie, il est necessaire de les modifier pour les adapter aux besoins des patients qui traversent cette phase. On sait par exemple que des doses de medicament nettement moindre permettent une efficacite optimale tout en limitant le risque d'effets secondaires au cours d'un premier Episode psychotique [45, 34].

I1 est aussi important d'adapter le contenu des interventions psy- chologiques pour repondre plus

specifiquement aux besoins de patients traversant un premier epi- sode psychotique. Ces besoins sont en effet differents de ceux des patients plus chroniques. I1 s'agit de patients jeunes, vivant la plupart du temps dans leurs families, tra- versant de plus les phases extreme- ment critiques et decisives de l'ado- lescence et de l'entree dans l'age adulte. Le probleme de la consom- marion de substances illicites com- plique egalement souvent le tableau et dolt egalement etre aborde speci- fiquement. Enfin, le developpe- ment d'un premier episode psycho- tique est un evenement trauma- tisant et deroutant qui remet en question l'identite profonde du sujet, et la qualite du premier contact que le patient a avec la psy- chiatrie darts cet etat particuliere- ment vulnerable est determinante pour la suite du traitement. L~ encore il est fondamental que l'in- tervention puisse se faire a la fois de maniere suffisamment souple et proactive, de maniere ~ favoriser l'engagement du patient dans le processus therapeutique.

INTERVENTION DANS LA

PHASE PREPSYC}{O[ {Q{iE

En l'absence de marqueurs biolo- giques ou genetiques fiables, les strategies de prevention primaire pour la psychose se limitent a c e jour a la detection de patients appa- raissant "cliniquement" ~ risque eleve de developper de tels troubles. Certains travaux out abouti ~ une meilleure definition psychopathologique de la phase qui precede l'eclosion du premier epi- sode psychotique et au developpe- ment de critkres cliniques qui sem- blent permettre la selection d'une population "a risque" [42].

Pourtant, meme si les resultats de premieres Etudes montrent que 33 ~ 58 % des patients ainsi selec- tionnes developpent ulterieurement un trouble psychotique [30], le manque de specificite de ces symp- t~Smes prodromiques implique un nombre eleve de faux positif. Le risque d'introduire un traitement

inutile et stigmatisant chez de tels sujets et l'absence de preuves reelles qu'une intervention ~ ce stade ait de reels benefices alimen- tent actuellement une rive contro- verse. I1 faut done attendre les resultats des quelques Etudes qui sont en cours ainsi que la resolu- tion des questions ethiques qu'elles soulevent avant que l'on puisse proposer des directives therapeu- tiques applicables ~ large echelle.

BEN~'tFICES DE L~{NTERVENT~ON PR~_COCE

Eevaluation de l'efficacite de ces nouvelles methodes de soins est souvent difficile ~ realiser. Les ser- vices qui developpent des pro- grammes de ce type le font en gene- ral dans le cadre d'une modification globale de leur fonctionnement, si bien que la comparaison ne peut se faire qu'avec l 'evolution des patients telle qu'elle etait avant la mise en fonction du programme. De plus, les programmes d'inter- vention precoces se trouvent enco- re pour la plupart dans une phase de developpement, et leur reelle efficacite n'a pas encore ete evaluee dans un contexte de recherche. I1 faut donc, pour avoir une idee plus precise de leur impact, attendre les resultats d'etudes muhicentriques initiees dans les centres plus deve- loppes, dans le cadre desquelles les patients regoivent un traitement standard ou specialise de maniere randomisee.

Certains benefices semblent cependant dej~ clairement etablis : 1) il a ere demontre qu'fl est pos- sible de raccourcir considerable- ment la DUP [29] et que les patients peuvent ainsi recevoir un traitement efficace beaucoup plus precocement, avec les retombees positives decrites plus haut ; 2) le taux de rechute dans la phase precoce semble etre ires faible dans les populations traitees dans ce type de programmes, se situant aux environs de 15 % seulement au cours des 15 premiers mois de trai- tement dans certaines Etudes [31] ; 3) Power et coll. [44] ont demontre

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I{_N I}£RVENi iON ?RI~iCOCE

que le developpement de structures specialisees a un effet sur l'adhe- rence au traitement, et qu'un hombre significativement moins eleve de patients echappent au suivi dans ce type de programmes ; 4) enfin, le taux de suicide est sou- vent exceptionnellement bas, situe par exemple a 0.5 % dans les 18 premiers mois entre 1998 et 2001 dans la population traitee a Mel- bourne [28].

~ERTINENCE OES OBJECTtF5 DE L~INTER°VENTI_ON PRECOCE

DANS LE5 TROUBLES )~IPOgAIRES

Certaines donnees de la litterature suggerent que les problemes soule- yes par les strategies d'intervention precoce s'observent egalement dans le domaine des troubles bipolaires. D'une part, les patients atteints d'un trouble bipolaire ne re~oivent souvent un traitement adequat que tardivement. Egeland et al. [13] ont ainsi observe que les patients pre- sentaient des symptOmes pendant 10 ans en moyenne avant qu'un traitement ne soit instaure. Lish et al. [32] ont quant a eux observe que 50 % des patients inclus dans leur-etude n'avaient recu aucun traitement pendant plus de 5 ans.

D'autre part, aucun traitement n'est specifiquement defini pour cette phase de la maladie. La majo- rite des directives de traitement pharmacologique ont ete develop- pees dans le contexte d'etudes menees sur des populations de patients chroniques et les divers modules de psychotherapie, avant tout de type cognitivo-comporte- mentaux, ne concernent pas direc- tement les elements problematiques specifiques du premier episode. Le traitement n'est done certainement pas optimal, ce qui se reflete par exemple dans le fait que 57 % des patients sont non adherents au trai- tement apres le premier episode maniaque [5].

Enfin, il semble que les patients developpant un trouble bipolaire presentent des troubles affectifs ou du comportement long-

temps avant qu'un episode identi- fiable de trouble de l 'humeur ne survienne. Bien que ces sympt0mes soient difficiles a differencier des modifications psychiques surve- nant par exemple au cours de l'ado- lescence, ils constituent une perio- de de prodrome qui, si elle etait mieux decrite, pourrait permettre une intervention plus prEcoce.

A eux seuls, ces elements sere- blent justifier l 'applicatioa des principes de l'intervention precoce au traitement des patients atteints d'un trouble bipolaire et laissent supposer qu'il en resulterait une meilleure evolution de la maladie. D'autres arguments donnent encore plus de credit a cette hypothese. Certaines morbidites secondaires ainsi qu'un certain hombre des fac- teurs pronostiques identifies dans la litterature semblent en effet etre susceptible d'etre influences par une intervention precoce. Ces ele- ments vont etre developpEs ci-des- SOHS.

5UIC~DE

La prevention du suicide est un objectif majeur dans le domaine de la saute mentale. Jamison [20] rele- vait que "cette maladie qui [l'avait] pratiquement tuee ~ maintes reprises tue des dizaines de milliers de personnes chaque annee : la plupart sont jeunes, meurent inuti- lement et plusieurs d'eux sont parmi les plus imaginatifs et talen- tueux de notre societe". En effet, 15 % des patients atteints d'un trouble bipolaire commettent un suicide s'ils ne regoivent pas un traitement adequat [6], et, plus les patients sont jeunes au moment du premier episode, plus le risque de suicide est eleve [46]. De plus, on sait que la premiere hospitalisation pour un trouble psychiatrique est un important facteur de risque pour le suicide [50]. Enfin, on sait que les patients qui suivent leur traitement de maniere intermitten- te rapportent une frequence nette- ment moins importante d'evene- ments de vie negatifs durant les periodes pendant lesquelles ils

re¢oivent le traitement [32]. Ainsi, route intervention per-

mettant de detecter les patients risque de developper un trouble bipolaire, ou de diminuer le delai entre l'apparition des sympt0mes et l'instauration d'un traitement, d'en- gager les patients dans le traitement et de les suivre de maniere proacti- ve dans les periodes de risque, offre une chance d'ameliorer ce triste bilan.

P A ] ' ~ O L O G I E S COMORBIDES

Des publications recentes ont demontre que 35 ~ 71 % des patients presentent un diagnostic de comorbidite psychiatrique au moment du premier episode maniaque [3, 23, 53, 56, 58, 68]. Les plus frequemment observees sont la dependance ou l'abus d'al- cool, diagnostiques dans 24 ~ 39 % des cas, et la dependance ou l'abus de substance, observes chez 16 35 % des patients. On releve aussi des troubles obsessionnels compul- sirs, des troubles anxieux, des etats de stress post-traumatique ou des troubles paniques, ~ une frequence plus elevee que dans la population generale.

I1 est difficile de determiner si ces troubles comorbides consti- tuent un facteur de risque dans le declenchement du trouble bipolai- re, ou s'il s'agit plut0t de troubles evoluant de maniere independante, de manifestations precoces ou pro- dromique du trouble bipolaire, ou enfin, dans le cas des abus de sub- stance, d'une tentative d'automedi- cation. Certaines donnees de la lit- terature suggerent que l'abus d'alcool pourrait constituer un fac- teur favorisant le developpement de troubles bipolaires [9, 57]. I1 semble moins probable que l'abus de substance joue un tel r0Ie; il est par contre clairement etabli que la persistance de l'abus de substance entraine un moins bon pronostic [53].

Quelle que soit leur relation avec le trouble bipolaire, une inter- vention precoce permettrait d'inter- venir plus rapidement sur les

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troubles comorbides et d'en limiter l'effet aggravant sur 1'evolution. Elle permet aussi, dans le contexte de l'abus de substance, de tenter de limiter les consequences sociales et physiques desastreuses de leur poursuite prolongee. Elle donne enfin une chance d'intervenir avant que le comportement ne s e t deve- nu trop chronique et donc encore plus difficile a enrayer.

COMPARA}SON ENTRE L~EVOL-{3T!ON APRES UN PREMIER I:2PtSODE ET APRES UNE RECID}_VE

S'il semble clairement etabli que la recuperation fonctionnelle comple- te n'est de loin pas la regle pour les patients atteints de troubles bipo- laires et que ceci s'observe deja apres le premier Episode maniaque, certains travaux suggerent que l'evolution est tout de meme meilleure dans la phase precoce de la maladie. Ainsi, dans la cohorte etudiee par Dion et coll. [12] par exemple, on peut voir que 6 mois apres l'hospitalisation, 64 % des premiers Episodes avaient un emploi contre seulement 33 % des patients chroniques. De plus, 86 % des premiers Episodes vivaient de maniere independante contre seule- ment 56 % des patients presentant un trouble recidivant.

La phase precoce de la maladie semble donc constituer une perio- de critique au cours de laquelle une evolution favorable est encore pos- sible. Ceci semble justifier le deve- loppement des soins permettant de profiter au maximum de ce meilleur potentiel de recuperation. Linszen et coll. [31] ont demontre que les patients traites dans le cadre d'un programme d'interven- tion precoce, permettant une breve duree de psychose non traitee et delivrant des soins proactifs, avaient un taux de rechute de 15 % seulement dans les 15 premiers mois. Ils ont egalement observe que ce taux faible de rechute ne se maintenait pas une fois que les patients etaient adresses pour la suite du traitement ~ un service habi tue. I1 semble donc qu'il est

possible de diminuer le taux de rechute, mais que ceci necessite des soins appropries pour une duree suffisante, estimee par Linszen et coll. [31] ~ environs 5 ans, pour permettre une consolidation des benefices du traitement.

~[MPACT DES REC}D1VES S{JR L~}2VOLU-f]ON

Cette difference d'evolution apres plusieurs Episodes trouve peut-etre son explication dans la theorie developpee par Post [43]. Le modb le de la "sensibilisation neuronale" suppose que l'activation de circuits neuronaux au cours des Episodes affectifs produit non seulement des modifications aigues et transitoires, mais 4galement des alterations per- manentes de l'activit4 neuronale qui pourraient meme se repercuter au niveau de l'expression des genes [23]. Ces alterations pourraient induire a leur tour une tendance plus 41evee a la rechute, les epi- sodes maniaques se declenchant plus facilement et tendant a durer plus longtemps.

De tels changements semblant se faire relativement tot dans l'evo- lution de la maladie, il parait donc appropri4 de chercher a intervenir suffisamment tot pour pouvoir sta- biliser les patients avant qu'ils ne soient survenus.

NWEAU D~ADAPTATION SOCIALE PREALABLE ET k!VOLUTION APRES UN PREMIER EPISODE MANi.AQU~i

Plusieurs Etudes ont demontr4 que le niveau de fonctionnement pre- morbide est significativement cor- rele avec la recuperation fonction- nelle apres le premier Episode. Ainsi, Tohen et coll. [67] ont obser- ve que plus le niveau professionnel etait elev4 avant l'episode maniaque, meilleur etait l'ajuste- ment social 4 ans apres sa surve- nue. De maniere similaire, Stra- kowski et coll. ont trouve qu'un meilleur niveau de fonctionnement [54], ou encore un meilleur niveau d'education et d'emploi [59] atteints avant l'4pisode initial sont

corrEes avec une meilleure recupe- ration fonctionnelle. De plus, le contexte social semble egalement influencer la recuperation sympto- matique, Tohen et coll. [65] ayant montre que les symptOmes dispa- raissaient plus rapidement chez les patients maries.

Correlation n'implique naturel- lement pas causalite lineaire, et il se peut que les patients qui ne par- viennent pas a atteindre un bon niveau de fonctionnement avant le developpement du premier episode maniaque presentent une forme plus grave de la maladie. I1 apparait cependant clairement que le niveau de fonctionnement atteint par le patient avant le developpement de la maladie et la qualit4 de son inte- gration sociale ont une influence sur le niveau de recuperation ulte- rieur.

La majorite des troubles bipo- laires se developpent durant l'ado- lescence et le debut de l'age adulte, dans une periode critique pour le developpement d'un reseau social et l'4tablissement de bases pour une future carriere professionnelle. La persistance pendant de longs mois de sympt0mes depressifs, maniaques ou psychotiques cons- titue certainement un obstacle considerable ~ la realisation de ces objectifs. Toute intervention qui permettrait de detecter rapidement ceux qui en souffrent, de limiter la duree de la phase active, de preve- nit les rechutes, ou au pire de retarder leur survenue, laissant ainsi le temps ~ la personne pour realiser son potentiel d'integration sociale, aurait indubitablement un effet benefique sur l'4volution ulte- rieure.

,*~GE D~APPAR[T}ON DU TROUBLE BIPOLAIRE ET EVOLUT{ON

Kraepelin, en 1921 [26], rapportait que 0.4 % de ses patients avaient developp4 leur maladie avant l'age de 10 ans. Le tableau maniaque est souvent different ~ cet age et les patients presentent plus de comor- bidites, et de difficultes d'adapta- tion sociale pre-morbide [4]. Ils

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developpent egalement plus sou- vent des sympt0mes psychotiques [36], out moins de troubles du sommeil, mais plus d'augmenta- tion du niveau d'energie et un risque suicidaire plus important [46]. Cette presentation atypique explique probablement pourquoi le diagnostic de trouble bipolaire est si souvent manque a l'adoles- cence [36]. La confusion se fait le plus souvent avec le trouble de deficit d'attention et d'hyperactivi- te chez Fenfant [51] et avec la schizophrenie chez les adolescents et les jeunes adultes [22].

Eevolution des patients deve- loppant un trouble bipolaire a un plus jeune age est apparemment moins favorable. Carlson et coll. [4] out observe qu'ils avaient une moindre probabilite de remission complete, alors que Tohen et coll. [65] out rapporte une moins bonne recuperation fonctionnelle 2 ans apres le premier episode s'il survenait avant l'age de 30 ans. Enfin, Geller et coll. [15] ont rap- porte que les patients developpant un trouble bipolaire a la phase pre-pubertaire ou adolescente pre- coce avaient une evolution similai- re a celle des patients adultes les plus- severes presentant des troubles mixtes, des cycles rapides continus et des pathologies resis- tantes au traitement.

Schuroff et coll. [49] out sug- ger4 recemment que les troubles bipolaires survenant tres tot pour- raient constituer une forme dis- tincte de la maladie, a forte com- posante familiale et de presentation differente. I1 se peut cependant aussi que l 'evolution defavorable de ces patients s 'ex- plique diff4remment. Premiere- ment, il est possible que le pheno- mene de sensibilisation [43] ait plus d'impact sur un cerveau moins mature. Deuxiemement, compte tenu de la grande sensibi- lite des processus psychosociaux au cours de l 'adolescence et du debut de Page adulte, la survenue d 'un premier episode maniaque dans cette periode de la vie aura un effet deletere plus marque sur

le developpement d'habiletes sociales et l ' integration sociale future du patient. Ces elements suggerent que toute intervention permettant, si possible, de preve- nir ou du moins de retarder Fa D parition du premier episode, et assurant une stabilisation plus rapide et plus durable, serait sus- ceptible d'influencer positivement l '4volution et le degre de recupe- ration.

DYSFONCTiON COGNITIVE

Les troubles cognitifs sont certaine- ment difficiles a evaluer dans la phase maniaque aigue. Certains auteurs out suggere que les patients presentent, dans cette phase de [a maladie, une dysfonction cognitive diffuse [35, 41], qui disparait au moment de la resolution de l'episo- de aigu. Des donnees recentes sug- gerent cependant qu'un certain degre de dysfonction cognitive per- siste durant ]a phase euthymique [14], d'autant plus marque que le hombre de rechutes est eleve [11, 25, 61, 70]. Tres peu d'etudes out ere effectuees dans des populations de premier episode maniaque. Leurs resultats suggerent cependant une disparition des troubles cogni- tifs apres la remission de l'episode [41, 47, 48].

Bien que ceci demande clarifi- cation et que les donnees soient encore relativement peu consis- tantes, il semble que les patients presentant un trouble bipolaire developpent des troubles cognitifs d'abord transitoires, mais qui per- sistent et tendent a s 'intensifier mesure que le nombre de rechutes augmente. Si ces elements devaient se confirmer, ils justifie- talent un traitement precoce intensif et le developpement de pratiques permettant de diminuer le hombre de rechutes.

MODIFICATIONS

NEURO-ANATOMIQUES

ET PREMIER EPISODE MANIAQUE

Bien que les techniques d'image- rie cerebrale aleut ere appliquees

surtout dans le contexte de la schizophrenie, un certain hombre d'etudes se sont focalisees sur les troubles bipolaires. Les princi- paux elements mis en evidence sont la presence d'hyper-densites dans la substance blanche, d'ano- malies de la structure cerebelleu- s e e t un elargissement ventricu- laire [52]. Un nombre tres limite d 'etudes out 4t4 conduites dans des populat ions de premier epi- sode maniaque. Elles out demon- ire la presence d 'un Eargissement des ventricules lateraux et du troisieme ventricule [60], une augmenta t ion du volume des amygdales, du thalamus et du globus pallidus [55], et une dimi- nution du volume de l 'hyppocam- pe gauche [71].

Eobservation d'anomalies cerebrales au moment du premier episode est compatible avec la theorie neuro-developpementale de la schizophrenie et suggere qu'un phenomene simitaire, se declenchant dans la phase preco- ce, puisse survenir dans le contex- te des troubles bipolaires. Si ces resultats devaient se confirmer, la creation de strategies d'interven- tions precoces, voire de detection de patients a risque de developper un trouble bipolaire, pourrait eventuellement nous mettre en position d'agir sur leur developpe- ment.

De plus, les resultats d'une etude menee par DelBello et coll. [10] suggerent la presence d 'un phenomene progressif, puisque la diminution du volume de la region V3 du vermts raise en evidence chez les patients bipolaires chro- niques n'a pas ete observee chez les premiers episodes. I1 est ainsi possible qu'un traitement plus efficace de la phase initiale de la maladie puisse permettre de dimi- nuer cette progression.

CONCLUSION

Plusieurs travaux suggerent que l'4volution des troubles bipolaires est moins favorable qu'on ne le pensait et que la maladie est pr4-

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sente souvent pendant plusieurs annees avant que le traitement ne soit institue. Les arguments deve- loppes dans cet article suggerent que l 'intervention precoce est sus- ceptible d'avoir un impact aussi bien sur les facteurs influencant l 'evolution que sur les morbidites secondaires. Outre l'application des strategies d4veloppees dans le contexte plus large de l'interven- tion precoce pour les troubles psy- chotiques, il semble cependant necessaire d'investiguer certains domaines specifiques aux troubles bipolaires. Quelques-uns d'entre eux vont etre brievement develop- pes ci-dessous.

(1) 12adherence au traitement 4tant souvent mauvaise, il est important de developper des direc- tives pharmacologiques adaptees au premier episode maniaque, par exemple en termes de dosage, de duree de prescription d'un stabili- sateur de l'humeur, ou encore d'as- sociation avec un antipsychotique dans la phase maniaque, et d'incor- porer dans les projets de recherche une evaluation de la perception subjective que les patients ont de leur traitement.

(2) I1 est necessaire de deve- lopper des approches therapeu- tique et psychotherapiques consa- crees aux probl~mes specifiques de la phase initiale de la maladie, met- tant un accent particulier sur le traitement des pathologies comor- bides.

(3) I2implication des troubles cognitifs dans le deficit de recupe- ration fonctionnelle a ere encore ires peu exploree, tt semble cepen- dant important de developper prea- lablement un paradigme theorique permettant de focaliser la recherche dans certains domaines des dys- fonctions cognitives, plut6t que de poursuivre l 'exploration de la pre- sence de deficits reveles par des tests choisis sans reelle hypothese theorique et qui ne contribue qu'a l'accumulation de donnees eparses et difficiles ~ interpreter.

(4) Eetude du developpement et des prodromes de la maladie a ere encore largement negligee. I1 est probable que les criteres develop- pes pour identifier les patients risque d'un trouble psychotique ne s'appliquent que de maniSre limitee aux troubles bipolaires. La plupart des etudes conduites jusqu'a ce

jour dans le domaine des troubles bipolaires ne concernent de plus que le prodrome des rechutes, kes rares donnees disponibles concer- nant le prodrome de l 'episode ini- tial ne mettent en evidence que des elements relativernent peu speci- fiques et seraient difficilement uti- lisables pour le depistage de sujets

risque [62]. I1 est donc necessaire de conduire des etudes permettant de mieux caracteriser le developpe- ment des troubles bipolaires jus- qu'a la survenue du premier episo- de maniaque, de maniere a en identifier les manifestations ini- tiales ainsi que les facteurs de risque, etudes qui, en donnant un contexte dans lequel interpreter ces elements peu specifiques, pour- raient conduire au developpement de criteres d'identification precoce de sujets ~ risque de developper un trouble bipolaire.

I1 est possible que ces develop- pements permettent ~ terme une amelioration de l 'evolution des patients atteints d'un trouble bipo- laire et que l'optimisme avec tequel cette maladie a longuement ere consideree se justifie davantage. N

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