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Article original La chirurgie du kyste hydatique pulmonaire au Mali S. Yéna*, Z.Z. Sanogo, A. Kéïta, D. Sangaré, S. Sidibé, A. Delaye, D. Doumbia, A. Diallo, S. Soumaré Service de chirurgie « A », hôpital du Point G, BP 333, Bamako, Mali RE ´ SUME ´ Introduction : L’hydatidose pulmonaire n’a pas fait l’objet de beaucoup d’études au Mali. Objectif : Répertorier les cas de kystes hydatiques du poumon opérés au Mali, afin d’analyser leurs aspects chirurgicaux. Méthodes et patients : Il s’agit d’une étude rétrospective et descriptive de cas consécutifs et non sélectionnés. De 1960 à l’an 2000, onze cas de kystes hydatiques du poumon ont été opérés au Mali. Le dossier le plus ancien date de 1968 et le plus récent de 2000. Tous ces patients ont été pris en charge dans le service de chirurgie « A » de l’Hôpital du Point G à Bamako. Résultats : L’âge des patients était compris entre 4 et 42 ans avec une moyenne de 20 ans. Le sexe ratio F/H a été de 1,75. La circonstance de découverte a été une toux dans huit cas. Sept patients avaient au moins un signe de kyste compliqué. Sur un total de 12 kystes, 9 étaient localisés à droite. Le traitement du kyste a consisté en une kystectomie accompagnée d’une résection atypique du parenchyme chez six patients et en une exérèse réglée du lobe atteint chez cinq autres. Les suites opératoires ont été compliquées dans cinq cas. Il n’y a pas eu de mortalité. L’anatomopathologie a confirmé l’hydatidose pulmonaire dans tous les cas. Conclusion : La fréquence de l’hydatidose pulmonaire est paradoxalement faible au Mali. Les patients consultent tardivement, ce qui explique en partie une proportion élevée d’exérèse parenchymateuse lors de leur traitement chirurgical. © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS Hydatidose pulmonaire / Traitement chirurgical / Résultats / Mali ABSTRACT Surgery of the pulmonary hydatid disease in Mali. Introduction: The pulmonary hydatid disease has not been the subject of many studies in Mali. Objective: List the cases hydatid cyst of the lung operated on in Mali, in order to analyze their surgical aspects. Methods and patients: This is a retrospective study of consecutive and non-selected cases. From 1960 to 2000, eleven cases of the pulmonary hydatid disease were operated on in Mali. The earliest case dates back to 1968 and the most recent was in 2000. All of these patients were taken care of at the « Point G Hospital » in Bamako. Results: Patients were aged between 4 and 42 years, with an estimated average at 20. The gender ratio (F/M) was 1.75. The circumstance leading to the discovery stems from 8 cases of cough. Seven patients had at least a sign of complicated cyst. Out of a total of 12 cysts, 9 were located to the right lung. The treatment of the cyst con- sisted in a kystectomy accompanied by an atypical resec- tion of the parenchyma on 6 patients and a typical resec- tion of the attacked lobe on 5 others. The operating effects were complicated in 5 cases. No mortality was reported. Anatomopathology confirmed pulmonary hydatidosis in all cases. Conclusion: Paradoxically, the frequency of pulmonary hydatidosis is low in Mali. Patients were consulted late. This explains in part the high level of lobectomy during surgical treatment. © 2002 Éditions scientifiques et médi- cales Elsevier SAS Pulmonary hydatidosis / Surgical treatment / Results / Mali Reçu le 26 septembre 2001 ; accepté le 18 février 2002. *Auteur correspondant. Tél. : +00-223-75-80-79, fax : +00-223-23-25- 93. Adresse e-mail : [email protected] (S. Yéna). Ann Chir 2002 ; 127 : 350-5 © 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés S000339440200771X/FLA

La chirurgie du kyste hydatique pulmonaire au Mali

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La chirurgie du kyste hydatique pulmonaire au Mali

S. Yéna*, Z.Z. Sanogo, A. Kéïta, D. Sangaré, S. Sidibé, A. Delaye, D. Doumbia, A. Diallo,S. Soumaré

Service de chirurgie « A », hôpital du Point G, BP 333, Bamako, Mali

RESUME

Introduction : L’hydatidose pulmonaire n’a pas fait l’objetde beaucoup d’études au Mali.Objectif : Répertorier les cas de kystes hydatiques dupoumon opérés au Mali, afin d’analyser leurs aspectschirurgicaux.Méthodes et patients : Il s’agit d’une étude rétrospectiveet descriptive de cas consécutifs et non sélectionnés. De1960 à l’an 2000, onze cas de kystes hydatiques dupoumon ont été opérés au Mali. Le dossier le plus anciendate de 1968 et le plus récent de 2000. Tous ces patientsont été pris en charge dans le service de chirurgie « A » del’Hôpital du Point G à Bamako.Résultats : L’âge des patients était compris entre 4 et 42ans avec une moyenne de 20 ans. Le sexe ratio F/H a étéde 1,75. La circonstance de découverte a été une touxdans huit cas. Sept patients avaient au moins un signe dekyste compliqué. Sur un total de 12 kystes, 9 étaientlocalisés à droite. Le traitement du kyste a consisté en unekystectomie accompagnée d’une résection atypique duparenchyme chez six patients et en une exérèse réglée dulobe atteint chez cinq autres. Les suites opératoires ontété compliquées dans cinq cas. Il n’y a pas eu de mortalité.L’anatomopathologie a confirmé l’hydatidose pulmonairedans tous les cas.Conclusion : La fréquence de l’hydatidose pulmonaireest paradoxalement faible au Mali. Les patients consultenttardivement, ce qui explique en partie une proportionélevée d’exérèse parenchymateuse lors de leur traitementchirurgical. © 2002 Éditions scientifiques et médicalesElsevier SAS

Hydatidose pulmonaire / Traitement chirurgical /Résultats / Mali

ABSTRACTSurgery of the pulmonary hydatid disease in Mali.Introduction: The pulmonary hydatid disease has notbeen the subject of many studies in Mali.Objective: List the cases hydatid cyst of the lung operatedon in Mali, in order to analyze their surgical aspects.Methods and patients: This is a retrospective study ofconsecutive and non-selected cases. From 1960 to 2000,eleven cases of the pulmonary hydatid disease wereoperated on in Mali. The earliest case dates back to 1968and the most recent was in 2000. All of these patients weretaken care of at the « Point G Hospital » in Bamako.Results: Patients were aged between 4 and 42 years, withan estimated average at 20. The gender ratio (F/M) was1.75. The circumstance leading to the discovery stemsfrom 8 cases of cough. Seven patients had at least a signof complicated cyst. Out of a total of 12 cysts, 9 werelocated to the right lung. The treatment of the cyst con-sisted in a kystectomy accompanied by an atypical resec-tion of the parenchyma on 6 patients and a typical resec-tion of the attacked lobe on 5 others. The operating effectswere complicated in 5 cases. No mortality was reported.Anatomopathology confirmed pulmonary hydatidosis in allcases.Conclusion: Paradoxically, the frequency of pulmonaryhydatidosis is low in Mali. Patients were consulted late.This explains in part the high level of lobectomy duringsurgical treatment. © 2002 Éditions scientifiques et médi-cales Elsevier SAS

Pulmonary hydatidosis / Surgical treatment / Results /Mali

Reçu le 26 septembre 2001 ; accepté le 18 février 2002.*Auteur correspondant. Tél. : +00-223-75-80-79, fax : +00-223-23-25-93.Adresse e-mail : [email protected] (S. Yéna).

Ann Chir 2002 ; 127 : 350-5© 2002 Éditions scientifiques et médicales Elsevier SAS. Tous droits réservés

S000339440200771X/FLA

INTRODUCTION

L’hydatidose reste un problème d’actualité. C’estune parasitose mondialement repartie, d’évolutionspontanée mortelle et la chirurgie occupe une largeplace dans son traitement. C’est une pathologieendémique au Maghreb et demeure un véritableproblème de santépublique. En l’an 2000, encore auMaroc, la chirurgie de l’hydatidose pulmonairereprésentait à elle seule plus de la moitié desactivités chirurgicales des services de chirurgie tho-racique [1]. Au Mali, malgré l’élevage extensif etintensif de moutons et des conditions économiques,culturelles et climatologiques semblables à cellesdes pays du Maghreb, du moins dans ses partiesNord, l’hydatidose humaine est rarement rencontréeen pratique médicale. Des études ont déjà étémenées sur les aspects épidémiologiques, cliniqueset thérapeutiques de cette parasitose grave au Mali[2]. Dans sa localisation pulmonaire, son traitementest essentiellement chirurgical. Le but de ce travailest de rapporter notre expérience en matière dechirurgie de l’hydatidose pulmonaire. Cette étude,qui s’ inspire en partie des travaux précédents, est lerésultat d’une compilation des cas pris en chargedans les principales structures chirurgicales deBamako.

MÉTHODES ET PATIENTS

Il s’agissait d’un travail rétrospectif et descriptifportant sur les cas de kyste hydatique du poumonopérés dans les hôpitaux universitaires du Mali dejanvier 1968 au 31 décembre 2000. L’enquête com-prenait d’une part, l’ interrogatoire de l’ensemble despraticiens hospitaliers, et d’autre part l’analyse desdossiers des patients et des protocoles opératoires.

En quatre décennies, il y avait 11 patients opérés dekyste hydatique pulmonaire. Il s’agissait de patientsopérés de façon consécutive et non sélectionnéedans le seul centre hospitalo-universitaire du Point« G ». Les critères d’analyses retenus ont été l’âge,le sexe, le mode découverte ou le motif de laconsultation, les données de l’ imagerie, du traite-ment et des suites à l’hôpital. Au total, l’âge despatients était compris entre quatre et 42 ans, avecune moyenne de 20 ans. Le sexe ratio F/H a été de1,75.

RÉSULTATS

Les circonstances de découverte de la maladiehydatique pulmonaire ont été très variables. Huitpatients parmi les 11 ont consulté pour une touxpersistante. Cette toux était accompagnée de douleurthoracique quatre fois, d’expectoration purulentetrois fois et hémoptysie deux fois. Chez troispatients, la découverte était fortuite à la suite d’uneradiographie du thorax.

La radiographie du thorax (Tableau 1)

Il s’agissait principalement du diagnostic d’uneopacité pulmonaire unique de tonalité hydrique (Fig1). L’opacité était ronde, ovalaire ou polylobée dansces cas. Mais l’ image radiologique évoquait parfoisune pneumopathie chronique localisée. Le diamètremoyen des kystes à la radiographie du thorax étaitde 8 cm avec des extrêmes allant de 5 à 12 cm.Tenant compte du nombre de kystes, il y avait autotal 12 kystes. Dans dix cas il était unilatéral etmonokystique et dans un cas, monokystique etbilatéral.

Tableau 1. Caractéristiques radiographiques à partir de 1990

Observation Image Taille cm Signes de souffrance Nombre de kyste

N° 6 Opacité ronde homogène 6 et 7 Niveau hydro-aérique 1 + 1N° 7 Opacité ronde homogène 8 Niveau hydro-aérique 1N° 8 Opacité ronde polylobée homogène 7 Non 1N° 9 Opacité ronde homogène 5 Niveau hydro-aérique 1Cliché n° 1N° 10 Opacité inhomogène 8 Pneumopathie 1

ExcavationN° 11 Opacité inhomogène 12 Pneumopathie 1Cliché n° 2

La chirurgie du kyste hydatique pulmonaire au Mali 351

L’échographie abdominale

A partir de 1990, elle a été systématique à larecherche de localisation intra-abdominale associée.

Seul un patient avait une localisation hépatique(segment V).

Le traitement (Tableau 2)

En préopératoire, aucun patient n’avait eu un traite-ment médical spécifique. En revanche, en postopé-ratoire, un traitement par le Mebendazole (50 à100 mg/kg/jour ) a été institué chez six patients defaçon systématique. Le traitement chirurgical radi-cal a été effectué dans tous les cas. Lors de lathoracotomie, l’ intubation trachéale a été non sélec-tive chez l’ensemble des patients. La voie d’abord aétéune thoracotomie postérolatérale dans neuf cas etune thoracotomie latérale dans deux cas. En pero-pératoire, et dans tous les cas, le diagnostic de kystehydatique a étéconfirmégrâce à leur aspect macros-copique caractéristique. Avant 1990, le sérum for-molé à 4 % était utilisé comme scolicide. Après1990, l’eau oxygénée à 10 % a été utilisée pour laprotection du champ opératoire et pour l’ injectionintrakystique. Avant son ablation, le kyste étaitstérilisé à l’aide d’un scolicide, puis vidé de soncontenu par un gros trocart, en faisant bien attentionde ne pas contaminer le reste de la cavité pleurale.Un traitement conservateur avec recherche et traite-ment des fistules bronchiques a été pratiqué chez sixpatients (une kystectomie et une résection du dômesaillant six fois et une périkystectomie avec unerésection atypique une fois). Chez les cinq autrespatients, une exérèse réglée de nécessité a été

Fig. 1. Opacité en boulet de canon (cliché de face).

Tableau 2. Données du traitement et les suites

Dossiers (année) Localisation Abord Traitement suites

N° 1 (1968) LM TPL Lobectomie moyenne SimplesN° 2 (1976) LID TPL Kystect + RD PyothoraxN° 3 (1977) LSD TPL Kystect + RD SimplesN° 4 (1982) LM TPL Lobectomie moyenne SimplesN° 5 (1982) LSD TPL Lobectomie supérieure SimplesN° 6 (1990) LSG TPL Kystect + RD Bronchospasme + Bradycardie

LSD TPL Kystect + RDN° 7 (1990) LSD TPL Kystect + RD Drainage prolongéN° 8 (1991) LM + Foie TL + Phrénotomie Kystect + Wedge Simples

PérikystectN° 9 (1994) LIG TL Kystect + RD Atélectasie postopératoire

Cliché n° 1N° 10 (1999) Petite scissure TPL Bilobectomie Sup et Moy Fistule bronchiqueN° 11 (2000) LSG TPL Lobectomie supérieure Simples

Cliché n° 2

LSD : lobe supérieur droit ; LSG : lobe supérieur gauche ; TPL : thoracotomie postérolatérale, TL : thoracotomie latérale ; LM : lobe moyen ;Kystect : kystectomie ; Périkystect : périkystectomie ; RD : résection du dôme saillant ; Sup : supérieure ; Moy : moyenne.

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effectuée en raison de l’état de destruction paren-chymateuse (quatre lobectomies et une bilobectomiesupérieure et moyenne). Dans ces cas, le kyste étaitpathologique et surinfecté.

Les suites opératoires (Tableau 2)

Cinq patients ont présenté des complications posto-pératoires : une bradycardie avec bronchospasmeune fois, un drainage prolongé une fois, une atélec-tasie une fois, un pyothorax une fois, et une fistuleune fois. Il n’y a pas eu de mortalité hospitalière.Avec un recul moyen de 1 an, il n’y a eu aucunerécidive de kyste hydatique pulmonaire chez lespatients opérés à partir de 1990. Après ce délai, tousles patients ont été perdus de vue.

L’examen anatomopathologique de la pièce opé-ratoire a pu être effectué dans sept cas sur 11. Cheztous ces patients les lésions observées ont étécompatibles avec une maladie hydatique pulmo-naire.

COMMENTAIRES ET DISCUSSIONS

La méthodologie

Depuis l’ indépendance du Mali, tous les travauxscientifiques cliniques publiés sur les kystes hydati-ques pulmonaires ont été répertoriés. Le premier casa été opéré en 1968 à l’hôpital du Point G et publiéen 1974 par Dembélé et Sangaré [2]. Notre travailrévèle que tous les kystes hydatiques pulmonairesont été opérés au centre hospitalo-universitaire duPoint « G ». L’enquête menée dans les autres centresn’a relevé aucun cas pris en charge dans ces struc-tures. Mais cette enquête ne fut qu’orale, car cesstructures n’archivant que rarement le dossier papieret l’ imagerie étant confiée aux patients. Ailleurs, ceshôpitaux n’ont pas eu de praticiens chirurgicaux àvocation thoracique depuis les années d’ indépen-dance. Ces constats suggèrent qu’une partie deshydatidoses pulmonaires reste méconnue au Mali.

Le diagnostic

L’âge et le sexeLa moyenne d’âge de 21 ans se situe dans lafourchette classique de l’âge de découverte de lamaladie hydatique en Afrique [3,4]. Elle peut se

manifester très tôt à l’enfance [5], comme l’ illustrele cas des deux enfants de 4 ans dans ce travail. Ladécouverte à l’âge de moins d’un an est possible [6].Une prédominance féminine a été constatée dansnotre travail. Dans la localisation hépatique, le sexeféminin semble être plus atteint [3], alors que dansles formes pulmonaires, plusieurs auteurs soulignentde prédominance masculine [4,5,7].

Les circonstances de découverteAucun motif de consultation évoqué par les patientsn’est pathognomonique de la maladie hydatiquepulmonaire [6]. Les manifestations cliniques relè-vent des signes de complications. La parasitose peutévoluer longtemps à bas bruit, et n’être reconnueque de façon fortuite. Dans les pays à plus hautniveau de vie, la découverte est faite dans une trèslarge majorité de cas (90 %) lors des bilans systé-matiques [8]. La seule traduction clinique pathogno-monique de l’hydatidose pulmonaire est la rareextériorisation de matériels hydatiques par vomique.Selon le travail de Halezeroglu et al. [8] sur unéchantillon de 46 patients, la fréquence des signesest proportionnelle à la taille du kyste (p = 0,004).Mais les signes n’étant pas spécifiques de la maladiehydatique, seule l’ imagerie permet d’orienter etd’affirmer le diagnostic.

L’imagerieDans les formes typiques, la radiographie conven-tionnelle permet à elle seule d’affirmer le diagnosticdans près de 90 % des cas [9]. L’ image d’un kystepeut faire discuter d’autres diagnostics comme unhamartome, un kyste bronchogénique, un tubercu-lome, un cancer périphérique ou une métastaseunique [10]. Ces variations rendent l’ interprétationradiographique difficile surtout si le kyste malades’accompagne de remaniement parenchymateux.Grâce au scanner thoracique, d’amples renseigne-ments obtenus sur le diagnostic des kystes hydati-ques et sur l’état du reste du parenchyme pulmo-naire, peuvent permettre en préopératoire deplanifier la technique opératoire. Cet examen oné-reux n’a été disponible au Mali qu’en 1999.

Le traitement chirurgical

L’abord thoracique classique est la thoracotomielatérale ou la postérolatérale en cas de lésion unique

La chirurgie du kyste hydatique pulmonaire au Mali 353

[9]. En cas de kyste bilatéral, et à condition que leslésions soient antérieures, une exérèse en un tempsest possible par sternotomie médiane [5]. En cas delocalisation simultanée pulmonaire droite et hépati-que, le traitement est possible en un seul tempsopératoire par thoraco-phrénotomie. S’ il faut opéreren deux temps, la priorité sera donnée au tempsthoracique [10]. Actuellement les techniques dechirurgie mini-invasive comme la vidéochirurgiethoracique et la chirurgie thoracique vidéo-assistéereprésentent une approche diagnostique et thérapeu-tique d’avenir au Mali. Pour le traitement du para-site, la technique de Ugon qui est possible dans 30 à60 % des cas [10,11], n’a pas été pratiquée dansnotre travail. La technique de Barret associée à unestérilisation préalable du kyste par l’utilisation deproduit scolicides à l’aide de deux seringues [4,7]est la méthode que nous avons pratiqué chaque foisque le kyste était plein. La kystectomie avec unerésection du dôme saillant qui est l’ interventionhabituelle, lorsque le périkyste est resté souple queles fistules bronchiolaires sont minimes, est possibledans 90 % des cas si le kyste est sain [5,10]. Uncapitonnage dans la loge est nécessaire en veillant àne pas laisser de cavité résiduelle ou cruentée,sources de complication postopératoire grave. Larésection atypique du parenchyme pulmonairepathologique peut être pratiquée [5,10]. L’ indicationd’une exérèse réglée en cas de destruction massiveparenchymateuse. Elle peut être nécessaire dans 20à 35 % des cas kystes hydatiques pulmonaires com-pliqués [4,10,11]. A l’extrême, de façon exception-nelle une pneumonectomie peu être nécessaire [4,5].

Les suites opératoires

Les suites d’une chirurgie de kyste hydatique pul-monaire sont généralement simples dans plus de90 % des cas [5]. Les mauvais résultats sont le plussouvent en rapport avec la chirurgie des cas com-pliqués, liés soit à l’évolution du kyste lui-même(surinfection, fistule bronchique, hémorragie, rema-niement parenchymateux irréversible), soit au ter-rain (altération de l’état général). En pratique, lamorbidité postopératoire n’excède guère les 10 %[9,11]. La mortalité globale est faible et de l’ordrede 1 à 4 % [4,5,7,11]. Les récidives postopératoiressont rares allant de 2 à 4 % des cas [5,7,10]. Cesrécidives sont surtout rencontrées en zone d’hype-rendémie. En pratique, elles sont le résultat soit

d’une greffe peropératoire, soit d’un kyste méconnu,ou encore d’une réinfestation. Ces éventualités bienque rares, témoignent toute l’ importance que leclinicien doit accorder au bilan préopératoire et ausuivi régulier postopératoire d’un patient opéré dekyste hydatique pulmonaire le plan clinique, radio-logique et/ou échographique, et même sérologique[10]. Un tel suivi n’a pas été possible dans notretravail en raison des patients perdus de vue enpostopératoire, de la non-disponibilité des examenssérologiques et des difficultés socio-économiques etfinancières.

CONCLUSION

Au Mali, dans sa localisation pulmonaire, le kystehydatique est découvert généralement au stade decomplication. Le diagnostic positif est essentielle-ment basé sur les signes cliniques d’atteinte pulmo-naire et sur la radiographie du thorax. Dans lesformes compliquées, les suites chirurgicales peuventêtre beaucoup plus complexes et sont fonction dudegré d’atteinte pulmonaire et du terrain du patient.L’anatomo-pathologie est toujours nécessaire pourécarter d’autres lésions broncho-pulmonaires. Bienqu’apparemment peu fréquent dans la littératuremédicale malienne, l’hydatidose doit cependant êtreconnue et sa prévention doit être faite, afin d’éviterla diffusion de cette parasitose grave telle que laconnaissent les pays d’hyperendémies du Maghrebvoisin.

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