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GRAND ANGLE
c e s p r oj e t s s c i e n t i f i q u e s
r é u n i s a u t o u r d u c i r e v e
• 3-5|Laréalitévirtuelle:
«unerévolutionméthodologique»
• 6-7|Laréalitévirtuellefaitrenaître
lesautomatesdel’Antiquité
• 8|Développerune
«culturedurisqueinondation»
• 9-10|Réalitévirtuelle&recherchemédicale
• 11|Cancer:quandlamémoireflanche
ZOOM SUR
f ê t e d e l a s c i e n c e 2 0 1 9
• 12|Voyageraucœurdelamatière
• 13|Dessynonymesparmilliers
• 14-15|Monnaies&Trésors:
danslescoulissesduservicedenumismatique
REGARD SUR L’ACTU • 16|Quandlapsychologiesociale
accompagneletridesdéchets
– unir & innover –
n °10
décembre 2019
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L’université de Caen Normandie a fait le pari de la réalité virtuelle dès 2006. C’est cette année-là qu’est né le CIREVE, avec une mission : faire de la réalité virtuelle un outil au service de la recherche scientifique. Parce qu’elle permet une plongée dans un monde artificiel reconstitué numériquement, la réalité virtuelle offre de nouvelles perspectives d’expérimentations.
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jet
s s
cie
ntifiques réunis autou
r d
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ire
ve
Dirigé par Éric Leroy du Cardonnoy et rattaché historiquement à l’UFR Humanités & sciences sociales, ce plateau technique fédère aujourd’hui 10 unités de recherche de toutes disciplines. Ce dossier spécial présente quelques projets de recherche réunis actuellement autour du CIREVE — qui dispose de ressources et d’équipements sans équivalent en milieu universitaire.
i n s ta g r a m | @ u n i c a e n . r e c h e r c h e
3
l e j o u r n a l d e l a r e c h e r c h e u n i c a e n
la réalité virtuelle
— une révolution méthodologique
Le CIREVE dispose d’équipements de pointe dédiés à la recherche pour tester des hypothèses, mettre en valeur un patrimoine disparu, expérimenter des situations, simuler des processus… On comprend l’intérêt de la réalité virtuelle pour les chercheurs de toutes disciplines ! Le Centre, dont l’origine est intimement liée à l’histoire de l’université, n’en finit pas d’innover.
LE pARi
DE LA RéALiTé viRTUELLE
Toutcommenceaveclamaquetteenplâtredela
Romeantique,exposéeaucœurdelaMaisondela
rechercheenscienceshumaines.Cettemaquette,
c’estcelledel’architectenormandPaulBigot.Réa-
liséentre1901et1911,le«PlandeRome»traduit
l’ensembledesconnaissancesdisponiblesalorssurla
topographieetl’urbanismedelaRomeduIVesiècle
aprèsJ.-C.PaulBigotlalègueàsonélève,Henry
Bernard,l’architecteenchargedelareconstruction
del’universitédeCaenaprèslaSecondeGuerremon-
diale.Celui-cienferalui-mêmedonàl’universitéen
avril1958,quelquesmoisaprèssoninauguration.
Classéeàl’inventairedesMonumentshisto-
riques,cettemaquettede70m²faitl’objetd’une
restaurationetd’unemiseenvaleuraudébutde
années1990,ouvrantdenouvellesperspectives.
Uneidéeémergeeneffetàcetteépoqueauseinde
l’équipederecherche«PlandeRome»,aujourd’hui
intégréeaulaboratoireERLIS:etsil’oncréaitune
maquettevirtuelledelavilledeRomeauIVesiècle
aprèsJ.-C.?Encomplémentdelamaquetteenplâtre,
quiprésentel’étatdesconnaissancesaumomentde
saréalisation,lamaquettevirtuellepermettraitde
rendrecomptedel’architecturedeRomeaugrédes
nouvellesdécouvertesarchéologiques,historiques
eticonographiques.Depuis1994,datedestoutes
premièresmodélisations,lemodèlevirtueln’acessé
d’évoluer.Auseindel’environnementvirtuel,levisi-
teurpeutainsisepromenersurleforumdeTrajan,
entrerdanslePanthéonpouradmirersacoupole,
flânerdans lesrueset lesboutiques,découvrir
unedomustraditionnelle,prendreunbaindansles
thermesdeCaracalla,traverserleTibresurlepont
Fabriciusouencores’installerdanslesgradinsdu
Colisée.Etcesurdifférentssupportsmultimédias
—salleimmersive,tablette,ordinateur,smartphone.
Lemodèlevirtuelestenconstantdéveloppement,
auplusprèsdesdernièresavancéesscientifiques.
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ntifiques réunis autou
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cireve
Centre interdisciplinaire
de réalité virtuelle
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RESTiTUER UN
pATRiMOiNE DiSpARU
«Laréalitévirtuellen’estpasseulementunoutil
dereprésentation»,indiquePhilippeFleury,res-
ponsablescientifiqueduprojet«PlandeRome»au
seindulaboratoireERLIS.«C’estunvéritableoutil
d’expérimentationquinouspermetd’interpréter
lessourcesdocumentairesànotredisposition».
Cesmodélisationssontlefruitd’unedémarche
scientifique: lessourcesdocumentairesquiont
justifié leschoixde la restitutionvirtuellesont
accessibles d’un simple clic. «Les réalisations
s’appuienttoutessuruntravailpréalabled’analyse
dessources,poursuitPhilippeFleury.Ilasouvent
falluprivilégierunehypothèsederestitutionparmi
d’autres,parfoisauprixdelongueshésitations.La
maquettevirtuelleestunformidableterraind’ex-
périencepourtesteretvisualiserceshypothèses.
C’estunevéritablerévolutionméthodologique,
quitrouveunéchofavorableauprèsdelacommu-
nautéscientifique.»
Preuvedecetintérêtgrandissant,l’univer-
sitédeCaenNormandieaaccueillilesprincipaux
spécialistesdelaRomeantiqueles11,12&13
décembre2019pouréchangersurlesquestions
detopographieetd’urbanismedelaRomeantique.
«Nousavonsréuniàcetteoccasiondeuxspécialistes
quidéfendentdeuxthèsescontradictoires,validées
parleursrecherchesarchéologiquesethistoriques.
IlsontdemandéauCIREVEdemodéliserchacunede
leurshypothèsespourqu’ellespuissentêtrepré-
sentéesetdiscutéeslorsducolloqueinternational.
L'objectifdecetteexpérienceétaitd'yvoirplusclair
pourparveniràfairepencherlabalancepourl’une
oul’autredecesinterprétations.»
FAiRE vivRE
LES TExTES ANCiENS
L’ambitionduprojetestscientifiquemaisaussi
pédagogique:lamaquettevirtuelle,avecsadocu-
mentation indexée,estune ressourcepour les
enseignantsde latinetdegrecancien.Plusde
2000élèvesontétéaccueillisauCIREVEaucours
del’année2018–2019pourunevisiteinteractivede
laRomeantiquecroiséeavecuneprésentationdela
maquetteenplâtredePaulBigot.L’équipe«Plande
Rome»effectueégalementunimportanttravailde
valorisationetdemédiationavecles«Nocturnes»
qui,chaquemois,attirentplusdedeuxcentscurieux
dansl’amphithéâtrePierreDauredel’université.
Laréalitévirtuelleestunmoyendevaloriser la
recherchesurl’Antiquitéauprèsd’unpluslarge
public.Cesconférencesproposent,durantune
heure,unevisiteinteractivedelaRomeantiqueagré-
mentéed’uneprésentationdessourcesanciennes.
«L’idéen’estplusseulementdemettreen
avantl’architecturedelaRomeantiquemaisde
découvrirlestextesanciens»,préciseSophieMade-
leine,ingénieurederechercheenanalysedesources
anciennesaulaboratoireERLISetdirectriceadjointe
duCIREVE.«LorsdelaNocturne“L’amouràRome”,
nousavonsemmenélepublicdansleGrandcirque.
Pourquoi?ParcequelepoèteOvidedistille,dans
L’Art d’aimer,sesconseilspourséduire,etl’unedeses
stratégiesconsisteàdisposeruncoussinpourque
lajeunefemmesoitbieninstalléedanslesgradins
enpierreduGrandcirque.Lesinfographistesdu
CIREVEontmodélisécespersonnages.»Lalittéra-
tureclassiqueapporteunenouvelledimensionen
animantetenfaisantvivrelamaquettevirtuelle.«Si
nousarrivons,pendantuneheure,àlirequelques
extraitsdetextesdePétrone,deSallusteoud’Ovide,
nousauronscontribuéàdiffuserlessavoirsetàfaire
progresserlaconnaissancesurlaRomeantique,qui
estsouventl’objetdefantasmes.»
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AU SERviCE DE TOUTES
LES DiSCipLiNES SCiENTiFiqUES
Fortedecetteexpérience,l’équipe«PlandeRome»
estàl’originedelacréationduCIREVE,en2006.
L’objectif:accompagneretsoutenirl’utilisationde
laréalitévirtuelledanslarecherche.Lesméthodes
d’immersionetd’interactionproposéesparlaréalité
virtuelleoffrentdenouveauxmodesd’expérience
quipeuventinspirerd’autresdisciplines.LeCentre
disposeaujourd’huid’unsavoir-faire,decompé-
tencesetd’équipementsuniques,dontunesalle
immersivede45m²sanséquivalentenmilieuuni-
versitaire.C’estdanscettesallequelesgéographes
simulentlesconséquencesdel’élévationduniveau
desmerssurdeszonescôtières,quedesneuropsy-
chologuesévaluentlesdysfonctionnementsdela
mémoire,etquedesneuroscientifiquesétudient
lestroubleslocomoteurs.Descasquesderéalité
virtuellededifférents types sontégalementà
dispositiondeséquipespourlesexpérimentations
individuelles.Attenantàlasalle,unamphithéâtre
de150placesestéquipépourassisterendirectaux
expérimentationsquis’ydéroulent.
LeCIREVEfédèreactuellement10unitésde
recherchedetoutesdisciplinesetmetàleurdispo-
sitionlesoutilsadaptésàleursprojetsderecherche.
C’estainsiqueleCentreaacquisuntapisroulant
pour lesbesoinsde larechercheensanté.«Ce
tapisrespectelereliefdel’environnementvirtuel
ets’adapteàl’alluredumarcheur,indiqueSophie
Madeleine.Ilpermetd’effectuerdesanalysesde
lamarchedanslecadred’étudessurlamaladie
d’Alzheimeretsurlesyndromed’Ehlers-Danlos.De
tellesétudesnepeuventsedéroulerqu’icicariln’y
apas,enFrance,d’autresalleimmersiveaussibien
équipéequelanôtre.»LeCIREVEvientd’obtenirun
financementdelaRégionNormandiepourencastrer
cetapisdanslesoldelasalleimmersive.Unefosse
de50cmdeprofondeurvaprochainementêtre
creuséedanslasallepourylogerletapis,quipourra
ainsiêtrefacilementrangéetressortienfonction
desbesoinsdesdifférenteséquipesderecherche.
«Unaménagementquinousferagagneruntemps
considérable,conclutSophieMadeleine.Surtout
quandonsaitquelasalleimmersiveestoccupée
6jourssur7!».
g r a n d a n g l e | … a u t o u r d u c i r e v e
c i r e v e . u n i c a e n . f r
Dans le cadre du contrat de Plan État-Région 2015 – 2020, correspondant à la programmation 2020, le CIREVE bénéficie d'un financement de 345 000 €. La somme permettra de maintenir la salle de réalité virtuelle au plus haut niveau technologique.
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la réalité virtuelle
fait renaÎtre les automates
de l’antiquité
Dès l’Antiquité, les Grecs et les Romains fabriquaient des machines capables de se mettre seules en mouvement… de quoi susciter la curiosité des contemporains ! La réalité virtuelle redonne vie à ces automates antiques, dont il ne reste plus de traces aujourd’hui. Rencontre avec Jérôme Nicolle, auteur d’une thèse pas comme les autres, à l’interface entre deux disciplines —l’informatique et les langues & littératures anciennes.
pOURqUOi S’iNTéRESSER
AUx AUTOMATES ANTiqUES ?
Le«PlandeRome»dePaulBigotestàl’origined’un
projetderestitutionvirtuelledelaRomeantique,ini-
tiéen1994.Lemodèlevirtueln’acessédes’enrichir
depuislors,pourrendrecomptedesprogrèsdela
connaissancearchéologique,historiqueetlittéraire.
Ceprojetnes’arrêtepasàlarestitutionvirtuelle
del’architectureetdel’urbanismedelaRomedu
IVesiècleaprèsJ.-C.,ets’intéresseégalementaux
technologiesdel’Antiquité.Lesdécouvertesarchéo-
logiquessontrarescarlesmachines,conçuesen
boispourlaplupart,n’ontpassurvécuaupassage
dutemps.Lessourcestextuellessontpeunom-
breuseset,trèssouvent,cesontdestraductions
quinoussontparvenues.C’estdanscecadreque
s’inscriventmestravauxdethèse.L’objectifestde
poursuivreletravailderestitutionpourenrichir
toujourspluslemodèlevirtueldelaRomeantique.
Laréalitévirtuelleestunoutilpourcomprendreles
machinesdéveloppéesdansl’Antiquitéettesterdes
hypothèsesderestitution.Ils’agitenparticulierde
s’intéresserauxautomatesdécritsdanslalittérature
scientifiqueettechnique.
qUELLES SONT
LEURS CARACTéRiSTiqUES ?
Montravailconsiste,dansunpremiertemps,àétu-
dieretàanalyserlestextesanciens.Cettepremière
étapeestaucœurdenotredémarchescientifique:
toutesnoshypothèsesderestitutionvirtuelles’ap-
puientsurdessourcesclassiques.Cesontlestraités
techniquesquinousrenseignentlemieuxsurles
automates,ceuxrédigéspardesingénieursgrecset
romains–Ctésibios,PhilondeByzance,Vitruveou
encoreHérond’Alexandrie.Lestraitésdécrivent,par-
foisavecdesdessins,lesmécanismesdesautomates,
leursprincipesdefonctionnementetleursusages.
Cesautomatesétaientutiliséspourémerveilleret
divertir,maisaussipourfaireladémonstrationde
grandsprincipesmécaniquesetphysiquesétudiés
àl’époque–écoulementdesfluides,propriétésde
l’air,forcedelavapeur,systèmesdepoidsetcontre-
poids,principed’Archimèdeetc.Installédevantun
temple,unautomateapportaituneatmosphère
mystique. Installédans le salond’undignitaire
romain,ilsymbolisaitlamodernitéetlepouvoir.
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greyc
UMR 6072 UNICAEN-ENSICAEN-CNRS
Groupe de recherche en informatique, image,
automatique & instrumentation de Caen
erlis
EA 4254
Équipe de recherche sur les littératures,
les imaginaires et les sociétés
COMMENT CES AUTOMATES S’iNTèGRENT-iLS
DANS LE MODèLE viRTUEL DE LA ROME ANTiqUE ?
L’analysedestraitéstechniquesconduit,dansun
secondtemps,àl’élaborationdemodèles3Dpour
restituervirtuellementlesautomates.LaServante
automatiqueestl’undescinqautomatesquej’étudie
danslecadredemathèse.C’estPhilondeByzance
quiaimaginécetautomateauIIIesiècleavantJ.-C
dansPneumatiques.Cetteservante,faitedecuivre
etd’argent,setientdebout,unecruchedanslamain
droite.Ledispositifsemetenmarchelorsqu’une
coupeestplacéedanslecreuxdesamaingauche:le
brasgauches’abaisseetlevin,puisl’eau,semettent
àcoulerdanslacoupe.Lebrasdelaservantese
remetenpositioninitialeunefoislacouperécupé-
rée.Lemécanisme,composédedeuxréservoirset
detuyauxencuivre,estdissimulédanslapoitrinede
laservante,quipeutremplirunedizainedecoupes.
Cesontensuiteleshôtesoulesesclavesquientrent
enjeupourremplirlesdeuxréservoirsd’eauetde
vin,àl’abridesregards.Levinétaittrèsconcentré
àcetteépoqueetilétaitnécessairedelediluer.
Maislemélangen’étaitpaspréparéàl’avance.C’est
d’ailleurscequifaitlamagiedecetautomate:les
dosesétaientstrictementrespectées–2/3devin
et1/3d’eau–sansquelacoupenedéborde.On
imaginebienl’étonnementdesconvives!L’intérêt
delaréalitévirtuelleestdepouvoirinteragiravec
l’environnementrestitué–danscecasprécis,ils’agit,
teluninvité,d’avancerverslatable,d’attraperune
coupe,desedirigerverslaservante,dedéposerla
coupedanssamainavantdelarécupérer,delapor-
teràseslèvresetdelaredéposersurlatable.L’étape
suivantedemathèseadoncconsistéàdévelopper
desalgorithmespermettantcetteimmersiontotale.
Laméthodeutiliselareconnaissancedegestes:une
combinaisondecapturedemouvements,dotéede
32 capteursrépartissurtoutlecorps,permetde
contrôleretd’animerunavatardansl’environne-
mentvirtuel.Autreatout:l’utilisationdecettecom-
binaisonpermetd’enregistrerdesmouvementsqui
servirontàanimerdespersonnagesdanslemodèle
virtuel,pourdonnerauxRomainsnumériquesune
démarchenaturelle.Laréalitévirtuellepermetainsi
demieuxcomprendrelesmécanismesimaginésily
aplusde2000ansetderestituerl’émerveillement
procuréparcesautomates.
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Le niveau des mers pourrait monter d’1,10 mètre d’ici 2100. C’est la conclusion inquiétante du dernier rapport du GIEC, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat. Quelles seraient les conséquences pour les villes côtières de Normandie ? Éléments de réponse avec Stéphane Costa et Daniel Delahaye, professeurs de géographie au LETG-Caen Geophen.
LES viLLES CôTièRES :
DES ESpACES vULNéRAbLES ?
Lesvillescôtièrescristallisentdenombreuxpro-
blèmeshydrologiques,cequilesrendparticulière-
mentfragiles.Ceszonesbassesdulittoral,proches
duniveaudelamer,sontsensiblesauxsubmersions
detempête.Implantéesdansdesfondsdevallée
encaissée,ellessontvulnérablesauxruissellements
etauxcouléesdeboue.Àcecis’ajoutentdesrisques
d’inondationscontinentales,liéesauxremontées
denappessouterrainesetauxdébordementsde
coursd’eau.Detelsévénementssontdeplusen
plusfréquentsetilspourraientsecombinerplus
souventàl’avenircarleréchauffementclimatique
laissecraindreuneaugmentationdunombred’épi-
sodesintenses.Nosrecherchesvisentàaméliorer
lesconnaissancesdecesphénomènes,pourétudier
leurévolutiondansl’hypothèsed’uneélévationdu
niveaudesmersdeplusd’1 mètreàl’horizon2100
–unehypothèseavancéeparunecommunauté
scientifiquedeplusenplusimportante.
CES RiSqUES pEUvENT-iLS
êTRE MESURéS ?
Notreapprocheesttoutd’aborduneapproche
historique,consistantàrecenserlestempêteset
lesinondationssurvenuescesdernièresdécennies.
Lesvillescôtièresnormandesontdéjàpayéunlourd
tributhumainetfinancierparlepassé.Latempête
du27-28février1990estuneréférencepournos
recherchescarelleaparticulièrementmarquéles
mémoires:cettetempêteaengendrédefortes
inondationsàÉtretat,jusqu’à60cmdehauteurdans
certainsquartiers.Notreobjectifest,dansunpre-
miertemps,d’étudieretdecartographierl’ensemble
desfacteursquiontparticipéaudéclenchement
decesphénomènes.Etcedansuneperspective
globale,quiprendaussibienencomptelesaspects
météorologiquesetmarinsquel’impactdel’urba-
nisationetdespratiquesagricoles.Dansunsecond
temps,unemodélisationnumériqueestpréparéeen
incluantunparamètresupplémentaire–l’élévation
duniveaudesmers.Ils’agitainsideconstruireune
mémoiredurisquepourfavoriserledéveloppement
d’uneculturedurisque.Danscetteoptique,nous
diffusonslesrésultatsdenosrecherchesauprès
desacteursduterritoireenfaisantappelàunoutil
novateur– laréalitévirtuelle.Lestechnologiesde
réalitévirtuellepermettrontdelesimmergerdans
lesphénomèneshistoriquesrestituésvirtuellement
maisaussidanslesphénomènesquipourraient
survenirdanslecadreduchangementclimatique.
L’enjeu:comprendrepouranticiperetagirenfaveur
d’unprojetterritorialdurable.
LA RéALiTé viRTUELLE :
UN OUTiL DE DiFFUSiON DES
RéSULTATS DE LA REChERChE ?
DanslecadredenotreprojetRAIVCOT,nouspro-
posonsd’utiliserlaréalitévirtuellepourdiffuseret
partagernosconnaissances.LeCIREVE,notamment
l’équipedeSophieMadeleine,amodélisé,surla
basedenosdonnées,uneinondationquipourrait
survenirdans lesruesd’Étretat–unepremière
pourlesinfographistesduCIREVE,quin’avaient
jusqu’alorsjamaissimulédesécoulementsdefluide.
Défiaccompli!Leshauteursd’eauetlesvitesses
d’écoulementrestituéesdanslemodèlevirtuel
sontprécisémentmesuréessurlabasededonnées
historiquesetdemodèlesmathématiquesincluant
l’hypothèsed’unemontéeduniveaudesmers
d’1mètre.Laréalitévirtuelleestunformidableoutil
demédiationpourprésenterdesrésultatsscienti-
fiques.Notrecible,cesontlesélus,quivontêtre
amenésàprendredesdécisionsimportantesàl’ave-
nirpourl’aménagementdesterritoires.L’outilest
novateuretsonimpactestfort.Ilnes’agitpas,bien
entendu,deviderlesvillescôtièresdeseshabitants
maisdefaireensortequ’ellessoientrésilientesfaceà
cetypedephénomènes.Noustravaillonségalement
avecleCIREVEsurdesmodèlesvirtuelssimulant
lesvillescôtièresdedemain.Notredémarcheest
scientifiqueetviseàapporterunéclairagesurdes
défissociétaux.Cesderniersserontconsidérables,
etenlamatière,ilfautévitertoutcatastrophisme.
Maispireseraitl’attentismeoul’indifférence.
Le projet RAIVCOT (2018–2020) est financé par
la Région Normandie et la Fondation de France.
letg-caen geophen
UMR 6554 UNICAEN-CNRS
Littoral, environnement,
télédétection, géomatique
développer
une « culture
du risque
inondation »
l e j o u r n a l d e l a r e c h e r c h e u n i c a e n
9
réalité virtuelle
&
recherche médicale
La proprioception : un terme bien connu des sportifs de haut niveau. Et pour cause, cette fonction joue un rôle clé dans le contrôle de la marche, la course ou encore l’équilibre. C’est grâce aux informations données par nos muscles et nos articulations que le cerveau perçoit la position et les mouvements des différentes parties du corps. Des troubles de la proprioception, comme chez les patients atteints du syndrome d’Ehlers-Danlos de type hypermobile (SEDh), entraînent chutes et collisions fréquentes. Avec le projet Vitalised, les chercheurs de l’unité COMETE veulent mieux cerner les mécanismes de cette maladie.
SyNDROME D’EhLERS-DANLOS :
L’ERRANCE MéDiCALE
Touchersonnezavecsondoigtlesyeuxfermés:ce
gesteestrendupossibleparlaproprioception,qui
nousrenseignesurl’emplacementdesmembresde
notrecorpsdansl’espace.Cettesensationestaltérée
chezlespatientsatteintsduSEDh:«Lescapteurs
proprioceptifsdisséminésdanstout lecorpsne
fonctionnentpluscorrectementettransmettentdes
informationsbruitéesaucerveau»,expliqueLeslie
Decker,maîtredeconférences-HDRenneurosciences
dumouvementhumain.«Unemauvaisereprésenta-
tiondesoncorpsdansl’espaceentraînedespertes
d’équilibre,descollisions,deschutes.Lemoindre
gesteduquotidiendemandebeaucoupd’attention
carlecerveaus’efforcedecompenserpourpallierle
manquedefiabilitédesinformationsenprovenance
ducorps…cequientraîneunegrandefatigue.»Le
SEDhestunemaladiehéréditairecomplexe,quitouche
majoritairementlesfemmesetsemanifestepardes
signesextrêmementvariés.Au-delàdestroublesdela
proprioception,laforme«hypermobile»dusyndrome
secaractérise,enplus,parunepeauhyper-extensible
etdesarticulationsanormalementmobilespropices
auxentorses.Pourlemilieumédical,ladiversitédes
symptômesestdéroutante.Pourlespatients,dirigés
despécialisteenspécialiste,l’errancediagnostique
estbientroppesante.«Ilestdoncnécessairedebien
comprendrelesmécanismesencausedanslamaladie
pourfaciliterlediagnostic»,préciseLeslieDecker.
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comete
UMR-S 1075 UNICAEN-INSERM
Mobilités : vieillissement,
pathologie, santé
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10
RépONDRE à LA SOUFFRANCE
DES pATiENTS
Lesyndromed’Ehlers-Danlosdetypehypermobile
estmaldiagnostiqué,cequiconduitfréquemment
àdesprisesdedécisionthérapeutiqueinadaptées.
Siàl’heureactuelleaucunesolutionthérapeutique
n’apparaîtpleinementsatisfaisantepourpallierles
symptômes,deuxstratégiessemblentnéanmoins
faire leurspreuvesauprèsdepatientsatteints
duSEDh:leportdevêtementscompressifsetla
reprogrammationsensorimotrice(oukinésithérapie
proprioceptive).«L’objectifduprojetVitalisedest
d’évaluerl’efficacitéconjointedecesdeuxstra-
tégies.Cettevalidationestessentiellepuisqu’elle
offriraitunenouvellealternativethérapeutique
efficacepouvantêtreproposéeàl’ensembledu
corpsmédicalcommepriseenchargederéférence
dansletraitementduSEDh»,indiqueLeslieDecker.
Unethèse,préparéeparValentinLanadanslecadre
d’uneCIFREaveclasociétéNovatexMedical,en
partenariataveclelaboratoireDevAHdel’université
deLorraine,étudiesilesvêtementscompressifs
peuventremédierauxtroublesdel’équilibreet
delamarchedecespatients.S’ilssontefficaces
àcourtterme,leseront-ilsàlongterme,unefois
retirés?«Notrehypothèseestquelecerveaua
besoind’une sortede starter, une suppléance
sensorielle,permettantauxpatientsdes’engager
dansunereprogrammationsensorimotricevisant
àrétablirunfonctionnementharmonieuxdela
chaîneproprioceptive.L’enjeudel’étudeVitalised
estainsidevaliderscientifiquementl’efficacitéde
cettestratégiethérapeutiqueinnovante.»
LA RéALiTé viRTUELLE,
EN qUêTE DE SENS
LeprojetVitalised,débutéauprintemps2018,
prévoitdesuivre40patientsâgésde18à50ans
pendantuneannée.Pourmesurerl’efficacitédela
thérapie,l’étudeinclutuneévaluationdestroubles
perceptifs,cognitifsetdurythmeveille-sommeil,
ainsiqu’uneexplorationtrèsfinedelamarcheet
del’équilibreenenvironnementvirtuel.«Lamarche
etl’équilibresollicitenttouslessens,parmilesquels
onpeutciterlaproprioception,lavisionetlesys-
tèmevestibulaire.Mais,ici,nousnousintéressons
toutparticulièrementaurôledes informations
proprioceptives.Laréalitévirtuelleconstitueun
véritableatout,carellenouspermetdesimuler
numériquementdesenvironnementsréalisteset
decontrôlercemondeartificielentoutesécurité.»
LeCIREVEafaitl’acquisitiond’untapisGRAILpour
lesbesoinsspécifiquesdecetteétude.Cetapis
roulants’adapteàlavitessededéplacementdes
patientscheminantdansl’environnementvirtuel.
Lescamérasinfra-rougesinstalléesau-dessusdes
écransdanslasalleimmersivepermettentd’enre-
gistrerlamarcheentempsréelgrâceauxmarqueurs
rétroréfléchissantsplacéssurlecorpsdespatients.
L’objectif:plongerlespatientsdansl’environnement
virtuelpourvoircommentlecerveaus’adapteàdes
contraintespourmaintenirlecontrôledel’équilibre
àlamarche.«Grâceautapis,nousavonspuappliquer
desoscillationstrèslentespourinduireuneatténua-
tiondesinformationsvestibulaires.Lesyeuxfermés,
lespatientesnepeuventalorscompterquasiment
quesurlesinformationsproprioceptivesprovenant
deleurcorpsafindepréserverleuréquilibre…ce
qui,commepressenti,serévèledifficile.Grâceàla
réalitévirtuelle,nouspouvonscréerdesscénarios
dedoubletâcheouencoreinduiredesperturbations
visuelles–cequinousapermisdemettreàjourque
lespatientessonttrèsdépendantesdelavisionet
ontbesoind’attentionpourcontrôlerleuréquilibre.
Lasalleimmersivepermetainsidecréerunegrande
diversitédesituationspourétudierlecontrôlede
l’équilibreaucoursdelamarche.»Lespatientes
s’amélioreront-ellesaprèslathérapieassociantles
vêtementscompressifsetlareprogrammationsen-
sorimotrice?Lespremiersrésultatsdecetteétude,
toujoursencours,sontencourageants.
union européenne
Fondseuropéendedéveloppementrégional
Le projet Vitalised
est cofinancé par
l’Union européenne,
la Région Normandie
dans le cadre
du programme opérationnel
FEDER / FSE 2014 – 2020.
l e j o u r n a l d e l a r e c h e r c h e u n i c a e n
11
Les pertes de mémoire : un effet secondaire observé chez bon nombre de patients suivis pour un cancer. Une étude menée par le laboratoire NIMH s’intéresse à ces troubles, fréquents, qui ont un impact négatif sur la qualité de vie des patients. Le point avec Bénédicte Giffard, maître de conférences en neuropsychologie.
COMMENT SE CARACTéRiSENT
CES TROUbLES DE LA MéMOiRE ?
L’impactducanceretdesestraitementssur la
mémoirenefaitplusdedoute.Maislecerveauest
unorganecomplexeetilestencorenécessaired’ap-
profondirlesconnaissancespourbiencomprendre
cesdysfonctionnements.C’estl’objectifdenotre
étudeProsom-K,quiporteplusspécifiquementsur
lecancerdusein.Cestroublescognitifssontgéné-
ralementlégers,maisilspeuventpersisterplusieurs
années.Ilssontd’autantplusgênantsqu’ilstouchent
fréquemmentlamémoireprospective.Lamémoire
prospective,c’estlamémoiredesintentionsfutures,
quipermetdesesouvenird’actionsàréaliserplus
tard.Serappelerqu’ilfautappelerlemédecinà9h
ouqu’ilfautpasseràlapharmacieenrentrantdu
travail,parexemple.Onimaginebienladétresse
despatientes,carlamémoireprospectiveesttrès
sollicitéeauquotidienetestessentielleaubonsuivi
dutraitement.
qUELS SONT LES FACTEURS
qUi FAvORiSENT CES TROUbLES
DE LA MéMOiRE pROSpECTivE ?
Desétudesscientifiquesontmisencausecertains
traitements,commelachimiothérapie,danslasur-
venuededéficitscognitifstouchantlamémoire,
l’attentionet laconcentration.Pourautant, les
patientesseplaignentparfoisdeproblèmesde
mémoireavantmême ledébutdu traitement.
Cequisuggèrequel’explicationsetrouve,aussi,
ailleurs:lachimiothérapienepeutêtreseuleres-
ponsabledecesaltérations.C’estimportantdele
soulignercarilseraitdésastreuxquedespatientes
enviennentàrefuserlachimiothérapieàcausede
cesdésagréments.Desétudessupplémentairessont
doncnécessaires.Ilestnotammentindispensablede
s’intéresseràd’autrestraitements,commel’hormo-
nothérapiequiestfréquemmentprescritedansle
casducancerduseinetdontleseffetsn’ontpasété
suffisammentétudiés.Outreletraitement,d’autres
facteurscommel’anxiété,lestress,lafatigue,etle
manquedesommeilsontàprendreencomptepour
biencomprendrelefonctionnementdelamémoire.
Laforcedeceprojet,c’estd’évaluerlamémoire
prospectiveenlienaveclestroublesdusommeil
etlesbouleversementsémotionnelsinduitsparla
maladie.
L’ORiGiNALiTé
DE CETTE éTUDE EST
DE RECOURiR à LA RéALiTé
viRTUELLE. pOURqUOi
CE ChOix ?
Lamémoireprospectiveestcomplexeàétudiercar
ellenouspermetdenousprojeterverslefuturpour
réaliserdesactionsduquotidien.Sonévaluation
nécessitedoncunprotocolederechercheadapté.
Cequ’ilfauttester,cesontdessituationsdelavie
quotidienne,auplusprèsduréel.C’estpourquoi
l’étudecomprendunvoletenréalitévirtuelle,mené
danslasalleimmersiveduCIREVE.Chaquepartici-
pantedoitapprendreunesériede9actionsàréaliser
12heuresplustarddansl’environnementvirtuel.Ce
délaide12heuresestsoitundélaidiurne,soitun
délainocturne:lesparticipantesarriventdonclesoir
avecdesactionsappriseslematin-même,oulematin
avecdesactionsappriseslaveille.Cettedistinction
asonimportancecarlesommeiljoueunrôledans
laconsolidationdelamémoire:nousévaluonsdonc
l’activitécérébraleetlaqualitédusommeildurantla
nuitàl’aidedecapteurs(polysomnographie).Dans
lasalleimmersive,lemodèlequenousutilisonsest
leMémorialdeCaenreconstituévirtuellement.
Lesparticipantessedéplacentlibrementdanscet
environnementvirtueletdoiventaccomplir les
actionsqu’ellesontmémorisées–«seprésenterà
l’accueilà9hpourachetersonbillet»ou«serendre
àl’auditoriumà11hpourlaprojectiondufilm»,
parexemple.Leseffetsdelafatigue,dustresset
del’anxiétésont,quantàeux,évaluésàl’aidede
questionnaires.Cetteétudeapporteraunemeilleure
compréhensiondestroublesrencontréesparles
patientes.Ils’agira,àterme,deproposerdesprises
enchargeadaptéespourcompensercesdifficultés
etaméliorerleurautonomie.
L’étude Prosom-K est réalisée en collaboration
avec le Centre de lutte contre le cancer François
Baclesse, le CIREVE, l’unité de recherche ANTICIPE
(UMR-S 1086 UNICAEN-INSERM), et l’unité de
recherche DC2N (UMR-S 1239 université de Rouen
Normandie-INSERM). Elle s’inscrit dans le cadre de
la Plateforme Cancer et cognition du Canceropôle
Nord-Ouest. Elle est financée par la Région Norman-
die, le Canceropôle Nord-Ouest, la Ligue contre le
cancer du Calvados et la Fondation ARC.
nimh
UMR-S 1077 INSERM-EPHE-UNICAEN
Neuropsychologie & imagerie
de la mémoire humaine
g r a n d a n g l e | … a u t o u r d u c i r e v e
cancer . . . . . . . quand la mémoire flanche
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voyager au cœur de la matiÈre
Il n’y a rien de plus concret que la matière… Et pourtant, il est difficile de représenter (et de se représenter !) les associations d’atomes qui la composent. C’est pour répondre à cette difficulté que les chercheurs du LCS ont imaginé Nanorêve, un dispositif de réalité virtuelle permettant de découvrir ce qui se cache au cœur d’un matériau.
Casquesurlatêteetmanetteenmain,c’estune
plongéedansl’infinimentpetitquenousproposele
LCSavecNanoRêve.Leprojet,lauréatduPrixMusée
Schlumberger2019*,aétédévoiléenavant-pre-
mièreàl’occasiondelaFêtedelascience2019.«Ça,
c’estunezéolithe,unmatériauutilisédansdetrès
nombreusesapplications,»,indiqueArnaudTravert,
enseignant-chercheur,auxlycéensaccueillissurle
VillagedessciencesdeCaen,le11octobredernier.
Unécranpermetaugroupedesuivreentemps
réellevoyagedel’utilisateuraucœurdumatériau,
icidansdesréseaux3Ddecavitésdedimension
moléculaire.
«Lesmatériauxquenousprésentonsàl’échelle
moléculaire,préciseArnaudTravert,sontnotam-
mentceuxquenousétudionsaulaboratoire.»La
spécialitéduLCS,c’estl’étudedesmatériauxcata-
lytiques.Cesmatériaux,utiliséspourfavoriserou
accéléreruneréactionchimique,sontunesolution
pourledéveloppementd’uneindustriechimique
plusvertueuse.L’objectif:optimiserleurspropriétés
etleursperformancespourdesapplicationsdansles
domainesdel’énergieetdeladépollution.Nanorêve
permetd’engagerunediscussionsurlachimie,qui
nebénéficiepastoujoursd’unebonneimageauprès
dugrandpublic.Sansparlerdel’aspectludiquedu
dispositifquiplaîtauxplusjeunes.«Lesenseignants
comprennentbienl’intérêtd’unteloutilquifavorise
l’apprentissageendonnantàvoirl’invisible.»
LeCIREVEaapportéunsoutientechniquepour
ledéveloppementdesmodèlesvirtuels.L’enveloppe
allouéeparlePrixMuséeSchlumbergerpermettra
aulaboratoiredepoursuivreledéveloppementde
Nanorêve.«L’undesvoletsduprojetconsisteàpro-
poserégalementdesvidéos3Dsuruneplateforme
accessibleenligne—desvidéosdemolécules,d’en-
zymes,denano-objets.Nousallonstravailleravecles
enseignantspouridentifierleursbesoins.»Cesite
internetprolongeral’expérienceNanorêve,avec
ducontenuenrichi,adaptétantauxinitiésqu’aux
simplescurieux.
* Le Prix Musée Schlumberger distingue chaque
année des démarches innovantes en matière de
médiation scientifique. À la clé : 10 000 euros pour
concevoir un outil illustrant une problématique
scientifique. Porté par Le Dôme et la Fondation
Musée Schlumberger, ce concours est ouvert aux
équipes de recherche publiques et privées de
Normandie. 10 projets ont vu le jour depuis la
création du prix, au printemps 2010 : NanoRêve
est le premier porté par un laboratoire de chimie.
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lcs
UMR 6506 ENSICAEN-UNICAEN-CNRS
Laboratoire Catalyse & Spectrochimie
n a n o r e v e . c n r s . f r
l e j o u r n a l d e l a r e c h e r c h e u n i c a e n
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des synonymes par milliers
Indispensable, incontournable, essentiel, nécessaire… Avec ses 50 000 entrées, le dictionnaire électronique des synonymes du CRISCO s’est imposé comme une référence pour celles et ceux qui manient la plume chaque jour. Rencontre avec Laurette Chardon, ingénieure de recherche et Chris Smith, maitre de conférences en lexicologie sur le stand de Campus en Fête.
ON A pARLé SéMANTiqUE
ET SyNONyMiE SUR LE STAND
DU CRiSCO ! LE DES, OUTiL
phARE DU LAbORATOiRE,
éTAiT à L’hONNEUR ?
Oui,nousavonsprésentéleDES–ledictionnaire
électroniquedessynonymes–quiestl’undestrois
axesderechercheduCRISCOdepuisledébutdes
années1990.LeDESestunoutilenaccèslibreet
gratuit,développéetmisàjourparlelaboratoire
surlabasedeseptdictionnairesderéférence.Les
utilisateursadressentégalementdenombreuses
propositionsd’ajoutoudesuppression,quisontétu-
diéeschaquesemaine.Leprincipe:unmotdoitêtre
substituableparunautredansuncontextedonné.
Àtitred’exemple,onretrouve«profession»et
«accouchement»parmilessynonymesde«travail»,
lesdeuxoccurrencespouvanteneffetsesubstituer
aumot«travail»dansdescontextesprécis.Pour
autant,«profession»et«accouchement»nesont
passynonymescariln’existepasdecontextedans
lequell’unpourraitsesubstitueràl’autre–c’estce
qu’onappellelasynonymiepartielle.LeDESreflètela
richessedelalanguefrançaise,c’estunoutilprécieux
pourcomprendrelapolysémie–lacapacitédesmots
àprendredessensdifférentssuivantlecontexte
danslequelilssontutilisés.Nousavonsinvitéles
visiteursdelaFêtedelascienceàs’interrogersur
cesnotions.
LE DES, CE SONT pRèS
de 200 000 requêtes
pAR jOUR. à qUi CET OUTiL
S’ADRESSE-T-iL ?
LeDictionnaireestessentiellementutilisépour
laproductionécritedansuncadreprofessionnel,
commelesuggèrelalistedesmotslesplusrecher-
chés–«eneffet»,«permettre»,«ainsi»,«présenter»,
«faire»,«comprendre».L’outilseveutêtrelereflet
delalanguefrançaisedanssesdiversemplois,mais
aussidansletemps.C’estpourquoionretrouvedes
occurrencescomme«LOL»,quiafaitsonentréedans
Le Petit Roberten2013.C’estpourquoionretrouve
égalementdessynonymespouvantchoquerpour
leursconnotationsinjurieuses,sexistes,racistesou
homophobes.Cesoccurrences,signaléesparun
astérisquerenvoyantàunepaged’avertissement,
sontbienprésentesdansleDEScarellespourraient
serévélerutilespouruntravaildetraductionou
danslecadredel’écritured’unroman.Defait,ilest
nécessaired’avoirunebonneconnaissancepréalable
delalanguefrançaisepourprofiterpleinementdu
DESetensaisirtouteslesconnotations.Ledanger,
pourdesnon-francophonesconfrontésànoslistes
desynonymesseraitdepenserqu’unmotpeutse
substitueràunautredemanièreabsolue.Nostra-
vauxsurlesespacessémantiquesvisentnotamment
àrépondreàcettedifficulté.
ChAqUE MOT DU DES EST EN
EFFET ASSOCié à UN « ESpACE
SéMANTiqUE ». qU’EST-CE
qUE CELA AppORTE DE pLUS ?
L’«espacesémantique»estunereprésentation
graphiqueen2Douen3Ddesdifférentssensque
recouvreunmêmemot. Ilpermetdeserendre
compterapidementdelapolysémied’unmotet
dedissocierclairementsesdifférentssens.Les
synonymesdumot«baie»,parexemple,sedis-
tinguentencinqensembles:«grain,fruit»,«golfe»,
«échancrure»,«crique,calanque»,et«ouverture,
fenêtre,lucarne».Chacundecesensemblesgra-
vitentautourdumot«baie»quifigureaucentrede
l’espacesémantique.Cettereprésentationpermet
devoir,d’uncoupd’œil,commentlessynonymesse
regroupentetcommentilssepositionnentlesuns
parrapportauxautres.C’estunevéritableplus-value
duDES.
AvEC LE pROjET MULTiDES,
LE DiCTiONNAiRE vA-T-iL
S’éTENDRE à D’AUTRES
LANGUES ?
LeprojetMULTIDESproposed’intégrerdesmots
anglaisauDES,enlesenvisageantcommedessyno-
nymesdemotsfrançais.Derrièreceprojet,ilyaune
questionscientifique:peut-onconsidérerlatraduc-
tioncommeuneformedesynonymie?Substituerun
motparunautreettraduireunmotparunautrene
seraient,ensomme,passidifférent.Danslesdeux
casseposentdesquestionsdesens,deregistre,
decontexteetdetemporalitéquiintéressentles
linguistesetlestraducteurs.«Pain»parexemple,
setraduitenanglaispar«bread»lorsqu’ils’agitde
nourritureoupar«punch»lorsqu’ils’agitd’uncoup
depoing.Cetoutilpermettraitderendrecompte
dufoisonnementdessensautourd’unmêmemot.
Ilpermettraitégalementdemettreenvaleurles
problèmesdetraductionposésparlesfaux-amis:
«tofix»,quisignifie«réparer»,nesetrouveraitpas
danslamêmeentréequeleverbefrançais«fixer».
Leprojetestencoursdedéveloppementmaisl’idée
serait,àterme,d’avoirunoutilbi-languepermettant
dequestionnerleDESenfrançaisseulementoubien
enfrançais/anglais.
crisco
EA 4255
Centre de recherches inter-langues
sur la signification en contexte
baie
grain
calanque
golfe
fenêtre
lucarne
ouvertureéchancrure
fruit
cr
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monnaies & trésors DANS LES COULISSES DU
SERVICE DE NUmISmAtIqUE
Comment reconstituer le passé lorsque les sources écrites sont absentes ou ont disparu ? Le CRAHAm réunit des spécialistes de différentes disciplines pour étudier les vestiges qui nous parviennent des sociétés anciennes et médiévales. Pièce de monnaie, tesson de poterie, fragment de vitrail, dent, ossement… Entre leurs mains, ces sources matérielles deviennent de véritables sources historiques. Le CRAHAm a ouvert ses portes au public lors de la Fête de la science — l’occasion de découvrir l’une de ses spécialités, la numismatique.
centre michel
de boüard-craham
UMR 6273 UNICAEN-CNRS
Centre de recherches archéologiques
& historiques anciennes & médiévales
LA NUMiSMATiqUE :
ENTRE ARChéOLOGiE & hiSTOiRE
Lesmonnaiessonttoujoursletémoignaged’activités
humaines:lesmétauxquilescomposentetlesins-
criptionsqu’ellescomportentsontdesindicesappor-
tantunéclairagedirectsurlespratiquesdessociétés
anciennes.Maisencorefaut-ilpouvoirinterpréterde
telsobjets.LeCRAHAMs’estainsidotédeservices
spécialiséspourdécrypterlesvestigesmatériels.
Auxcôtésdesservicesd’archéométrie,d’archéo-
anthropologie,d’archéomatiqueetdecéramolo-
gie,leservicedenumismatiquedisposedescom-
pétencesetdeséquipementsnécessairespour
étudierlesmonnaiesdécouvertessurleschantiers
defouillesarchéologiques.Ilrépondégalementaux
besoinsdesmembresduCRAHAMetdesinstitutions
partenaires–I’Institutnationalderecherchesarchéo-
logiquespréventives·INRAP,leServicerégionalde
l’archéologie,lescollectivitésterritoires,lesmusées
etc.Unefoisarrivéesaulaboratoire,lesdécouvertes
monétairessontnettoyées,identifiées,classées
avantd’êtrepubliéesdansdesrevuesspécialisées.
«Cesdécouvertesmonétaires,ilfautleurdonnerdu
sens»,expliquePierre-MarieGuihard,responsable
duservicedenumismatique.«Lanumismatique,
c’estl’histoired’hommesetdecomportements.
Lesmonnaiesnousrenseignentsurlacirculation
desbiens,lespratiquescommerciales,lesusages
del’argent,leséchangessociaux.»Unedémarche
ensommefortementmarquéeparl’archéologie
etl’anthropologiequelerécentrecrutementde
ThibaultCardon,chargéderechercheauCNRS,est
venurenforcer.
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AUTOpSiE D’UN TRéSOR
MONéTAiRE
Lesmonnaies,parcequ’ellessurviventaupassagedu
temps,nesontpasraresencontextearchéologique.
Plusétonnantsenrevanchesontlestrésorsmoné-
taires,accumulésprogressivementetenfouis.C’est
doncunefouillehorsducommunquiaétéconfiéeau
servicedenumismatiqueduCRAHAMauprintemps
2011.«Uneexpériencequin’arrivepasdeuxfois
dansunecarrière»,soulignePierre-MarieGuihard.
Enarchéologie,lesdécouvertessontsouventlefruit
duhasard.C’esteneffetaucoursdetravauxdans
sonchampdeSaint-Germain-de-Varreville(50)qu’un
agriculteurmetaujourunvaseencéramique.À
l’intérieur:14 528monnaiesromainesdatantdela
premièremoitiéduIVesiècle.«Commentlesmon-
naiesétaient-ellesagencées?Étaient-ellesdisposées
envrac?Ouétaient-ellessoigneusementorganisées,
ensacsouenrouleauxparexemple?Levase,plein
àrasbord,a-t-ilétéremplienuneseulefoisouen
plusieursphasessuccessives?C’estàcesquestions
quenousavonstoutd’abordcherchéàrépondre
pourcomprendrecommentunstockdemonnaies
pouvaitêtregéréàcetteépoque.»Lafouilledu
trésorrévèlelacoexistencedeplusieursensembles,
séparéspardefinescouchesdeterreargileuse.Un
fragmentdecordelettesuggèremêmequ’ungroupe
demonnaiesétaitconservédansunsacenmatière
périssable.Cetagencement laisseentrevoir les
grandesétapesd’unremplissages’étalantsurune
dizained’années.«L’étudeducontenuduvaseaété
associéeàunefouilleconduitesurlelieu-mêmedela
découverteparCécileAllinne,maîtredeconférences
enarchéologie.Aucunautrevestigedel’Antiquité
n’aétéretrouvéàproximité,cequilaissesupposer
quelevaseétaitenfouidansunecachetteisolée.
Sonpropriétairel’a-t-ildissimulépourfuirundanger
imminent?Non,detouteévidence,puisqu’ilapparaît
clairementquelevaseaétéprogressivementrempli,
enplusieursfois.Ilauraitpuapparteniràuncom-
merçantquisouhaitaitmettreseséconomiesàl’abri
pourendisposerdetempsentemps.Cesmonnaies
romaines,qu’onappelledesnummi,sontd’ailleurs
raresparmilesmonnaiesisoléesdécouvertessurles
sitesarchéologiquesdelarégionetpourraient,de
cefait,releverd’unesphèred’échangeparticulière,
comme,peut-être,desmilieuxd’affaires.»
UNE ExpERTiSE COMpLèTE,
DE LA FOUiLLE à LA pRODUCTiON SCiENTiFiqUE
LetrésordeSaint-Germain-de-Varrevillearejoint
lescollectionsduMuséedeNormandiemaisfait
toujoursl’objetd’uneétudedétailléeauseindu
service.Sil’analysedutrésoralaisséentrevoirun
fragmentdelavied’unGallo-RomainauIVesiècle,les
monnaiesn’ont,elles,pasencorerévélétousleurs
secrets.«L’enquêtes’estnotammentpoursuivieavec
l’analysedesmétauxquicomposentcesnummi»,
indiqueGuillaumeBlanchet,doctorantauCRAHAM.
«LestechniquesdefluorescenceXnouspermettent
d’identifierlasignaturechimiquedecesmonnaies.
Notre objectif est de mieux comprendre les
méthodesdefabricationmaisaussidecernerlages-
tiondesstocksdemétauxutilisésparl’Étataufildes
annéespourlesproduire.»Préalableindispensable
pourétudierlesnummi,souventmaculésdeterreet
rongésparlacorrosion:lenettoyage.«Nousappli-
quonsdifférentesrecettesenfonctiondel’alliage
desmétauxquicomposentlesmonnaies,précise
GuillaumeBlanchet.L’usagedeproduitschimiques
estcoupléàdestechniquesmécaniquesutilisant
scalpelsetmicro-tours.Ilnes’agitpasd’aboutirà
unerestaurationdesmonnaiesmaisdelesrendre
suffisammentlisiblesetd’assurerleurconservation.»
DanslesarmoiresfortesduCRAHAM,onretrouve
desmonnaiesantiques,médiévalesetmodernes
issuesdenombreuxchantiersarchéologiqueset
accessiblesauxchercheursetauxétudiants.Les
découvertesmonétairesréceptionnéesetétudiées
parleservicedenumismatiquefonttoutesl’objet
d’unréférencementdétaillédansNUMMUS.Cette
basededonnées,alimentéeaufuretàmesuredes
études,rendcomptedel’importancedelamonnaie
entantquesourcedepremièremainpourleverle
voilesurl’histoiredeséchanges,del’Antiquitéà
l’époquemoderne.
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Directeurdepublication:PierreDenise·Présidentdel’université
deCaenNormandie | Coordination:LindaOrtholan·Directrice
delacommunication | Conception·réalisation:Directiondela
communication
qUAND LA PSyCHOLOgIE SOCIALE ACCOmPAgNE
LE tRI DES DÉCHEtSTrier ses déchets : une initiative utile pour l’environnement ? De plus en plus de Français le pensent, comme le montrent les chiffres de l’Observatoire du geste de tri. Même si les comportements s’améliorent, il reste encore une marge de progression importante pour que le tri devienne systématique. Pour Cécile Sénémeaud, professeure de psychologie sociale et directrice du LPCN, la psychologie sociale a un rôle à jouer pour encourager le changement de comportement.
COMMENT FAvORiSER
UNE évOLUTiON
DES COMpORTEMENTS ?
Traditionnellement,ilexistetroisleviersd’action
poursusciterunchangementdecomportement.
Lepremierconsisteàcontraindrepardesloiset
desréglementations,maiscelevierpeineàfavoriser
l’adhésiondelapopulation.Ledeuxièmereposesur
uneincitationfinancière.Cettestratégiedonnedes
résultatssurtoutàcourtterme,maisnepermetpas
d’encourageruneévolutiondurabledescomporte-
mentséco-citoyens:parexemple,sijetrieleverre
contreunerécompense,qu’est-cequivam’inciter
àtrierlecartonetleplastique?Ledernierlevier
consisteàsensibiliseretàéduquerpourexpliquer
lesbénéficesetexposerlesdangerspotentiels.Mais
êtreconvaincudel'enjeud'unproblèmen'implique
pasforcémentdepasseràl'action.Surlaquestion
dutrisélectif,parexemple,lesétudesd’opinion
démontrentquelesFrançaissontmajoritairement
satisfaitsdesdispositifsdetrietconvaincusdel’uti-
litéd’untelgeste.Pourautant,forceestdeconstater
queletridesdéchetsn’estpassystématique.Pour-
quoilesgensont-ilsdescomportementsquivont
àl’encontredeleursconvictions?Lapsychologie
socialepeutapporterdesréponsesàcetypede
questions.Notredémarcheconsisteàidentifierles
freinspsychosociauxquiempêchentunindividude
changerdecomportementpour,àterme,mettre
enplacedesstratégiesdemotivationvéritablement
adaptées.
CécileSénémeaud
aprésentéceprojetderechercheaction
lorsducycledeconférences«Viesd’ordures»
organiséparlaMRSHCaenNormandie
àl’occasiondelaFêtedelascience.
qUELS SONT CES FREiNS
pSyChOSOCiAUx ?
En2016,danslesdépartementsduCalvados,de
l’OrneetdelaManche,lapartdesemballagesen
verreretrouvéedanslesdéchetsménagerss’éle-
vaitàplusde10 %danscertainescommunes—un
chiffreplusélevéquelamoyennenationale.C’est
pourrépondreàcetteproblématiquequenous
avonscommencéàtravailler,en2018,auxcôtésde
l’associationBiomasseNormandieetduSYVEDAC,
leSyndicatpourlavalorisationetl’éliminationdes
déchetsdel’agglomérationcaennaise.Nousavons
étudiélerôledesfreinsd’ordrepratique,telsquele
manquedeplacepourstockerlesemballageschez
soiouencoreladistanceentrelelieuderésidence
etlepointdetriduverre,etsurtoutceluidesfreins
etlevierspsychosociaux.Cequinousintéresseplus
spécifiquement,c’estcequelesgensperçoiventde
leurentouragecarlanormesocialeauneinfluence
considérablesurl’actionindividuelle.Lespersonnes
quim’entourentattendent-ellesdemoiquejetrie
mesemballagesenverre?Est-cequeleshabitants
demonquartier,eux,lefont?Sijepensequenon,
pourquoimoi,dèslors,devrais-jelefaire?Nous
regardonsaussilesvariablesémotionnelles:est-ce
quetriermesdéchetsmerendfieretest-cequeje
culpabiliselorsquejenelefaispas?Autreparamètre:
laconfiancequej’accordeaugestedetrietlacapa-
citéquejecroisavoirpourlefaire.Est-cequejesuis
convaincuquecettedémarcheaunréelintérêtpour
protégernotreplanèteouest-cequecegesteme
sembletropfutilefaceàl’ampleurduphénomène?
Nousavonsconsulté504ménagesdel’aggloméra-
tioncaennaise,résidantdansdesquartiersoùl’on
triepeuetdansdesquartiersoùl‘ontriebeaucoup.
Cediagnosticestindispensablepouridentifiercequi
motivelesgensàtrierou,aucontraire,cequiles
empêchedepasseràl’action.C’estgrâceàçaque
nouspouvons,dansundeuxièmetemps,élaborer
ettesterdesoutilsdecommunicationconvaincants
etadaptésauxpublicsciblés.
CES OUTiLS
SE TRADUiSENT COMMENT ?
Nousavonsproposéuneaffichereprésentant,pour
susciteruneémotionnégative,unepoubelleremplie
debouteillesenverreavecunephraseactivantla
normesociale— «88%despersonnesvivantàCaen-
la-meraffirmentqu’ilestutiledetriersesemballages
enverre.»Cetteafficheaégalementétédéclinée
enflyerderrièrelequelonaajoutédesquestions
simplesetludiquesrelativesauxpratiquesdetri
dufoyeretunecartedespointsd’apportvolon-
taireslesplusproches.Cesélémentsrappellentla
simplicitédugestedetrietredonnentconfiance
danssacapacitédefaire.Pourmesurerl'efficacité
desstratégiesquenousmettonsenplacesurle
terrain,notredémarcheestexpérimentale.Elle
obéitàunelogiqued'administrationdelapreuve
etpermetdecomparerleseffetsdenosdispositifs
decommunication.Ainsi,nousavonsaccrochél’af-
fichedanscertainsimmeublesetdansd’autres,nous
l'avonsassociéeàdesflyersdéposésdanslesboîtesà
lettres.Dansd'autresencore,nousn'avonsrienfait.
GrâceàlacollaborationavecBiomasseNormandie,
nousévaluonstouslesmoisletauxderemplissage
despointsd’apportvolontairepourvérifiersinotre
interventionaétéefficace.Deplusenplusd’ac-
teurspublicsfontappelànotrelaboratoirepour
développerdesprogrammesderechercheaction
liésàl’accompagnementauchangement.Faceà
cettedemandeenhausseconstante,nousproposons
depuistroisansunparcoursdemaster«Psychologie
sociale de l’intervention: audit & conduite de
changement»dontressortentdespsychologues
forméspouraccompagnerlechangement.
lpcn
EA 7452
Laboratoire de psychologie
Caen Normandie
r e g a r d s u r l’a c t u