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Sommaire •Appel ......................................2-3 Il faut redresser le cap de la politique du médicament à usage humain •Editorial .....................................4 Champ libre Aujourd’hui, la politique du médicament se conçoit à l’échelon européen ..............5-7 La répartition des rôles au sein de l’Union européenne ..............6 En pratique, la politique actuelle du médicament tourne le dos à la santé publique .................................8-10 Un membre du CPMP prend position .........................................9 La politique du médicament au service de l’industrie ........................11-13 Les dangers de la procédure d’AMM par reconnaissance mutuelle .......................................12 Pour une réglementation qui réponde aux besoins élémentaires de santé publique ...............................14-15 Internet - Les agences du médicament ont des devoirs d’information ............................16 - FDA : un exemple de transparence .................17-18 MedWatch ................................18 - EMEA : un faux-semblant de transparence .................18-20 Directeur de la publication : Jacques Juillard Adresse postale : La revue Prescrire - BP 459 – (F) 75527 Paris Cedex 11 E-mail : [email protected] Site internet : www.prescrire.org La politique du médicament en danger L’Agence européenne du médi- cament (alias EMEA) est clairement aujourd’hui une institution au ser- vice des firmes pharmaceutiques et non au service de la santé des européens. Au sein de la Commission européenne, le médi- cament est rattaché à la Direction “Entreprises” et non à la Direction “Santé et protection des consom- mateurs”, et tout est fait pour favoriser la compétitivité à court terme des firmes pharmaceutiques européennes vis-à-vis de leurs concurrentes. Dans les années 1970, l’Europe du médicament s’est développée de façon harmonieuse : marchan- dises industrielles, les médicaments devaient néanmoins alors s’inscrire dans une perspective de santé publique. Lors de son entrée en activité, en 1995, l’EMEA devait notamment, selon ses attributions, favoriser l’information des profes- sionnels et des patients. Il y a loin des principes à la réali- té. Et les modifications de la régle- mentation européenne du médica- ment que cherchent à faire adopter, dans les tout prochains mois, les industriels et leurs alliés de la Commission, sont très inquiétants (lire pages 5-15). Certains évoquent l’américanisa- tion du marché européen du médi- cament. Mais l’Europe ne dispose- ra même pas des moyens de contrôle de la Food and Drug Administration, ni de la transpa- rence des institutions américaines (lire pages 16-20). Les citoyens doivent intervenir, et exiger une politique du médica- ment au service réel de la santé, ainsi que la transparence effective de toutes les administrations, fus- sent-elles européennes et spéciali- sées dans le médicament. La revue Prescrire E XTRAITS DE LA REVUE P RESCRIRE JUIN 2002 LA REVUE PRESCRIRE - EXTRAITS PAGE 1

JUIN 2002 La politique du médicament en danger · 2019. 4. 17. · La politique du médicament en danger L’Agence européenne du médi-cament (alias EMEA) est clairement aujourd’hui

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Page 1: JUIN 2002 La politique du médicament en danger · 2019. 4. 17. · La politique du médicament en danger L’Agence européenne du médi-cament (alias EMEA) est clairement aujourd’hui

Sommaire•Appel ......................................2-3Il faut redresser le cap de la politique du médicament à usage humain

•Editorial .....................................4Champ libre

•Aujourd’hui, la politiquedu médicament se conçoità l’échelon européen ..............5-7

La répartition des rôles au sein de l’Union européenne ..............6

•En pratique, la politique actuelle du médicamenttourne le dos à la santépublique .................................8-10

Un membre du CPMP prend position .........................................9

•La politiquedu médicament au servicede l’industrie ........................11-13

Les dangers de la procédure d’AMM par reconnaissance mutuelle .......................................12

•Pour une réglementationqui réponde aux besoins élémentaires de santépublique ...............................14-15

•Internet

- Les agences du médicament ont des devoirsd’information ............................16

- FDA : un exemplede transparence .................17-18

MedWatch ................................18

- EMEA : un faux-semblantde transparence .................18-20

Directeur de la publication :Jacques Juillard

Adresse postale :La revue Prescrire - BP 459 –(F) 75527 Paris Cedex 11E-mail : [email protected] internet : www.prescrire.org

La politique du médicament en danger

L’Agence européenne du médi-cament (alias EMEA) est clairementaujourd’hui une institution au ser-vice des firmes pharmaceutiqueset non au service de la santé des européens. Au sein de laCommission européenne, le médi-cament est rattaché à la Direction“Entreprises” et non à la Direction“Santé et protection des consom-mateurs”, et tout est fait pour favoriser la compétitivité à courtterme des firmes pharmaceutiqueseuropéennes vis-à-vis de leursconcurrentes.

Dans les années 1970, l’Europedu médicament s’est développéede façon harmonieuse : marchan-dises industrielles, les médicamentsdevaient néanmoins alors s’inscriredans une perspective de santépublique. Lors de son entrée enactivité, en 1995, l’EMEA devaitnotamment, selon ses attributions,favoriser l’information des profes-sionnels et des patients.

Il y a loin des principes à la réali-té. Et les modifications de la régle-mentation européenne du médica-ment que cherchent à faire adopter,dans les tout prochains mois, lesindustriels et leurs alliés de laCommission, sont très inquiétants(lire pages 5-15).

Certains évoquent l’américanisa-tion du marché européen du médi-cament. Mais l’Europe ne dispose-ra même pas des moyens decontrôle de la Food and DrugAdministration, ni de la transpa-rence des institutions américaines(lire pages 16-20).

Les citoyens doivent intervenir,et exiger une politique du médica-ment au service réel de la santé,ainsi que la transparence effectivede toutes les administrations, fus-sent-elles européennes et spéciali-sées dans le médicament.

La revue Prescrire

E X T R A I T S D E L A R E V U E P R E S C R I R E

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LA REVUE PRESCRIRE - EXTRAITS • PAGE 1

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PAGE 2 • LA REVUE PRESCRIRE - EXTRAITS

Santé publique avant politique industrielle. Le Médicament étantun élément important de la politique de santé, les structures administratives, euro-péenne et nationales, chargées des autorisations de mise sur le marché et dusuivi après commercialisation doivent dépendre directement des responsablesSanté des États et de l’Union.

Dans ce cadre, • ce sont les ministres de la Santé de l’Union qui doivent décider, avecle Parlement, de la politique européenne du médicament et de l’adop-tion des Directives et Règlements afférents, et non les ministres del’Industrie ;• l’Agence européenne du médicament (EMEA) doit dépendre de laDirection générale Santé et Protection des consommateurs, et non plusde la Direction générale Entreprises de la Commission européenne.

Indépendance financière. Le Médicament étant l’objet d’enjeux finan-ciers considérables, il est essentiel que les structures et les personnes chargées del’administration et du contrôle des médicaments soient indépendantes des firmespharmaceutiques sur le plan financier.

Dans ce cadre,• le budget des États et de l’Union doit rapidement couvrir à 100 % lebudget des agences nationales et européenne du Médicament ;• les redevances dues par les firmes pharmaceutiques, notammentpour les demandes d’autorisation des médicaments, doivent être ver-sées aux budgets des États et de l’Union, et non directement auxagences, de façon à empêcher toute forme de clientélisme ;• le montant de ces redevances doit être calculé de façon à ce que lesindustriels aient nettement intérêt à choisir la voie centralisée de l’auto-risation européenne de mise sur le marché s’ils veulent accéder àl’ensemble des pays de l’Union ;• les conflits d’intérêts des personnels, des experts et des organismes sol-licités doivent être régulièrement déclarés, examinés et pris en comp-te dans la pratique ; ils doivent être rendus publics.

Libre accès aux données scientifiques. Le Médicament ne doit pasfaire exception au devoir de transparence de l’ensemble des institutions euro-péennes et nationales concernées. Ce devoir est d’autant plus essentiel que sont

en jeu ici des informations scientifiques qui peuvent permettre de mieux soi-gner et/ou de faire un meilleur usage des thérapeutiques disponibles. Il s’ins-crit aussi dans le cadre du devoir moral des collectivités de rendre publiques lesinformations issues de la recherche clinique, à laquelle des milliers de maladesont accepté bénévolement de participer.

Dans ce cadre,• les agences nationales et européenne du Médicament doivent seréorganiser pour rendre accessibles au public et aux professionnels desanté, sous des formes synthétiques, détaillées et référencées, les infor-mations scientifiques qui leur ont permis de prendre leurs décisions,positives ou négatives. Et ce aussi bien pour ce qui concerne les auto-risations de mise sur le marché (nationales, européennes centraliséesou par reconnaissance mutuelle), que pour ce qui concerne la sur-veillance post-commercialisation (pharmacovigilance, réévaluationcomparée du bénéfice, survenue d’erreurs médicamenteuses, etc.).

Procédures centralisées et exigeantes. L’effort d’harmonisationeuropéenne et de concentration des moyens entrepris depuis 1995, au travers dela création de l’Agence européenne du médicament (EMEA) et de la procédu-re centralisée des autorisations européennes de mise sur le marché des médica-ments, doit être poursuivi et amplifié.

Dans ce cadre,• la procédure d’autorisation de mise sur le marché par reconnaissan-ce mutuelle doit disparaître, après un délai d’adaptation aussi courtque possible, au bénéfice d’autorisations de mises sur le marché cen-tralisées, efficaces et transparentes, et ce pour toute commercialisationd’un médicament dans plus d’un pays de l’Union européenne ;• les moyens budgétaires de l’Agence européenne du médicament doi-vent être considérablement augmentés, de façon à ce que cet organis-me clé de la politique européenne du Médicament puisse faire face àses devoirs de compétence, d’indépendance, de transparence et de vigi-lance ;• les délais d’attribution des autorisations de mise sur le marché (natio-nales ou européennes) ne doivent pas être systématiquement rac-courcis : ils doivent permettre une évaluation sérieuse et complète desdossiers, dans le souci de la protection des patients ; les délais habi-

Appel aux responsables politiques nationaux et européens

Il faut redresser le cap de la politique du médicament à usage humain

Il est vital de replacer le Médicament dans une logique de santé publique, au service

des citoyens, en privilégiant l’indépendance et la transparence à tous les niveaux.

Pour préserver durablement son efficacité et son dynamisme à l’échelon mondial, il est tout

aussi vital que l’industrie pharmaceutique soit énergiquement orientée pour répondre aux besoins réels

de santé publique et de progrès thérapeutiques, en Europe et dans le reste du monde.

Les membres de l’association Mieux Prescrire et la Rédaction de la revue Prescrire appellent les responsables

politiques concernés (députés européens, ministres du Conseil de l’Union européenne, commissaires européens)

à reconsidérer les orientations contenues dans les propositions de Directive et de Règlement relatifs au Médicament

préparées par la Direction générale Entreprises de la Commission européenne.

Dans l’intérêt de la santé publique, ils appellent ces responsables à adopter de nouvelles orientations s’inscrivant

dans une politique générale au service des populations.

Pour ce faire, ils demandent que soient prises les mesures suivantes :

LA REVUE PRESCRIRE JUILLET/AOÛT 2002/TOME 22 N° 230 • PAGES 546-547

O S I T I O N P

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LA REVUE PRESCRIRE - EXTRAITS • PAGE 3

tuels ne doivent être raccourcis que dans des situations à délimiterprécisément, correspondant à des affections graves, actuellement sanssolution thérapeutique ;• le réexamen périodique des dossiers d’autorisations de mise sur lemarché (nationales ou européennes) doit être renforcé et réellementmis en œuvre ; il doit non seulement concerner les données relativesà l’efficacité et aux effets indésirables du Médicament, mais aussi à sonutilité globale compte tenu de l’évolution des connaissances et desautres moyens thérapeutiques disponibles, médicamenteux et nonmédicamenteux.

Une bonne information pour un bon usage. Le bon usage dumédicament, et en particulier la prévention des effets indésirables et des erreursmédicamenteuses, nécessite une bonne information du public et des profession-nels de santé.

Dans ce cadre,• il revient aux autorités nationales et européennes de prendre toutesles dispositions pour que se développent, au sein du public et des pro-fessionnels de santé, des supports d’information indépendante, docu-mentée, référencée, comparative, élaborée de façon transparente etexplicite, sur les maladies et sur les moyens thérapeutiques, préventifs,diagnostiques et de dépistage, et leur bon usage ;• la dénomination commune internationale des médicaments, et nonle nom de marque ou de fantaisie, doit être considérée comme le moyenprincipal de leur identification sur tout le territoire de l’Union, tantpour ce qui concerne les administrations responsables, que les utilisa-teurs, patients et professionnels de santé ;• les firmes pharmaceutiques doivent être incitées et encouragées àaméliorer l’information du public qui figure sur le conditionnementet dans les notices de leurs spécialités ;• la publicité pharmaceutique doit être réglementée dans tous les paysde l’Union : contrôle a priori pour les médicaments d’automédication ;interdiction formelle de toute publicité grand public pour les médica-ments de prescription ; contrôle a posteriori de la publicité destinéeaux professionnels de santé ; application effective et rapide de fortessanctions aux contrevenants.

Transparence des coûts. Les médicaments ne peuvent s’inscrire dans unepolitique de santé au service de la population que s’ils sont disponibles, répar-tis sur tout le territoire, accessibles à l’ensemble des populations, et que leurprix soit compatible avec les budgets sociaux mobilisables.

Dans ce cadre, et pour faire face à la montée spectaculaire des prixdes médicaments, • les responsables nationaux et européens doivent rapidement enga-ger une étude rigoureuse relative au prix de revient industriel desmédicaments, et particulièrement au coût réel de la recherche biomé-dicale ;• ils doivent constituer, au niveau de l’Union et de chaque État, des orga-nismes dotés de moyens importants, chargés de financer, d’orienter etde stimuler la recherche clinique de terrain nécessaire pour répondreaux nombreux besoins non couverts par la recherche financée par lesfirmes pharmaceutiques ; • ils doivent préparer la mise sur pied, à l’échelon des États et de l’Union,de dispositifs institutionnels chargés de fournir, à l’ensemble des per-sonnes concernées, patients, professionnels de santé, organismes deprotection sociale, et sous une forme appropriée, synthétique, référen-cée, actualisée, les données comparatives relatives aux médicaments,permettant de réaliser des choix en toute connaissance de cause.

Ces évolutions décisives ne doivent pas être improvisées. Maisquelques années de travail soutenu suffisent pour les faire aboutirconcrètement.

La revue PrescrireAssociation Mieux Prescrire

Des principes fondamentauxincontournables

Discuter de l’évolution de la poli-tique européenne du médicamentfait appel à de multiples niveaux depréoccupation (sanitaires, humains,économiques, financiers, etc.), dontbeaucoup ont été abordés dans larevue Prescrire.

Voici, pour ceux qui voudraientfouiller la question, quelques textesimportants déjà publiés dans larevue et qui n’ont jamais été autantd’actualité :

• “Ce que sont les véritables pro-grès thérapeutiques dans le domai-ne du médicament” (n° 225, p. 81 et140-145) : texte intégral de laDéclaration de l’ISDB (la Sociétéinternationale des revues indépen-dantes d’information sur le médica-ment), Paris 15-16 novembre 2001.Ne pas confondre “nouveauté”,“innovation” et réel progrès théra-peutique ; mettre en permanencele malade au centre de nos préoc-cupations.

• “Recherche biomédicale ; l’intérêtdes personnes d’abord” (n° 219, p.539-540 et 542-543) : texte intégralde la Déclaration d’Helsinki del’Association médicale mondiale,octobre 2000. Les nouvelles théra-peutiques doivent être évaluées par comparaison aux meilleuresméthodes en usage ; le placebo nedoit être utilisé qu’en l’absence detraitements ayant déjà fait leurspreuves.

• “Pour la transparence des déci-sions officielles concernant les médi-caments” (n°172, p. 229 et 277-281) :texte intégral de la Déclarationd’Uppsala coordonnée par la sec-tion européenne de l’associationHealth Action International et laFondation suédoise Dag Ham-marskjöld, Uppsala 11-14 sep-tembre 1996. Les principes de base,les obstacles et les moyens de pro-mouvoir la transparence et lecontrôle public des décisions offi-cielles concernant les médicaments.

• “Sur la communication d’informa-tions concernant la sécurité d’emploides médicaments” (n° 187, p. 599) :texte intégral de la Déclarationd’Erice adoptée à l’issue de la

Conférence internationale sur l’amé-lioration de la communication desinformations en pharmacovigilan-ce, organisée sous l’égide del’Organisation mondiale de la santé(OMS) par, entre autres, le Centrecollaborateur OMS d’Uppsala pourles effets indésirables des médica-ments, Erice 24-27 septembre 1997.Les devoirs fondamentaux d’infor-mation et de transparence des ins-titutions dans le domaine du médi-cament.

• “Penser et prescrire en DCI : unebonne pratique professionnelle” (n° 209, p. 561 et 606-623) : syn-thèse faisant référence sur le sujet(à laquelle on peut ajouter “Lesmédicaments génériques”, dossierdocumentaire détaillé réalisé éga-lement par la Rédaction de la revuePrescrire : 232 pages, mise à jourfévrier 2002). Centrer la gestioncollective des médicaments autourde leur dénomination communeinternationale (DCI), y comprispour leur prescription et leur dispensation, est un enjeu essen-tiel de la qualité des soins.

• “Internet : les agences du médi-cament ont des devoirs d’informa-tion” (ci-après, page 16) : grilled’analyse, et donc cahier descharges, qu’utilise l’équipe de larevue Prescrire pour évaluer les sitesinternet des agences du médica-ment. Cette grille a notamment per-mis à la revue de comparer les sitesinternet des agences américaine (ci-après, pages 17-18) et européenne(ci-après, pages 18-20).

• “Prix des médicaments rem-boursables quelle logique ?”“Première partie - Années 1990 :une libéralisation Internationalecroissante défavorable au contrôledes prix des médicaments” (n° 222,p. 782-786) ; “Deuxième partie -Prix proportionnels à l’innovation :principe raisonnable, maigres résul-tats” (n° 223, p. 801 et 859-863). La liberté des échanges intracom-munautaires est défavorable aucontrôle des prix des médicaments.Trop de latitude est laissée auxfirmes pharmaceutiques.

©LRP

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Nous développons ici l’analyse del’action de l’Agence européenne dumédicament (EMEA). Plus largement,nous vous invitons à faire un bilan de lapolitique du médicament en Europe.

Ce bilan est d’autant plus nécessaireque, très prochainement, deux proposi-tions de Directive et de Règlementconcernant la politique du médicamentvont être soumises, pour adoption, auParlement européen et au Conseil del’Union européenne. Ces propositions

ont été préparées et sont promues parla Direction générale “Entreprises” de laCommission européenne, dont dépendaujourd’hui directement l’EMEA.

Pour la Rédaction de la revue Prescrire,et pour de nombreux autres observa-teurs indépendants, ce bilan est loind’être positif. Et dans 7 ans, il pourraitêtre encore pire, si les propositionsactuelles, activement soutenues par lelobbying de certaines firmes pharmaceu-tiques, étaient adoptées telles quelles.

On peut souvent lire ou entendre direque l’Europe est un “machin” techno-cratique, éloigné des populations, piéti-nant les vitalités nationales.

L’analyse détaillée du dossier “Médica-ment en Europe” montre qu’il n’en estrien. L’harmonisation est utile pouroptimiser les ressources humaines etscientifiques, les institutions ne sont passi mal conçues, elles ne sont pas figées,

et elles sont perméables aux influencesdes citoyens. Encore faut-il que ceux-cise préoccupent des sujets qui lesconcernent, et qu’ils s’expriment.

Et là est le vrai problème. Qui s’estoccupé jusqu’à présent de la politiquedu médicament en Europe ? Pour ainsidire personne, à part les industriels dumédicament et leurs multiples courroiesde transmission.

Il n’est donc pas étonnant que seull’aspect industriel du médicament ait été

pris en compte, que l’EMEA ait été ratta-chée à la Direction “Entreprises” et nonà la Direction “Santé et Protection desconsommateurs”, que son budget soitfinancé en majorité par les firmes, com-me celui des Agences nationales dumédicament, etc. Le médicament estavant tout perçu comme une marchandi-se au service de la vitalité de l’économie“européenne”, et non comme un desmoyens disponibles au service de lasanté des européens.

Dans le domaine du médicament, lapolitique pro-industrielle de libre mar-ché, non soumise à un cahier descharges de santé publique, conduit à deserrements dangereux. Mais ce n’est paslà une fatalité. Il n’est jamais trop tardpour agir. On peut, on doit oser chan-ger le monde quand il ne convient pas. Ilsuffit de ne pas laisser le champ libre.

La revue Prescrire

Champ libre

É D I T O R I A L

LA REVUE PRESCRIRE JUIN 2002/TOME 22 N° 229 • PAGE 401

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LA REVUE PRESCRIRE - EXTRAITS • PAGE 5

Depuis une décennie,l’essentiel de la politiquedu médicament se décide

et s’organise au niveau européenet dans un contexte d’harmoni-sation internationale. Il persistequelques attributions locales (aliasnationales, par exemple fran-çaises), mais elles sont presquetoutes encadrées par des règlescommunes aux différents pays del’Union européenne.

Aujourd’hui, il est donc deve-nu indispensable de bienconnaître le fonctionnementgénéral des institutions euro-péennes pour comprendre le nou-veau cadre de référence du paysdans lequel on vit et on travaille.

Voici un glossaire pour s’yretrouver.

• AMM = Autorisation demise sur le marché. L’octroi d’uneAMM permet à une firme pharma-ceutique de mettre sur le marchéune spécialité pharmaceutique(médicament fabriqué de façonindustrielle). Il existe aujourd’huien Europe trois types d’AMM :

– AMM locale (alias nationa-le) : accordée par une agencenationale du médicament, aprèsexamen du dossier d’évaluationet avis de la Commission natio-nale d’autorisation de mise sur lemarché. Valable seulement sur leterritoire du pays où elle a été

accordée : par exemple, la France ;– AMM européenne par la pro-

cédure centralisée : accordée parla Commission européenne, aprèsinstruction du dossier parl’Agence européenne du médica-ment (EMEA) et sur avis de laCommission d’autorisation demise sur le marché européenne(CPMP). Cette AMM est valablesur tout le marché communau-taire, c’est-à-dire tous les terri-toires des pays de l’Union ;

– AMM par reconnaissancemutuelle (alias : par la procéduredécentralisée) : accordée par lesagences nationales du médicamentdes États membres sur la base dela reconnaissance d’une AMM ini-

a- Ne pas confondre d’une part “paysrapporteur” qui qualifie le rôle joué dansla procédure par reconnaissance mutuel-le par le pays ayant octroyé l’AMM ini-tiale ; et d’autre part les “rapporteurs”et “co-rapporteurs” qui sont les membresde la Commission européenne d’AMMagissant dans le cadre de la procédurecentralisée. Ces derniers sont chargés parla Commission européenne d’AMM(CPMP en anglais) d’analyser les dos-siers d’évaluation des médicaments et derapporter le résultat de leur analysedevant leurs collègues du CPMP. Ilsn’agissent pas au nom de leur pays, maiscomme membres d’une commissiond’experts au niveau européen.

tiale accordée par un des Étatsmembres. Cet État membre est dit“pays rapporteur” (alias “ReferenceMember State”) (a), car il

Redresser le cap de la politique du médicament

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Première partie

Aujourd’hui, la politique du médicament se conçoit

à l’échelon européen

La politique du médicament s’inscrit depuis plusde 20 ans dans le cadre européen, en France com-me dans toute l’Union européenne. Il faut appré-hender le fonctionnement des institutions euro-péennes et l’évolution de la politique européennedu médicament pour faire évoluer favorablementles choses.

LA REVUE PRESCRIRE JUIN 2002/TOME 22 N° 229 • PAGES 460-463

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PAGE 6 • LA REVUE PRESCRIRE - EXTRAITS

établit le rapport d’évaluationqui sera soumis à reconnaissan-ce par les autres pays. L’EMEAest tenue informée par la firme,mais le CPMP n’est consulté quepour arbitrage, en cas d’opposi-tion d’un ou plusieurs États àl’octroi de l’AMM.

• EMEA = European Agencyfor the Evaluation of MedicinalProducts (alias Agence euro-péenne du médicament). Créée parun Règlement européen de 1993,et fonctionnelle depuis 1995,l’EMEA a son siège à Londres. Ellea un rôle de coordination des res-sources scientifiques mises à dis-position par les États membrespour l’évaluation et la surveillan-ce des médicaments (à usagehumain et à usage vétérinaire).

Elle n’a pas de pouvoir déci-sionnel, mais elle doit donner des avis aux institutions euro-péennes : essentiellement à laCommission européenne (quioctroie les AMM) et aux Étatsmembres (par exemple en matiè-re de pharmacovigilance).

L’EMEA dispose de commissionsconsultatives (principalement leCPMP) et de groupes de travailconstitués d’experts provenant desdifférents pays de l’Union.

En 2001, l’EMEA employait208 fonctionnaires (prévisionspour 2002 : 251), et son budgets’élevait à 65 866 000 j (prévi-sions pour 2002 : 70 547 000 j),dont 69 % constitués par les taxeset redevances payées par lesfirmes pour l’examen de leursdossiers (1).

• CPMP = Committee forProprietary Medicinal Pro-ducts (alias Commission d’auto-risation de mise sur le marché desmédicaments à usage humain).Le CPMP est une des commissionsconsultatives de l’EMEA.

Il comprend actuellement2 experts de chacun des pays de laCommunauté, choisis pour leurexpérience dans l’évaluation desmédicaments, nommés pour unepériode de 3 ans renouvelable, etqui sont tenus d’agir en tantqu’experts scientifiques, mais noncomme représentants politiquesde leurs pays d’origine.

Le CPMP est chargé de donnerun avis sur les demandes de misesur le marché des médicamentshumains, dans le cadre de la pro-cédure centralisée. Il est égale-

ment consulté, lors des arbitrages,dans le cadre de la reconnaissan-ce mutuelle.

Il est aidé par des groupes detravail spécifiques (efficacité, sécu-rité, pharmacovigilance, biotech-niques, médicaments dérivés dusang, médicaments de phytothé-rapie, etc.). Il existe par ailleursaujourd’hui, auprès de l’EMEA,une autre commission chargée derendre des avis sur les médica-ments orphelins : le COMP, aliasCommittee for Orphan MedicinalProducts.

• EPAR = European PublicAssessment Report (alias rap-port public d’évaluation). LesEPAR sont publiés par l’EMEAsur les médicaments autorisés parla procédure centralisée. Ils sont

La répartition des rôles au sein de l’Union européenne

• Conseil européen : impulsion et orien-tation. Le Conseil européen a un rôle d’impul-sion et d’orientation politique générale. ChaqueÉtat membre y est représenté par le chef d’Étatou de gouvernement, assisté du ministre desaffaires étrangères.

• Parlement européen : pouvoir législatifpartagé et pouvoir budgétaire. Le Parlementeuropéen a le pouvoir législatif (en codécisionavec le Conseil de l’Union européenne), le pou-voir budgétaire et de contrôle de l’exécutif. Il estcomposé des députés européens, élus pour 5 anspar les citoyens des États.

C’est la seule institution communautaire quise réunit et délibère en public.

• Conseil de l’Union européenne : pouvoirlégislatif partagé. Le Conseil (des ministres)de l’Union européenne est aussi un organe légis-latif de la Communauté (en codécision avec leParlement européen). Il est formé par un repré-sentant de chaque État membre, au niveau minis-tériel, et sa composition varie en fonction dessujets abordés. Ainsi, un projet relatif au médi-cament peut être discuté par les ministres de lasanté ou par les ministres de l’industrie, selonl’angle envisagé.

• Commission européenne : monopole del’initiative législative. La Commission euro-péenne dispose du monopole du droit d’initiati-ve dans le domaine de la législation communau-taire. Elle met en œuvre la préparation des textes,en principe dans l’esprit des grandes orientationstracées par le Conseil de l’Union européenne.Dans le domaine du médicament, les proposi-

tions de Directive et de Règlement en discussionen 2002 ont été préparées par la Direction géné-rale “Entreprises” de la Commission européenne.La Commission européenne est par ailleurs l’orga-ne exécutif de l’Union : elle veille à l’application destraités et décisions communautaires. Ses servicesemploient un nombre important de fonctionnaireseuropéens : environ 20 000 en 2002.

• Des comités consultatifs. Le Comité éco-nomique et social, qui comporte trois groupes(employeurs, travailleurs et activités diverses), aun rôle consultatif. Par exemple, il a organisé uneconsultation sur la réglementation du médica-ment en cours de discussion. Le Comité desrégions, créé dans l’esprit d’une Europe prochedes citoyens, et constitué de représentants descollectivités locales et régionales, a également unrôle consultatif.

• Directives et Règlements. La portée desDirectives et des Règlements est définie parl’article 249 du Traité des CommunautésEuropéennes :

« Pour l’accomplissement de leur mission et dansles conditions prévues au présent traité, le Parlementeuropéen conjointement avec le Conseil (NDLR :le Conseil de l’Union européenne), le Conseil(NDLR : le Conseil européen) et la Commission(NDLR : la Commission européenne) arrêtentdes règlements et des directives, prennent des déci-sions et formulent des recommandations ou des avis.

Le règlement a une portée générale. Il est obli-gatoire dans tous ses éléments et il est directementapplicable dans tout État membre.

La directive lie tout État membre destinatairequant au résultat à atteindre, tout en laissant aux

instances nationales la compétence quant à la formeet aux moyens.

La décision est obligatoire dans tous ses élémentspour les destinataires qu’elle désigne (NDLR : ellene s’impose qu’à ces destinataires).

Les recommandations et les avis ne lient pas(NDLR : ils n’ont pas d’effet obligatoire oucontraignant) ».

©LRP

Pour en savoir plus • Communautés européennes “Annuaire inter-institutionnel – Qui fait quoi dans l’UnionEuropéenne ?” Office des publications officielles desCommunautés européennes, Luxembourg 2002.Outre des informations générales sur les institutions,cet annuaire comporte les listes de tous lesparlementaires et membres des différentesinstitutions. L’ensemble de ces informations et aussiaccessible via le serveur Europa du Parlementeuropéen (voir ci-dessous).

• Sauron JL “L’application du droit de l’Unioneuropéenne en France” La Documentation FrançaiseCollection Réflexe Europe, Paris 2000 : 135 pages.

• The ABC of Community Law “Borchardt KD”–Fifth edition. European Communities 2000 ;European Commission, Directorate - General forEducation and Culture - Publications Unit, rue de laLoi - Wetstraat 200, B-1049 Brussels (disponible danstoutes les langues de l’Union).

• Sites internet : - Parlement européen http://www.europarl.eu.int(pour l’essentiel dans toutes les langues de l’Union).- Union européenne en ligne http://www.europa. eu.int/inst-fr.htm (pour l’essentiel dans toutes leslangues de l’Union).

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censés rendre compte de l’état dudossier d’évaluation présenté parla firme à l’EMEA, de l’analyseréalisée par le CPMP et des motifsétayant l’avis de celui-ci. Il s’agiten pratique d’un documentconcis, duquel ont été retiréestoutes les données considéréescomme confidentielles d’un pointde vue industriel et commercial,et qui a reçu l’aval de la firmeconcernée.

Seuls les octrois d’AMM par laprocédure centralisée donnent lieuà la publication d’un EPAR. Aucunrapport d’évaluation n’est dispo-nible en cas de refus d’AMM. Demême, aucune des nombreusesdécisions prises par reconnaissan-ce mutuelle ne donne lieu à unEPAR.

• RCP = Résumé des carac-téristiques du produit (enanglais = SPC, pour Summary ofProduct Characteristics). Annexéà l’AMM, parfois appelé “carted’identité du médicament”, leRCP résume l’état des connais-sances sur le médicament aumoment de l’octroi de l’AMM,puis de chacune de ses révisionsquinquennales.

Prérédigé par la firme, il est dépo-sé à l’agence concernée en mêmetemps que la demande d’AMM. Ilest finalisé lors de l’octroi de l’AMM,et traduit dans les différenteslangues de l’Union quand il s’agitd’une AMM européenne.

Le RCP est construit selon unplan européen imposé, danslequel viennent s’intercaler desmentions supplémentaires toutau long de la vie du médicament :par exemple, des mises en gardecontre des effets indésirables malconnus ou inconnus initialement.

Le RCP constitue la base desmentions que la firme devra fairefigurer sur toute publicité dirigéevers les professionnels de santé (parexemple, une monographie d’undictionnaire de spécialités commele dictionnaire Vidal, une brochu-re, un encart publicitaire).

Une autre annexe de l’AMM(appelée aujourd’hui Annexe IIIa,et auparavant Annexe II) reprendles informations contenues dansle RCP, dans un langage censéêtre compréhensible par le public.Cette annexe constitue la base desmentions à reproduire sur la noti-ce du médicament.

• Blue box. La “blue box”dénomme le cadre entouré d’unfilet bleu qui figure sur les condi-tionnements des spécialités pour-vues d’une AMM européennecentralisée.

Dans ce cadre, se trouvent lesmentions propres à la réglemen-tation nationale du pays danslequel la spécialité est commer-cialisée.

On y trouve en particulier lestatut légal dans le pays, parexemple la liste de substancesvénéneuses (en France, liste I ouliste II ou liste des stupéfiants),ou la prescription restreinte à tel-le catégorie de prescripteurs, ceséléments n’étant pas encore tota-lement harmonisés dans l’ensem-ble de l’Union.

• Numéro d’AMM euro-péenne. Lorsqu’une spécialité aobtenu une AMM européennepar la procédure centralisée, sonnuméro d’AMM (que l’on retrou-ve par exemple sur le condition-nement ou sur les monographiesdu dictionnaire Vidal) est consti-tué des éléments suivants :– les lettres “EU”, pour UnionEuropéenne (en anglais EuropeanUnion) ;– le chiffre “1” ou “2”, selon qu’ils’agit d’un médicament à usagehumain (“1”) ou vétérinaire (“2”) ;– deux chiffres, correspondant àl’année de la première autorisa-tion : ex. 95 pour 1995 ;– trois chiffres, correspondant àun numéro attribué au médica-ment ;– trois chiffres, caractérisantchaque spécialité de la gamme enfonction de sa forme, de son dosa-ge et de la présentation (c’est-à-dire la contenance du condition-nement).

Exemple : EU/1/97/031/044correspond à l’AMM de la spé-cialité à usage humain NeoRecor-mon°, forme injectable, dosage à6 000 UI par seringue, présenta-tion en boîte de 6 seringues,autorisée en 1997 par la procé-dure d’AMM européenne cen-tralisée.

Nous avons déjà expliqué dansla revue Prescrire la significationdes numéros d’AMM des spécia-lités ayant obtenu une AMMfrançaise, numéros qui corres-pondent au Code CIP (Club Inter-Pharmaceutique) (2,3).

• ICH = International Con-ference on Harmonisation fortechnical requirements ofregistration of pharmaceuti-cals for human use. Le proces-sus de l’ICH a été mis en œuvreen 1990, à l’initiative des autori-tés de régulation et de l’industriepharmaceutique des États-Unisd’Amérique, d’Europe et duJapon.

Son objectif est d’harmoniserles procédures visant à la mise surle marché des médicaments, enadoptant à la fois des recomman-dations communes pour l’éva-luation et des modalités adminis-tratives similaires.

À travers des conférences inter-nationales (qui se sont tenuestous les deux ans environ), et sur-tout par le travail intensif d’uncomité de 14 membres entourésd’experts industriels et adminis-tratifs, l’ICH a abouti à l’adoptionde plus d’une centaine de recom-mandations aujourd’hui utiliséespar les firmes et les agences.

Cette harmonisation rapidepeut être considérée comme bien-venue dans la mesure où elle per-met une économie de moyens(avec, par exemple, moins derépétition inutile d’essais sem-blables sur l’Animal ou surl’Homme). Elle peut aussi fairecraindre un nivellement par lebas des exigences internationalesen matière d’évaluation.

Professionnels de santé etpatients n’ont pratiquement pasparticipé à ce processus. Ils ontpourtant intérêt à le suivre atten-tivement et à intervenir quanddes recommandations leur parais-sent inadéquates (ces recom-mandations sont accessibles surles sites des grandes agences dumédicament, dont l’Agence euro-péenne).

©LRP

Extraits de la recherche documentairePrescrire.1- The European Agency for the Eva-luation of Medicinal Products “WorkProgramme 2002” 18 December 2001 :62 pages (“Annex 1 – EMEA establish-ment plan 2000-2002” pages 42-43 ;“Annex 2 – EMEA budget summaries2000-2002” page 44).2- Prescrire Rédaction “Préserver lasignification du Code CIP” Rev Prescr2001; 21 (213) : 32.3- Prescrire Rédaction “Modification ducode barres sur les vignettes “Rev Prescr2002 ; 22 (227) : 268.

Pour en savoir plus Les informations clefs relatives à la régle-mentation européenne du médicamentpeuvent être trouvées grâce aux sourcessuivantes :

• Sur l’histoire de la construction dudroit européen du médicament :Campion G “Clefs pour l’Europe dumédicament” Éditions de Santé, Paris1996 : 251 pages.

• Sur la réglementation communautai-re actuelle du médicament ; définitions,concepts, liste des textes en vigueur :Brunet P “Dictionnary of the main refe-rence terms – Pharmaceutical law in theEuropean Union” Éditions de Santé,Paris 1999 : 236 pages (en anglais).

• Sur les procédures d’autorisation demise sur le marché et leur mise en pratique : Commission Européenne “La réglementation des médicamentsdans l’Union Européenne – Volume 2A.Avis aux demandeurs – Médicaments àusage humain” Office des publicationsofficielles des Communautés euro-péennes 1998 : 175 pages.

• Sur les textes européens en vigueur(directives, règlements) et les proposi-tions de modifications de ces textes : siteinternet, l’Union européenne en lignehttp://europa.eu.int/eur-lex

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C’est dans son applicationpratique que l’on peut jugerune politique. Et pour ce

qui concerne le médicament, c’estau double niveau, national (fran-çais, belge, italien, etc.) et euro-péen, que l’on peut juger la poli-tique qui lui est appliquée.

Cette politique est-elle transpa-rente ? S’inscrit-elle aujourd’huidans une démarche de santépublique cohérente ? Vise-t-elle àrenforcer la responsabilité et le rôledes différents acteurs (patients, pro-fessionnels de santé, administra-tifs, industriels) ?

Les lecteurs assidus de la revuePrescrire peuvent tirer de chaquenuméro de la revue, et en particu-lier des bilans récapitulatifs de find’année, des réponses à ces ques-tions. Les autorités françaises char-gées du médicament y ont souventété montrées du doigt pour leurpratique du secret, l’opacité de leursurveillance après commercialisa-tion des médicaments, le peu d’effi-cacité de leur politique d’encadre-ment des prix des médicaments,etc.

Pour ce qui est de l’Europe, leslecteurs de la revue ont aussi puconstater :- que les autorisations de mise surle marché (AMM) centralisées necorrespondent pas souvent à deréels progrès thérapeutiques(1,2,3) ;- que l’Agence européenne dumédicament (EMEA) est financiè-rement dépendante des redevancesdes firmes pharmaceutiques pouréquilibrer son budget (a)(4) ;- que l’EMEA, à l’image de son siteinternet, est un organisme opaquepour les citoyens et les profession-nels de la santé (5) ;- que les règles européennesactuelles entravent de fait toutcontrôle efficace des prix des médi-caments à l’échelon national (enFrance, par exemple) (6,7).

La revue Prescrire n’est pas la seu-le à dénoncer les insuffisances etles déviances actuelles des pratiqueslocales et européennes qui éloi-gnent la politique du médicament

de ses objectifs initiaux. Voici troisautres analyses à titre d’exemples.

Le constat de l’ISDB :des agences laconiques

Lors de sa création, l’EMEA s’estengagée à offrir des garanties detransparence comme le fontaujourd’hui toutes les institutionseuropéennes dans l’esprit de laCharte des droits fondamentaux del’Union européenne (b)(8). Elle afait de la publication systématiquedes rapports d’évaluation des médi-caments autorisés par la procédurecentralisée le fleuron de sa politiquede communication. Ces documentsd’une dizaine de pages (pour la par-tie scientifique utile), appelés EPAR(pour European Public AssessmentReport), étaient censés être rédigéspar les services de l’EMEA, puis êtrerendus publics et mis à jour.

Les revues européennes indé-pendantes de thérapeutique consa-crées aux médicaments, et regrou-pées au sein de l’ISDB (InternationalSociety of Drug Bulletins), ont toutd’abord salué positivement cetteinitiative, et transmis des proposi-tions d’amélioration à l’EMEA (9).

Puis, observant une détériorationde la qualité des EPAR, le groupeeuropéen de l’ISDB a réalisé etpublié une étude détaillée de 9EPAR consécutifs (septembre 1996à août 1997), puis de l’ensemble desEPAR publiés en 1999 et 2000. Cesétudes ont comparé l’informationdiffusée par l’EMEA et celle dispo-nible dans les dossiers completsqu’avaient pu réunir les membresde l’ISDB. Le constat fut très néga-tif : les EPAR n’étaient ni harmoni-sés, ni fiables, ni correctement actua-lisés (10,11).

Depuis, l’équipe de la revuePrescrire, qui analyse les dossiers detous les nouveaux médicaments,peut témoigner que les choses sesont encore dégradées. L’EMEA nedispose pas de moyens documen-taires indépendants des firmespharmaceutiques (c). Dans beau-

coup de cas, pour ne pas dire plus,l’analyse des EPAR donne à penserque ces documents sont rédigésintégralement ou en grande partiepar les firmes elles-mêmes, oudirectement par simples “copier-coller” à partir des dossiers desfirmes (d). Trop souvent, les EPARsont imprécis, voire incohérents.Et surtout la publication erratiquede leurs mises à jour sur le siteinternet de l’EMEA en fait desdocuments de valeur aléatoire (5).

Les EPAR n’existent que pourune minorité des AMM, les “AMMcentralisées” : les AMM obtenuesvia le système totalement opaqueet de plus en plus florissant dit dela “procédure par reconnaissancemutuelle” ne font l’objet d’aucunEPAR, ni même d’aucune infor-mation centralisée utilisable.Quasiment aucune agence natio-nale ne rend public son travaild’évaluation, même lorsqu’elle agitcomme rapporteur dans le cadrede la procédure par reconnaissan-ce mutuelle (les Pays-Bas ont faitdepuis peu quelques exceptions).

Les résultatsinquiétants d’uneenquête indépendante

Les résultats de 5 ans d’ob-servation et d’analyse du systèmeeuropéen de régulation du médi-cament, publiés par 2 chercheursbritanniques, donnent à réfléchiralors que des propositions deDirective et de Règlement sur lesujet vont être soumises aux par-lementaires européens (e)(12).

John Abraham, professeur desociologie et directeur du Center forResearch in Health and Medicine(Université du Sussex), et GrahamLewis, consultant en régulationinternationale du médicament, ontexaminé, entre 1994 et 1999, lefonctionnement des institutionseuropéennes chargées du médica-ment et le rôle des États membres.

Leur travail, financé surtout parle Conseil britannique pour la

Deuxième partie

En pratique, la politique actuelle du médicament tourne le dos à la santé publique

a- En 2002, la part industrielle du bud-get de l’EMEA est passée à 69,46 % (réf.14). Elle était de 53 % en 1998 (réf. 4).b- Le principe de transparence figure notam-ment au chapitre “Citoyenneté” de la Charte,aux articles 41 “Droit à une bonne adminis-tration” et 40 “Droit d’accès aux documents”(réf. 8). Un Règlement relatif à l’accès auxdocuments, adopté en 2001, est entré envigueur le 3 décembre 2001, et permet uneapplication du principe de transparence(réf. 15).c- Il faut souligner que l’EMEA n’est pas laseule Agence du médicament dans ce cas. Pourne prendre qu’un exemple géographique-ment proche, l’Agence française des produitsde santé ne dispose pas non plus de moyens derecherche documentaire d’envergure quiseraient indépendants des firmes, et qu’ellepourrait utiliser systématiquement pour ana-lyser à la fois les données de la littérature,dont celles en provenance des revues indé-pendantes, et celles des autres agences dumédicament dans le monde.d- Selon les procédures internes de l’EMEA,les EPAR sont communiqués aux firmesconcernées, pour avis, avant publication. Ilserait bon que l’EMEA précise qui écrit lesEPAR, comment, avec quels moyens, et quia le dernier mot pour le “bon à publier”.e- Un ouvrage de 243 pages, étayées par plusde 400 références, rapporte les résultats de cetravail. Il constitue une source majeured’information, particulièrement utile pourqui s’intéresse à la politique du médicamenten Europe (réf. 12).

recherche économique et sociale,s’est appuyé sur des interviews demultiples acteurs dans une cin-quantaine d’institutions et d’orga-nismes administratifs industriels,consuméristes, de différents paysd’Europe (en particulier d’Allema-gne, du Royaume-Uni et de Suède,pays à industries pharmaceutiquesfortes), et sur les nombreux docu-ments publiés et non publiés qu’ilsont rassemblés.

Les 2 auteurs rappellent dansquel contexte économique, socio-logique et politique, s’est construitle système européen du médica-ment. Ils exposent ensuite leursobservations sur son fonctionne-ment, avec de nombreux exem-ples. Ils ont constaté que la ten-dance à produire et à autoriser tou-jours plus de médicaments, et deplus en plus vite, l’emporte sur lesconsidérations de santé publique.

Ils analysent comment lesagences chargées du médicamentse retrouvent en compétition

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Un membre du CPMP prend position (1)

Pour le rattachement administratifde l’EMEA à la DG Santé. « Bien que samission soit de “promouvoir la protection de lasanté humaine et des consommateurs deproduits médicamenteux” (…), l’EMEA dépendd’une administration de la CommissionEuropéenne dédiée à l’industrie (…) dénomméeDirection générale Entreprises.

La préoccupation fondamentale de l’EMEAdevrait être la santé publique, puisque c’estl’objectif final d’une amélioration de ladisponibilité des médicaments. (…) Si lesconsidérations de santé publique étaientprioritaires, l’approbation des nouveauxmédicaments par l’EMEA dépendrait de leurintérêt pour les patients, et ne serait accordéeque pour des indications bien précises, après desrecherches approfondies (…) ».

Pour l’indépendance financière del’EMEA. « L’EMEA a deux sources definancement : une subvention de la Communautéeuropéenne, et les taxes et redevances réclaméespar l’EMEA aux industriels pour l’évaluation desdossiers et divers services (…). L’EMEA entre encompétition forcée avec les agences nationales dumédicament pour ces droits, puisque (sauf pour cequi concerne les produits de la biotechnologie) lesindustriels peuvent avoir recours à ces agences viala procédure décentralisée (NDLR : alias parreconnaissance mutuelle) avec l’espoird’obtenir une approbation plus facilement qu’ens’adressant à l’EMEA. Pour éliminer ce conflit,toutes les demandes d’autorisation de mise sur lemarché européen devraient passer par une seuleagence, l’EMEA.

L’EMEA devrait être autorisée à mener sespropres recherches (ou à passer des contrats derecherche avec de tierces parties) pour confirmer ouinfirmer les données rapportées par les industriels.L’EMEA devrait aussi avoir les moyens de mettreen œuvre des actions de pharmacovigilance,d’étudier l’utilisation des médicaments et de meneractivement des recherches, au lieu de se fieruniquement à des rapports spontanés et à desdonnées de seconde main.

L’Europe devrait reconnaître qu’il estnécessaire pour l’EMEA d’endosser ces nouveauxrôles, et devrait lui procurer les substantielsinvestissements nécessaires. Bien quelle couvre unepopulation deux fois plus importante que sacousine d’Outre-Atlantique, l’EMEA demeurebeaucoup moins développée que la Food andDrug Administration des États-Unis d’Amérique.Si les subventions de l’Union européenne étaient àun niveau normal, les droits acquittés à l’EMEApar les industriels ne représenteraient qu’unefaible proportion de ses revenus ce qui permettraità l’Agence d’être libre et indépendante ».

Pour une expertise indépendante, etnon juge et partie. « Il n’est pas normal quela même organisation, et plus encore les mêmesindividus (à savoir les membres du CPMP),conseillent les industriels sur les meilleurs moyensde développer un médicament, décident de la misesur le marché de ce médicament, et en cas d’appel,

en décident à nouveau une seconde fois. Le conseilscientifique ne devrait pas être une activitésystématique, et devrait être donné à l’initiativedu CPMP plutôt qu’à la demande des firmesindustrielles (…). Si le CPMP donne un avisnégatif à propos d’un médicament, il ne devraitpas changer d’opinion sur le même dossier aubout de quatre mois à peine. Les appels nedevraient être possibles que pour des raisonssérieuses, comme un mauvais usage volontaire dedonnées contenues dans le dossier. L’appel devraitêtre jugé par un groupe indépendant d’experts nesiégeant pas au CPMP.

L’évaluation des dossiers pourrait aussi êtreaméliorée. Un des deux rapporteurs du CPMP esthabituellement proposé par la firmepharmaceutique (…). Il est difficile de justifiercette pratique. Il y a peu de chances que les firmespharmaceutiques choisissent un rapporteur parmiles membres du CPMP considérés comme ayantl’esprit critique. En outre, le dossier doitobligatoirement comporter un rapport effectué parun expert indépendant (…). En pratique, cesexperts “neutres” tendent à mettre en exergue lesvertus du nouveau médicament et non pas àdonner une vision équilibrée de ses avantages etde ses inconvénients. Il serait moins hypocrite dedemander à la firme pharmaceutique de préparerun résumé du dossier (…).

Les industriels peuvent arrêter la procédureplusieurs fois, et modifier le calendrier s’ils enestiment le besoin, tandis que le CPMP doit suivreune procédure rigide (…). Le CPMP devraitbénéficier de la même souplesse que les industrielsdans la gestion de l’agenda du processusd’évaluation ».

Trop d’évaluations non compara-tives. « La législation de l’Union européenneaffirme à de nombreuses reprises que lesmédicaments doivent être évalués pour leurqualité, leur efficacité (a) et leur sécurité.Cependant, cette exigence a été interprétée et miseen œuvre comme si chaque médicament devait êtremis à disposition dans un désert thérapeutique…

Le but apparent des industriels semble être deproduire un catalogue européen de médicamentsau sein duquel les médecins, ou même parfois lespatients, pourraient choisir lesquels utiliser, et lesservices de santé nationaux lesquels rembourser.Mais s’il n’existe aucun moyen de faire descomparaisons solides entre les produits, commentles médecins et les patients pourraient-ils faire deschoix informés ?

Ce point est abordé dans plusieursrecommandations, dont le document E10 de laConférence internationale pour l’harmonisationde l’année 2000 (…), qui souligne que dans lesessais, les médicaments devraient être évalués parcomparaison avec les traitements concurrents etnon avec des placebos. Ces recommandations ontprovoqué une forte réaction de l’EFPIA(Fédération européenne des industriespharmaceutiques), qui a affirmé que pour desraisons légales, scientifiques et de santé publique,“la qualité, la sécurité et l’efficacité (a) doivent

rester les seuls critères d’évaluation des demandesd’autorisation de mise sur le marché (…).

En dehors des maladies rares, il existe peu dedomaines thérapeutiques et peu d’indicationsdans lesquelles on ne dispose d’aucun traitement.C’est seulement dans ces cas que les nouveauxmédicaments devraient être comparés à unplacebo et non à un traitement actif (…) »

Coût occulté. « En dépit d’appels répétéspour la prise en compte des aspects économiques etpour maîtriser le coût des soins, le CPMP continuede travailler dans un monde idéal dans lequell’approbation des médicaments n’est limitée paraucune contrainte financière (…) ».

RCP non comparatifs. « Dans cesrésumés des caractéristiques, les médicamentssont décrits comme s’iIs étaient les seuls sur lemarché. Il faudrait les comparer aux autresmédicaments de mécanisme d’action similairecommercialisés dans les mêmes indications (…).Les résumés des caractéristiques des produitsdevraient être distribués aux médecins par lesautorités nationales (…) ».

Manque de transparence. « L’infor-mation sur les retraits des demandes d’autori-sation de mise sur le marché est confidentielle, etaucune donnée n’est rendue publique. Lapublication de telles données serait utile à la santépublique. Par conséquent, il faudrait, soitinterdire tout retrait de demande après le stade desévaluations préliminaires, soit rendre publiquesles caractéristiques essentielles de tous lesmédicaments dont la demande d’autorisation aété retirée (…).

Lorsqu’un médicament n’est ni approuvé nirejeté à l’unanimité, l’opinion de la minoritédisparaît lors de l’élaboration du rapportd’évaluation européen rendu public sur cemédicament (EPAR). La reproduction de toutes lesopinions sur tous les documents, y compris lesrésumés des caractéristiques des produits et lesEPAR, permettrait à chacun de se faire uneopinion. Il est évidemment indispensable de voterpour parvenir à des décisions réglementaires, maiscela ne signifie pas que la majorité ait toujoursraison ».

Reconnaissance mutuelle trop per-missive. « Le système décentralisé semble servirplus la libre circulation des produitspharmaceutiques dans l’Union Européenne queles intérêts des patients (…) ».

Réévaluation nécessaire des AMM.« Les intérêts de la santé publique seraient mieuxservis par une mise à jour régulière du profilbénéfices/risques des médicaments (…) »

Traduction © LRP

a- Note du traducteur : le mot anglais employé iciest “efficacy”, qui signifie “efficacité dans les essaiscliniques” ; par opposition à “effectiveness”, quisignifie “efficacité en pratique clinique quo-tidienne”.

1- Garattini S et Bertele V “Adjusting Europe’s drugregulation to public health needs” Lancet 2001 ; 358 :64-67 (traduit par nos soins ; extraits).

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dans un contexted’harmonisation encore incompletet observent qu’elles sont toutesmajoritairement financées parl’industrie pharmaceutique, àl’exception d’une agence, celle del’Allemagne qui, à l’époque del’enquête, n’était financée qu’à hau-teur de 40 % par des fonds indus-triels. Comme l’EMEA, les agencesnationales vivent surtout des taxeset redevances payées par les firmesqui demandent des AMM.

Les deux chercheurs rappellent,aussi, les risques liés au manqued’indépendance de nombreuxexperts scientifiques impliqués dansle système d’évaluation du médi-cament. Ils montrent, enfin et sur-tout, le manque total de transpa-rence du monde de la régulation, etl’oubli de rendre compte des motifsdes décisions.

L’impact de ces tendances surles pays européens à industriepharmaceutique plus faible que cel-le des pays où s’est dérouléel’enquête est seulement évoqué.Un prolongement de l’enquêteserait le bienvenu au moment del’élargissement de l’Union euro-péenne.

Des experts font un constat sévère etproposent d’adapter la réglementation à la santé publique

Silvio Garattini, un des anima-teurs de l’Institut italien MarioNegri, un centre de recherche enpharmacologie clinique mondia-lement reconnu pour ses compé-tences, notamment dans le domai-ne cardiovasculaire, est membre

du CPMP européen. Avec VittorioBertele, un autre spécialiste del’lnstitut Mario Negri œuvrantcomme expert auprès du CPMP,il a publié dans le Lancet, en juillet2001, une analyse détaillée des fai-blesses du système européen dumédicament, et a proposé unesérie de mesures de redressement(13). Nous avons traduit dansl’encadré page 465 de larges ex-traits de leur analyse.

S’il ne fallait retenir qu’un mes-sage de ces deux experts, ce devraitêtre leur conclusion :

« En conclusion, la centralisationau moins partielle des autorisations demise sur le marché au sein de l’EMEAest une bonne chose, et devrait être pro-gressivement accentuée pour aboutir àunifier l’approbation, le suivi et les poli-tiques concernant les produits médica-menteux, y compris la pharmacovigi-lance et la surveillance de l’utilisationdes produits.

La situation administrative del’EMEA devrait être modifiée afinqu’elle dépende de la Direction géné-rale de la Santé et de la Protection desconsommateurs, et non de la Directiongénérale Entreprises qui s’occupe del’industrie. L’approbation des nou-veaux médicaments doit comprendreune évaluation comparative. Le méca-nisme d’autorisation des nouveauxmédicaments devrait être plus critique.

Pour défendre les intérêts du public,les firmes pharmaceutiques nedevraient pas être autorisées à com-mercialiser des médicaments dans leseul but d’obtenir une part de mar-ché. Le pouvoir croissant de l’industriepharmaceutique impose un contre-pouvoir équivalent, afin que les médi-caments continuent d’avoir une uti-lité pour les patients et ne soient passeulement une source de profits com-merciaux ».

Conclusion : il faut viteredresser le cap

Depuis la création de l’EMEA etla mise en œuvre effective de lapolitique européenne du médica-ment, 7 ans ont passé. Il est tempsde tirer le bilan.

Celui que nous tirons n’est paspositif. L’EMEA, conditionnée parson rattachement à la Directiongénérale “Entreprises” de la Com-mission européenne, n’est pas auservice de la Santé publique. Elle secomporte essentiellement commeun prestataire administratif au ser-vice des firmes pharmaceutiques.

Les institutions européennes ontentrepris de réviser la Directive etle Règlement européens sur lemédicament. Les orientations don-nées à plusieurs reprises par leConseil de l’Union européenne vontdans le bon sens : inscrire la poli-tique du médicament dans un sys-tème de protection sociale au ser-vice des patients, favoriser un usagerationnel du médicament et la miseau point de nouvelles thérapeu-tiques constituant de réels progrèspour les patients.

Mais nous verrons dans le prochain numéro que les proposi-tions de révision élaborées et promues par la Direction généra-le “Entreprises” de la Commissioneuropéenne aggravent les caracté-ristiques “pro-industrielles” à courtterme de la politique actuelle. Elless’écartent des orientations duConseil, et exposent à des risquesimportants, à la fois les patients et,à terme, l’industrie européenne,en favorisant la commercialisationde médicaments qui n’apportentpas de réels progrès thérapeutiques.

©LRP

Extraits de la recherche documentairePrescrire.1- Prescrire Rédaction “Nouveaux médi-caments à AMM européenne : cotationPrescrire en 1999” Rev Prescr 2000 ; 20(202) : 60.2- Prescrire Rédaction “AMM européen-ne ne veut pas dire médicament “inno-vant”” Rev Prescr 2001 ; 21 (213) : 62.3- Prescrire Rédaction “Nouveaux médi-caments à AMM centralisée présentés en2001 dans la revue Prescrire” Rev Prescr2002 ; 22 (224) : 57.4- Prescrire Rédaction “Le financement desagences du médicament” Rev Prescr 1999 ;19 (201) : 867-868.5- Prescrire Rédaction “Site internet :EMEA” Rev Prescr 2002 ; 22 (228) : 386-388.6- Prescrire Rédaction “Quelle Europe dumédicament ?” Rev Prescr 2001 ; 21 (223) :801.7- Prescrire Rédaction “Prix des médica-ments remboursables : quelle logique ?Deuxième partie - Prix proportionnels àl’innovation : principe raisonnable, maigresrésultats” Rev Prescr 2001 ; 21 (223) : 859-863.8- “Charte des droits fondamentaux del’Union européenne” (2000/C 364/01)18 décembre 2000 : 22 pages.9- Bardelay D “ISDB Euro-group relationswith EMEA” ISDB Newsletter 1999 : 13 (1) :4-5.10- International Society for Drug Bulletins“ISDB assessment of nine European PublicAssessment Reports published by theEuropean Medicines Evaluation Agency(EMEA)” 26 June 1988 : 12 pages.11- ISDB European Group “EuropeanMedicines Evaluation Agency” ISDBNewsletter 2001 : 15 (1) : 11-13.12- Abraham J et Lewis G “Regulatingmedicines in Europe - Competition, exper-tise and public health” Routledge, London& New York 2000 : 243 pages.13- Garattini S et Bertele V “AdjustingEurope’s drug regulation to public healthneeds” Lancet 2001 ; 358 : 64-67.14- EMEA “Work programme 2002 -Annex 2 - EMEA budget summaries 2000-2002” 18 December 2001 : 44.15- “Règlement (CE) n°1049/2001 duParlement européen et du Conseil du30 mai 2001 relatif à l’accès du public auxdocuments du Parlement européen, duConseil et de la Commission” [NDLR :s’applique aussi selon son considérant 8, àtoutes les agences créées par ces institu-tions] Journal Officiel des Communautés euro-péennes du 31 mai 2001 : L145/43 -L145/48.

Suite de la page 8 �

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Troisième partie

La politique du médicament au service de l’industrie

L es textes qui constituentl’architecture du droit euro-péen du médicament ont

fait l’objet de multiples modifica-tions au fil des quatre dernièresdécennies. Il en va ainsi pour laDirective 65/65/EEC de 1965, quia posé les bases de la définitiondu médicament et le principe del’autorisation de mise sur le mar-ché (AMM), obligatoire pourtoutes les spécialités pharmaceu-tiques (c’est-à-dire les médica-ments préparés industriellement).De même, pour les Directives75/318/EEC et 75/319/EEC quiont défini le socle de l’évaluationanalytique, pharmacotoxicolo-gique et clinique des médica-ments, en vue de leur AMM.

Les versions des textesaujourd’hui en vigueur sont laDirective 2001/83/EC du 26 no-vembre 2001 et le Règlement2309/93 du 22 juillet 1993.

Les orientations duConseil de l’Unioneuropéenne en faveurde la santé publiquen’ont pas été suivies

La mise en place de l’Agenceeuropéenne du médicament(EMEA), en 1995, et le rodage deson fonctionnement en matièred’AMM et de pharmacovigilanceont constitué une étape impor-tante dans l’application pratiquedes textes européens. Sept ansplus tard, il est temps pour les ins-tances européennes de tirer lebilan de cette expérience etd’adapter, si nécessaire, la régle-mentation en vigueur. Les orien-tations données par le Conseil del’Union européenne pour cetteadaptation ont été dégagéesnotamment à la Conférence euro-péenne de Lisbonne sur les médi-caments et la santé publique, enavril 2000 (1).

Tenant compte des tendancesdu développement du marchépharmaceutique, le Conseil a alors

souligné la nécessité d’identifierles médicaments apportant uneréelle valeur thérapeutique ajou-tée, d’évaluer le coût des médi-caments pour en assurer l’usagerationnel et de développer uneinformation sur les médicamentsqui soit indépendante de l’indus-trie pharmaceutique.

Il a précisé que l’identificationdes médicaments constituant deréels progrès thérapeutiques était« vitale non seulement dans une pers-pective de protection du consomma-teur, mais aussi d’un point de vueindustriel »(1).

Lors d’une Conférence euro-péenne ultérieure sur la santé enEurope, qui a eu lieu à Gand endécembre 2001, à la fin de la pré-sidence belge de l’Union euro-péenne, ces objectifs ont été rap-pelés, et un bilan critique desinstitutions chargées du médica-ment a été dressé, appelant àmieux prendre en compte lesintérêts de la santé publique (2).

La Commission européen-ne confie la tâche à sa Direc-tion générale “Entreprises”.La Commission européenne, enl’occurrence sa Direction Générale“Entreprises” dont relève de façoncaractéristique l’EMEA, a élabo-ré un projet de réforme de laréglementation du médicament.La Commission est là dans sonrôle, puisqu’elle a le monopole del’initiative des évolutions régle-mentaires (lire la première partiede ce dossier dans le n°229, pages461-463). C’est donc elle qui està l’origine de deux propositionsde textes sur les médicaments àusage humain et vétérinaire (uneDirective et un Règlement) quisont discutées depuis 2001, envue de leur adoption par leParlement européen et le Conseilde l’Union européenne (3,4).

Ces propositions de textes sontaccompagnées de deux docu-ments dont l’analyse est particu-lièrement instructive : d’une part,un Mémorandum explicitant lesmotivations des textes (5), et

d’autre part un document traitantde l’évaluation de l’impact pro-bable des textes sur les industriesdu médicament (6).

La Direction générale“Entreprises” a choisi soncamp. La lecture du Mémo-randum ne donne pas l’impres-sion que la Direction générale“Entreprises” ait tenu compte desnombreuses critiques formuléesdans les institutions et à l’extérieur.Il semble aussi qu’elle ait peu tenucompte de certaines orientationsessentielles du Conseil de l’Unioneuropéenne. Cette impression estconfirmée par la lecture du docu-ment sur l’impact industriel, puispar la lecture du contenu des pro-positions de Directive et deRèglement (3à6).

Ainsi, en matière de bilan descinq années écoulées depuis lacréation de l’EMEA, la Directiongénérale “Entreprises” sembles’être reposée essentiellement sur un audit de l’Agence réalisé en 2000, à la demande de laCommission, par le cabinetCameron Mc Kenna and AndersenConsulting. Le Mémorandum fait par ailleurs référence à des« commentaires des diverses partiesconcernées (autorités des Étatsmembres, firmes pharmaceutiques,associations de l’industrie pharma-ceutique, associations professionnellesde médecins et pharmaciens, et asso-ciations de patients et de consomma-teurs) » (5). Mais il ne renvoie àaucun document précis qui auraitpu être élaboré par ces parties. Iln’évoque aucun des documentscritiques relatifs aux insuffisancesde l’EMEA dont nous avons renducompte dans la deuxième partiede notre dossier (n° 229, pages464-466).

Sur un plan général, leMémorandum souligne surtoutla volonté de la Direction géné-rale “Entreprises” de prendre encompte les évolutions industriellesdu moment, telles que « la mon-dialisation ». La Direction généra-le “Entreprises” en déduit que la

réglementation actuelle estinadaptée, et qu’elle risque d’iso-ler l’Europe et de défavoriser sesindustries pharmaceutiques (5).

Les objectifs affichés ne sont pas tousréellement visés

Les objectifs principaux annon-cés dans le Mémorandum parais-sent d’emblée difficiles à conci-lier :« –Assurer un haut niveau de pro-tection sanitaire à la population euro-péenne et une surveillance accrue dumarché.– Parfaire le marché intérieur phar-maceutique en prenant en compte lesimplications de la mondialisation, eten établissant un cadre législatif etréglementaire qui favorise la compé-titivité de l’industrie pharmaceutiqueeuropéenne.– Faire face aux défis de l’élargisse-ment futur de l’Union Européenne.– Rationaliser et simplifier autant quepossible le système pour améliorer sacohérence, sa visibilité et la transpa-rence de ses procédures et de ses pro-cessus décisionnels » (5).

Le Mémorandum reprendensuite chacun des points sur les-quels la Direction générale“Entreprises” propose de modi-fier les textes. Il est intéressant demettre en parallèle pour chacunde ces points : premièrement cequi en est dit dans leMémorandum (5) ; deuxième-ment ce qui en est dit dans ledocument intitulé “Évaluation del’impact sur les industries dumédicament” (6) ; et troisième-ment les propositions de Directiveet de Règlement qui seront sou-mises au vote des parlementaireset à l’approbation du Conseil (desministres) de l’Union européenne.

Autorisations de mise sur le marché plus faciles. LeMémorandum souligne qu’ilconviendra de maintenir la qua-lité des débats scientifiques � �

LA REVUE PRESCRIRE JUILLET/AOUT 2002/TOME 22 N° 230 • PAGES 541-543

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Les dangers de la procédure d'AMM par reconnaissance mutuelle

Les autorisations de mise sur le marché(AMM) par “reconnaissance mutuelle” (alias : parla “procédure décentralisée”) sont accordées parles agences nationales du médicament des Étatsmembres de l’Union européenne sur la base dela reconnaissance d’une AMM initiale accordéepar un des États membres. Cet État membre estdit “pays rapporteur” (alias “Reference MemberState”), car il établit le rapport d’évaluation qui estensuite soumis à reconnaissance par les autrespays. L’Agence européenne du médicament(EMEA) est tenue informée par la firme, mais laCommission d’AMM européenne (CPMP) n’estconsultée que pour arbitrage, en cas d’opposi-tion d’un ou plusieurs États à l’octroi de l’AMM.

Une procédure “transitoire” qui dure.Cette formule a pu être comprise initialementcomme une voie transitoire, en attendant la mon-tée en régime des capacités de la procédure cen-tralisée (lire la description de cette procéduredans le numéro 229, page 461). Mais depuisquelques années, la procédure par reconnais-sance mutuelle s’est développée, et peu à peuelle s’est trouvée “institutionnalisée”, sous l’impul-sion de quelques agences nationales du médica-ment et des firmes pharmaceutiques. Et un desobjectifs longuement développé dans les projetsde Directive et de Règlement de la Directiongénérale “Entreprises” de la Commission euro-péenne est de renforcer les droits des industrielsde passer par cette voie, et de leur faciliter aumaximum la tâche.

Voici les critiques fondamentales régulière-ment formulées à l’encontre de la procédure parreconnaissance mutuelle, système porteur derisques pour la santé publique et les malades (1,2).

Un système particulièrement opaque. Laresponsabilité de l’octroi des AMM par “recon-naissance mutuelle” étant diluée, et aucune règle

de transparence n’étant imposée, les données surlesquelles s’appuient les agences nationales, pouroctroyer ou non les AMM, ne sont pas renduespubliques, à de minuscules exceptions près (a)).

Certes, cette opacité n’est pas propre auxAMM par “reconnaissance mutuelle”, la quasi-totalité des AMM nationales sont dans ce cas enEurope, mais elle en est la caricature.

Un véritable “marché” de l’octroid’AMM. Le budget de la plupart des agencesnationales du médicament dépend en majorité,voire en totalité, des redevances versées par lesfirmes pharmaceutiques lors du dépôt de leursdiverses demandes d’AMM (b) (3). Il est donccrucial, pour l’équilibre financier de ces agences,qu’elles soient “bien vues” par leurs “clients”,c’est-à-dire par les firmes, et surtout qu’elles neles incitent pas à choisir la voie européenne cen-tralisée d’obtention des AMM, véritable “concur-rent” commun.

De fait, les firmes pharmaceutiques mettenten concurrence les agences.

Un nivellement vers le bas des exi-gences. Dans ce contexte, les firmes ont inté-rêt à choisir en priorité les agences qui ont leniveau d’exigence le plus bas et/ou qui sont les plus rapides à examiner les dossiers, ces critères, pas toujours, mais souvent liés.

En termes édulcorés, les agences sont misesen concurrence sur la base de critères de “flexi-bilité”, comme disent les spécialistes (4). Et chacune est liée aux autres dans le cadre de lareconnaissance mutuelle : si une agence expri-me trop souvent des désaccords, les autresagences pourraient se montrer à leur tour souvent en désaccord avec elle, quand elle est“pays rapporteur”, lui faisant perdre son attraitpour sa “clientèle” potentielle.

Disparité des décisions et dispersion descapacités d’expertise. Dans le cadre de la pro-cédure décentralisée, les critères de décision nesont pas homogènes, et les capacités d’exper-tises scientifiques varient d’une agence nationa-le à une autre, de même que l’indépendance et lesens critique de ces expertises. Il s’en suit despossibilités variées d’octroi des AMM selon le“pays rapporteur”, dont se jouent les firmes.

Au total, dès lors que la commercialisationd’un médicament est envisagée dans plus d’unpays de l’Union européenne, la santé publiquebénéficierait de la disparition de la procédurepar reconnaissance mutuelle, après un délaid’adaptation aussi court que possible, au profitd’une procédure européenne centralisée, ren-forcée, efficace et transparente.

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a- Pour le moment, seuls les Pays-Bas ont fait un débutd’effort de transparence dans ce domaine. Des repré-sentants de l’Agence de Suède ont évoqué le projet depublication de rapports d’évaluation, mais sans pourl’instant le faire aboutir. L’obligation de rendre publicsde tels rapports figure dans la loi française (art. L.5311-1 du Code de la Santé publique), mais elle n’est pasmise en application à ce jour.b- Dans une enquête réalisée en 1999, seule l’Agence dumédicament d’Allemagne n’était pas financée majori-tairement par l’industrie pharmaceutique. Elle l’étaitnéanmoins à hauteur de 40 % de son budget (réf. 2).

1- Garattini S et Bertele V “Adjusting Europe’sdrug regulation to public health needs” Lancet2001 ; 358 : 64-67.2- Abraham J et Lewis G “Regulating Medicinesin Europe – Competition, expertise and publichealth” Routledge London – New York, 2000 :243 pages.3- Prescrire Rédaction “Le financement desagences du médicament” Rev Prescr 1999 ; 19(201) : 867-868.4- Bouzy C et Abadie E “L’Europe du médica-ment” Rev Prat 2002 ; 52 : 510-514.

(au cours de l’évaluation desdossiers d’AMM) dans uneEurope élargie à 20, puis 25 ou28 pays membres (5). Il évoquebrièvement l’importance donnéepar le Conseil de l’Union euro-péenne à l’identification de médi-caments qui ont une valeur thé-rapeutique ajoutée significativepar rapport aux médicaments déjàexistants, mais pour affirmerqu’une évolution réglementairedans ce sens n’est pas possible.

Le document sur l’évaluationde l’impact industriel assure quantà lui que les firmes obtiendrontdes autorisations dans des délais

plus courts, que la suppression dela réévaluation quinquennale leurfera faire des économies, et quela procédure par reconnaissancemutuelle dont elles apprécient laflexibilité sera maintenue (6).

Les propositions de Directive etde Règlement comportent ainsi :– le maintien d’une évaluation noncomparative de la balance béné-fices/risques des nouveaux médi-caments par rapport aux médica-ments de référence déjà existants(ce qui a pour conséquence de nepas permettre d’identifier les médi-caments à réelle valeur thérapeu-tique ajoutée) ;

– un raccourcissement du délaid’examen des demandes d’AMM,pour les procédures nationales etpar reconnaissance mutuelle, de210 à 150 jours (ce qui ne va pasdans le sens d’une améliorationde la qualité de l’évaluation scien-tifique (a)) ;– une possibilité d’octroi encore plusrapide pour les médicaments dits“innovants” (sans définition de ceterme, et alors qu’un tel octroidevrait être réservé aux situationsexceptionnelles : patients sans alter-native thérapeutique, et présomp-tion de l’apport thérapeutiqued’une nouvelle substance) ;

– une suppression de la rééva-luation quinquennale des AMM,et l’adoption du principe del’AMM « indéfinie » (accordéeune fois pour toutes), quelle quesoit la procédure d’octroi utili-sée ;– la facilitation de la procéduredes AMM par reconnaissancemutuelle, en faisant gérer l’essen-tiel des points de désaccord, non plus par la Commission européenne d’AMM de l’EMEA (le CPMP), mais par un groupeautonome, restreint, dit de “facilitation”, représentant lespays (3,4).

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Pharmacovigilance confi-dentielle et à moindre frais.Le Mémorandum parle du main-tien d’un haut niveau de sécuri-té des médicaments, et d’unemeilleure gestion des crises depharmacovigilance (5). Mais ledocument sur l’évaluation del’impact industriel précise, lui, queles mesures de renforcement dela pharmacovigilance proposéesne devraient pas coûter auxfirmes, puisque ces mesures cor-respondent au système déjà enplace dans les firmes (6). On voitdonc mal où est l’incitation à unrenforcement.

Les propositions de Directive etde Règlement sont en fait mini-malistes : essentiellement la four-niture par les firmes de rapports depharmacovigilance sur leurs spé-cialités tous les 3 ans au lieu de tousles 5 ans aujourd’hui (b) (3,4). Ànoter que la constitution d’unebase de données européenne depharmacovigilance, souvent évo-quée aujourd’hui comme un grandprogrès par la Direction générale“Entreprises” ou par les organisa-tions émanant de l’industrie phar-maceutique, faisait déjà partie destâches de l’EMEA depuis 1995 : cen’est donc pas une nouveauté. Desurcroît, il n’est toujours pas pré-vu que cette base soit rendue acces-sible aux professionnels de santéou aux patients.

Médicaments génériquesentravés. Le Mémorandum par-le de « rendre plus facile la mise surle marché des génériques » (5). Maisle document sur l’impact indus-triel précise : « l’harmonisation dela période de protection des données(…) empêchera plus longtemps unfabricant de générique de demanderune AMM allégée » (6).

Les propositions de Directive etde Règlement comportent de faitun allongement de la durée deprotection des données, et doncune entrave à la mise sur le mar-ché de certains génériques (3).

Publicité grand public facili-tée. Le Mémorandum est d’embléetrès clair : « il devrait y avoir de lapublicité directe auprès du public pourtrois classes de médicaments (…) » (àtitre expérimental) (5).

Sur ce point, sujet à grossepolémique ces derniers mois, laproposition de Directive est moins

nette que le Mémorandum : elleutilise le terme d’“information”et non de “publicité”. Mais dans lamesure où cela s’insère dans lechapitre de la Directive consacréeà la publicité générée par lesfirmes pharmaceutiques, il estclair qu’il ne s’agit pas d’infor-mation indépendante (3).

Transparence des procé-dures et des décisions : pro-messes évasives. La transpa-rence des procédures et desdécisions est annoncée dans leMémorandum (5), mais n’estjamais évoquée dans le documentsur l’impact industriel (6).

Elle apparaît dans la propositionde Règlement : publication de rap-ports d’évaluation expurgés sur lesmédicaments autorisés via la pro-cédure centralisée (mais cela exis-te déjà, et ces rapports, alias EPAR,sont de qualité très variable (lire len° 229, page 464)) ; assurance de« la garantie d’un niveau appropriéde transparence » par l’adoption derègles rendant accessibles au public« les informations qui ne sont pas denature confidentielle (4) ». Des termesbien vagues pour un texte régle-mentaire.

Un angle de vue industrielet non de santé publique

En résumé, si le Mémorandum,qui précède les propositions deDirective et de Règlement, affichequelques préoccupations de san-té publique (5), les propositionselles-mêmes visent essentielle-ment à renforcer la compétitivi-té à court terme des firmes phar-maceutiques (3,4). Le documentannexe sur l’évaluation del’impact des propositions sur lesaffaires industrielles confirme cet-te orientation : il rassure claire-ment les firmes sur la portée destextes proposés (6).

De même, les conclusions dugroupe intitulé “G10”, groupeinformel à forte représentationindustrielle, constitué par laCommission européenne pourexaminer les propositions, confir-ment qu’elles sont bienvenues dupoint de vue des firmes (c) (7).

Il est de ce fait logique que desprofessionnels de santé, despatients, des consommateurs et

des responsables d’organismes decouverture sociale aient perçu lesrisques de ces propositions pourla santé publique. Ils ont élaboréen commun, dans de nombreuxpays d’Europe, des contre-propo-sitions visant notamment à main-tenir l’esprit initial de la régle-mentation européenne : uneévaluation rigoureuse du médi-cament, une pharmacovigilanceactive, l’encadrement de la pres-sion promotionnelle des firmes,dans le cadre d’une politiquetransparente du médicamentrésolument tournée vers la santépublique (lire ci-après page 14).

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a- 210 jours peuvent sembler longs. Maisquand on comptabilise toutes les étapes,il ne reste pas énormément pour l’étudeapprofondie du dossier. Ainsi, dans lecas de l’AMM européenne centralisée, lesrapporteurs ont au mieux 70 jours pourrendre leur rapport.b- Actuellement, les PSUR (en anglais per-iodic safety update report, en français rap-port périodique sur les effets indésirables) doi-vent être fournis aux autorités compétentes(nationales ou européenne selon le cas) par lafirme titulaire de l’AMM, tous les six moispendant les 2 premières années suivantl’octroi de l’AMM, puis une fois par an pen-dant 3 ans, puis tous les 5 ans. Ces rapportssont censés comporter des données sur lesvolumes des ventes, les nombres de prescrip-tions et de patients supposés exposés au médi-cament, ainsi que les événements indésirablesconnus par la firme, sous forme détaillée puisrésumée. Les rapports doivent en principe êtreaccompagnés des résultats des essais mis enœuvre pour compléter l’évaluation de la sécu-rité du médicament. En pratique, il n’est paspossible de savoir ce que contiennent lesPSUR, car ils ne sont pas accessibles publi-quement, ni au plan national, ni au planeuropéen.c- Le groupe “G10” est constitué de13 membres : 2 membres de la Commissioneuropéenne (Direction générale “Entreprises”et Direction générale “Santé et protection desconsommateurs”), 5 ministres, 3 représen-tants d’organisations d’industriels, le prési-dent de GlaxoSmithKline Europe (le premiergroupe pharmaceutique européen), 1 repré-sentant de la mutualité et 1 représentant despatients (réf. 7,8).

Extraits de la recherche documentairePrescrire.1- 2281st Council meeting – Health“Follow up to the Lisbon-Confe-rence on medicinal products andpublic health – Conclusions”Luxembourg 29 June 2000 : 8-9.2- Mossialos E et coll. “The influen-ce of EU law on the social character of health care systems in the European Union – Report submit-ted to the Belgian Presidency of the European Union – Final version” Brussels 19 November2001 : 60-80.3- “Proposal for a Directive of theEuropean Parliament and of theCouncil amending Directive

2001/83/EC onthe Communitycode relating to medicinal productsfor human use (Text with EEArelevance)” 2001/0253 (COD) : 87-119 (disponible en français, 35 pages).4- “Proposal for a Regulation of theEuropean Parliament and of theCouncil laying down Communityprocedures for the authorizationand supervision of medicinal pro-ducts for human and veterinaryuse and establishing a EuropeanAgency for the Evaluation of Medi-cinal Products (Text with EEA rele-vance)” 2001/0252 (COD) : 14-57(disponible en français, 45 pages).5- “Explanatory memorandum”Précédant les textes 2001/0253(COD) et 2001/0252 (COD) : 77-86.6- “Impact assessment form.Impact of the proposal on busi-nesses, particularly on small andmedium-sized enterprises (SMEs)”68-75 (partie Directive) et 126-133(partie Règlement).7- Albanese V “Compétitivitéindustrielle en Europe. Le G10émet 14 recommandations” Phar-maceutiques 2002 ; 96) : 36-39.8- European Commission, “Highlevel group on innovation and pro-vision of medecines. Recommen-dations for action” G10 Medecines- Report - 07 May 2002 : 30 pages.

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Depuis que la Directiongénérale “Entreprises” dela Commission européen-

ne a rendu officielles ses propo-sitions de modification de Direc-tive et de Règlement sur lemédicament (lire pages 11-13),et après le temps nécessaire àl’étude approfondie de ces textes complexes, diverses associationset organisations groupées en collectifs et des personnalités sesont manifestées de toutes partsauprès des institutions concernéeset ont entrepris un “contre-lob-bying” pour faire valoir d’autrespoints de vue. En voici quelquesexemples.

Les revues indépendantes

L’international Society of DrugBulletins (ISDB (a)), dont la revuePrescrire assure actuellement laprésidence, est intervenue dansde nombreuses instances europé-ennes (b).

L’ISDB a en particulier misl’accent sur le rôle spécifique desdifférents acteurs du système desanté en matière d’information surle médicament : il faut soutenir ledéveloppement des sourcesd’information indépendantes dansle domaine thérapeutique ; onconnaît les abus répétés et majeursde la publicité pharmaceutique surles professionnels de santé ; cesabus disqualifient par avance lesindustriels du médicament pource qui concerne l’information dupublic ; l’interdiction de toutepublicité pharmaceutique directeauprès du public sur les médica-ments de prescription doit êtremaintenue sur tout le territoireeuropéen ; les industriels du médi-cament ont déjà assez à faire pouraméliorer ce qui relève de leurpropre responsabilité d’industriels,en particulier les notices et lesconditionnements des médica-ments (1).

L’ISDB a en outre dénoncé les

conséquences néfastes d’une accé-lération des procédures d’autori-sation de mise sur le marché (parle raccourcissement des délaisd’instruction, ou par l’utilisationfréquente de procédures accélé-rées même quand elles ne sont pasjustifiées), du développement (aulieu de l’extinction) du circuitparallèle, complexe et opaque, ditde “reconnaissance mutuelle”, etdu non-réexamen des dossiersd’AMM après commercialisation,tous les 5 ans, comme initialementprévu, même si mal appliqué (2).

Des membres du CPMP

Dans une lettre ouverte datéedu 25 février 2002, 9 expertsmembres de la Commission d’auto-risation de mise sur le marchéeuropéenne (CPMP) de l’Agenceeuropéenne du médicament(EMEA), appartenant à 7 pays(Espagne, Finlande, Islande, ltalie,Norvège, Pays-Bas, Portugal), sesont adressés aux parlementairesqui auront à voter fin 2002 lesmodifications de la Directive euro-péenne sur le médicament (3).

Dans cette lettre qui passe enrevue tous les problèmes dumoment, les signataires constatentet déplorent que le fonctionne-ment actuel de l’EMEA favoriseles intérêts des firmes pharma-ceutiques plutôt que l’intérêt de lasanté publique. Ils dénoncent enparticulier :– le rattachement de l’EMEA à laDirection générale “Entreprises”de la Commission européenne, etson non rattachement à la Direc-tion “Santé et Protection desConsommateurs” ;– le financement de l’EMEA, assu-ré aujourd’hui à hauteur de 70 %par l’industrie pharmaceutique ; – l’opacité de l’EMEA pour ce quiconcerne ses buts, les donnéesqu’elle utilise, voire certaines de ses décisions, alors que la Charte des Droits Fondamentaux

dans l’Union Européenne et leRèglement européen n° 1049/2001sur l’accès aux documents pré-voient plus de transparence ;– le fait que les autorisations demise sur le marché soient accor-dées à beaucoup de médicamentssimplement équivalents ou seu-lement non-inférieurs à ceux quiexistent déjà, sans que cela soitexplicité publiquement ;– les délais courts qui sont impo-sés aux experts pour rendre leuravis sur des dossiers d’évaluationfournis par les firmes ; dossiersqui ne permettent guère deconclure rapidement, en particu-lier du fait du manque de don-nées comparatives.

Des réseaux associatifs

De son côté, le réseau interna-tional non gouvernemental HealthAction International (HAI (c)) etl’European Public Health Alliance,un groupement d’associations nongouvernementales européennes(EPHA (d)) ont organisé un sym-posium international ayant pourthème la publicité pharmaceutiquedirecte auprès du public pour les médicaments de prescription(Bruxelles, 10 janvier 2002) (4).

À la suite de cette journée, quia notamment permis d’enregis-trer le témoignage d’équipes spé-cialisées nord-américaines, etd’entendre les arguments des res-ponsables de la Direction généra-le “Entreprises” de la Commissioneuropéenne et ceux des repré-sentants au plus haut niveaueuropéen de l’industrie pharma-ceutique, une déclaration com-mune de HAI et EPHA a étépubliée. En voici des extraits :

« (…). Cette rencontre a clarifié uncertain nombre de points :• Le public veut de l’informationobjective sur les médicaments deprescription. Chacun a insisté sur lefait que le public a besoin d’avoiraccès à de l’information équilibrée,

comparative, pertinente, mise à jour,précise et non biaisée sur les traite-ments médicamenteux et non médi-camenteux. Seule la Direction géné-rale Entreprises de la Commissioneuropéenne a défendu la propositiond’autoriser les industriels du médica-ment à faire de la publicité pour lesmédicaments de prescription.• Personne ne revendique lapaternité de la proposition de laCommission. (…) Selon la Directiongénérale Entreprises, cette propositionest issue de demandes exprimées pardes groupes de patients, mais elle n’apas été en mesure de citer le nom d’unseul groupe de patients en faveur decette proposition.

Selon son Directeur général,l’European Federation of Pharma-ceutical Industries and Associations(EFPIA - Fédération européenne desassociations et des industries pharma-ceutiques) n’a aucune position concer-nant la publicité directe, et les repré-sentants de AstraZeneca, de Novartiset de Merck Sharp &Dohme présentsn’ont émis aucun commentaire.

Certains responsables nationauxdes politiques de santé (tels que leMinistre hollandais de la santé) ontclairement déclaré qu’ils rejetaient lapublicité directe, mais qu’ils voulaientaméliorer la qualité et l’accessibilitéde l’information sur les médicaments(ce qui ne nécessite aucun changementlégislatif). (…)• Des données montrent que lapublicité directe des médicamentsde prescription met en danger lasanté publique. (…). Si on considè-re les presque 20 années de publicitédirecte aux États-Unis, il est clair quela publicité directe accroît inutilementla pression sur les budgets de santépublique, la délivrance d’informa-tions de santé futiles ou trompeuses,et l’utilisation inappropriée et inuti-le des médicaments. L’expérience desÉtats-Unis a montré qu’il est diffici-le et coûteux de faire respecter les loisqui réglementent la publicité directe,qu’elles sont couramment violées,généralement par des annonceurs quiminimisent l’information sur le risqueet qui exagèrent les bénéfices.

Quatrième partie

Pour une réglementation qui réponde aux besoinsélémentaires de santé publique

LA REVUE PRESCRIRE JUILLET/AOUT 2002/TOME 22 N° 230 • PAGES 544-545

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LA REVUE PRESCRIRE - EXTRAITS • PAGE 15

Pour HAI et EPHA, « Il faut reje-ter la proposition sous sa forme actuel-le car elle n’est pas conforme à l’obli-gation qui découle de l’article 152 dutraité de l’Union européenne, d’assu-rer un haut niveau de santé publiquedans toutes ses activités. Elle n’est pasnon plus conforme aux critèreséthiques pour la promotion des médi-caments à usage humain de l’OMStels qu’ils ont été adoptés par tous lespays membres de l’OMS en 1988. (…)

Il faut appliquer vigoureusement lalégislation actuelle par des vérifications,des sanctions, et un suivi attentif de lapublicité en direction des profession-nels de santé et du grand public. (…)

Il faut développer une stratégievolontariste d’éducation et d’informa-tion des consommateurs, afin que lepublic reçoive et utilise une informa-tion objective de qualité sur les médi-caments. Plus précisément, il faut :– améliorer la qualité des noticesd’information destinées aux patientspour les rendre plus faciles à lire, pluscomplètes et plus compréhensibles ;– encourager la production d’infor-mations comparatives et indépen-dantes sur les médicaments, pour lesprofessionnels de santé comme pourle public. En outre, il faut promou-voir des vérifications sur le terrain,indépendantes et périodiques de l’effi-cacité de l’information médicale pouréduquer et informer les professionnelset le public ;– développer sur le long terme desmoyens d’enseigner aux citoyens lesprincipes de base qui sous-tendent lestraitements rationnels et l’aptitude àl’évaluation critique ».

Le Collectif Europe et Médicament

Le Collectif Europe et Médica-ment, constitué le 20 mars 2002à Paris, s’est fixé pour objectifd’informer toutes les personnesconcernées par la politique dumédicament en Europe, et de pré-senter des amendements aux pro-positions de Directive et deRèglement de la Commissioneuropéenne (e).

Voici des extraits des raisons desa démarche (5) :

«• Le médicament n’est pas unproduit de consommation banal.Par définition, le médicament s’adres-

se à des personnes malades, ou à despersonnes présentant des facteurs derisque. Par nature, son effet thérapeu-tique, ou préventif, s’accompagned’effets indésirables potentiels. En outre,le marché du médicament est un “mar-ché captif” ; le patient n’est pas unconsommateur et prend son médica-ment non par choix, mais par nécessi-té. Ces particularités impliquent uneévaluation rigoureuse des dossiers dedemande d’autorisation de mise sur lemarché, une surveillance active des effetsindésirables potentiels, une informa-tion fiable et complète de tous les acteursdu système de santé et de tout citoyen,malade potentiel. (…)

• Une réduction de 210 à 150jours du délai d’examen des dos-siers de demande d’AMM ne per-met pas de garantir une experti-se de qualité. Évaluer sérieusementles données pharmaceutiques, toxico-logiques et cliniques relatives à unnouveau médicament demande untemps incompressible. L’expérienceaccumulée par les experts de l’Agenceeuropéenne du médicament montreque le respect des délais actuels est déjàdifficile. (…) la procédure accéléréedoit être réservée aux situations excep-tionnelles, c’est-à-dire aux médicamentsconstituant un possible progrès théra-peutique significatif, pour des maladessans alternative disponible (…).

• L’absence de réévaluation régu-lière des médicaments n’est pasconcevable au rythme où évoluentles connaissances scientifiques. Laréévaluation des effets indésirables desmédicaments en fonction des donnéesnouvelles de pharmacovigilances’impose pour garantir le bon usagedes médicaments et la sécurité despatients.

La réévaluation des bénéfices com-paratifs des médicaments, à la lumiè-re des nouvelles données cliniques dis-ponibles sur le plan international, estégalement indispensable pour ne paspriver les patients des traitements lesplus efficaces à un moment donné.(…)

• Une pharmacovigilance passiveet opaque n’est pas une véritablegarantie de sécurité. Le recueil desnotifications spontanées d’effets indé-sirables par l’Agence européenne dumédicament est une bonne chose, maisà la condition que les données accu-mulées profitent à la meilleure connais-

sance des risques par ceux qui sont enmesure de les éviter : les professionnelsde santé et les malades. La base de don-nées ainsi constituée doit être accessiblesur demande. Les rapports de phar-macovigilance doivent également êtreaccessibles sur demande. (…)

Et surtout l’Agence européenne dumédicament doit pouvoir aller au-delàet mettre en œuvre une pharmacovi-gilance indépendante et active. Elledoit disposer de moyens pour mettreen œuvre des enquêtes prospectives, encoordination avec les agences natio-nales des pays membres et des autrespays du monde. (…)

• Trois principes fondamentauxsont à renforcer dans la Directive.(…) Trois principes devraient être ren-forcés pour donner des garanties auxcitoyens européens :- Principe de transparence. (…)L’opacité qui entoure aujourd’huil’Agence européenne du médicamentest une entrave au bon usage du médi-cament. Le renforcement de la trans-parence est le seul moyen de restau-rer la confiance des patients et desprofessionnels de santé dans une ins-titution essentielle et de les associer aubon usage du médicament.Les patients doivent être représentéset participer activement à l’ensembledes instances consultatives de l’EMEA.L’article 58 de la proposition deRèglement doit prévoir une représen-tation équilibrée entre les patients etl’industrie au Conseil d’administra-tion de l’EMEA, ainsi que des procé-dures transparentes de nominationde ces représentants.- Principe d’indépendance. (…)Les propositions de Directive et deRèglement doivent restaurer desgaranties indispensables d’indépen-dance. Le financement communau-taire de l’EMEA doit par ailleurs êtrenotablement augmenté pour renfor-cer son indépendance et donner àl’Agence des moyens à la hauteur desa tâche et de ses responsabilités.- Principe d’harmonisation. Le travail déjà accompli pour har-moniser le système européen du médi-cament est considérable. Mais il res-te beaucoup à faire en matière depharmacovigilance (européenne etinternationale), et surtout en matièred’autorisation de mise sur le marché.La procédure d’AMM dite centraliséeest le témoin d’une bonne harmoni-sation, mais la procédure dite “parreconnaissance mutuelle” est encore

chaotique, et faitintervenir une expertisetrès hétérogène. De surcroît, totale-ment opaque, cette procédure ne peutêtre acceptée en confiance par lescitoyens européens. (…) ».

© LRP

a- L’International Society of Drug Bulletins(ISDB) est un réseau international de revuesde thérapeutique indépendantes de l’indus-trie pharmaceutique fondé en 1986. Site internet : www.isdbweb.org b- Ses représentants sont intervenus notamment dans la Conférence “EuropeanIntegration and Health Care systems : aChallenge for Social Policy”, organisée par laprésidence belge de l’Union européenne(Gand, 7-8 décembre 2001) (réf.1) et lors dela consultation menée par le Comité écono-mique et social européen sur le thème “Whatare the consequences of EU commission’s pro-posals on the health of EU citizens, notably ondrug safety?” (Bruxelles, 6 mars 2002)(réf.2).c- Health Action International (HAI) est unréseau informel qui rassemble quelques 150 associations et groupes de consommateurset autres, impliqués dans les questions rela-tives à la santé et aux médicaments dans plusde 70 pays. Site internet : www.haiweb.orgd- European Public Health Alliance (EPHA)représente plus de 80 associations et organi-sations non gouvernementales impliquéesdans le domaine de la santé en Europe. Site internet : www.epha.orge- Le Collectif Europe Médicament regroupede nombreuses associations familiales ou deconsommateurs, groupements de patients, ins-titutions mutualistes, organisations profes-sionnelles de santé. Email : [email protected]

Extraits de la recherche documentairePrescrire.1- Bardelay D - European Group ofthe International Society of DrugBulletins “Information for consu-mers” European integration andhealth care systems : a challenge forsocial policy” Ghent 7-8 December2001 : 8 pages.2- International Society of DrugBulletins “About the proposals ofthe EU Commission (COM 2001-404 Final) regarding drug approvalsand pharmacovigilance” European,Economic and Social Committee,Bruxelles 6 mars 2002 : 8 pages.3- Groupe des 9 experts du Com-mittee of Proprietary Medicinal Pro-ducts “Dear Members of the Euro-pean Parlement – Proposed amend-ments to the EU pharmaceuticallegislation” Milan 25 February 2002 :2 pages.4- Health Action Internatioal –European Public Health Alliance“Joint Statement on the proposedrelaxation of the EU Ban on direct to consumer advertising of pres-cription medicines” 28 January2002 : 3 pages (Traduction LRP :6 pages).5- Collectif Europe et Médicament“Position du Collectif” mars 2002 :10 pages.

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PAGE 16 • LA REVUE PRESCRIRE - EXTRAITS

Internet Les agences du médicament ont des devoirsd’information

Les agences gouverne-mentales du médicamentont des devoirs de trans-

parence de leurs décisions etd’information vis-à-vis des res-ponsables politiques et desindustriels de leur pays, maisaussi vis-à-vis des citoyens etdes professionnels de santé (1).

Compte tenu des impératifstechniques et humains, lemédia le plus approprié pourréaliser cette informationpublique est aujourd’hui le siteinternet : les coûts de diffusionsont réduits au minimum ; lesmises à jour peuvent être réali-sées quotidiennement ; les his-toriques des décisions peuventêtre conservés ; etc.

Évaluer la qualité des sitesweb des agences permet d’éva-luer leur travail, leur volonté etleur capacité à informer, c’est-à-dire à jouer leur rôle d’acteurde santé publique. On peutainsi reconnaître celles qui sontutiles et fiables.

Bien sûr, c’est l’ergonomiedu site qui est vue d’abord. Est-il facilement accessible, rapide àconsulter, avec des moyensinformatiques et logiciels cou-rants ? Son arborisation est-elleclaire ?

Au-delà de cette ergonomie,c’est sur sa capacité à répondreaux questions légitimes qui seposent à tout un chacun quedoit être jugé le site d’uneagence du médicament.

La grille d’analyse utiliséepar l’équipe de la revue Prescrirepour évaluer le site d’uneagence du médicament estreproduite en encadré ci-contre. Elle peut sûrement êtrecomplétée. Mais elle constitueun minimum indispensable. Ilconvient en particulier de sou-ligner que toutes les informa-tions doivent être mises à jourrégulièrement et datées.

©LRP

1- “Pour la transparence des décisionsofficielles concernant les médicaments :la Déclaration d’Uppsala” Rev Prescr1997 ; 17 (172) : 277-281.

I T E S W E BS

1- Organisation de l’Agence- Organigramme : coordon-

nées des unités et noms des res-ponsables ; listes des experts ;conflits d’intérêt

- Calendrier des réunionsavec leur ordre du jour précis,et le cas échéant leur accès parle public

- Rapports d’activités annuelsdétaillés

- Comptes rendus du Conseild’administration ; remarquesdes structures de contrôlefinancier ; etc.

- Budgets

2- Socle réglementaire- Ensemble des textes régle-

mentaires et lettres de missiondéfinissant le rôle et les objec-tifs de l’Agence, des commis-sions et groupes de travail quil’entourent

- Ensemble des décisions etconsignes collectives signées parles responsables de l’Agence

- Répertoires des génériques,des médicaments à statut par-ticulier, des médicaments clas-sés comme stupéfiants, des pro-duits dérivés du sang, etc.

- Registre des interdictionsde publicité et leurs motiva-tions

3- Comptes rendus d’éva-luation

- Résumés des caractéris-tiques des médicaments (RCP) :annexe I (information des pro-fessionnels), annexe II (notice)et annexe III (étiquetage) del’autorisation de mise sur lemarché (AMM), avec signale-ment précis des changementsde libellé

- Rapports d’évaluation envue de l’obtention de l’AMM(avec dates de rédaction et demise à disposition ; mises àjours en évidence (a))

- Comptes rendus des débatsdes commissions et des groupesde travail spécialisés (ou trans-

cription de l’enregistrement deces séances)

- Registre des essais cliniquesterminés ou en cours - Éva-luation comparative du rapportcoût/utilité des médicaments :travaux des commissions adhoc (en France : Commissionde la transparence) ; accès àtous les avis de ces commissionset aux estimations du servicerendu par rapport aux autresressources du marché (enFrance : amélioration du servi-ce médical rendu (ASMR) etfiches de transparence) et desrapports les motivant

- Recommandations d’utili-sation ; calendriers des vacci-nations ; etc.

4- Pharmacovigilance- Décisions en pharmacovi-

gilance avec données fondantces décisions : alertes, mises engarde, modifications du condi-tionnement, retraits de lots(incidents industriels), lettrescirculaires (aux industriels, auxcentres de pharmacovigilance,aux praticiens, etc.), retraits dumarché ou suspensionsd’AMM

- Modifications des RCP enrapport avec effets indésirables,interactions, grossesse, misesen garde, restrictions d’indica-tions, posologie, surdosage, ter-rains particuliers

- Rapports des enquêtes depharmacovigilance terminées

- Comptes rendus des réu-nions des commissions depharmacovigilance, de phar-macodépendance, d’interac-tions médicamenteuses, gros-sesse et allaitement, etc.

- Médicaments à surveillan-ce particulière (liste des enquê-tes en cours, listes des médica-ments “surveillés”)

- Bulletins d’actualités enpharmacovigilance (national,et régionaux des centres depharmacovigilance)

- Bilans des déclarationsspontanées des praticiens et desétudes spécifiques de pharma-covigilance

- Liste des centres de phar-macovigilance, de pharmaco-dépendance, etc.

- Fiches téléchargeables denotification d’effets indésirables(de médicaments, de disposi-tifs médicaux, de phytothéra-pie, etc.)

5- Consommation - Uti-lisation - Prix

- Données de consommation- Données d’utilisation : non-

observance, dépendance, déra-page d’indications, prescriptionsnon conformes aux RCP

- Arrêts de commercialisa-tion, ruptures d’approvision-nement

- Catalogue à jour des prixdes médicaments pris en char-ge par l’assurance maladie

6- Autres produitsLa responsabilité des agences

n’est généralement pas limitéeau seul domaine des spéciali-tés pharmaceutiques, les sitesdes agences doivent aussi, selonla réglementation en vigueurdans le pays et selon les mis-sions des différentes institu-tions, traiter :

- des préparations magis-trales, officinales, hospitalières ;

- des plantes médicinales ;- des dérivés du sang ;- des dispositifs médicaux ;- des produits diététiques ;- etc.

©LRP

a- Ces rapports ont par exemple pournoms : European Public AssesmentReport (EPAR) (Agence européenne) ;Drug Review (Food and DrugAdministration des États-Unisd’Amérique). Ils n’existent pas enFrance.

Grille d’analyse du site web d’une agence du médicament

LA REVUE PRESCRIRE JUIN 2001/TOME 21 N° 218 • PAGE 464

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LA REVUE PRESCRIRE - EXTRAITS • PAGE 17

I T E S W E Bs

FDAFOOD AND DRUGADMINISTRATION

Un exemplede transparence

La Food andDrug Admi-

nistration (FDA)évalue les béné-fices et les risques des produits de santé (médica-

ments, dispositifs médicaux, testsde dépistage, etc.) et veille à lasécurité des aliments et de cer-tains produits de consommationcourante présentant un risquepotentiel pour la santé (télé-phones portables, fours à micro-ondes, etc.).

Remarquablement bien conçu,le site de la FDA comporteactuellement en ligne quelque140 000 documents techniquesou administratifs.

Les principaux départementsde la FDA ont chacun leur propresite sur le serveur de l’Agence.

Les points forts. La paged’accueil offre à chaque visiteurla possibilité d’accéder rapide-ment à ce qui l’intéresse :- par type de public : consom-mateurs, patients, professionnelsde santé, industriels, journalistes,femmes, personnes âgées,enfants (“Information for :”) ;- par publication (“Referenceroom”) ;- par nouveauté (“FDA news”) ;- par type de produits (“ProductsFDA regulate”) ;- par type d’activités : essais cli-niques, commissions, vigilances,etc. (“FDA activities”) ;- par manière de contacter laFDA : pour signaler un incident,

demander un document public,etc. (“Let us hear from you”).Les principaux départements ontchacun leur site :- Le Center for Drug Evalua-tion and Research (CDER)est responsable de l’évaluationdes nouveaux médicaments entermes de qualité de fabrication,d’efficacité, de sécurité, de no-tices d’information, et donne sonavis favorable ou défavorable àla mise sur le marché américain.Le CDER a sa propre paged’accueil : http://www.fda.gov/cder/index.html.- Le Center for Biologics Eva-luation and Research (CBER)est chargé d’évaluer l’efficacitéet la sécurité des produits théra-peutiques d’origine microbiolo-gique, végétale, animale ouhumaine, tels le sang et les pro-duits sanguins, les vaccins, lesanticorps monoclonaux, lesenzymes et les interférons, lesgènes, les greffons d’origine ani-male, les allergènes, etc. Les testsdiagnostiques permettant d’iden-tifier les agents infectieux sontégalement du ressort du CBER.Ce Centre a sa propre paged’accueil : http://www.fda. gov/cber/index.html.- Le Center for Devices andRadiological Health (CDRH)est chargé de l’évaluation de lasécurité et de l’efficacité des dis-positifs médicaux (prothèses etorthèses, lecteurs de glycémie,robots chirurgicaux, etc.), ainsique de l’innocuité des produitsémettant des radiations (fours àmicro-ondes, écrans vidéos, télé-phones cellulaires, équipementsradiologiques, etc.). Les donnéesaméricaines de matériovigilance,incluant les alertes publiques,sont rassemblées dans la ru-brique “Postmarket issues”. LeCDRH a sa propre page d’accueil :http://www.fda.gov/cdrh/index.html.- Medwatch (lire en encadrépage 706), département trans-versal de la FDA chargé de lapharmacovigilance et de lamatériovigilance, a sa proprepage d’accueil : http://www.fda. gov/medwatch/index.html - Le Center for Food Safetyand Applied Nutrition(CFSAN) a pour mission deveiller à la sécurité sanitaire de la

nourriture consommée par lapopulation américaine (à l’excep-tion de la viande, de la volaille etdes œufs). La prévention des toxi-infections alimentaires (“food-borne illness”) est l’un de sesobjectifs principaux. Mais leCFSAN est également chargé dela sécurité des complémentsnutritionnels et des additifs ali-mentaires, des laits en poudredestinés aux enfants et autres ali-ments utilisés en thérapeutiquehumaine. Les cosmétiques sontégalement de son ressort. LeCFSAN a sa propre page d’ac-cueil : http://vm.cfsan. fda.gov.

Les limites. La FDA a l’obli-gation légale de rendre dispo-nible sur son site l’informationqu’elle détient (1). Les limitesdu site de l’Agence américainesont celles de la FDA elle-même.

Pour gagner du temps. Lapage “FDA Manuals and Publi-cations” permet un accès aisé àl’ensemble de la documentationprésente sur le serveur. Les dif-férents types de documents ysont classés à l’aide d’une cour-te liste alphabétique de mots clés.Chacun des Centres composantla FDA propose de plus sa propreliste de documents spécifiquesen ligne.

Trois modes d’exploration sontproposés en bas de la paged’accueil général : un plandétaillé du site (“Site map”), unindex par mots clés de A à Z (“A-Z index”) et un moteur de re-cherche interne (“Search”). Lesinformations contenues dans lesbases de données présentes sur lesite ne sont pas accessibles parces trois modes d’exploration :chaque base doit être exploréeindividuellement.

Une page d’accueil réservéeaux professionnels de santé(“Health professionnals”), re-groupe à la manière d’un portail,toutes les pages du site FDA sus-ceptibles de les intéresser : un gainde temps certain pour le profes-sionnel qui vient juste “pour voir”.

Le visiteur qui cherche uneinformation précise gagne à uti-liser le mode de recherche avan-cé (“Advanced Search”) qui per-met de trouver toutes les pagescontenant un groupe de mots

contigus ou plusieurs mots noncontigus, de chercher en texteintégral, dans le titre seulementou dans le titre et les mots-clés,de filtrer les documents mis enligne la veille ou la semaine pas-sée. Les informations contenuesdans les bases de données sontinaccessibles par ce mode. Il estconseillé de saisir les mots entiè-rement en minuscules ou entiè-rement en majuscules, puis deles mettre chacun entre guille-mets, afin d’optimiser sa re-cherche (cliquer sur “Searchtips” pour plus de détails).

Il est possible de s’inscrire à dif-férentes listes de diffusion (FDANews Digest, FDA Consumer,MedWatch “What’s new”, etc.).L’accès à ces services se trouveau bas de la page d’accueil(“Subscribe to FDA’s E-Mail lists”).

Site créé en 1995Éditeur(s). Food and Drug Adminis-tration.Financement. Explicité. Le site estfinancé par la FDA, dont le budget pré-visionnel pour l’année 2002 est de1 414 391 000 US $ (Environ 40 % defonds publics et 60 % provenant desredevances versées par l’industrie).Présence de publicité. Non.Devenir des données personnellesfournies par les internautes. La FDAdéclare ne jamais communiquer à destiers les informations personnelles don-nées volontairement (telles que l’adres-se électronique qu’il faut donner pours’abonner à une liste de diffusion de laFDA ou bien les coordonnées person-nelles requises lors de la notificationd’un incident de vigilance).Politique de mise à jour. De nou-veaux documents sont mis en ligne àun rythme quotidien. La mise à jourdes documents publiés sur le site FDAest très régulière et des modificationssont susceptibles d’être mises en lignechaque jour.Auteur(s). La FDA emploie 9 000 per-sonnes, incluant des chimistes, desmicrobiologistes, des cliniciens, desvétérinaires, des juristes, des ingénieursbiomédicaux, des inspecteurs de lasanté, des inspecteurs de la pharma-cie, etc. La FDA dispose par ailleursde nombreux comités consultatifs (advi-sory committees) composés de spé-cialistes des divers domaines couvertspar l’Agence. Les auteurs des docu-ments mis en ligne sur le serveur del’Agence peuvent être des fonction-naires ou des collaborateurs extérieurs.

Informations vérifiées le 19 août 2001

©LRP

1- Prescrire Rédaction “Médica-ments : exiger les informations desagences publiques” Rev Prescr 2001 ;21 (217) : 381-382.

• Enanglais• Accèsgratuit,sans motde passe

http://www.fda.gov

LA REVUE PRESCRIRE OCTOBRE 2001/TOME 21 N° 221 • PAGES 705-706

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PAGE 18 • LA REVUE PRESCRIRE - EXTRAITS

MedWatchThe FDA safety information and adverse event reporting program

MedWatch est un programme de la FDA (lire page précédente) visant àencourager les notifications d’effets indésirables et à communiquer les alertesconcernant les effets indésirables des médicaments, des produits biologiques,des dispositifs médicaux et des compléments nutritionnels du marché amé-ricain.

Les points forts. Les alertes de pharmacovigilance et les nouvelles misesen garde concernant les effets indésirables y sont rapidement et facilementaccessibles.

La section “Safety information” permet d’accéder aux alertes de phar-macovigilance et aux documents explicatifs (lettres, rapports). Elle est divi-sée en 5 rubriques : produits biologiques, compléments nutritionnels, médi-caments, dispositifs médicaux, autres. Un bref résumé des données depharmacovigilance apparaît à l’écran, un lien hypertexte renvoyant aux docu-ments détaillés, lettres aux professionnels de santé, rapports, etc. Les alertessont archivées par année et par ordre alphabétique.

Toute modification des résumés des caractéristiques (RCP) des médica-ments commercialisés aux États-Unis est mise en ligne. Ces modificationsconcernent tous les paragraphes des RCP : effets indésirables, précautionsd’emploi, mises en garde, contre-indications, indications, posologie et moded’administration, interactions, mais aussi la pharmacologie clinique, la car-cinogénicité, etc. Le nouveau texte est facilement repérable, en gras et sou-ligné. Si un texte exposant les données ayant conduit à ces modifications esten ligne sur le site de la FDA, un lien hypertexte dirige vers ce document. Lesmodifications des RCP sont archivées par date et par ordre alphabétiquesur le site.

La fiche standard de notification d’effet indésirable peut être téléchargée.Les professionnels de santé et le public peuvent aussi notifier en ligne.

MedWatch invite le visiteur à lui retourner des commentaires ou à inter-roger la FDA sur des documents ou rapports concernant les produits àl’aide d’un formulaire en ligne.

Une section donne accès à la liste des retraits de lots ou de produitsentrant dans le champ de la FDA. Les raisons des retraits sont toujoursexplicitées et concernent le plus souvent des erreurs industrielles (condi-tionnement, non respect des bonnes pratiques de fabrication, etc.), descontre-façons de spécialités (relativement fréquentes aux États-Unis, avecles détails permettant de les repérer), retraits de lots de produits dérivés dusang (identification d’un facteur de risque chez un donneur : exposition à unrisque infectieux, traitement médicamenteux en cours, maladie en cours ;erreur d’étiquetage, etc.), non conformité de dispositifs médicaux, etc.

Les limites. MedWatch exerce une surveillance limitée aux médicamentsdestinés au marché des États-Unis d’Amérique. Il ne faut pas oublier qu’unesubstance commercialisée en France peut être commercialisée outre-Atlantique avec un autre nom de spécialité, des indications ou des dosagesdifférents.

Pour gagner du temps. La section “What’s new” donne les alertesdes deux dernières semaines. Pour recevoir automatiquement les alertespar courrier électronique, il est possible de s’inscrire à la liste de diffusion deMedWatch “What’s new”.

©LRP

http://www.fda.gov/medwatch/index.html

I T E S W E Bs

EMEAAGENCE EUROPÉENNE POURL’ÉVALUATION DESMÉDICAMENTS (EUROPEAN MEDICINESEVALUATION AGENCY)

Un faux-semblantde transparence

L’Agence euro-péenne pour

l’évaluation des médicaments (EMEA) a pour missions princi-pales : - la coordination de l’évaluation scientifique des médicaments

(procédure centralisée d’autori-sation de mise sur le marchéeuropéen) et la saisine pour arbi-trage scientifique de désaccordsen matière de reconnaissancemutuelle des autorisations natio-nales de mise sur le marché(procédure européenne décen-tralisée) ;- la coordination des activitésliées à la pharmacovigilance àl’échelon européen ;- la coordination des activitésd’inspection dans le domaineindustriel du médicament,notamment celles en rapportavec la vérification du respect desBonnes pratiques de fabrication(BPF), des Bonnes pratiques delaboratoire (BPL) et des Bonnespratiques cliniques (BPC).

En outre, elle est chargéed’une mission de conseil scien-tifique dans la conduite desétudes précliniques et des essaisthérapeutiques.

Durant ses 6 premières an-nées d’existence, l’EMEA aexpertisé 339 demandes d’auto-risation centralisées pour des

spécialités pharmaceutiques des-tinées à l’Homme, et donné unavis favorable à la mise sur lemarché à 194 d’entre elles. Dansla même période, l’Agence aenregistré 1 399 demandesd’autorisation par reconnais-sance mutuelle et effectué10 arbitrages en ce domaine. Deplus, elle a traité 5 240 deman-des de modification d’AMM.

Les points forts

L’EMEA met en ligne 2 typesintéressants d’avis et rapportsd’évaluation.

Des rapports d’évaluation(EPAR). Les rapports publicseuropéens d’évaluation (EPARs)des médicaments ayant reçu uneautorisation de mise sur le mar-ché communautaire par la pro-cédure centralisée sont mis à dis-position du public, ainsi queleurs révisions successives(rubrique Human Medicines,sous-rubrique Product informa-tion\Authorized products :http://www.emea.eu.int/htms/human/epar/epar.htm).

Prenant en compte les essaispubliés, les EPARs font égale-ment référence à un certainnombre d’essais non publiés.

Aux débuts de l’Agence, lesEPARs se présentaient sous laforme d’un document unique,en anglais. Certains EPARs par-mi les plus anciens ne sont dis-ponibles que dans ce format. LesEPARs comportent aujourd’hui8 modules indépendants. Les rai-sons d’un tel découpage ne sontpas explicitées. Les modules 1,3, 4 et 5 sont presque toujourstraduits en 11 langues. Le mo-dule 2 l’est parfois. Les profes-sionnels et le public français ontainsi accès au résumé des carac-téristiques du produit (RCP)(module 4) et à la notice (modu-le 3) en langue française. Lesmodules 6, 7 et 8 des EPARS, quiconcernent la discussion scien-tifique, les étapes suivies dansl’évaluation en vue de la misesur le marché et, le cas échéant,les étapes suivies dans l’évalua-tion après autorisation, ne sontdisponibles qu’en anglais.

• En anglais(certainsdocumentssontdisponiblesen 11langues)• Accèsgratuit,sans motde passe

http://www.emea.eu.int/

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Des avis avant décision.Depuis le 1er avril 2001, sous lapression de plusieurs organisa-tions de citoyens et de profes-sionnels, l’EMEA a accepté queles avis du CPMP (Committeefor Proprietary MedicinalProducts, l’équivalent d’unecommission d’autorisation demise sur la marché (AMM)) surles demandes initiales d’autori-sation de mise sur le marchéd’un médicament à usagehumain, soient rendus publics,dans une forme résumée, le jourmême où la décision a été prisepar cette commission, que cet-te dernière soit favorable oudéfavorable à la commercialisa-tion du médicament en Europe.Ces avis résumés (en anglais,“summaries of opinion”), longsd’une à deux pages maximum,sont mis en ligne et téléchar-geables (http://www.emea.eu. int/htms/human/opinion/opinion.htm). Après accord ourefus de l’autorisation de misesur le marché par la Commissioneuropéenne, l’avis résumé estsupprimé du serveur de l’EMEApour être remplacé par le rap-port public européen d’évalua-tion (EPAR) élaboré par leCPMP (voir, pour une descrip-tion de cette procédure, http:// www.emea.eu. int /pdfs /human/opinion/163501en.pdf).

Les rapports d’activité annuelsde l’EMEA sont mis en ligne àhttp://www.emea.eu.int/htms/general/direct/ar.htm.

Une transparence en fait très superficielle

Aucun compte rendu détaillédes réunions du CPMP n’est dis-ponible. Les EPARs et avis duCPMP affichés ne sont qu’unepointe de l’iceberg de l’activitéadministrative de l’Agence.

Opacité de la procédure dereconnaissance mutuelle. Lesrapports scientifiques relatifs auxautorisations par reconnaissan-ce mutuelle, de loin les plusnombreux, ne sont pas mis enligne sur le site de l’EMEA.Environ 2 500 médicamentsayant fait l’objet d’une procé-

dure décentralisée (soit une pro-cédure initiale d’AMM parreconnaissance mutuelle, soitune procédure de modificationd’autorisation postérieure à unemise sur le marché) sont listésailleurs, sur un autre site(European Product Index,http://mri.medagencies.com/prodidx/), mais seul le rapportpublic d’évaluation d’un de cesmédicaments y est accessible.

Il n’existe, sur le site mêmede l’EMEA, aucun lien hyper-texte pointant vers les rapportsd’évaluation ou les RCP produitspar les 15 pays dans le cadre deleurs autorisations de mise surle marché nationales.

Ni références, ni datationclaire. Les rapports scientifiques(EPARs) relatifs aux autorisa-tions centralisées ayant obtenuun avis favorable sont en ligne,mais sous une forme résumée.Les références bibliographiquesdes essais cliniques publiés surlesquels s’appuient la discussionscientifique ne sont en généralpas citées dans les EPARs.

Les textes révisés sont mis enligne, mais sans date et surtoutsans signalement clair des pas-sages effectivement révisés.

Pharmacovigilance à dosehoméopathique. L’EMEA apour mission d’assurer la phar-macovigilance de tous les médi-caments utilisés dans les 15 paysmembres de la Communautéeuropéenne. Mais l’informationde pharmacovigilance mise enligne sur son site est indigente.

En 2001, l’EMEA n’a mis enligne que 7 alertes concernantla sécurité de médicaments déjàcommercialisés en Europe(“Product safety announce-ments”) et a retiré l’autorisationde 4 médicaments (“Marketauthorisation withdrawals”).

Les sujets de pharmacovigi-lance débattus à l’EMEA, ainsique les comptes rendus desréunions relatives aux effetsindésirables des médicaments nesont pas rendus publics.

L’EMEA ne propose pas auxprofessionnels la réception desalertes et des retraits ou sus-pensions d’AMM centraliséespar courrier électronique : il faut

aller sur le site de l’Agence pourêtre informé (bouton rouge“Product alert”, sur la paged’accueil).

L’EMEA ne propose pas defiches téléchargeables de notifi-cation d’effets indésirables demédicaments. Elle donne sim-plement le nom, le numéro detéléphone et l’E-mail de la per-sonne à contacter (00 44 207418 85 92, noel.wathion@ emea.eudra.org).

D’autres données de phar-macovigilance sont présentes surle site, mais dispersées dansd’autres sections ou à l’intérieurdes documents d’évaluation.Ainsi, les prises de position del’EMEA sur les risques dethrombose veineuse liée auxcontraceptifs oraux dits “de troi-sième génération” ont été pla-cées dans la zone du site destinéeà la presse (rubrique “Pressorientated information/Positionsstatements”). Les révisions desrapports publics européensd’évaluation (EPARs), qui con-cernent les médicaments dumarché communautaire, nesont pas individualisées lors-qu’elles sont consécutives à denouvelles données de pharma-covigilance : pour obtenir cesinformations, il faut afficher unà un chaque EPAR révisé,rechercher ensuite un à un lesparagraphes modifiés afin devérifier, par comparaison avecles versions antérieures, s’ils sonten rapport ou non avec deseffets indésirables.

L’EMEA n’a pas, à ce jour, demission concernant les disposi-tifs médicaux et la matériovigi-lance.

Navigation difficile dansun tel labyrinthe

L’accessibilité informatique etl’ergonomie du site sont extrê-mement problématiques. Lenavigateur de l’internaute doitêtre préalablement paramétrépour la lecture du langage infor-matique Java. D’après l’EMEA,les utilisateurs de PC ne peuventvisualiser correctement ce sitequ’avec Internet Explorer enversion 5 minimum ou bien via

une version 4.7 de NetscapeNavigator. Les utilisateurs deMacIntosh doivent se servirquant à eux d’une version 4.7de Netscape Navigator, ensachant qu’Internet Explorerdonne, quelle qu’en soit la ver-sion, de piètres résultats. De plus,l’emploi de menus déroulantshiérarchiques, l’affichage exclu-sif de petites tailles de caractèreset de fenêtres ne faisant appa-raître que le début des textescontribuent également à opaci-fier et rendre très difficile l’uti-lisation du site par des visiteurspeu familiarisés avec ce typed’interfaces.

Pour gagner du temps

Quoique dense, le plan du site(rubrique “Site Map” de la paged’accueil) est bien fait, et permetd’avoir une vue d’ensembleassez claire sur les différentessections du site de l’EMEA et d’yaccéder en cliquant sur l’élémentvoulu du plan.

Pages d’actualité. Une listerassemblant de nouveaux docu-ments mis en ligne par l’EMEA,mise à jour quotidiennement etprésentée par ordre chronolo-gique décroissant, est accessibleà la page “Just published”(http://www.emea.eu.int/whatsnewp.htm). L’accès direct à cet-te page est recommandé pourse tenir au courant de l’actuali-té de l’EMEA et ne pas se perdredans le labyrinthe auquel peutmener rapidement la paged’accueil.

Une autre page web permet-tant de retrouver avec plus defacilité des informations phar-maceutiques ou réglementaireseuropéennes se trouve sur le ser-veur de DG Enterprise (unité F2,Commission européenne). Cetorganisme communautaire jouenotamment un rôle d’interfaceentre l’Agence et la Commissioneuropéenne.

Registre. Le plan du sitePharmaceuticals (http://dg3. eudra.org/F2/site map.htm) per-met d’accéder au registre desmédicaments communau- � �

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taires à usage humain (uni-quement ceux mis sur le marchéselon la procédure centralisée) etau registre des médicamentsorphelins (rubrique “Register”).Le premier registre peut êtreouvert soit par ordre alphabé-tique de noms de spécialités, soitpar ordre chronologique (il n’estpas possible de l’ouvrir par classethérapeutique ou par dénomi-nation commune internationa-le). Dans les deux cas, tous lesmédicaments sont listés sur uneseule page. Un clic sur leur nom(hypertexte bleu) donne accès àleur RCP et à leur notice dans lalangue de son choix.

Moteur de recherche. Lemoteur de recherche interne ausite de l’EMEA propose deuxmodes de recherche (“EMEAnew Web” et/ou “EMEA Web”).L’ancien serveur de l’EMEA(“EMEA web”), dont l’adresseInternet a été fermée en février2001, contient cependant enco-re quelques EPARs. En cochantles deux options de recherchesimultanément, on ne passerapas à côté de l’information surles EPARs non encore transfé-rée sur le nouveau serveur.

Site créé en 1995Éditeur(s). L’Agence européenne pourl’évaluation des médicaments (EMEA),en exercice depuis le 1er janvier 1995,a ses bureaux à Londres. L’EMEA estune “agence communautaire”, autre-ment dit un organisme de droit publiceuropéen. Elle dépend de la DirectionGénérale industrielle de la Commissioneuropéenne (DG Enterprise). L’EMEA, représentée légalement parson directeur exécutif, est dotée d’unconseil d’administration (managementboard) composé de 34 membres(2 représentants par État membre,2 représentants du Parlement euro-péen et 2 représentants de la Com-mission européenne). Elle dispose de trois commissionsscientifiques qui sont responsables dela préparation des avis rendus parl’EMEA sur les questions relatives àl’évaluation des médicaments à usa-ge humain d’une part, vétérinaired’autre part. La commission responsable des médi-caments destinés à l’Homme, cou-ramment appelée Commission desspécialités pharmaceutiques (Com-mittee for Proprietary MedicinalProducts ou CPMP), est composée de30 membres (2 par État membre), etse réunit chaque mois. Une commis-sion distincte rend exclusivement desavis sur les médicaments orphelins(Committee for Orphan MedicinalProducts ou COMP).

� Le CVMP ou Committee for VeterinaryMedicinal Products est chargé desmédicaments à usage animal. Un organigramme (non daté) del’EMEA est disponible en langue fran-çaise à http://www.emea.eu.int/pdfs/ general/admin/organigram/3129101fr.pdf . La liste des membres du CPMP esten ligne à http://www.emea.eu.int/htms/aboutus/cpmp.htm. En ce qui concerne les textes régle-mentaires définissant le rôle et lesobjectifs de l’Agence et de ses com-missions, l’EMEA renvoie, à Eudralex,sur le site “Pharmaceuticals” de DGEnterprise : http://dg3.eudra.org/F2/ eudralex/index.htm.Une vue d’ensemble synthétique surla législation du médicament enEurope et les rôles respectifs des dif-férentes institutions concernées(Commission, DG Enterprise, EMEA,etc.) est téléchargeable à http://phar-macos.eudra.org/F2/pharmacos/docs/brochure/pharmaeu.pdf.Enfin, il est utile de savoir que le site del’EMEA est seulement l’un des 6 sitescommunautaires sur le médicamenten Europe. L’accès simultané àl’ensemble des sites concernés se faitvia “Eudra Portal” à http://eudrapor-tal.eudra.org. Financement. En 1999, 2000 et 2001,l’EMEA a été financée à environ 25 %par une subvention provenant de laCommunauté Européenne, à environ70% par les redevances industrielleset à 5% par des fonds “autres” (sour-ce : rapport annuel 2001 de l’EMEA,téléchargeable à http://www.emea.eu. int/htms/general/direct/ar.htm). La redevance payée par une firmepour l’examen d’une demande d’auto-risation de mise sur le marché d’unespécialité pharmaceutique données’élève à 200 000 c, auxquels s’ajou-tent 20 000 c supplémentaires pourchaque dosage et/ou forme galéniqueadditionnelle du médicament et, le caséchéant, 5 000 c pour chaque pré-sentation supplémentaire d’un dosa-ge ou d’une forme galénique donnée.Si une firme demande un avis scien-tifique à l’EMEA, la redevance varierade 30 000 à 60 000 c selon le nombrede disciplines scientifiques impliquéesdans l’expertise.

Présence de publicité. Non.

Devenir des données personnellesfournies par les internautes. Pas dedonnées personnelles demandées.

Politique éditoriale. Le code deconduite de l’EMEA (http://www.emea. eu.int/pdfs/general/admin/Conduct/3767499FR.pdf) insiste avec force sur lefait que l’ensemble des travaux réali-sés par l’Agence sont et doivent resterhautement confidentiels. Les membresdu conseil d’administration, lesmembres des commissions et lesexperts s’engagent par écrit et sonttenus, leur vie durant, à la plus gran-de discrétion. Le même code deconduite affirme l’importance de rendrepubliques toutes les informations sus-ceptibles d’influer sur la santé descitoyens européens. Le site web de l’EMEA n’est que lapartie visible de l’iceberg : on n’y trou-ve que les documents ou les informa-tions que l’EMEA a décidé de rendre

publiques, après consultation desindustriels concernés.Le résultat de cette double contrainteest une politique éditoriale du site insuf-fisamment explicitée et une politiquede transparence confuse. Quelquesparagraphes explicatifs dispersés dansles sections du site informent sur lestypes de documents et d’informationsque l’EMEA accepte de mettre à dis-position des citoyens et des profes-sionnels de santé, mais le plus sou-vent sans en expliciter clairement lesraisons. Quelques documents indi-quent que la question de la transpa-rence est une préoccupation del’EMEA (lire, par exemple, le compterendu de l’atelier “A clear step forward :Transparency at the EMEA” consul-table à http://www. emea.eu.int/htms/general/manage/ar.htm). L’ExternalCatalogue of EMEA Documents(http://194.81.125.53/EMEAApps/dbCat/OraExternalCatalogue.htm),catalogue assorti d’un moteur derecherche spécifique et rassemblantla totalité des documents produitsdepuis le 1er décembre 2000 au seinde l’EMEA, quelle qu’en soit la nature,catégorise ces documents selon leurdegré de confidentialité : P (documentpublic), Rt (document sous embargotemporaire, titre non masqué), Ct(document confidentiel, titre non mas-qué), R (document sous embargo tem-poraire, titre masqué) et C (documentconfidentiel, titre masqué). Ainsi, les109 rapports d’évaluation de médica-ments produits par l’EMEA en 2001portent tous un titre masqué(“Assessment Report of a product”) etsont tous classés C (confidentiels). Latransparence de l’EMEA consiste, ici,à expliciter que toutes ses évaluationsscientifiques dans leur version com-plète, y compris des évaluations demédicaments autorisés, sont et res-teront confidentielles. Les rapportseuropéens publics d’évaluation(EPARs), résumés des rapports scien-tifiques complets élaborés en concer-tation avec chaque firme concernée,n’ont pas systématiquement le statutde document public (P) : si bonnombre sont sous embargo tempo-raire avec titre masqué (R), certainssont classés confidentiels (C), ce quiest paradoxal pour un rapport public.Les industriels ont en fait le droit defaire marche arrière pour retirer le dos-sier qu’ils avaient soumis jusqu’àquelques minutes avant que le CPMPne rende son avis : dans ce cas defigure (plus de 50 dossiers concernésdepuis 1995), le résultat des évalua-tions scientifiques reste confidentiel.L’avis en version intégrale de la com-mission des spécialités médicalesconcernant l’AMM d’un médicament(“CPMP opinion”), sur laquelle s’appuiela Commission européenne pourprendre la décision finale et officiellede mise sur le marché est et resteconfidentiel. Seul un avis résumé estrendu public et ce, à l’occasion de lademande initiale d’AMM. En effet, lesavis en version intégrale ou résuméedu CPMP concernant les demandesde révision ultérieures de l’AMM nesont pas systématiquement renduespubliques. Par ailleurs, lorsqu’un médicament estautorisé sur la base d’une opinionmajoritaire au sein du CPMP, les argu-

ments scientifiques de la minoritéopposée à la mise sur le marché nesont jamais explicités publiquement. On pourrait s’attendre à ce que la confi-dentialité des données s’appliqueexclusivement aux procédés indus-triels de fabrication des substances,mais les données scientifiques dispo-nibles, qu’elles soient précliniques oucliniques, sont loin d’être livrées sys-tématiquement au public. Les raisons générales conduisant àdonner un statut confidentiel, tempo-raire ou définitif, à certains documentsproduits par ses commissions ne sontqu’exceptionnellement explicitées parl’EMEA.Politique de mise à jour. Certainessections (alias modules) des EPARssont assez régulièrement mises à jour,et notamment leur module 8, qui décritles mesures prises postérieurement àla mise de la spécialité pharmaceu-tique concernée sur le marché com-munautaire. La fiche de présentationde chaque médicament autorisé signa-le quels modules ont été révisés etindique le numéro (et non la date) dela dernière révision. Quant à la naturedes révisions effectuées, elle n’estqu’exceptionnellement signalée à l’inté-rieur des textes : pas de notice intro-ductive, pas de traitement graphique(texte en italique ou en gras, souli-gnement ou surlignage) qui permet-trait au lecteur de savoir précisémentce qui a changé dans les documentsmarqués comme révisés.Pour couronner cette politique invrai-semblable, le dernier item qui appa-raît noir sur blanc dans chacun desmodules des EPARs, à savoir la datede dernière mise à jour du document,n’est jamais renseigné. C’est semoquer littéralement du public.Auteur(s). Plus de 3 000 experts euro-péens sont mis à disposition del’EMEA par les autorités compétentesdes quinze États membres pour réa-liser les travaux d’évaluation sur les-quels s’appuient les deux commis-sions scientifiques de l’EMEA pourrendre leurs avis.La liste des noms des experts euro-péens, classés par pays, est en ligneà http://www.emea.eu.int/pdfs/abou-tus/ExpertsCo.pdf. Leurs domainesde compétence et les déclarations deconflits d’intérêt ne sont pas mention-nés dans cette liste, mais l’EMEA affir-me les donner à toute personne quiles demande.

Informations vérifiées le 7 mars 2002

©LRP