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Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes En vue de l’obtention du Diplôme d’État d’ergothérapeute BARREAU Cyndie Juin 2012 L’accompagnement du conjoint d’une personne porteuse de la maladie d’Alzheimer : une des missions de l’ergothérapeute au sein d’une équipe spécialisée Alzheimer.

L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

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Page 1: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes

En vue de l’obtention du Diplôme d’État d’ergothérapeute

BARREAU Cyndie

Juin 2012

L’accompagnement du conjoint d’une

personne porteuse de la maladie

d’Alzheimer : une des missions de

l’ergothérapeute au sein d’une équipe

spécialisée Alzheimer.

clarisse
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Page 2: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

Institut de Formation en Ergothérapie de Rennes

Sous la direction de Mme Le Mauff, maître de mémoire

En vue de l’obtention du Diplôme d’État d’ergothérapeute

BARREAU Cyndie

Juin 2012

L’accompagnement du conjoint d’une

personne porteuse de la maladie

d’Alzheimer : une des missions de

l’ergothérapeute au sein d’une équipe

spécialisée Alzheimer.

Page 3: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

Résumé

Mots clés :

Maladie d’Alzheimer

Équipe spécialisée Alzheimer

Ergothérapie

Aidant principal

Maintien au domicile

La maladie d’Alzheimer touche environ 800 000 personnes en France. Près de la

moitié d’entre elles désirent rester à leur domicile le plus longtemps possible. Cependant,

cette solution n’est possible que par des compensations familiales, professionnelles et

matérielles. La maladie d’Alzheimer engendre de nombreux troubles cognitifs et

comportementaux qui perturbent l’autonomie du patient dans la plupart des activités de la

vie quotidienne. L’aidant familial, principale ressource, se retrouve progressivement en

situation d’épuisement et peut être en demande d’un accompagnement professionnel. Pour

répondre à cette demande et à la problématique du maintien à domicile des personnes

porteuses de cette maladie, le plan Alzheimer 2008-2012 propose diverses mesures. Parmi

celles-ci on distingue la mesure 6 concernant les équipes spécialisées Alzheimer. Ces

équipes pluriprofessionnelles tentent de répondre aux besoins du patient et aux attentes de

l’entourage. Pour cela l’ergothérapeute réalise un bilan au domicile des personnes et

propose un plan d’intervention adapté suivi de 10 à 13 séances de réhabilitation. En

proposant diverses activités et préconisations, l’équipe souhaite faciliter le maintien au

domicile, l’adhésion à des structures de relais voire des démarches d’institutionnalisation.

Page 4: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

J’adresse mes remerciements aux personnes qui m’ont aidé dans la réalisation de ce

mémoire.

En premier lieu, je remercie Mme Le Mauff, maitre de mémoire, qui m’a guidé et

accompagné tout au long de ce travail.

Je remercie également les ergothérapeutes, l’Assistant de Soins en Gérontologie et le

conjoint aidant qui ont pris le temps de répondre à mes questions.

J’adresse une pensée particulière à Françoise Barreau, Kévin Macé ainsi que mes

colocataires et mes proches qui m’ont soutenu et encouragé.

Page 5: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

SOMMAIRE

INTRODUCTION ................................................................................................................... 1

PROBLEMATIQUE ............................................................................................................... 2

APPORTS THEORIQUES ..................................................................................................... 8

1 La maladie d’Alzheimer ................................................................................................. 8

1.1 Affection neurodégénérative .................................................................................... 8

1.2 Les principaux troubles ........................................................................................... 9

1.3 Poser le diagnostic .................................................................................................11

1.4 Les facteurs de risques ..........................................................................................12

1.5 Les traitements médicamenteux et non médicamenteux ........................................13

2 Le maintien à domicile possible grâce aux aidants familiaux ........................................14

2.1 Choix du maintien au domicile ................................................................................14

2.2 Le conjoint, aidant principal ....................................................................................15

3 L’ergothérapie en équipe spécialisée Alzheimer ...........................................................18

3.1 Organisation de l’ESA ............................................................................................18

3.2 Déroulement de l’intervention .................................................................................20

RECUEIL DE DONNEES .....................................................................................................23

1 Méthodologie ................................................................................................................23

1.1 L’entretien ..............................................................................................................23

1.2 La population interrogée .........................................................................................23

1.3 La procédure d’analyse ..........................................................................................23

2 L’analyse des entretiens ...............................................................................................24

2.1 Des contextes de recours et des situations initiales différentes ..............................24

2.1.1 Les différentes modalités de recours à l’ESA ......................................................24

2.1.2 L’existence préalable de l’intervention de professionnel à domicile .....................25

2.2 Ce qui facilite l’adhésion .........................................................................................25

2.2.1 Évoquer l’évolution et l’épuisement .....................................................................25

2.2.2 L’observation des activités privilégiées pour pallier le refus du bilan ...................26

2.2.3 Favoriser la relation de confiance .......................................................................26

2.3 Le déroulement des interventions ...........................................................................27

Page 6: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

2.3.1 Le cahier des charges.........................................................................................27

2.3.2 Modalités d’organisation des séances et délégation aux ASG ............................30

2.4 Les réactions des aidants durant les séances ........................................................31

2.4.1 Les réactions vis-à-vis de l’intervention de l’équipe spécialisée ..........................31

2.4.2 Les réactions vis-à-vis des conseils et préconisations ........................................33

2.5 Les moyens indirects auprès de l’aidant .................................................................35

2.6 Les moyens directs auprès de l’aidant....................................................................38

2.7 Les relais et structures de répit possible .................................................................41

2.8 Les réactions des professionnels et aidants sur l’intervention ................................43

DISCUSSION .......................................................................................................................47

1 Conclusions de l’enquête ..............................................................................................47

2 De nouvelles pistes de réflexion ...................................................................................49

3 Critiques de la méthode ................................................................................................51

CONCLUSION .....................................................................................................................52

BIBLIOGRAPHIE ..................................................................................................................53

GLOSSAIRE

ANNEXES

Page 7: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

1

INTRODUCTION

J’entends souvent parler de la maladie d’Alzheimer par les médias et dans mon

entourage. On me parle de troubles de la mémoire et de la peur d’être atteint par cette

maladie. On me raconte aussi des souvenirs douloureux de famille où les grands-parents ont

tenté de vivre à leur domicile avec les difficultés que provoque cette affection. C’est un

combat quotidien pour accepter la maladie et réagir de manière adaptée face aux troubles

de la maladie d’Alzheimer.

Et puis un jour, lors d’une expérience professionnelle, j’ai pu observer le

comportement de personnes âgées ayant des troubles de la mémoire et du comportement.

En tant que veilleuse de nuit dans un domicile collectif, mon rôle est de donner les

médicaments du coucher à quelques personnes âgées, d’environ 80 ans, n’arrivant plus à

gérer seule leur traitement. Alors que certains vérifiaient plusieurs fois en me questionnant

que je leur donnais le bon comprimé, d’autres ne se souvenaient plus de moi d’un jour sur

l’autre. Il est aussi arrivé que l’on me raconte des dizaines de fois les mêmes histoires, ou

que le passé de certaines personnes se modifiait au fur et à mesure de nos discussions.

Certains n’arrivaient plus à s’orienter dans le temps, d’autres dans l’espace et une

surveillance accrue était parfois nécessaire. Les personnes que j’ai rencontré présentaient

surement un début de démence et étaient placées dans cette structure car elles ne

pouvaient plus rester seules chez elle.

Je me suis alors renseignée sur les différentes structures accueillant les personnes

âgées et au cours de ma formation d’ergothérapeute, j’ai découvert les équipes spécialisées

Alzheimer. Ces équipes interviennent au domicile des personnes âgées atteintes d’une

démence afin de permettre leur maintien à domicile.

Cet écrit interroge les pratiques des ergothérapeutes intervenant au domicile de

personnes porteuses de la maladie d’Alzheimer, chez des couples âgés dont le conjoint non

malade devient l’aidant principal au quotidien.

Page 8: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

2

PROBLEMATIQUE

La maladie d’Alzheimer touche actuellement près de 860 000 personnes en France.

Cependant, si l’on prend en compte l’entourage familial, on obtient près de 3 millions de

personnes concernées par cette affection neurodégénérative du système nerveux central

(Marsaudon, 2011, p27). Cette maladie est répertoriée dans les démences

neurogénératives. Une démence étant une « altération progressive de la mémoire et de

l’idéation, suffisamment marquée pour handicaper les activités de la vie quotidienne,

apparue depuis au moins six mois ; et présence d’au moins un trouble suivant : langage,

calcul, jugement, altération de la pensée abstraite, praxies, gnosies ou modifications de la

personnalité » (Patry-Morel, 2006, p17). Selon des données épidémiologiques, la maladie

d’Alzheimer représente 70% des démences en France (Marsaudon, 2011, p27). Elle est

donc plus fréquente que les démences vasculaires ou mixtes, mais également plus

importante que les autres démences neurodégénératives comme la démence à corps de

Lewy ou la démence fronto-temporale. Selon Cécile Patry-Morel (2006, p19), la maladie

d’Alzheimer est une démence dégénérative dont l’atteinte située dans la région

hippocampique, puis au niveau du cortex temporal et au niveau des aires associatives

temporo-pariétales puis préfrontales, peut provoquer divers symptômes. « La maladie se

distingue par trois catégories de symptômes : un déficit des fonctions cognitives

(intellectuelles) avec, au premier plan des troubles de la mémoire, une réduction des

activités de la vie quotidienne, une modification du comportement et de l’humeur. »1 Quelles

peuvent être les répercussions de la maladie d’Alzheimer sur le quotidien des personnes

âgées et de leur entourage ?

D’après le résumé de la Journée Régionale d’échanges sur la Maladie d’Alzheimer

(UNASSAD2, 2004), des difficultés spécifiques apparaissent lors de la prise en charge des

personnes à domicile. « Une acceptation difficile de la maladie […], une communication avec

les malades souvent rendue très difficile […], un épuisement de l’entourage et des

professionnels […], une dégénérescence inexorable de la maladie qui rendent les conditions

d’intervention difficile. » (UNASSAD, 2004, p1). C’est également le ressenti que j’ai pu

recueillir lors de discussion avec des amis me racontant leurs souvenirs de famille. Des

enfants qui ne supportent plus l’inversion du rythme nycthéméral chez leur parent ; les

déambulations ; que leur parent ne se souvienne plus des petits-enfants ; qu’il dérange

régulièrement les affaires dans la maison car ne reconnait pas les objets, ne sait plus s’en

servir ou ne sait plus où ils se rangent. Une autre amie me parle de sa grande tante qui

s’occupe de sa sœur atteinte de la maladie d’Alzheimer et qui se retrouve hospitalisée par

1 Derouesné et Selmès. La maladie d’Alzheimer : Comportement et humeur. Guides pratiques de l’aidant, 2005. P7 2 Cf. glossaire

Page 9: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

3

épuisement physique et psychologique. Dans ces situations on peut se demander si la

dégradation de l’état de santé de la personne atteinte de la maladie d’Alzheimer entraine un

choix systématique entre le placement en institution ou la continuité du maintien au domicile.

L’institutionnalisation est-elle inévitable ? Répond-elle à la demande de la personne, ou est-

ce que des aides professionnelles et/ou profanes peuvent permettre le maintien à domicile ?

On se demande aussi quel soutien permettrait aux aidants profanes, familiaux, d’éviter le

surmenage, l’épuisement ?

Mon questionnement se dirige alors vers le lieu de vie des personnes atteintes de la

maladie d’Alzheimer. Selon l’Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé

(ANAES), 75% des personnes atteintes de cette maladie vivaient à domicile en 2000

(Gautheron, 2011, p41). Ces résultats importants m’interpellent sur les raisons de ce choix.

Le manque de place en structure est certainement une des causes, mais il y a surement

aussi le fait de vouloir rester dans son logement. En effet, « les personnes atteintes de la

maladie d’Alzheimer sont de plus en plus nombreuses et elles souhaitent rester à leur

domicile ‘‘le plus longtemps possible’’ ».3 Le problème qui peut se poser c’est que « le choix

de maintenir ou non une personne à son domicile demande une réflexion d’ordre éthique. Il

s’agit de faire au mieux pour le patient en combinant ses souhaits et sa sécurité qui sont

parfois contradictoires. » (Gautheron, 2011, p42). Ce choix est en lien avec la notion de

qualité de vie qui est à préserver, à la fois pour la personne mais aussi pour les aidants. On

remarque que « la principale conséquence de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie

apparentée est une détérioration de l’état de santé des proches et une perte majeure de

qualité de vie. »4 Cette notion de qualité de vie est défini par l’Organisation Mondiale de la

Santé (OMS) comme étant « la perception qu’a un individu de sa place dans l’existence,

dans le contexte de la culture et du système de valeurs dans lesquels il vit, en relation avec

ses objectifs, ses attentes, ses normes et ses inquiétudes. Il s’agit d’un large champ

conceptuel, englobant de manière complexe la santé physique de la personne, son état

psychologique, son niveau d’indépendance, ses relations sociales, ses croyances

personnelles et sa relation avec les spécificités de son environnement. »5 Qu’est-ce-qui peut

actuellement être proposé pour améliorer cette qualité de vie pour l’individu et ceux de son

entourage qui l’assistent au quotidien ?

3 UNASSAD. Journée régionale d’échange sur la maladie d’Alzheimer. P1. 4 Données issues du Plan Alzheimer 2008-2012. P13. 5 Définition de l’OMS tirée de l’article de Charlotte GAUTHERON. Le domicile en question : maintien à domicile et qualité de vie des patients déments. P42

Page 10: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

4

Afin de répondre à ce problème de santé publique le gouvernement a mis en place le

Plan « Alzheimer et maladies apparentées » 2008-20126. Le but étant de répondre au triple

défit : scientifique, médical et social, que pose cette maladie actuellement. Ce plan est

composé de 10 mesures phares pour « améliorer le diagnostic […] pour mieux soigner et

mieux accompagner […] pour aider plus et mieux […] pour chercher plus vite […] ». Le plan

énonce 3 axes principaux, chacun contenant plusieurs objectifs spécifiques. Le premier axe

concerne la qualité de vie des malades et des aidants. Le but est d’améliorer à la fois

l’annonce du diagnostic, le parcours de soins, le maintien au domicile ou l’accueil en

structure et le rôle des professionnels, par le biais de 6 objectifs. Pour y répondre plusieurs

mesures sont proposées.

En regardant de plus près l’objectif 3 de l’axe 1 de ce plan Alzheimer, « renforcement

du soutien à domicile, en favorisant l’intervention de personnels spécialisés »7, on remarque

que la mesure 6 parle plus spécifiquement des équipes spécialisée Alzheimer (ESA). Elles

sont composées d’ergothérapeutes et/ou psychomotriciens, d’assistants de soins en

gérontologie et d’infirmiers coordinateurs qui travaillent sous prescription médicale et

interviennent au domicile des personnes âgées. Leur but étant « l’amélioration de la qualité

de vie du malade et de l’aidant » (Boschat, 2001, p17). Au sein des équipes spécialisées

Alzheimer, l’ergothérapeute a pour missions d’évaluer les facteurs personnels tels que les

habitudes de vie, les fonctions cognitives, motrices, sensorielles et nociceptives ; les facteurs

environnementaux humains et matériels ; les performances dans les activités de la vie

quotidienne. Il prend en compte dans l’environnement humain l’aidant principal, en observant

et se renseignant sur son rôle et son intervention au quotidien auprès de la personne

malade. Comment l’ergothérapeute peut-il intervenir auprès d’une personne âgée atteinte de

la maladie d’Alzheimer ainsi que de l’aidant familial pour améliorer leur quotidien ?

L’aménagement du domicile peut-il limiter l’aggravation des troubles liés à la maladie et donc

diminuer le besoin en aide humaine au quotidien ? Comment préserver la possibilité du

maintien à domicile tout en permettant à la personne âgée d’avoir une bonne qualité de vie ?

Depuis plusieurs années, les ergothérapeutes veulent montrer l’intérêt de leur

spécificité professionnelle au domicile. En effet, l’ergothérapie a pour but d’évaluer et de

faciliter l’autonomie et l’indépendance de la personne en situation de handicap. Il est donc

intéressant de réaliser un bilan sur le lieu de vie de la personne. Cela permet entre autre

d’effectuer des mises en situation écologique pour mieux estimer les capacités, incapacités

et situations de handicap. On peut aussi proposer des changements, aménagements,

conseils à la personne et son entourage, mais également mettre la personne en situation

6 Ce plan fait suite aux plans Alzheimer 2001-2005 et 2004-2007 7 Ibid. P26

Page 11: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

5

dans son milieu de vie. C’est pourquoi « le domicile même des patients est probablement

l’endroit où l’ergothérapie trouve (ou trouverait) à exprimer au mieux sa spécificité » (Meeus,

1997, p260). À la fin des années 1990, une étude a été réalisée en Belgique par le Groupe

de Recherche Appliquée en Ergothérapie (GRApE)8 afin de démontrer l’intérêt de

l’intervention au domicile des ergothérapeutes. Cette étude a montré que les patients et leur

l’entourage n’étaient pas systématiquement demandeurs d’aide, mais que la plupart du

temps des préconisations en aménagement, aides techniques et des conseils divers ont été

donnés, notamment lors de la visite à domicile. L’ergothérapie a continué à se développer et

à se faire connaitre dans le milieu médical. Selon une étude plus récente, l’ergothérapie

permet « d’améliorer les capacités des patients pour la réalisation des activités de la vie

quotidienne […] et réduire la charge des aidants en améliorant leur sentiment de

compétence et leur capacité à gérer les problèmes comportementaux qu’ils rencontrent »

(Graff, 2011, p7). Ce qui peut expliquer la création de postes d’ergothérapeutes au sein des

équipes spécialisées Alzheimer, puisqu’elles interviennent principalement au domicile.

On constate donc que les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer sont de plus

en plus nombreuses en France et quelles souhaitent rester majoritairement chez elles. On

remarque également que 28% des personnes de 60 ans et plus, tout public confondu, « sont

aidées régulièrement en raison d’un problème de santé ou d’un handicap dans les tâches de

la vie quotidienne, financièrement ou par un soutien moral » (DREES, Août 2011, p2). Cette

aide est fourni dans 48% des cas par l’entourage seulement, dans 20% des cas par les

professionnels et dans 32 % des cas par la famille et les professionnels9 (DRESS10, Août

2011, p3). Les personnes âgées vieillissant avec un problème de santé ou un handicap, telle

que la maladie d’Alzheimer, reçoivent donc une grande partie de l’aide quotidienne par leur

entourage familial. La personne concernée est appelée aidant familial, ou aidant informel.

Les informations exposées au « Train Alzheimer » (Amouyel et al., 2011, Rennes)

m’ont renseigné sur le rôle d’un aidant familial. Il se caractérise par le fait qu’il soit un

membre de la famille ou un ami proche de la personne malade et qu’il apporte un soutien, de

l’aide et des soins sans être rémunéré. De plus, selon la Haute Autorité de Santé (HAS) on

remarque que majoritairement ce sont les conjoints et les enfants qui ont ce rôle (HAS, 2010,

p12). Elle définit également plus précisément ce qu’est un aidant informel, c’est « la

personne non professionnelle qui vient en aide à titre principal pour partie ou totalement, à

une personne dépendante de son entourage, pour les activités de la vie quotidienne. Cette

aide régulière peut être prodiguée de façon permanente ou non et peut prendre plusieurs

formes, notamment : nursing, soins, accompagnement à l’éducation et à la vie sociale,

8 Ibid. P264 9 Ensemble de l’étude présentée en Annexe 1 10 Cf. glossaire

Page 12: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

6

démarches administratives, coordination, vigilance permanente, soutien psychologique,

communication, activités domestiques, etc. ».11 On remarque que l’aidant informel peut être

amené à prodiguer de l’aide de diverses manières et en soit il peut être vu comme un

soignant profane. Depuis de nombreuses années on rencontre dans notre société des

soignants profanes qui « pour gérer la santé ou la maladie, […] mobilisent un certain nombre

de connaissances, d’origine et de nature diverses, même s’ils n’en disposent que de façon

fragmentaire »12. Alors que « l’aidant est le plus souvent un conjoint âgé » (Boschat, 2001,

p21), on remarque surtout que « 80% sont des femmes » (Le Reun, 2009, p3). En effet,

depuis très longtemps « la division sexuée du travail familial fait de la femme un véritable

agent de santé primaire à l’intérieur de la famille » (CRESSON, 1995, p43). Le conjoint est

en permanence avec la personne malade et possède un lien affectif très fort avec lui, du fait

qu’ils soient en couple. Le risque d’épuisement est donc d’autant plus important pour lui. La

cohabitation et l’importance du lien affectif étant deux des facteurs de vulnérabilité de

dépression de l’aidant13.

Comme l’énonce le plan Alzheimer dans la mesure 2, les aidants familiaux ne sont

pas formés aux troubles et notamment aux troubles du comportement. C’est pourquoi ce

plan oriente certaines de ces mesures vers l’aidant, soignant profane, à la fois par des

formations mais aussi par l’intervention de professionnel au domicile pour les écouter et

trouver ensemble des solutions à leurs difficultés. Il est d’autant plus important de prendre en

compte le rôle de l’aidant car il intervient environ 60h par semaine auprès de la personne

malade et ce pendant 6 ans et demi en moyenne avant l’entrée en institution (Le Reun,

2009, p3). « L’accompagnement du malade Alzheimer a indéniablement pour l’aidant un

retentissement au niveau social (raréfaction des liens sociaux) mais également en terme de

santé (cas plus fréquents de dépression). » (Boschat, 2001, p21) Ainsi au sein des équipes

spécialisées Alzheimer, l’ergothérapeute va prendre en compte les difficultés rencontrées

dans le quotidien de la personne malade, mais aussi les répercussions des troubles du

comportement. La prise en charge précoce d’une personne âgée Alzheimer par un aidant

familial soutenu par des professionnels, permettrait-elle d’améliorer la situation de vie à

domicile ? Est ce que l’intervention de professionnels à domicile peut retarder l’évolution des

troubles chez la personne porteuse de la maladie d’Alzheimer et de limiter l’épuisement du

conjoint aidant ?

11 HAS. Recommandations de bonne pratique : Maladie d’Alzheimer et maladies apparentées : suivi médical des aidants naturels : Argumentaire. Février 2010. P12 12 Geneviève Cresson. Le travail domestique de santé. Mai 1995. P87 13 Le Reun. Aide aux aidants familiaux des malades d’Alzheimer. 2009. 7

Page 13: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

7

Les questions de ce travail porte sur l’apport de l’ergothérapie dans le cadre des

missions dévolues aux équipes spécialisées Alzheimer auprès du conjoint aidant.

De multiples interventions sont possibles auprès de l’aidant. Il y a l’écoute de l’aidant

dans l’action directe de l’ergothérapeute vis-à-vis de la personne porteuse du syndrome

démentiel (aménagement du cadre de vie, mise en place d’aides humaines et/ou matérielles,

conseils prodigués). Toutes ces interventions ont pour but de maintenir au mieux les

fonctions et la possibilité de retrouver des activités.

Ces interventions multiples sont-elles de nature à soulager l’aidant ? Ont-elles de

l’importance pour le conjoint ?

Hypothèse 1 : au sein d’une équipe spécialisée Alzheimer, les interventions d’un

ergothérapeute peuvent contribuer à soutenir, améliorer la qualité de vie et limiter

l’épuisement de l’aidant.

Hypothèse 2 : le soutien apporté à la personne atteinte de la maladie d’Alzheimer, via les

actions de l’ergothérapie, ont une répercussion positive sur l’aidant.

Hypothèse 3 : en informant le patient et l’aidant, l’ergothérapeute permet une meilleure

compréhension et des réactions adaptées par rapport à la maladie, ce qui limite l’aggravation

des troubles du comportement.

Pour explorer ce questionnement, nous allons tout d’abord rechercher les concepts et

apports théoriques. Puis procéder à des entretiens auprès de 4 ergothérapeutes

intervenants dans des équipes spécialisées, auprès d’une Assistante de Soins en

Gérontologie (ASG) et enfin auprès d’un aidant principal dont le conjoint a été suivi par une

équipe spécialisée Alzheimer.

Page 14: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

8

APPORTS THEORIQUES

1 La maladie d’Alzheimer

1.1 Affection neurodégénérative

La maladie d’Alzheimer est une affection neurodégénérative du système nerveux

central, non héréditaire le plus fréquemment, avec seulement 2% de forme familiale14. Elle a

été découverte en 1906, par le psychiatre et neuropathologiste allemand Alois Alzheimer,

durant l’autopsie d’une femme de 51 ans. Il a repéré des lésions cérébrales qui

caractérisaient une maladie neurologique. La patiente présentait selon lui une

« dégénérescence fibrillaire », caractérisée par un « grand tableau démentiel avec

désorientation et hallucination »15. Cette maladie a fait l’objet ensuite de nombreuses

recherches afin de déterminer plus précisément son origine, sa symptomatologie et les

possibilités de traitement.

Les recherches ont montré que la maladie d’Alzheimer est due à l’apparition de

plaques séniles, de plaques amyloïdes et d’une dégénérescence fibrillaire.

Les plaques amyloïdes : C’est « le premier type de lésion cérébrale retrouvée dans la

maladie d’Alzheimer. Elle correspond au dépôt progressif d’une substance insoluble,

appelée « amyloïde », entre les neurones. […] Les plaques sont des agrégats de dépôts non

éliminés qui provoquent une réaction inflammatoire neurotoxique entraînant la mort des

neurones englués dans cette substance. » (Marsaudon, 2011, p 17).

La dégénérescence fibrillaire : C’est « le second type de lésion cérébrale retrouvée dans la

maladie d’Alzheimer. Il s’agit d’une accumulation dans le neurone de filaments constitués par

une agrégation de protéines microtubulaires appelés ‘‘Tau’’. »16. Dans le cas de cette

maladie c’est le fait que la dégénérescence fibrillaire soit anormalement phosphorylée,

regroupée en hélice et associée aux plaques amyloïdes qui provoquent la destruction des

neurones.

Les plaques séniles : C’est « l’association des deux lésions précédentes : un dépôt

extracellulaire amyloïde de peptide AB, entouré d’une couronne formée d’axones chargés de

protéine Tau »17.

14 Amouyel et al. Le Train Alzheimer. 2011 15 Patry-Morel. Maladie d’Alzheimer et troubles apparentés : rééducation théorie et pratique. 2006. P20 16 Ibid. P18 17 Ibid. P19

Page 15: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

9

La survenue de ces plaques touche dans un premier temps la région hippocampique

du cerveau, ensuite le cortex temporal, puis les régions corticales associatives (temporale

supérieure, le pôle frontal et le cortex pariétal). Il y a également l’aire de Broca qui est

atteinte par cette dégénérescence, puis le cortex occipital. Au stade le plus sévère de la

maladie, c’est la quasi-totalité des aires cérébrales qui sont touchées (Marsaudon, 2011).

1.2 Les principaux troubles

Selon le Manuel Diagnostique et Statistique des maladies mentales (DSM-IV), les

critères pour repérer la démence d’Alzheimer sont portés sur les déficits des fonctions

cognitives. Ainsi, dans la maladie d’Alzheimer on peut trouver les troubles suivants :

- altération de la mémoire : « au stade initial, les troubles portent sur les faits

immédiats […] ensuite vient l’oubli des événements récents »18. On observe dans un premier

temps la personne égarer des objets ou ne pas éteindre les lumières puis oublier des

évènements récents de sa vie. Et puis « un des troubles les plus importants est l’incapacité

d’apprendre, c'est-à-dire d’enregistrer une information nouvelle » (Gove, 2010, p35), ce qui

fait que la personne doit sans arrêt noter les informations pour ne pas les oublier. Ce que

l’on note également c’est qu’au départ les troubles mnésiques sont partiels, ne touchent pas

tous les évènements. Mais « plus tard, le trouble mnésique est total et perturbe la vie

quotidienne et la vie sociale » (Duquenoy, 2004, p29). Il y a des répercussions puisque « les

difficultés d’orientation spatiales sont multipliées »19, la personne est désorientée, ne sait

plus pourquoi elle est dans cet endroit et comment rentrer chez elle.

- aphasie : c’est « un trouble du langage qui entraine l’impossibilité de traduire la pensée par

des mots malgré des organes de phonation corrects (manque de mots) » (Duquenoy, 2004,

p30) et qui touche dans un premier temps « les mots les plus rares, abstraits ou récemment

acquis »20.

- apraxie : « c’est un trouble acquis du comportement gestuel volontaire, intentionnel,

empêchant la réalisation sur commande de certains gestes, alors qu’il n’existe ni déficit

moteur ou sensitif, ni incoordination, ni troubles majeurs de la compréhension »21. Elle

touche les gestes bimanuels sans signification (pince pouce/index par exemple) demandés

sur consignes verbales, puis les gestes symboliques et l’utilisation d’objets usuels.

18 Karyne Duquenoy Spychala. Comprendre et accompagner les malades âgés atteints d’Alzheimer. 2004. P29 19 Ibid. P29 20 Ibid. P30 21 Ibid. P32

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10

- agnosie : « incapacité à reconnaitre les personnes et les objets » (Gove, 2010, p65).

Souvent associée à d’autres troubles par erreur comme ceux de la mémoire, une baisse de

l’acuité visuelle ou une confusion entre les objets et personnes. On observe aussi

généralement un phénomène d’anosognosie chez les personnes malades où « les troubles

peuvent être ignorés partiellement ou complètement, le malade nie les difficultés qui en

résultent » (Duquenoy, 2004, p30).

- trouble des fonctions exécutives : on peut remarquer des troubles du jugement, de

l’attention, du raisonnement, des difficultés d’abstractions, de calcul et dans la gestion de

situations nouvelles. Tous ces troubles perturbent les activités complexes de la vie

quotidienne comme les activités à doubles tâches ou de réflexion (Duquenoy, 2004, p33).

Cependant, il existe aussi de nombreux troubles du comportement dans la maladie

d’Alzheimer. Il existe plusieurs grilles ou évaluation répertoriant les troubles du

comportement chez une personne démente. Il me semble pertinent de m’attarder sur les

symptômes comportementaux et psychiques de la démence (SCPD) dont voici les

principaux troubles répertoriés, liste non exhaustive.

- agitation / agressivité : cette catégorie regroupe plusieurs troubles possibles et apparait

dans 50 à 60% des cas22. Ainsi l’agitation est perçue comme « une série de comportements

moteurs (attitudes, mouvements) ou verbaux (répétition de questions ou de mots) qui ne

traduisent pas des besoins apparents et qui paraissent inadaptés car ils n’ont pas un but

évident »23. La personne malade ne contrôle plus une situation ou est anxieuse et manifeste

ce changement par de l’agitation voire de l’agressivité. En sachant que cette agressivité est

le plus fréquemment verbale et qu’elle est d’ordre physique lors d’un événement particulier

(nouveauté, moment désagréable, contrariété, conflit, douleur etc.)24.

- apathie / indifférence : « le centre de la motivation serait une des premières zones

atteintes dans le cerveau » ce qui entraine une perte d’initiative importante chez les

personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer. Les activités occupationnelles habituelles

n’intéressent plus le malade, il se repli sur lui-même et ne bouge quasiment plus de son lit ou

de sa chaise dans la journée (Gove, 2010 p66). Ce trouble apparait chez 70% des

personnes atteintes de cette maladie (Derouesné, 2005, p29).

- anxiété / angoisse : trouble qui apparait très tôt dans la maladie d’Alzheimer et qui

« demeure tout au long de la maladie »25. Il résulte soit d’un dysfonctionnement cérébral, soit

d’un problème psychique lié à la prise de conscience des divers troubles et de leurs

retentissements sur le quotidien (Khosravi, 2002, p51 et Duquenoy, 2004, p35). Ces troubles

22 Derouesné. La maladie d’Alzheimer : comportement et humeur. 2005. P29 23 Ibid. P58 24 Ibid. P64 25 Mitra Khosravi. La vie quotidienne du malade d’Alzheimer : guide pratique. 2002. P51

Page 17: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

11

se manifestent par de l’agitation « le malade court ou marche toute une journée, parle sans

cesse, touche et manipule quelque chose pendant des heures, éprouve une envie anormale

de manger » (Khosravi, 2002, p53). Il est présent dans 40 à 60% des cas26.

- hallucinations : présente dans 10 à 30% des situations, c’est le fait que la personne

perçoit des objets, personnes ou animaux qui ne font pas partie de la réalité. La personne

est la seule à les percevoir (Derouesné, 2005, p29 et p91).

- idées délirantes : elles apparaissent en moyenne dans 20 à 40% des cas27 et se

caractérisent par une « conviction absolue et inébranlable du malade que ce qu’il pense est

vrai »28. Une démonstration et un rappel à la réalité ne peuvent changer ces idées délirantes.

- sommeil : présent dans 40% des cas, il se caractérise par de « l’hypersomnolence diurne

favorisée par l’apathie et le désintérêt » (Duquenoy, 2004, p44). On observe parfois une

inversion du rythme nycthéméral qui devient difficilement gérable par l’entourage29.

- alimentation : présent chez 30% des personnes (Derouesné, 2005, p29), on peut observer

plusieurs comportements. Certains seront en dénutrition car ils oublient de manger, ne

savent plus comment se faire à manger ou comment porter les aliments à la bouche. Ils sont

déprimés ou n’ont pas l’initiative de manger, ou encore le goût des aliments ne donne pas

envie (ça peut être dû aux traitements ou à des hallucinations gustatives). Mais on observe

parfois le comportement inverse, « ils mangent tout ce qui se trouve à leur portée »

(Khosravi, 2002, p140).

Sans oublier tous les autres troubles du comportement comme la dépression, la

désinhibition, les stéréotypies, les fabulations, l’accumulation d’objets (collectionneurs) ou

leur destruction, l’incontinence, ne pas vouloir rester seul ou au contraire refuser le contact

avec une personne, mais aussi la fatigue. Tous ces troubles sont plus ou moins intriqués

entre eux et peuvent être fluctuants selon les périodes de la journée ou l’environnement de

la personne. Ils sont importants à repérer car entrainent diverses répercussions sur la vie

quotidienne (Derouesné - Khosravi – Duquenoy).

1.3 Poser le diagnostic

On sait depuis sa découverte que seule l’autopsie peut confirmer réellement la

présence de cette affection neurologique. Néanmoins, depuis plusieurs années, différents

moyens sont mis en place afin d’obtenir un diagnostic différentiel. Le plus souvent les

patients atteints de la maladie d’Alzheimer ont d’abord été voir leur médecin traitant pour une

plainte mnésique de leur part ou de l’entourage. Le médecin généraliste réalise alors

26 Derouesné. La maladie d’Alzheimer : comportement et humeur. 2005. P29 27 Ibid. P29 28 Ibid. P104 29 Ibid. P45

Page 18: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

12

quelques bilans neuropsychologiques et évalue rapidement les répercussions sur les

activités de la vie quotidienne. Si la plainte mnésique est suspecte, qu’elle est en lien avec

un trouble du langage ou un trouble gestuel et que l’entourage constate un changement de

comportement, alors la personne est dirigée vers une consultation mémoire. Elle rencontre

une équipe pluri professionnelle (neurologue, gériatre, orthophoniste, ergothérapeute…) qui

lui propose de passer un entretien avec des évaluations neuropsychologiques plus

avancées. Souvent vient ensuite des épreuves de laboratoires afin d’écarter des causes

réversibles de démence. Une neuro-imagerie est réalisée par un IRM, une scintigraphie ou

encore un pet scan, pour étudier le fonctionnement normal et anormal des aires cérébrales

(Marsaudon, 2005).

Tous les résultats sont mis en communs afin de poser un diagnostic le plus juste

possible. On peut s’appuyer également sur les critères du DSM –IV30, qui permet de poser

un diagnostic entre les différentes affections dégénératives. Selon le DSM-IV, la maladie

d’Alzheimer se caractérise par :

« - la présence du noyau démentiel (critère A et B),

- une évolution progressive et continue (critère C),

- la survenue non exclusivement liée à une confusion mentale (critère E),

- l’absence d’explication de la démence par d’autres affections du système nerveux central

(critère D1), par d’autres affections générales démentielles (critère D2), par des affections

liées à l’emploi de substances (critères D3),

- l’absence d’une meilleure explication par un trouble isolé de l’axe I (épisode dépressif

majeur, schizophrénie) » (Bakchine, 2003, p20).

Le tableau complet avec les critères détaillés du DSM-IV concernant la maladie d’Alzheimer

est en annexe 2.

1.4 Les facteurs de risques

Des facteurs de risques ont été repérés au cours d’études sur cette affection

neurologique. Deux sont prouvés statistiquement : l’âge et le sexe. En effet, « on constaterait

une augmentation exponentielle avec l’âge ; de 1,5% à l’âge de 65 ans, elle double tous les

quatre ans pour atteindre 30% à l’âge de 80 ans ».31 De plus les femmes semblent plus

touchées par cette maladie, plusieurs raisons peuvent l’expliquer. D’une part les femmes ont

une espérance de vie supérieure à celle des hommes : 78,2 ans pour les hommes et 84,8

30 Cf. glossaire 31 Patry-Morel. Maladie d’Alzheimer et troubles apparentés : rééducation, théorie et pratique. 2006. P20

Page 19: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

13

ans pour les femmes32. « D’autre part, la durée de la maladie semble plus longue

(engendrant moins de décès) chez les femmes que chez les hommes. »33

Dans certains ouvrages on peut voir d’autres facteurs de risques entrer en jeu dans cette

maladie : la faiblesse du réseau social et des activités, le niveau d’éducation, l’absence

d’exercice physique, une consommation importante de tabac, une hypertension artérielle, un

diabète, une dépression, un traumatisme crânien, un accident vasculaire cérébral. (Gove,

2010, p18 et Khosravi, 2002, p8) Cependant, ce ne sont que des hypothèses.

1.5 Les traitements médicamenteux et non médicamenteux

On remarque en tout cas une progression importante du nombre de personnes

touchées par cette affection en France. On compte près de 860 000 personnes atteintes et

selon les statistiques, il est estimé à 1,3 millions le nombre de personnes atteintes de la

maladie d’Alzheimer en 2020 et à 2,1 millions en 2040 (Marsaudon, 2011, p27).

Les recherches s’intensifient pour trouver et évaluer des traitements médicamenteux

et non médicamenteux qui améliorent l’état de la personne malade d’Alzheimer. Il n’existe

actuellement aucun traitement curatif pour cette affection neurologique. Cependant, 2

principaux traitements médicamenteux sont prescrits dans le cas de cette maladie et montre

des effets bénéfiques pour le patient :

- l’anticholinestérasique : c’est un neurotransmetteur qui inhibe l’effet du cholinestérase, ce

dernier étant le destructeur de l’acétylcholine. En permettant à l’acétylcholine de fonctionner

de manière plus efficace et en plus grande quantité, l’anti cholinestérase est reconnue

comme un traitement limitant le déclin cognitif. Il est prescrit dans les formes légère à

modérément sévère de la maladie d’Alzheimer (Balardy et al., 2004, p33).

- la mémantine : c’est un neurotransmetteur qui a une action antagoniste au glutamate. Ce

dernier est en excès et stimule de manière trop intense le système nerveux central. Il est

utilisé dans les « formes sévères de la MA (MMS entre 3 et 14) » et « un bénéfice

thérapeutique à 6 mois est observé sur la cognition, l’impression clinique globale,

l’autonomie et sur le temps de soins passé auprès du patient »34.

Outre ces traitements médicamenteux, une prise en charge pluridisciplinaire, non

médicamenteuse, peut être proposée pour des personnes atteintes de cette maladie. Cette

équipe peut comprendre comme professionnels : gériatre, psychologue, neuropsychologue,

infirmière, aide-soignante, assistante de soin en gérontologie, kinésithérapeute,

ergothérapeute, orthophoniste…etc. Selon l’ANAES35, en 2003, voici les grands objectifs de

32 INSEE. Étude sur l’évolution de l’espérance de vie à divers âge. 2011 33 Marsaudon. La maladie d’Alzheimer : informer – traiter – accompagner. 2011. P34 34 Balardy et al. Clinique des démences et spécificité de la maladie d’Alzheimer. 2004. P33 35 Ibid. p34 – Cf. Glossaire.

Page 20: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

14

leur prise en charge : stimulation cognitive, psycho-cognitive ; stimulation du comportement ;

stimulation sensorielle ; stimulation de l’activité motrice ; aménagement des lieux de vie ;

surveillance médicale.

Ces objectifs ont pour but : « améliorer les fonctions cognitives […] ; réduire le stress

lié à la maladie […] ; préserver le plus longtemps possible l’autonomie fonctionnelle […] les

liens et échanges sociaux ; maintenir et améliorer la qualité de vie ; retarder le passage en

institution ; aider, soulager et préserver la santé mentale et physique des aidants »36.

Pour cela les professionnels interviennent dans diverses structures hospitalières mais

également au domicile des personnes âgées.

2 Le maintien à domicile possible grâce aux aidants familiaux

2.1 Choix du maintien au domicile

En 2007 on comptait 366 49937 personnes en affection longue durée (ADL 15) et/ou

traitées pour une maladie d’Alzheimer, soit près de la moitié de la population globale touchée

par cette maladie. Ces personnes veulent rester à leur domicile « le plus longtemps

possible » (UNASSAD, 2004, p1). C’est un problème de santé public majeur car notre

politique actuelle est de respecter le choix de ces personnes et de mettre en place les

moyens nécessaires au niveau des soins pour que ce maintien à domicile soit réalisable. En

effet, « que ce soit pour des raisons humanistes (une personne a le droit d’être respectée

jusque dans sa maladie), pour des raisons libérales (une personne doit avoir le libre choix de

son lieu de vie) ou des raisons économiques (une personne à domicile ‘‘coûte’’ globalement

moins qu’une personne hospitalisée), le choix de vivre à domicile pour une personne atteinte

de la maladie d’Alzheimer est entendu aujourd’hui » (UNASSAD, 2004, p2).

C’est pourquoi il existe actuellement différentes aides humaines, matérielles et

financières38 pour favoriser ce maintien à domicile. Alors que des structures comme les

Services de Soins Infirmiers A Domicile (SSIAD), ESA39 ou Équipe Mobile Alzheimer (EMA),

structure de répit etc. se mettent en place ou se développent, on reconnait également la

maladie d’Alzheimer comme affection longue durée. Ce qui permet une prise en charge à

100% des soins40 et davantage de possibilité de maintien au domicile.

36 Ibid. P35 37 Circulaire du 23 mars 2011 relative à la mise en œuvre des mesures médico-sociales du plan Alzheimer. P11. 38 Tableau récapitulatif des différentes aides financières pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer en Annexe 3 39 Cf. glossaire 40 HAS. Liste des actes et prestation affection de longue durée. Juin 2010. P2

Page 21: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

15

On peut ensuite distinguer les éléments qui vont favoriser le maintien à domicile

jusqu’à un stade évolué. Dans les recommandations concernant la démarche éthique autour

de la maladie d’Alzheimer41 on trouve :

- « La précocité du diagnostic, sa connaissance par la personne malade et par ses proches.

- Un accompagnement, un soutien adéquat du patient et de ses proches tout au long du

parcours de la maladie, avec une évaluation régulière de la pertinence et de la qualité du

maintien à domicile.

- Une bonne cohésion entre les professionnels et les proches.

- Un soutien psychologique des professionnels. »

Ce groupe de travail composé de gériatres, psychiatres et sociologues

principalement, met aussi en évidence les limites du maintien à domicile pour une personne

atteinte de la maladie d’Alzheimer :

- « Les ressources financières sont insuffisantes.

- Les besoins de base et la sécurité de la personne malade ne peuvent plus être assurés

malgré l’implication des acteurs.

- Les ressources psychologiques et/ou physiques des aidants sont dépassées.

- La qualité du maintien à domicile se dégrade (maltraitance, enferment social de la

personne malade et/ou de son aidant, etc.) »42.

On peut donc voir que le maintien à domicile dépend non seulement de la volonté de

la personne malade de rester chez elle, mais également de tout le soutien que peut lui

apporter l’aidant et/ou l’entourage profane d’une manière générale.

2.2 Le conjoint, aidant principal

En ce qui concerne l’aidant principal qui intervient pour une personne malade

d’Alzheimer, il s’agit le plus souvent du (ou de la) conjoint(e) ou d’un enfant adulte. Et dans

80% des cas il s’agit des femmes (Le Reun, 2009, p3). « La prise en charge familiale repose

classiquement sur une seule personne (aidant principal), le plus souvent le conjoint ou la

fille, et ce, même si le réseau d’aidants potentiels est dense. Cet aidant familial principal est

une femme dans les trois quarts des cas. Les hommes assurent plus facilement le rôle

d’aidant secondaire ou de coaidant. » (Pr. Blanchard, p25). Geneviève Cresson (1995, p250)

a recensé différentes tâches sanitaires profanes réalisées le plus souvent par des femmes.

41 Professeur Blanchard et al. Alzheimer : l’éthique en question : recommandations. P43 42 Ibid. P43

Page 22: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

16

Parmi ces tâches on peut trouver :

Domaine de l’affectif Domaine du cognitif Domaine du pratique

Plan familial « créer une dynamique

familiale propice à

l’épanouissement, au

bien-être »

« recherche des

particularités

individuelles éducation

familiale à la santé,

information »

« assurer propreté,

hygiène, confort,

sécurité… faire les

démarches

administratives, etc. »

Plan

paramédical

« rassurer les malades

(être rassurée),

entretenir des relations

satisfaisantes avec les

professionnels »

« faire un diagnostic

profane, rechercher les

informations

spécifiques, évaluer le

travail des

professionnels »

« donner les soins

(traitement) aux

malades, ou à titre

préventif »

Plan externe « (contribuer à) créer

les relations et

l’ambiance propices au

bien-être, à la sécurité,

etc. à l’extérieur de la

famille »

« rechercher les

informations non-

médicales sur les

nuisances, les moyens

de défense… »

« agir sur les plans

professionnel, politique,

amical, etc. pour une

meilleure santé (une

meilleure sécurité

etc.) »

L’étude que décrit Geneviève Cresson démontre que, pour toutes populations

confondues, le soignant profane tient une grande importance dans la réalisation d’activités

de la vie quotidienne. Selon l’étude de Nelly Le Reun, l’aidant principal d’un patient atteint de

la maladie d’Alzheimer passe « 60 heures hebdomadaires » à aider son proche malade et ce

« pendant 6 ans et demi avant l’entrée en hébergement (ou environ 10 ans) » (Le Reun,

2009, p4). Cependant, il ne faut pas oublier les répercussions de cette prise en charge

quotidienne et certains conjoints le perçoivent très bien. Toujours selon l’étude de Nelly Le

Reun, les aidants familiaux font ressortir 2 grands points concernant l’impact de la relation

d’aide sur la santé des aidants :

- le stress chronique : avec à la fois un retentissement social (isolement, difficultés

financières), une souffrance psychologique et morale (« le fardeau », épuisement,

dépression) et un retentissement sur la santé physique.

- la valorisation : estime de soi, optimisme, valorisation dans le rôle de l’aidant, support social

correct et réconfortant.

Page 23: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

17

Dans certains cas, on peut observer un impact négatif de cette relation d’aide sur la

santé du malade. Si l’épuisement de l’aidant est très important cela peut provoquer :

« aggravation des troubles comportementaux, maltraitance (physique, psychologique,

médicamenteuse), institutionnalisation en urgence » (Le Reun, 2009, p9).

Il faut donc avant tout prendre en compte les facteurs de risques d’épuisement de

l’aidant. Dans les recommandations éthiques autour de la maladie d’Alzheimer, le groupe de

travail que coordonne le professeur Blanchard a fait une liste complète de ces facteurs de

risques (l’ensemble est présenté en annexe 4) et en voici les principaux :

« - l’âge avancé et l’état de santé précaire de l’aidant ;

- l’isolement […] ;

- l’ambition de vouloir tout faire et tout normaliser, parfois en rivalité avec les soignants ; ou

alors, à trop vouloir masquer ou se cacher la réalité de la maladie, […] ;

- l’incapacité de se projeter dans l’avenir, devant l’aggravation progressive de l’état de santé

de son parent, avec un sentiment d’impuissance et/ou de culpabilité ;

- les traumatismes provoqués […] par la non reconnaissance des proches par la personne

malade ;

- l’ambivalence entre désir de vie et désir de mort ;

- le ressentiment face à des conduites inadaptées du parent malade, […] ;

- un temps important de présence quotidienne consacré à l’aide alors que la prise en charge

dure depuis plusieurs mois, voire des années ;

- le deuil anticipé d’une personne pourtant toujours vivante ;

- les problèmes matériels, notamment un habitat inadapté. »

Le ressenti des aidants est très variable, selon les situations. C’est pourquoi il arrive

que certains refusent la prise en charge et que d’autres soient en demande d’aide. Certaines

associations de familles ont exprimé, lors de la conférence des familles en 200643, leur envie

de reconnaissance de leur fonction, de proposition de solution de répit et de proposition de

nouvelles technologies d’assistance. Pour les aidants dans le refus d’aide professionnel cela

peut s’expliquer « par les représentations ou les présupposés que construisent les individus

à propos de certains services. Les personnes déterminent ainsi des repères et se fixent des

limites à ne pas dépasser sans aide. »44 Ils attendent dans la plupart des cas une

modification brutale des conditions de vie du malade, de l’entourage ou de se retrouver dans

une situation critique, pour en arriver à demander de l’aide. Il faut noter aussi que l’aidant

familial « se sent investi de cette mission et considère cet engagement comme une chose

43 Le Reun. Aide aux aidants familiaux des malades d’Alzheimer. P12. 44 Le Mauff. Autour de l’urgence gérontologique. P64

Page 24: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

18

évidente »45. Il est donc parfois difficile de les convaincre qu’ils vont rapidement être épuisés

s’ils ne font pas appel à des aides professionnelles.

C’est pourquoi un plan Alzheimer a été mis en place, afin de fixer des objectifs et des

moyens précis pouvant répondre à la fois à l’augmentation importante du nombre de

personne malade, mais surtout à la demande et aux besoins d’aide des familles. Ainsi grâce

à une intervention pluriprofessionnelle et à la mise en place d’un projet individualisé en

réponse à la demande des personnes, des aides pourront être proposées. Ce plan

Alzheimer 2008-201246 prévoit ainsi d’améliorer les dispositifs d’annonce et

d’accompagnement et d’augmenter l’activité des consultations mémoire en France. Il prévoit

une meilleure prise en charge de la personne porteuse de la maladie d’Alzheimer par la

création ou le renforcement de structure comme les Maisons pour l’autonomie et l’intégration

des malades Alzheimer (MAIA), les Établissements d’Hébergement pour Personnes Âgées

Dépendantes (EHPAD), les équipes spécialisées Alzheimer, un centre national de référence

pour les malades Alzheimer jeunes etc.

3 L’ergothérapie en équipe spécialisée Alzheimer

3.1 Organisation de l’ESA

Les équipes spécialisées Alzheimer (ESA) sont apparues en France en 2009. Mises

en place suite au plan Alzheimer 2008-2012 et plus précisément après la mesure 6

(présentée en annexe 5), elles étaient 39 au départ. Après une expérimentation du projet et

un retour des professionnels sur leurs pratiques à domicile, les ESA se sont formalisées et

on devrait en compter 500 d’ici fin 2012. Fort de cette expérimentation, le cahier des charges

de ces équipes a été réétudié par la Direction Générale de la Cohésion Sociale (DGCS) afin

de répondre au mieux à l’objectif fixé : « réduire les symptômes et/ou maintenir ou

développer les capacités résiduelles des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer afin

de permettre le maintien à domicile »47. Le cahier des charges reprend les constats fait par

les professionnels sur le terrain ; donne le mode d’organisation et de fonctionnement des

équipes ; reprend les critères d’inclusions des patients ; informe du lieu de réalisation, de la

durée et de l’intensité des séances ; et expliquent les actions possibles par l’équipe.

Intervenant au sein des SSIAD48 ou de Services Polyvalents d’Aides et de Soins à

Domicile (SPASAD), ces équipes sont composées d’un infirmier coordinateur, d’un

ergothérapeute et/ou psychomotricien et d’ASG49. Ainsi, l’infirmier et les ASG peuvent

45 Ibid. P64 46 Missions de pilotage du Plan Alzheimer 2008-2012. 47 Ministère des solidarités et de la cohésion sociale. Annexe 1 : Cahier des charges des ESA. 2011. P1 48 Cf. glossaire 49 Cf. glossaire

Page 25: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

19

intervenir à la fois sur l’ESA mais aussi sur le SSIAD ou le SPASAD. Ils ont chacun des rôles

bien définis :

« - infirmier coordinateur (IDEC) en charge des partenariats, de l’évaluation de base et de la

coordination des interventions et du suivi de celles-ci (0,25 ETP50) ;

- ergothérapeute et/ou psychomotricien en charge de la réalisation de l’évaluation des

capacités du malade, des séances de soins de réhabilitation et d’accompagnement et du

bilan adressé au médecin traitant (1 ETP) ;

- assistants de soins en gérontologie (ASG) qui réalisent pour partie les soins de

réhabilitation et d’accompagnement sur la base de l’évaluation et des objectifs assignés par

l’ergothérapeute et/ou le psychomotricien (1,5 ETP). »51

Pour permettre à cette équipe d’intervenir au domicile plusieurs règles ont été mises

en place. Comme le décrit Christine Boschat, l’appellation d’équipe spécialisée Alzheimer est

réductrice par rapport aux maladies apparentées existantes. Il est donc possible de modifier

le nom de l’équipe, on peut ainsi entendre le nom d’Équipe Spécialisée dans les Pathologies

de la Mémoire (ESPM) dans certains territoires. De plus, l’équipe ne peut intervenir « qu’à

partir du moment où le médecin traitant et/ou le médecin spécialiste le demande(nt) »

(Boschat, 2011, p18). Le médecin ayant connaissance du dossier médical, le diagnostic est

posé ou en cours de recherche et la personne est avertie. « En aucun cas notre intervention

ne doit perturber le malade en lui proposant des soins dont il croit ne pas avoir besoin. »52 Il

faut une prescription médicale demandant un bilan ergothérapique, puis une autre

prescription avec l’appellation « 12 à 15 séances de réhabilitation pour maladie d’Alzheimer

ou maladie apparentée »53. Le nombre de séance de réhabilitation a été fixé suite à l’étude

de Maud Graff (2011, p12). Elle explique que « 10 sessions d’ergothérapie en milieu

ordinaire de vie, administré pendant 5 semaines, avaient amélioré le fonctionnement en vie

quotidienne des patients atteints de démence, et diminué la charge en soin supportée par

leurs aidants principaux ». Enfin, le patient doit être en accord avec le projet et les

interventions de l’équipe. C’est pourquoi un contrat de soins est réalisé dans chaque équipe,

remis au patient et signé en sa présence. Ce contrat « stipule les droits et obligations des

deux parties (patient/équipe spécialisée), la nature des soins, le nombre et les jours des

séances »54.

50 ETP = équivalent temps plein 51 Ibid. P3 52 Boschat. L’expérimentation d’une ESA. P18 53 Ministère des solidarités et de la cohésion sociale. Annexe 1 : Cahier des charges des ESA. 2011. P5 54 Ibid. P18

Page 26: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

20

Les critères d’inclusion indiqués dans le cahier des charges expliquent qu’une équipe

spécialisée Alzheimer « s’adresse prioritairement aux personnes atteintes de la maladie

d’Alzheimer ou apparentés diagnostiquées à un stade léger ou modéré de la maladie […] ;

pouvant faire l’objet d’une intervention de réhabilitation (conservant une mobilité, une

capacité d’attention, une capacité de compréhension… »55.

Une formation a été mise en place pour que les aides soignants ou les aides médico-

psychologiques (AMP) qui le souhaitent, puissent devenir assistants de soins en

gérontologie. Il est de la décision des SSIAD56 et SPASAD de recruter des ASG57 qui sont

également aides-soignants ou AMP dans un autre service de soin, ou de les embaucher à

temps plein sur l’ESA. Les ergothérapeutes sont également formés à ces nouvelles

pratiques, que ce soit en école ou dans le cadre de formation continue.

Toujours selon le cahier des charges des ESA, il est décrit que ces structures

« couvrent un territoire plus large que les SSIAD classique ». Les professionnels

interviennent à la fois auprès de personnes ne relevant pas de prise en charge en SSIAD,

mais aussi auprès de personnes prise en charge par le SSIAD rattaché à l’ESA, ou par un

autre SSIAD s’il y a besoin.

3.2 Déroulement de l’intervention

L’équipe spécialisée Alzheimer propose des soins de réhabilitation. Mais avant de

proposer ces soins l’ergothérapeute réalise un bilan au domicile de la personne malade.

Christine Boschat (2011, p19) explique que « le déroulement de l’évaluation doit […] se faire

au gré de la qualité des échanges et ne respecte pas forcément l’ordre préétabli des

bilans ». Elle ajoute que lors du bilan, elle recherche les troubles liées à la maladie

d’Alzheimer et leurs répercussions sur la vie quotidienne. Ces bilans s’orientent autour de

trois axes, « les facteurs personnels, l’environnement humain ainsi que l’environnement

matériel ». C’est également ce que le centre de la mémoire de Liège décrit en réhabilitation

cognitive lors de la passation bilan. Ils expliquent que ce bilan sert à fixer les objectifs

d’intervention. « En réhabilitation cognitive dans le cadre de démence, le niveau fonctionnel

du sujet, ses habitudes de vie, son environnement, mais aussi la disponibilité des proches

sont autant de facteurs qui déterminent si les objectifs à poursuivre sont réalistes ou non. »58

Tout au long des séances, l’équipe réalise des actions auprès du malade, de l’aidant

et de l’environnement du malade. L’ergothérapeute, qui a un rôle d’évaluateur de la situation

55 Ministère des solidarités et de la cohésion sociale. Annexe 1 : Cahier des charges des ESA. 2011. P5 56 Cf. glossaire 57 Cf. glossaire 58 Wojtasik. Réadaptation cognitive d’activités de vie quotidienne dans la maladie d’Alzheimer. 2003. P5

Page 27: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

21

au domicile, propose donc un plan d’intervention contenant un ou deux objectifs parmi les 7

domaines suivants (HAS, 2010)59 :

- « réadaptation cognitive dans les activités de la vie quotidienne […] ;

- préconisation et entrainement à l’utilisation d’aides techniques […] ;

- réadaptation de la mobilité et des transferts […] ;

- prévention et traitement des risques de chute […] ;

- positionnement des troubles posturaux assis et en décubitus […] ;

- développement des performances de l’entourage dans la prise en charge et

l’accompagnement du patient […] ;

- aménagement de l’environnement ».

L’ensemble des actes d’ergothérapie (objectifs et outils d’évaluation) sont présentés en

annexe 6.

Afin de réaliser ce plan d’intervention, l’ergothérapeute va intervenir au domicile des

personnes pour leur proposer des activités répondant aux objectifs fixés. Selon les objectifs,

il va déléguer certaines activités aux ASG60, qui sont formés aux pathologies démentielles. A

noter une petite distinction dans le rôle des ASG : « il ne s’agit pas d’une délégation de

compétences au sens juridique mais d’une supervision de la mise en œuvre de l’intervention

sous leur responsabilité »61. Une étroite collaboration existe entre l’ergothérapeute et les

ASG pour permettre le bon fonctionnement de l’équipe.

Les moyens mis en place par l’ergothérapeute et les ASG ont toujours pour principes

ceux de la réhabilitation cognitive. Il s’agit de « comprendre la nature des erreurs du patient

en fonctionnement […] pour pouvoir apporter les adaptations nécessaires au maintien de

l’activité » (Wojtasik, 2003, p7). Ainsi l’équipe de Liège explique qu’il faut donner des

conseils et astuces aux aidants pour faciliter la réhabilitation cognitive au quotidien. Parmi

les principes on trouve également les diverses stratégies que l’on peut utiliser : « facilitation

des performances, apprentissage de nouvelles connaissances et/ou automatismes,

aménagement de l’environnement (Van der Linden, 1995) »62. C’est ce que l’on retrouve

dans le cahier des charges avec la liste d’activités réalisables au domicile des patients :

- « conseiller, éduquer, prévenir la personne malade et son entourage ;

- solliciter et renforcer les compétences préservées et résiduelles et les savoir-faire ;

- proposer et automatiser des stratégies d’adaptation ;

- renforcer l’estime de soi, la communication verbale et non verbale »63.

59 HAS. Actes d’ergothérapie et de psychomotricité. Janvier 2010 60 Cf. glossaire 61 Ministère des solidarités et de la cohésion sociale. Annexe 1 : Cahier des charges des ESA. 2011. P3 62 Ibid. P7 63 Ministère des solidarités et de la cohésion sociale. Annexe 1 : Cahier des charges des ESA. 2011. P7

Page 28: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

22

En sachant que les objectifs fixés et les moyens mis en place à domicile par l’équipe

spécialisée ne perdurent pas dans le temps car la prescription est limitée à 3 mois maximum

d’intervention, mais elle est « renouvelable tous les ans »64.

Les équipes spécialisées Alzheimer respectent un certain nombre de règles instaurés

dans le cahier des charges. Elle propose en théorie une intervention adaptée à chaque

situation avec une équipe pouvant répondre à différents objectifs fixés en fonction de la

situation. L’ergothérapeute a un rôle important puisqu’il évalue la situation au domicile, fixe

les objectifs, réalise quelques séances et délègue des soins de réhabilitation aux ASG.

Selon le cahier des charges, l’aidant doit être inclut dans le projet de soin et l’équipe

spécialisée se doit de transmettre des conseils et préconisations pour améliorer la qualité de

vie du patient et de l’aidant.

On constate que la maladie d’Alzheimer est une affection neurodégénérative

complexe qui touche de plus en plus de personnes en France. De nombreuses recherches

sont réalisées pour proposer des traitements médicamenteux et non médicamenteux

adaptés à cette maladie mais aussi sur les répercussions dans la vie quotidienne. Parmi ces

solutions on retient la création du Plan Alzheimer 2008-2012 et notamment la mise en place

des équipes spécialisées Alzheimer composées entre autre d’un ergothérapeute. Ces

équipes interviennent à domicile et proposent des séances de réhabilitation afin de permettre

le maintien au domicile, si c’est le désir du patient et de son entourage. Leur intervention

permet d’accompagner à la fois la personne malade en fonction des difficultés qu’elle peut

rencontrer dans son quotidien. Mais elle permet également de soutenir l’aidant principal et

l’entourage familial en général, dans la compréhension et la manière de réagir face aux

troubles cognitifs et aux troubles du comportement.

De part son intervention, l’ergothérapeute contribue à soutenir, améliorer la qualité de

vie et limiter l’épuisement de l’aidant. Il informe, conseille le patient et son entourage afin de

limiter les troubles du comportement et leurs répercussions dans les activités de la vie

quotidienne. L’action directe de l’ergothérapeute sur la personne atteinte de la maladie

d’Alzheimer est bénéfique à la fois pour le malade et pour son entourage.

Après avoir exploré les troubles de la maladie d’Alzheimer et les répercussions sur

l’entourage familial, cet écrit va présenter de quelle manière les ergothérapeutes

interviennent concrètement auprès du conjoint aidant au sein d’une équipe spécialisée

Alzheimer.

64 Ibid. P6

Page 29: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

23

RECUEIL DE DONNEES

1 Méthodologie

Le recueil de données à pour but de répondre à ma problématique et de comprendre

comment les ergothérapeutes interviennent au domicile d’un couple dont un des conjoints

est atteint de la maladie d’Alzheimer.

1.1 L’entretien

J’ai choisi d’utiliser l’entretien pour mon recueil de données. La réalisation d’une

grille d’entretien m’a permis d’interroger les personnes avec des questions semi-directives.

Les informations ainsi recueillies sont riches qualitativement et me permettent d’avoir l’avis

des personnes interrogées. Grâce à cette grille d’entretien l’échange était plus facile et le

recueil de données plus riche. Tous les entretiens réalisés ont été enregistrés avec un

dictaphone puis retranscrit. La durée moyenne d’un entretien est de 30min.

1.2 La population interrogée

Parmi les 6 entretiens réalisés, 4 étaient destinés à des ergothérapeutes travaillant

en équipe spécialisée Alzheimer afin de connaitre leur pratique professionnelle. Pour

compléter ces entretiens, une assistante de soins en gérontologie a bien voulu me confier

son avis de professionnel sur le terrain. Enfin un entretien auprès d’un aidant m’a permis de

connaitre son ressenti par rapport à l’intervention de l’équipe. Une présentation succincte de

ces personnes permettra de mieux comprendre les réponses obtenues. Afin de préserver

l’anonymat des personnes interrogées, leurs prénoms ont été modifiés.

Mme Laure D. Mme Marine B. Mme Charlotte

G.

Mme Emilie M. Mme Marie-

Françoise X.

M. Michel Y

Ergothérapeute

en ESA

Ergothérapeute

en ESA

Ergothérapeute

en ESA

Ergothérapeute

en ESA

ASG en ESA Aidant

principal

Depuis 1 an Depuis 2 ans et

demi

Depuis 2 mois Depuis 2 ans et

demi

Depuis 2 ans

et demi

Intervention

terminée

1.3 La procédure d’analyse

Les entretiens étant très riches et afin de conserver au mieux l’aspect qualitatif des

données, il était pertinent de réaliser une analyse thématique. Après avoir cherché les

thèmes récurrents, la réalisation d’un tableau de pré-analyse m’a permis de faciliter l’analyse

en répertoriant les réponses par thèmes. L’analyse sera riche en illustration afin de

retranscrire au mieux les informations recueillies. En annexe 7 et 8 sont retranscrits les

entretiens de Marine et Michel.

Page 30: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

24

2 L’analyse des entretiens

2.1 Des contextes de recours et des situations initiales différentes

2.1.1 Les différentes modalités de recours à l’ESA

Dans toutes les situations présentées l’équipe intervient au domicile des personnes

suite à une demande des partenaires professionnels et parfois des familles elles-mêmes.

L’intervention est progressive et commence par un premier temps de rencontre.

Pour Laure, les situations sont transmises par des partenaires comme le médecin, le

CLIC (centre local d’information et de coordination) ou l’hôpital. Ensuite, « on appelle la

famille, ou bien si jamais c’est eux qui on notre numéro, la famille nous joint, et il y a une

première explication téléphonique ». Puis une visite est organisée chez les personnes. « Et

cette visite là elle ne compte pas dans les séances, mais c’est vraiment une visite où

j’explique et les gens peuvent me dire oui ou non ils acceptent qu’on intervienne finalement

ou pas. » Dans l’équipe de Charlotte les situations sont souvent transmises par « les

spécialistes du domicile, par les services de soins, les SSIAD65 ou les aides à domicile ».

Mais il y aussi les médecins traitants et les familles qui demandent directement une

intervention de l’équipe. Dans tous les cas la famille et le médecin sont tenus au courant.

« Nous on appelle la famille en proposant une intervention et après, en parallèle on appelle

le médecin en lui disant que il y a des nouvelles équipes et que s’il veut bien, si on a son

accord pour intervenir. » Ensuite Charlotte rencontre la famille et cette « première évaluation

c’est plus une prise de connaissance de la situation ». Pour Emilie, les situations sont

rapportées par le médecin ou un « tiers professionnel ». Un appel téléphonique est passé à

la famille et un rendez-vous à domicile est fixé. Ce rendez-vous est « éventuellement en

binôme avec l’infirmière du SSIAD66, si c’est prévu qu’il y ait une prise en charge SSIAD en

même temps ou qui fera suite à l’intervention de l’équipe mémoire ». Ce temps de rencontre

fait rapidement place à un temps d’évaluation au domicile.

L’équipe de Marine procède d’une autre manière. La demande arrive directement par

les personnes. En effet, « même si l’information a été donnée par un médecin, par le CLIC

ou par un service d’aide qui intervient chez eux, on demande quand même que ce soit la

personne qui nous contacte ». Ensuite c’est la coordinatrice (psychomotricienne de

formation) qui, par une première visite, « fait une analyse un petit peu de la situation, qui

recueille déjà quelques informations sur les capacités de la personne, ce qu’elle fait au

quotidien, un petit peu l’histoire de vie, ou l’entourage familial ». Puis la coordinatrice

détermine si la situation requiert plutôt une intervention de l’ergothérapeute ou de la

65 Cf. glossaire 66 Cf. glossaire

Page 31: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

25

psychomotricienne. Lorsque Marine est sollicitée elle se rend au domicile des personnes

pour effectuer un « entretien ». Durant cette visite elle établit un « recueil des habitudes de

vie, des difficultés du quotidien ». « Je laisse la personne me dire ce qu’elle a envie de me

dire. » Marine présente ensuite son intervention, son rôle dans l’équipe et ce qu’elle peut leur

apporter. Si la personne « est tout à fait, on va dire, d’accord pour notre intervention […] je

peux commencer par faire les bilans dès la première rencontre » sinon elle va plutôt rester

dans l’échange pour recueillir des informations.

2.1.2 L’existence préalable de l’intervention de professionnel à

domicile

L’équipe de Charlotte, qui n’existe que depuis 2 mois, intervient chez les personnes

pour la 3ème ou 4ème fois. Pour l’instant Charlotte n’a « jamais eu de refus de l’aidant, c’est

plutôt des fois des refus de la personne […] où la personne est complètement opposante ».

Ce constat est à mettre en lien avec le fait que l’équipe de Charlotte intervient surtout chez

« des gens qui ont déjà des services qui interviennent à domicile, donc qui ont l’habitude

d’avoir des gens qui viennent » chez eux. Dès la première rencontre, Charlotte explique

« vraiment à quoi sert l’équipe spécialisée, le rôle de chacun » pour faciliter l’adhésion de la

famille. Pour les personnes qui n’ont pas de services d’aides à domicile c’est parfois plus

difficile d’intervenir. Par exemple, « la personne qui elle n’était pas trop pour l’intervention,

mais qui n’était pas non plus contre, donc bon c’était de la négociation. » Mais de manière

général, Charlotte et son équipe arrive assez facilement à réintervenir chez les personnes.

Pour répondre à la demande d’un professionnel ou d’une famille, les 4 équipes

commencent par un contact téléphonique puis se rendent au domicile pour évaluer la

situation et avoir l’accord des personnes pour réintervenir. Même si cette première visite se

passe bien généralement, les ESA ont parfois plus de difficultés pour réintervenir.

2.2 Ce qui facilite l’adhésion

2.2.1 Évoquer l’évolution et l’épuisement

Laure nous explique que dans certains cas les personnes refusent les autres

interventions, mais elle précise que pour certains ils ne sont « pas en refus de notre partage,

ils seraient contents d’avoir quelqu’un qui vient papoter, mais ce n’est pas notre but ». Dans

les situations plus complexes voire de refus Laure tente de convaincre les personnes en

venant leur « rendre une petite visite […] ce sera une heure par semaine, ce n’est pas

beaucoup ». Elle discute avec eux de leur projet de vie, « dire que si on fait ça c’est aussi en

pensant au futur ». Pour convaincre également l’aidant elle l’inclut dans le projet de soins,

comme ça elle « se permettra de lui donner des conseils […] qu’évidemment on le forcera

pas, mais qu’on va les lui donner et qu’après ce sera à lui d’y réfléchir […] on l’inclut

Page 32: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

26

vraiment […] ». Et elle le sensibilise à la notion d’épuisement, « on joue toujours avec la

question de l’âge […] il faut aussi penser à vous et nous on pense à vous parce qu’on sait

avec expérience que si vous continuer comme ça […] vous allez être complètement

épuisé. » Et si malgré cela les personnes sont toujours en refus alors elle n’insiste pas. « Si

on sent qu’ils sont vraiment dans le déni, malgré tout on ne pourra pas, on se rend compte

qu’on ne peut rien faire. »

2.2.2 L’observation des activités privilégiées pour pallier le refus

du bilan

En ce qui concerne Marine, elle oriente dès la première rencontre sa manière

d’aborder les personnes. S’ils sont d’accord avec l’intervention elle propose directement un

bilan ergothérapique. Quand la situation est plus difficile, elle est plus « dans la discussion,

voilà essayer de connaitre la personne (patient), voir comment elle réagit ». Et quand le

patient n’accepte pas les bilans elle oriente ses recherches sur les activités que la personne

aime faire, « et en fonction de cette activité j’essaye d’évaluer par des observations où est-ce

qu’elle en est dans ses capacités. » Marine arrive assez facilement à retourner chez les

personnes car dès le début ils demandent « généralement que ce soit l’entourage, ou si la

personne le peut la personne elle-même, qui nous contactent […] c’est déjà une première

entrée, acceptation de notre intervention ». Elle explique que parfois les personnes ne

comprennent pas trop ce que l’équipe peut leur apporter et que dans ces cas là c’est

souvent que « l’adhésion du patient est plus délicate ». Dans les rares cas ou l’équipe n’a pu

réintervenir, malgré plusieurs tentatives pour les convaincre, c’est en général que le couple

« refuse toute les aides […] ils sont dans le déni […] ou voilà ils viennent d’apprendre le

diagnostic, voilà, c’est non pour tout parce que c’est dur à encaisser ».

2.2.3 Favoriser la relation de confiance

La relation de confiance est un des points fondamentaux des interventions d’Emilie.

« Il y a besoin d’un temps de confiance avec le malade mais il y a aussi besoin d’un temps

de confiance avec l’aidant ». Il permet à la famille de ne pas voir l’équipe comme un

« élément intrusif » du fait qu’elle intervienne directement au domicile. Afin de permettre

cette relation Emilie explique que dès les premières rencontres les aidants « repèrent que

l’on a un temps d’échange avec madame, et aussi on a un temps d’échange (avec l’aidant)

on écoute ce qui ne va pas dans le quotidien ». C’est la discussion et l’écoute qui sont mises

en avant pour créer la relation de confiance entre l’ergothérapeute et l’aidant. Elle laisse les

personnes parler librement et elle remarque que, par rapport au discours que les personnes

peuvent avoir avec leur famille, il y a « un rapport affectif qui fait que ça peut biaiser le

discours, alors que nous on a aucun rapport affectif ». L’ergothérapeute, en tant que

Page 33: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

27

professionnel, a une vision objective de la situation ce qui peut faciliter l’acceptation de son

intervention. La relation de confiance est établie et après « d’une séance à l’autre ils nous

rapportent souvent des éléments qui se sont passés la semaine précédente, […] soit en

terme de déficit, soit au contraire en terme d’amélioration ». Emilie montre dès les premières

séances ce que fait l’équipe et ce qu’elle peut apporter aux personnes. Il est arrivé que la

famille refuse sa présence au domicile, malgré les temps d’écoute et d’échange. « Notre

présence peut être perçue comme un changement dans l’environnement qui peut générer

une modification du comportement ou en tout cas l’aidant peut être dans la crainte que ça va

générer des troubles du comportement. » Dans ces cas là elle ne réintervient pas.

2.3 Le déroulement des interventions

2.3.1 Le cahier des charges

La fréquence d’intervention : chaque ESA suit le cahier des charges qui prévoit 15

séances de réhabilitation par an et dont l’organisation est laissée à l’appréciation des

équipes. Marine, Charlotte et Emilie réalisent ces 15 séances en continue et restent ensuite

disponible pour des contacts téléphoniques. A l’inverse, Laure organise ses séances pour

intervenir 2 ou 3 fois par an selon les situations. « Très souvent j’essaie d’en faire 12 en me

disant pour après, […] si on m’appelle dans 3-4mois je pourrais dire ok je peux me déplacer

il restait des séances ».

Analyser la situation : l’ergothérapeute est principalement missionné pour se rendre au

domicile des patients et observer comment se déroule leur quotidien. Le temps d’évaluation

de la situation est conséquent car le plan de traitement ergothérapique doit proposer des

solutions adaptées qui répondent aux difficultés rencontrées et cela en 15 séances.

- Réaliser l’évaluation : Après le premier contact téléphonique, les ergothérapeutes se

rendent au domicile et commencent leur évaluation. Pour Laure il s’agit souvent d’une seule

séance. « Je me rends compte que une est souvent suffisante, à part vraiment pour des

personnes qui seraient près à faire, à accepter d’avoir des bilans ». Dès la première séance

d’évaluation, Laure pose un objectif de réhabilitation. L’ergothérapeute doit analyser

rapidement la situation pour distinguer les principales difficultés et proposer des solutions

adaptées. Ensuite c’est au cours des séances et avec les transmissions faites par l’ASG67

que Laure précise son plan de traitement en fixant un ou deux autres objectifs.

Marine réalise son bilan sur « trois ou quatre séances ». C’est généralement sous la forme

d’un entretien, pour la première séance, qu’elle recueille « les habitudes de vie, les difficultés

au quotidien ». Elle réalise aussi des « bilans de capacités de la personne » par des mises

en situation écologique au domicile du patient. L’ergothérapeute évalue les troubles

67 Cf. glossaire

Page 34: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

28

praxiques et gnosiques du patient. Marine observe comment réagit la personne durant les

mises en situations et écoute attentivement les difficultés qu’elle peut retransmettre. En

discutant avec le patient on prend aussi en compte les troubles du langage et les troubles du

comportement.

Charlotte explique que la première évaluation consiste en « une prise de connaissance de la

situation » et que la deuxième se déroule « plus auprès de la personne, pour voir un peu ses

capacités restantes, ses incapacités ». Une fois que la relation de confiance est instaurée, il

est plus facile pour l’ergothérapeute de proposer des activités de la vie quotidienne afin

d’évaluer les capacités de la personne. La deuxième séance sert davantage à proposer les

objectifs à la famille et obtenir leur accord pour les séances suivantes.

Emilie réalise également son évaluation sur deux séances. Avant la première séance, Emilie

s’informe sur le patient auprès des partenaires et notamment les infirmières du SSIAD68.

Ainsi, elle a déjà connaissance de la situation. L’ergothérapeute doit avoir la vision la plus

globale de la personne et de son environnement. Il est important de rechercher le maximum

d’informations, à la fois lors de l’évaluation à domicile, mais aussi auprès des autres

professionnels connaissant la personne malade. L’évaluation de l’ergothérapeute sera

d’autant plus riche et le plan de traitement d’autant plus précis et adapté à la demande.

- Poser des objectifs : Suite au bilan un ou plusieurs objectifs sont fixés puis retranscrits

dans le compte rendu d’évaluation. Dès la première séance, Laure propose un objectif qui

peut être « vous aider à reprendre cette activité ». Pour chaque intervention elle réalise une

sorte de contrat avec la famille, « on signe ça au bout d’une séance d’évaluation pour qu’ils

comprennent qu’on est là pour faire des objectifs ». Marine réalise son compte-rendu de

bilan où elle « propose un projet de soin avec deux à trois objectifs ». Charlotte essaie de

respecter le cahier des charges où normalement « on doit mettre un ou deux objectifs » mais

« généralement, dans mes comptes rendu d’évaluation je mets toujours trois objectifs » pour

pouvoir répondre au mieux à la situation. Emilie parle davantage de « proposition de

séance » à la famille. Elle explique aussi qu’elle envoi « le compte rendu au médecin

prescripteur » puis recontacte la famille et fixe les dates précises des séances.

Parmi les principaux objectifs des ergothérapeutes on retrouve l’introduction d’activités

signifiantes pour le patient. L’ergothérapeute doit proposer des activités adaptées en fonction

des observations et informations recueillies lors de l’évaluation pour que la personne adhère

à la proposition. Pour l’aidant il faut « l’accompagner dans la compréhension de la maladie »

(Emilie) et le conseiller pour limiter les troubles du comportement au quotidien. Grâce à

l’évaluation de l’ergothérapeute, les troubles du patient sont repérés et il est donc plus facile

68 Cf. glossaire

Page 35: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

29

de proposer des conseils adaptés à la situation. Enfin, l’ergothérapeute propose diverses

préconisations autour des adaptations environnementales et des solutions de répit possible.

Les ergothérapeutes font beaucoup « d’informations sur les structures de répit » (Marine),

mais aussi de « l’aide aux inscriptions, l’aide aux formalités administratives » (Laure). En

fonction des situations, l’ergothérapeute doit proposer la solution la plus adaptée, juger de la

pertinence de ces propositions et réajuster si besoin son plan d’intervention.

Réaliser des transmissions : ensuite les séances s’enchainent avec l’ergothérapeute ou

l’ASG69. Entre les séances, il y a des transmissions régulières lors de réunions

interprofessionnelles pour discuter de chaque situation. L’ergothérapeute reprend les

comptes rendu de séance des ASG, donne son avis et des conseils sur la situation pour

réajuster le projet de soin du patient. Marie-Françoise explique qu’il y a « des réunions

normalement assez régulières ici où on reprend les cas un par un pour discuter un petit peu

où on en est ».

Mise en place d’un relais : les équipes proposent régulièrement la mise en place d’un relais

avec des services d’aides à domicile ou des structures d’hébergement. A la fin des séances,

l’équipe organise un bilan de fin d’intervention pour reprendre tout ce qui a été réalisé chez

les personnes. Pour Laure il s’agit d’une « visite de bilan avec l’aidant principal […] l’usager

[…], on reprend que il y a eu une évaluation, on a pu remarquer telles difficultés, voilà les

objectifs qu’on s’est fixé […] et puis on explique un petit peu nous qu’est-ce qu’on a pu voir

qui a avancé ». En reprenant les objectifs, Laure intègre aussi la notion de relais qui doit se

mettre en place suite aux interventions de l’ESA. « Et puis surtout notre objectifs vu que c’est

12 à 15 séances c’est de faire un relais après ». L’équipe de Charlotte étant récente elle n’a

pas encore réalisé d’évaluation de fin d’intervention, mais elle nous précise tout de même

qu’elle devrait se dérouler avec « normalement les mêmes personnes que pendant

l’évaluation ». L’équipe d’Emilie réalise ce bilan « avec la personne malade, avec les aidants,

avec les ASG70 » pour reprendre les objectifs et voir « ce qui a marché, moins bien marché,

vers où on va ».

Les modalités de fin d’intervention : Une fois cette visite de fin d’intervention réalisée,

l’ergothérapeute rédige un compte rendu de fin de séance de réhabilitation. Laure nous

explique qu’elle « fait valider aussi par l’ASG » le compte rendu puis qu’elle « l’envoie au

médecin traitant et à la famille, aux soignants ». Emilie envoi elle aussi son compte rendu

aux différents professionnels, « médecin traitant, médecin spécialiste, médecin territorial s’il

y a une demande d’APA (Allocation Personnalisée d’Autonomie) en cours, éventuellement

aux collaborateurs paramédicaux », en fonction des situations.

69 Cf. glossaire 70 Cf. glossaire

Page 36: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

30

2.3.2 Modalités d’organisation des séances et délégation aux ASG

Après avoir réalisé son évaluation et avoir posé les objectifs de réhabilitation,

l’ergothérapeute délègue à l’ASG certaines séances. Pour cela elle réalise une feuille de

route avec les grands objectifs et les moyens à mettre en œuvre avec le patient. Ensuite,

comme nous le dit Laure « les séances se sera moi ou l’ASG, en priorité l’ASG puisque

comme on a déterminé les objectifs c’est elle qui va mener les séances ». C’est

l’ergothérapeute qui détermine le moment où l’ASG intervient chez les personnes et qui

annonce la venue de ce nouveau professionnel au patient et à la famille. Charlotte explique

à la famille lors de la deuxième évaluation que « se sera l’assistant de soin en gérontologie

qui va faire les séances ».

Les ergothérapeutes interrogées organisent et participent à un temps de rencontre

commun avec l’ASG71 et le patient. Laure nous explique que « la visite après l’évaluation je

m’y rends avec l’ASG » où elle « la présente à la famille ». Charlotte revient aussi après

l’évaluation pour « présenter l’ASG à la personne et à la famille ». Emilie « prend aussi le

temps de faire […] un temps de rencontre en binôme, un temps de présentation de l’ASG

auprès de la personne qui va bénéficier des soins ». Marie-Françoise nous raconte comment

se déroule cette visite, « soit on fait la première visite de rencontre et on fait juste la visite,

[…] soit elle nous intègre dès la première séance, […] elle va partir et je vais rester avec la

personne ».

Ensuite dans le déroulement des séances il y a un partage des rôles et objectifs

suivis par l’ergothérapeute ou l’ASG. L’ergothérapeute fixe les activités ayant le plus de

signification pour le patient, en fonction des observations du bilan. L’ASG met en œuvre ces

activités afin de répondre aux objectifs fixés par l’ergothérapeute. Comme le dit Marie-

Françoise, elle a « 10/12 séances après à faire auprès des personnes donc en fonction de

ce que l’ergo nous a demandé comme objectifs et bien on doit les appliquer, on essaye de

mettre en œuvre ce qu’elle nous demande ». Elle ajoute au fil de l’entretien que les séances

commencent souvent par la mise en place de « repère temporel » et qu’après c’est très

variable selon les situations. Ensuite l’ergothérapeute et l’ASG peuvent orienter les séances

autour de « la relation de confiance […] de temps d’écoute […] de leur faire parler de leur

histoire de vie […] de resituer un peu qui est qui » dans l’entourage. Et pour cela elle utilise

« quand même pas mal les jeux » car c’est « un bon moyen pour discuter ». Mais elles

peuvent peut aussi faire des activités extérieures comme aller à « la piscine » ou à « la

bibliothèque », le but étant de répondre aux objectifs ergothérapiques en respectant « les

habitudes de vie » de la personne. Durant l’évaluation, l’ergothérapeute donne divers

conseils au patient et son entourage. Charlotte explique que les ASG reçoivent également

71 Cf. glossaire

Page 37: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

31

ces conseils afin qu’elles puissent « rappeler les conseils qu’on donne ». Emilie missionne

les ASG quand « on est sur la proposition d’un service d’aide à domicile » ou l’équipe « peut

introduire par le biais des ASG » progressivement cette aide, en gardant à l’esprit « qu’on va

relayer avec un autre service au terme de nos interventions ». Enfin Marie-Françoise

explique qu’en étant observatrice durant les séances et en « faisant connaissance, de fil en

aiguille, il y a des choses qu’on va remettre en question ». Ces transmissions permettront de

réajuster le projet de soin durant les réunions interprofessionnelles.

Certaines activités ne sont réalisées que par les ergothérapeutes. En effet, elles

guident systématiquement les ASG72 sur les moyens à mettre en place avec le patient, mais

elles répondent aussi elle-même à certains objectifs spécifiques. Laure réalise tous « les

contacts avec les aides à domicile, l’accueil de jour, ou d’autres contacts téléphoniques aussi

avec la famille ». Elle intervient aussi au domicile des personnes « s’il y a des difficultés » ou

si l’ASG ne peut se rendre à la séance. Charlotte se rend au domicile des personnes pour

« voir ce qui me reste à voir » et pour garder un contact direct avec le patient. Emilie

intervient spécifiquement « pour parler d’aménagement matériel » ou « pour parler de

services vers lesquels ou aves lesquels l’équipe va travailler, soit les services d’aide à

domicile, soit les SSIAD73 ». Et elle exprime bien le fait qu’elle veut garder « ce temps là

avec le patient pour pouvoir parler plus particulièrement des difficultés de l’aidant » et des

solutions de répit possible.

2.4 Les réactions des aidants durant les séances

Selon les données recueillies, on remarque que les aidants sont souvent demandeurs

d’une aide, d’un accompagnement par des professionnels. C’est pourquoi ils acceptent

l’intervention de l’équipe spécialisée dans la plupart des situations. On observe cependant

que durant les séances les aidants ne réagissent pas tous de la même manière.

2.4.1 Les réactions vis-à-vis de l’intervention de l’équipe

spécialisée

Même si la famille accepte que l’équipe spécialisée intervienne auprès de la

personne malade, il est parfois nécessaire de resituer clairement les objectifs de séances.

En effet, Laure nous explique que certains aidants sont contents d’entendre « faire reprendre

des activités » car « ils pensent oui ça serait bien vous pourrez allez vous promener […] oui

ça serait bien si vous faites ça des jeux avec mon épouse ». Donc durant les séances il faut

parfois réexpliquer qu’au-delà du jeu et des activités proposées il y a un objectif

thérapeutique. « On est des soignants, ce n’est pas de l’occupationnel » nous dit Laure.

Dans certains cas l’aidant n’accepte pas totalement l’intervention, il reste sur la défensive

72 Cf. glossaire 73 Cf. glossaire

Page 38: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

32

dans les premiers temps, mais comme nous le dit Marine, « quand ils voient que ça perturbe

pas plus la personne, s’ils voient en plus que la personne apprécie le moment, là déjà ils

acceptent plus facilement ».

On constate que les aidants réagissent de manières différentes durant les séances.

Certains aidants s’absentent systématiquement, Emilie pense qu’ils « perçoivent également

notre temps de présence comme un temps de répit pour eux ». Soit c’est un des objectifs de

l’intervention, soit l’aidant prend ce temps pour lui car il en ressent le besoin. « C'est-à-dire

qu’ils goutent déjà un petit peu à cette liberté retrouvée ou en tout cas un moment où ils

peuvent confier en toute confiance leur personne à quelqu’un d’autre. »

La plupart des aidants sont présents à un moment de la séance pour discuter avec

l’intervenant, ergothérapeute ou ASG74, ou pour observer la séance. Le fait que l’aidant soit

présent durant les séances permet d’expliquer la maladie et de donner des conseils au

couple. Comme nous explique Marine « c’est bien aussi parce que l’aidant entend, il voit

aussi comment on parle face à la personne, voilà ils se rendent compte de certaines choses

». Cependant, l’équipe de Marine n’intègre pas systématiquement l’aidant aux séances, cela

dépend des situations et des objectifs d’intervention, « on va voir si on fait intervenir l’aidant

ou pas ». En effet, parfois l’aidant est tellement présent que les séances sont compliquées à

gérer. Emilie nous raconte qu’il y a « l’extrême, il y a ces aidants là […] c'est-à-dire qu’on

essaie de poser des objectifs avec la personne et l’aidant il est là en permanence sur le

temps des séances » et que l’ASG et l’ergothérapeute doivent poser « des limites ou un

cadre ». Emilie pense que ces aidants réagissent de cette manière pas tant par « crainte à

mon avis que ça se passe mal » mais surtout parce que l’aidant a besoin d’une présence et

de discuter avec le professionnel. On retrouve ainsi beaucoup d’aidants qui acceptent

l’intervention car ils vont pouvoir discuter avec quelqu’un d’extérieur à la famille. Ils ont

besoin d’un temps d’écoute. C’est ce que Marie-Françoise ressent également durant les

séances, « souvent les aidants qui ont besoin un peu de discuter, ben voilà on essaye de

discuter un peu dehors ou sur d’autres situations ». Mais elle exprime aussi le fait que ces

temps de discussion sont plutôt limités dans le temps, du fait des contraintes

organisationnelles et que certains aidants aimeraient parler davantage. C’est pourquoi

certains « essaie de me rattraper, ou de discuter un petit peu plus loin », sauf que le conjoint

malade qui n’assiste pas à la discussion est souvent dans la crainte de ce qui peut être dit

sur lui ou sur la séance qui vient de passer. « C’est toujours difficile parce que comme nous

on vient pour la personne voilà, c’est toujours difficile de parler derrière son dos, parce que le

but justement c’est de garder […] une communication. »

74 Cf. glossaire

Page 39: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

33

Et puis les équipes spécialisées se retrouvent parfois confrontées à des refus

pendant le déroulement des séances. Emilie nous expose une situation où le patient n’avait

aucun suivi médical par rapport à la maladie d’Alzheimer, qu’elle avait « réussi à intervenir et

au bout de la troisième séance le M. nous a clairement dit je ne veux pas vous revoir ».

Même si les personnes acceptent au début, dans des situations où les conflits familiaux sont

complexes, l’intervention ne peut se réaliser totalement.

En ce qui concerne la majorité des interventions, on observe que le comportement

des aidants évolue au fil des séances. Les aidants sont souvent dans la demande comme

nous le montre Marine « ils sont en demande d’avoir un accompagnement » ou comme nous

le dit Michel « on avait besoin d’être guidé par ces gens là qui s’occupe des malades ».

Marie-Françoise note aussi que durant ses premières séances « souvent on est perçu un

petit peu comme quelqu’un qui arrive, qui va faire mieux que moi, et puis ce n’est pas juste

moi je suis là toute la journée et puis avec elle, elle va dire oui et avec moi elle va dire non ».

L’aidant se rend compte que son conjoint peut réaliser des activités adaptées mais aussi

peut accepter difficilement qu’il ne les fasse qu’avec l’ergothérapeute ou l’ASG75. Cela peut

être vécu comme une crainte d’être dévalorisé, de ne pas reconnaitre tout ce qu’il a réalisé

depuis des années avec son conjoint malade. Au début des séances, les changements de

comportements de la personne malade surprennent le conjoint aidant mais petit à petit c’est

le conjoint qui rapporte des éléments nouveaux « soit en terme de déficit soit au contraire en

terme d’amélioration » comme le constate Emilie. Dans ces cas là, les aidants sont souvent

très réactifs pour la préparation des activités d’une séance sur l’autre. Michel nous raconte

qu’il prépare ce que lui a demandé l’ASG pour faire une activité cuisine, « alors bon on

achète tout ce qu’il faut ». Marie-Françoise nous explique que « il y en a chez qui ils vont

être très réactifs, on va avoir tout la semaine prochaine, et puis d’autres on attend toujours ».

2.4.2 Les réactions vis-à-vis des conseils et préconisations

Il y a des aidants qui sont en accord avec les conseils prodigués et qui essaient de

les respecter. Quand durant les séances le conjoint observe l’attitude de l’ASG, il tente de le

reproduire pour limiter les troubles du comportement liés à la maladie. Comme nous le dit

Emilie, « il s’est inspiré un petit peu de ce que fait l’aidant (professionnel) et il s’aperçoit que

ça marche ». C’est ce que nous confie également Michel en parlant de sorties extérieures

‘‘bruyantes’’, « moi-même je parle assez fort » et qu’il se rend compte que cela perturbe sa

femme. Alors en suivant les conseils de l’équipe, « on est obligé de se corriger ». D’autres

suivent au mieux les préconisations d’aménagement du domicile, comme l’a remarqué Laure

chez un couple où le mari « a suivie, alors par exemple pour les chutes il a mis en place des

barres, il a enlevé les tapis par terre ». Même si les personnes ont déjà entendu ces conseils

75 Cf. glossaire

Page 40: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

34

prodigués par l’entourage, ils réagissent plus rapidement lorsqu’ils en parlent avec l’équipe

spécialisée « oui, oui c’est vrai on me le disait avant mais là » nous rapporte Laure. C’est

justement parce qu’ils sont donnés par un professionnel, qu’il n’y a pas de rapport affectif,

qu’ils les acceptent parfois plus facilement. Pour certaines personnes les conseils sont

rapidement compris et acquis. Laure nous raconte qu’il y a des aidants qui comprennent

juste en observant la séance. « Dès fois il y a des personnes en effet juste le fait que nous

on fasse l’activité et ben ils comprennent, on n’a pas besoin de revenir dessus. » Et on

observe aussi des aidants qui trouvent seuls des solutions aux difficultés qu’ils rencontraient

au quotidien. Selon les propos de Marine, « bon souvent en fait l’aidant il trouve les solutions

seul, nous on est juste là pour leur dire qu’il y a encore des possibilités ». Les réactions des

aidants sont souvent positives par rapport aux conseils donnés et leur attitude change vis-à-

vis de leur conjoint malade. « Effectivement ça a pu permettre à l’aidant d’avancer un petit

peu sur l’acceptation de la situation, sur l’acceptation des troubles de la personne et sur un

petit peu comment l’accompagner », nous dit Marine. Le savoir-faire des professionnels

permet à l’aidant d’adapter son attitude, mais l’ergothérapeute doit également reconnaitre le

savoir-faire de l’aidant pour réussir à le conseiller.

Puis pour d’autre c’est plus difficile d’intégrer les préconisations, d’accepter de

changer un peu son attitude vis-à-vis de son conjoint. Il faudrait pour certain tout

décomposer ou prendre le temps de discuter autour de l’activité réalisée pour que l’aidant

puisse reproduire le comportement du professionnel. Mais comme nous le dit Laure, « là

c’est plus difficile de tout reprendre ». On voit même des personnes qui ne modifient pas leur

attitude, qui ne prennent pas en compte les conseils par rapport à la maladie, c’est ce que

nous transmet Marine « parfois on voit des personnes qui ne changent pas du tout après

notre intervention ». Elle ajoute que pour quelques aidants c’est trop difficile d’accepter

toutes ces modifications et qu’ils « n’ont pas assez de capacités de ressources pour

accepter tout ça ». Ainsi on peut entendre de la part d’un aidant « ben c’est facile pour vous,

vous êtes là que une fois dans la semaine », nous transmet Laure. Il y a toute la

problématique du relais, dont nous parlerons plus en détails par la suite, qui n’est pas

toujours bien entendu par la famille. Alors que des aidants évoquent clairement leur

épuisement, Charlotte nous dit que « ce n’est pas pour autant qu’ils vont accepter l’aide ou le

répit » malgré les préconisations de l’équipe. Après il existe aussi des réactions

ambivalentes pour certains aidants, ils n’acceptent pas toutes les propositions de l’équipe.

Comme on peut le constater avec Michel qui est satisfait des séances réalisées, « c’est bien

qu’elles soient venues » mais qui évoque quelques situations où il n’a pas souhaité suivre

les conseils de l’équipe. « C’est assez difficile de guider une personne qu’est malade bon si

vous voulez pour ranger les affaires et tout ça » nous dit-il dans un premier temps. Et puis au

Page 41: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

35

fil des questions il nous explique « elle m’avait proposé de mettre des étiquettes pour dire

par exemple tel et tel vaisselle se trouve » mais que ça n’a pas été mis en place car « il y a

peut être des malades qui le font, mais ma femme elle a l’habitude de ranger les affaires où

sa lui plait et moi c’est peut être assez difficile mais quand vous suivez une personne vous

retrouvez automatiquement, vous retrouvez où les affaires sont égarées ». On se rend

compte des difficultés que cela peut provoquer pour les personnes. Après comme le dit

Marie-Françoise « je pense que forcément après ça va faire poser des questions ».

2.5 Les moyens indirects auprès de l’aidant

Le but de l’équipe spécialisée est d’intervenir prioritairement auprès de la personne

malade. C’est ce que nous rappelle Marine en disant qu’elle ne « peut pas intervenir que

auprès de l’aidant, il faut forcément par notre intervention qu’on ait une action auprès de la

personne aidée ». Cependant, les données recueillies montrent que dans toutes les

situations où il y a un aidant, l’intervention de l’équipe spécialisée retentit de manière directe

ou indirecte sur celui-ci. Ainsi pour Marie-Françoise « dans nos séances dès qu’il y a un

aidant on aide forcément les deux ».

Parmi les moyens indirects, il y a comme dans toute prise en charge une relation de

confiance qui doit s’instaurer avec la personne malade. D’ailleurs, Marie-Françoise nous

explique que c’est par cette « relation de confiance » et « beaucoup de temps d’écoute » que

l’on arrive à créer une bonne relation avec le malade. Et si la relation est bien instaurée,

alors la famille accepte d’autant mieux l’intervention de l’équipe à domicile. On voit même

certaines personnes attendre l’arrivée de l’ASG76 car une relation forte s’est créée. Comme

nous l’évoque Laure, « et donc on a pu constater que en y allant, avec une ASG qui était à

son écoute, en disant toujours oh ben oui c’est super, c’est intéressant ce que vous me dites

[…] et ben le mari il attend limite à la porte l’ASG ». Pour Marine, il faut aussi « trouver ce

qui va pouvoir rassurer » la personne durant les séances pour que l’intervention se déroule

bien. Et une fois que la relation de confiance est mise en place, l’ASG et l’ergothérapeute

tente de valoriser la personne atteinte de la maladie d’Alzheimer. Même si l’équipe n’arrive

pas à atteindre tous ses objectifs, l’intervention « ça aura peut être aussi valorisé un peu la

personne comme on va lui faire faire certaines choses » nous explique Laure.

Pour pouvoir valoriser la personne et répondre aux objectifs fixés, les équipes

spécialisées proposent diverses activités en fonction de leurs possibilités matérielles et des

habitudes de vie de la personne malade. Comme nous le dit Marine « on a pleins d’activités

en fait donc on essaye un petit peu tout ce qu’on a » tout en essayant « de voir aussi par

76 Cf. glossaire

Page 42: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

36

rapport à ce qu’il faisait avant ». Parmi les données recueillies on peut retenir quelques

activités types régulièrement proposées :

- la réminiscence en discutant « sur les photos, photos de famille, arbre généalogique »

comme nous l’indique Marie-Françoise.

- des mises en situation cuisine comme nous raconte Michel « elle nous a appris, enfin à ma

femme, pour faire par exemple un gâteau ou lui proposer de faire de la cuisine et ceci-cela ».

- des activités motrices de gym douce où l’intervenant « explique quels gestes elle peut

refaire », comme nous l’explique Marine. Le but étant de « stimuler la mobilité » et de limiter

le « ralentissement psychomoteur » chez certaines personnes.

- des jeux divers car « c’est un bon moyen de rentrer en communication » selon Marie-

Françoise

- des sorties extérieures, soit sur le temps des séances de réhabilitation où le but « c’est

essayer de mettre des choses en place […] enfin des choses qui peuvent être dans les

habitudes de vie » comme aller à la piscine ou à la bibliothèque comme le fait Marie-

Françoise. Soit des sorties organisées par une association ou un service professionnel

« pour discuter ensemble ou pour jouer et tout ça » d’après Michel.

Parmi toutes ces activités certaines peuvent être considérées également comme « des

activités de stimulation cognitive ». Mais attention comme nous indique Laure elle n’est pas

réalisée « dans le but tel puisque évidemment dans le cahier des charges ils disent bien

qu’on n’est pas là pour faire un atelier de stimulation cognitive ». Le but est de « reprendre

des petites activités » qui sollicitent par la même occasion les fonctions cognitives.

Parallèlement à ces activités, les professionnels proposent différentes adaptations et

préconisations matérielles pour aménager l’environnement. Pour que les personnes

acceptent le matériel proposé l’équipe réalise des essais. « On les aide aussi à, bon d’un

point de vue matériel, quand on fait des propositions, ils font l’essai, ils trouvent que ça

marche donc c’est plutôt positif » nous dit Emilie. Mais il faut aussi expliquer l’intérêt

d’installer ce matériel à domicile. Emilie nous explique également que « c’est important aussi

d’expliciter le trouble pour pouvoir expliquer pourquoi on va adapter l’environnement

matériel ». On distingue deux objectifs dans la préconisation de ces adaptations matérielles :

- sécuriser la personne malade en proposant « des planches de bains, des barres d’appuis

[…] des rehausse-WC, enfin voilà du petit matériel généralement » pour Charlotte. Emilie a

déjà préconisé un « téléphone basique à touche numérique […] avec le prénom écrit en

face » pour que la personne puisse appeler en cas d’urgence.

Page 43: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

37

- « mettre des repères au domicile » selon Charlotte avec « souvent en premier lieu c’est le

repère temporel, repère calendrier » (Marie-Françoise). Charlotte nous indique qu’elle

préconise très régulièrement « d’avoir un tableau blanc, je ne sais pas dans la cuisine ou

dans le salon, là où ils sont le plus souvent, pour pouvoir leur noter des informations ». Mais

on peut aussi trouver des adaptations « maisons » réalisées par les professionnels comme

ce qui a été mis en place au domicile de Michel. L’équipe a fabriqué un set de table adapté

« pour mettre la table […] pour mettre le couvert », mais elle leur a aussi proposé de

« mettre des étiquettes pour dire par exemple tel et tel vaisselle se trouve » à cet endroit.

On peut donc trouver diverses adaptations, selon les situations et les difficultés au domicile.

Les ergothérapeutes et ASG77 proposent soit du matériel à acheter soit des adaptations

qu’elles réalisent en fonction des besoins. Ainsi l’équipe tente de répondre le mieux possible

aux objectifs fixés. Une fois que ces adaptations sont instaurées et qu’elles permettent

d’améliorer le quotidien, l’équipe pense aussi au relais avec les aides à domicile, notamment

pour continuer à utiliser les outils.

On observe que même si les adaptations mises en place facilitent le quotidien du

couple « on va proposer quand même de soulager l’aidant par rapport à certaines activités »

selon Emilie. Les aides à domicile sont sensibilisées aux situations que rencontre l’équipe

spécialisée et aux moyens mis en place pour faciliter la prise de relais interprofessionnelle.

Ainsi « ils sont toujours vigilant en fait à ça aussi, c'est-à-dire à ce que soit l’aidant ne

s’épuise pas, soit que l’aidant continue à bien accompagner la personne, en respectant ses

capacités, en respectant ses envies », comme nous l’explique Marine. Mais l’équipe fait

aussi le relais avec les services d’aides à domicile pour « clarifier un peu les rôles de l’aide à

domicile », car comme nous le démontre Laure « leur rôle c’est 3h de ménage, est ce qu’elle

ne pourrait pas faire une heure et demie de ménage et une heure et demie tenir compagnie

à monsieur ». Et quand c’est possible elle présente aux aides à domicile des types

d’exercices réalisables avec la personne malade pour qu’elles ne se retrouvent pas en

difficulté. L’ergothérapeute fait donc les liens entre ce qui est mis en place au domicile et le

service qui prend le relais, pour répondre au mieux aux attentes de la famille et permettre

l’utilisation des adaptations et aménagements réalisés.

77 Cf. glossaire

Page 44: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

38

2.6 Les moyens directs auprès de l’aidant

Les différents moyens utilisés auprès de la personne malade ont souvent un impact

positif sur l’aidant car ils limitent entre autre l’épuisement. Les ergothérapeutes nous

expliquent que leur « intervention elle est pour la personne mais également pour l’aidant »

(Laure) et que « le temps d’écoute qu’on peut leur accorder » est important car il n’y a pas

de « rapports affectifs » comme on peut trouver dans une famille (Emilie). Donc lorsque l’on

intervient à domicile on réalise les séances surtout auprès de la personne malade, tout en

prenant en compte ce que nous dit l’aidant. Il est important de répondre à ses interrogations

et attentes. D’ailleurs un autre exemple qui confirme que l’on intervient auprès du couple

dans son ensemble c’est que « souvent en fait le matériel il sert pour le couple, c’est quand

même des personnes âgées » nous explique Charlotte. On adapte donc nos propositions en

fonction du couple et pas uniquement de la personne malade.

C’est pourquoi selon les situations, l’ergothérapeute et l’ASG intègrent l’aidant à

certaines séances pour donner des conseils et réaliser des activités avec le couple. Ainsi,

comme nous l’avons dit précédemment78 « c’est bien aussi parce que l’aidant entend, il voit

aussi comment on parle face à la personne, voilà ils se rendent compte de certaines choses

rien qu’en étant à trois » (Marine). L’intervenant professionnel transmet un savoir-faire aux

aidants durant les séances. C’est plutôt rare que les professionnels soient seuls avec l’aidant

durant les séances. Dans le cas d’une situation difficile ils travaillent en binôme,

ergothérapeute et ASG. Laure nous évoque un exemple ou elles y vont à deux, « l’ASG va

faire une activité et moi je discute avec l’aidant ». Pour Charlotte, elle est intervenue en

binôme pour une situation difficile où le but était de séparer le couple durant les séances,

« c’est un couple qui fonctionne vraiment à deux mais voilà on sent que l’épouse est quand

même très, très fatiguée et lui voilà des gros troubles du comportement ». Dans cette

situation « quand il y a l’aidant ce n’est pas facile de faire une séance » donc il est préférable

d’intervenir en binôme. Emilie nous explique que ces temps sont importants car les aidants

« nous repèrent comme étant, comme faisant du lien avec les différentes structures » et qu’il

faut garder ce temps de discussion avec l’aidant pour évoquer les relais et les partenariats

de l’équipe. En ce qui concerne le point de vue de l’ASG, Marie-Françoise nous explique

qu’elle rencontre régulièrement des aidants qui « essaie de me rattraper, ou de discuter un

petit peu plus loin ». Les aidants ont souvent besoin d’un temps d’écoute, mais Marie-

Françoise nous parle également du malaise rencontré vis-à-vis de la personne malade qui

s’interroge, « c’est toujours difficile de parler derrière son dos ». Donc il faut réussir à gérer

les séances en fonction des objectifs fixés et du temps d’écoute dont a besoin l’aidant.

78 3- réaction de l’aidant durant les séances – 1ère partie

Page 45: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

39

Dans tous les cas, l’équipe spécialisée donne tout au long de son intervention des

conseils et des préconisations pour mieux gérer le quotidien. Parmi les données recueillies

voici les conseils les plus fréquemment transmis aux aidants. Les propositions

d’aménagement matériel ne sont pas énoncées car elles concernent la personne malade

et/ou le couple.

Il est important :

- que l’aidant soit inclus dans le processus et le faire participer si besoin durant les

séances. Pour Laure il faut que l’aidant « accepte un petit peu de rentrer dans le

processus » et pour cela il faut que l’équipe « l’inclus vraiment » durant l’intervention. Elle

demande souvent à l’aidant, même quand il est un peu réticent, « d’essayer d’y croire au

moins ».

- que l’aidant soit sensibilisé par rapport à l’épuisement. Dans certains cas, Marine

observe que « l’aidant n’est pas du tout en capacité d’accompagner la personne » donc elle

essaie « de lui faire comprendre aussi que peut être qu’il n’y arrive pas, qu’il est épuisé, que

c’est peut être pas son rôle ». Laure sensibilise également l’aidant en lui disant « si vous

continuez comme ça à ce que votre époux ou votre épouse ne fasse rien, ben vous allez être

complètement épuisé ».

- que l’aidant connaisse mieux les troubles de la maladie d’Alzheimer. Emilie a souvent

pour objectif « d’accompagner dans la compréhension de la maladie […] des troubles […]

d’apporter de l’explication ». L’aidant peut ainsi savoir « pourquoi la personne réagit de telle

ou telle façon » et « qu’est ce qui est lié à la maladie ou bien qu’est ce qui est lié à la

personne dans ses habitudes », selon Marine. En parlant avec l’aidant des troubles

rencontrés dans le quotidien, l’ergothérapeute comprend également comment se déroule

une journée et peut orienter ces objectifs et moyens d’intervention en fonction des difficultés.

- que l’aidant accepte la maladie et le changement de personnalité/comportement du

malade. En connaissant davantage la maladie, l’équipe peut ensuite accompagner l’aidant

dans l’acceptation des troubles ou en tout cas « de réajuster son point de vue, son opinion »,

comme nous l’explique Emilie. Pour Marine, l’intervention permet d’être « aussi sur

l’acceptation que la personne a changé ».

- que l’aidant ait une attitude adaptée face à la maladie. Dans les entretiens on retrouve

« des conseils plutôt sur les troubles du comportement pour les limiter » (Charlotte). Laure

évoque quelques anecdotes où elle expliquait à l’aidant que pour éviter la mise en échec il

vaut mieux « induire la réponse » ou encore « souligner toutes les choses positives ». Mais

les professionnels parlent aussi « du conseil sur l’accompagnement » que l’aidant « pourrait

apporter au quotidien à leur conjoint » (Marine). Pour Emilie il est important de revoir

Page 46: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

40

« l’attitude de l’environnement humain » en lui expliquant « la manière de faire passer une

consigne » comme par exemple « poser une question ouverte, donner une consigne à la

fois, solliciter la personne sur des temps courts, parler bien en face de la personne ». Et ces

conseils vont permettre à l’aidant d’adapter son attitude au quotidien pour accompagner le

mieux possible son conjoint/sa conjointe. Michel évoque également les conseils que l’équipe

lui a transmis quand il dit « et puis ben pour faire les courses on m’a expliqué comment ça se

passe, elle ne peut pas sortir toute seule, je l’accompagne ». Marie-Françoise explique que

durant ces séances, elle fait parfois intervenir l’aidant pour montrer qu’il faut « s’entraider »

et ne « pas compliquer la tâche » réalisée, rester sur des consignes simples.

- que l’aidant exprime son ressenti par rapport à la situation et aux conseils. Marine se

positionne rapidement sur un temps « d’écoute quand même de l’aidant sur ce qu’il va

pouvoir dire, sans forcément proposer de solution dans un premier temps mais déjà de

l’écoute, pour qu’on comprenne aussi comment il réagit face à cette situation ». Pour Emilie

aussi il faut d’abord les écouter, même si « quand ils parlent de la maladie, ils expliquent des

comportements, ils expliquent des attitudes déficitaires mais on sent que derrière ils ne

comprennent pas ou que ça leur pose problème », l’équipe va rebondir sur ces propos pour

orienter leur conseils et préconisations.

- que l’aidant ait des pistes d’activités réalisables avec son conjoint. Marine a rencontré

des aidants qui demandent « quelle activité je peux encore lui proposer ? ». Donc

l’intervention avait pour objectif « de trouver une activité qui va correspondre à cette

personne et qui ou que l’aidant pourra refaire après avec lui » et que « l’aidant se sent utile

aussi et puisse apporter quelque chose ».

- que l’aidant soit valorisé par rapport à ce qu’il fait au quotidien. Charlotte a déjà

rencontré des situations où un de ses objectifs était « d’appuyer sur elle ce qu’elle faisait de

bien, de mettre en avant » ce que réalisait la conjointe aidante au quotidien. Emilie nous

explique que si le couple souhaite le maintien au domicile « on va être sur de la valorisation

de ce qu’ils font déjà, donc de l’entretien par l’aidant » pour maintenir les bonnes attitudes et

réactions de l’aidant.

- que l’aidant soit informé des relais possibles. L’équipe intervient pour accompagner

l’aidant dans les démarches administratives s’il le souhaite. Laure explique qu’on va leur dire

« on va faire avec vous ». Cela permet d’aider concrètement l’aidant, comme cela a été le

cas pour Michel « tous les dossiers ont été faits et puis même elle m’a aidé pour les maisons

de retraite » dit-il en parlant de l’équipe. Les différents relais seront présentés dans la

prochaine partie.

Page 47: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

41

Tous ces conseils peuvent être assimilés à de « l’éducation thérapeutique » comme

nous l’évoquent Laure et Emilie. Même si le terme n’est pas toujours employé en tant que tel

dans les comptes rendus des ergothérapeutes, « dès fois on ne l’écrit pas mais on le fait »

nous dit Laure, il permet quand même de regrouper toutes les préconisations faites à

l’aidant. Ainsi Emilie nous parle « d’éducation thérapeutique de l’aidant » et Laure

« d’éducation thérapeutique du comportement à adopter » comme objectif de certaines

interventions.

2.7 Les relais et structures de répit possible

Les données recueillies permettent de distinguer les différents relais possible durant

l’intervention de l’ESA. L’équipe intervenant sur 2 ou 3 mois, ils parlent très régulièrement

soit de proposition de relais (18 verbatim sur les 6 entretiens) soit de répit (18 verbatim sur

les 6 entretiens). Voici les différents relais rapportés lors des entretiens. Dans la 2ème colonne

est répertorié le nombre d’entretien dans lesquels les structures ou solutions de répits sont

abordées (colonne « * »).

Type de relais * Informations recueillies

Les aides à

domicile

6 - peuvent avoir une présentation de la situation par une rencontre

avec le patient, en binôme avec l’ergothérapeute ou l’ASG

- ont un rôle précis en fonction des moyens mis en place par l’ESA

- réalisent différentes activités : toilette, habillage, ménage, répit

pour l’aidant ou bien veiller à ce que le conjoint « continue à bien

accompagner la personne » (Marine)

- sont souvent peu « formés sur cette pathologie » (Marie-

Françoise)

L’accueil de

jour

5 - permet l’introduction d’activités et l’acceptation est facilité par de

l’information, des conseils et des visites avec l’ESA

- reçoit le compte rendu ergothérapique pour apporter des

informations sur la situation

L’EHPAD79 4 - nécessite des démarches administratives pour réaliser le dossier

d’inscription. L’équipe informe et accompagne la famille si besoin.

- est conseillé si le maintien à domicile n’est pas possible ou par

préconisation

- reçoit un compte rendu ergothérapique envoyé à l’équipe

interprofessionnelle pour faciliter le relais

79 Cf. glossaire

Page 48: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

42

Le médecin

(traitant ou

spécialiste)

4 - est prescripteur des séances de réhabilitation, sollicite l’ESA sur

des situations nouvelles ou déjà connues

- reçoit les comptes rendus ergothérapiques d’évaluation et de fin

d’intervention pour suivre l’évolution

- suit sur du long terme les patients (avant et après ESA) et donne

parfois du retour sur les séances

Les SSIAD80 3 - sont des partenaires qui évoquent des situations difficiles et sont

en lien avec l’ESA tout au long de l’intervention pour accompagner

les aides soignants sur les moyens mis en place au domicile

- peuvent aussi être proposé en relais sur des tâches précises

- permettent un suivi à long terme

L’orthopho-

niste

3 - reçoit un compte rendu ergothérapique s’il y a une prise en

charge par l’orthophoniste avant l’ESA

- peut être proposé à la famille et au médecin si l’ergothérapeute

note des troubles du langage importants

L’Allocation

Personnalisée

d’Autonomie

(APA)

3 - est une ressource financière importante

- elle doit être expliquée aux familles (démarches à réaliser, intérêt)

- doit être réviser régulièrement, surtout si la situation évolue et

amène plus de difficultés

- est mise en place entre autre par un médecin territorial (détermine

le montant), qui reçoit les comptes rendu ergothérapique

La formation

des aidants

3 - est réalisées par divers organismes (CLIC, France Alzheimer etc.)

qui proposent des temps d’échange sur des thèmes variés

Le CLIC 2 - informe les personnes sur toutes les aides possibles sur le

territoire et propose parfois des groupes d’aides aux aidants

- donne les informations, mais n’accompagne pas les personnes

dans les démarches administratives

Les

associations

2 - peuvent proposer des activités extérieures ou parfois une « prise

en charge plus individualisée » (Emilie) selon le type d’association

L’accueil

temporaire

2 - est préconisée si ce relais correspond à la situation de la

personne, à son projet de vie

Le

psychologue

2 - permet un suivi psychologique lors de situation difficile

- reçoit le compte rendu ergothérapique s’il fait partie de la

structure relais (accueil de jour etc.)

80 Cf. glossaire

Page 49: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

43

La plate forme

de répit

1 - est proposée quand « il y a besoin de mettre en place du répit »

(Emilie) pour l’aidant

Le

neuropsycho-

logue

1 - participe souvent au diagnostic durant la consultation mémoire, il

fait des préconisations à l’ergothérapeute de ce qu’il a observé,

donc il reçoit les comptes rendus ergothérapiques pour connaitre

l’évolution

Les

protections

juridiques

1 - sont parfois préconisées, les ergothérapeutes donnent des

« conseils sur la tutelle et curatelle, les protections juridiques »

(Charlotte)

Le foyer

logement

1 - est un relais possible

L’aidant lui-

même

1 - quand le projet du couple c’est que l’aidant principal soit le relais,

qu’il n’y ait pas de relais professionnel, « on redéfini un petit peu

les capacités de la personne et comment ils peuvent »

accompagner leur conjoint malade (Marine).

Un des objectifs de l’ergothérapeute est l’introduction d’un relais en fin d’intervention,

notamment dans les situations où il n’y a aucun professionnel pour accompagner les

personnes au domicile. Il est donc important de conseiller rapidement les familles sur le type

de relais possible et celui le plus adapté. Il faut également les accompagner dans les

démarches administratives ou transmettre les coordonnées des structures avoisinantes. Il

ne faut pas hésiter à faire les démarches avec eux, que ce soit pour remplir les dossiers ou

visiter certaines structures.

2.8 Les réactions des professionnels et aidants sur l’intervention

Durant chaque entretien, les professionnels et l’aidant interrogés ont pu exprimer leur

sentiment personnel sur l’intervention d’une équipe spécialisée Alzheimer. Certains ont plus

de recul que d’autres, mais tous apportent quelques critiques personnelles.

Laure exprime clairement le fait que l’équipe spécialisée est présente pour

accompagner les personnes en fonction du besoin évalué. Comme elle le dit souvent aux

partenaires « oui on va évaluer mais on va ensuite agir ». Ce qui les distingue d’ailleurs des

professionnels de certaines structures qui donnent les informations mais sans

accompagnement personnel dans les démarches. Et de ce fait, le retour des aidants est

généralement positif. « Elle est contente que l’on a relancé un peu la machine on va dire »

dit elle en parlant d’une conjointe qui pensait que son mari n’était plus capable de réaliser

des activités. Elle évoque aussi le fait que son équipe n’a pas beaucoup de recul par rapport

Page 50: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

44

aux premières interventions (présente depuis 1an), mais qu’ils ont pour projet de réintervenir

chez certaines personnes s’il y a une demande. « Là je commence à me dire ben là le

monsieur j’aimerais bien savoir comment il va et si on pouvait réintervenir voilà ce serait

bien. »

Marine parle également des partenaires que peuvent avoir les équipes. Elle précise

qu’il est important de rappeler à ces derniers le rôle de l’ergothérapeute dans ses

interventions. Elle est parfois interpellée pour des situations où l’aidant est en demande

d’accompagnement, Marine leur répond « d’accord mais il faut qu’on voit la situation, voir si

on peut agir aussi auprès de la personne aidé, enfin du patient ». Elle explique aussi « qu’il y

a peu de chose quand même qui leur sont proposés dans l’accompagnement, de choses

adaptés » et qu’elle comprend donc pourquoi ils sont en demande. Et du coup, le fait que

l’équipe intervienne a « pu permettre à l’aidant d’avancer un petit peu sur l’acceptation de la

situation, sur l’acceptation des troubles de la personne et sur un petit peu comment

l’accompagner ». Marine nuance cependant ces propos en disant « parfois ça peut aider,

mais pas toujours ». En effet, elle a pu constater que pour la majorité des aidants ils font du

retour positif sur la situation. Mais dans certains cas « ils n’ont pas vu l’intérêt de notre

intervention, ça n’a rien apporté pour eux ». Ces retours peuvent être dits durant les séances

ou dans les questionnaires de fin d’intervention reçus par l’équipe de Marine. Dans les cas

de retour négatif la situation était difficile car l’aidant « s’attendait à ce qu’on guérisse » son

conjoint. D’où le rejet quand l’équipe ne propose que des solutions pour compenser les

difficultés. Pour ces situations, il serait intéressant de réintervenir, mais l’équipe étant

récente sur le territoire (1 an) Marine est rarement retournée chez des personnes déjà

suivies par l’équipe. Elle précise que « au début en plus on pouvait réintervenir tout de suite

et puis le cahier des charges a été modifié » et maintenant il faut attendre un an avant de

reproposer une intervention.

Charlotte étant présente depuis seulement 2 mois dans l’équipe spécialisée, elle

explique qu’elle « n’est pas intervenu encore beaucoup, 3 ou 4 fois, 4 ou 5 fois plutôt » et

donc qu’elle a peu de recul sur les interventions. Mais elle souhaiterait évaluer le ressenti de

l’aidant en réalisant le mini-zarit « un à l’évaluation et un à la fin » car même si cet outil ne va

pas « forcément […] montrer beaucoup de chose parce qu’il évalue la souffrance à un

instant T », mais au moins on peut connaitre le point de vue de l’aidant et amener cette

discussion. Charlotte perçoit tout de même en seulement 2 mois que l’intervention de

l’équipe est bénéfique pour le couple.

Quant à Emilie, elle évoque les limites que peut parfois rencontrer son équipe. «

Quand on sent que là nous on est un peu dans nos limites il nous ait arrivé à trois ou quatre

reprises d’orienter vers Mme *, directrice de la plate-forme de répit ». Emilie choisit cette

Page 51: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

45

orientation car la plate-forme de répit propose « une prise en charge encore un peu plus

personnalisée autour là exclusivement de l’aidant », ce qui peut aider dans certaines

situations. Sinon, pour les autres interventions, l’équipe d’Emilie aimerait bien avoir du retour

des personnes par « un questionnaire de satisfaction » qui permettrait de « valider l’efficacité

de notre intervention ». Lorsque l’équipe réintervient sur une situation, Emilie fait de nouveau

passer le mini-zarit pour voir si « par rapport aux actions qu’on avait mis en place […] les

problématiques c’étaient déplacées ». Cela permet de mieux cibler les demandes des

personnes mais aussi d’avoir du recul sur la première intervention. Emilie reçoit parfois des

nouvelles des personnes soit par les familles, soit en contactant ses partenaires (médecin,

assistante sociale, conseillère en gérontologie etc.). Ce qu’elle remarque à chaque fois c’est

que « les gens ils s’approprient l’équipe de manière totalement différentes ça peut être pour

souffler soit parce que ça va leur permettre de régler des difficultés qu’ils vont rencontrer

avec leur conjoint » ou « de pouvoir s’échapper ».

Marie-Françoise fait comme constat général « que la difficulté de notre équipe

mémoire c’est qu’on arrive à des stades qui sont déjà très avancés ». Ce qui explique qu’il

« y a eu déjà une compensation de l’un envers l’autre » dans le couple et qu’il est parfois

difficile de changer ses habitudes de vie. Selon Marie-Françoise, l’équipe arrive trop tard car

lorsque le malade est au début de la maladie « se faire aider à ce stade là ben c’est ça la

difficulté je pense, les gens cachent beaucoup et ne sont pas encore prêt à se faire aider ».

Pour pallier à ce problème la solution que propose Marie-Françoise c’est de retourner chez

les personnes un an après. « La première fois on n’avait pas réussi à faire ce qu’on voulait

par exemple et pourquoi pas réessayer de mettre des choses en place une deuxième fois. »

L’ASG81 constate que certaines interventions peuvent être longues avant que les habitudes

et comportements changent. Elle ajoute que c’est un peu une « frustration » car elle « aime

bien que les choses avances, […] enfin c’est un gros travail sur moi et sur ma façon de

faire ». Il est important de relativiser et de prendre du recul sur sa manière d’exercer car

dans certains cas « on a l’impression d’avoir mal travaillé ou de pas avoir fait ce qu’on aurait

voulu ». Cependant, dans les situations difficiles, si on a l’impression que rien n’a bougé,

Marie-Françoise remarque « qu’on aura quand même posé des questions » et selon elle, les

gens qui veulent se faire aider vont réfléchir et redemander de l’aide. C’est d’ailleurs pour ça

qu’elle évoque la mise en place de relais, même minime, pour continuer à accompagner les

personnes, mais aussi pour permettre à l’équipe de revenir en gardant un contact indirect

avec le couple. Enfin, elle évalue le ressenti de l’aidant en fonction de son comportement

durant les séances, « on sent les gens qui sont contents ou pas, tu as ceux qui n’ont pas

arrêté de dire merci et puis ceux qui vont te fuir ».

81 Cf. glossaire

Page 52: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

46

Michel est convaincu du bénéfice de l’intervention de l’équipe spécialisée. « Ça c’est

vrai que la question de ça, c’est un bien qu’elle soit passée. » Selon lui, « on avait besoin

d’être guidé […] parce qu’autrement ce n’est pas facile ». Lui et sa conjointe avaient besoin

d’être accompagnés et ne regrettent pas l’intervention de l’ergothérapeute et des ASG. Il

exprime son souhait de rester au domicile le plus longtemps possible pour vivre tous les

deux mais aussi parce que « il y a des personnes qui acceptent et puis il y a des personnes

vous savez bien c’est très dur » d’aller en structure. C’est le cas de sa femme, qui souhaite

rester avec son époux. Michel a tout de même suivi les conseils puisqu’il a constitué des

dossiers d’inscription en EHPAD82. En ce qui concerne la vie quotidienne, c’est lui qui aide

sa femme, « déjà le matin bon ben faut que je m’occupe de ma femme, parce que bon ben

elle a du mal à s’habiller ». Il explique que s’il a « vraiment besoin pour des soins » il sait

qu’il peut demander de l’aide mais « enfin bon moi tant que ça va, c’est ce que je dis je

m’occupe de ma femme quoi et le jour où ça ira plus ben on est quand même assisté ».

Michel a accepté la venue des professionnels au domicile et il a été inclu dans le processus.

Il a pu donner son avis sur les préconisations et discuter avec l’ergothérapeute des solutions

les plus adaptées à sa situation. Il est conscient qu’il y aura peut être une nouvelle

intervention de l’équipe spécialisée si la situation se dégrade, s’il est fatigué ou si les

troubles de sa femme se majorent.

82 Cf. glossaire

Page 53: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

47

DISCUSSION

1 Conclusions de l’enquête

On remarque que les aidants réagissent tous de manières différentes durant

l’intervention de l’équipe spécialisée Alzheimer. Les ergothérapeutes aménagent leur

approche professionnelle en mettant en œuvre un savoir-faire qu’elles ont pu acquérir au

cours de leur expérience, pour faciliter la mise en place de l’intervention. Ainsi, elles

expliquent qu’il est nécessaire d’informer les malades et leur entourage sur le rôle de

l’équipe, le but des séances et de reposer la finalité de leur intervention dès que l’aidant ou

le malade en fait la demande. En effet, il n’est pas toujours évident d’accepter la venue de

professionnel au domicile. Les ergothérapeutes évoquent donc quelques éléments clés que

l’on peut utiliser réintervenir chez les personnes. On peut parler avec eux du projet de vie du

couple et du souhait de rester au domicile le plus longtemps possible pour faciliter

l’adhésion. Il est important d’informer l’aidant sur la notion d’épuisement pour qu’il soit

conscient des risques qu’il prend pour sa santé. Les ergothérapeutes expliquent que la

connaissance de l’individu est le point central pour s’adapter aux particularités de chaque

situation. Les bilans peuvent ainsi prendre plusieurs formes : entretien avec la personne et

son entourage, observations par des mises en situation, bilans validés. L’encouragement

peut également faciliter la discussion et permettre au couple de parler d’eux. Le fait qu’il y ait

déjà des tiers professionnels qui interviennent est aussi noté comme un argument qui facilite

la présence de l’ESA. Cependant, les professionnels sont parfois dans la « négociation »

pour pouvoir réintervenir. En tout cas, il est nécessaire de créer une relation de confiance

avec le malade mais aussi avec l’entourage, même si cela peut prendre du temps. On

s’aperçoit que la plupart du temps l’équipe spécialisée Alzheimer est bien acceptée et que le

déroulement des séances s’effectue sans trop de difficultés. Les cas de refus sont présents

surtout durant les premières interventions de l’ergothérapeute et ils sont liés au déni de la

personne malade ou à la difficulté d’acceptation du diagnostic.

Les ergothérapeutes respectent du mieux possible le cahier des charges du plan

Alzheimer 2008-2012. Cependant, elles modulent tout de même certains points comme la

durée entre 2 interventions ou le nombre d’objectifs dans leur compte rendu. Cela leur

permet de répondre aux situations remontées par leurs partenaires et d’atteindre l’effectif

requis pour la file active, qui théoriquement devrait être de 30 personnes. Durant les

séances, l’équipe spécialisée prend appui sur diverses activités comme média de

l’intervention. L’objectif est d’introduire des activités sociales, revalorisantes et signifiantes

pour la personne malade. D’où l’importance de l’évaluation de l’ergothérapeute pour repérer

les « activités habituelles ou routinières (activités mobilisant moins de traitements contrôlés

Page 54: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

48

et plus de traitements de type automatique) qui vont clairement porter sur les domaines

d’intérêt et d’expertise du patient » (Adam, 2009, p446). Les professionnels vont prendre

connaissances des activités de la vie quotidienne que la personne effectuait auparavant pour

ensuite les utiliser lors des séances de réhabilitation. Alors que « la maladie génère des

troubles cognitifs qui rendent le patient moins capable de réaliser les choses […] l’inactivité

d’un patient Alzheimer participe à accentuer la perte de cognition »83. Pour rompre ce

phénomène, l’équipe spécialisée doit à la fois permettre à la personne malade de reprendre

certaines activités de la vie quotidienne, mais elle doit aussi montrer à l’aidant quelles

activités peuvent toujours être réalisées avec son conjoint/sa conjointe. L’ergothérapeute va

discuter avec l’aidant des adaptations et de l’organisation à suivre pour faciliter la réalisation

de ces activités. Le conjoint se sent rassurer, écouter et accompagner dans cette démarche.

De plus, quand la personne malade réalise qu’elle est toujours compétente et qu’elle peut se

réengager dans l’activité, alors on voit certains troubles du comportement comme l’apathie,

l’agitation ou l’agressivité s’atténuer. En redonnant à la personne malade des possibilités

d’actions sur son quotidien et en discutant ensemble de la maladie, on peut permettre au

couple de retrouver un équilibre qu’ils avaient plus ou moins perdu.

Les ergothérapeutes préconisent également quelques adaptations du domicile pour

améliorer la sécurité et limiter les troubles du comportement dans le quotidien. Ainsi en

posant des veilleuses et des signalétiques pour aller aux toilettes la nuit, la personne atteinte

de la maladie d’Alzheimer peut s’y rendre seule et l’aidant peut rester dormir et être sécurisé

pour son conjoint. Autre exemple avec la mise en place d’un relais professionnel, assuré par

des services à domicile (aides soignants ou aides à domicile), pour certains actes de la vie

quotidienne. Si une aide soignante passe tous les matins pour aider à la toilette, la personne

malade participera davantage car le professionnel n’effectue que les gestes nécessaires et

l’aidant peut s’accorder un moment de répit. Il existe donc plusieurs moyens dont l’action

directe sur la personne malade soulage au quotidien l’aidant, à la limite de l’épuisement.

De la même manière, les ergothérapeutes prennent le temps de donner des conseils

à la personne malade, mais aussi et surtout à l’aidant en fonction des situations difficiles qu’il

vit au quotidien. En incluant l’aidant dès le début de l’intervention, celui-ci sera d’autant plus

attentif aux conseils prodigués qu’il en perçoit l’intérêt. L’ergothérapeute a comme objectif

vis-à-vis de l’aidant de l’informer sur la maladie, de limiter son épuisement et de permettre

éventuellement d’adapter son comportement, s’il éprouve des difficultés. Pour cela il prend

appui sur les bases de techniques professionnelles mises en œuvre par l’ergothérapeute ou

l’ASG84. Au cours des séances, l’aidant peut être inclus pour certaines activités afin qu’il

83 Ibid. P446 84 Cf. glossaire

Page 55: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

49

observe et comprenne comment le professionnel réagit avec son conjoint malade. Le but

étant de lui donner des « clés » pour qu’il adopte une attitude permettant de limiter les

troubles du comportement, lorsqu’ils sont présents et qu’il ne peut lui-même les réguler.

Pour que ces moyens puissent être mis en place, l’ergothérapeute doit écouter ce

que rapporte l’aidant. Mais il doit surtout prendre en compte ce que le conjoint connait déjà,

tout le savoir-faire et savoir-être qu’il détient en tant que soignant profane. Ainsi, dans les

objectifs et moyens des séances, les professionnels peuvent s’appuyer sur ses

connaissances pour le valoriser ou le conseiller si besoin sur l’attitude à adopter, les

aménagements à réaliser etc. Les professionnels interviennent auprès de couples qui se

connaissent depuis très longtemps, qui ont des habitudes de vie et des rôles bien identifiés.

Ainsi, chacun est en droit de refuser l’intervention de l’équipe ou les préconisations de

l’ergothérapeute. Comme l’évoque Michel dans les entretiens, il a écouté les conseils, puis

après discussion au sein du couple, ils ont fait des choix (pas d’étiquettes sur les placards

malgré la désorientation de sa femme). En tant que professionnel ergothérapeute on se doit

de proposer des solutions adaptées mais aussi d’entendre le refus des personnes.

2 De nouvelles pistes de réflexion

Lorsque l’ergothérapeute intervient au domicile d’un patient atteint de la maladie

d’Alzheimer, il rencontre très souvent au moins un aidant familial, conjoint ou enfant. Afin de

faciliter son acceptation vis-à-vis du patient mais aussi de l’entourage, l’ergothérapeute doit

user de multiples recours en fonction des situations. Si dès les premières rencontres la

relation de confiance est instaurée, l’ergothérapeute pourra proposer un plan d’intervention

adapté et obtenir l’accord de la personne et de l’entourage. Cette phase d’acceptation de

l’intervention est donc très importante et les ergothérapeutes doivent arriver chez les

personnes en modulant leurs interventions au gré des circonstances.

L’ergothérapeute doit inclure l’aidant et poser les limites du cadre d’intervention

Dès l’évaluation, l’aidant familial va guider l’ergothérapeute en évoquant les difficultés

que la personne malade rencontre dans son quotidien. Il faut prendre le temps de l’écouter

et de mettre en lien ces informations avec ce que rapporte la personne atteinte de la maladie

d’Alzheimer. En effet, il est vrai que les personnes ne transmettent parfois qu’une petite

partie des difficultés qu’ils rencontrent étant donné les troubles de cette maladie comme les

pertes de mémoire ou le déni. En prenant en compte le point de vue de l’aidant familial,

celui-ci se sent impliqué dans le projet de soin et va pouvoir transmettre des informations

importantes. Il peut rapporter de nouvelles difficultés, des améliorations, les réactions de la

personne malade sur les séances et toutes ces informations vont nous permettre de

réajuster les objectifs. De plus, si l’entourage est en accord avec l’intervention et les objectifs

Page 56: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

50

posés, il peut inciter la personne malade dans le refus à accepter les propositions. Même

s’ils oublient certaines informations et minimisent souvent leurs troubles, les personnes

porteuses de la maladie d’Alzheimer sont accessibles à l’échange et aux préconisations.

Donc si les médecins et l’entourage insistent sur les mêmes préconisations que l’équipe

spécialisée, il sera plus facile d’amener une aide humaine professionnelle ou une aide

matérielle au domicile.

Cependant, il faut que l’ergothérapeute soit vigilant durant les séances à poser un

cadre d’intervention. Certains aidants sont ressources pour la personne malade et l’équipe

mais d’autres peuvent amener les professionnels dans leurs limites d’intervention. Si l’aidant

est trop présent durant les séances, alors l’ergothérapeute ou l’ASG85 vont avoir des

difficultés pour mener à bien leurs objectifs. Si l’aidant n’est jamais présent et n’a aucun

temps d’échange avec l’équipe, alors il peut réagir de manière inadaptée face aux

préconisations des ergothérapeutes, car il n’était pas au courant de l’avancée de

l’intervention. Par exemple si on propose une solution de répit type accueil de jour ou aide à

domicile, que l’aidant n’est pas en accord avec cette préconisation mais qu’il n’exprime

aucune demande à l’équipe, on risque de se retrouver en difficulté pour finaliser cette

solution. Il faut donc être au clair avec la personne malade et son entourage proche sur nos

missions d’intervention et les prévenir régulièrement de ce qui est mis en place.

L’ergothérapeute doit évaluer et prendre en compte l’épuisement de l’aidant

L’épuisement de l’aidant est souvent la raison de la demande d’intervention. La

personne atteinte de la maladie d’Alzheimer minimisant ses troubles et ses difficultés, c’est

la famille qui compense progressivement jusqu’à un stade critique. Mais cette compensation

arrivant de manière progressive, certains aidants n’évaluent pas correctement l’importance

de leur aide et l’épuisement engendré. L’ergothérapeute doit petit à petit leur faire prendre

conscience des nombreuses tâches qu’ils accomplissent et ce dès le bilan. On observe dès

les premiers échanges avec l’aidant, comment il perçoit son rôle d’aidant familial et quel type

d’accompagnement il demande. S’il n’y a aucune demande de sa part et que l’équipe

intervient sur incitation du médecin, alors il faut repérer quel type d’aide humaine ou

matérielle sera accepté par la famille. L’ergothérapeute ne doit pas être trop ambitieux au

risque d’amener un refus complet des préconisations. Lorsqu’il faut amener du répit se doit

de respecter ce que la personne malade désire, mais il faut également écouter l’avis de

l’aidant. Certains conjoints sont dans la plainte et se sentent épuisés mais ce n’est pas pour

autant qu’ils vont accepter facilement les propositions de répit. On explique alors les

différentes propositions, en amenant des documents, réalisant des visites ou demandant à

85 Cf. glossaire

Page 57: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

51

certains professionnels de venir rencontrer les familles (directrice des aides à domicile par

exemple). On explique l’importance de ce temps de répit pour permettre à l’aidant de profiter

de ces moments pour accompagner son conjoint. Au lieu de compenser les tâches du

quotidien (ménage etc.), ils peuvent réaliser ensemble des activités occupationnelles que la

personne atteinte de la maladie d’Alzheimer apprécie mais ne peut plus réaliser seule (sortie

à l’extérieur, évocation de souvenirs, cuisine, tricot etc.).

L’ergothérapeute propose aussi aux aidants de participer à des formations et groupes

de paroles86. L’association France Alzheimer organise régulièrement des formations aux

aidants car selon eux, « personne mieux que l'aidant familial, ne connaît la personne qu'il

accompagne »87. Ils proposent ainsi des temps de rencontre avec des professionnels pour

échanger sur leur quotidien et les solutions (attitudes et comportements) qu’ils peuvent

adaptés aux situations difficiles qu’ils peuvent rencontrer. « Pour la personne malade, c'est

aussi un gage de respect et de prise en compte de sa dignité. ». Ces temps d’échange

permettent aussi « une entraide et un soutien mutuel entre les familles participantes ».

3 Critiques de la méthode

Au terme de ce travail de recherche nous pouvons dire que les 6 entretiens réalisés

ont permis de répondre au sujet de recherche, mais qu’ils ne sont qu’un aperçu de toutes les

démarches professionnelles des ergothérapeutes intervenant dans les équipes spécialisées

Alzheimer. La grille d’entretien était pertinente puisque les données recueillies étaient riches

et en accord avec les objectifs de recherches. Cependant, on peut s’interroger sur l’influence

de la zone géographique, de la date d’ouverture de chaque équipe et des pathologies

rencontrées par les ergothérapeutes. Les entretiens ont été ciblés sur la maladie d’Alzheimer

mais il est possible que les ergothérapeutes et l’ASG aient fait part de leur expérience

auprès de personnes atteintes d’une autre démence dégénérative, d’une démence

vasculaire ou d’une démence secondaire. En prenant en compte ces variables et en les

couplant à un échantillonnage plus important, cela aurait complété et enrichi notre enquête.

De plus, certaines questions de l’entretien auraient pu être approfondies afin de préciser

l’analyse des données. Quelles solutions proposer pour limiter l’épuisement de l’aidant ?

Quelles sont les difficultés rencontrées par rapport aux diverses préconisations ? Ou encore,

en interrogeant uniquement des aidants familiaux on aurait pu recueillir leur strict point de

vue sur l’intervention des ESA. Quelles étaient leurs attentes ? Qu’est ce que l’équipe leur a

apporté ? Leur opinion a-t-elle été prise en compte ?

86 Mesure 2 du Plan Alzheimer 2008-2012 87 France Alzheimer. Formation des aidants.

Page 58: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

52

CONCLUSION

La maladie d’Alzheimer est un sujet d’actualité de part les nombreuses recherches

effectuées à la fois sur les traitements médicamenteux et sur les thérapies non

médicamenteuse. Le nombre de personnes âgées porteuses de cette maladie augmentant

de manière importante, la question du maintien au domicile et des autres possibilités de

projet de vie est à prendre en compte. Alors que le Plan Alzheimer propose plusieurs

structures d’accueils, solutions de répit et interventions à domicile par des professionnels

formés, l’acceptation de toutes ces solutions n’est pas toujours évidente pour les familles.

Les équipes spécialisées Alzheimer ont donc pour missions d’amener progressivement un

accompagnement et des temps de répit pour l’aidant principal, notamment pour les conjoints

présents quotidiennement au domicile.

Cet écrit portant sur les missions de l’ergothérapeute auprès de l’aidant familial,

démontre l’importance de cette profession au sein d’une équipe spécialisée Alzheimer. Il

arrive à créer une relation de confiance en prenant en compte tous les aspects et les

habitudes de la vie du patient. En réalisant des mises en situation écologique et des

préconisations au domicile, l’aidant principal adhère plus facilement au projet car il perçoit

l’intérêt que cela peut lui apporter au quotidien. L’ergothérapeute étant formé aux divers

troubles de la maladie d’Alzheimer et notamment aux symptômes comportementaux et

psychologiques de la démence, il conseille l’aidant sur l’attitude à adopter dans les activités

de la vie quotidienne. Le conjoint aidant peut ainsi mieux comprendre et gérer les troubles et

les difficultés rencontrées, ce qui apaise d’autant plus la personne malade.

Ce travail d’initiation à la recherche m’a permis d’approfondir mes connaissances et

de découvrir une nouvelle démarche professionnelle pour les ergothérapeutes. Les

recherches effectuées n’ont pu donner qu’une analyse qualitative et non quantitative des

résultats obtenus. Pour que cette recherche contienne de réelles valeurs scientifiques, il

serait intéressant de l’élargir à toutes les équipes spécialisées Alzheimer mises en place

actuellement sur le territoire Français. On peut aussi s’interroger sur les spécificités de

l’intervention d’un psychomotricien par rapport à celui d’un ergothérapeute auprès d’une

personne porteuse de la maladie d’Alzheimer et de son entourage ? Ou alors, on peut

étudier le cas de personnes jeunes porteuses de cette maladie, ayant ses enfants à

domicile. Quelles sont les spécificités de l’ergothérapie pour ce type d’intervention ? Quels

sont les préconisations et conseils pour limiter l’épuisement des aidants familiaux (conjoint

et/ou enfants) ? Comment l’ergothérapeute se positionne t-il en tant que professionnel de

santé, dans ce contexte familial ?

Page 59: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

53

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<http://www.drees.sante.gouv.fr/IMG/pdf/er771.pdf> (Consulté le 10/02/12)

[20] - France Alzheimer. La formation des aidants. [En ligne] Mise à jour en mars 2012.

Disponible sur Internet : <http://www.francealzheimer.org/pages/vivre-avec-

alzheimer/aidants.php> (Consulté le 26/03/11)

[21] - Haute Autorité de Santé (HAS). Recommandations de bonne pratique : Maladie

d’Alzheimer et maladies apparentées : suivi médical des aidants naturels : Argumentaire. [En

ligne] Mise à jour en février 2010. Disponible sur Internet :

<http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2010-03/maladie_dalzheimer_-

_suivi_medical_des_aidants_naturels_-_argumentaire_2010-03-31_15-38-54_749.pdf>

(Consulté le 3/02/12)

[22] – HAS. Actes d’ergothérapie et de psychomotricité susceptibles d’être réalisés pour la

réadaptation à domicile des personnes souffrant de la maladie d’Alzheimer ou d’une maladie

apparentée. [En ligne] Mise à jour en janvier 2010. Disponible sur Internet :

<http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2010-03/alzheimer_-

_actes_dergotherapie_et_de_psychomotricite_-_document_dinformation_2010-03-25_12-

06-15_255.pdf> (Consulté le 14/01/12)

Page 61: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

55

[23] – HAS. Liste des actes et prestations affection de longue durée : maladie d’Alzheimer et

autres démences. [En ligne] Mise à jour en juin 2010. Disponible sur Internet :

<http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2009-

07/lap_alzheimer_finale_web_juin2009.pdf> (Consulté le 05/04/12)

[24] – INSEE. Évolution de l’espérance de vie à divers âges. [En ligne] Mise à jour en mai

2012. Disponible sur Internet :

<http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=0&ref_id=NATnon02229> (Consulté le

17/01/12)

[25] – La maison des aidants. Qui sont les aidants ? [En ligne] Mise à jour en 01/12.

Disponible sur Internet :

<http://www.lamaisondesaidants.com/dossiers/dossiers.php?val=22_accueil> (Consulté le

16/01/12)

[26] - Le Reun. Aide aux aidants familiaux des malades d’Alzheimer. [En ligne] Mise à jour

mai 2009. Disponible sur Internet :

<http://www.sgoc.fr/DIU%20Alzheimer%20Rennes%20Brest/s%C3%A9minaire%204/Dr%20

Le%20Reun%20-

%20Aide%20aux%20Aidants%20[Mode%20de%20compatibilit%C3%A9].pdf> (Consulté le

10/12/11)

[27] – Ministère des affaires sociales et de la santé. Archives : les plans Alzheimer 2001-

2005 et 2004-2007. [En ligne] Mise à jour en mai 2012. Disponible sur Internet :

<http://www.sante.gouv.fr/archives-les-plans-alzheimer-2001-2005-et-2004-2007.html>

(Consulté le 20/12/11)

[28] – Ministère des solidarités et de la cohésion sociale. Circulaire DGCS/SD3A no 2011-110

du 23 mars 2011 relative à la mise en œuvre des mesures médico-sociales du plan

Alzheimer (mesure no 6). [En ligne] Mise à jour le 23 mars 2011. Disponible sur Internet :

<http://www.sante.gouv.fr/fichiers/bo/2011/11-06/ste_20110006_0100_0165.pdf> (Consulté

le 06/01/12)

[29] – Ministère des solidarités et de la cohésion sociale. Annexe 1 : Cahier des charges des

équipes spécialisées Alzheimer à domicile. [En ligne] Mise à jour en mars 2011. Disponible

sur Internet :

<http://www.ash.tm.fr/mybdd/upload/bdd_148/CahierdeschargesAlzheimerAD-08-04-11.pdf>

(Consulté le 06/01/12)

Page 62: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

56

[30] - Mission de pilotage du plan Alzheimer. Plan « Alzheimer et maladies apparentées »

2008-2012. [En ligne] Mise à jour en 11/2011. Disponible sur Internet :

<http://www.plan-alzheimer.gouv.fr/IMG/pdf/plan-alzheimer-2008-2012.pdf> (Consulté le

06/01/11)

[31] – Professeur Blanchard et al. Alzheimer : l’éthique en questions : recommandations. [En

ligne] Mise à jour en 2007. Disponible sur Internet :

<http://www.plan-alzheimer.gouv.fr/IMG/pdf/Alzheimer_-_l_ethique_en_question_-

_recommandations_-_plan_Alzheimer_2004-2007.pdf> (Consulté le 03/03/12)

[32] - UNASSAD. Journée régionale d’échanges sur la maladie d’Alzheimer. Mieux

accompagner les malades qui vivent à domicile. [En ligne] Disponible sur Internet :

<http://aquitaine.sante.gouv.fr/download/3_alz_adomicile_unassad.pdf> (Consulté le

19/12/11)

[33] – WOJTASIK V. CHU de Liège. Réadaptation cognitive d’activités de vie quotidienne

dans la maladie d’Alzheimer. [En ligne] Mise à jour en 2003. Disponible sur Internet :

<www.cmchuliege.be/docs/readaptation_cognitive.rtf> (Consulté le 16/02/12)

Page 63: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

GLOSSAIRE

ADL : Affection de Longue Durée

ANAES : Agence Nationale d’Accréditation et d’Évaluation en Santé

AMP : Aide Médico-Psychologique

APA : Allocation Personnalisée d’Autonomie

ASG : Assistant de Soins en Gérontologie

DGCS : Direction Générale de la Cohésion Sociale

DRESS : Direction de la Recherche, des Études de l’Évaluation et des Statistiques

DSM-IV : Manuel Diagnostique et Statistiques des maladies mentales

EHPAD : Établissement d’Hébergement pour Personnes Âgées Dépendantes

EMA : Équipé Mobile Alzheimer

ESA : Équipe Spécialisée Alzheimer

ESPM : Équipe Spécialisée dans les Pathologies de la Mémoire

ETP : Équivalent Temps-Plein

GRApE : Groupe de Recherche Appliqué en Ergothérapie

HAS : Haute Autorité de Santé

IDEC : Infirmière Coordinatrice

MAIA : Maison pour l’Autonomie et l’Intégration des malades d’Alzheimer

OMS : Organisation Mondiale de la Santé

SCPD : Symptômes Comportementaux et Psychique de la Démence

SPADAD : Services Polyvalents d’Aides et de Soins  Domicile

SSIAD : Service de Soins Infirmiers  Domicile

UNASSAD : Union Nationale des Associations de Soins et Services  Domicile

Page 64: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

ANNEXES

Annexe 1 : La répartition des personnes âgées aidées par type d’aide reçue, selon le

niveau de dépendance (GIR)

Annexe 2 : Les critères diagnostiques DSM-IV pour la maladie d’Alzheimer

Annexe 3 : Les aides financières possibles pour les personnes atteintes de la

maladie d’Alzheimer

Annexe 4 : Les facteurs de risques d’épuisement des aidants familiaux

Annexe 5 : La mesure 6 du plan Alzheimer 2008-2012

Annexe 6 : Les actes d’ergothérapie en ESA selon l’HAS

Annexe 7 : Entretien avec Marine, ergothérapeute en ESA depuis 2 ans et demi

Annexe 8 : Entretien avec Michel, aidant principal, conjoint d’une personne atteinte

de la maladie d’Alzheimer

Page 65: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

ANNEXE 1

La répartition des personnes âgées aidées par type d’aide reçue, selon le niveau de

dépendance (GIR).

TABLEAU 1 : Répartition des personnes âgées aidées par type d'aide reçue, selon le niveau de

dépendance (GIR)

GIR 1-2

GIR 3 GIR 4 GIR 5 GIR 6 Ensemble

Nombre de personnes aidées 230 000 230 000 400 000 480 000 2 310 000 3 650 000

Aide de l'entourage seulement 22 25 36 45 56 48

Aide de professionnels seulement 7 7 14 15 24 20

Aide mixte* 71 68 50 40 20 32

Tous types d'aide 100 100 100 100 100 100

*Aide combinée de l'entourage et de professionnels.

Lecture • 71% des personnes aidées âgées de 60 ans ou plus très dépendantes (GIR 1-2) et vivant à domicile

sont aidées régulièrement pour des raisons de santé ou de handicap par un proche et un professionnel, 7 % sont

aidées uniquement par des professionnels, 22 % uniquement par leur entourage.

Champ • Personnes âgées de 60 ans ou plus vivant à domicile et aidées régulièrement pour des raisons de

santé ou de handicap dans les tâches de la vie quotidienne par un proche ou un professionnel, financièrement

par un proche ou par un soutien moral d’un proche.

Sources • Enquête Handicap-Santé 2008, volet ménages, INSEE.

ENCADRÉ 2 : Les groupes iso-ressources (GIR)

Chaque personne interrogée dans le volet ménages de l’enquête Handicap-Santé s’est vue attribuer une «

estimation GIR » déterminée sur la base des réponses aux questions HSM et en s’appuyant sur la méthode

d’attribution du GIR à partir de la grille AGGIR (autonomie gérontologie groupe iso-ressources) explicitée dans

l’article R 232-3 du Code de l’action sociale et des familles, méthode qui s’impose aux évaluateurs des conseils

généraux. La détermination du GIR s’appuie sur dix variables d’activité corporelle et mentale. Cette estimation

GIR a été calculée pour toutes les personnes enquêtées âgées de 60 ans ou plus, que celles-ci aient ou non

déclaré percevoir l’allocation personnalisée d’autonomie (APA). Le

GIR attribué n’est donc pas ici le résultat de l’évaluation de professionnels ; il doit être considéré comme un

indicateur statistique du degré de dépendance de la personne.

Page 66: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

Le GIR 1 correspond aux personnes âgées confinées au lit ou au fauteuil et dont les fonctions mentales sont

gravement altérées, qui nécessitent une présence indispensable et continue d’intervenants.

Le GIR 2 comprend deux groupes de personnes âgées : celles qui sont confinées au lit ou fauteuil, dont les

fonctions mentales ne sont pas totalement altérées et qui nécessitent une prise en charge pour la plupart des

activités de la vie courante et celles dont les fonctions mentales sont altérées mais qui ont conservé leurs

capacités de se déplacer.

Le GIR 3 correspond pour l’essentiel, aux personnes âgées ayant conservé leurs fonctions mentales,

partiellement leur capacité à se déplacer mais qui nécessitent plusieurs fois par jour des aides pour leur

autonomie corporelle. La majorité d’entre elles n’assument pas seule l’hygiène de l’élimination anale et urinaire.

Le GIR 4 comprend essentiellement deux groupes de personnes. D’une part celles qui n’assument pas seules

leurs transferts mais qui, une fois levées, peuvent se déplacer à l’intérieur du logement. Elles doivent parfois être

aidées pour la toilette et l’habillage. La grande majorité d’entre elles s’alimentent seules. D’autre part celles qui

n’ont pas de problème pour se déplacer mais qu’il faut aider pour les activités corporelles et les repas.

Le GIR 5 correspond aux personnes qui assurent seules leurs déplacements à l’intérieur de leur logement,

s’alimentent et s’habillent seules. Elles nécessitent une aide ponctuelle pour la toilette, la préparation des repas et

le ménage.

Le GIR 6 regroupe toutes les personnes qui n’ont pas perdu leur autonomie pour les actes discriminants de la vie

courante.

Page 67: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

ANNEXE 2

Les critères diagnostiques DSM-IV pour la maladie d’Alzheimer.

Page 68: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

ANNEXE 3

Les aides financières possibles pour les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer

Train Alzheimer du 21 septembre au 6 octobre 2011.

Page 69: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

ANNEXE 4

Les facteurs de risques d’épuisement des aidants familiaux

3 - Quels sont les facteurs de risque d’épuisement de l’aidant familial ?

Les facteurs prédictifs d’épuisement sont bien identifiés et doivent être recherchés, car il est difficile pour

l’aidant de prendre conscience de ses limites :

- la désignation implicite d’une personne comme aidant principal potentiel du fait d’une plus grande disponibilité

supposée : enfants célibataires et/ou n’ayant pas d’activité professionnelle, proximité géographique ;

- l’âge avancé et l’état de santé précaire de l’aidant ;

- une situation conflictuelle avec les autres membres de la famille ;

- l’isolement avec sensation d’enfermement dans le rôle d’aidant et de restriction de la vie personnelle ;

- l’ambition de vouloir tout faire et tout normaliser, parfois en rivalité avec les soignants ; ou alors, à trop vouloir

masquer ou se cacher la réalité de la maladie, certains aidants ont du mal à admettre leurs besoins, à accepter

pour leur parent une aide à domicile ;

- l’incapacité de se projeter dans l’avenir, devant l’aggravation progressive de l’état de santé de son parent, avec

un sentiment d’impuissance et/ou de culpabilité ;

- les traumatismes provoqués par l’inversion des rôles parent/enfant et par la non reconnaissance des proches

par la personne malade ;

- l’ambivalence entre désir de vie et désir de mort ;

- le sentiment de honte face aux comportements de son parent qui échappent aux normes ;

- le ressentiment face à des conduites inadaptées du parent malade, ne correspondant pas à sa personnalité

antérieure ;

- un temps important de présence quotidienne consacré à l’aide alors que la prise en charge dure depuis

plusieurs mois, voire des années ;

- le deuil anticipé d’une personne pourtant toujours vivante ;

- les problèmes matériels, notamment un habitat inadapté.

Certains symptômes et attitudes de l’aidant sont des signes d’alerte d’un risque d’épuisement :

- tristesse, anxiété, pleurs, découragement ;

- diminution des activités sociales et de loisirs et rupture progressive avec l’entourage amical, avec le voisinage ;

- fatigue ;

- accumulation de petits problèmes de santé ;

- agressivité, irritabilité ;

- repli sur soi ;

- mauvaise qualité du sommeil.

Le rôle de tout professionnel de santé est de prévenir et de repérer ces situations, d’aider l’aidant à

prendre conscience de son épuisement, des risques pour sa santé et pour celle du patient. L’épuisement

de l’aidant est un facteur de risque majeur de maltraitance de la personne malade. Le soignant doit

proposer des réponses, de façon concertée avec les autres professionnels, notamment des solutions

alternatives temporaires qui permettent de dépasser des périodes critiques même si elles ne règlent pas

le problème de fond1.

Page 70: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

ANNEXE 5

La mesure 6 du plan Alzheimer 2008-2012

Mesure n°6

Renforcement du soutien à domicile, en favorisant l’intervention de personnels spécialisés

1. Contexte

A l’heure actuelle, les personnels soignants sont insuffisamment formés à la prise en charge des personnes

atteintes de la maladie d’Alzheimer sur de nombreux aspects essentiels de la

vie courante. L’insuffisance de formation touche également l’apprentissage de gestes adaptés qui sécurisent le

malade, l’aptitude à la communication non verbale et la prise en charge des troubles cognitifs.

2. Objectif

La création d’une formation d’assistant en gérontologie, accessible par la formation continue, répond à ce besoin,

tout comme l’offre nouvelle de formation adaptée à la spécificité de la dépendance psychique.

Des équipes spécialisées comprenant des assistants en gérontologie, des psychomotriciens ou

ergothérapeutes seront ainsi constituées.

Ainsi, sur prescription médicale, les ergothérapeutes et les psychomotriciens pourront intervenir à domicile et

assurer, dès le diagnostic, l’éducation thérapeutique, un bilan d’adaptation du logement, la réhabilitation et la

stimulation cognitive et, le cas échéant, en cas de crise, la prise en charge des troubles du comportement.

Ces équipes spécialisées amélioreront considérablement la prise en charge des personnes atteintes de la

maladie d’Alzheimer, mais aussi de l’ensemble des personnes âgées dépendantes, leur qualité de vie, et celle de

leur entourage, créant ainsi les conditions d’un véritable choix entre domicile et institutionnalisation.

L’orientation des personnes atteintes depuis le lieu unique se fera vers des équipes renforcées de services

polyvalents d’aide et de soins à domicile ou vers des équipes de coordination libérale intégrant ces prestations,

en fonction des territoires.

3. Mesure

Les services polyvalents d'aide et de soins à domicile (SPASAD), récemment créés, associent, au sein d’une

même structure, à la fois offre de soins et aides à la personne. Ce sont donc des structures particulièrement

adaptées pour la prise en charge interdisciplinaire que nécessite la maladie d’Alzheimer, puisqu’elles permettent

d’assurer l’essentiel des actes réalisés dans le cadre des services de soins infirmiers à domicile (SSIAD) tout en

faisant bénéficier les personnes atteintes de professionnels spécifiquement formés. La tarification

des SSIAD devra être adaptée, en fonction des expérimentations en cours, afin de permettre le recrutement de

ces professionnels.

Sur cette base, 500 équipes spécialisées, soit 5000 places de services à domicile, seront créées de 2009 à

2012.

Page 71: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

Ces places devront être réparties équitablement sur le territoire. Ces créations de places renforcées s’inscrivent

dans la progression globale du nombre de places en soins et services à domicile, entamée depuis 2007.

Parallèlement, la coordination des professionnels libéraux sera encouragée, avec des équipes intégrant des

ergothérapeutes et des psychomotriciens. Une réflexion va être menée, en lien avec la Haute Autorité de Santé,

afin de permettre la rémunération des professionnels non conventionnés par l’assurance maladie, sur le modèle

de ce qui a été établi pour la prise en charge des soins de podologie pour les diabétiques.

La coordination entre ces équipes et les autres intervenants – psychiatres, neuropsychologue – sera assurée par

le coordonnateur, en liaison avec le médecin traitant prescripteur. En effet, il est très important que ces

professionnels puissent également intervenir auprès du patient.

Enfin, afin de permettre le recrutement de ces nombreux professionnels, le Plan Métiers intégrera, en plus de la

création de la formation d’assistant de soin en gérontologie, la question de la formation par les régions des

ergothérapeutes et des psychomotriciens.

4. Acteurs

Caisse Nationale pour la Solidarité et l'Autonomie, ministère chargé des affaires sociales, ministère chargé de la

Santé en partenariat avec la HAS.

5. Calendrier

2008 : adaptation de la tarification des SSIAD

2008 : étude par la HAS et la DSS de la coordination libérale

2008 : étude des modalités de formation des ergothérapeutes et psychomotriciens

2009-2012 : création des équipes par montée en charge progressive

2009 : mise en place des coordinations libérales

6. Financement

169 M€ au total, 75 M€ en année pleine pour la création des 500 équipes spécialisées, avec une montée en

charge progressive

7. Évaluation

Indicateurs de processus

Modification de l’article D 312-2 du code l'action sociale et des familles pour compléter la liste des professionnels

des SSIAD intervenant à domicile (assistant de gérontologie, psychomotricien, ergothérapeute)

Création de nouveaux centres de formation pour les ergothérapeutes et les psychomotriciens

Indicateurs de résultats

Nombre de places de SSIAD spécialisées créées / nombre de malades d’Alzheimer (ALD) à domicile

Nombre de SPASAD créés

Nombre de groupements de coopération créés (GCSMS) intégrant un SSIAD

Nombre de coordinations libérales « Alzheimer » créées

Nombre malades d’Alzheimer à domicile / nombre de malades d’Alzheimer en établissement

(ALD)

Nombre de professionnels formés

Page 72: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

ANNEXE 6

Les actes d’ergothérapie en ESA selon l’HAS

Réadaptation cognitive dans les activités de la vie quotidienne

Objectifs - Favoriser le maintien des capacités de participation aux activités de la vie quotidienne en stimulant les capacités cognitives restantes. - Renforcer les stratégies compensatoires et les performances lors des activités de la vie quotidienne (toilette,

habillage, repas, cuisine, ménage, conduite, loisirs, gestion financière, utilisation des moyens de communication,

gestion de l’argent, etc.).

Outils d’évaluation1 - Bilan Modulaire d’Ergothérapie (BME).

- Functional Assessment STaging (FAST).

- Grille d’Ylieff.

- Kitchen Task Assessment.

- Assessment of motor rand process skills.

- Caregivers Assessment of Functional dependence and Upset (CAFU).

- Mesure Canadienne du Rendement Occupationnel (MCRO).

- Questionnaire de style vie de Mayers.

Préconisation et entraînement à l’utilisation d’aides techniques

Objectifs - Améliorer les capacités fonctionnelles, la participation aux activités, la participation sociale. - Assurer la sécurité.

- Réduire les troubles de la communication et les difficultés liées à la mémoire.

- Prévenir l’apparition d’un syndrome de désadaptation posturale et motrice.

- Entraîner le patient, son entourage familial et les professionnels à l’utilisation des aides techniques.

Outils d’évaluation - Mesure de la qualité de l’environnement. - Mesure Canadienne du Rendement Occupationnel (MCRO).

- Questionnaire de style vie de Mayers.

Réadaptation de la mobilité et des transferts

Objectifs - Améliorer, maintenir les capacités fonctionnelles, la participation aux activités, la participation sociale. - Améliorer, entretenir les schémas moteurs par des techniques de réactivation motrice, basées sur le concept

d’ergomotricité.

Outil d’évaluation - Bilan Modulaire d’Ergothérapie (BME).

Prévention et traitement des risques de chute

Objectifs - Prévenir les risques de chute. - Développer les stratégies d’adaptation posturale et sécuritaire lors des activités de la vie quotidienne.

- Favoriser la participation aux activités de la vie quotidienne, à la vie sociale.

- Éviter l’isolement en favorisant la mobilité.

- Proposer des alternatives aux contentions physiques.

Page 73: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

Outils d’évaluation - Équilibre et Vie Quotidienne (EVQ). - Home Falls and Accidents Screening Tool (HOME FAST).

Positionnement des troubles posturaux assis et en décubitus

Objectifs - Améliorer les capacités fonctionnelles, la participation aux activités de la vie quotidienne. - Améliorer les capacités de manipulation des véhicules pour handicapés physiques (fauteuil roulants et

dispositifs assimilés).

- Aider à la prévention des escarres et des déformations orthopédiques.

- Proposer des alternatives aux contentions physiques.

Outil d’évaluation - Mesure du Contrôle Postural Assis de l’Adulte (MCPAA2).CTES DE PSYCHOMOTRICITE

Développement des performances de l’entourage dans la prise en charge et l’accompagnement du

patient

Objectifs -Optimiser l’accompagnement des patients souffrant de la MA ou d’une maladie apparentée dans les activités de la vie quotidienne. - Développer le savoir-faire des aidants pour solliciter les capacités motrices et cognitives lors des activités de la

vie quotidienne.

Outil d’évaluation - Caregivers Assessment of Functional dependence and Upset (CAFU).

Aménagement de l’environnement

Objectifs - Réduire les limitations de l’autonomie liées à l’environnement. - Améliorer la sécurité, l’orientation.

- Proposer des alternatives aux contentions physiques.

Outils d’évaluation - Grille d’évaluation de la sécurité (GES). - Enabler.

- Mesure de la qualité de l’environnement.

- Équilibre et Vie Quotidienne (EVQ).

- Home Falls and Accidents Screening Tool (HOME FAST).

- Mesure Canadienne du Rendement Occupationnel (MCRO).

- Questionnaire de style vie de Mayers.

Page 74: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

ANNEXE 7

Entretien avec Marine, ergothérapeute en ESA depuis 2 ans et demi

1) D’une manière générale, comment se déroule votre intervention au domicile ?

Au domicile, donc il y a une première visite par la coordinatrice qui fait une analyse un petit peu de la situation, qui recueille déjà

quelques informations sur les capacités de la personne, ce qu’elle fait au quotidien, un petit peu l’histoire de vie, ou l’entourage

familial. Et ensuite moi ou la psychomotricienne on intervient pour les bilans de capacités de la personne. Souvent moi je

commence par un entretien plutôt, recueil des habitudes de vie, des difficultés au quotidien. Voilà au départ c’est un petit peu je

laisse la personne me dire ce qu’elle a envie de me dire. Je présente mon intervention, ce qu’est une ergothérapeute, qu’est ce

que je peux apporter. Et après je vois comment la personne réagit. Si elle est tout à fait on va dire d’accord pour notre

intervention, parce qu’il faut aussi souvent réexpliquer pour qu’ils acceptent aussi qu’on vienne, si la personne je sens qu’elle a

bien compris, qu’elle voit ce que peut être je peux lui apporter et qu’elle n’est pas contre les bilans, je peux commencer par faire

les bilans dès la première rencontre. Ou alors, si je sens que c’est un petit peu difficile, bon ben je suis plus dans la discussion,

voilà essayé de connaitre la personne, voir comment elle réagit. Parfois j’ai des personnes qui n’acceptent pas du tout les

bilans, donc si au départ ils ont pu me dire « ben j’aimerais faire ça, j’aimerais faire cette activité là » je dirais « ah ben je peux

peut-être le faire avec vous ». Donc voilà du coup je pars plutôt sur une activité et en fonction de cette activité j’essaye d’évaluer

par des observations où est-ce qu’elle en est dans ces capacités. Voilà comment ça se passe. Et après en fonction de ça au

bout de trois ou quatre séances je fais un compte rendu de mes évaluations et je propose un projet de soin, avec deux à trois

objectifs à atteindre. Donc ça peut être plutôt travailler sur une activité ou limiter l’angoisse, donc trouver ce qui va pouvoir la

rassurer, est-ce-que c’est en réorganisant un petit peu son quotidien, voilà après ça dépend. Et puis dans les objectifs on peut

aussi avoir conseil à l’aidant, si on sent que si on apporte conseil à l’aidant la personne serait rassurée, serait moins angoissée

et ça ne pourra être que mieux après pour notre intervention que ce soit un peu plus calme on va dire.

2) Et du coup l’aidant comment est ce qu’il accepte votre intervention au domicile ?

Souvent ils l’acceptent, déjà avant qu’on intervienne parce qu’on demande généralement que se soit l’entourage, ou si la

personne le peut la personne elle-même, qui nous contactent. Même si l’information a été donnée par un médecin, par le CLIC

ou par un service d’aide qui intervient chez eux, on demande quand même que ce soit la personne qui nous contacte. C’est

déjà une première entrée, acceptation de notre intervention. Donc souvent ils l’acceptent. Parfois quand ça plus été un conseil

insistant du médecin ou du CLIC et bien voilà ça dépend, soit on réexplique notre intervention, bon déjà ma collègue au

téléphone explique, au moment de la première rencontre explique. Nous à notre première visite, l’ergo ou la psychomotricienne

on ne demande pas forcément qu’il y ait la famille, mais si la famille est présente bon ben voilà c’est pareil on repasse par là.

On n’a pas trop eu de difficultés par rapport à l’acceptation des conjoints. Il y a peu être de temps en temps où ils ne voient pas

vraiment ce qu’on peut apporter où là justement l’adhésion du patient est plus délicate on va dire. Mais en général ils acceptent

bien. Quand ils voient , à partir du moment où ils voient que ça perturbe pas plus la personne, même si au départ ils ne voient

pas trop ce qu’on peut leur apporter, quand ils voient que ça perturbe pas plus la personne s’ils voient encore en plus que la

personne apprécie le moment, là déjà ils acceptent plus facilement.

3) Et dans les cas où il y a quelques difficultés, comment est ce que vous réagissez ?

Nous de toute façon on ne va pas les forcer. On réexplique, on explique que de toute façon voilà on ne va pas les forcer. S’il ne

souhaite pas notre intervention on arrêtera et qu’on reste quand même à leur disposition, s’il y a besoin d’une intervention plus

tard. Si possibilité il y a on fait le lien avec le CLIC s’il n’a pas encore eu ce lien de crée, parce qu’au moins le CLIC est là sur du

long terme, qu’il peut nous réinterpeller aussi après. Et puis si la demande était venue par exemple du médecin et ben on

explique au médecin qu’ils n’ont pas souhaité notre intervention. Si la demande n’était pas du médecin on ne l’informe pas

forcément. Donc voilà, souvent quand le conjoint n’accepte pas, enfin s’il y a un refus de la part du patient ou du conjoint, ou

vraiment la personne ne veut pas du tout, parce qu’on est chez eux donc. Après c’est différent quand justement c’est un enfant

qui ne vit pas avec la personne, il n’y a pas d’histoire de tutelle, curatelle, chose comme ça, là c’est différent. On ne va pas

intervenir, ça va dépendre de la situation, parce qu’on peut dire aussi « la personne, vous n’avez pas entre guillemet légalement

le droit de nous interdire ». si la personne chez qui on intervient est d’accord le patient et que les enfants ne sont pas d’accord,

là on va prendre en compte que ce que va dire la personne qui intervient, la personne intervient par contre et que le conjoint, si

la personne est d’accord et le conjoint n’est pas d’accord et ben là, on peut aussi discuter, parce qu’on peut aussi dire la

Page 75: L‘accompagnement du conjoint d‘une personne porteuse de la

personne n’est plus totalement, enfin, il n’y a pas de mise sous tutelle, sous curatelle, ce n’est pas forcément eux qui vont tout

décider pour cette personne là, donc on peut aussi être amener à parler, du coup à faire peut être intervenir le médecin pour

qu’on intervienne, comme ça il y a un poids, mais si aucun des deux ne veut ben là on insiste pas. Si le conjoint ne veut pas,

mais ça, ça ne nous est pas arrivé par contre, que le conjoint ne veuille pas et que le patient veuille ça ne nous est pas arrivé.

Que les deux ne veuillent pas c’est déjà arrivé. Ça en général ce n’est pas arrivé, quand le patient voulait bien, souvent le

conjoint il accepte aussi.

Et du coup dans la plupart des cas les patients et les conjoints acceptent et d’après vous pourquoi est-ce qu’ils

acceptent aussi facilement ? C’est eux qui sont en demande ?

Oui et aussi parce qu’il y a peu de chose quand même qui leur sont proposés dans l’accompagnement, de choses adaptées je

veux dire. Parce que effectivement il y a beaucoup d’aides à domicile, mais des personnes qui ne sont pas toujours formées,

qui sont là pour une action précise mais qui ne sont pas forcément là pour de l’accompagnement par rapport à la maladie ou

aux troubles qu’à la personne. Donc je pense que ça doit venir de là. Mais ils sont en demande d’avoir un accompagnement,

quand ils ne le sont pas c’est qu’ils refusent toutes aides. Ils sont dans le déni, peut être dans une phase de déni ou voilà ils

viennent d’apprendre le diagnostic, voilà, c’est non pour tout parce que c’est dur à encaisser. Mais à un moment souvent ils

sont en demande et il y a tellement peu de chose sur le territoire que « ah il y a quelque chose et ben très bien on va essayer ».

4) Et donc par rapport à vos objectifs, vous me disiez qu’il y en a deux-trois, ceux qui sont par rapport à l’aidant, ça

serait quoi le genre d’objectifs ?

Ben comme je le disais au départ c’est vraiment soutien de l’aidant par soit par de l’écoute, soit du conseil enfin de l’information

sur la maladie et les troubles, soit du conseil sur l’accompagnement qu’il pourrait apporter au quotidien à leur conjoint. Ou alors

de l’information sur les groupes d’aide aux aidants aussi. Alors sur notre territoire il y a des groupes qui sont données par les

CLIC et il y a des groupes qui sont données par France Alzheimer. Donc voilà actuellement c’est un petit peu tout ce qu’il y a.

après c’est de l’information sur les structures de répits, les accueils de jour, les accueils temporaires, principalement d’ailleurs,

ou alors si vraiment le maintien à domicile n’est pas possible ça va être sur les maisons de retraite, les foyers logements aussi

parfois. Mais bon on va dire que nous on fait surtout de l’information sur l’accueil de jour, principalement parce qu’on peut être

amené à aller faire une visite avec eux, pour leur présenter le lieu, pour qu’ils comprennent ce que ça peut apporter. Que ça soit

fait aussi par une personne extérieure que le conjoint parfois aussi c’est pas mal parce que s’il n’accepte pas tout de suite au

moins ils en veulent pas au conjoint qui aura fait la démarche. Donc voilà souvent on dit ça « non mais ce n’est pas votre

conjoint qui nous a demandé, c’est nous on vous propose les choses qui existent » pour que peut-être ça passe plus

facilement, qu’ils acceptent plus facilement et qu’au moins il n’y ait pas aussi après de répercussions sur le conjoint. Après ce

qui est des accueils temporaires, des maisons de retraite nous on n’a pas tellement de structures de répits, enfin d’autres

choses éventuellement qui existent. Souvent aussi le CLIC, on les oriente vers le CLIC pour les informer sur tous ce qui existe,

sur les aides financières qu’ils peuvent avoir. Mais on fait, on va les mettre en lien aussi avec le CLIC quoi.

Et du coup est ce qu’il y a des objectifs on va dire indirects, en travaillant auprès de la personne malade qui agiraient

un peu sur l’aidant ?

Ben par exemple on a des, bon là ce n’était pas un conjoint, mais si, si, si c’est arrivé avec des conjoints aussi, qui nous

demande « quelle activité je peux encore lui proposer ? ». C’était des personnes qui étaient quand même à des stades évolués

de la maladie où c’est vrai que les capacités sont très limités donc c’est qu’est ce qu’on peut leur proposer maintenant ? Par

rapport aux activités qui existent, parce que tout ce qu’il faisait avant ben c’est plus possible. Voilà donc du coup nos séances

c’est aussi de trouver une activité qui va correspondre à cette personne et qui ou que l’aidant pourra refaire après avec lui. Pour

que l’aidant se sente utile aussi et puisse apporter quelque chose. Souvent c’est ça, en indirect enfin pour ma part en tout cas,

en tant qu’ergothérapeute.

5) Quels moyens est-ce que vous mettez en place que se soit avec l’aidant ou le conjoint malade au domicile ?

Ben nous on a pleins d’activité en fait donc on essaye un petit peu tout ce qu’on a. on essaye de voir aussi par rapport à ce qu’il

faisait avant. Bon souvent en fait l’aidant il trouve les solutions seuls, nous on est juste là pour leur dire qu’il y a encore des

possibilités. Souvent ils arrivent à retrouver des choses seuls. Bon parfois on leur donne quand même des pistes, on va leur

dire d’essayer plus des activités ludiques auxquels ils n’auraient pas pensé. Dans les activités du quotidien souvent l’aidant

trouve tout seul. Je me souviens d’une dame, bon là c’était sa fille mais, elle avait remarqué que faire essuyer la vaisselle, faire

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plier le linge sa maman pouvait toujours le faire bon ben voilà elle l’orientait plutôt à le faire. Pour une autre dame, elle avait

remarqué que son mari tout ce qui était rangement des tiroirs, des placards ben tout ça il aimait le faire et il le faisait encore

bien donc elle continuait à faire ça au niveau du quotidien. Après au niveau peut-être autre activité à proposer pour stimuler la

mobilité ou euh, ben là c’était plus la mobilité parce que c’était un monsieur qui du coup avait un ralentissement psychomoteur,

je lui disais « ben comme activité vous pouvez peut-être, ça peut être des jeux de ballons » voilà c’est autre chose qu’on n’a

plus forcément l’habitude de faire et qui ne sont plus forcément proposé aux personnes, voilà quand on est en couple on va pas

se mettre, on ne joue pas forcément au ballon, on fait pas forcément des mouvements de gym. Donc ça pouvait être ça aussi,

on refait une séance, on lui explique quels gestes elle peut refaire.

Et est-ce qu’il y a des moments où vous arrivez à être un peu seul avec l’aidant, pour discuter ?

Rarement ça quand même, très rarement. Si vraiment on le souhaite on peut organiser une rencontre, des coordinations en fait

en dehors de chez la personne. Ça nous ait arrivé de temps en temps mais rarement, parce que même les coordinations on

essaye de le faire avec la personne, le patient, quand même en général. Bon là je vais peut-être avoir un cas mais ce n’est pas

avec le conjoint, c’est avec les enfants. Mais avec les enfants c’est aussi différents parce que les enfants ne vivent pas avec la

personne, enfin ça arrive mais ce n’est pas encore ce qu’il y a de plus courant. Souvent c’est soi le conjoint, enfin le coup le

vieillit encore ensemble, soit la personne vit seule et rarement mais ça arrive quand même elle vit chez un de ses enfants. Ou

un enfant est venu vivre avec mais ça c’est quand même rare. Donc rarement quand même on n’est seul avec l’aidant. Très

rarement, donc c’est en présence du patient qu’on explique, c’est bien aussi parce que l’aidant entend, il voit aussi comment on

parle face à la personne, voilà ils se rendent compte de certaines choses rien qu’en étant à trois. Mais ouais on n’est pas

souvent seul, ça nous est arrivé vraiment quand la personne, le patient avait plutôt des crises d’agressivité, d’agitation si on

parlait de ses troubles et de sa maladie. Si on voyait que pour la personne bon ce n’était pas toujours simple à accepter mais

qu’elle pouvait entendre certaines choses, souvent on est là.

6) Et du coup vous est ce que vous avez le sentiment que votre intervention elle a été bénéfique pour l’aidant et le

conjoint ? Vous avez peut-être un peu de recul par rapport à certaines prises en charge.

Ben disons que, nous on voit que parfois effectivement ça a pu permettre à l’aidant d’avancer un petit peu sur l’acceptation de

la situation, sur l’acceptation des troubles de la personne et sur un petit peu comment l’accompagner. Parfois ça peut aider,

mais pas toujours. Parfois on voit des personnes qui ne changent pas du tout après notre intervention. Et là souvent on se dit

qu’après ça va être difficile, sauf si on a réussi à mettre en place un service d’aide et que le service d’aide est bien au courant

de ça et qu’il va toujours y avoir aussi, ils sont toujours vigilant en fait à ça aussi, c’est-à-dire à ce que soit l’aidant ne s’épuise

pas, soit que l’aidant continue à bien accompagner la personne, en respectant ses capacités, en respectant ses envies. Que du

coup le service d’aide qui se met en place soit sensibilisé à ça. Si on voit que l’aidant n’a pas du tout évolué pendant notre

intervention. Ça arrive, il y a les deux. Il y en a aussi c’est trop difficile pour eux, ils n’ont plus assez de capacités de ressources

pour accepter tout ça et pour avoir un accompagnement adapté.

7) Et à la toute fin de la prise en charge est-ce-que vous avez une manière d’évaluer le ressenti de l’aidant ?

On a un questionnaire, qu’on transmet, bon ben il est adressé au patient mais qui peut être rempli, souvent qui est rempli par

l’aidant. C’est précisé ou non si ça a été rempli par le patient ou par une personne de l’entourage. C’est des questionnaires

anonymes et on demande est ce que notre intervention a permis d’éclaircir des choses, d’avoir plus d’information sur la

maladie, est ce que ça a apporté quelque chose au quotidien. Après c’est un peu plus sur les modalités de notre intervention

est ce que le rythme convenait, est ce que le moment de l’intervention convenait, est ce que la personne était enfin ça peut être

avant ou après, enfin est ce qu’il n’y a pas eu plus d’angoisse en fait par notre intervention. Voilà c’est un petit peu tout ça qu’on

évalue.

Vous avez eu des retours déjà du coup des questionnaires ?

Oui des questionnaires, oui on en a. parfois les gens laissent anonyme, parce qu’ils ont la possibilité, que ça reste anonyme ou

qu’ils mettent leurs noms, donc parfois on sait pour quelle prise en charge. Enfin en général même on arrive à savoir parce que

pour l’instant on a trente personnes en file active donc on sait à peu près quand est ce qu’on a terminé, on se dit « ah ça, ça

ressemblerait plutôt à telle situation » donc on se dit bon ben voilà ça, ça peut peut-être être par rapport à, pi bon il y a des

personnes qui le mettent aussi franchement, on sait qui c’est. En général c’est positif, on a eu quand même deux, trois

questionnaires ou non c’était négatif, ils n’ont pas vu l’intérêt de notre intervention, ça n’a rien apporté pour eux. C’était en tout

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cas pour un monsieur qui était, c’était des conjoints un monsieur, un jeune qui avait à peine soixante ans voilà acceptation du

diagnostic, acceptation de la situation, du trouble pour l’instant c’était trop dur. Il était en train de faire le deuil de tous ce qu’il

venait d’apprendre, que sa femme n’allait plus être pareille, qu’elle perdait des choses, donc on va dire que concrètement on a

rien apporté pour lui. Il s’attendait à ce qu’on guérisse son épouse, donc forcément. Donc voilà, là ce n’était pas positif pour lui,

on va essayer d’en reparler, mais voilà, c’était trop dur à ce moment là. Et l’autre personne alors là c’était plus compliqué, mais

là je pense que ça allait être difficile alors là qu’il comprenne, c’est pareil c’est une personne qui voulait qu’on guérisse sa

femme et qui n’avait pas compris la maladie, qui ne comprenait pas ce que les troubles engendraient, qui ne comprenait pas

que le changement de sa femme était lié à ces troubles là donc malgré une aide enfin une explication de notre part, une

explication de la fille et du médecin aussi mais là le couple ça allait être difficile.

Et ça arrive du coup qu’il y ait des contacts après ?

Ce n’est pas souvent après, mais sauf si les gens veulent qu’on réintervienne puisque l’on peut réintervenir un an après. Nous

parfois par différents partenaires par contre on peut avoir des informations, par le CLIC demandé où ça en ai, par le SSIAD si

c’était un SSIAD qui les suivait, ou part l’accueil de jour. Voilà on peut avoir des infos comme ça. On sait parfois si la s ituation

est stable, si ça a évolué, si parfois il nous demande « est-ce-que vous pouvez réintervenir ? ». Là on n’a pas eu trop de cas où

on est réintervenu. Ça fait deux ans, un peu plus de deux ans maintenant qu’on existe et là peut être que ça va revenir. Je sais

qu’il y a des situations qui ont évolué, justement est ce qu’elles n’ont pas trop évolué, est ce qu’on est encore dans, est ce qu’il

y a encore des capacités de réhabilitation. Donc voilà c’est, on va voir, mais on n’a pas encore de cas où on va réintervenir un

an après. Au début en plus on pouvait réintervenir tout de suite et puis le cahier des charges a été modifié, donc on a des

personnes où on est réintervenu tout de suite et depuis il n’y en a pas eu forcément, ou alors la personne n’est plus à domicile.

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ANNEXE 8

Entretien avec Michel, aidant principal, conjoint d’une personne atteinte de la maladie

d’Alzheimer

1) Est-ce que vous pouvez me racontez qu’est-ce que l’équipe professionnel a fait chez vous, comment est-ce qu’elle

est intervenu chez vous ?

C’est-à-dire que bon c’est la suite de, si vous voulez du CHU, comme ma femme à la maladie d’Alzheimer et donc c’est passé

après par le docteur traitant et comment je dirais moi, les assistantes sociales je veux dire comme vous dites là thérapeute là ?

Les ergothérapeutes ?

Oui alors donc elles sont venues et puis bon on a rempli des papiers ceci-cela et on nous a interrogé sur la patiente quoi et

après c'est-à-dire que, je dois dire bon ben que c’est assez difficile de guider une personne qu’est malade bon si vous voulez

pour ranger les affaires et tout ça ou pour faire la cuisine ou pour, enfin ce n’est pas si vous voulez du cent pour cent. Parce

que on fait montrer à la personne mais la personne disons que elle ne suit pas. Même comment si vous voulez pour mettre la

table, je vais vous faire voir. (Le monsieur me montre une fiche plastifiée la liste d’objets pour mettre la table, ainsi que le

modèle avec l’emplacement des couverts). Vous voyez pour mettre le couvert par exemple.

Donc ça c’est l’ergothérapeute qui vous l’a proposé ?

Ben disons que c’était celle qui était avec elle, sa collègue quoi. Et même, sa collègue elle nous a appris, enfin à ma femme,

pour faire par exemple un gâteau ou lui proposer de faire la cuisine et ceci-cela. Alors bon on achète tout ce qu’il faut et puis ma

femme fait, elle est guidé quoi si vous voulez et ma femme fait tout et après bon bah elle lui fait montrer comment le gâteau,

comment dirais-je à suivre quoi. La recette et tout ça bon bah.

Ils sont venus combien de fois vous voir ?

Ben c’est-à-dire qu’ils ont le droit à, suivant les personnes qui acceptent, mais je veux dire 15 fois par an. Et si les gens refusent

bon ben ils réduisent quoi.

Et du coup là c’est terminé l’intervention ?

Là c’est terminé sauf si vous voulez si on avait vraiment besoin pour des soins par exemple, pour faire la toilette ou quoi, enfin

bon moi tant que ça va, c’est-ce que j’ai dis je m’occupe de ma femme quoi et le jour où ça ira plus ben on est quand même

assisté. On a proposé même des sorties et des sorties par exemple venir à domicile et puis emmener ma femme dans un

comment enfin dans un genre de club ou qui prennent des gens qui sont comme ça pour discuter ensemble ou pour jouer et

tout ça. Mais enfin ça, ça dépend de la personne parce que il y a des personnes qui acceptent et il y a des personnes qui ne

veulent pas, elles veulent rester, c’est le cas de ma femme. Parce qu’il faut qu’elle soit décidé quoi. Voilà ce n’est pas facile,

pas toujours.

2) Sinon, quand l’ergothérapeute et sa collègue son venues chez vous, qu’est-ce qu’elles ont mis en place chez vous ?

Qu’est-ce qu’ils ont fait ?

Ben en place alors disons ranger les vêtements quoi, parce que bon pour trouver plus facilement. La question de la vaisselle

aussi, comme je vous disais, bon pour que ça soit plus facile à trouver et même elle m’avait proposé de mettre des étiquettes

pour dire par exemple tel et tel vaisselle se trouve, bon ben ça a pas été fait parce que finalement, bon il y a peut être des

malades qui le font, mais ma femme elle a l’habitude de ranger les affaires où sa lui plait et moi c’est peut être assez difficile

mais quand vous suivez une personne vous retrouvez automatiquement, vous retrouvez où les affaires sont égarées, c’est pas

toujours facile et où elle range les affaires, parce que bon on a l’habitude de l’appartement, donc bon c’est pas toujours facile

mais enfin on est dans un appartement c’est pas comme dans une maison. Les affaires ont les retrouvent plus facilement.

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Elles vous ont proposé des choses et après c’est vous qui avez décidé ensemble ?

Ah ben oui parce que quand il y a rien à faire ce n’est pas la peine. Quand faut remettre les fourchettes avec les fourchettes,

mettre les couteaux avec les couteaux, bon ben comme les casseroles et ceci et cela. Bon ben aussi, ce qu’il y a si vous voulez

elle me pose des questions pour comment ça se passe le matin et puis, parce que pour les médicaments de la personne,

comment ça se passe le midi, ce qu’elle peut faire. Bon ben elle épluche encore les légumes quoi et puis pour faire la vaisselle

et ben ça va encore, mais le plus difficile c’est de ranger les affaires, parce que la personne, si vous voulez, pour ranger cinq

minutes après elle ne sait plus, il y a des choses qu’elle range et des choses qu’elle ne sait plus.

Les repères sont plus difficiles ?

Ben ça dépend oui, les repères sont plus difficiles, quoique comme ma femme bon ben elle arrive à repasser quand même.

Mais enfin bon il y a des choses qu’elle ne peut pas repasser si vous voulez comme les chemises, les pantalons, mais le petit

linge elle peut. Étendre le linge elle peut le faire aussi, c’est moi qui m’occupe de la machine à laver. Et puis bon pour fa ire les

courses, on m’a expliqué comment ça se passe, elle ne peut pas sortir toute seule je l’accompagne et on fait nos courses et

puis on range. Sinon ben elle me demande où on va et comme on se promène au bord de l’Erdre et que moi j’ai un jardin bon

ben elle me regarde travailler et quand ça lui plait ben elle se lève et elle fait ce qu’elle veut.

Donc l’ergothérapeute elle n’a pas vraiment mis en place des choses à ce niveau là ?

Ben à ce niveau là non mais si vous voulez c’est à suivre parce que bon, c’est comme dans les maisons de retraite bon ben on

c’est fait inscrire parce que bon ça prend au moins deux ans, c’est très, très long et là j’ai reçu des nouvelles justement et ils ont

dit qu’il n’y avait pas de place qu’il fallait renouveler au bout de six mois, tous les six mois à renouveler. Tant qu’on peut rester

c’est ce que je lui ai dit, tant qu’on peut rester c’est aussi bien, parce qu’autrement et puis ce n’est pas facile parce qu’il y a des

personnes qui acceptent et puis il y a des personnes, vous savez bien, c’est très dur.

Et donc tout ce coté administratif, les papiers, faire les démarches, est ce que elles vous ont aidé, l’ergothérapeute et

les ASG ?

Ah oui, ah ben oui tous les dossiers ont été faits et puis même elle m’a aidé pour les maisons de retraite. Et puis bon ben,

même, comment je veux dire moi, elles nous envoient des, si vous voulez elles organisent enfin par leur comment, où elles

travaillent et elles s’en occupent, disons qu’elles organisent des sorties pour des, comment, pour des spectacles mais bon faut

que la personne veut y aller, quand elle ne veut pas y aller, c’est ça bon ben elles nous a demandé où on allait bon ben on allait

dans les club, mais dans les clubs vous savez bien ce que c’est, c’est que moi ma femme elle n’aime pas le bruit, parce que

quand c’est le bruit qu’est trop haut ça la gêne, ça gêne au niveau cerveau quoi, alors là ben on est dans un club mais de temps

en temps on y allait manger, mais on y va de moins en moins parce que disons que le bruit fatigue quoi. Parce que bon vous ne

pouvez pas imposer aux gens de ne pas faire de bruit, c’est difficile. Ça vous savez il y en a, moi-même je parle assez fort et je

ne m’en rends pas compte alors quelque fois elle est perturbée. Ben oui alors on est obligé de se corriger.

3) Et alors sinon comment est ce que vous avez vécu l’intervention de professionnels au domicile ? Parce qu’ils sont

venu chez vous, comment est ce que vous avez vécu cette situation ?

Ben je l’ai vécu bien, parce que c’est normal je veux dire qu’il y ait des gens qui s’occupent des malades comme ça. Et puis en

plus ben on est quand même guidé quoi parce que quelque fois on ne sait pas où on va. C’est ça quoi.

Un rôle d’accompagnement ? Vous en aviez besoin ?

Vraiment oui et puis de toute façon on n’a pas le choix, parce que bon s’il n’y a personne pour guider les gens c’est bien

difficile. Et même, on ne sait pas ce que l’avenir décide. C'est-à-dire que bon ben d’ici, parce que d’ici un an c'est-à-dire que la

maladie plus ça va plus elle s’aggrave, mais enfin bon ça dépend parce que ils n’ont pas vraiment encore trouvé le médicament.

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4) Et là vu que c’est la fin de la prise en charge, quels changements vous avez constaté par rapport à avant ? Entre là

maintenant où l’intervention est terminée, l’ergothérapeute est passée et puis avant l’intervention de ces

professionnels ? Est ce que vous avez trouvé un changement entre les deux ?

Ben euh, oui parce que on en avait besoin hein. On avait besoin d’être guidé par ces gens là qui s’occupe des malades. Moi je

trouve que c’est bien pi il y a quand même des, si vous voulez, comment je dirais moi, des organismes quoi, qui s’occupe de

ces gens là, parce qu’autrement ce n’est pas facile. D’ailleurs, c’est comment c’est au CHU parce que ça fait des années que

ma femme est comme ça, le docteur traitant il m’a rappelé à l’ordre parce que bon disons que, bon ben il me dit vous ne vous

occupez pas encore des papiers, les assistantes sociales et puis tout ben j’ai dit, ben il dit « il serait peut être temps de vous en

occupez » alors bon tout d’un coup je me suis décidé et puis là ça a été quand même assez vite. Et quand même, bon ben

avant on ne savait pas trop comment faire, on laissait un petit peu aller quoi. C’est bien qu’elles soient venues. Parce

qu’autrement ce qu’on fait tous les mardis on a quand même une aide ménagère.

Qui n’était pas là avant ?

Qui n’était pas là, qui n’était pas là, enfin c'est-à-dire ça doit faire la troisième année quand même, elle vient deux heures et

demi par semaine. Ça permet, je veux dire, de faire le ménage et puis c’est tout hein parce qu’autrement le reste on s’en

occupe.

Ça permet peut être de soulager aussi toutes les choses que vous avez à faire aussi ?

Ah ben oui parce que bon ben, parce que vraiment si je m’occupais de tout ça serait de trop. Parce que déjà quand on a une

personne à s’occuper, déjà le matin bon ben faut que je m’occupe de ma femme, parce que bon ben elle a du mal à s’habiller.

Et après bon ben faut quand même qu’elle s’occupe de faire les courses et tout ça, bon c’est moi qui fais la cuisine, mais el le

m’aide aussi, mais enfin le plus gros c’est moi qui le fais. Bon ben l’après-midi on est tranquille, s’il fait beau bon ben on sort. Le

plus dur c’est l’hiver à passer quoi.

5) Et donc d’une manière générale vous avez le sentiment d’avoir été aidé quand même ?

Ah oui, oui, oui, oui, oui, ah ben oui. Ça c’est vrai que la question de ça, c’est un bien qu’elles soient passées.

Et donc est ce que vous aimeriez qu’elles repassent, elles peuvent intervenir une fois par an, est ce que vous aimeriez

qu’elles repassent l’année prochaine ? Est ce que vous en avez discuté ?

Vous savez dans une année, c'est-à-dire que, je dirais oui, mais c'est-à-dire que bon ben elles sont déjà passées cette année,

mais ce qu’il reste c’est souvent, enfin ce qu’il a derrière, comment elles procèdent les années suivantes. C'est-à-dire qu’elles

procèdent peut être sous une autre forme. Vous voyez ce que je veux dire ?

Comment ça une autre forme ?

Ben je veux dire, est ce qu’elles procèdent comme la première année ? Parce que normalement on est convoqué toujours une

fois par an au CHU et c’est par là que le début se fait. Mais bon ben quand on va là-bas c’est là qu’ils font, ceux qui s’en

occupent ils font un test sur la personne et c’est eux qui décident ce qu’il y a faire. Mais enfin bon, à moins qu’il y ait quelque

chose de nouveau, mais ça m’étonnerait.