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présente
L’ACCES DES PERSONNES SOURDES
A LA CULTURE
ENQUÊTE 2013
* * * *
avec la collaboration de
Publication Mai 2014
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
CRé – www.rayondecrits.fr
2
L’ACCES DES PERSONNES SOURDES A LA CULTURE
REALISEE PAR CRE – COMPAGNIE RAYON D’ECRITS
ET 6 ETUDIANTS DE L’ESSEC
Alice DEAN, Auriane DE CURIERES DE CASTELNAU, Clément DE GUYON DE GEIS DE PAMPELONNE, François DEISS, Roxane DE MOULINS DE ROCHEFORT,
Adélaïde DE WAVRIN
De janvier à juin 2013 dans le cadre du PCE - Projet Conseil en Entreprise
ENCADRES PAR CRE
Sandrine CHERON et Colombe BARSACQ
avec le soutien d’Isabelle VOIZEUX, artiste associée de CRé et vice-présidente de Dialogue et Liberté des Sourds en Val d’Oise
RESULTATS DE L’ETUDE RETRAVAILLES
par Carla ADRA (étudiante en Anthropologie et Ethnologie) et Charlotte LORIN (étudiante en M1 d’interprétariat en Langue des Signes Française
à l’Université de Lille)
dans le cadre de stages au sein de CRé en décembre 2013 et janvier 2014
NOS REMERCIEMENTS CHALEUREUX A :
Françoise REY – Agnès KERECKI – Wolfgang DICK de l’ESSEC
Ainsi qu’à Alain MILLOT, Président de Dialogue et Liberté des Sourds en Val d’Oise - Olivier SCHETRIT - Yann CANTIN
Et merci à toutes les personnes sourdes qui ont bien voulu répondre ainsi qu’aux lieux culturels et institutions médico-sociales qui ont pris le temps de
participer à cette enquête.
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
CRé – www.rayondecrits.fr
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SOMMAIRE
AVIS AU LECTEUR . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.4
LA LOI N°2005-12 DU 11 FEVRIER 2005
OBJECTIF PRINCIPAL
DOMAINES IMPACTES
UN OBJECTIF DURABLE POUR LA SOCIETE FRANÇAISE, UNE AFFLUENCE AMELIOREE POUR LES
ETABLISSEMENTS
LA LEGISLATION DES ERP, MISE EN APPLICATION DE LA LOI : VOTRE BATI ET VOS PRESTATIONS DOIVENT
ETRE ADAPTES A TOUS
QUATRE PRIORITES POUR LE COMITE INTERMINISTERIEL DU HANDICAP (CIH)
UN IMPERATIF
INTRODUCTION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.8
ORIGINE DU MOT HANDICAP
VAUT-IL MIEUX PARLER DE PERSONNES MALENTENDANTES PLUTOT QUE SOURDES ?
UNE REVOLUTION CULTURELLE EN MARCHE : L’APPROCHE SOCIETALE
L’ETUDE « L’ACCES DES PERSONNES SOURDES A LA CULTURE » . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.16 OBJECTIFS ET AMBITIONS
RESULTATS
STRUCTURES ET ACCESSIBILITE
LE PUBLIC SOURD
LE PUBLIC SOURD ET LA CULTURE
ACTIVITES OU EVENEMENTS ORGANISES POUR LE PUBLIC SOURD
LES FREINS A LA VISITE DES LIEUX CULTURELS
DISPOSITIFS DE MISE EN ACCESSIBILITE
ADAPTER L’AMENAGEMENT ET L’EQUIPEMENT DES LIEUX
SENSIBILISER ET FORMER LES PERSONNELS A L’ACCUEIL DES PUBLICS SOURDS
RENDRE ACCESSIBLES LES CONTENUS ARTISTIQUES ET CULTURELS
METTRE EN PLACE UNE COMMUNICATION EXTERNE EN S’APPUYANT SUR DES RELAIS
INSTITUTIONNELS AU SEIN DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DES ASSOCIATIONS
INTEGRER DES USAGERS OU UN COLLABORATEUR HANDICAPE
TARIFS ET INFORMATIONS DES DISPOSITIFS TECHNIQUES D’ACCESSIBILITE
CONCLUSION . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.32
SOURCES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.36
ANNEXES . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . P.37
CRE
MISSION HANDI-CAPACITES / L’ESSEC
AFFICHE
CONTACTEZ-NOUS !
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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AVIS AU LECTEUR
La notion de culture se réfère dans l’étude qui suit à tout ce qui est en rapport avec
l’artistique et le rôle social. Dans la vie, l’art joue un rôle primordial. Aujourd’hui, l’Homme
s’épanouit et grandit au contact des œuvres, livres, films, musiques, peintures etc. Mais si la
culture n’est pas accessible, elle ne peut être transmise. En effet, les œuvres sont, très
rarement, adaptées aux personnes sourdes.
Ainsi, comment la population sourde française peut-elle accéder au patrimoine commun
qu’est la culture française si les institutions culturelles elles-mêmes ne s’adaptent pas à elle?
Ce sont les questions qui se sont posées à nous et auxquelles nous avons chercher une réponse en rencontrant 100 personnes sourdes du département du Val d’Oise, parmi celles-ci 87 personnes ont répondu à notre questionnaire, qui a été produit sous forme écrite et également dans des entretiens en langue des signes. Une cinquantaine d’établissements recevant du public ont reçu le questionnaire 24 ont envoyé leur réponse. 90% des structures reconnaissent ne pas avoir connaissance des besoins et des demandes
des personnes sourdes en matière d’accès à la culture, celles-ci pourtant ont témoigné de
leur soif d’accès à la culture. Nous prenons donc en compte ce fossé qui existe espérant que
vous trouverez des réponses très concrètes et parfois simples à mettre en œuvre pour
favoriser un meilleur accès à la Culture pour tous.
Des organisations et des associations sont néanmoins sensibles à cette discrimination et
réfléchissent à l’évolution de leurs pratiques.
* * * * Les informations qui suivent dans notre AVIS AU LECTEUR sont disponibles dans l’ouvrage Handicap Culture ERP, employeurs, salariés - Les clés d’une culture de l’égalité - Editions La Scène Le handicap est parfois invisible et survient majoritairement après 16 ans, plus encore après
40 ans. Il n’est donc pas seulement question des personnes qui accèderaient pour la
première fois à la culture, mais bien de ceux qui sont vos spectateurs, vos visiteurs, vos
salariés, et qui auraient le goût de s’y maintenir quoi qu’il arrive.
Avant la loi du 11 février 2005, trois handicaps étaient reconnus : moteur, sensoriel, mental.
Désormais ils sont au nombre de 5 : leur ont été associés les maladies psychiques, les
situations de handicap invalidants ou invisibles.
La reconnaissance officielle de la LSF en tant que langue à part entière ne date que de 2005.
Certains chiffres couramment utilisés sont en outre anciens car issus de l’enquête
Handicaps, incapacités, dépendance (HID), réalisée par l’Institut National de Recherche et
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des Etudes Economiques (INSEE) et par la Direction de la Recherche, des Etudes er de
l’Evaluation et des Statistiques (DREES) entre 1998 et 2001. Selon l’AGEFIPH (l’Association
pour la Gestion, la Formation et l’Insertion des Personnes Handicapées), au cours de sa vie
active une personne sur deux sera confrontée à une situation de handicap, qu’elle soit
durable ou réversible, dont 12% seulement à la naissance.
Avant d’entrer dans le cœur des résultats de l’étude menée (p.36), nous vous invitons à
prendre connaissance des éléments de contexte suivants, afin de cerner la démarche et
l’objectif de la présente étude.
LA LOI N°2005-12 DU 11 FEVRIER 2005
OBJECTIF PRINCIPAL : « ( …) l’égalité des droits et des chances, la participation et la
citoyenneté des personnes handicapées ». C’est la principale Loi sur les droits des personnes
handicapées depuis celle du 30 juin 1975. Elle a pour objectif une meilleure insertion dans la
société française des personnes en situation de handicap, quel que soit le type de leur
handicap, en leur permettant l’accès aux mêmes droits que chaque citoyen, en rendant
accessibles tous les lieux de la vie publique. Il importe que la chaine des déplacements soit
respectée, incluant les transports, l’aménagement de la voirie, des espaces publics et des
bâtiments dans leur ensemble.
Votre Etablissement Recevant du Public (ERP) est donc directement concerné par cette loi
qui oblige votre bâti et vos prestations à être accessibles à toutes les personnes touchées
par un handicap. Ces règles concernent également les installations Ouvertes au Public (IOP) :
installations, espaces publics ou privés desservant les ERP (tribunes, gradins, jardins, loges
etc.).
DOMAINES IMPACTES PAR QUELQUES EXTRAITS :
Accessibilité du bâti et accès aux prestations : « Est considéré comme accessible aux
personnes handicapées tout bâtiment ou aménagement permettant, dans des conditions
normales de fonctionnement, à des personnes handicapées, avec la plus grande autonomie
possible de circuler, d’accéder aux locaux et équipements d’utiliser les équipements, de se
repérer, de communiquer et de bénéficier des prestations en vue desquelles cet
établissement ou cette installation a été conçu. Les conditions d’accès des personnes
handicapées doivent être les mêmes que celles des personnes valides ou, à défaut,
présenter une qualité d’usage équivalente. » (Art R 111-19-2)
Participation et citoyenneté : « (…) toute personne handicapée a droit à la solidarité de
l’ensemble de la collectivité territoriale, qui lui garantit en vertu de cette obligation, l‘accès
aux droits fondamentaux reconnu à tous les citoyens ainsi que le plein exercice de sa
citoyenneté. » (Art. L 114-21)
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Actions (tout ce qui suit s’applique dans le domaine de la formation et de l’accès à la
culture) : « (…) – des actions s’adressant directement aux personnes handicapées ; des
actions visant à informer, former, accompagner, soutenir les familles et les aidants ; des
actions visant à favoriser le développement des groupes d’entraides mutuelle ; des actions
de formation et de soutien professionnels ; des actions d’information et de sensibilisation du
public ; des actions permettant d’établir des liens concrets de citoyenneté ; (…) des actions
pédagogiques en milieu scolaire et professionnel ainsi que dans tous les lieux d’accueil
(…) » (Art . L 114-3)
UN OBJECTIF DURABLE POUR LA SOCIETE FRANÇAISE, UNE AFFLUENCE AMELIOREE
POUR LES ETABLISSEMENTS Pour votre établissement, l‘intégration d’aménagement améliorant l’accueil ; le confort, les
prestations pour tous ne peut qu’être profitable en termes d’affluence et de retombées tant
pécuniaire qu’en terme d’enrichissement des pratiques.
La bonne mise en oeuvre de l’accessibilité des lieux recevant du public participe pleinement
du développement durable de la société française et de l’amélioration des conditions de vies
de nos concitoyennes et concitoyens.
LA LEGISLATION DES ERP MISE EN APPLICATION DE LA LOI : VOTRE BATI ET VOS
PRESTATIONS DOIVENT ETRE ADAPTES A TOUS Au 1er janvier 2015, il importe de satisfaire les besoins d’usage dans le cadre des prestations
et services, de sensibilisation et d’informations des collaborateurs d’un ERP, qui doivent
prendre en compte tous les besoins spécifiques. En cas de non respect des dispositions
légales, les sanctions prévues par la loi de 2005 sont la fermeture de l’établissement ne
respectant pas le délai de mise en accessibilité : le remboursement des subventions
publiques ; une amende de 45 000€ pour les architectes, entrepreneurs et toute personnes
de l’exécution des travaux. Une interdiction d’exercer peut être prononcée. En cas de
récidive, la peine est portée à 6 mois d’emprisonnement et à 75 000€ d’amende.
4 PRIORITES POUR LE COMITE INTERMINISTERIEL DU HANDICAP (CIH) La 1ere réunion du CIH a eu lieu le 25 septembre 2013. La feuille de route gouvernementale
qui en est issue se donne pour objectif de définir la nouvelle dynamique : une politique du
handicap pour une société plus inclusive et une citoyenneté effective des personnes
handicapées.
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Les 4 sujets majeurs de la feuille gouvernementale sont :
1. LA JEUNESSE : accompagner les parents, mieux accueillir les enfants en crèche
ouvrir les portes de l’école et des études supérieures, utiliser le numérique,
faciliter les pratiques sportives, les pratiques culturelles et l’accès aux vacances.
2. L’EMPLOI
3. L’ACCESSIBILITE : faciliter la vie d’usager et de client, la vie citoyenne et l’accès à
la culture et au sport.
4. LA CONNAISSANCE DU HANDICAP
UN IMPERATIF Un impératif découle de la feuille de route gouvernementale : se donner les moyens de
réussir la mise en accessibilité. Le constat du retard accumulé depuis 2005 appelle à une
mobilisation inédite ! Ainsi une large concertation a été mise en place jusqu’en janvier 2014
avec l’ensemble des acteurs concernés.
Principaux points de cette concertation et issus du rapport « Réussir 2015 » :
Un constat mitigé sur la mise en accessibilité des ERP existants, des transports et de
la voirie ;
Des agendas d’accessibilités programmés pour permettre aux acteurs privés et
publics d’enjamber 2015 et de poursuivre l’élan.
Nécessité d’une impulsion nationale et territoriale forte.
Une adaptation des normes d’accessibilité pour mieux prendre en compte tous les
handicaps (moteurs, sensoriel, mental ou psychique), l’évolution des techniques et
les contraintes des opérateurs.
Engager une démarche concertée privilégiant la qualité d’usage et la conception
universelle.
A toutes les préconisations obligatoires ou recommandées peuvent s’ajouter d’autres
critères liés à la labélisation TOURISME & HANICAP. Pour les connaître vous pouvez vous
référer à la liste disponible sur le site http://www.tourisme-handicaps.org/
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INTRODUCTION Avouer son ignorance, sa maladresse potentielle, sa peur de mal faire et avant tout sans
doute, celle de ne pas savoir comment faire, peut, en bien des occasions, détendre une
situation et conduire à une relation franche décontractée, force de progrès. Car être en
situation de handicap ne veut pas dire l’être pour tout et partout. Face au handicap, nous
autre Français considérons la seule incapacité, et donc, ce qui semble ne plus être possible
de faire, quand les anglo-saxons eux, apprécient ce qui est encore possible... Un autre
regard ! Une démarche que nous devrions suivre.1
Origine du mot handicap Nous articulerons notre étude autour d’une appréhension du monde des sourds et de la
surdité comme étant basés sur une notion de différence et non comme s’il s’agissait d’un
handicap2.
Le mot handicap vient de la contraction de trois mots anglais hand in cap (la main dans le
chapeau).
Vers 1660, un chroniqueur découvrait à la Mitter Tavern de Londres, un système de troc
d’objets entre deux participants. Un arbitre, le « handicapper » déterminait la différence de
valeur des deux objets, puis déposait la somme compensant l’inégalité constatée dans un
chapeau. C’était donc un système d’échange ou l’on recherchait l’équité.
A partir du milieu du XVIIIe siècle, ce mot est appliqué à la compétition équestre. Lorsque
deux chevaux de mensurations différentes concouraient ensemble, le plus léger était lesté
d’un poids appelé « handicap » afin de maintenir l’égalité de chance entre les deux.
« L’inconvénient » associé donc à la différence de poids est ici aussi comme au XVIIe siècle,
un procédé contribuant à atteindre l’équité. Par la suite ce système fut étendu à différents
sports.
Finalement, le terme fut utilisé pour désigner toute action visant à rendre plus équitable une
confrontation. Cela conduira à employer l’expression « être handicapé » en parlant des
participants désavantagés au départ d’une course. 3
De là vient à partir de 1913, le sens figuré d’entrave, de gène, d’infériorité et par extension à
partir de 1964, celui d’infériorité momentanée.
Le sens médical apparaitra, lui, vers 1950 et se généralisera ensuite pour donner la définition
que la loi reconnaît aujourd’hui et qui est assez proche de celle du sens commun.
1
Handicap Culture ERP, employeurs, salariés - Les clés d’une culture de l’égalité - Editions La Scène 2
Vient du jeu irlandais Hand in cap soit Main dans le chapeau, faisant référence au tirage au sort d’un nom dans une
chapeau, le désigné aura un défi ou sera le premier à faire quelque chose. En course hippique, l’on cherche à donner sa chance au moins bon coursier : les autres partiront donc avec un handicap. 3
http://www Handicontent.fr
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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9
Au cours des dernières décennies, le vocabulaire utilisé pour désigner les personnes
handicapées a bien évolué. Si vers 1960, on désignait ces personnes comme étant « infirmes
ou invalides », et les autres comme « normales ou valides », on parle aujourd’hui de
« personnes handicapées » ou de « personnes en situation de handicap », et de
« personnes ordinaires ». Car le handicap est encore plus lourd quand l’environnement ne
prend pas en compte les besoins de la personne handicapée. Ainsi le Handicap est le
désavantage qui résulte de la différence entre ce que la société attend de l’individu et ce
qu’il est capable de faire, compte tenu de ses déficiences et des incapacités relatives. Pour
une incapacité donnée, le handicap est variable, d’une part en fonction des exigences
sociales, et d’autre part des aides qui peuvent être apportées dans chacun des milieux de
vie. » 4
Ainsi, nous envisagerons l’accès des personnes sourdes à la culture dans une dimension
anthropologique et non médicale.
A l’horizon 2015, tous les Établissements Recevant du Public (ERP) devraient être rendus
accessibles conformément à la Loi du 11 février 2005 sur l'égalité des droits et des chances,
la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.
Le premier ministre Jean-Marc Ayrault a annoncé en mars 2014 le report de l'application de
la loi de 2005 sur le handicap qui prévoit que tous les établissements et transports publics
seront accessibles à tous au 1er janvier 2015. Un report pour quoi ? Pour qui ? L'accès libre
pour tous ne devrait pas attendre, mais après le départ de Madame Carlotti, nous ne savons
pas encore qui reprendra le travail mené pas à pas. 5
Aujourd’hui, il existe près de 5,5 millions de sourds en France, dont 800 000 sourds
profonds selon l’UNAPEDA6. D’après le Plan 2010-2012 en direction des personnes sourdes
et malentendantes7, le Ministère de la Famille et de la Solidarité estime à 6,6% la population
sourde ou malentendante au sein de la population française. Pourtant, l’Etude de la
Direction de la Recherche des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques estimait en 2007
cette même part à 8,7%.
119 000 personnes environ utilisent la LSF 8 en France
Les chiffres concernant la surdité sont difficiles à obtenir et étudier. Les études divergent
selon la définition accordée à la surdité et selon les sources. Ils ne disent pas comment les
sourds vivent cette surdité et n’expliquent pas qu’une partie de la population sourde ne
considère pas la surdité comme un handicap mais comme élément fondateur d’une
culture. Aussi est-il important de signaler que les termes et la façon dont il sont énoncés
4
Handicap Culture ERP , employeurs, salariés - Les clés d’une culture de l’égalité - Editions La Scène 5
https://www.change.org/fr/pétitions/accessibilié-la-liberté-d-aller-et-de-venir-ne-peut-pas-attendre-10-ans-de-plus 6
Union Nationale des Associations de Parents d’Enfants Déficients Auditifs
www.unapeda.asso.fr/article.php3?id_article=615 7
www.travail-emploi-sante.gouv.fr 8
www.webaccessibilité.fr
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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peuvent être perçus de manière choquante par les intéressés eux-mêmes ; dire qu’en France
X millions de personnes « souffrent de déficience auditive » est une façon de cloisonner ces
mêmes personnes dans une catégorie de personnes à plaindre et à assister, alors qu’ils se
sentent des citoyens à part entière avec leur propre langue, la Langue des Signes Française.
La difficulté est que le pays des sourds, lui, n’existe pas.
Vaut-il mieux parler de personnes malentendantes plutôt que
sourdes ? (Le handicap en entreprise : contrainte ou opportunité ? Guy TISSERAND, extraits)
« On entre là dans les limites de l’absurde, puisqu’un individu malentendant entend mal,
comme le terme l’indique, alors qu’une personne sourde n’entend pas du tout.
L’euphémisation des termes est souvent la traduction d’une certaine mauvaise conscience,
mais elle peut entrainer une imprécision sans pour autant faire progresser le respect de la
personne. Elle risque, par ailleurs, d’induire des comportements inappropriés, comme
l’utilisation de l’écrit, de la lecture labiale ou de la LSF avec des personnes malentendantes
qui de leur coté, utilisent les moyens de communication traditionnels (oralisation, écoute) et
non ces outils qu’emploient les personnes sourdes ou l’inverse.
Lors d’une intervention en entreprise, un manager me signale qu’un de ses collaborateurs
est malentendant. J’engage donc la conversation avec le collaborateur en question en lui
parlant distinctement et en lui demandant s’il comprend. A ce moment, le manager
m’interpelle. Il me demande pourquoi je parle à cette personne, alors qu’elle n’entend pas.
Je lui explique que si la personne est malentendante, je peux lui parler. Il me répond que la
personne n’entend pas, mais il me l’a présenté comme « une personne malentendante »
car on lui a dit que le terme sourd était prohibé. Cet exemple illustre les effets pervers
qu’une manière policée d’utiliser le langage de manière irréfléchie peut avoir comme
conséquences sur la relation interpersonnelle et sur les comportements. » 9
L’acharnement des entendants à vouloir réparer « l’oreille cassée » des sourds donne lieu en
1880, au Congrès de Milan : constitué en majorité de médecins entendants, il doit
déterminer de la langue des signes ou de l’oralisme, quelle méthode sera la plus adaptée à
l’éducation des sourds.
Parmi tant d’autres à priori… Trois raisons sont alors invoquées pour prononcer l’interdiction :
« La Langue des Signes Française n’est pas une vraie langue… »
« ELLE NE PERMET PAS DE PARLER DE DIEU ! »
« Les signes empêchent les sourds de bien respirer ce qui favorise la tuberculose. »
9 et
11 Le handicap en entreprise : contrainte ou opportunité ? Guy TISSERAND - Editions PEARSON
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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11
Une langue interdite pendant plus d’un siècle Il découle du Congrès de Milan l’interdiction de la Langue des Signes dans les pays
participants, à l’exception des Etats-Unis et de l’Angleterre. L’oralisme se diffuse en masse
dans les écoles et la Langue des Signes Française, considérée comme barrière à
l’apprentissage du français oral est totalement condamnée pendant plus de 100 ans !
La LSF a été proscrite, méprisée et marginalisée aux seules associations de personnes
sourdes. Dans les instituts destinés aux personnes sourdes, la Langues des Signes se pratique
en cachette et elle s’est considérablement appauvrie.
Mais les combats menés depuis pour la reconnaissance de la Langue des Signes
commencent à porter leurs fruits : la Loi N° 2005-102 du 11 février 2005 reconnait la LSF
comme une langue à part entière.
Une révolution culturelle en marche : l’approche sociétale C’est l’évolution vers l‘approche sociétale du handicap qui, depuis les années 1980 et plus
encore depuis la loi de 2005, a permis une diminution significative du taux de chômage des
personnes handicapées. On peut parler ici de véritable révolution culturelle : les personnes
handicapées sortent alors des milieux dits « spécialisés » pour s’intégrer progressivement
dans le milieu qualifié « d’ordinaire » L’effort d’adaptation devient réciproque et partagé ; il
n’est plus exclusivement à la charge de la personne handicapée voire de ses proches.
Sortant de la logique de la « déficience », on entre ici de plain-pied dans la réponse aux
besoins d’une minorité et dans le principe d’égalité des chances. 10
Ce n’est qu’en 1991, grâce à la loi Fabius sur la liberté du choix de communication (LSF ou
oral), que la LSF est de nouveau autorisée dans notre pays. Puis la Loi du 11 février 2005
reconnaît la LSF comme langue à part entière.
Une langue reconnue en 1991, mais un retard dans l’apprentissage
de la langue écrite française chez les personnes sourdes Après un siècle d’interdiction de la LSF, les sourds français ont accumulé un retard forcé
dans leur apprentissage de leur seconde langue le français écrit :
Selon le Rapport Gillot de 1998, 80 % des personnes sourdes sont illettrées11. La difficulté de
donner des chiffres est grande : Dominique Gillot12 le dit elle-même en répondant à la
question d’où viennent ces chiffres ?
11 Le Droit des sourds : 115 propositions, rapport au Premier Ministre, 1998, Dominique Gillot
12 Femme politique française, notamment Secrétaire d’Etat chargée des personnes âgées et des personnes handicapées
auprès du ministre de l’Emploi et de la Solidarité. Voir ses propositions de loi ou de résolutions sur www.senat.fr
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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12
« Ce ne sont pas des statistiques, ce ne sont pas des chiffres scientifiques. Dans mon rapport c’est
une compilation, une analyse d’une compilation d’informations recueillies à travers différentes
études, différents rapports, différents témoignages qui nous ont amenés à faire cette évaluation,
cette estimation. » 13
La lecture et l’écriture sont très difficiles à comprendre et appliquer lorsque l’on est sourd.
Pourquoi ? Tentez donc de prononcer de l’hindi (langue d’Inde) alors que vous n’en avez
jamais entendu. C’est impossible ! De même, essayez de lire une langue que vous ne
connaissez pas... vous n’y arriverez pas.
C’est le même phénomène pour le français chez une personne sourde. L’enfant sourd
expérimente le monde à travers ses yeux et non ses oreilles. C’est pourquoi la Langue des
Signes s’avère être la langue naturelle de l’enfant sourd puisque régie par les yeux et le
corps. Or il a été démontré que la maîtrise d’une première langue aide à l’apprentissage
d’une seconde langue. Ainsi, si la possibilité de maîtriser la Langue des Signes et de l’utiliser
dans l’apprentissage de tout autre savoir, est donnée à l’enfant, alors il lui sera possible
d’acquérir non seulement le français écrit mais aussi tout le reste. Cela est démontré dans
plusieurs écoles en France qui prodiguent leur enseignement en LSF (Toulouse/Poitiers…)
Pourtant, la nécessité d’un enseignement de la LSF et en LSF n’est pas encore ancrée dans
les esprits. La question centrale en terme d'accès à l'emploi pour les personnes sourdes
concerne l'aménagement et l'évolution de l'emploi, car beaucoup de violence est engendrée
dans ces situations par le manque d'adaptation.
Par ailleurs, la population sourde est jugée « handicapée ». Cependant, la population
entendante l’est tout autant : la surdité provoque pour deux personnes qui se rencontrent
et ne parlent pas la même langue un handicap partagé de communication. L’entendant est
aussi handicapé que le sourd lorsqu’ils se retrouvent face à face, ne sachant comment
communiquer.
La personne sourde n’a pas de retard mental, n’a pas de handicap psychologique. Elle ne
parle pas la même langue que celle d’un entendant ; c’est difficile, mais pas insurmontable…
C’est une question d’adaptation.
13
Emission l’œil et la main du 18/11/2013, Quelque chose me cloche, http://www.france5.fr/emissions/l-oeil-et-la-
main/diffusions/18-11-2013_147321
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
CRé – www.rayondecrits.fr
13
Découvrons le témoignage de Yann Cantin14, doctorant en histoire à l'EHESS :
« Parlons par exemple d’une invention qui était censée révolutionner la
communication entre sourds et entendants, le téléphone. En principe, la paternité de cette
invention doit être attribuée à l’italien Antonio Meucci(1808- 1889) qui s’est vu devancer
par Alexander Graham Bell (1847-1922), son cadet de 39 ans, dans le dépôt du brevet
d’invention. Mais, c’est surtout l’intention première de Bell qui est surprenante. En effet, il
escomptait l’utiliser pour parler à distance à son épouse sourde Mabel Gardiner
Hubbard (1857-1923), dont le père sera le premier président de la compagnie téléphonique
Bell. En effet, d’une éducation orale, et surtout influencé par les principes éducatifs de son
père, Alexander Melville Bell (1819-1905), qui a lui-même également épousé une sourde,
Alexander Graham escompte utiliser la technologie afin de faciliter l’éducation orale et ainsi
discuter à distance avec sa femme, sans avoir recours aux gestes qu’il honnit.
Mais, l’application pratique semble être malaisée, et par conséquent, après quelques
réflexions dont je ne vais pas exposer ici, on assiste à une évolution fulgurante du
téléphone entre 1890 et 1920 où cette technologie devient rapidement
incontournable.
Mais, il y a toujours un grand mais…
Les sourds se sont trouvés en butte face à un grand mur, quand les administrations
adoptent de plus en plus cette technologie comme moyen principal de contact, de
rendez-vous ou d’échanges. Dès les années 1950, on assiste à une généralisation de
l’usage du téléphone, et de ses avatars : interphone, haut-parleurs, radios…
Le son devient le principal moyen de communication au cours du XXe siècle, alors que l’écrit
l’est au XIXe siècle. Face à cette généralisation du son, le sourd n’a plus aucun moyen de
garder prise sur son parcours, et ainsi de faire les démarches lui-même. De plus en plus, le
téléphone est exigé pour ces démarches. Par conséquent, le sourd est forcé d’avoir recours à
un tiers, le plus souvent un proche de famille, pour faire ces démarches, et là, la notion de la
vie privé disparaît pour les personnes sourdes, plus particulièrement quand il est question
des affaires médicales. Bref, à vouloir appeler un sourd à distance, Bell a entraîné un
mouvement inverse, et l’a exclu de la vie sociale, intention qu’il n’avait pas voulu.
Vouloir faire du Sourd, un être comme les
autres et donc, à ne pas vouloir reconnaître sa
spécificité, Bell a entraîné sa stigmatisation au
cours du XXe siècle, dont le fait extrême a été
la stérilisation des sourds issus de familles
sourdes, en Allemagne, durant le IIIe Reich,
mais également aux Etats-Unis, en Scandinavie,
de l’interdiction du mariage entre Sourds en
Finlande jusqu’aux années 1970…
D’autre part, l’idée de véhiculer le son à
14
Travaux de Yann Cantin - http://noetomalalie.hypotheses.org/author/noetomalalie
Granville Redmond et Charlie Chaplin 1
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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14
distance donne une certaine idée : faire du cinéma parlant.
Ainsi, comment synchroniser le son à l’image, ce qui est assez difficile. La solution
technologique s’est généralisée qu’au cours des années 1920 et là s’ouvre une nouvelle
période pour le cinéma, mais également pour la communauté sourde. Or, d’après un
chapitre d’un ouvrage, édité par CNRS Editions, le processus qui a conduit à l’introduction
du cinéma parlant, serait à l’origine, pour tenter de faire apprendre la parole aux enfants
sourds, à l’aide de la technologie. (…), l’arrivée du son au cinéma a entrainé l’exclusion de
nombreux comédiens sourds, d’Hollywood puisque leurs pantomimes sont devenus inutiles.
Il faut savoir que Charlie Chaplin s’est lié d’amitié avec un peintre sourd, Granville Redmond 15, plus connu pour ses œuvres impressionnistes car il a été le premier peintre américain à
l’adopter. Or, Granville est également comédien dans nombre de films de Charlot, et d’après
les historiens, Charlie Chaplin connaîtrait l’American Sign Language (ou je dirais le
Noétomalalien16
américain !)
Par conséquent, cette présence des comédiens sourds s’est fracassée face aux exigences
du cinéma parlant, comme nombre de comédiens peu doué dans le contrôle de la voix…
Ainsi, avec le cinéma parlant disparaît l’une des distractions accessible aux sourds. Le
cinéma muet met les sourds et les entendants sur le pied d’égalité, avec l’image des
comédiens bougeant, et des textes explicatifs qui s’y affichent. Or, avec le parlant, plus
rien n’est accessible… C’est seulement par les sous-titres que c’est possible.
MAIS, encore un mais…
C’est seulement avec les films étrangers, que l’on sous-titre volontiers, pas les films français,
ce qui de fait va entrainer un “divorce” entre la communauté sourde et le cinéma français qui
ne sous-titre pas ses films français (cela ne se fait seulement que depuis deux ans, voire cinq,
et encore pour certains rares films, au cinéma…).
Par la suite, tout au long du XXe siècle, les films deviennent tout simplement des
images mouvantes, avec des lèvres qui bougent, mais dont le contenu ne passe pas…
De là, on assiste à une double exclusion sociale et culturelle des sourds par la technologie
du son… alors qu’ils étaient à l’origine destinés à faire l’inverse…
Conclusion :
Par conséquent, voyant s’accentuer ce phénomène d’exclusion, les spécialistes de la
surdité se sont mis en tête d’ajouter d’autres technologies afin de faire entrer les
sourds dans la société : appareils auditifs, implants cochléaires, afin de permettre aux
sourds de pouvoir téléphoner et de pouvoir suivre les discussions à la télévision…
Or, qu’en est-ils concrètement ?
L’exclusion sociale des sourds reste toujours présente, mais, avec le retour de l’écrit, grâce
aux SMS et l’email, cette exclusion devient moins forte. Le minitel, (…) et l’Internet qui
accordent la priorité à l’écrit, apportent un contre-tendance, en encourageant l’écrit et
la lecture. Et là, on remarque que les sourds se sentent moins exclus, et reprennent cette
technologie à leur profit, avec les vidéos youtube noétomalaliées… Mais, ceci est une autre
histoire ! »
15
http://www.granvilleredmondgallery.com 16
Noétomalalie, signifie l’art d’exprimer par signes ce que l’on pense donc en LS
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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15
La LSF est une langue à part entière et loin d’être internationale ! La LSF est pratiquée par une partie de la population sourde, soit par 119 000 personnes en
France métropolitaine. Chaque pays possède sa propre Langue des Signes pouvant être
analysée au même titre que les langues vocales par la grammaire et la syntaxe.
Elles permettent d’exprimer les nuances comme toutes les autres langues.
Si aujourd’hui l’on peut considérer que la LSF est légitimement reconnue, il n’existe que 400
interprètes diplômés Français/LSF dont une vingtaine hors hexagone… contre 3 000
interprètes Suédois/Langue des Signes Suédoise ! Ceci démontre un retard considérable de
notre pays comparé à nos voisins scandinaves. En France les personnes sourdes peuvent
utiliser selon ce qui leur a été transmis la LSF (Langue des Signes Française), le LPC (Langage
parlé complété) ou l’oralisation, ou les trois.
Une étude pilote sur le département du val d’Oise pendant 6 mois Partant du constat au moment de la refonte du Schéma Départemental des personnes
Handicapées piloté par le Conseil Général du Val d’Oise, de la faible prise en compte de la
question de l’accès à la culture des personnes sourdes, et forte de son expérience de terrain,
via les spectacles et les stages qu’elle anime, CRé s’est interrogé sur la démarche de
sensibilisation qu’elle mène à chaque prise de contact avec les responsables institutionnels
et culturels. Car très peu de connaissance de cette réalité se perçoit chez les adultes actifs.
CRé s’est appuyée dans son analyse sur l’enquête d’accessibilité réalisée en 2010 sur le
département du Val d’Oise, piloté par le Théâtre du Cristal17 qui si elle apportait des
réponses en matière d’accès à la culture pour tous types de Handicap n’en avait aucune sur
la surdité. Pour nous conforter dans le constat d’absence de prise en compte de cette
spécificité, dans les médias et au sein des institutions, nous avons souhaité mettre en place
cette enquête. Il a été fait le constat dans le cadre de restitutions d’études au niveau du
territoire, que « s’il n’y a pas de plainte, il n’y a pas de prise en compte de ces besoins jugés
minoritaires. »
La notion de culture se réfère dans l’étude qui suit à tout ce qui est en rapport avec
l’artistique et le rôle social. Dans la vie, l’art joue un rôle primordial. Aujourd’hui, l’Homme
s’épanouit et grandit au contact des œuvres, livres, films, musiques, peintures etc. Mais si la
culture n’est pas accessible, elle ne peut être transmise. En effet, les œuvres sont, très
rarement, adaptées aux personnes sourdes.
Ainsi, comment la population sourde française peut-elle accéder au patrimoine commun
qu’est la culture française si les institutions culturelles elles-mêmes ne s’adaptent pas à elle?
90% des structures reconnaissent ne pas avoir connaissance des besoins et des demandes
des personnes sourdes en matière d’accès à la culture.
Des organisations et des associations sont néanmoins sensibles à cette discrimination.
17
http://www.artsenfolies.org/theatreducristal/index.php?option=com_content&view=category&layout=blog&id=40&Itemid=66
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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16
Dans le cadre d’un Projet Conseil en Entreprise (PCE), six étudiants de l'École Supérieure des
Sciences Économiques et Commerciales (ESSEC) de Cergy (95), encadrés par la Compagnie
Rayon d’écrits ont mené cette étude intitulée :
« À l’ère de la communication, lutter contre un
handicap invisible : la surdité. »
OBJECTIFS :
Donner les clefs de compréhension pour un meilleur accès à la culture partagé entre
sourds et entendants ;
Face au manque de documents officiels, obtenir des chiffres de recensement, le
constat du retard de la France en la matière est préoccupant ;
Travailler sur des propositions d'actions concrètes sur l’accessibilité à la culture des
personnes sourdes en mobilisant différents interlocuteurs sensibilisés et en
sensibilisant les autres ;
Proposer un sujet d’actualité afin de bousculer une réalité stagnante à quelques mois
de la mise en application de la loi sur le Handicap en 2015.
AMBITIONS :
1. Proposer des actions efficaces en lien avec l’application de la Loi sur le Handicap en
2015, notamment en termes de créations bilingues de spectacles en français et en
Langue des Signes Française ;
2. Proposer des actions culturelles et des formations pour amateurs/professionnels
destinées à tous les publics locuteurs de la LSF ou non, sourds et malentendants ;
3. Mobiliser l’ensemble des acteurs culturels ;
4. Créer du «lien» ce qui manque cruellement aujourd’hui entre les structures.
L’intention est de mettre en lumière la réalité du non-accès d’un public qui se retrouve
aujourd’hui la plupart du temps oublié des programmations et d’analyser les attentes de ce
public afin de proposer des solutions innovantes permettant de mieux accéder à la culture.
Pour répondre à cette problématique, deux questionnaires ont donc été réalisés : l’un à
destination des personnes sourdes ou malentendantes, locutrices ou non de la LSF et l’autre
pour les lieux culturels du Val d’Oise.
Les interviews ont été analysées entre avril et juin 2013.
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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17
Résultats
1. Structures et accessibilité Le questionnaire a été envoyé à une cinquantaine d’établissements du département du 95 :
24 d’entre eux ont répondu. 71% des structures se présentent comme culturelles et
programment des spectacles vivants et pièces de théâtre.
71%
14%
35%
7%
7%
14%
14%
Culturelle
Socio-culturelle
Municipale
Médico sociale
Agréée
Associative
Autre
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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18
Accessibilité des structures
77% des lieux se disent accessibles aux personnes en situation de handicap.
L’accessibilité est pourtant difficile à définir. Est-elle comprise de façon globale ou
simplement comme l’accessibilité du cadre bâti ?
Des moyens communicatifs doivent donc être déployés pour les personnes sourdes.
Les œuvres sont-elles compréhensibles pour tout le monde ? Pour les personnes sourdes (un
tiers des personnes en situation de handicap), cela nécessite une adaptation par divers
moyens à la communication : par exemple, la traduction de la langue française en LSF, le sur-
titrage… (cf. proposition concrètes : traduction LSF).
Quelles offres culturelles y sont proposées ?
On remarque que les activités les plus proposées appartiennent au domaine du théâtre et de
la musique. La danse et le cinéma suivent de près puisque proposés à plus de 40%.
Ceci correspond-il aux préférences culturelles des personnes sourdes ?
77%
23%
accessible
non-accessible
39%
21%
35%
78%
47%
61%
7%
26%
42%
25% 25%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
90%
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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19
35%
65%
2. Le public sourd
Sur 100 personnes sourdes et malentendantes résidentes du Val d’Oise, 87 ont répondu
totalement au questionnaire.
Sexe et âge
☐ 65% femmes
☐ 35% hommes
Types de surdité
1% 16%
59%
24%
0% 3%
24%
73%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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20
Les personnes sourdes ayant répondu sont âgées de 31 à 60 ans, cette partie de la
population est composée à 65% de femmes et sourde profonde.
Cela est n’est qu’un infime reflet de la population sourde du département.
Au 1er janvier 2013, la population du Val d’Oise est estimée par l’INSEE18 à 1 187 836
habitants. Ce qui représente 10,10% de la région et 1,9% de la population française.
Environ 83 500 personnes sont sourdes dans le département, donc 2 505 sourdes profondes,
soit 3% de la population française selon le Baromètre National de l’Audition de 2003.19
Situation familiale
La plupart des personnes interrogées ont des enfants, sourds pour 20% d’entre eux.
Nous préciserons qu’il est estimé par l’UNAPEDA, à 1 enfant sourd sur 1000 naissances soit
près de 700 enfants sourds chaque année. Seulement 10% d’enfants sourds ont des parents
sourds eux-mêmes.
Modes d’expression
18
Institut national de la statistique et des études économiques collecte, produit, analyse et diffuse des informations sur
l'économie et la société françaises. http://www.insee.fr/fr/ppp/bases-de-donnees/recensement/populations-legales/pages2012/pdf/dep95.pdf 19
Informations recueillies auprès de l’Etude préalable à la création d’un service médicosocial spécialisé pour les déficientes
sensorielles dans le Val d’Oise réalisée en décembre 2004
83%
17% Avecenfants
Sansenfants 80%
20% enfantsentendants
enfants sourds
97%
29% 26%
0%
20%
40%
60%
80%
100%
120%
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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21
Ici, le total des pourcentages n’est pas de 100% - plusieurs réponses ont été admises : des
personnes pratiquant la LSF lisent aussi sur les lèvres par défaut, puisque les entendants ne
signent pas. Il en va de même chez les sourds oralistes.
Dans le département du Val d’Oise, la communication en LSF est massivement représentée.
Nous pouvons lier ce point au fait que la majorité des individus soient sourds profonds et
que malgré l’éducation oraliste préconisée en France durant toute la période d’interdiction
de la LSF ; nous observons un développement progressif de la LSF sur le territoire.
3. Le public sourd et la culture
En philosophie, la CULTURE désigne tout ce qui est contraire à la NATURE. En
sociologie, elle désigne ce qui est commun à un groupe d’individus et permet d’unir,
de souder une communauté. Ici, nous utiliserons le point de vue sociologique en
introduisant notre propos par l’essai de Yann Cantin Existe-t-il une communauté
sourde ? (24 janvier 2012) 20
« Qui sont ces personnes dont nous parlons et que nous avons rencontrées et font-elles
partie d’une communauté ? Existe-t-il une communauté sourde ? Cette
question, je me la suis souvent posée, car c’est justement le point central de ma thèse
portant sur la communauté sourde de la Belle Epoque.
Médicalement parlant, il n’existe pas de communauté sourde, puisqu’un handicap n’est pas
un fait culturel. Or, si l’on lit l’article de Jean-Louis Siran 21et des recherches de Yves
Delaporte, et même des écrits de Bernard Mottez, on peut douter du critère purement
médical. Ainsi, les recherches sociologiques et anthropologiques indiquent l’existence d’une
communauté sourde. Or, qu’est-ce qui fait sa spécificité ? Il semble bien que ce n’est pas le
fait de ne pas entendre, mais justement d’utiliser une langue totalement spécifique, voire
unique.
En effet, la langue des signes, dont il existe des milliers de spécificités locales et nationales,
chaque pays a la sienne, se repose sur le canal visio-gestuel, et non pas le canal audio-vocal.
Ainsi, cette spécificité fait toute la différence, et c’est ce qui constitue le point central de
l’existence d’une communauté. Je ne vais pas détailler sur la question linguistique ou
sociologique qui ne sont pas réellement mes domaines de compétence, mais sur le domaine
historique. Je vous recommande fortement la lecture de cet article : Andrea Benvenuto « De
quoi parlons-nous quand nous parlons de “sourds” ? », Le Télémaque1/2004 (n° 25), p. 73-
86.
Ainsi la principale question est : Depuis quand alors cette communauté existe ?
Pour tout répondre, on ne le sait pas faute de recherches approfondies. Il existe des
recherches faites par des bénévoles partout dans le monde entier. Mais, les recherches de
20
Gallica.Bnf.fr 21
http://www.cairn.info/revue-l-homme-2004-1-page-173.htm
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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22
niveau universitaire sont très rares et concernent principalement deux questions :
l’éducation des sourds-muets, et l’intervention de l’Etat sur la communauté sourde.
Que savons-nous donc sur la communauté dans le passé ? Avant les années 1970, on ne sait
quasiment rien. On connaît quelques noms, des actions associatives, des événements
fondateurs : la naissance de la Société Centrale des Sourds-Muets en 1836 et le Congrès de
Milan en 1880 entre autres… Mais, ce n’est que la partie visible de l’iceberg historique.
Car, qu’en est-il de la vie au quotidien ? Des familles ? De la transmission de la langue des
signes ? De l’emploi ? Et même des liens entre les personnalités sourdes ? De tout cela, il
semble bien qu’il y ait même une jungle amazonienne à défricher !
Or, l’un des plus grands écueils, quand on souhaite faire de l’histoire sociale, ou même
l’histoire d’une communauté, c’est de trouver des sources. Le plus simple serait d’aller
consulter les archives, de regarder les sources écrites. Mais, la communauté sourde a une
particularité que l’on peut dire unique dans les pays occidentaux : une transmission de la
mémoire qui n’est pas écrite.
Cette transmission non écrite, basée sur la langue des signes, que l’on peut dire
“transmission noétomalalienne” s’est faite au sein des associations, dans des lieux de
rencontres réguliers. »
Nous nous intéresserons à la “culture” qu’offrent les lieux qui se définissent comme centres
culturels : institutions et lieux qui proposent une programmation de spectacles, des
expositions, des conférences, mais aussi des animations socioculturelles à destination de la
population locale. Les visiteurs ont tous une approche et un rapport spécifique avec ces lieux
et ont différentes attentes.
Que représente la culture pour les personnes sourdes ?
71%
65%
47%
16% 13% 5% 4%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
80%
Un loisir Un endroitpour faire
desdécouvertes
Un lieu derencontres
Un espacede
formation
Uneoccupation
Autre Rien
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23
Si les dimensions de loisirs et de découvertes sont logiquement dominantes, il est
intéressant de noter que pour près de la moitié des personnes interrogées, les sorties
culturelles sont aussi lieux de rencontres, soit de socialisation et donc de recours à lutter
contre l’isolement.
Ainsi, nous pouvons constater que les structures culturelles ne se limitent pas à être
uniquement des lieux d’expositions, ou de découverte mais aussi des endroits qui
permettent de créer du lien entre les personnes et de partager entre générations et
groupes sociaux. Ceci correspond a la notion de culture pour les personnes sourdes (cf.
graphique “la notion de culture chez les personnes sourdes »).
Quels sont les centres d’intérêts culturels préférés ?
Ici, plusieurs réponses pouvaient également être données le résultat est dans l’ordre des
questions posées et dépasse 100%.
On remarque un très fort intérêt pour le spectacle vivant (théâtre, mime, cirque et danse).
La vue étant le sens essentiel chez les sourds, les spectacles qui investissent le corps, le
mouvement et renvoient des informations visuelles (couleurs, gestes, costumes) sont perçus
comme (très) intéressants pour la population sourde, qui s’exprime par le corps tout comme
la danse, le mime et le théâtre.
Le cinéma quant à lui intéresse massivement alors que les lieux sont rarement adaptés à un
public sourd, par manque de sous-titrages. Cependant, se développent ici et là des séances à
raison de deux fois par semaine, où le sous-titrage est assuré (Lille, Poitiers).
Les expositions attirent elles aussi un public important : la soif de découverte est grande.
60%
26% 32%
28%
61% 66%
55%
33%
45%
32%
45% 37%
0%
10%
20%
30%
40%
50%
60%
70%
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À quelle fréquence les lieux culturels sont-ils visités ?
On peut se réjouir de la fréquentation élevée du public sourd dans les lieux culturels sachant
que 44% de la population y va tous les mois. Aucun ne déclare ne jamais y aller.
4. Et concrètement…
Activités ou évènements organisés pour le public sourd
Des structures dites accessibles, un peu moins de la moitié proposent, disent-elles des
activités adaptées au public sourd ou malentendant. Ces exemples doivent inciter les autres
lieux à développer une offre adéquate (cf. propositions concrètes). Les 55% restants devront
alors être accessibles d’ici 2015.
Cependant, la population sourde dénonce les différents obstacles rencontrés dans les
structures du département. Absence de traduction en LSF, manque de pictogramme clairs
dédiés à une meilleure compréhension de ce qui est mis en place. Absence de suivi au long
de l’année de modalités d’accueil adapté. Manque de compréhension en ce qui concerne la
différence entre sourds et malentendants.
45% 55%
oui
non
10%
44% 21%
13%
6%
10%
44% 21%
13%
6%
1x tous les 3 mois : 21%
1x/tous les mois : 44%
1x/an: 6%
1x/semaine: 10%
1x tous les 6 mois : 13%
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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25
Quels sont les freins à la visite des lieux culturels ?
De manière évidente, l’accessibilité en LSF est une condition incontournable puisque la
population du Val d’Oise s’exprime majoritairement en LSF.
D’ailleurs, on note 85% de réponses favorables à la mise en place de sur-titrages, de visites
guidées et de conférences en LSF. (cf. propositions concrètes)
Cette étude met en lumière un très fort intérêt du public pour les pratiques culturelles
mais aussi les obstacles découlant d’un handicap invisible qui empêche la communication,
dans la mesure où la langue des signes n’est pas pratiquée par les personnels d’accueil
dans les structures. De cette étude, découlent des propositions pour adapter les lieux et la
programmation pour faciliter leur accès à la culture.
10% 8%
45%
27%
62%
0% 13%
10% Vous n'avez pas envie
Vous n'avez pas l'argent
Vous n'avez pas le temps
C'est trop loin
Pas accessible en LSF
Pas de boucle magnétique
Mauvais accueil
Autre
Etude sur l’accès des personnes sourdes à la culture
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26
Propositions concrètes
90 % des lieux culturels n’étaient pas au courant des demandes et des souhaits de la
population sourde. On peut penser que très peu d’établissements étaient sensibilisés à ce
handicap. Maintenant, et grâce aux données de cette étude, nous pouvons affirmer que les
personnes sourdes veulent et doivent avoir un accès à la culture à part égale des
entendants, afin de pouvoir, non seulement apprendre mais aussi participer au
développement de la société civile d’une communauté au sens large, à laquelle tout le
monde contribue avec son propre point de vue.
83% des structures se disent intéressées par des outils concrets assurant une meilleure
accessibilité des personnes sourdes à la culture et on note également que plus de 77% d’avis
sont favorables à la création d’ateliers et de spectacles. Donc pour pouvoir mettre ces
activités en place, une dynamique de réseau est nécessaire à partir de laquelle les centres
culturels pourraient faire appel à différentes structures :
- CRé - Compagnie Rayon d’Ecrits
- DLS 95 - Dialogue et Liberté des Sourds en Val d’Oise
- Symbiose
- Remora
- Apui les Villageoises
- Bookbeo etc.
Les entretiens en face à face avec les responsables des lieux culturels et le public
interrogés ont mis en évidence quatre axes de progrès :
1. ADAPTER L’AMENAGEMENT ET L’EQUIPEMENT DES LIEUX
2. SENSIBILISER ET FORMER LES PERSONNELS A L’ACCUEIL DES PUBLICS SOURDS
3. RENDRE ACCESSIBLES LES CONTENUS ARTISTIQUES ET CULTURELS
4. METTRE EN PLACE UNE COMMUNICATION EXTERNE EN S’APPUYANT SUR DES
RELAIS INSTITUTIONNELS AU SEIN DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET DES
ASSOCIATIONS
Pour les tarifs et la mise en place de certains dispositifs, les informations sont en annexes.
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1. ADAPTER L’AMENAGEMENT ET L’EQUIPEMENT DES LIEUX
METTRE EN PLACE UNE SIGNALETIQUE directionnelle sous forme de pictogrammes. Il
convient de compléter la signalétique de base pour les publics handicapés (boucle
audio) par des indications visuelles compréhensibles (fléchage, codes couleurs,
balisage au sol)
Doubler l’information sonore par de l’information visuelle (vidéos en LSF,
lecture labiale, écriture sur un carnet, sur-titrage…) avec un bon éclairage (voir plus
bas). Et se munir d’un système sonore d’alarme incendie couplé à un système de
flash lumineux dans tous les endroits où une personne sourde pourrait se trouver
seule (sanitaires, loges, coulisses…)
ÉTUDIER L’ACOUSTIQUE ET L’ISOLATION PHONIQUE dés la conception des bâtiments,
des travaux de réflexion ou des aménagements scénographiques. Ceci implique le
contrôle de la réverbération des sons, le contrôle de la transmission des sons, des
bruits de machines et des vibrations, la réduction de l’électricité statique (qui
interfère avec les prothèses auditives), le contrôle des fréquences de sons transmis.
L’installation de boucles magnétiques de comptoir d’accueil ou de tour de salle
constitue une aide précieuse pour les personnes malentendantes appareillées de
prothèses analogiques.
DEPLOYER L’INSTALLATION D’UNE BOUCLE MAGNETIQUE dans l’espace d’accueil, ou sur
la banque d’accueil elle-même. Elle permet de capter les sons d’un spectacle de
façon amplifiée, en changeant le mode de sélection sur les prothèses auditives des
personnes malentendantes. Elle est applicable aux lieux culturels et peut ne pas avoir
été conçue au départ de la fabrication du bâtiment...
PRENDRE EN COMPTE L’ECLAIRAGE pour les personnes sourdes. Cela facilite la
communication en permettant de lire sur les lèvres plus facilement pour certaines
personnes qui en sont capable et une bonne visibilité pour la LSF. Ceci se heurte
parfois aux contraintes techniques des spectacles (salles obscures) ou les expositions
(conservations des œuvres)
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2. SENSIBILISER ET FORMER LES PERSONNELS A L’ACCUEIL DES PUBLICS
SOURDS
METTRE EN PLACE UN REFERENT 22 pour l’accueil du public sourd.
PREVOIR LE RECOURS A DES INTERPRETES EN LSF, mais aussi des médiateurs et guides
sourds, dans le cadre d’actions de médiation culturelle et dans certains cas à des
codeurs LPC23,
PREVOIR DES ACTIONS DE SENSIBILISATION DE L’ENSEMBLE DES PERSONNELS au contact
des publics (médiateurs, agents d’accueil et sécurité, ouvreuse etc.) pour leur
permettre de mieux prendre en compte les besoins spécifiques et d’acquérir les
bases de la communication avec une personne sourde.
3. RENDRE ACCESSIBLES LES CONTENUS ARTISTIQUES ET CULTURELS
Les solutions doivent être adaptées aux différents types d’œuvres artistiques (théâtre
avec sur titrages, musique ou chanson, œuvre plastiques, etc.)
PROPOSER DES CAFES SIGNES 24 dans les lieux culturels pour favoriser les échanges,
les rencontres et la transmission des informations (coût estimatif de 2 000€ par rdv,
35 participants, 2 intervenants, 4h d’intervention + temps de préparation – conçue
par CRé – Compagnie Rayon d’écrits, à Cergy).
GENERALISER LE SOUS-TITRAGE TEXTUEL (sous réserves d’équipements techniques et
des choix artistiques).
PROPOSER UNE TRADUCTION EN LSF (vidéo)
DEPLOYER LE VISIOGUIDE qui est un appareil numérique portable qui diffuse des
séquences vidéo de commentaires d’expositions en langue des signes et d’un sous-
titrage. Le visio-guide peut être utilisé comme aide à la visite dans nombre de lieux
culturels (Château de Versailles, Le Carreau, Cergy : exposition R. Doisneau avec CRé).
LANCER DES VIDEOS PAR FLASHCODES. Ce dispositif permet, par un simple flash depuis
un smart phone de renvoyer à un contenu en ligne (traduction LSF). Son utilisation
22
Personne maîtrisant la LSF et sensibilisé à la question sourde. 23
Langage Parlé Complété : code manuel autour du visage complété de la lecture labiale, adapté aux phonèmes de la
langue française. 24
Lieux de rencontres entre sourds et entendants, locuteurs ou non de la LSF, afin d’échanger, partager, se rencontrer et
se découvrir.
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semble extrêmement pertinente car 63% des sondés possèdent un smart phone (via
l’application Handitag). Ceci est développé par exemple par Bookbeo :
DEVELOPPER LA VISIO-INTERPRETATION qui repose sur le même principe que la
visioconférence, permettant de dialoguer et transmettre des documents à un
interlocuteur distant, par le biais d’un interprète traduisant en temps réel la
conversation.
4. METTRE EN PLACE UNE COMMUNICATION EXTERNE EN S’APPUYANT SUR
DES RELAIS INSTITUTIONNELS AU SEIN DES COLLECTIVITES TERRITORIALES ET
DES ASSOCIATIONS
UTILISER TOUS LES RELAIS LOCAUX (associations de personnes sourdes, centres de
ressources spécialisés, institutions d’accueil des secteurs sanitaires, et services d’aide
et de soins à domicile) et MDPH25 pour relayer l’information.
S’APPUYER SUR LA PRESSE SPECIALISEE : Déclic, Info-Fax des sourds, Websourd,
Sourds.net, Art pi !, Deaf-France etc.
COORDONNER TOUS LES VECTEURS DE COMMUNICATION traditionnels : pictogrammes
sur les affiches, relations presse, radios locales et WebTV, etc.
UTILISER DES FLYERS ET DOCUMENTATIONS ADAPTES en précisant l’accessibilité (sous-
titrage, LSF…), en recourant à des pictogrammes et en précisant systématiquement
un contact mail sur tous les supports.
CONCEVOIR UN SITE INTERNET PROPOSANT UNE ENTREE SPECIFIQUE PAR TYPE DE
HANDICAP pour un accès adapté aux informations. Beaucoup de personnes sourdes
rencontrent des difficultés de lecture, allant de la non maitrise à l’aptitude partielle.
La traduction des contenus par des vidéos en LSF est l’une des solutions à privilégier.
Le site Web sourd est un exemple en la matière : www.websourd.org.
25
MDPH : Maisons Départementales pour les Personnes Handicapées
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5. INTEGRER DES USAGERS OU UN COLLABORATEUR HANDICAPE
RENFORCER SES CHANCES DE REUSSITE : on sait que les premiers moments d’une
intégration déterminent souvent sa réussite dans la durée.
IL EST DONC ESSENTIEL DE PREPARER L’ARRIVEE DE LA PERSONNE en définissant ses
besoins de compensation et en les mettant en œuvre, autant que possible avant
l’arrivée.
LA COMPENSATION MISE EN ŒUVRE DOIT ETRE PERCUE, COMPRISE ET ACCEPTEE par le
collectif comme la réduction d’un désavantage, et non comme une faveur, c’est
pourquoi la question de la sensibilisation de l’équipe est importante.
CE N’EST PAS LA VISIBILITE DU HANDICAP QUI COMPTE mais la visibilité des
compensations mises en œuvres
LE FAIT DE SYSTEMATISER LA DEMARCHE DE SENSIBILISATION PERMET D’EVITER DE
STIGMATISER ceux qui la solliciteraient, et de la rendre plus naturelle dans la
structure.26
26
Le handicap en entreprise : contrainte ou opportunité ? Guy TISSERAND - Editions PEARSON
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INFORMATIONS DES DISPOSITIFS TECHNIQUES D’ACCESSIBILITE
Flashcode vidéo (Bookbéo)
Permet par simple flash depuis un Smartphone de renvoyer à un contenu en ligne. Dans la
mesure où 63% des sourds disposent d’un Smartphone, flasher un QR code à côté d’une
œuvre renverrait directement à une explication vidéo en LSF.
Coût de la création d’un QR valable un an : 400 € environ
Coût de la création d’une QR code vidéo avec gestion autonome : environ 2000€ (Beobox).
Vélotypie (Société Système RISP à Caen)
Permet un sous-titrage en direct.
Coût de la prestation à distance via une ligne ADSL pour 1 h : 300 €
(de Cergy, Val d’Oise)
Coût de la prestation d’une conférence sur place pour 1 heure : 400 € TTC (à Cergy, frais
d’hébergement pour le transcripteur si la conférence a lieu après 20h).
Boucle magnétique (Société AVITSAM)
Permet par transmission magnétique de capter les sons d’un spectacle de façon amplifiée,
en choisissant la position T sur les prothèses auditives. Un amplificateur correspond à
chaque salle, selon la forme et la disposition.
Coût du double-amplificateur pour le théâtre de Grenoble : 2000 € environ + coût de la
pose.
Application iPad
Conçue par Signes de sens (Lille) : en LSF, sonorisée et sous-titrée, elle est dédiée aux
enfants et notamment utilisée au musée du Quai Branly à Paris : 75 000 €.
Visio guides
Conçue par CRé – Compagnie Rayon d’écrits (Cergy) : en LSF, sous-titrée, elle est dédiée aux
enfants et adultes pour accompagner l’exposition sur DOISNEAU : 2 500€ (coût pour 10
photos).
Vidéos en LSF pour présenter les expositions
Grand écran placé à l’entrée de chaque exposition présentant une synthèse des textes de
l’exposition en LSF, sonorisée et sous-titrée : 3 500 €.
Visites en LSF
Visites guidées en LSF et visites contées bilingues (Quai Branly).
Une visite par trimestre.
Facture globale des sociétés de conférenciers ; ainsi le coût ne peut être déterminé.
Visites en LPC
Visites en LPC avec un codeur qui se place à côté du conférencier lors de la visite. Une visite
par semestre. Coût de la prestation : 170€ de l’heure pour un codeur.
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Conclusion
* * * * L’un des préalables à toute ouverture à la singularité est la confiance. Confiance dans la
structure à évoluer, innover, expérimenter, faire évoluer sa propre culture. Confiance du
porteur de projet, du recruteur encouragé et rassuré par sa hiérarchie. Confiance dans la
personne recrutée ou dans le public invité, dont la différence ne doit occulter ni les
motivations, ni les compétences, ni les droits à bénéficier d’un accès plein et entier à la
culture comme à tous les domaines (éducation, santé…) auquel aspire un citoyen à part
entière.
Malgré l’absence criante de moyens et d’actions que révèle cette étude, sur le territoire du
Val d’Oise en matière d’accès à la culture des personnes sourdes, en 2013, les responsables
de centres culturels ayant rempli le questionnaire pensent que leur équipe est sensible à la
problématique de l’accès des personnes sourdes à la culture.
La majorité des structures se disent intéressées par des outils concrets permettant une
meilleure accessibilité des personnes sourdes à la culture, cependant le manque de budget
est bien souvent une entrave. Il faut tout d’abord penser l’accessibilité de manière globale,
c’est à dire non seulement adapter le cadre bâti mais aussi les contenus, les informations et
ainsi procéder à une planification concrète de la mise en accessibilité. Un des points de
départ reste de sensibiliser les structures culturelles.
Mais le combat pour la reconnaissance à part entière de la Langue des Signes Française est
loin d’être terminé. En effet, dans cette étude nous parlons de l’accès à la culture par
rapport à l’offre proposée par les centres culturels. Or, la culture c’est aussi la base d’une
société, ce qui créé du lien, et très peu d’informations sont diffusées en LSF. Les personnes
sourdes subissent un manque d’accès au savoir de manière générale. Ceci est dans un
premier temps dû à un manque d’accès à la LSF chez les enfants sourds. Après cent ans
d’interdiction de la LSF dans notre pays, il est encore très difficile de la favoriser et la faire
reconnaitre aux yeux des politiques et de la population française. Ainsi, le nombre minime
de classes bilingues sur le territoire afflige l’évolution de ces enfants en terme d’éducation.
Seulement 5 à 10% des jeunes sourds ont accès à ces classes. La LSF se doit d’être enseignée
à sa population légitime et l’enseignement se doit d’être effectué dans leur langue.
Il existe une charte nationale du droit des enfants sourds27 qui rappelle les engagements de
la loi de 2005 et demande la mise en application d’un enseignement en langue des signes et
avec le français à l’écrit permettant le libre choix d’une éducation en LSF. Les établissements
qui accueillent les enfants sourds dépendent toujours du Ministère de la Santé et non de
l’Education Nationale, ce qui interroge sur la notion d’éducation ou de rééducation. Le
27
http://www.avaaz.org/fr/petition/Charte_LSF_pour_les_enfants_sourds
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Gouvernement doit reconnaître que s’il y a un choix entre 2 types d’éducation et de
scolarisation, l’offre éducative doit correspondre à chacun des deux.
La volonté de soigner à tout prix la « déficience auditive » est un véritable frein à l’accès à la
culture : l’effort est consacré à la rééducation de l’ouïe et à l’oralité plus qu’à l’accès au
savoir alors que la culture sourde est riche de son histoire et de sa langue.
L’accès à la LSF est donc l’un des premiers défis… C’est ainsi que l’on évitera l’exclusion de
ces futurs adultes.
Enfin, lorsque nous nous parlons ici d’accessibilité à la culture, il va sans dire que nous
faisons référence à la culture entendante.
Il ne faut pourtant pas oublier que la culture « Pi-sourde » ou « typiquement-sourde » existe!
La création de l’International Visual Theater à Paris en 1976 en est l’exemple le plus
pertinent, où artistes sourds et public sourd se rencontrent et développent ensemble leur
culture. LANGUE ne va pas sans CULTURE. La LSF est la langue des sourds. Les sourds ont
donc leur propre culture.
SI L’ON NE PEUT CHANGER LE MONDE, ON PEUT PARTICIPER A AMELIORER SON
UNIVERS (extrait de Le handicap en entreprise : contrainte ou opportunité ? Guy TISSERAND) 28
« Chaque jour je mesure combien la connaissance est la clef du changement. Aujourd’hui, à
partir de mes expériences et des progrès réalisés, je suis persuadé que, malgré tout le travail
qu’il reste à accomplir et l’ouvrage qu’il faut sans cesse remettre sur le métier, la dynamique
est enclenchée. Elle va se poursuivre tant elle est porteuse de richesses, souvent
insoupçonnées, qui ne demandent qu’à être découvertes. Dans un monde sous pression, en
recherche permanente de repères, où l’individu, en quête de sens, s’interroge régulièrement
sur sa place et son rôle dans son environnement professionnel, les sujets du handicap, de la
diversité et de la singularité, formidables vecteurs d’innovation et de progrès social, peuvent
constituer une réponse efficace. Quelle personne, quelle structure et plus encore quelle
société peut aujourd’hui se priver d’une telle opportunité ? »
VERS UNE DISPARITION DES SITUATIONS DE HANDICAP : LA CONCEPTION
UNIVERSELLE (extrait de Handicap Culture ERP, employeurs, salariés - Les clés d’une culture de l’égalité) 29
« A l’initiative de la Délégation Interministérielle aux Personnes Handicapées une
définition commune à 14 ministères concernés a été donnée à l’accessibilité qui a fait
ensuite l’objet de déclinaisons : l’accessibilité permet l’autonomie et la participation des
personnes en situations de handicap, en réduisant voire en supprimant les discordances
entre leurs capacités, leurs besoins et leurs souhaits, d’une part, et les différentes
composantes physiques, organisationnelles et culturelles de leur environnement, d’autre
28
Le handicap en entreprise : contrainte ou opportunité ? Guy TISSERAND - Editions PEARSON 29
Handicap Culture ERP, employeurs, salariés - Les clés d’une culture de l’égalité - Editions La Scène
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part. L’accessibilité requiert la mise en œuvre des éléments complémentaires, nécessaire à
toute personne en incapacité permanente ou temporaire pour se déplacer et accéder
librement et en sécurité au cadre de vie ainsi qu’à tous les lieux et services, produits et
activités. La société en s’inscrivant dans cette démarche d’accessibilité, fait progresser
également la qualité de vie de tous ses membres. »
La conception universelle est une intervention sur les environnements, les produits et les
services visant à ce que tous, y compris les générations suivantes, et sans égard à l’âge, aux
capacités et aux origines culturelles puissent participer à la vie de nos sociétés.30
Selon l’Organisation des Nations Unies (ONU), on entend par conception universelle…
« (…) la conception de produits, de programmes, et de services qui puissent être
utilisés par tous, dans toute la mesure du possible, sans nécessiter ni adaptions, ni
conception spéciale. Cela n’exclut pas les appareils et accessoires fonctionnels pour
des catégories particulières de personnes en situations de handicap, là où ils sont
nécessaires.
Les 3 principes de la conception universelle :
- Elle ne repose pas uniquement sur la notion d’adaptation des lieux
physiques ;
- Elle vise à éliminer toutes les barrières qui peuvent limiter une personne dans
l’accomplissement des ses activités quotidiennes ;
- Elle repose sur le fait que tout citoyen doit pouvoir avoir accès à l’ensemble
des services offerts à la population, et ce, dans tous les domaines
d’activités. » 31
Un dernier mot
« Rien ne remplacera jamais le naturel, la simplicité et la volonté de communiquer
pleinement et sans retenue avec l’autre. Parlez librement et ne vous interdisez ni ne
regrettez d’user de mots comme «regarder », « voir », face à une personne déficiente
visuelle, « marcher » ou « courir » devant une personne en fauteuil roulant et donc
« écouter » ou « entendre » avec une personne ayant une déficience auditive. Evitez en
revanche d’utiliser des expressions comme « infirme », « souffrir d’un handicap », dites
plutôt « une personne en situation de handicap » et non « un handicapé ». Maintenant que
vous avez lu ceci, il vous reste à le mettre en pratique.
30
Fondation Design For All 31
Travaux de l’association québécoise APHRSP – Association des Personnes Handicapées de la Rive Sud-Ouest
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Si votre lieu travaille à l’égalité d’accès, d’usage et de qualité, il ne pourra accueillir de public
bénéficiaire si tout autour rien n’est adapté, accessible… Entourez-vous, mobilisez,
coordonnez…
Et puis, toutes ces mesures, si elles ne sont pas possibles pour des raisons économique ou
logistiques, peuvent être satisfaites autrement, par un simple geste bien souvent. N’assistez
pas la personne, mettez tout en œuvre pour qu’elle soit la plus autonome possible. Le
handicap est une rencontre avec l’autre, sa fragilité, la solidarité. Il n’est pas question de
prendre en charge mais de « prendre en compte » (Pascal Parsat)
Citation extraite de l’ouvrage Handicap Culture ERP , employeurs, salariés - Les clés d’une culture de l’égalité - Editions La Scène
« Pensez à rester vous même, comme vous l’êtes, avec vos imperfections et vos points
forts. Utilisez le mot « SI ». Si cette personne pouvait assister au spectacle et non si elle
pouvait entendre, que pourrait elle en apprécier ?
Cela veut dire que vous ne vous positionnez plus comme un(e) assistant(e), mais comme un
partenaire. Ne passez pas au delà de la rencontre sans oser vraiment poser des questions. Il
n’y a pas de mauvaise question, et il n’y a aucune obligation pour la personne en face de
répondre, si la question de fait ne lui semble pas pertinente. Tout est question de bon sens.
Interrogez-vous sans jugement, ni projection, car souvent nous sommes en tant que
« personnes valides » dans la projection de nos peurs et de nos fantasmes, ce qui revient à
se dire que cette situation est terrible ou insupportable, au cas où nous serions touchés par
tel ou tel handicap. Alors que pour une personne qui vit cela au quotidien, elle ne se sent pas
autrement ! Pensez à la question qu’un enfant pourrait poser à un autre enfant « qu’est-ce
que ça fait de ne pas entendre ? ». L’enfant sourd répondrait certainement « je ne sais pas,
je suis né avec, et pour toi qu’est ce que ça fait d’entendre ? » dans toute circonstance, si je
n’entendais pas, si je ne voyais pas, si je ne marchais pas… que pourrais-je apprécier de cette
offre culturelle ? Le plus petit dénominateur commun, c’est l’envie d’être avec les autres et
de partager.
Si je pouvais faire en sorte de créer du lien et des passerelles, peut-être pourrais-je avoir le
soutien d’une personne elle même en situation de handicap pour vérifier avec elle, quelques
pistes de travail. Si quelque chose pouvait nous rapprocher, et si je pouvais faire moi-même
quelque chose qui permette à l’autre d’être plus autonome, comment pourrais-je œuvrer ?
C’est le premier pas vers un mieux vivre ensemble au cœur de ce qui se nomme l’Humanité.
C’est à dire vivre au cœur de la Cité – au sens de l’agora – et pas seulement vivre au sein de
la société dite de communication. Et ce, précisément au moment même où nous évitons le
contact dans les yeux, rivés sur nos prolongements technologiques -avec les réseaux sociaux,
les Smartphones, et autres webcams- mécaniques subtiles pour garder le contact tout en
évitant d’être ensemble dans un même espace. C’est ainsi que l’espace de la représentation
et du spectacle vivant est encore un de ces lieux ou l’on apprend à vivre et vibrer ensemble.
Ouvrons-nous aux autres, c’est un enjeu et une force pour notre avenir. »
Colombe Barsacq
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Sources
* * * * agefiph.fr
annuaire-interpretes-lsf.org
bookbeo.com
clicanoo.re
developpement-durable-gouv.fr
eidcpep95.org
fnsf.org
insee.fr
legifrance.gouv.fr
rayondecrits.fr
sourds.waliceo.fr
unisda.org
unapeda.asso.fr
websourd.org
Emission l’Œil et la Main, France 5, Quelque chose me cloche, 18.11.13
Bibliographie et contacts
Etude préalable à la création d’un service médicosocial spécialisé pour les personnes déficientes
sensorielles dans le Val d’Oise (décembre 2004)
DALLE-NAZEBI S., Récits d'une violence ordinaire. Les sourds au travail, dans Développement
humain, handicap et changement social, Vol. 18, n°2 : L'expérience de la surdité, p.43-58, en
ligne : http://www.ripph.qc.ca/node/1042 (2009)
GILLOT D., Le Droit des sourds : 115 propositions, rapport au Premier Ministre (1998)
KOMPANY S. L’accessibilité des lieux de travail – Nouvelle règlementations pour les employeurs et
pour les travailleurs handicapés – Editions du puits fleuri (septembre 2012)
PARODE M., Les devenus sourds : un monde à part, Université Pierre Mendès France, Grenoble
(2008)
STRADELLA C., Accessibilité et Culture Sourde, La prise en compte de la Culture Sourde dans la
médiation des arts visuels envers les Sourds, et leur relation aux œuvres, Université de Cergy-
Pontoise (2012-2013)
TISSERAND G., Le handicap en entreprise : contrainte ou opportunité ? - Editions PEARSON
CENTRE RECHERCHE THEATRE HANDICAP, Handicap Culture ERP, employeurs, salariés - Les clés
d’une culture de l’égalité - Editions La Scène
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Annexes
* * * * CRé – Compagnie Rayon d’écrits
Handi-Capacités
Affiche conçue pour l’étude (dernière de couverture)
CRé – Compagnie Rayon d’écrits est une association portée par Colombe Barsacq (directrice
de production des projets) et Michel Trillot (responsable artistique et metteur en scène),
fondée en 1997 dans le Val d’Oise. Compagnie professionnelle de spectacle vivant, elle crée
et produit des œuvres artistiques et évènements culturels pour tous publics, en Français et
LSF en travaillant notamment avec des artistes sourds.
Depuis sa création, CRé a produit une 15zaine de formes artistiques. En décembre 2009, elle
a produit Eaux vives et terres nues, le premier spectacle de chanson française entièrement
bilingue en France, avec Colombe au chant et Bachir Saïfi au chantsigne. Depuis 2012,
Isabelle Voizeux32 est artiste associée de CRé et participe à la réflexion de la compagnie sur
la mixité entre sourds et entendants et le bilinguisme ; elle a participé à la création des deux
spectacles au répertoire Elle a tant... et Au-delà du Silence ! et pilote le Café Noétomalalie,
évènement bimensuel itinérant sur la communauté d’agglomération de Cergy Pontoise.
CRé a le désir de faire connaître son travail sur la mixité des publics et l’accès à la culture
pour tous. Aller à la rencontre de nouveaux publics, amener le spectacle vivant là où il n’est
pas, aider à le transmettre et à créer des passerelles, c’est ce qui nous mobilise. Nous
invitons ainsi les différents publics à découvrir et à partager notre démarche de création et
notre réflexion sur la cohésion d’un public mixte mêlant sourds et entendants. Ainsi nous
repensons le processus de création et portons un regard nouveau sur les mondes des Arts et
du silence.
Découvrez l’équipe, les projets artistiques et les propositions de stages et formations sur
www.rayondecrits.fr
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Artiste, comédienne sourde et présentatrice de l’émission l’Œil et la Main sur France 5.
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Nous remercions pour leur soutien :
Le Groupe ESSEC a fondé son développement sur l’humanisme, la responsabilité, la diversité,
l’innovation et l’excellence. Depuis 2008, il est engagé dans une nouvelle démarche
d’intégration du handicap et des personnes en situation de handicap à travers la Mission
Handi-Capacités de l'ESSEC, qui s'inscrit dans la démarche "Management & Society".
La Mission Handi-Capacités ESSEC s’engage pour :
• L’insertion des personnes handicapées en tant qu’étudiants en formation initiale,
participants en formation permanente, professeurs et collaborateurs ;
• L’accessibilité des campus et des activités qui s’y déroulent (locaux, cours, concours, sites
internet, événements etc.) ;
• La prise en compte des différentes formes de handicap au sein des programmes de
formation pour sensibiliser et responsabiliser les futurs cadres et dirigeants.
Pour plus d'informations
handicap.essec.edu
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Contact
VOUS SOUHAITEZ DES PRECISIONS, UNE MISE EN RESEAU
VOUS AVEZ DES QUESTIONS
Ecrivez-nous :
Ou appel/sms :
06 80 05 51 36
Nous pouvons vous joindre sur simple demande les questionnaires utilisés pour l’enquête
afin de les diffuser autour de vous et participer ensemble à questionner le territoire sur la
question de l’accès à la culture du public sourd ou malentendant.
* * * * www.rayondecrits.fr * * * *
Siège social : Maison des Touleuses - 20 place des Touleuses - 95000 Cergy
Correspondance : 11 rue de la Prairie - 95000 Cergy
N° Siret : 420 111 304 00028 - Code APE : 9001Z
Licence entrepreneur de spectacle : cat N°2 – 104 66 84
Agréments Jeunesse et Sports et Entreprise Solidaire
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L’affiche créée pour l’étude