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Le Crocodile La Gazette du Nil n° 1 Prologue- Nos ancêtres Il y eut l’époque Thinite -3000 > -2700 1 ère et 2 ème dynasties Basse Égypte et Haute Égypte deviennent 1 seul pays L’ancien Empire -2780 >v -2300 IIIème, IVème, Vème et VIème dynasties Le temps des pyramides, des obélisques, des adorateurs du soleil, le dieu Ré Une gloire sans pareil, et puis un papy gâteux Pépi 1 er qui meurt à 100 ans après un règne de 94 ans ! Une 1 ère période intermédiaire v -2300 > -2065 VII, VIII, IX et Xème dynasties Un art décadent : Henenou et sa femme, Personnages malingres, aux jambes trop longues Désordres, révolutions, c’est le bazar. Le pays est morcelé, tout décade, l’économie, les arts... ça durera 300 ans ! Puis vers -2060, l’Égypte est réunifiée. Le Moyen Empire -2065 > -1785 XI et XIIème dynasties Richesse et prospérité Commerce florissant avec la Crète du roi Minos, exploitation de l’oasis du Fayoum On vénère Sobek, le crocodile, dans la capitale du Fayoum que les Grecs appellent « Crocodilopolis » Une 2 ème période intermédiaire - 1785 > -1580 XIII, XIV, XV, XVI et XVIIème dynasties Une trentaine de roitelets de pacotille se succèdent, pendant les dynasties XIII et XIV. Cela favorise l’invasion d’un peuple violent et barbare les « Hyksôs ». Ils règneront pendant 2 siècles (XIV et XVème dynasties) et laisseront le souvenir d’une dictature d’une rare violence. Le Nouvel Empire -1580 > -1085 XVIII, XIX et XXème Ramsès II, le mégalo Des héros et des conquérants, des pharaonnes et des reines (de vraies maitresses femmes !). 11 Ramsès se succèderont avant de laisser la place à Sheshonq, le Libyen. Seul, l’art demeure florissant, autrement, tout va à vau-l’eau

Le Crocodile · 2016. 2. 1. · Le Crocodile La Gazette du Nil n° 6 Acte 4 Premier tableau Une salle du palais royal Toujours aussi amoureuse, Amnéris fait venir Radamès et le

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Le

Crocodile La Gazette du Nil

n° 1

Prologue- Nos ancêtres Il y eut

l’époque Thinite -3000 > -2700 1ère

et 2ème

dynasties

Basse Égypte et Haute Égypte deviennent 1 seul pays

L’ancien Empire -2780 >v -2300

IIIème, IVème, Vème et VIème dynasties

Le temps des pyramides, des obélisques, des adorateurs du soleil, le dieu Ré Une gloire sans pareil, et puis un papy gâteux Pépi 1er qui meurt à 100 ans après un règne de 94 ans !

Une 1ère période intermédiaire v -2300 > -2065 VII, VIII, IX et Xème dynasties

Un art décadent : Henenou et sa femme, Personnages malingres, aux jambes trop longues

Désordres, révolutions, c’est le bazar. Le pays est morcelé, tout décade, l’économie, les arts... ça durera 300 ans ! Puis vers -2060, l’Égypte est réunifiée.

Le Moyen Empire -2065 > -1785 XI et XIIème dynasties

Richesse et prospérité Commerce florissant avec la Crète du roi Minos, exploitation de l’oasis du Fayoum

On vénère Sobek, le crocodile, dans la capitale du Fayoum que les Grecs appellent « Crocodilopolis »

Une 2ème période intermédiaire - 1785 > -1580 XIII, XIV, XV, XVI et XVIIème dynasties

Une trentaine de roitelets de pacotille se succèdent, pendant les dynasties XIII et XIV. Cela favorise l’invasion d’un peuple violent et barbare les « Hyksôs ». Ils règneront pendant 2 siècles (XIV et XVème dynasties) et laisseront le souvenir d’une dictature d’une rare violence.

Le Nouvel Empire -1580 > -1085 XVIII, XIX et XXème

Ramsès II, le mégalo

Des héros et des conquérants, des pharaonnes et des reines (de vraies maitresses femmes !). 11 Ramsès se succèderont avant de laisser la place à Sheshonq, le Libyen. Seul, l’art demeure florissant, autrement, tout va à vau-l’eau

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La Basse époque -1085 > -332 XXI, XXII, XXIII, XXIV et XXVème

Des pharaons lybiens, des rois éthiopiens, se succèdent, puis c’est au tour des Assyriens de dominer le pays

Les nouveaux pharaons se font construire des pyramides, mais, ce n’est plus vraiment ça !

Il y eut, ensuite, les Perses, Alexandre le Grand et ... Cléopâtre

Cette belle chronologie date de 2015, mais tout n’était pas aussi clair en 1869. On se contentera donc de situer Aïda, à « l’époque des pharaons ». Pourquoi évoquer 1869 ? Parce que c’est à cette date que devait voir le jour l’opéra de Verdi, super production commandée par Saïd Pacha pour l’inauguration du canal de Suez. Il faudra pourtant attendre 1871 pour pouvoir l’applaudir. (À suivre dans nos prochains numéros !)

1869, date mémorable dans notre histoire ! Ferdinand de Lesseps réalise le rêve de nos pharaons. Il ouvre une porte entre la Méditerranée et la Mer Rouge en perçant et en aménageant un canal sur 164 km, permettant ainsi une circulation maritime directe entre l’Europe et l’Asie : 8 000 km en moins !

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n° 2

Prologue (suite)

Une tempête sous un crane Mariette, l’autodidacte passionné, jubile : l’Égypte qu’il aime va renaître de ses cendres, sur scène, et ce, grâce à lui ! Il désire un opéra archéologiquement « authentique ». Les noms, d’abord, Radamès si proche de Ramsès, Amnéris d’Aménardis (prénom féminin XXVème dynastie) etc. Puis, les costumes, le décor. Il dessine, retouche, compare, multiplie les accessoires, fait raser barbes et moustaches.

Après avoir gratté du sable, exploré des nécropoles, des tombes, trouvé des sphinx, des taureaux, des momies, notre archéologue serait-il lassé des fouilles? On apprend de source sûre qu’il doit participer à la rédaction du livret d’un opéra dont Verdi, le célèbre patriote dramaturge italien composera la musique. C’est sur fond de guerres incessantes entre Éthiopiens et Égyptiens, que Mariette, le librettiste égyptologue, met en scène ses personnages :

Aïda, captive en Égypte. Mais sous la tunique de l’esclave se cache une princesse éthiopienne

Radamès, le héros, chouchou de ces dames, l’ambitieux égyptien, fougueux capitaine et futur conquérant des Éthiopiens.

Ces deux là s’aiment, c’est sûr !

Amnéris jolie fille à papa, passionnée, excessive, follement amoureuse du beau capitaine. Lui, ne l’aime pas, c’est clair ! Amonastro le roi éthiopien vaincu, père d’Aïda, souhaite libérer son peuple par tous les moyens

Ramsis grand prêtre, insensible et fort de son pouvoir.

Le pharaon Égyptien

Amnéris, sa fille

Radamès, le capitaine des Égyptiens

Ramsis grand prêtre

Le roi Éthiopien Amonastro

Aïda, sa fille

De nouvelles aventures pour Mariette !!!

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n° 4

Acte 2 Premier tableau Thèbes appartement d’Amnéris

Vite, vite, le héros revient en vainqueur ! Amnéris doit se préparer pour assister au retour triomphant de Radamès. Ses esclaves dansent, l’apprêtent en chantant (Chi mai). Pour un peu, elle oublierait sa jalousie. Pourtant, la vue de la belle Aïda, sa rivale ranime sa colère. Par dépit amoureux, elle se joue d’elle, lui annonce la mort du capitaine ; Aïda se désespère. Mais, la nouvelle est fausse, Ftah soit loué ! Il est vivant ! Les masques tombent Aïda ne peut cacher sa joie et met Amnéris littéralement hors d’elle. (Amore, amore). Les trompettes que l’on entend, au loin, annoncent l’arrivée de l’armée, la querelle des deux femmes est interrompue.

Deuxième tableau grande place de Thèbes

La foule en liesse accueille le souverain, accompagné de sa fille Amnéris, d’Aïda et de Ramsis, sur fond de chants guerriers. Un frisson héroïque parcourt le public lorsque résonnent les fameuses trompettes droites "égyptiennes" à l’arrivée de Radamès. (Gloria all’Egitto, ad side). On porte le héros en triomphe. Dans sa grande clémence, Radamès demande la libération des prisonniers parmi lesquels figure Amonastro. (Grazie agli Dei...). Le roi grâcie les captifs et accorde la main de sa fille au victorieux capitaine. Amnéris triomphe, Aïda et Radamès sont effondrés, Amonastro ne pense qu’à se venger...

Les esclaves étaient instruits pour amuser le maître et sa famille. Ainsi était-on sûr de respecter les convenances et d’éviter les bouffonneries déplacées.

Les trompettes ont été inventées en Égypte il y a plus de trois mille ans. Deux furent retrouvées dans le tombeau de Toutânkhamon.

La trompette (sheneb) était essentiellement utilisée pendant les campagnes militaires, en association avec le tambour, pour rallier les soldats. Elle pouvait aussi servir lors des parades militaires et même pour le dressage des chevaux pendant les fêtes. La plupart du temps, Il fallait deux hommes pour tenir la trompette. Plutarque prétend que "le son de ces instruments ressemble au cri de l'âne".

Petits ragots de palais !

Le triomphe du séducteur

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n° 5

Acte 3 Les bords du Nil temple d’Isis

Un lieu à la mode, des rebondissements à foison On se bouscule au temple d’Isis, c’est visiblement un lieu très prisé!

On y trouve, ce soir-là :

-Amnéris qui est accompagnée de Ramfis et vient prier Isis avant de célébrer ses noces avec Radamès. -Aïda qui doit y retrouver le fringant capitaine. Elle pleure son pays natal (O cieli azzurri). Mais, c’est son père qu’elle croise (rivedrai le foreste imbalsamate). Ce fourbe lui demande de trahir son amant en lui extorquant le parcours que Radamès compte emprunter avec ses soldats. L’Égyptien doit effectivement anéantir définitivement l’armée des Éthiopiens reconstituée en hâte pour libérer son chef. Le père menace sa fille, la renie. Quel dilemme ! elle cède. C’est alors qu’arrive le prince charmant. Amonasro se cache.

Un badinage tragique - Radamès, tu ne m’aimes pas ! - Mais si Aïda, je t’aime - Alors, si tu m’aimes, dis-moi par où tu vas engager ton armée ! (Par ti riveggo mia dolce Aïda) - Par le col de Napata ! C’est dit ! Amonasro sort de sa cachette. Déshonoré, Radamès songe à fuir avec Aïda. Trop tard ! c’est au tour d’Amnéris de surgir, le Nubien cherche à la tuer, Radamès s’interpose. Surviennent alors Ramfis, les prêtres, les gardes ! Le jeune héros se rend tandis que s’enfuient Aïda et son père. (final)

Le canon égyptien Et si Mariette poussait le réalisme jusqu’à imaginer une mise en scène qui s’inspirerait du canon égyptien ? Les peinture et les reliefs montrent les épaules et l’œil des personnages de face alors que le visage et le bassin sont de profil.

Archers nubiens

Des relations de nature diverse ont longtemps existé entre ces deux contrées, parfois alliées mais aussi très très souvent ennemies.

Coups de théâtre en série!

Àchacun son pilier !

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n° 6

Acte 4 Premier tableau Une salle du palais royal

Toujours aussi amoureuse, Amnéris fait venir Radamès et le supplie de changer d’attitude. S’il se justifie, s’il renonce à Aïda, elle se fait fort d’obtenir sa grâce. (Gia i sacerdoti). Radamès refuse et préfère affronter son sort. On l’emmène dans un souterrain pour être jugé. La jeune femme, de ses appartements, " entend" le silence dédaigneux du jeune homme et le jugement terrifiant des prêtres. Il sera emmuré vivant, châtiment réservé aux traitres. Effondrée, Amnéris supplie et maudit les prêtres inflexibles. (Scène du jugement).

Deuxième tableau Sous le temple

Seul dans son souterrain, Radamès se prépare à une mort horrible. C’est alors que, près de lui, il sent une présence. C’est Aïda ! Elle l’avait rejoint pour mourir avec lui. Magnifique adieu à la vie (Morir ! si pura e bella !). Puis on entend Amnéris implorer la déesse pour qu’elle accorde la paix éternelle à "son âme adorée". Au loin, les prêtres et les prêtresses louent le dieu Fthà.

La peine de mort Heureusement assez rare. En général on coupait la tête des criminels, on jetait les femmes adultères aux crocodiles, on emmurait vivants les traitres au pays. Certains avaient une chance inouïe, ils mouraient d’une morsure de serpent. Le condamné était attaché, par terre, un cobra sur sa poitrine.

RADAMÈS Mourir! Mourir! ô toi si belle!…… Mourir! ô loi cruelle…… Quand pour toi l'existence à peine s'ouvre-t-elle! Quand l'amour doit charmer ton cœur! Dans mon malheur

Quoi! tu devrais me

suivre! Non! tu vivras… car, moi, je t'aime… tu dois vivre. AÏDA Vois! déjà l'ange de la mort a déployé son aile,

De la vie éternelle Il nous montre le port. Pour nous s'est entr'ouvert le ciel, Là, toute la douleur cesse, Là, commence l'ivresse De l'amour éternel!

QUEL PANACHE !!!

MOURIR D’AMOUR

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n° 7

ÉPILOGUE

Au départ, il a beaucoup trainé les pieds. Écrire un hymne pour l’inauguration du canal de Suez ? Pas question ! Pas plus qu’un opéra d’ailleurs, même si c’est le khédive lui-même qui lui en fait la demande. Soucieux de sa gloire, Ismaïl Pacha rêve de fêtes grandioses qui associeraient l’ouverture d’un nouvel opéra à celle du canal. Non, décidément, ces fastes ne l’intéressent pas, il a 57 ans et tient à sa tranquillité. Mais, finalement, une ébauche que Mariette lui propose retient son attention. L’antiquité égyptienne est à la mode, le passé historique, c’est romantique et les émois de ces jeunes gens sont bien touchants. Tout compte fait, enthousiaste, Giuseppe se met à l’ouvrage !

Secondé par l’archéologue, le compositeur s’implique, cherche à respecter le plus possible une vérité historique, celle de l’époque des grands pharaons, soit à peu

près 10 siècles ! Le livret, pourtant, semble un peu fantaisiste dans ses repères chronologiques, notamment quand il situe l’action dans le temple de Vulcain dont le nom latin doit étrangement résonner aux oreilles d’Hatshepsout, Toutânkhamon et autre Ramsès.

Mais qu’importe ! Verdi retrouve la fougue de ses engagements ; libertaire, défenseur de l’opprimé, il met en scène une esclave éthiopienne et un général égyptien. Leur liberté d’aimer est entravée par le conflit qui oppose leur pays respectif.

L’Égyptomanie

Après l’expédition de Bonaparte l’Europe entière est atteinte d’égyptomania. Les bureaux, les fauteuils, les lampadaires, la vaisselle, tout est "retour d’Égypte".

En 1861 notre Mariette, infatigable, creuse, fouille, met au grand jour.

Le public, fasciné, se précipite sur les lieux des découvertes.

Khédive

Titre équivalant à celui de vice-roi, conféré par le sultan Abdülaziz au pacha d'Égypte Ismail (1867), et comportant des prérogatives de souveraineté.

Et Verdi ?

Qu’allait-il faire dans cette felouque ?

!

!

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Mariette s’occupe des costumes et des décors avec passion. Il descend dans la tombe de Ramsès III pour faire quelques croquis de costumes qu’il exploitera notamment dans la scène du triomphe. Quant au décor, il reproduit avec exactitude les monuments comme l’intérieur du temple d’Isis à Philae (Acte III). Le public invité à la première est ébloui par l’exotisme fastueux d’un passé ressuscité. L’archéologue, étourdi par l’ampleur du projet, ne recule devant aucune somptuosité.

La musique de Verdi passe au second plan.

Pourtant, il ne faudrait pas s’y tromper. Cet opéra est loin d’être une œuvre Hollywoodienne et il ne suffit pas de mettre sur scène des centaines de figurants, des beaux costumes voire des éléphants pour réussir. Aïda est d’abord une œuvre intimiste aux nombreuses scènes où évoluent deux ou trois personnages. Le secret de la réussite tient dans le fragile équilibre entre

héroïsme et poésie, dramatisme et lyrisme, volume et maîtrise. Dès l’ouverture, Radamès chante son ambition, son amour pour Aïda et son attitude devant l’attachement de l’esclave pour son pays. Trois musiques différentes, contrastées, pour poser l’action. Le caractère d’Aïda est dépeint par une progression qui mène l’héroïne au désespoir. Non, elle ne pourra choisir entre son amant et son père. Quant à Amnéris, c’est sans doute le personnage clé de l’œuvre. Personnalité hors du commun, elle exprime avec la même intensité l’amour malheureux, l’amitié bafouée, la violence de la vengeance, le désespoir et le remords.

Véritable construction architecturale, l’œuvre n’a pas besoin d’un stade pour se

donner. Même au Caire, à sa création, la salle ne contenait pas 1200 places alors qu’on s’échine bien souvent à mettre en scène devant des milliers de personnes, un chant parfois murmuré.

L’espace est suggéré par l’émotion. Émotion du public à l’écoute de passages magnifiques, mais aussi celle du compositeur lui-même, sceptique dorénavant devant ce qu’il a défendu si longtemps ; la patrie, ici, est une mère indigne qui détruit ses enfants.

L’inauguration du canal sans Verdi

Le 17 novembre 1869 l’impératrice Eugénie, l’empereur d’Autriche, le Prince de Galles, le kronprinz de Prusse inaugurent en grandes pompes ces cent soixante-quatre kilomètres de voies d’eau, mais sans Aïda, le nouvel opéra du Caire n’est pas prêt. La construction a pris du retard. Il faudra attendre le 24 décembre 1871. En effet, entre temps, la guerre France-Allemagne, le siège de Paris, la Commune bloquent les décors et les costumes réalisés à Paris.

Un succès splendidissime

S’écrie un journaliste enthousiaste à la fin de la représentation. C’est un énorme succès que ne verra pas le compositeur. Car Verdi boude, furieux de constater que le public n’est composé que de politiciens, de bourgeois et de critiques, il décide de boycotter la soirée, il n’ira pas. Il attendra quelques mois pour donner cet opéra devant des mélomanes, à la Scala de Milan. Cette fois, il entendra les louanges d’un public qui le gratifiera de trente-deux rappels.

Une passion romantique sur fond de faste exotique. C’est sans doute le secret d’une réussite. Aïda est surement l’ouvrage le plus populaire de Verdi, le plus joué dans tous les festivals du monde entier. La fascination pour cette œuvre ne se dément pas au fil du temps.

opéra archéologique !

Une œuvre méconnue ?

Un opéra archéologique