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DIPLÔMES DU SOCIAL N o 1 ÉDUCATEUR SPÉCIALISÉ DIPLÔME D’ÉTAT DEES le Social .fr ITINÉRAIRES ÉR A A I I R R E A A I I R R R R R R E E PRO DC 2  Conception et conduite de projet éducatif spécialisé Modules 4 e édition Le métier et la formation Les savoirs et savoir-faire à mobiliser La méthodologie des épreuves de certification

ITINÉRAIRESÉRAIRE ÉDUCATEUR SPÉCIALISÉ … · DC 2 Conception et conduite de projet éducatif spécialis ... Cette réforme porte finalement en elle la définition d’une méthodologie

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DIPLÔMESDU SOCIALNo1

ÉDUCATEUR SPÉCIALISÉDIPLÔME D’ÉTAT

DEES

le Social.fr

ITINÉRAIRESÉRAAIIRREAAIIRRRRRREEPRO

DC 2 Conception et conduitede projet éducatif spécialisé

Modules

4e édition

Le métier et la formation

Les savoirs et savoir-faire à mobiliser

La méthodologie des épreuves de certification

DEES

Série dirigée par Stéphane Rullac

Stéphane Rullac Éducateur spécialisé et docteur en anthropologie et coordonnateur

Cécile Sorisest éducatrice spécialisée et directrice d'une association d'action sociale

4e édition

ÉDUCATEUR SPÉCIALISÉDIPLÔME D’ÉTAT ITINÉRAIRES

PRO

DC2. Conception et conduitede projet éducatif spécialisé

La loi du 11 mars 1957 n’autorisant aux termes des alinéas 2 et 3 de l’article 41, d’une part, que les « copies ou reproductions strictement réservées à l’usage privé du copiste et non destinées à une utilisation collective » et, d’autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d’exemple et d’illustration, « toute représentation ou reproduction intégrale, ou partielle, faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause, est illicite » (alinéa 1er de l’article 40). Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles 425 et suivants du Code pénal. Le « photocopillage », c’est l’usage abusif et collectif de la photocopie sans autorisation des auteurs et des éditeurs. Largement répandu dans les établissements d’enseignement, le « photocopillage » menace l’avenir du livre, car il met en danger son équilibre économique. Il prive les auteurs d’une juste rémunération. En dehors de l’usage privé du copiste, toute reproduction totale ou partielle de cet ouvrage est interdite. Des photocopies payantes peuvent être réalisées avec l’accord de l’éditeur. S’adresser au Centre français d’exploitation du droit de copie : 20, rue des Grands-Augustins, F-75006 Paris. Tél. : 01 44 07 47 70.© Vuibert – octobre 2014 – 5, allée de la 2e D.B., 75015 Paris - Site Internet : http://www.vuibert.fr

ISBN : 978-2-311-20071-3

Conception couverture : HDL Design / Conception intérieur : Linéale production

vant-proposLe diplôme d’état d’éducateur spécialisé (DEES) a fêté ses 40 ans en 2007, tout en se voyantsimultanément remanié pour la seconde fois de son histoire. Après 1990, la formationproposée aux éducateurs spécialisés est de nouveau revisitée par le décret n° 2007-899 du15 mai 2007. Toute modification porte en elle la même question : qu’apporte la nouvelledonne et représente-t-elle un progrès ? Les huit anciennes unités de formations (UF) laissent la place à quatre domaines de formation(DF). En passant d’une approche thématique (UF 1 : Pédagogie générale ; UF 2 : Pédagogiede l’expression et techniques éducatives ; UF 3 : Approches des handicaps, des inadaptationset pédagogie de l’éducation spécialisée ; UF 4 : Vie collective ; UF 5 : économie et société ;UF 6 : Unité juridique ; UF 7 : Culture générale professionnelle ; UF 8 : Unité de spécialisation),à celle de la compétence, le nouveau DEES est révolutionné. En effet, la formation estdésormais structurée autour de l’acquisition de quatre domaines de compétences (DC 1 :Accompagnement social et éducatif spécialisé ; DC 2 : Conception et conduite de projetéducatif spécialisé ; DC 3 : Communication professionnelle en travail social ; DC 4 : Implicationdans les dynamiques partenariales, institutionnelles et interinstitutionnelles).Ce changement est révolutionnaire dans la mesure où la formation est directement mise auservice de l’acte éducatif. Les formateurs ont désormais l’obligation de dispenser un contenuet de mettre en place un processus formatif tourné vers le savoir-faire. Cet objectif impliquel’interdisciplinarité et renvoie à l’arrière-plan l’approche thématique. Le fameux lien avec leterrain est intimement lié aux contenus dispensés ; il est même au cœur de l’objectifpédagogique. Cette exigence d’opérationnalité incombe dorénavant exclusivement auxformateurs qui sont tenus de mettre leurs connaissances au service d’un métier.Ce nouveau dispositif intègre massivement la méthodologie dans son contenu : le travaild’équipe, la méthodologie de projet et les écrits professionnels. Le défi formatif est de ne pastomber dans l’acquisition d’une procédure qui oublierait que l’humain reste au cœur del’éducation spécialisée. Le projet éducatif s’adresse à des individus qui doivent rester maîtresde leur existence. Ainsi, en nous penchant sur le « comment », nous allons défendre le « pourquoi » et à travers lui l’identité professionnelle. Cette réforme donne une place plus importante aux lieux de stage. En validant seuls les écritsprofessionnels que chaque étudiant est tenu de réaliser pendant ses stages, les « acteurs deterrain » se voient confier, en totale autonomie, un accompagnement pédagogique et unecertification. Cette reconnaissance rapproche un peu plus la formation des réalités de terrain. Cette réforme porte finalement en elle la définition d’une méthodologie propre à l’éducationspécialisée qui dépasse la méthodologie de projet, pour s’affirmer comme une véritablepédagogie de l’éducation spécialisée. Les manuels que nous vous proposons pour les quatredomaines de compétences contribuent à cette indispensable construction théoriquecollective. La responsabilité de tous les acteurs de ce champ professionnel consiste aujourd’huià développer la théorie qui est le fruit de la pratique mise en œuvre quotidiennement.

Stéphane RullacDirecteur de collection

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SommaireAvant-propos ......................................................................................................................... 3

Sommaire.................................................................................................................................... 4

Introduction .............................................................................................................................. 9

Partie 1. Le projet : un concept « total » au cœur de notre culture contemporaineLa notion de projet : une fausse évidence............................. 19

Les origines théoriques .................................................................................. 21

Un défi au temps................................................................................................... 24

Les diverses postures d’anticipation.............................................. 28

Le projet comme outil technique : existe-t-il une spécificité éducative ? ........................................... 29

Les différentes dimensions du projet éducatif .................. 34

Définition du projet éducatif spécialisé ..................................... 38

Partie 2. Les différents projets de l’éducation spécialisée

Un impératif au-delà des obligations légales................... 45

Des projets interdépendants................................................................... 47

Un vocabulaire précis...................................................................................... 49

II

I

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IV

III

II

I

III

Sommaire • 5

Définitions ...................................................................................................................... 51

Place du référent dans le projet personnalisé .................. 65

Quand la réflexion sert l’action......................................................... 71

Partie 3. Le défi de l’objectivationscientifique : l’indispensable apport de la méthodologie de recherche

La méthodologie de projet est une recherche appliquée ...................................................................................................................... 75

Partie 4. À la recherche d’une pédagogie de l’éducation spécialisée

La définition classique du travail social..................................... 101

Partie 5. À la recherche d’une méthodologiedu projet éducatif spécialisé

Les présupposés communs à tout projet d’intervention ............................................................................................................. 129

La méthodologie d’intervention classique en travail social ....................................................................................................... 130

Les spécificités méthodologiques de l’interventionéducative spécialisée....................................................................................... 134

Les promesses de la recherche-action....................................... 140

Perspectives d’un processus méthodologique éducatif 144

VI

V

IV

I

II

III

IV

V

Partie 6. Le défi de l’évaluation

Une nouvelle compétence qui s’impose .................................. 157

L’évaluation est multidimensionnelle........................................... 159

Un processus évaluatif nécessairement différencié en évaluations particulières ..................................................................... 163

L’évaluation en pratique(s). 1 : la méthode Alföldi....... 167

L’évaluation en pratique(s). 2 : la méthode inspirée du Conseil national de l’évaluation sociale et médico-sociale ................................................................................................. 171

La nécessité de développer de nouveaux outils ............ 173

Partie 7. Le support relationnel de la viequotidienne et des activités

Le quotidien : une réalité incontournable .............................. 177

La structuration du quotidien................................................................. 179

L’éducateur et les activités : un destin commun ............ 182

Les techniques éducatives et d’expression........................... 185

La prise en charge des groupes ......................................................... 187

Partie 8. La place des familles dans le projet éducatif spécialisé

Une réalité complexe multidimensionnelle.......................... 193

Des approches dépassées : de l’indispensable à la dangereuse famille................................................................................ 195

I

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I

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6 • Sommaire

Sommaire • 7

L’émergence de nouvelles approches : la nécessité de collaborer avec les familles............................................................. 199

Définir la place des familles dans le projet éducatifen fonction du contexte de l’intervention ............................... 204

La place des familles dans le cadre judiciaire de laprotection de l’enfance.................................................................................. 205

La place des familles dans le cadre d’une relationcontractualisée......................................................................................................... 208

La place des familles dans le cadre d’un projet dedéveloppement social..................................................................................... 213

La place incertaine des familles dans le projet éducatif 216

Partie 9. Les certifications du DC 2

L’étude de situation............................................................................................ 221

Le mémoire................................................................................................................... 228

Conclusion.................................................................................................................................. 235

Bibliographie .......................................................................................................................... 236

III

IV

V

VI

VII

VIII

I

II

es différents projets de l’éducation

spécialisée

Par Cécile Soris

LPartie 2

Place du référent dans le projet personnalisé

Nécessité d’un éclairage conceptuel a. Tentative de définitionLe terme « référent » trouve son origine dans la linguistique et désigne « un être ou unobjet réel ou imaginaire auquel renvoie un signe linguistique » (Larousse). Du point de vuedes thérapeutes familiaux et en psychothérapie institutionnelle systémique, la fonctionde référent thérapeutique consiste à être « un soignant choisi dans l’équipe des thérapeutespour effectuer un suivi personnalisé d’un patient lorsqu’il s’agit d’une prise en charge àlong terme (...). Son rôle spécifique de disponibilité vis-à-vis d’un patient précis se réalisesoit sur un mode d’accompagnement et d’écoute libre, soit à l’occasion d’un soin défini quicentre la relation » (Dictionnaire clinique des thérapies familiales).

Il est complexe de définir cette fonction, d’un point de vue éducatif, tant sa réalité varieselon les établissements ou services (internats éducatifs, instituts médico-pédagogiques,action éducative en milieu ouvert dans le cadre judiciaire ou administratif, aide sociale àl’enfance, ...). Selon le cadre et le contexte de l’intervention, au terme référent s’ajoute unqualificatif ou une spécialité en lien avec la compétence du professionnel. On parlera duréférent éducatif, de placement, institutionnel, scolaire, de la mesure d’AEMO qu’elle soitadministrative ou judiciaire... En cela, la définition du référent éducatif échappe donc de faità une modélisation généralisable à tous les champs d’intervention. D’ores et déjà, nouspouvons affirmer que l’éducateur référent occupe donc une place à géométrie variable, tantdans le parcours personnalisé de la personne que dans les relations avec les partenairesselon l’établissement ou le service dans lequel il exerce ses fonctions. Reste que le choix denommer un référent ne relève pas a priori d’une logique fantaisiste1. Une majoritéd’établissements souscrivent à cette nécessité estimant que la personne et sa famille nepeuvent être confrontées à la communauté éducative composée d’une multiplicitéd’intervenants (éducateurs spécialisés, éducateurs sportifs, éducateurs scolaires,psychologues, psychiatres, orthophonistes, psychomotriciens…), sans savoir précisément àqui ils doivent s’adresser pour obtenir une information ou simplement échanger. Cette

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V

1. Dans certains établissements ou services, cette place est quelquefois vidée de sa substance ou inhabitée tantl’aspect collectif prévaut sur la personne. Bien que le manque de personnel puisse être quelquefois invoquépour expliquer cette vacance, elle ne peut constituer une réponse en soi. Pour certains, elle est liée à une insuffisance de réflexions sur ce sujet du fait d’un manque de temps et souvent de volonté. D’autres refusentla mise en place de la référence compte tenu des risques d’exclusivité liés à la relation tissée entre le référentet l’enfant ou l’adulte.

66 • Les différents projets de l’éducation spécialisée

1. Jacques Trémintin et Guy Benloulou, « Le référent : professionnel ressource ou substitut parental », Lien social,n° 340.

multiplicité d’intervenants est alors susceptible d’insécuriser, de complexifier la relationéducative, de brouiller le discours et d’empêcher en somme une cohérence dans les actionsqu’elles soient éducatives, sociales, thérapeutiques ou pédagogiques.

b. Des intérêts et des risques

La fonction de la référence consiste en « l’instauration d’une relation privilégiée [qui] faitentrer peu ou prou le professionnel dans une logique de suppléance parentale : il exerceun rôle d’écoute, d’observation et de guidance et assure la continuité et la cohérencede la vie de l’usager. Il prend très vite une place centrale dans son univers étantfacilement sollicité pour répondre aux demandes, angoisses et problèmes de ce dernier1. »

Cette relation privilégiée, entre l’éducateur référent et la personne accompagnée, se situedonc au carrefour d’une confiance réciproque et de l’affectif. Du côté de l’éducateur, cetteplace de référent constitue idéalement un levier dans la relation du fait de sa proximité : elleengage dans la connaissance et la compréhension de l’autre. Du côté de la personneaccompagnée, elle prend appui sur « un adulte ressource » qui le protège, le soutient etl’encourage.

Cependant, le risque de la référence se situe dans l’appropriation par le professionnel, aumoins à son insu, de la situation : en se sentant le seul dépositaire de la parole de la personneet détenteur d’une vérité sur elle, l’éducateur peut alors n’accorder que peu de crédit auxobservations de ses collègues et s’arrêter exclusivement sur ses émotions et ses ressentis.Dans ce type de configuration, la personne n’est plus reconnue comme actrice de ses projetsmais prisonnière d’une perception individuelle, aussi bienveillante soit-elle. Cette relationfusionnelle ou d’emprise réciproque compromet nécessairement l’évolution de la personne.Certes, l’éducateur doit travailler avec ses propres représentations, sa perception, sesémotions et ses ressentis qui conditionnent en partie ses pratiques et qui rigidifientquelquefois ses positions. Il doit alors s’en décaler afin de trouver la « bonne distance » quipermet à la personne d’être accompagnée, sans se trouver « coincé » dans une relationnécessairement temporaire : ce défi quotidien nécessite de s’interroger en permanence. Et si la position de référent crée le plus souvent une relation de proximité, somme touteparticulière, elle ne devrait pas se traduire par une impossibilité à objectiver ce qui est vécu. L’exemple qui suit propose une vision de la référence à laquelle s’ajoute un commentairesur les dispositifs qu’il convient de mettre en place dans un établissement afin d’en conjurerles « mauvais » effets et de garantir la mise en œuvre du projet personnalisé dans lesmeilleures conditions possibles.

Rôle et fonction du référent en internat éducatif(extrait d’un projet d’établissement)

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Place du référent dans le projet personnalisé • 67

Le référent éducatif est dans un lien privilégié mais non exclusif avec l’enfant. Autrementdit, il n’est pas le seul dépositaire des informations concernant l’enfant et ses parents. Iln’est pas le seul à être en relation avec eux. L’équipe dans son ensemble est concernée.Pour autant, dans un souci de cohérence, il est le fil conducteur d’une situation, celui quiest le plus à même de restituer de manière exhaustive ce qui se passe pour l’enfant lorsde son placement notamment en réunion de synthèse. Il est également celui quiconstruira avec l’enfant son projet personnalisé.En outre, plusieurs responsabilités lui incombent :Sur le plan scolaire :� celle de suivre l’enfant dans sa scolarité. Pour ce faire, il rencontre les enseignants

de manière régulière (environ trois fois par an), et dans la mesure du possible enprésence de ses parents informés en amont des rendez-vous ;

� il accompagne l’enfant dans son orientation, son projet professionnel ;� il assure le suivi scolaire (état des fournitures, cahier de correspondance, bulletins

scolaires, etc.) ;� il relaie les demandes ou besoins de soutien scolaire ou d’un autre suivi

(orthophonie, psychomotricité, etc.) auprès de l’équipe.Sur le plan médical :� il assure le suivi médical et paramédical et veille à sa bonne organisation ;� il prend les contacts nécessaires le cas échéant ou sollicite la ou les personnes

susceptibles de le faire.(...) Il informe et implique les parents dans la mesure du possible dans la scolarité del’enfant, la santé, l’hygiène, les projets à court ou moyen terme (vacances, etc.). Enconcertation avec la direction, il participe à des rencontres formalisées avec les parentsà raison de deux à trois fois par an afin de faire le point sur la situation de l’enfant etcelle de ses parents, les projets à court ou moyen terme. Si la mesure de placementarrive à échéance, le rendez-vous avec la famille sera, entre autres, l’occasion detransmettre la position de l’équipe à l’égard du placement, ses difficultés comme sespoints positifs.Le référent éducatif a un devoir de transmission des informations lorsqu’elles constituentdes éléments de danger pour l’enfant. Dans la relation éducative fondée sur la confiance,le référent éducatif doit impérativement expliquer à l’enfant les raisons pour lesquellesil est amené à transmettre des informations. Il n’est pas seul dans la situation mais seréfère à une équipe tenue au secret professionnel.Par ailleurs, bien qu’il intervienne au quotidien et suive l’enfant dans son évolution, ilcentralise ou collecte les informations transmises par ses collègues tant dans les tempsinformels, par le biais du cahier d’informations, qu’au cours des réunions.

CommentairesExaminons maintenant ce qui favorise le processus éducatif, lui-même construit à partird’un double mouvement : l’un impulsé par le référent éducatif mobilisé par l’enfant, centrésur son projet personnalisé, et l’autre sous l’égide de l’équipe pluridisciplinaire qui, par sonexistence, peut oblitérer les effets pervers de la référence.

Une individualisation de l’accompagnement Dans cet exemple, le référent centralise l’information et s’inscrit au cœur de l’accompagne -ment de l’enfant par sa présence régulière. La relation qu’il tisse avec lui et ses parentsl’amène de fait à occuper une place essentielle sans que celle-ci ne soit fondée surl’exclusivité. Pourtant, par les responsabilités qui sont les siennes sur les plans scolaire etmédical, le référent est celui qui garantit, assure, organise la mise en œuvre des suivis ainsique le projet personnalisé. L’éducateur référent participe alors à l’évaluation de la situationen tant que principal interlocuteur de l’enfant et de sa famille. Enfin, il relaie les obser -vations, les demandes des partenaires institutionnels et contribue par ses écrits à unemeilleure connaissance de l’enfant et à la prise en compte de ses besoins.

La sécurisation d’un travail collectifEn cela, le référent détient un extraordinaire pouvoir qui peut se muer en toute-puissanceen l’absence d’instances de régulation et de supervision, ou de volontés de restitution d’in-formations et d’actions en équipe. Dans l’exemple ci-dessus, les places des responsableshiérarchiques de l’équipe éducative ne sont pas négligeables. Par leur participation et leurcontribution à la réflexion, la solitude ou l’isolement de l’éducateur sont amoindris, au profitde la communauté éducative impliquée dans son ensemble auprès de chaque enfantaccueilli. Pour autant, il ne faut pas mythifier l’idéal que représente ce collectif de profes sion-nels, si délicat à maintenir dans certains établissements ou services.

68 • Les différents projets de l’éducation spécialisée

Durant l’année, selon des temps à déterminer, le référent éducatif expose les situationspour lesquelles il a été nommé. Des comptes rendus sont rédigés à cet effet maiségalement au cours des réunions de synthèse, ou des rencontres avec les partenaires,et composent le dossier de l’enfant. Ils sont à disposition de l’équipe éducative.Enfin, au cours du placement de l’enfant, le référent éducatif est amené à rencontrer demultiples partenaires. Ces derniers n’ont évidemment pas le même rôle maisinterviennent de manière plus ou moins régulière dans le quotidien de l’enfant etparticipent de fait à sa construction sociale et individuelle. Ainsi, il est souhaitable quedes points puissent être faits avec chacun d’entre eux afin d’enrichir les observationsconcernant l’enfant et définir des projets au plus près de ses besoins.

Une tentative d’objectiver l’accompagnement Toutefois, consi dérons que la définition d’objectifs clairs, et de procédures de travail rigou-reuses dont chacun maîtrise le sens et partage la conduite, favorise ce travail d’équipe. Decette manière, la mutualisation des savoir-être et savoir-faire, permet cette mise en synergiesi nécessaire lorsqu’il est question de la « chose » éducative et de sa complexité multidimen-sionnelle.Plus que la relation duelle, c’est donc la relation triangulaire qui est nécessaire pour atté-nuer les effets du face à face ou de la « main dans la main ». Cette configuration composéede l’enfant, du référent et du tiers séparateur, en tant qu’instance symbolique polymorphe,permet de renoncer à la toute-puissance de l’éducateur. Le fait de permettre à ce dernierde bénéficier d’un soutien technique, d’instances de paroles où ses observations étayéespar ses représentations, ses valeurs, son histoire et ses références sont prises en compte(sans qu’elles soient érigées en vérités absolues), encourage l’objectivation et donc la prisede distance éducative. C’est par le déploiement de ces moyens que l’enfant, par la placede sujet qui lui est donnée, peut s’éveiller à lui-même et à autrui, en s’appuyant sur desadultes responsables.

La piste délicate de la co-référenceEnfin, dans de nombreux établissements, il existe aussi un référent secondaire ou co-référent, dont la fonction est quelquefois difficile à appréhender, voire parfois vidée desa substance, alors qu’il apparaît en théorie dans le projet éducatif. Tel un couple éducatif,le référent et le co-référent sont appelés à œuvrer ensemble pour un but commun :favoriser la construction individuelle et sociale de la personne en privilégiant laconcertation, en assurant la continuité de l’accompagnement éducatif. Qu’en est-il dansles faits ? Ce duo est-il au cœur du processus éducatif ou au contraire à la marge de celui-ci ? Sa place est-elle réelle ou virtuelle ? Alors que le « co » induit une répartition équitabledes responsabilités, une intervention simultanée, une mission partagée avec son collègueréférent, la fonction de co-référent ne résiste souvent pas à l’épreuve de la réalité.Davantage perçue comme une fiction ou une charge trop lourde à assumer, la co-référencefigure sur le papier mais est peu ou prou habitée par l’éducateur voire désincarnée. Lemanque de moyens, l’absence ou l’insuffisance d’échanges entre professionnels, lesdifficultés à se situer dans la relation éducative (compte tenu de la place du référent, desdivergences de point de vue ou de perception), sont autant de raisons justifiant les limitesou la remise en question de la co-référence. Dès lors, relève-t-elle d’une mission impossibleou peut-elle, même modestement, se frayer un chemin ? L’exemple qui suit illustre lavolonté d’une équipe éducative de la faire exister malgré les obstacles cités.

Place du référent dans le projet personnalisé • 69

Extrait d’un projet portant sur la coréférenceTant sur la maison des enfants que sur la structure d’accueil des adolescents, le choix aété fait de maintenir l’existence d’un co-référent en complément du référent. Si leréférent occupe une place centrale dans l’accompagnement de l’enfant avec lequel setisse une relation privilégiée, le coréférent n’occupe pas une place secondaire bien quesoient probablement moindre les sollicitations à son égard.

70 • Les différents projets de l’éducation spécialisée

Le contenu de son intervention est à définir selon les situations. Certaines réclamentune présence égale à celle du référent. D’autres appellent davantage de distance ouinduisent la détermination d’une place dédiée particulièrement aux relations avec lafamille, l’institution scolaire. Cette souplesse dans la définition de la place et la fonctiondu co-référent constitue un élément essentiel. Elle permet de prendre en compte lasingularité de chaque enfant admis à l’Arche au cours de son placement. En outre, le co-référent s’inscrit dans un dispositif à même d’évoluer en fonction des observationsfaites par l’équipe éducative.Sa fonction lui confère une place symbolique s’assimilant à celle d’un tiers dans larelation entre le référent et l’enfant. Il permet également l’existence de la mixité au coursde l’accompagnement éducatif de l’enfant. Cela suppose que soient ensemble désignéspuis présentés à l’enfant le référent et le co-référent. Par ailleurs, ce dernier devient unrelais auprès de l’enfant lorsque le référent est absent. Dans certains actes comme uneaudience au tribunal, la rédaction du rapport d’évolution, les réunions de synthèse, laconstruction du projet individualisé ou les rencontres avec les parents, sa participationou sa présence peuvent être requises voire nécessaires. Enfin, il propose dans la réflexion collective un regard plus objectivé sur l’évolution del’enfant et l’appréciation de sa situation.

es certifications du DC 2

LPartie 9

Par Stéphane Rullac

221

L’étude de situation

Définition officielleCes tableaux sont fournis par le référentiel de certification, en annexe II de l’arrêté du 20 juin 2007 relatif au DEES.

L’esprit L’étude de situation est une épreuve écrite de 4 heures, organisée par le centre deformation, à la date de son choix. Corrigée par un formateur ou un professionnel del’éducation spécialisée, ce devoir sur table permet de préparer le candidat à se forger unecompétence dans l’analyse éducative qui intègre une synthèse éducative, un diagnosticéducatif et des hypothèses d’actions éducatives. Bien qu’intéressante, cette logique est largement fictive dans les modalités proposées parle DEES : si la mise en œuvre du projet éducatif est construite préalablement sur ces phases

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1

I

Domaine de compétences

Objectifs de l’épreuve Compétences repérées Durée de l’épreuveInterrogateurs ou correcteurs

1re partie : participation àl’élaboration et à la conduitedu projet éducatif.

évaluer les capacités d’obser-vation, d’analyse et de restitu-tion des situations éducatives.évaluer la capacité du candi-dat à émettre des hypothèsesfondées sur ses observationset ses connaissances des publics.

Observer, rendre compte etanalyser les situations éduca-tives.Participer à la mise en œuvred’un projet éducatif.

épreuve écrite d’une durée de4 heures.

1 correcteur (formateur ouprofessionnel).

épreuve écrite : à partir d’une situation (3 à 6 pages)fournie au candidat. Le candidat synthétise la com-préhension qu’il a de la situation. Il en analyse lesdifférents paramètres au regard de ses connaissanceset de sa pratique professionnelle. Il émet des hypo-thèses lui permettant d’élaborer des propositions.

épreuve organisée en cours de formation par l’établissement deformation.Coefficient 1.

Type d’épreuveCadre de l’épreuveet lieu de l’épreuve

méthodologiques, il ne s’agit en aucun cas, dans la réalité, d’une expertise solitaire, maisbien d’un travail d’équipe et en association avec l’usager. Cet exercice solitaire ne vaut doncque comme exercice pédagogique et non comme une évaluation strictement profession-nelle. Dans sa pratique, l’éducateur mène ce travail collectivement et ne peut être le seulgarant de la formalisation théorie/pratique, comme le demande cette certification.

ObjectifsUn ensemble de documents sont susceptibles d’êtres présentés : lettres, rapports sociaux,bilans, éléments d’enquêtes sociales, notes de situations, extraits de synthèses, etc. Lesobjectifs de cet exercice peuvent être définis ainsi :� repérer les auteurs et le contexte d’écriture de chaque document ; � construire une chronologie des événements relatés ;� évaluer les problèmes existant dans l’environnement de l’usager ;� évaluer les problèmes et les besoins de l’usager ;� définir la nature théorique de la problématique éducative de l’usager ;� définir les objectifs potentiels d’un projet éducatif à mettre en œuvre ;� évaluer les ressources et les obstacles à la mise en œuvre du projet éducatif ;� proposer les moyens d’un projet éducatif ;� élaborer un calendrier d’intervention de la mise en œuvre du projet éducatif.

MéthodePour ce faire, voici un plan de travail possible :� faire une lecture attentive et synthétique de chaque document (1 h) : repérer les

auteurs, la nature des documents et les événements-clés relatés. Synthétiser lesproblèmes sociaux et éducatifs que rencontrent l’environnement et l’usager ;

� construire la problématique éducative (30 min) : il s’agit de repérer la cause généraledes problèmes auxquels les actions éducatives vont tenter de remédier. Ce repérage,de ce qui fait problème éducativement, doit être associé à des théories bien repérées.Par exemple, il peut s’agir d’intervenir sur la relation mère-enfant ou sur une communi -cation entravée par des troubles auditifs, etc. Il s’agit finalement de la partie analytiquedu diagnostic éducatif ;

� déterminer les ressources opérationnelles du projet éducatif (30 min) : cerepérage s’attache autant aux moyens qu’aux obstacles à contourner, chez tous lesacteurs mobilisables, dans un espace-temps repéré (l’usager, son environnement,l’action éducative et ses moyens). Il s’agit finalement de la partie opératoire dudiagnostic éducatif ;

� construire le plan (15 min) : le plan reprend les éléments formulés dans les phases deréflexion préalables : introduction (problématique), 1re partie (synthèse de la situation :contraintes et problèmes), 2e partie (diagnostic éducatif : problèmes et solutions, en

4

3

222 • Les certifications du DC 2

L’étude de situation • 223

passant par le repérage théorique de la source du problème), 3e partie (hypothèsesd’actions : solutions et modalités d’application) ;

� rédaction (1 h 15) ;� relecture (30 min).

Proposition de plan indicatif� Introduction : résumer la situation, établir la chronologie des faits, situer les problèmes

à étudier, énoncer la problématique à traiter et le plan.� Synthèse de documents : détailler la situation, donner le cadre réglementaire et

présenter les réseaux et partenariats existants.� Analyse de la situation : mettre en évidence les problèmes et les enjeux du suivi à

mettre en place, ainsi que les enjeux du positionnement professionnel à prendre encompte, en relation avec des points théoriques.

� Propositions d’actions : présenter des pistes pour faire au mieux en veillant à associerl’usager au suivi proposé, mesurer les zones d’incertitude et les limites de l’actionenvisagée.

� Conclusion : rappeler la situation, la problématique, les pistes de solutions et terminerpar un questionnement qui ouvre des pistes de réflexion nouvelle.

Exemple1

Le devoir se compose en général d’une consigne, d’un résumé de situation et de docu -ments annexés.

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ConsigneAprès un an de placement au Foyer d’Action Éducative (FAE) Les Oliviers, l’équipeéducative interroge l’intérêt de maintenir Sylvain dans ce foyer. En tant que référent(e)et à l’approche du renouvellement de son projet individualisé, il vous est demandé uneesquisse de projet éducatif.

SituationSylvain est un jeune homme de 17 ans et demi, accueilli au FAE Les Oliviers depuis le31 juillet 2008 pour avoir commis des actes de violence sur son ascendant légitime. Il esten attente de jugement. Le jeune homme et sa famille ont déjà fait l’objet de mesuresciviles et pénales.

1. Un grand merci à Célia Carpaye pour cet exemple. Il est possible de retrouver d’autres conseils méthodolo-giques sur son excellent site : http://educateur-specialise.blogspot.com. Tous les éléments d’identification ontété modifiés.

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DEESDC 2 Conception et conduite

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Stéphane Rullac est éducateur spécialisé et docteur en anthropologie.

Cécile Soris est éducatrice spécialisée et directrice d’une associationd’action sociale.