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Henri Lechat Les fouilles de l'Acropole In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 12, 1888. pp. 430-440. Citer ce document / Cite this document : Lechat Henri. Les fouilles de l'Acropole. In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 12, 1888. pp. 430-440. doi : 10.3406/bch.1888.3966 http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bch_0007-4217_1888_num_12_1_3966

Lechat, H. Les Fouilles de l'Acropole

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Sobre les fouilles de l'Acropole

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Henri Lechat

Les fouilles de l'AcropoleIn: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 12, 1888. pp. 430-440.

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Lechat Henri. Les fouilles de l'Acropole. In: Bulletin de correspondance hellénique. Volume 12, 1888. pp. 430-440.

doi : 10.3406/bch.1888.3966

http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/bch_0007-4217_1888_num_12_1_3966

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pied posé sur une proue; sans doute une figure de Victoire et une allusion aux victoires navales qui avaient amené la fondation de Pompéiopolis.

G. DOUBLET.

LES FOUILLES DE L'ACROPOLE

On voit au Musée de l'Acropole, depuis 1882, quelques débris très mutilés d'un fronton en tuf, qui représentait le combat d'Hercule contre Triton (1). On y pourra voir bientôt un second exemplaire, — plus grand, plus beau, et peut-être (il faut l'espérer) moins endommagé, — de la même représentation. J'ai signalé dans mes précédents comptes-rendus (2) plusieurs fragments, découverts pendant ces derniers mois, qui paraissaient appartenir à un groupe d'Hercule et Triton. Bien que les fouilles prochaines doivent, selon toute probabilité, accroître encore le nombre des morceaux de cette provenance, M. Cavvadias a pensé que l'on pouvait dès à présent commencer le travail de rajustage et de restauration. La tentative a bien réussi: des parties considérables du groupe ont retrouvé leur place naturelle, et l'on peut déjà se faire une idée de l'ensemble. Le sujet semble avoir été conçu comme dans le fronton de 1882; seulement, les personnages sont disposés dans l'autre sens, c'est à dire qu'Hercule et Triton, au lieu de présenter au spectateur le flanc gauche, lui présenteraient ici le flanc droit. Mais, dans l'œuvre récente comme dans l'autre, il faut toujours qu'Hercule se baisse pour atteindre le corps demi-rampant de Triton, et qu'il pose un genou à terre

(1) Cf. Purgold, '%>. ΆρχαωΛ., 1885, p. 242; pi. VII, fig- 5, de l'année 4884; — P. J. Meier, Mittheil. Athen, 1885, p. 327; — F. Studniczka, ibid, 1886, p. 61, pi II.

(2) Voy plus hatii-, p. 240 et 333.

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afin d'avoir dans le combat un solide point d'appui. — Le

nouveau groupe, tel qu'il vient d'être rajusté, est, à cette heure, fort loin d'être complet. La partie supérieure du corps d'Hercule manque jusqu'au nombril; la jambe gauche aussi est absente, sauf une petite partie de la cuisse; — cela suffit, il est vrai, pour indiquer la position de la jambe: le pied devait avoir sur le sol une ferme assiette, le genou était fortement ployé, et la face antérieure de la cuisse se trouvait appliquée contre le ventre penché en avant. La jambe droite est en entier conservée; elle attenait au sol par le genou et par l'extrémité du pied. Ces différentes parties sont nues; elles étaient enduites d'une couleur rouge pâle, presque rose, très effacée aujourd'hui, mais dont il y a encore des traces; on avait imité par là, tant bien que mal, le ton habituel de la chair. — Au flanc gauche d'Hercule est accolé le corps de serpent qui, d'après la fable, remplaçait pour Triton les membres inférieurs et prolongeait son torse, lequel était un torse d'homme. Dans le fronton de 1882, le torse est intact, c'est la partie en forme de serpent qui subsiste le moins; ici, au contraire, le torse manque, mais on a de nombreux morceaux du serpent, et considérables (les plus gros ont un diamètre de 0,40), et, pour les couleurs, d'une fort belle conservation. Les écailles, larges, forment des bandes juxtaposées qui se développent dans le sens de la longueur du corps; ces bandes sont alternativement rouges et bleues. Il est à noter que les couleurs ont été mises là seulement où le spectateur pouvait les voir; sur la face postérieure, où l'œil ne pouvait pas atteindre, les couleurs cessent; même on n'observe plus ces étroits rubans en relief qui séparent l'une de l'autre les écailles de chaque bande et les diverses bandes d'écaillés. Cependant le modelé continue encore, puis il est lui-même interrompu, et l'on ne trouve plus qu'une masse non dégrossie, violemment cassée par endroits: c'est le bloc même, ou du moins ce qui reste du bloc de tuf où l'œuvre a été sculptée.

Le corps de Triton se détachait donc en haut-relief, et celui d'Hercule était presque partout en ronde-bosse. Les propos

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tions sont un peu plus grandes que nature, surtout quand on considère la grosseur des membres. Le mollet droit. d'Hercule, par exemple, est énorme avec ses veines en saillie, pareilles à des cordes, et les méplats des muscles beaucoup trop accusés, comme taillés à facettes. Le travail ne semble pas terminé; il resterait à arrondir ce modelé trop sommaire. C'est un procédé connu de l'art archaïque d'exagérer, dans un corps déjà un peu court et ramassé, les saillies musculaires; mais particulièrement dans les représentations d'Hercule, l'artiste a quelquefois, de parti pris, afin de rendre plus sensible aux yeux la force du héros, augmenté la grosseur des jambes et des bras au-delà de ce qu'autorisait la nature: l'ensemble est lourd, trapu, inélégant. C'est l'impression, je crois, qu'on ressentira devant le nouveau groupe d'Hercule et Triton, quand la restauration en sera plus complète (1).

En dehors des questions artistiques qu'elle amène, cette découverte prouve une fois encore l'existence sur l'Acropole d'Athènes, avant les guerres Médiques, d'un culte d'Hercule très florissant; toute trace en avait disparu au Vine siècle; c'est par ces vieilles sculptures en morceaux qu'on le constate aujourd'hui. Car il n'est guère vraisemblable qu'elles aient servi à décorer un temple ou un téménos, dont la divinité n'eût pas été Hercule. Et, d'autre part, si elles étaient toutes consacrées à Hercule, cela jette un jour inattendu sur l'ancienne religion de l'Etat athénien; elles sont justement les plus archaïques que l'on ait retrouvées, — et la série commencée s'augmentera peut-être bientôt de quelques œuvres analogues. Voici déjà deux représentations de la lutte avec Triton; un fronton entier (2) est consacré au combat contre l'Hydre, — et des fouilles récentes sont sortis plusieurs morceaux de serpent, jusqu'à

(1) Quant aux deux têtes en tuf, précédemment trouvées (v. plus haut, p. 333), comme leurs proportions concordent bien avec celles du groupe entier, il devient tout à fait probable qu'elles appartiennent aux deux combattants. Il est à désirer qu'on retrouve assez de fragments de la partie supérieure de l'un et de l'autre corps pour qu'on puisse à la fin rajuster ces têtes, et savoir le mouvement exact que l'artiste grec leur avait donné.

(2) Purgold; %. ΆρχαιοΛ., 1884, p. 147 et pi. Vil; 1885, p. 233.

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ce jour inexpliqués, qui pourraient fort bien appartenir à une nouvelle Hydre. Puis l'on rappellerait l'exploit d'Hercule à îSémée pour rendre compte de ce lion dont on a d'importants débris: d'abord, de nombreux morceaux d'une crinière peinte en rouge et par places en bleu; ensuite, deux pattes avec des griffes énormes où les poils sont marqués en noir; — en dernier lieu, une tête ou plutôt un fragment fort mutilé de la tête, le quart environ; les dimensions en sont colossales; pour en donner ridée, l'œil droit, qui est conservé, mesure en longueur onze centimètres et demi, en hauteur huit centimètres. Une petite partie de la crinière est encore attenante, avec des restes de peinture rouge et bleue, mais le rouge domine. L'iris de l'œil est rouge, la pupille, très dilatée, est noire. Cet œil gigantesque, enfoncé derrière la saillie — véritable monticule — que fait l'os de îa mâchoire, regarde fixement, grand ouvert.

Parmi les autres restes de sculpture en tuf, il n'y a plus guère à citer qu'une tête d'homme plus petite que nature

(Haut. 0,12 environ), bien conservée, sauf le côté droit delà chevelure et le nez; elle était fixée sur le corps dont elle faisait partie, au moyen d'une tige de plomb enfoncée verticalement dans le cou. Les yeux sont en amande et relevés vers les tempes. Les cheveux, divisés sur le front par une raie centrale, sont rejetés derrière la tête en une quantité de fines boucles annelées, et sont coupés net sur la nuque; un cordon les resserre, allant d'une oreille à l'autre. La barbe est rasée autour de la bouche; simplement massée sur les joues et le menton, elle est divisée par quelques raies obliques, peintes on noir. Les sourcils, le tour des paupières et l'iris des yeux également sont noirs; toute autre couleur a disparu. Le dessin de îa bouche est délicat; au reste, cette petite tête, en dépit des procédés un peu sommaires dont a usé l'artiste, garde dans l'ensemble un certain mérite artistique.

Les objets en marbre sont toujours les moins nombreux parmi les découvertes de l'Acropole; en revanche, les plus récemment trouvés sont d'une qualité rare et méritent une description détaillée.

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Tout d'abord, une tête d'homme, plus petite que nature, imberbe, — d'une conservation parfaite: à peine faut-il mentionner une légère égratignure sur le nez. A la place des yeux s'ouvrent deux profondes cavités, vides, qui étaient autrefois remplies par une matière vitreuse ou quelque métal colorié afin de donner l'illusion de l'œil vivant. Le menton est fort, les lèvres serrées, le nez fin; les oreilles, petites, élégantes, ont été creusées et fouillées avec soin. Mais le travail le plus curieux est celui des cheveux: la tête est entourée d'un cercle rigide, — sans doute en métal dans la réalité, — qui pose sur le haut du front et s'abaisse par derrière presque jusqu'à la nuque; les cheveux sur la tête sont simplement peignés, avec de molles ondulations; mais, arrivés au cercle de métal, ils se divisent en boucles nombreuses qui s'enroulent autour de ce cercle, passent dessus, repassent dessous, le faisant pareil à une épaisse couronne, et leurs extrémités sur les tempes et la nuque, — non pas sur le front qui reste dégagé, — se plaquent en mèches courtes, en petits frisons très fins, ciselés avec une délicatesse un peu sèche qui rappelle le travail du bronze. Aucune trace de couleur, sauf une petite tache rouge sur les cheveux par derrière; encore je la crois accidentelle. La figure est pour ainsi dire sans expression, ce qui tient peut-être à l'absence des yeux. Mais l'art n'en est pas moins excellent, l'exécution très poussée, presque raffinée; c'est une œuvre intéressante, probablement des premières années du Vme siècle, qui conserve une saveur — mais très légère — d'archaïsme dans ce menton un peu lourd, dans cet arrangement bizarre et savant de la chevelure.

. A peine cette tête avait-elle été découverte, qu'on se mit à chercher dans le Musée quelque torse décapité à qui elle pût convenir. Or, en 1866, on avait trouvé tout près du Parthenon un très beau torse d'adolescent, auquel M. Furtwaengler avait rajouté plus tard une tête trouvée la même année, au même endroit. (On verra la reproduction photographique, face et profil, de la statue ainsi restaurée dans le Vme volume des

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Mi'ttheilungen, planche I) (1). Il parut, en y regardant de près, que le torse d'autrefois s'ajusterait mieux à la tête d'aujourd'hui; on en détacha vivement l'autre, celle qu'on lui avait attribuée depuis 1878, sur la foi de M. Furtwaengler, et on mit à la place la tête nouvelle. — La substitution a été un peu précipitée; il y a quelques raisons de craindre qu'on n'ait ensuite à la regretter.

En premier lieu, l'ancienne tête convenait fort bien; elle était, par son expression particulière, en parfaite harmonie avec l'expression générale du corps. Cette fierté jeune, cet air de crânerie tranquille que le sculpteur a voulu mettre dans le corps vigoureux de son éphèbe, et que fait nettement sentir l'attitude delà jambe droite portée en avant, — se retrouvent dans la tète franchement levée, au regard calme, à la bouche un peu dédaigneuse. Que lui reprochait-on? D'être trop grosse, et portée sur un cou trop long. De ces deux défauts, l'un, comme on va voir, était nécessaire, — et l'on pouvait remédier à l'autre. Tout récemment, un sculpteur français (2), qui était de passage à Athènes, fut mis en présence de la statue et invité à donner son avis sur la restauration de M. Furtwaengler, (il n'était pas question de la tête nouvelle qui n'était pas encore découverte). La réponse fut à peu près ceci: «La tête est, en effet, trop grosse, mais il ne faut pas s'en étonner: la statue représente un enfant de 15 à 16 ans, or, chez l'adolescent, la tête est un peu disproportionnée comme grosseur. — Le cou est trop long, il est indispensable de le raccourcir; il suffira, pour cela, de diminuer d'un demi- centimètre la couche de plâtre qu'on a interposée entre la nuque et les épaules.» — Ainsi, un homme du métier, averti, n'avait été nullement choqué de voir cette tête sur ce torse; il ne trouvait à relever qu'un léger défaut qui était le fait5non du sculpteur ancien, mais du restaurateur, et que l'on aurait pu, du reste, en quelques minutes faire disparaître.:

Voyons maintenant la nouvelle tête. On reprochait à l'autre

il) Article de M. Furtwaengler, même volume, page 20. {2} M, Raoul Verlet, prix du Salon de 1887,

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d'être trop- grosse; celle-ci esf, irop petite. La statue, tout à l'heure, avait le cou trop long; à présent elle est plutôt engoncée. — La tête ancienne est, sans aucun doute, d'un adolescent; avec ou sans le torse, elle garde un caractère juvénile auquel on ne peut se tromper. L'autre, malgré ses dimensions réduites, est plus virile, plus mûre; elle conviendrait mieux à un adulte. — Elle a, d'autre part, conservé visiblement un reste d'archaïsme, que l'examen du torse ne révèle pas; en sorte qu'elle paraît être d'un art un peu plus ancien que le reste du corps, d'un art moins libre, plus attaché aux minuties du travail. — Aussi cette parfaite harmonie qui existait auparavant entre le corps et la tête, s'est-elle évanouie; l'unité d'expression que l'on avait tout à l'heure, on ne la sent plus. Même, l'attitude significative du corps se trouve à présent comme contrariée, et ne dit plus à l'esprit ce qu'elle doit lui dire. — Enfin, il semble bien que les muscles de la région antérieure du cou ne se prolongent pas au-delà de la cassure selon la ligne régulière qu'ils devraient suivre. Cette observation, si elle était vérifiée, couperait court à tout débat, — mais ces muscles sont si faiblement indiqués que l'on ne peut risquer à ce sujet une affirmation trop nette; je n'y insiste pas. — En. tout cas, cette dernière raison mise à part, il en subsiste assez d'autrea pour ne p'is donner si vite la préférence à la tête nouvelle sur l'ancienne. Il n'est pas impossible, à la rigueur, que la véritable tête de ce torse d'é- phèbe soit encore à trouver; mais entre les deux qui sont en présence, celle que M. Furtwaengier croyait être la bonne autrefois nous semble être restée même aujourd'hui la meilleure.

Une autre sculpture en marbre, qui est au Musée depuis plusieurs années, se trouve en partie complétée — cette fois sans contestation — par quelques fragments découverts le mois dernier. Je veux parler* de la grande figure d'Athèna que M. Studniczka [Mittheilungen,. 1886, p. 185, avec planche insérée dans le texte à la p. 187) a reconnue comme devant être le personnage central d'un fronton. Un de ces morceaux, mutilé, presque informe, appartenait à l'épaule droite; il vient

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d'être rajusté, un autre, très bien conservé, comprend le pied droit et la jambe jusqu'au genou; les proportions sont un peu plus grandes que nature. Le pied est nu, ;-ur la jambe flotte une draperie; le mouvement de cette draperie, 'a pose de la jambe·, la conlraction des orteils indiquent que la déesse était représentée dans une marche rapide, presque violente. Ce fragment fournît donc une preuve de plus en faveur des hypothèses de M. Studniczka.

Entre !e Musée st le mur d« Ci mon, on a. découvert une statue en marbre blanc qui représente une Victoire ailée et courant; la tête manque et aussi les pieds, l'avant-bras droit et le bras gauche tout en Mer. La hauteur en l'état est de 0,75 environ; ce qui reste est cassé en deux morceaux par le milieu fi). —La Victoire est figurée suivant le procédé habituel aux figures archaïques de cette sorte, le huste de face et les jambes de, profil. Le bras gauche était étendu en avant, le droit pendait le Ion μ; du corps. Derrière les épaules jont attachées deux ailes qui étaient évidemment éployées, mais toute la partie qui débordait a été brisée et a disparu. La chevelure descendait en nappe sur le dos et remplissait l'espace laissé libre entre les ailes et la nuque; elle était pointe en rouge. Le vêtement so compose d'une tunique collante avec des manches courtes qui couvrent ie haut du bras, puis d'un manteau tombant à larges plis réguliers comme dans h plupart des s Salues archaïques, ί' ν a des restes de couleur bleue sur la bordure du manteau el L· quelques autres endroits. Le bas

des jambes et ias pîed&, qui manquent, étaient faits de deux, ou trois :noi'::-i:iu\ r^nparté.i, le tout assujetti par une grosse barre de plomb qui subsisi-.i encore, enfoncée dans la statue verticalement jusqu-.'is environ à la hauteur des genoux. — Cette tvatue a ρ par tien!: à la période d j fa:it archaïque, mais d'un archaïsme déjà mitigé; ie modelé un bras droit est bon, le travail des draper:^ simple et aisé. —Je rappelle que l'on avait précédemment découvert sur l'Acropole une autre statue

(t) ,U:i fragment i.ssez considérable} de i'épaulo gauche se trouvait depuis iorigierup» dans ies viiriues du Musée; ii se rajuste à :>a place exactement-

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en marbre de Victoire ailée (1); celle-là était de dimensions plus grandes, et, d'ailleurs, d'un caractère artistique assez différent.

Enfin l'on a trouvé, il y a quelques jours, un fragment considérable d'une statue de femme; brisé au cou et aux genoux, le morceau mesure en l'état de 0,45 à 0,50 de hauteur; la statue était donc beaucoup plus petite que nature. Une tète, — encore inédite, je crois, — provenant de fouilles anciennes, s'adapte exactement à la cassure du cou et appartient, sans aucun doute, à la statue. Il ne manque plus, à présent, que le bas des jambes, l'avant-bras droit qui était rapporté, suivant l'habitude, et une partie du bras gauche. La sculpture, de style archaïque, d'exécution soignée, n'offre aucune particularité notable· Les détails et l'arrangement du costume sont les mêmes que dans la plupart des statues archaïques d'Athènes et de Délos; il y a d'abord la longue tunique serrée, dont la main gauche ramène les plis sur la face externe de la cuisse, de façon que l'étoffe colle sur les jambes; puis la courte chemisette, souple et crêpée, qui ne descend guère plus bas que la poitrine, et qu'on n'aperçoit, d'ailleurs, que sur l'épaule et le sein gauches, laissés à découvert par le troisième vêtement, le manteau, qui entoure le corps de ses grands plis réguliers. — Mais toutes ces pièces du costume sont peintes diversement, et le principal intérêt de la nouvelle statue vient de l'admirable conservation de ces couleurs. La tunique de dessous présente sur le devant une large bande rouge qui devrait tomber droit et au milieu, mais que le geste de la main gauche ramène en courbe sur le côté. La chemisette est peinte d'un vert foncé (2) que met en valeur une bordure rouge sur le cou ; la ligne des crevés, sur les manches, se détache entre deux bandes coloriées: à droite, les crevés et les agrafes qui les séparent, ressortent en rouge vif entre deux bandes vertes, tandis qu'à gauche ils ont été peints en vert entre deux bandes rouges. Lu manteau est orné d'une belle

il) Mittheil. Athen, XI, p. 372, pi. XI, fig. C. (2) On observe quelques traces de bleu sous le sein gauche, en sorie que

la teinte verte actuelle peut n'être qu'une altération, causée par le temps et l'humidité, de la couleur bleue primitive.

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bordure ronge qui passe et repasse, se dérobe et reparaît, suivant les sinuosités des plis nombreux (1). Il faut noter que les couleurs de ces bordures et de ces bandes sont elles-mêmes variées par des méandres et des grecques d'un dessin très-fin, qui courent tout le long, dans un enchevêtrement gracieux. Enfin, le manteau et la tunique sont, de plus, constellés de petits ornements qui font sur l'étoffe de jolies taches rouges, et vertes, entre lesquelles sont semées encore de minus cules croix rouges. Les mêmes ornements, peints des mêmes couleurs, se retrouvent sur le diadème qui entoure les cheveux, et sur les rondelles massives qui couvrent le lobe de l'oreille. — L'artiste qui a choisi ces couleurs, très vives, très riches de ton, les a pourtant disposées avec une exquise sobriété; ce n'est guère que sur les bordures des vêtements qu'on les trouve, visiblement comme accessoires, pour amortir la dureté du marbre, sans nuire aux lignes de la statue. L'effet en est des plus heureux, l'œil est doucement réjoui de ces teintes si belles qui semblent donner à la matière une souplesse vivante. — Aussi cette statue peut-elle être considérée comme un des plus curieux documents que l'on possède jusqu'à ce jour pour l'étude de la sculpture polychrome.

Dans la série des petits bronzes, je signale les suivants : — un homme nu, peut-être un cavalier; manquent les deux pieds, le bras gauche et la main droite; les jambes sont écartées, et piiées comme pour s'asseoir; les deux bras étaient tendus en avant, mais celui de gauche a été cassé et celui de droite, qui subsiste, a été tordu, peut-être par le feu, de telle sorte que le coude est tourné vers la poitrine. Le travail est excellent et prouve un art très avancé; malgré les dimensions exiguës (Haut. 0ra, 12 environ), l'exactitude anatomique a été cherchée avec soin, et atteinte; — une Athèna debout (Haut. 0m,15 environ); manquent la tête, le bras gauche et l'avant- bras droit; elle est vêtue d'une longue tunique qui tombe devant la jambe gauche à plis verticaux et parallèles, sembla-

il) II n'y a de peinte que la partie antérieure de la statue, ce qui n'a rien d'étonnant, puisque la chevelure et le manteau, par derrière, sont simplement massés, sans l'indication d'aucun détail.

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blés aux cannelures d'une colonne, tandis que la jambe droite .fléchit un pen en avant: c'est la pose bien connue des Caryatides de l'Ereehlheion; un ampéchonion recouvre la tunique depuis les épaules jusqu'à la ceinture, et par-dessus est placée l'égide, très couru? par devant, mais par derrière descendant jusques au niveau des cuisses; les cheveux, 1res longs, s'épandent sur le dos. Cette statuette, malgré ses mutilations, est une des pins belles de la série déjà nombreuse des figures en bronze d'Athèna; — un Crnîanre barbu, du type le plus ancien, c'est à dire que les jambes de devant sont des jambes d'homme; ii porte sur l'épaule une hache (?); il est tout petit (quelques centimètres en longueur), mais d'un joli mouvement; — un œil humain, plus grand que natnrp, destiné sans doute à être incrusté dans quelque tête en marbre; la rangée supérieure des cils est découpée, à la façon d'un peigne, dans une feuille mince en saillie.

En même temps que les fouilles se poursuivent le long du Parthenon, on s'occupe de démolir les maçonneries de toute espèce que les Vénitiens, les Turcs et même les Grecs — les modernes — ont entassées devant l'entrée de l'Acropole. On a commencé par le bastion d'Odyssée, qui se trouve au-dessous des Propylées. Construit en 1822 pendant la guerre de l'Indépendance par le chef des Grecs, Odyssée, ce bastion avait pour objet de protéger les abords de la fontaine Clepsydre, dont l'eau éiait nécessaire aux assiégés. — On s'est attaqué aussi aux deux tours carrées qui flanquent la «porte de Beu- lé»; ces tours avaient été surélevées au moyen-âge, et même renforcées sur les côtés extérieurs par un mur de plus d'un mètre d'épaisseur. On fera disparaître ces adjonctions postérieures, afin que les deux tours qui sont d'assez basse époque, il est vrai, mais néanmoins de construction hellénique, reparaissent au jour. — Enfin, le long mur bas, percé de meurtrières, qui allait de l'entrée actuelle de l'Acropole jusqu'à l'Odéon d'Hérode, vient d'être rasé. — On a trouvé dans ces différentes démolitions quelques textes épigraphiques.

HENRI LECHAT 7 juillet