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OFFICE DS JJA ET ·P.sCHI"OE.;).UZ· OUTP.E-nER 20, rue ;ionsieur 'P.ô"RIS vn- COTE 4230 GEOGRA.PHIE LE REGIME FONCIER CHEZ LES SUSU DU KONKOURE par Ho FRECHOU [0 4230 Konkouré 1958

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  • OFFICE DS JJA RZCR;RCT~ SClm~TIFI~UEET ·P.sCHI"Œ.;).UZ· OUTP.E-nER

    20, rue ;ionsieur'P.ô"RIS vn-

    COTE ~E CL1.SS~~S~T N° 4230

    GEOGRA.PHIE h1Ji~JAINE

    LE REGIME FONCIER CHEZ LES SUSU DU KONKOURE

    par

    Ho FRECHOU

    [0 4230 Konkouré1958

  • LE REGIME FONCIERchez les SUSU du Moyen-Konkure

    Rapport provisoirepar Hubert FRECHOU

    Géographe de l'ORSTOM

    Septembre 1958

  • · TABLE des MATIERES

    .":Dell.Qkhulimii.

    Warakalan

    Vill~ges du Sugekuru

    II - Gériéralités : la notion de prœpriétéfoncière

    po l

    p. 8

    p. 10

    p. 10

    p. 13_

    p. 16

    p. 19-

    po 23-

    Généralités : Le peuplement SUSU

    PREMIERE PARTIE: l'appropriation du saI

    l - Quelques exemples

    Malea

    INTRODUCTION

    Les fondements du droit de propriété p.23

    L'aliénation

    Le territoire Tillageois

    DEUXIEME PARTIE : La tenure des terres : modalités

    l - L'organisation familiale

    II - Les rapports fonciers à l'intérieur du clan

    III - La situation des anciens captifs

    IV - L'explQitation familiale

    V - Le régime des prêts

    VI - L'utilisation des produits spontanés

    CONCLUSION PROVISOIRE

    p. 28

    p. 34

    p. 38

    p. 39

    p. 45

    p. 49

    p. 52

    p. 59

    p. 61

    .p. 64

    -:-:-:-:-:-:-:-:-

  • LE REGIME FONCIER

    C~Z~SOOW ru KONKOURE

    Etude faite dans le cadre de l'Opération KONKOURE-BOKE

    de ltOrsto~ et pour le compte de la M.A.R.G.

    ~ar Monsieur Hubert Frechou(Licencié de Géographie)

  • -.

    ..

    I.-

    IN',rRODUCTlon------------

    LE P~U~L~rffiNT SUSU...... ~ ... -_ .... --

    COID'usrON DU KJGlm~; FONCIER CIillZ LES SUSU.Le régimA foncier chez les Susu a déjà été

    ~tudié dans plu~lieur8 ouvrages(I). On peut repro-cher à leurs auteurs un caractère pourtant évidentet fondamental des riotions se rattachant à la pro-priété du sol chez les Susu: let~r confusion.

    Chez les Peuls des Timbis, on peut définirun ensemble assez cohérent de règles. Chez les

    Susu du iloyen Konkouré au contraire, plusieurs no-tions, qui paraissent incompatibles, c·oexistent. Ilest difficile, dans l'amas de réponses contradiotoi-res et hésitantes fou~nies par les informateura,de

    : ;. .. : . :, . ~ .

    discerner des principes généraux, ou, lorsque de'~;tels principes sont définis par ces informateure,otr

    --------_.........__...._.--------_......_-------(1) Les indications données par le Coutumier juridi-que de l'A.O.l", sont tr'·s vagues: la terre Il '" nesaurait passer pour être le fruit d'aucun travailhumain .•..• Elle 11' appartient à. personne '.'.D'autre part Il ••••• constituent· l'a propriété collec-tive: la terre ... ,." ( De q;.lelle collectivité:famil-le, village ••.... , s'agit-il ?)

    Même imprécision, proche de l 'incohérence, dansle Coutumier indigène de la Guinée Française(inédit)" ... les premiers occupants se sont partagé le solet ont ensuite accordé le droit de s'établir à d'au-tres familles .. ,conservant le domaine éminent de laterre ..• De cette notion découle celle-ci: les habi-tants du pays, n'ont qu'un droit d'usage de la ter-re .. " ( S'agit-il de tous les habitants?)

    Dans son Rapport de mission dans le Noyen Konkou-ré,P.FRITSCH écrit sue chaque "carIé" est collecti-vement propriétaire des terres défriqhées par sesancêtres.

  • - 2 -

    s'aperçoit qu'ils ne sont pas appliqués dans la pra-tique. Le régime de la terre chez les Susu n'appa-rait pas fondé sur quelques principes généraux,sim~pIes, mais composé d'un ensemble touffu-de règles

    et d'usages empiriques.

    2.- M..A.~GION DU.J-lOYEN KOlUCUR!

    La présentation géographiqUe de la région

    Moyen Konkare a été faite par FRITSCH

    Jusqu'à une date récente, elle était divisée

    administrativement en plusieurs cantons, qui corres-pondaient à de petites unités traditionnelles:&OKl.iILI, BAREN, TENB, HONOlvlA, SUQEKURU ( ce derni.errattaché administrativement au Monoma).

    Peut-être le régime foncier n'est-il pas exac-tement le même dans ces petits f1pays"·.· Ma,1I!f, s'il

    existe des différences régionales, elles sont noyées

    dans les contradictions que l'on rencontre à l'inté-rieur de chaque villaGe. Par conséquent on pe,ut secontenter de décrire le régime foncier commè valablepour l~ensemble de la région.

    3.- COI1POSITION RACIALE DE LA POPULATIONt 1

    La: région du Noyen Konkure est une zone decontact, où se mélangent des populations d'originesdiverses, qui ont une forte conscience de leur ori-ginalité.

    Les deux groupes les plus importants. sont leEPeuls qui dominent au Nord( Monoma et Soki11)- èt" ..

    les Susu qui l'emportent dan~ le reste de la région

    En dehors des anciens captifs rattachés-aux' -Peuls et aus ~su, d'autres éléments existent, maisne forment pas en général de forts groupements homo-gènes. Certes, il existe de Gros hameaux malinke(Suludera dans le Monoma, Maninkaya dans le Tene),~is, en [énéral, même quand ils n'ont pas oublie'

    leurs origines, ces éléments minoritaires sont dis-

    1

  • - 3 -

    persés parmi les Susu ou les Peuls~ et parfois con-

    fondus avec eux. Ainsi, on trouve dans quelqueshameaux peuls, des cordonniers d'origine malinke(Garanke), des 1l1aobé" d'origine inconnue, desgriots d'or~gines diverses. C'est surtout dans les

    villages susu que se rencontrént des Dyalonke, des

    Malinke souvent.complète~entassimilés ( ce qui estfacile, les Susu et les Malinke étant deux popula~tians très voisines) et d'anciens captifs de Peuls,d'originee très diversEs, échappés à leurs maitres.

    Dans une étude d'ense~ble du régime foncier

    on peut donc négliger cee minorités ethniques., ets'intéresser seulement HUX deux groupes les plusimportants: les Susu et les Peula (I)

    4.- LE PEUPLBrŒUT SUSU: SA MISE EN PLAUE..

    Il est indispens~.ble de savoir comment

    s'est mis9 en place la pcpulation susu, car, nousle verrons, les droits des groupes qui la composentdépendent de l'époque et des conditions de leurinstallation.

    Les documents écrits étant exceptionnels etprobablement, composés récemment, les circonstancesde l'installation des 5usu ne sont connues que pap

    les traditions orales se rapportant à la fondationdes villages et à l'origine des familles. Cas tra-ditions sont peu sares; beaucoup plue que dans lesvillages peuls du Fouta Dyalon, les informateurs

    hésitent, avouent leur ignorance, se contredisent.Cependant un certain nombre dë traite généraux enressortent avec quelque nettet~.

    (1) Les Peuls de la région du Moyen Konkure fe-ront l'objet d'un autre ra~port.

  • . -

    - 4 -

    Premier fait remarquable ( et . s~rpranant):

    ù'l'arrivée des ~usu, le pays était vide, couvertpnr~~

    for~t vierge~ Dans les rares villages ( Khole, Tu-

    manya),on dit que les ancêtres ont, à leur arrivée,

    chassé les anciens habitants (hendé ?);mais presquepartout on affirme qu'il n'y avait jamais eu person-

    ne avant l'arrivée de l'ancêtre-fondateur.

    Deuxième fait: le peupleme~'lt susu est relative-ment récen1t'. Beaucoup de' villa{ses ont été fondés par

    les grands-pères des vieillards actuels. Cependant

    quelques villages sont plus anciens: Sen-ya dans le

    Menoma, Dularutu dans le bokhili, Dumbuya et Khimbi-sin dans le Sugekuru, Sambaya dans le Baren, datent

    probablement de la deuxième moitié du XVlllo siècle.La plupart des autres paraissent avoir été créés en-

    tre 1.800 et 1.860.

    Quelle était l'origine de ces populations?

    Presque toujours les traditions villa[;,eoises lesfont venir du "Fugé" ( = en haut ), c'est-e.-dire desrégions situées à l'Est du Futa-Dyalon. On dit cou-

    ramment que les Kamara sont originaires de Friya tles Silla de Balaya, c'est-à-dire du pays malinkéactuel ( Haute-Guinée ). L'itinéraire Haute-Guinée_

    région du Konkure aurait été parcouru en plusieurs

    étapes par les fondateurs de villages. Par exemple,Manga Yola Silla serait parti de Dyafuna(Haute-Gui-

    née) et se serait arrêté successivement quelque 'part

    dans le Futa Dyalon, puis à Tangan,Kaligalan et Pel-leI Tyeke ( dans le Masi) à Paren et Dulanku (Sokhi-li),avant de fonder Demokhulima.

    1

    Lorsqu'on demande aux Susu les raisons' decette longue migration, ils répo~dent que leursancêtres l'ont accomplie ~ la rechërëhe de' terres

    à cultiver~ ou à la recher·che de gibier .. En' realï.téil est probable que cette migration s'estechèlon-

    née sur une assez longue période ( les trad1tibhs

    attribuant aux fondateurs des villages toutes les ~

  • - 5 -

    ~apes franchies,en fait,au cours de plusieurs généra-tions).D'autre part,les Sussus ne se sont pas dépla-cés de leur plein gré.On sait qu'autrefois, sous le

    nom de Dyalonkés(les Susu actuels connaissent leurétroite parenté avec les Dyalonkés du Sangalnn),ileont peuplé tout le Futa-Dyalon~et qu'ils ~n.ont été

    chassés par les Peuls au 18° Biécle.Il est sans doutesignificatif que de nombreux anc~tres se so1ent,d'a-prés les traditions,"reposés"~~\!lele Sud du Timbi-Tunile Sud du Masi ~t le Sokhil~_:cn peut en déduire que

    les Sus'\1: se'sollt installés dans ces régions quand les

    Peuls ont conquis le centre du Futa-Dyalon,pu1s ont .',-recommencé à fuir quand les Peuls ont repris leur pro-

    gression vers le Sud-Ouest.Dans ces conditions,l'installation des SUBU J

    s'est faite de façon trés désor~onnée.p'ar la suite,etjusqu'à la fin du Igo siécle,la région du Moyen-Konku-ré fut constamment traverséo par des bandes de guer~::~~

    riers et de 'pil~ards venus du }i'uta-Dyalon ou du Laba-ya.Cette insécurité permanente dont le souvenir estresté trés vivace provoqua de nombreuses migrations

    en tous sens ~et,sans doute,la ruine de nombreux cen-tres habités et la disparition de bien des familles.

    Le schema de la fondation des villages esttoujoùrs décrit de la même façon par les traditions'

    oralea:Un homme,venu de plus ou moins loin,le plus

    souvent du "Fugé",construit sa case en un lieu désert.En même temps ~ou peu aprés,d'autres hommes s'instal-lent prés de lui:un nouveau villa[d.e est né. Ses habi-tants se multiplient~chaquegénération accueille denouveaux immit,:,rn11ts.BientÔt, "on manque de placell,etquelques familles partent du village-centre(le "ta"),

    pour fonder des hameaux(dakha),dont la vie est sou-

    vent éphémère,muis qui parfois prennent une certaineimportànc6,sans jamais,cependant,supplanter le· ta;~

  • Tel est le village susu réel,avec son ta et

    ses dakha dispersés au milieu des champs cultivéset des jach2res qui forment son. territoire. Beaucoupde ces villages,trop petits,ont é~é annexés adminis-

    trativement à un village voisin plus important ou

    mieux placé.Par exemple/Knolé a été rattaché à Bambu-khu(Sugekuru),Dulanku à Solenta(Sokhili).En fait ces

    rattachements ont été assez mal accueillis et les ha-

    bitants des villages annexés continuent à s'organiserde façon indépsndante,sauf en ce qui concerne le paie-ment de l'impôt.En particulier,du point de vue qui

    nous intéresse,le territoire des villa~es rayé~ de lacarte administrativ~ continue ~ éxister, ses limites

    restent connues.

    6.-L'ORGA,NI8ATION DU PEn.·LElfJ.ENT SUSU:LES CLANS VILLAGEOIS.i

    On distingue chez les Susu plusieurs groupes,

    désignés par des "lambé" différEnts:Silla,Kamara,Ban-gura,Suma,qui correspondent aux groupes malinke oudyalonke( par exem:;Jle, Bangura se "traduittlchez 'les r·1a-linke,par Sisokho).

    La plupart des Susu qui peuplent la région duMoyen-Konkure ont pour lambé Silla ou Kamara.Les Ban-gura et surtout les Suma sont peu nombreux et parfois

    essaient,en changeant de nom,de s'assimiler à l'un desdeux groupes majoritaires;les Bangura,not~mnent,s'as-'similent volontiers ElL1.X Kamara, considérés comme des pa-rents.~ans tous les villages susu de la région du

    }1oyen-Konkuré,chacun des 1ambé Kamara et Silla est for-tement représenté.On peut se demander si cette dualitésystématique a une signification.

    Mais y a t'il vraiment dualité?En réalittf, lesSilla et les Kamara eux-mêmes se subdivisent en plu~'sieurs branches distinguées par un deuxième nom.Pa!miles Kamara. on distingue par exemple les Kamara-Dosi'(nalea et Simbaraya dans le Téné, Tumanya et' 'Simbàlya' .

    dàns' le Sugekuru),les l~amara-Khalu(Demokhulimadans leSokhili;Kèbale dans le Sikima,Bageya dans le Ba~en)~~··les Kamara-Sanka(Warakalan,Kulibara,Kansa dans le" Tene)etx.De m€me,on rencontre des Silla-Kalasi à Warakalan

    Banguya et Frigiya(Téné),des Silla-Kinsi à Songoroh-ya

    et dans plusieurs villages du Labaya,des Silla-Yale à

  • - 7 -

    Simba1ya,Buma et,Wara(Sugekuru) ••• (I).

    Cette division n'est pas systématique:il existede nombreux Kamara et surtout de nombreux Silla quina portent pas de deuxième nom(mais peut-être l'ont-

    ils oublié?)D'autre part , certains "deuxièmes noms"ont de toute dVidence une origine locale:des Kamarade Khole,de même que des Silla de Simbalya,sont ap-pelés "Kaniya"parce qu'ils descendent de deux ancê-

    tres appelés Manga Kani. A Sen-Ya(Monoma),des Sillasont appelés Sanden-Yi parce qu'ils avaient cons~~ru1t,à l'entrée de la cour autour de laquelle sontgroupés leurs maisons, une case-vestibule appelée

    senden-yi.

    Sauf dans ce dernier cas et dans quelques casanalogues,les informat~urB consultés à ce sujet

    n'ont pas pu m~Fxp~iq~er le sens et l'origine desdeuxiémes noms.

    Il n'est nullement indifférent de distinguer

    oes gro~pes parmi les Kamara et parmi les Silla:ilsontparfo1s des tana différents(2)et sont toujoursindépendants ies uns par rapport aux autres.Du pointde vue des droits fonciers et politiqJ.es,la sépara-tion est aussi marquée,par exemple à Simbalya,entreles Silla Kaniya et la Silla Yale, qu'entre ces deuxgroupes et les Kamara Dosi ou les Bangura.A l'échel-

    le du village,la dualité signalée plus haut n'est ~

    donc qutune apparence.Dans ohaque village,il existeplusieurs groupes qui descendent chacun d'un ancêtre-immigrant,et qui seront désignés par le mot "clan"

    dans la suite de ce rapport.

    --------------------------(I)I1 ne faut pas confondre ces deuxiémes noms,quiétablissent des distinctions entre les Silla,avv~les surnoms glorieux que l'on peut donner à tous lesSilla:Yattara,Damba,Dansokho •••(2)Chaque groupe" a un tana,c'est-à-dire un animalque les membres du gro~pe ne doivent pas toucher.Laplupart des Silla ont pour tana le python,maia les8illa Sokhilikay de Demokhulima ont pour tana la . "hyène.-De m@me,alors que les Kamara ont en généralpour tana le man8e-mil,le tana des Kamara~Yalama estla pe:Nirix.

  • PREMJERE.P!RTI~:, . . .. ......,; ..L'APPRORRIATION DU SOL

    Il s'agit de chercher une réponse aux ques-tions suivantes:-Le sol est-il approprié?

    Est-il partagé'~ntre les villages,communautés

    géographiquement distinctes?Est-il partagé entre les groupes qui composent

    chaque communauté villageoise?Quels groupes:clane,

    familles étendues,ménages,individus?

    -Qui est propriétaire du sol?Tous les groupes ont-ils une part?Y a t'il des

    propriétaires et des non-propriétair~s?

    -Quel est le contenu du titre de propriétaire?Enparticulier,la propriété du sol est-elle aliénable?

    -Comment s'est fait le partage du Bol:une fois pour

    toutes ou peu à peu?suivant des principes systéma-tiques ou empiriquement?

    -Quels sont les fondements du droit de propriété?

    Pourquoi certains groupes sont-ils propriétaires et,éventuellement,d'autres ne le sont-ils pas?

    C'est au sujet du partage du sol et des fon-

    dements des droits de propriété que les réponsesdes informateurs sont particulièrement confuse~;· -

    Le vocabulairelui~même·est··hésitant.Prenons

    par exemple le mot lasiri;demandons qu'elle est sasignification et qui peut être désigné par ce mot.A Songoron-Ya(Téné):d'aprés un informateur,considé-

    ré cowae l'h~~e le'plus respectable du village,un

    seul clan est lasiri:celui qui descend du fondateur

    de Songoron-Ya.D'aprés plusieurs autres informa~ .~ •.teurs ,le mot lasiri s'applique aux trois clans les

  • plus anciennement installés;pour eux comme pour leJ

    premier,le titro de lasiri ne peut être acquis parles autres clans.Enfin,d'aprés un troisiéme gTouped'informateurs,sont lasiri tous ceux qui sont nés

    dans le village,sauf les captifs;le titre de laeiriest donc acquis par les fils d'étrangers.Le mot la-

    siri a donc à Songoron-Ya trois sens différents et

    s'applique,selon lc. snr-s dans lequ~l on l'emploie,

    à presque toute la population ou à une minorité.Or/

    c' (-Jst sur le titre de lasiri. que sont fondé s lesdroits politiques et fonciers traditionnels.

    Il faut donc manier avec beaucoup 4e pré-cautions le vocabulaire susu •r-rais on constate qu.e,m~me lorsqu'elles portent sur des faits concrets,et,

    à plus forto raison, sur l'explication de ces faits,

    les informat~~: sont contradictoires:non seulement

    les villages voisins ou les clans d'un m~me villagese contredisent mutuollement,maia le même informa-teur,à qui on pose deux fois la m~me question, donnesouvent deux répon8es absolument opposées.

    Que signifient ces hésitations, cos oontra-dictions?

    Peut-on simplement les attribuer à l'ignorance desinformateurs?Ce serait étolU1ant,à propos de 'problé-mes qui touchent de trés prés leur vie quotidienne.

    Faut-il penser que l'eSprit des Susu est rebelle àl'abstraction,qu'ils ne sont pas capables d'élabo-

    rer une théorie~ou même d'expliquer de façon cohé-

    rente?

    Ou bien cos contradictions expriment-elles la co-·:.existence de points de vue différents?Et,dans ce caspourquoi?

    A cause de la fluidité du vocabulaire,ducaractère contradictoire des faits exposés par les

    informateurs et de la confusion des explications

    qu'ils donnent,il parait nécessaire,dans l'exposéqui va suivre,de rester trés prés' du concret,c'est-à-dire de COIilli1encer par don-ël.er des exemples. Peut-

    être sera~t'il possible,par la suite,de tirer de cesexemples quelques explicntions générales·

  • - 10 -

    ..

    Ce village est situé dans le Nord du Téne, au

    confluent du Kon~cure et du Mayonkure.

    Les 500 habitants du village se répartissent en-

    tre le ta (Malea) et des dakha dispersés sur le ter-ritoire du village: Lamban, Duguren, Giyafari, Kenen-

    de, Sewaya, Wondekubi, Kunkure, Khoniya-Khori.

    La population appartient à plusieurs clans:

    - 10) Clans anciennement installés.......~--------- -- ....._-------------(Les vieillards actuels sont la deuxième ou

    troisième génération de ces clans née à Malea)

    - Les Kamara Yalama, descendants de Manga SimbiNalé, fondate:ur du village ( d'où le nom du ta:

    Male-ya), installés dans le ta et à Wondekub1.

    - Les Kamara-Dosi Laberaka ( c'est-à-dire" d'enbas Il),descendants de !'1anga,Dumi" et de son frère

    Sura Ansumani, installés dans le ta et à Lamban.

    - Les Kamara-Dosi Fugeraka ( c'est-à-dire" d'enhaut ") descendants d'un parent de 1'Ilanga Dumi'

    dont le nom a été oublié, installés dans le ta et .à KUl1kure: .

    - Les Silla, installés dans le ta et dans' plusieurs

    hameaux. La généalo~ie des Silla et leur' orgahi~'sation familiale sont confuses." Ils descenaènt· de4 ancêtres dont les liens de parehté soht· ïric~r~ .

    tains. On peut distinguer parmi eux, semble-t-il:

    les billa-Sandenkwiles Silla

    Ces clans anéiens ont reçù des îmmïgrahts dont

    ils sont les diyatigi ( hôte qui reçoit ).

  • - II -

    - Les buma, fils de plusieurs frères dont certains

    après avoir séjourné à Malea, sont ensuite par-

    tis fonder Dombele-Susu, dans le Baren.

    - les Banbura, fils d'Ansumani, tous groupés dans

    le ta

    - Des Kamarn et des 8illa d'origines diverses,non ap':Jarentés aux précédents. La plupart d' en-

    tre eux, venus, vers 1930, a l'occasion de laconstruction dU'pont du Konkure, habitent le

    long de la rO I..1.te, à Sewaya, Khoniya-Khori et

    Kunkure.

    Le territoire de Malee est partagé enplusieurs grands s8cte-~1rs qui appartiennent aux

    cinq clans los plus anciens. Les Bangura et les

    Suma ne sont propriétaires que des environs immé-1

    diats de leurs casos ( l ou 2 hectares ,.

    Les autres familles) pour la plupart, habitent surdes terres qui leur ont été prêtées.

    Ce partage est expliqué ainsi: quand les

    ancêtres des 5 clans les plus anciens sont venus

    s'installer à l' om ,laC€F.lent actuel de Malea, les

    environs étaient inhabités, le sol vierge. Qh..?$~

    ~cêtre a défr~ché do son côté et est ains~ftevenu

    E~r).._~.t.~~r..~."..Q.:~ cl0!!!ê:-.ip....§. qu 1 il a légué à ses des-cendants. Lorsque les autres clans sont arrivés,

    tout le territoire de Malea avait été d~friché et

    approprié.

    Los traditions ne disent pas si les sec-

    teurs ~ défricher ont été choisis librement par'

    chacun des ancêtres, ou répartis entre eux par" lepremier, Manga 8imbi Male, fondateur du ta; Mai~-~

    il semble certain que le partaf',e dû 'sol' est 11:0" ré-

    .ê..~J..:t~~t..,.~~.d.él.r.i.9)1_e!fi.~l1~: Il Parto ~t où IJlailf,a: Dum1' "

    --------------_---lll=\_~n.éAc1f''1,..~iL(Cll.h1Jéa........---.nnou s somme s proprié taire-' s. disent les

  • .... :ta lOI

    Kamara Dosi Laberaka. Et les membres des autresclans parJ.~nt de même: " Ct: que chacun a défriché

    1

    lui appartient, puis appartient à Bes :fils ".

    Dans ces condi~ions, on peut af~irmer que ~~im;tesdes secteurs n'ont ~as été f~xées à l'avance, maisse sont trouvées placées là où les défrichementsse rencontraient. La forme des secteurs, la situati-

    on des limites ( qui le plus souvent ne tiennent pascompte des limites naturelles) témoignent dans lemême sens.

    Les limites du territoire villageois..... _-~---------.--_ ........ -Au NOrd et à l'Ouest, le territoire est bor-

    dé par le Konkure, difficile à franchir et qui cons-titue une limite :naturelle très nette.

    A l'Est, la limite actuelle est tracée pa~le Mnyonkure. Toutefois cette rivière n'est pas unobstacle comparable au Konkure. D'après des informa-tours de Malea, le territoire du village englobaitautrefois, à l'Bst du Mayonkure, des hameaux aujour-d'hui abandonnés.

    Au Sud, le territoire de Malea touche celuide Yateya. Les Kamara-Dosi Laberaka, dont le domai-ne borde cette limite, disent que leur anc8tre

    Manga Dumi avait envoyé son jeune frère Sura. Ansu-mani fonder 10 hameau de Lamban et défricher tout~autour 1/ afin d'empScher les gens de yateya· de ve-nir sur nos terres ". Ceci semble" sous:"en'tenarequ'une limite avait d'abord été fixée entre 'les" -deux villages, et que les habitants dé Malea èràl-gnaient les empiètements de ceux de-Yateyâ~·MalsJdans ce cas, pourquoi la limite est-elle'sitüéè··· .beaucoup p~us près de Yateya que de Malea, et pour-quoi ne suit-elle pas une limite naturelle, parexemple le cours d'un des petits affluents duMayonkure ? D'autre part, si des limites avaientété fixées à l'avance, les gens de Malea n'auraientcertainement pas refusé de prêter des terres àleurs voisins. Il est donc vra{semblable qu'en réa-

    lité, c'est en défrichant que les Kamara-Dos1 Labe-raka sont devenus propriétaires des environs de

    ------------------

  • Lamban,agrandissant du même coup le territoire deMalea.Cette hypothése·n'exclut nul~Gment,bien au

    contraire, que l'emplacement du hameau ait été

    choisi à dessein.

    Vers le Sud-Duest,du c$té de Warakalan, la

    limite est incertaine.Certains habitants de Malaa

    disent qu'elle est tracée par le ruisseau Sonye-Khimbisinde; d'autres la placent le long du Dor ... __

    re~QU m~me du Fandyefikhu, situés plus au Sud. D'a-prés les habitants de vIarakalan , le Spnye-Khimbisir..·

    de est l'ancienne limite, "mais un jour ceux de Ma-lea sont venus cultiver entre le Sonye-Khimbisindeet le Demukuro( sans que nous nous y opposions); de-

    puis, la limite suit le Demukure " • .J!}n réalité, ac-tuellement, le terrain situé entre les deux ruis-seaux est occupé par' des Peuls qui y ont fondé le

    hameau de Yorongobaya; de là, sans doute, l·incerti~·

    tude dos habitants de Malea.

    Il semble donc que les lirni!ïp.s ri " Malea n ~0tllp~s, été fixé.es.!. J..' avanc~, par accord avec les " "gas voisins, mais sont le résultat des défrich6-ments et de l'occupation agricole effective. Le ter·-ritoire do Maloa s'est formé en marne temps et de la

    m8me façon quo los secteurs claniques ·qui le compo-sent.

    La situation, à Malea, est simple: le partagrdu sol a été réalisé entre les ci"1 l • '-i_dns anc1eüi;l,dont les ancêtres ont défriché 10 sol vierge. Lesfamilles installées plus récemment acceptent cette

    situation; 'il n' y a pas de conflits .~lais cette sim-

    plicité, cett~ absence de conflits sont en réalitéexceptionnelles. L'exemple d'autres villages va lemontrer.

    WAR~AN ( Tén~ 2

    A Warakalan, quatre clans sont d'accord pour

    se dire les plus anciennement installés ( leurs an-

  • c~tres sont arrivés, con~e à Malea, il y a 100 ou

    I20 ans ) • Ce sont:

    - Les Silla-Kalasi, descendants de Manga Mori, lefondateur du village.

    - Le s Bangura.

    - Les Kamara-Sanka.

    - Les Silla, descendants de Manga Musa, qui était

    Mal1nke.

    Point de vue des clans anciens.r •

    Diaprés les membres de ces quatre clans, les. droits fonciers sont répartis de la même façon qu'àMalen:

    - Les quatre olans anciens sont propriétaires, cha-

    cun, d'un secteur du territoire.

    - Leurs droits sont fondés sur le fait-que leursano~t~e ont défriché ces secteurs.

    - Les Silln-Kalasi estiment qu'ils avaient, à l'ori-g~e, une certaine priorité sur les 3 autres clans:Mange. Mori., délégu~ par ses parents de Banguya " àqui appartenait t'ou.te la région ", aurait donné auxancatres des 3 autres clans leurs secteurs. Mais cessoctours n'étaient pas encore défrichés, et ~es S11~~la Kalasi reconnaissent qu'an les défrichant, les3 autres on sont devenus ~eUlG propriétaires.

    -Les autres c~ans, venus plus tard et n'ayant riend~fr1ché, ne sont propriétaires que des emplace-ments de leurs cases et jardins, y compris ceuxqu'ils ont abandonnéset où subsistent des arbresfruitiers.

    Point de vue des clans plus, récemment ~nstallés

    Contrairement à ce qui se passe à Malea f lesclans plus récemment installés se disent propriétai- '

    res légitimes, non seulement des terrains qu'ilsont bâti. et'o·pJ.anté f mais dL's parcelles environnantessur des étendues assez grandes pour qu'ils puissentorganiser leurs cultures de plein champ et leurs

    jachères sans avoir besoin d'emprunter des terres.

  • C'~st ainsi que:

    Seydubn Silla se dit propriétaire, avec ses

    frères et ses fils, d'un domaine assez grand pour

    pouvoir prêter des parcelles. Il dit que les Si~_-

    la Kalf',si et les Ramara - Sanka lui empru:atent par-

    fois des parcelles. ll.~~l?..ait pas comment sa famil-

    le est devenu' - propriétniro do ce domaine.

    Alm8:...mi Bokari $i:q..~ cf.,i t que 10 hameau abandonné

    de Buramaya, qui avait été fondé par son ~rand frè-

    re, lui appartien«, -ainsi que les terrains environ-nants. Cos ter'rains auraient été dQ.nnéf? à son grand

    frère par les Silla. Mais ces derniers disen~ que

    les terrains situés autour de Buramaya n'ont été

    que pr~tés, et qulAlmami Bokari est propriétai~e

    seulement de l'ancien haAeau, où ~es arbres frui-

    tiers avaient été plantés.

    Musa e~...ad.B._Ka:n!.~~.ê:. se di~:ènt propriétairesde terrains assez étondus, Quj. leur auraient été

    donnés par les Bangura; Ulle partie do ces terrains

    auraient été donnés neu défrichés.-,--....~_.-- --'"""'- ..._......_- ...._-Enfin, Al:f.:'î. S_'tY.du., c~wf dl un clan numériquement

    trés important, prétend ê'~re propriétaire, autour

    du hameau de ]\andyefikhe, dl un vaste.; domaine: à

    peu prés la moitié Nord du sGctGur qui, dIaprés les

    quatre clans anciens, appa~tien.r-, ~ aux Kamara-Sanka

    Interrogé sur l'origine de son droit de pr0priété,

    Alfa Soydu déclara d'abord: "Là 'où votre père tra-

    vaillait, vous êtes propriétaire ". Puis, à la

    question \1 Votre père était-il propriétaire et pour--

    quoi 11 était-il? ", Alfa Seydu répor. dit que son

    clan était propriétaire à la suite d'un partage du

    territoire entre les grands pè~es des vieillards ac-

    tuels.

    Alfa Seydu met donc son clan au rang des clans

    anciennement installés. Il assure d'ailleurs que

    son grand-père est né à Warakalan, ce qui est con-

    'te sté par le s membre s (~e s autre s clans, d' apré s le s-

    quels c'est seulement le père d'Alfa Seydu qui, né

    dallS le Sokhili, est venu s'installer à \'larakalan.

    A propos des prétentions d'Alfa Boydu, il est

    intéressant de notor la position trés hésitante des

  • '.

    Suma. Ces derniers acceptent en princi.Je 1e point devue des quatre clans anciens, selon lequol ces qua-tre clans sont los seuls propriétaires. Toutefois1es Suma disent que, s'ils veulent cultivûr des ter-res vers li'andyefikhe, ils demandent l'autorisation

    de le taire à Alfa Seydu, qu'ils reconnaissent donc,implicitement, comme propriétaire.

    De telles,contradictions sont fré~uentea. Onles rencontre, à vrai dire, dans la plupart des vil-lages.

    Les clans installés à une date r~lativament récentefondent leurs prétentions sur plusieurs arguments:

    - pa.rfois ils disent être a:!:!.~•.~~.~ que les au-treset avoir participé au défrichement, donc au

    partage.

    - ou bien ils disent que le terrain leur a été ~~, défriché ou non, par un des clans anciens.

    - fr6que~~ent, celui qui se dit propriétaire se con-tente de déclarer: Il Tcl terrain m'appartient,puisque mon père y travaillait." L'habitude d'u-tiliser un terrain suffirait donc à fonder ledroit de propriété.

    Le cas de ce village est encore pluscomplexe que celui de Warakalan.

    IO L La ~i tuq.t i.t?l!....~.f!.~~ÈJ..q_~.!!..·L la . m~F.l~...9..'!:.~à..~AE!kalan:Les clans peuvent être classés en deux groupes:clans anciens dont les ancêtres ont fondé le villa-ge vers 1800 ( Silla-SokhilikaYt Kamara-IChalu, Ka-mara-8agalandyi, Kamara ) et clans installés depuisune ou deux générations ( Aydara ou Sherifu, Il des-cendants du Prophéte Il; Kaba,malinke et Sisakho,griots malinke ).

    Comme à Warakalan, les membres des 4 clansanciens disent que l'ensemble du territoire de De-

    mokhulima a été partagé entre leurs anc3tres; ~ ,

    _____________----.::-9U:=:O.:::::cl:;.s=:n.:=estJrr2J?..rj.étair~.s terres_d.éfrichéee par

  • son ancêtre et par ses captifs, qui étaient ici,ot sont encore, trés nombreux: le chef de clan ins-tallait un groupe de oaptifs dans la brousse, fon-dant ainsi un hameau; tous les terrains que lescapt~fs mettaient en valeur autour du hameau deve-na~\ propriété du clan de leurs maitres. Ce partagea abouti à la formation de quatre grands secteurs;mais les enclaves sont nombreuses, et, par endroits, .

    les limites sont fort enchevêtrées.

    D'autre part, entre l~s. clans anciens etcertains des clans récemment installés existent les~. .. •......-..---.'--*-.-~.--..-.-.- ... -----

    mêmes divergences de vue qu'à Warakalan. Notammœnt,les Kaba so ~isont seuls propriétaires d'un bas-fond situé 10 long d~ ruisseau"Demukuro, et d'unegrande étendue de brousse sur la montagne Kantambu;ces deux terrains leur auraient été donnés par lesSilla et les Kamara-Sagalandyi. Mais les Silla etles Kamara-Sagalandyi disent avoir seulement prêté

    oes terrains.

    2°) Nais un certain ~bre de. faits eXistent ici,gui, n'ont pas été oR§...ervélL~ vlarakalan.

    Dons reconnus de terrains. ..... --Les membres des clans anciens reconnaissent

    que des terres ont été données de façon nette et dé-

    finitive aux autres clans. Par exemple:-les Kamara-Sagalandyi, en accueillant le grand ma-rabout Mamadu Hafiya, grand père des·Sherifu ac-

    tuels, lui a donné un champ de riz,puis deux gr~ndsmorceaux de brousse non défrichés.

    -les Kamara-Sngnlandyi ont aussi donné des terresaux griots Sisokho, venus auprés d'aux quand ilsétaient chefs du Sokhili.

    -nul ne conteste aux Kabn la propriété .d'un terrainproohe du ruisseau Solima.

    -les Silla ont donné aux Kamara-Sagalandyi un ter-rain situé prés du hameau de Kumbeleya.

    Dans chacun de ces cas:- le t~rrain donné avait déja été défriché par l'an-

    cien propriétaire ( sauf certains terrains donnésaux Sherifu ).

    - lao bénéficiaires sont pleinement propriétaires:

  • les donnteurs ne peuvent reprendre les terrainsdonnés. Seuls, las nouveaux propriétaires peuvent

    disposer de ces terrains, los prêtrr ou les donner.

    Par exomple, en 1958, Bamàdu Bobo Silln n domnndéaux Knmnrn-Scgnlandyi unü p~rtiG du terrain, situé

    prés do Kumbelüya, quo les Silla ont autrefois donné

    nux Kamarn-Sagalandyi.

    ~~.Usnge de l~ocontrainte.

    Il a pu arriver aussi que des terres soientprises de force pnr un clan plus puissant qu'un au-t~e. O'0st ainsi que °les Knmar~-Sngnlandyiauraient

    profité de la puissance que leur confèrait ln chef-ferie pour s'emparer de pnrc~llos qui ~pparton~ient~ux nutres c~ans ~nciens.

    Dro~ts_fimi~ents des Silla-Sokhilikny

    Arrivés les premiers dars ln région, lesSilln. "Sokhilikay" ( c'est-à-dire: habitnnts du 80-

    khili ) sont reconnus comme étnnt les diyatig1 (hS-te qui reçoit ) de tous los ;:.ut-o-es clans. Il ost ad-mis qu'il.s ont désie;né aux autres clans venus aussi-tôt nprés eux des secteurs de brousse viorge à dé-fricher.

    Les °Silla-Sokhilikay estiment queOleur si-tuation de premiers occupants leur donne des droitssupérieurs à ceux des trois nutres clnns défricheurs.

    Aussi affirment-ils volontiers qu'ils sont les seulsvrais propriétaires du sol, et qu'ils ont seulementprêté aux autres clans le sol des secteurs à défri-

    cher. D'aprés les Silla-Sokhllikay, par conséquent,le fondement de la Il vraie propriété n .du.sol estl'occupation, au sens le plus va6ue du terme: simpleprésence dans une région, snns ln prisa de possessionréelle que constitue Ole défrichement.

    Cette notion de propriété fondée sur laseule ancienneté de l'occupation, notion que l'onpeut appeler propriété éminente, est trés vivace

    dans l'esprit des Silla-Sokhilikay, mais on n'entrouve aucune trace dans les propos des membres desautres Clans, et l'attitude pleine de contradictionsdes Silln-Sokhilikay eux-mêmes indique qu'elle est

  • à peu prés vide de tout conten~ réel. En effet:

    Les mêmes informateurs, membres du clanSokhilikay, disent tantôt qU'ils sont les seuls vraie

    propriétaires et que leurs anc~tres ont seulement

    pr~té des terres a~ nutres clans, tantôt que ces ter_res ont été réellement données par l'ancêtre des

    Silla à ses gendres, ancêtres des autres clans, qui1

    les ont défrich~ et en sont~ de~uis, les seuls

    propriétaires, de même que les Silln sont proprié-taires du reste du territoire.

    D'autre part, même 2orsqu'ilsse disentseuls vrais propriétuires, les Si11n admettent, sansprotester, que les autres clans agissent en proprié-

    taires: ils disent par exemple que les Kamara-Saga-

    landyi ont donné des terres aux Kabn. et aux Siijokho.Ils reconnaissent que, si des étrangers veulent~

    l-\...tiliser une parcelle situ0e dans le secteur attribué

    à un autre clan, c' e st· -à un membre de ce clan qu'ilsdoivent en üem~n~er l'autorisation, par exemple, aux

    Kn.mara-Khalu.

    Cette notion de propriété éminente des

    Silla-Sokhilikay, avec 16s contradiotions qu'ellesouléve, se retrouve dans les autres villages susudu Sud du ~okhili: co(lectivement, tous les 8111-

    Sokhilikay se considèrent corame seuls vrais proprié-

    taires du sol du Sokhili.Notons enfin que, bien que

    co droit exclusif que s'attribuent les S1lln-Sokhi-likay soit purement théorique, et bien qu'ils en

    aient conscience, certains d'entre eux tiennent àaffirmer Ëlvec force leurs prérogatives de premiersoccupants. Il nrrive que cette affirmation provoqueentre eux ct les autres clans des discutions trés

    violentes.

    VILLAGES DU SUGEKURU.

    La même opposition entre ln notion de

    propriété éminente fond~e sur la simple présence

    du premier occupan-c, ct les droits acquis par l' ('c-cupant réel, le défricheur, se rotrouve, sous une

  • forme un peu difftrente, dans le Sud et le sud-Eut du Sugekuru, où un désaocord oppose, de façontoute platonique d'ailleurs, les habitants de Tama-lan à ceux des villages voisins.

    Point de vue des habitants de Tnmalan....... . . .Le villC'.[,

  • ·- .

    , .

    et dans les autres villages du Sokhili,oppositioa

    entre-Jlcux notions de l~ proEriété foncière, fon-dées l'une sur lu première installution, l'autresur le défrichement. Muis, ici, l'opposition existe

    non pns entre les clnns venus les uns nprés les au-

    tres d l'intérieur du même villnge, mais entre desvillages créés les illLS aprés les autres duns la mê-

    me région.

    Dans cette partie du Sugckuru, la situa-tion est pnrticulièrement compliquée ~ Garnma, où

    existent:I?des contest~tions entre villages:

    Garnm~ est un hameau importnnt, fondé par des hom-mes venus de Simbnl~a. Ses hnbitnnts exploitent, au-tour du hnmenu, un petit terroir situé à l'Est de

    Tum~y~ et nu Nord de Bubuyn. Lu propriété éminente

    du soL.de ce terroir est revendiquée à ln. fois pnr1

    les villagoB de Tr~~lnn, Tumnnyn et Bubuya. Quant~ux hnbit~nts de Gnrnmn, ils nffirment en génér~l

    être les seuls vrnis propri~tn.iros du sol, disnntque, lorsque Ansumcni LegotiKnmnrn n fondé Gnrnma,vers 1860, il nie demnndé à personne l'nutorisntion

    de s'instD.l1er~ ut que 10 terroir, vide, n'nvnitencore j~n.is été défriché; pnr conséquent, le solnppartient :-'.L~X h~bitants de Gal"runn., dont les envi-rons sont simplemûnt une partie du territoire de

    Simbrüya,. tn d'origine de presque tous les hnbi-tnnts du hr.menn ..

    Cepcnd~nt, lorsque je l'interrogen.~ à cc su-

    jet/pour ln qu~trième fois, le chef nctuel de Garn-

    mn, n.prés un long silence, déclnr~ que Il le terri-toire c.ppr.rtiend à Bubuy:l. Il. Suivirent des explicn-tions contradictoires: ceux de BubuY0 nous ont don-né ces terrains ... ceux de Bubuy~ nous ont prêté cesterrnins.

    Un ~utre habitant de G~r~m~ déclnre que,lorsqu'il s'est installé dnns le hnmenu, il n lui-m~m(; demandé nux gens de Bubuyf'.. des parcelles si-

    tuées dnus le terroir que cultivent ~ctuellcmont lesh~bitnnts de Gnr~n.

    I~ semble donc que ce terroir n appnrtenu

    à Bubuyn. l'1:1is '~ujourd 'hui les hnbit:1nts de G:Ilramni /

  • - 22 -

    y ngissent librement, en propriétnires.2°)des contestations entre les cl~ns in6~alléa à_____._ 1_-'· ._. __ \Gnrnm.;:'.., identiques ù celles signnléen ~1. propos do

    Domokhulim[\..:

    - les Knmnr~-Nynkhosoé, descendants du fondateurAl1sumnni I.egeti, se d:l.sent seuls v~j s:-proprié-tnires do tout le terroir de G[\..r~m~, parce que

    prenuers occupa.nts.- d'~utres clnns: K·~nr~-Sng['..l~ndyi, Knmnrn-Dosi,

    Silln-Kolan, disent être propriétnires des pnrcol-les défrichées par leurs nncêtres rospectifs.

  • GBNERALI~ES

    LA NOTION DE PROPRIETE...-.- ..... _...... -_..-.-.- .........FONCIERE'

    De l'étude des exempleaprécédents: Malen,Wnrnknlnn, Demokhulim~, et les villages du Sugekuru,il ressort que, dnns ln pl~lpart des villuges, exis-

    tent des contradictions plus ou moine complexes qui,

    d'une fnçon génér~le, opposent les cl~s les plus an-ciens à qeux qui se sont instnllés plus récemment. Cescontradictions portent sur l~ question: Qui est pro-

    priétaire? A cette question sont données dee réponsesdifférentes, auxquelles correspondent des notions dif-férentes de l'oriGine, des fondements et du contenu

    'de l~ propriété fonoière.

    LES FONDE~mNTS DU DROIT DE PROPRIETE

    1,0 )le8 droit,a du Il premier o,ccupnnt "; propriété é-minente,.

    Il fe.ut entendre ici, pnr "premier occu-pant ", celui qui 3'est instnllé le premier dons unerégion donnée~ ~t ses descend~nts. Nous nvons vu quedans cert~ins villnges, les "premiers ocoupnnts ll sedisent seuls vrnis propriétaires du sol. Ils slnttri-

    buent le. pro.)riété de V2.stcs surfaces, hors de propor-

    tion avec celles qu'un clun peut réel~ement utiliser.Le principe \1 ln. terre r.'.pp~rtient nu pre-

    mier occupnnt Il est soutenu, soit pnr les·hnbitn.nts du

    villnge qui est le plus ancion dnns une région doru~ée

    ( Tnmnlnn dnns le Sud-Est du Sugekuru, Snmbnyn dnns leNord du Bnren ), soit pnr les membres du clnn le pl~snncien à l'intérieur de certnins villages ( Demokhuli-

    ma, Gnrc..ma, Songoron-yn.).

    Il fnut noter que ce principe n'est pns con-nu dans de nombreux villages: il ne l'est pna à Malan

    ni à Sen-yn, ni à Warnknl~n, où pourtnnt les Silln-Kn-Insi, descendnnts du fondateur du villnge disent qu'nu

    trefois toute ln. région npp~rtenc~t nux Silln-Knl~Bi

    de B~guya.

  • -"

    , -'

    L8 droit de propriété éminente fondé surce principe est essentiellement collectif: tous les

    Silln-Sokhilik~y de l'ensemble du Sokhili se consi-

    dèrent collectivement comme seuls propriétnires du

    sol et ont prôté des secteurs nux clnns venus nprés

    eux. Ainsi, lorsque l'nncêtre des K~nr-Sagnlnndyi

    s'est instnllé à Demokhulimn. les terres qui cons-.tituent le domaine nctuel de son clnn lui ont été

    attribuées pur trois nncêtres des Silln-Sokhilikny:

    Mnngn Yoln de Demokhulimu, Mori Bokari de Dulnnkuet Ynngi Boknri de Solentn.

    Ln notion de premier occupnnt, lorsque

    " occupntion " signifie simplement présence, esttrés vngue et exclut toute possibilité de défini-

    tion de limites précises duns l'espnce: sauf lors-

    qu'il existe des barrières naturellos infr~nchissn

    bles, où s'arrôte exo.otement lt l'occupntion " de

    tel clnn ? En fnit, le8 "premiers occupnnts " sonttentés de pIncer trés loin les bornes théoriques de

    leur domaine: d'aprés certains informnteurs, le

    droit éminent des Silln-Sokhilikny s'étend en de-

    hors du Sokhili, bien loin nu Sud du Konkure:" D'i-

    ci jusqu'à'ln montngne Forko, dans le Knniyn, prés

    de Kindyn, on demande des terres nux Sokhilikay."

    Duns chaque villGge, plusieurs ancêtres

    sont venus à ln même époque, o.ussit6t nprés lefondateur, parfois marne avec lui. Le groupement

    étnit, en des temps trOUblés, ln condition nécess,"ü-·

    re d'une éxistenc e rElativement sùr,:!.

    D'aprés les trnditions ornles, les clnnsissus de ces nncGtres ont, avec ou s~ns l'nide de

    oaptifs, défriché pour ln première fois le sol au-

    tour du villnge récemment construit. Ces clnns se

    considèrent COll~e seuls propriétaires des secteursqu'ils ont défrichés.

    Le principe Il ln terre nppnrtient nu défri-

    cheur et à ses descendnnts ", contrairement ~u prin-dipe " ln terre nppnrtient nu premier intnllé " im-

    plique un Enr~nge du territoire: le défrichement,

    fait pur plusieurs clnns qui travnillent chacun de

  • -.r

    . .-'

    ..

    .!'son ooté, 0.. pour conséquonce IlnpllFopr-iatiol1 pa.rchaque clnn soit d'un grnnd domnino d'un seul tenant

    ( Mnlen, Wnrnknlnn, Sen-yu, Songoron-ya ) soit,

    moins souvent, de plusieurs parcelles de ta~lle ir~égulière dispersées sur :e territoire du villnge( Simbalyn, Q~rnmn ).Deux f~its montrent que le par-tage n été fnit n posteriori, est un résultat du dé-

    1frichement:

    - les limites sont souvent conventionnelles, ~ s'ap-puient pns, trés souvent, sur des limites nnturelles-

    1

    - les secteurs sont d'étendue trés inégnle, selon,

    sn.ns doute, ln n .•puiss8.nce Il des clnns ( nombre demembres, nombre de cnptifs ).

    Le principe " ln. terre n.u défricheur l' 1 •

    existe dans tous les villages; il divise ln popula-tion de chacun en deux catégories: d'une part 3, 4ou 5 clnns nnciens, défricheurs et propriétnires,

    d'autre part les clnns instnllés plus récemment, qui

    sont venus nlors que tout le territoire nva1t déjnété défriché et qui, pnr conséquent, n'ont pu deve-nir propriétnircs •

    Le titre de " premier occupnnt Il est eou..:

    ventnppliqué à tous les clnns défrioheurs'( et nonpns, seulement, nu premier d'entre eux ); mais ici

    • J 1

    l'expression n'a p~s le même sens que précédemment:

    elle implique, non ln simple présence, mnis ln prise

    de possession réelle du sol pnr sn mise Cil vnleur: .'chnque clun devient propriétnire pnrce qU'il défri-

    che.

    Dans les villages où les de~ oonceptionsde l'origine de l~ propriété coexistent, elles s·op-posent~ et leur opposition peut entraîner des contro-

    verses violentes, bien que portnnt en f~it sur des

    problémes théoriquGs.

    Il est d'ailleurs probable qu'en rénlitéle principe " l~ terre o.u défricheur 11 n'exclut pns ..

    totnlcment le principe Il ln tarre n.u premier instal-lé ", mnis l'étend simplement à plusieurs cInna. Ilest possible que les cl~ns anciens se considèrentCOm;)0 propriétnires non seulement dés terres qu· ils

    ont réellement défrichœs üo.,;ï.o de:' tout ,le Iosetht~Ù1J"

    duns lequel ils ont défriché, dopuis leur instnl1nt~

  • -.'

    ~\ de nombreu.sos po..rcel.les. Llexexnple de S~-yamontre en effet quo ce partage est un fnit tr~sancien, donc peut-être antérieur à l'nchévement

    du défrichement. Le territoire que les h~bit~ntsde Sen-yn considèrent comme leur est pnrtngé cntrois grnnds secteurs qui npp~rtiennent aux tr,is

    cinna défricheurs: Silln, Bnngura et Xnmara. Naisle~ secteurs B~ngurn ot Knmnrn sont en rénli~é oc-cupés pnr les Peuls du vill~ge de Snnsnndyi. Or Snn-

    sandyi ost un vill~ge presqu'nusSi nncien que Sen-

    yn, et il est douteux que les habitants de Sen-ya

    nient pu défricher entièrument leurs secteurs nvnntln création de Snno~dyi; ces secteurs étaient doncnppropriés avant-môme d'être complétement défrichés.

    Il en résulte ln possibilité de contes-tntions entre cl:o.ns, mf:a.e lorsque le principe Il 10.

    terre nu défricheur II est admis. Souvent, les mem-

    bres des clans recermüent immigrés disent ~voir défri-

    ché t~lle ou telle pnrcelle, encln~ée dnns le ~omaine d'un clnn ~cien, et en être par conséquent pro-priétnires légitj.IDEF3. I~_ f.'1ut reconna.itre que l'expres-

    sion Il brousse non èéfrichée "( wondi ) 0. en fait unsens trés éliJ.stique. Pour los Susu,Icornme pour.lesPeuls, le mot wondi signifie théoriquement forêt

    vierge, mais il désigne souvent des paroelles quin'ont pns été utilisées depuis assez longtemps ( 50nns ou plus ) pour que ln végétation nit repris, ap-proximntivement, l'nspect d'une forêt vierge.

    3° )los C?J...0.~s~".i.1.l8.t~~1.1.t4.s.~~~mment sont-ils prop'riétni-

    ~

    Nous nvons vu que dnns plusieurs villages,

    des cl~ns installés depuis une ou deux générationsseulement se considèrent comme propriétaires des par-celles où sont leurs cnses, leurs jnrdins et leursèhnmps; souvent ils prétendent jouir de la pleinepropriété d'esp~ces assez étendus pour faire fnoe àleurs besoins tout en mnintennnt une rotation normn-

    le de champs cultivés et de jnchères. Ces préten-

    tions, qui le plus souvent ne sont pas admises par

    les clnns nnciens, sont basées sur trois arguments:

    - tel clnn réce~ment installé affirme nvoir défrichépour ln première fois une p~rcelle ( mais un clnn an-

  • ..

    "','t"

    - 27 -

    cian soutient que cette parcelle avnit déja étéutilisée ).- de nombreux informnteursse contentent de dire

    qu'ils sont propriétaires do telle parcelle Il par-

    ce qu'ils ont touj~)Urs vu leur père y trnvailler "ou bien" purce qU'ils l'ont héritée de leur père ";

    et ils ajoutent qu'ils ne snvent pas pourquoi leur

    père en était lui-même propriétaire. Ces informa-teurs admettent donc, implicitement, que le simplefait de l'utilisntion crée un droit,' que ln posses-sion crée ln propriété; que l'usucapion est possible .

    . Le principe de l'usucnpion n'est jn.mais admis pa.r

    los cl~ns Qnciens.

    - souvent, l~s membres des clans récemment instnllésqui se disent propriétcires ne se contentent pns del'explicntion précédente; ils disent que leur domai-ne leur a été donné, déja. dé triché ou non, pnr un

    clan nncien. Cette affirmation paso, dana chaque cns,U11probléme pratique: le clun ancien eat-il d'a.ccord?o.-tlil réellement donné?

    Le plus souvent, il est difficile de savoir

    si ceux qui ~ffirment être devenus propriétairesd'une pnrcelle fondent leurs prétentions sur un don

    ou sur l'usucapion. Voici, à titre d'exemple, ce quedisent des informateurs de Yengisa ( Baren ): " Karn.-moka Mnm~du Silln ( fils du fondnteur du villnge) n.fnit venir prés de lui Knrnmoko Dyan Knmnrn. Donc il

    deva.i t lui donner une· place pour trnvr.-.iller. ~ •Et là

    où un Knmara. tr

  • -,:.-

    .-

    L'ALIENATIOlif......-------Théorigu~~, l'aliénation, le passnge

    d'une parcelle dos mains d'un propriétaire à celles

    d'un autre, est-elle concevable?

    - si ln propriété du sol est réservée aux descQn.d~nts de celui qui est venu le premier hnbiter d~s

    une région, si ln notion de propriété fonoière estinhérente à 10. quo.lité de premier illsto.llé, le droitde propriété est évidemment inaliénable; son titu-laire ne peut changer que si la desoendance du pro-

    mier installé s'éteint.- il en est Bans doute de m~me si on admet le prin-

    oipe " 10. terre uu défrioheur ot",à ses descendtmtslt

    Noua avons vu, d'ailleurs, qu'il est s~ns dOQte il-lusoiro de vouloir distinguer absolumont les droits:ron~és sur le défrichement de ceux donnés par la ......simple" occupation II( au sens le plus vague de etG

    mot J. -Oependant on peut estimer que celui qui aacquis ln qunlité de propriétaire pâr son trn~ilpeut en disposer à Bon gré, et notamment ln doftfter.

    - si le droit de propriété se oonfond simplementavec l'utilisntion hnbituelle, rien ne s'oppoae auprincipe de l'aliénation, bien nu contrnire: celuiquï se considère comme propriétaire d'une parcello

    que ni lui ni ses ascendnnts n'ont défrich6e admetpnr là-même, nu moins implicitement, que cette par-cGlle a chnngé de propriétaire.

    C'est sur 10.. bnse du principe" ln. terre

    a.ppnrtient nu premier installé " que los habitantsde Dombele· ( Bnre!1 ) m'ont dit: "Le sol o.ppnrtient~ux gens de 8amb~ya.lls nous l'ont prêté seule-ment: ln terre ne se donne pns ". filnis je doie sou-ligner que l'~n ne m'a. j~~is, ailleurs, présentéun obsta.cle de principe nussi définitif.

    En général, l'expression Il donner. ln. ter-

    re " est ndmise, et co-qro.mment employée. Mais, ,sou-vont, elle est équivoque4 et désigne un pr3t aussibien qu'un don véritable. Pourtnnt, ln distinction

    entre pr3t et don est en principe claira, et, dans

  • -,,:-

    certains cns. aucun doute n'est possible.

    Le don et le prat.......,.-.. . ...

    Parfois, les deux parties sont d'accordpour reconnnitre qU'Q~ terrain a été donné. Qunnd,à Demokhulimn, les ~nmara-Sngalnndyidisent avoir .•donné des terres aux bherifu, cela signifie que las

    Sherifu ont reçu tous les droits que les ~amnrnSagnlandyinvaient sur ces terres. Si un ~nmaraSngalandyi veut un jour cultiver une parcelle do

    ces terres, il devra en demander l'autorisation auxSherifu. Il slagit bien d'un cadeau, qui a été of-fert à un grand-marabout, le grnnd père des Sherifuactuels, e~ signe de gratitude pour llenseignement

    cornni~ue qu'il dispensait à de nombreux éléves.

    Au contraire, lorsqu'un homme, habitantdans un village demande à un propriétnire d'un vil-

    J

    Inge voisin une parcelle qu'il uti1isern pour uneculture ~uelle ( riz par exemple ), il est bienentendu qu'nprés la récolte le terrain reviendra au-tomatiquement au prêteur, qui reste le seul vraibokhi'kandyi ( propriétaire du sol )tandis que lecultivateur est seulement, tant que la réoolte estsur pied, khe kandyi (propriétaire du champ tempo-rnire ).

    ~~coup moi~s clniro GS~ ln situntio~ en-gendrée per .1 1 insta.l:l:illEn d ~~_.immigrnnt df'l..!ls ;up.villng~. Cet étr~ngor a une maison, un jardin, deschnmps.Le sol luia-t'il été donné ou seulement pr3-té? Il existe toute une gamme dG réponaùB à cettequestion.

    - 10 terrain a été prêté4 et le propriétnire peut lerepr~ndre s'il veut, et expulser l'étranger de Ba

    1cnse.

    - le terrain a été prêté, mais le propriétaire nepeut le reprendre ni à l'immigrant ni à sos fils.- le terrain [1. été don:né à l'étrnnger qui en estpropriétaire tnnt qu'il reste là (ninsi que ses

    fils,' Si l'étrnnger part, le terrain revient à l'an-

    cien propriétaire. Ainsi, des gons de ~mlea nvaientfondé un hameau, Kuredunki, sur le territoire de

  • ;

    - 30 -

    Yengisa;· ils cultivniœt librement les terres envi-

    ronnantes. Puis, plusieurs dlentre 8UX étant morts,

    los survivnnts sont revenus à Malen. Los gens deYengisa ont alors récupéré les terres qu'ils nvaient

    concédéw

    - le terrain n été donné une fois pour toutes. ~

    ~ltranger en est désormais seul propriétnire.

    Chacune de ces réponses peut .être donnée,

    soit p~r le dyntigi ( C~lui qui n ~ccueilliltimmi

    grant ) soit pnr Il son étranger Il (1). I.JIn.is, le plussouvent, il y n décnlnge entre los réponses desdoux p~rties: par exemple, l'immigrant ( ou, surtout

    les enf~nts de l'iwaigrnnt ) affirme que le terrainlui a été donné; le dyatigi dit que son étrnngerest seulement propriétaire du sol qui porte sa cnse,

    eon J~rdin perm~nent. et les ~rbres qu'il n plnntés.

    Peut-on expliquer ces contradictions, toutsimplement ~~r l~ mnuvnise foi de l'une des p~rtiGs?

    Pfl.rfois peut-être: jo demnndcii:' un jour à un ~

    ltrnnger instnllé depuis quelques nnnéos dans un vil-Inge si, à force de cultiver certnines pcxcelles,il en deviendrait propriétnire. Nous étions seuls,

    il répondit que oui. Peu après arriva un nutre hom-me, membre d'un clan nnciennement instnllé. Je repo-8:-\i') ln même question; l'étrnnger répondit cette :fèi$

    qI'il ne pourrait pns devenir propr~étnire.

    N~is ces contradictions entre les diyntigi

    et leurs étrangers sont trop fréquentes~ et, par~ois/s'expriment si ouvertement qu'on ne. peut les exp1i-

    quer uniquement par la mnuvaise foi. Il faut donc

    se demnnder comment l'emprunteur peut ~tre conduità s'attribuer des droits qui, dnns l'esprit du

    diyntigi, ne lui ont pns été nccordés.

    _ - '"' _.•..__ _ _._ --- ._-_.•__ _-_ - - -(1) Le terme" mo. Khonye Il ( mon étranger), très

    cournmment omployé, signifie: l'étrnnger quej'ni reçu, installé chez moi. Ce terme impli-que une sorte ùe pnrenté pnr nllinnce.

  • - ...:-

    .'

    D'une f~çon générale, on nccueille très

    volontiers des étr~n6ers, c~r on est content davoir nügmenter ln popul~tion du village. C'estpourquoi les claris ancienno·tiennent à bien recevoirles immigrnnts. C'est à ln fois un devoir moral et

    le moyen de g~rder cet étr~nger et sa famille.

    Autnnt que possible, le diyntigi concède à son~-etrnnger nssez de terre~ pour sa case, son j~rdin,ses ch~mps tempor~ires.

    Purfois même, ln concession de terres à l'étrangerest considérée coü~C qunsi-obligatoire pnr lediy~tigi,surtout lorsqQe l'étranger. est ou devient

    son parent: gendre, be~u-père ou neveu mntornel

    {le cns est très fréquent): Il On ne peut refuserdes terres à son neveu mntcrnel 11.

    L'étrnnger bénéficie par conséquent d'un

    vérit~ble ~roi~_~~E~~~

    Du point de vue du diyntigi et de ln col-

    lectivité villageoise, ce droit d'usage apparnit

    même conme pnrtie intégrante du droit de cité:l'étr~nger doit recevoir les terres dont il n be-soin, tant qu'il est personnellement admis dnns ln

    communnuté. C'~st seulement lorsqu'il commet des

    fuutes graves que, en le privnnt du droit de cité,en le chassant du village, on le prive du m~mecoup de ses droits d'ùsage sur les terres q~i lui

    nvnicnt été concédées.

    Très souvent, on Inissc l'étrnnger pren-

    dre l'h~bitude d'utiliser les mômes pnrcelles,qu'il revient cultiver npr8s les avoir Inissées enjaChère, s~ns nvoir besoin de les redemnnder nu

    propriétnire, son diyntigi •

    Agissant librement, l'étrnnger se sent chez lui;il est tout n~turellemont amené à S0 considérer

    comma propri~tnire des pnrcGlles qu'il utilise, et

    à dire qu'elles lui ont été données. Surtout,lcs

  • ~. 32 -

    fils de l' immigl'::'..nt, qui n"'.issont dans le vill."..ge

    Gt voiont lùurpère tr~vn.iller librement sur tel o~

    tel terr~in, s'nffirmeront pro~riétnires (1).

    E~ f~it~Jl'ftrnnger jouit d'u~o sécurité certai-

    ~. Il P&ut cultiver nutnnt do terres qu'il le dési-

    re ( snuf .toltefois d~ns quelques villages où lesbonnes terres à riz sont peu abondantes).

    L'expulsion d'UL~ étrnnger est un fait ex-. .ceptionl1el,qui ne se produit qu'en cns d'inconduite

    notoire.

    Ln s~curité dont jouit celui à qui on n' con-

    cédé des terres est si grnnde que, pnrfois, des mem-bres desclm1s propriétaires qui veulent créer un

    hruùeau, demandent un terrain à un nutre cl~n, lors-

    qu'il ne leur convient pns, pour une rnison quelcon~que, de s'instnller sur leurs propres terres. C'est['.insi qu'à Nnlén, plusieurs Knmnrn.-Dosi et 81110.,

    membres de deux clans propriétaires do vastes do-

    m~ines, ont créé les h~Gnux de ~enendé ct Wondéku-bi sur los terres des Knmarn-Ynlnmn, p~rce que leurspropres secteurs étaient trop éloignés du tn. Le

    fait est d'nut~t plus r0marqunble que ces hommesestiment que le'chef des Knmnra-Ynlnmn peut, s'ille désire, les exp,l.1ser même de leurs CCl.ses.

    Un autre fait montre ln. stnbilité do ln.

    situation des non-~ropriétnires: il nrrive Qoaez.. ~

    souvent qU'ils accueillent eux-m~mes de nouveauxétrangers.

    {r) A propos des droits des negnri (neveux mater-nels): A Solent~(8okhili) au COQrs d'une discussionentre les ~illa-Sokhilikny qui affirmaient être lesseuls propriét~ircs légitimes du sol, et les Knmnroces derniers répondaient:" Notre ancêtre était leneg~ri du vetre, chez qui il était venu habiter.Pnrsa mère, il ~ eu droit à l'héritage des parents desn mère. Nous sommes donc propriétaires au m@metitIC que vous ".

    Mn1s c'est le seul cns où j'ai entendu des nega-ri fonder leurs prétentions sur un héritage trans-mis p~r l'int~rmédinire d'une fel~le.

  • - 33 -

    Lorsqu'une controverse s'élève entre lesdiy~tigi et leurs étr~ngers, olle reste théoriquele plus souvent: le diyatigi veut seulement que l'on

    reconnaisse ses droits éminents. Un exemple:

    Entre SonBoron-y~ et Bnnguyn se trouve un hameau,

    Knlikure, fondé et hnbité par des personnes origi-nnires de Bnnguya. Lus hnbitnnts de Songoron-yn di-

    sent que Kalikure est sur leurs terres et a été fon-dé avec leur nutoris~tion. Lesh~bitnnts de Bnnguyaet de Knlikure répondent qu'ils n'ont jam~is eu be-

    soin de demander une ~utorisntion quelconque, ayant

    créé le hameau sur leur propro territoire.J'ai eu l'occnsion d'assister un jour à une discus-sion extrémement violente à ce sujet. Au plus fort

    de la querelle, les gens de Songoron-ya disaient:

    " Vous ne reconnaissez pe:.s la vérité et c'est trèsmal, car ce terrain est à nous. Cependant nous

    n'aurions jamnis l'idée de vous faire déguerpir"

    Duns ces conditions, on peut dire que celuiqui occupe habituellemont une p~rcelle ( non séù~

    lement un terrain b~ti ou planté, mais un terrain

    de culture temporaire qu'il utilise avec régulari-té) en devient le propriétaire réel. L'aliénation. --des terres est donc un fait proclamé p~ le nou--------._._------- .-~~ - ---1venu propriétaire, et que l'nncien doit subir, le

    plus souvent de mauvais gré: à Demokhulimn, lesSilln ont renoncé aux terres que les Kamnra-8agn-Inndyi leur ont autrefois "prises de force" ou

    " empruntées et jnmais rendues Il, De même,' les

    gens de Bubuyn disent que les terres situées àl'Est du ruisseau Kuntu faisaient autrefois pnrtie

    de leur territoire, mnis que des étrangers y ont

    cultivé des champs et fondé des hamenux anns deman-der ~ucune nutorisation; en conséquence, les gensde Bubuy~ ne vont plus cultiVer à l'Est du Kuntu.

    L'nliénntion est donc un fnit, considéré par les

    uns comme don ou usu~u~ion , p~r les autres, commeun vol,

  • !

    ~.

    - 34 ..

    LB TERRITOIRD VILLAGEOIS...-. - ...... ...- - - .- - - - _...-

    Ce qui vient d'être di~ sur les fondementsdu droit de propriété, sur ln possibilité de l'alié-

    nntion de ce droit, pnrnit vnlnble aussi bien pour

    les territoires villageois que pour les domaines cln

    niques.

    Conflits---Nous avons vu, p~r des exem~les, que la con-

    trndiction entre les deux principes Il ln. terre aupremier installé If et " la terre au défricheur Il

    peut opposer aussi'bien des collectivités villageoi-

    ses ( T~nnlnn et d'autres villages du Sugc~uru;Snmbaya et des villages du Nord du Bnren) que desclnns. à l'intérieur d'~n village.

    Des controverses entre anciens propriétaireset occup~nts plus rücents, non-défricheurs,peuvent

    égnlement opposer deux collectivités: Songoron-ya

    et Bnnguyn; Bubuyn et les hnmenux situés à l'Estdu Kuntu; de même Simbalyn et Tumanya au sujet doterres situées nutour du hameau de Modya ote ....

    ~es li~ites .entre les territoires villageoisont les m~mes carnctères qu'entre les domnines cla-niques: elles ne s'appuient pns, souvent, sur des

    limites nnturelles, elles sont enchev€trées (oncla-

    vos nombreuses) pnrfois mal connues, souvent contos-tées. Il est remarquable de constater l'embnrrns desinformateurs, -l'insuffisance des explications qu'ilsfournissent, quand on leur demande comment ont été

    fixées les limites du territoire de leurvillnge.

    Aliénat~ion

    Il est certain que des limites de territoi-

    res vill~;eois ont été modifiées ct que l'aliénation

    est, à l'échelle des collectivités villagooises, unfnit:

    - autour de Gnnamn s'est constitué, nux dépens duterritoire do Bubuyn., un petit territoire ~ demi

    indépcndnnt, à demi r~ttnché à SimbQlyn, village

    dont G~rame est un hnmcau.

  • - ::':5 -

    - Bubuyn., d'autre pnrt, n. perdu la pr-•• 'tie Est de SOl1

    territoire.

    - Los Knmarn-Khnlu de Demokhulima ont reç~ une par-

    tie de leur domaine ~ctuel de Mori Suleymnne,Chefdu Sikimn; ce secteur fnit, depuis, p~rtie du ter-

    ritoire de D6ffiokhulimn.

    - les hnbitnnts de W~rnknlnn admettent que ln limi-

    tu entro leur territoire et celui de Mnlea a été

    déplncée.

    Pnr conséquent, le torritoire villageois

    n'est pns une donnée primitive originale, à partiret à l'intérieur de laquelle se seraienteonatituées

    des dom~inos claniques.

    Dnns le Sokhili par exemyle, on peut se représenterschématiquement ainsi l'histoire do l'appropriation

    du sol pnr les collectivités villageoises ~t par les

    clans:

    1°) les Silla-Sokhilikny arrivent les premiers. Ilssont collectivement propriétaires du Sokhili

    ,

    Aucune limite n'existe entre eux, m~me quandils se dispersent dans toute la ré~ion à partir

    de Dulnnku.

    2°) d'a\,\,tres clnns arrivent à leur tour, s'associent·aux groupes Sokhilikay dispersés, et fondentavec eux des villages.

    ;0) à pnrtir ct autour de ces lieux habités, tousces clnns, de môme que les Silla-Sokhilikny,dé-frichent, se taillent dn.ns la forêt des domainesqui, en s'agrandissant, finissent ~ar se limiter

    mutuellement.

    4°) los territoires villageois sont nlors formés:chacun est l'ensemble des domaines appropriés

    pnr les cln.ns qui composent la collectivité vil-

    lageoise.

    Loin d'être un cndre primitif, fixé à pri-

    ori, les territoires villngeois, tels qu'ils exis-tent Gt sont délimités nctuellement, sont, comme les

  • domaines claniques, le produit emplr2que de l'instal-lntion,du défrichement,de l'occupation Rgricole.Ils

    n'en sont pns moins,une fois constitués,une réalité

    dont les villageois ont une conscience très vive,sinon très claire.

    CONCLUSION

    En résumé, le régime foncier chez les Susu de

    la région du Moyen Konkure est caractérisé par le

    mélange ou la superposition de plusieurs notions dela propriété foncière, notions qui ont des fonde-

    1

    mentset des.implications diff6rentes.

    C'est à cause de l'existence de notions dif-férentes que les explications données par les informateurs,surtout quand on interroge plusieurs per-sonnes à la fois, paraissent enchevêtrées, et que

    le vocabulaire lui-même est incertain .

    . Deux principes extr@mes, formellement incom-patibles, s'opposent: .: -; ~ cr.' :

    Le premier principe: " la. terre appartier.:c au pre-mier installé Il sout~nu par les clans les plus an-ciennement installés, conduit·~ une notion que L'onpeut appeler propriété éminen~e: le premier instal-

    lé accueille les autres clans et leur perl1et d'uti-'

    11ser à ieur guise les terres qui entourent le vil-lage, mais reste le seul vrai propriétaire, le seullégitime. Si on se contente d'interroger les chefs

    de villages ( qui jusqu'à une date récente 'apparte-naient presque toujours aux clans anciennement ins-tallés~ on a bien des chances de ne connaitre quece point de vue~ et de le considérer comme un sys-

    tème cohérent et, stable, basé sur un principe sim-ple admis par tous.

    En réalité, en face de cette notion en exis-

    te une autre,à laquelle se rallient plus ou moins

    ouvertement les clans récemment inst~llés, Cette

    notion~ est/par nature/une notion empirique~quise,développe dans les faits avant d'apparaitre

    dans les consciences. Les l'étrangers" accueillis

    par les clans anciens reçoivent l'autorisationd'utiliser certaines parcelles. Ils en prennent

  • ." .

    - 37 -

    l'habitude. L'habitude de l'usage d'une parcelledevient bient8t un droit d'usage, puis le droit d'u~sage apparait comme un droit de propriété. Quands'est accompliee passage du fait à l'idée de droit,la notion de propriété éminente est née, tandis ques'affirme une ,conception radicalement opposée, fon-dée sur le principe " la terre appartient à celui

    qui l'utilise ". l'lais le contenu de la notion depropriété fond~ sur ce principe est tout différentde ce qu'impliquait la notion de propriété éminente.La propriété éminente est par nature collective, ina-

    liénable, fixée une fois pour toutes. Au contraire,la propriété fondée sur l'utilisation est adaptéeà la réalité de l'exploitation; elle suppose donc

    la possibilité de partagés et de transferts d'un

    titulaire à l'autre; elle est divisible et aliénable.

    Nous voyon~ .maintenant ce que signifie lecaractère confus et contradictoire des renseignements

    donnés par les Susu à propos de leur régime foncier:les contradictions expriment l'existence de pointsde vue différents#et, dans une certaine mesure, lalutte d'intérets opposés.

    Des deux can6eptiom.antagonistes, la deu-\

    xiéme tend à se ren~t~constamment, parce qu'elleeet fondée sur la réalité, parce qu'elle est vécuequotidiennement, tandis que la notion de propriété

    é~inenté, devenue iilusoire, finit par être oubliée.

  • . .

    - 38 -

    DEUXIEME PARTIE

    LA TENURE DES TERRES: MODALITES•

    Aprés avoir essayé de comprendre commentla terre a été appromiée par les clans suau, par-a. .J. ns

    'tagée entre eux, nous déorire les modalit~s de sarépartition entre les membres du clan, en vue de samise en culture.

    Il est néce~saire, pour cèlà, de connaitrel'organisation familiale suau.

  • 1.- L'ORGANISATION ]'AlviILIALE

    DEFINITIONS.'-----------Plusieurs mots existent, en susu, pour

    désigner des groupements familiaux plus ou moins

    étendus.IO)Khabile: Le khabile est l'ensemble des parents

    d'une personne, toua ceux à qui elle est liée par

    le sang. Cette personne peut distinguer son baba-khabile ( parents du coté paternel ) et son nga-khabile ( parents du coté maternel). Le khabile nepeut donc pas ~&tre une unité familiale organisée.

    2 0 )Dembaya: Ce mot désigne l'ensemble formé par unhomme marié (le dembaya kandyi, celui qui posséde

    un dembaya, ou dembaya khundyi, le chef du dembaya )

    et les personnes qui sont à sa charge: épouses, filset filles, et parfois une vieille mère, un"enfant

    adopté, un frère célibataire, des éléves coraniques.

    Le mot dembaya est celui qui correspond le mieux àIl ménage" ou Il famille restreinte ". Mais il a

    pariois une extjension plus grande: le dembaya kandyiestime parfois que ses fils, aprés leur mariage, con-

    tinuent à faire partie de son dembayn, temporairement

    ( tant qu'ils n'ont pas construit leur propre case,tant qu'ils n'ont pas d'enfants, tant qu'ils ne sont

    pas ca~ables de se débrouiller seuls, etc) ou même

    définitivement, jusqu'à la mort de leur père. A lalimite, le dembaya est parfois confondu avec une au-tre unité, conçue habituellement comme beaucoup plus

    vaste, le fokhe.

    3°) Fokhe. On donne ete ce mot plusieurs détinitionà, -qui se complétent sans toutefois être absolument com-

    patibles entre elles. Le fokhe est un "groupe de

    dembaya Il dont les chefs sont unis ~ntre eux par des

    liens de parenté ( frères, pères et fils, oncles etneveux, beaux-pères et gendres ) ou par l'adoption( dyatigi et leurs étrangers ). Ces chefs de dembaya

    sont plus ou moins soumis à l'autorité- de l'un d'eux

    ( fokhe kandyi ). S~uvent, leurs cases sont constrQi-tes les unes à coté des autres; ctest pourquoi le fo-

    khe est souvent défini comme Il un groupe de caSE)S si-

    tuées autour d'une cour ". Cette disposition trés cn-

  • .11

    ,

    ractéristique du village Susu, qui se présente sou-vent comme une succession de cours entourées de ca-

    ses, est en quelque sorte l'inscription dans la pay-sage d'un fait social, ln représentation matérielledes liens qui unissent les dembaya d'un même fokhe.

    ~o) Carr~. Le mot carré est souvent employé pour tra-duire le mot ausu fokhe. En réalité, ce mot'désigneune unité administrative, plus précisément fiscale.

    Il désigne un groupe de personnes qui versent lemontant de l'imrot personnel 'à l'une d'entre elles,appelée" chef de carré "; les chefs de carré rever-

    sent ces sommes au chef de village. Le carré coXnci-

    de parfois avec le fokhe, mais pas toujours,: trè~souvent, le tokhe se compose de plusieurs carrés;dans ce cas le carré n'est rien d'autre que l'unité

    fiscale élémentaire, et son chef n'a pas d'autre ra-le que la levée de l'impot.

    C'est donc le mot fokhe qu'il convientd'employor pour désigner cet ensemble cohérent de

    familles restreintes qui est sans dout~ l'élémentfondamental de l'organisation sociale des Susu.

    LE'FOIŒE_.... - _....Un fokhe susu peut comprendre:

    - les descendants, en lignée masculine, d'un mêmeancêtre. Lorsqu'ils appartiennent à la mêmegénérn-

    tion, ces hommes sont des" frères Il ( qu'ils Boient

    frères au sens strict ou cousins). S'il y a plusieumgénérations, tous ceux de la deuxième sont les 'ffils"(c'est-à-dire fils ou neveux paternels) de la premi-

    ère. L'extension du sens des mots ,"fils ll et "frères"est un témoignage de la cohésion du fokhe.

    Ces descendants en lignée masculine de l'ancêtre

    sont en quelque sorte le personnel titulairo,l'os-

    sature du fokhe, qui ~omprend de plus, en général:

    - des étrangers qui sont venus stinstaller dans levillage pour une raison quelconque: élèves corani-

    ques - enfants mis en gage - hommes partis de chez

    eux pour chercher fortune ••.• Ces étrangers peuvententrer dans la catégorie des~

  • -.

    - Parents par alliance:

    - Gendres ou beauX-frères des membres"titulaires" qui ont quitté leur fokhe d'origine etse sont intégrés à celui de leurs bitandyi(beaux-

    parents) •

    Negari (neveux maternels) qui/ par-

    fois sont les fils des précédents,parfois sont nés

    dans le fokhe d'origine de leur père puis ont été

    ramenés dans le fokhe de leur mère devenue veuve ou

    divorcée. Leurs fils et petits-fi~s sont auseides negari, de sorte qu~ cette catégorie est trèsnombreuse.

    - Fils adoptifs, dont la mère, veuve

    ou divorcée, s'est remariée avec un membre du fo-khe.

    - des captifs.

    LE CHEF DE FOKHE----------Celui qui dirige le fokhc est en prin-

    cipe l'homme le plus vieux parmi les "membres titulaires'

    On l'appelle plus souvent Fori (vieill~rd) que FokheKhundyi ( chef du fokhe ) ou Fokhe Kandyi (propriétaire

    du fokhe). Mais:

    - assez souvent, le fokhe kandyi réel n'est pas le plusvieux, soit parce que le plus vieux est incapable detenir le rôle qui lui revient normalement pour une

    raison quelconque (absences fréquentes,nk~ladie,inin

    telligence ,malhonnêteté , simple manque de prestige)

    soi~ pnrcQ que l'autorité du plus vieux est dépasséepar celle d'un de ses cadets qui est riche, ou ins-

    truit, ou reno~é ( p~r exemple parce qu'il est ou a

    été qhef de village). Très souvent, aussi, l'autoritéest partagée entre deux ou trois hommes.

    - parfois, lorsque les "membres titulaires" sont tousjeunes, l'autorité réelle peut revenir à untlétranger tl

    ou à un parent par alli~nce,que t6US respectent à cau-se de son âge ct de sn sagesse.

    - Il peut même arriver qu'une femme prenne de l'ascen-dant sur ses fils ct neveux, et que ces derniers crai-

    gnent d'~gir contre sa volonté.

  • ".

    ....

    SCISSION DU FOKHE----_ ....... ----

    La plupart des informateurs, lorsqu'on leurdemande, sous une forme générale, si un fokhe peut

    se scinder, répondent que non; ils ajoutent que,quandlé chef du fokhe meurt, il est automatiquement rempla-oé par le plus dg~ des survivants ('son frère ou sont'ils a!né) ..Si co principe est vrai, le fokhe se confond doncavec le clan, puisque tous les descendants dlun mêmeanc8tre restent groupés dnns un m~me fokhe.

    Il est vrai que la plupart des clans se compo-sent d'un seul fokhe. Mais, fréquemment, plusieursfokhe nettement indépendants les uns des autres~ ont

    le mame ancêtre. Par exemple, les Kumnra-Sagalandyide Démokhulima sont divisés en 6 fokhe, bien qu'ilsdêBcendent toua de Gbeti }UUnudu et de son fils MoriIsmayla •

    La scission peut avoir lieu dlune façon netteet brutale, par suite de mésentente. Beauooup plus

    soùvent, elle se produit sans heurt» pour diverses

    raisons dans lesquelles la volonté des intéressés n'aguère part:

    - Lorsque les membres du olan deviennent trop nombreux,1

    - Lorsque certains d'cntre eux construisent leure oa-ses à l'écart, pnrce qu'il n'y a plus de plaoe au-tour de ln cour primitive: on dit parfois que telhomme est allé fonder son fokhe quelque part (dansun hameau ou 8im~lement à l'autrè extrémité du ta).

    Lorsque l'autorité ost ~artngée entre deux hommes,notamment entre deux demi-frères ( même père - mè-res différentes)

    . Il convient de noter que ces facteurs de divi-sion, m~me lorsqu'ils se renforcent l'un l'autre,

    n'entrainent pas automatiquement la division dU fokhe.

    Il arrive fréquemment que les membres d'un clan,nom-breux et dispersés dans deux ou trois hameaux,ne for-

  • ment réellement qu'un seul fokhe, reconnaissent tous

    l'autorité du m~me fokhe Kandyi~

    Il faut surtout remarquer que la scission,au

    moment où elle n lieu, est progressive,hésitante, à

    peine consciente" ou conçue comme provisoire: " Nous

    sommes divisés en deux fokhe~ et nous avons deux fo-

    khe Kandyi, mais ces deux fokhe n'en font qu'un "."Nous sommes divisés en deux fokhe, l'un dans le ta,l'autre au hameau de X, mais si ceux de X reviennentdans le ta, nous n6 formerons plus qu'un seul fokhe ll •

    DEGRE D'INTEGRATION DES ETRANGERS & PARENTS PAR ALLIANCEli.... T 1

    Dans quelle mesure les "trangers ll et les pa-rents par aJ-J-innce sont-il.s intégrés dans le fokhequi les a accueillis ? Il est évident que cela varie

    énormément d'un fokhe à l'autre~ et, dans un fokhe,d'un homme à l'autre. Certains restent réellement desétrangers, d'autres sont considérés par leur diyati-

    gi comme faisant p~rtic de lu fnmille ct traités en

    frères, bien que leur origine ne,soit pas oubliée.

    Les étrangers et parents par alliance ont la.t.c.cu1;té do sf6rg'"m~ÇlE:.I' ~n f-ekhe iJ1~en&nnt. Bien

    • T. ~ ._... 'Y. ,qùe' les diiatigi refusent p:'.rfoiEL c.1~ le~: reconnaitre, .

    cola so produit fréquemment, pour les mernes raisonset avec la m~me discrétion que lorsque la scissions'opère dans le coeur môme du fokhe.

    Il peut arriver au contraire que les membresadoptés cherchent à être complètement assimil~s aux

    membres "titulaires ll du fokhe, f.'fin sans doute de

    bénéficier des avantages liùs à l'appartenance à unefamille ancienne et puissnnte. Deux exemples:

    à Yengisa, Morluye Silla, membre du clan des Silla-Knbuya, prétend être un vrai Silla-Kabuya, un pe-tit-fils de ~Qnfori Knbu, fondateur du village.·

    Les Silla-Kabnyu nient cette origine: d'nprès eux

    Morlnye ct sa soeur Bintya ont été seùlement re~

    cueillis pur les Silla-Knbaya après la mort de leur

    père, qui ~tnit un étran6er venu du Sugekuru. Bin-

    tya confirme ln version des Silla-Knbaya&

  • .......-..

    .. 44 -

    - A Démokhulima, autre tentative d'assimilation,mais

    réussie. L'un des fokhe Kamaro.-Sagnlnndyi fondé

    autrefois pnr Alfa Namudu "Gali Nnnge" (chef deguerre) n'existe plus, les denscendants de Gali

    Mange étant tous morts. Mais il reste des descen-

    dnnts des étrangers adoptés par Gali M~nge.

    Les Kamara-Sagnlnndyi permettent à l'un d'euxMamadu Nene)fils d'un spadassin de Gali Mange, de

    porter le nom de Kamara Sngalandyi, afin qu'il

    " reconstruise " le fokhe de Gali Mange. MamaduNene semble d'ailleurs ~tre considéré comme un

    K~mnra ~agalandyi authentique par plusieurs viei~

    lards de Démokhulima.

    CONCLUSION.... ~ _.......

    Le fokhe n'est pas une unité strictement dé-finie, aux contours nets ct rigides; chaque ~okhe

    est une construction empirique, toujours susceptible

    de se transformer, de façon généralement inconsciente

    Nous allons voir que le fokhe reste cependant

    une réalité bien ~1vante•

  • .. .

    II.-LES RAPPORTS FONCIERSAL' INTERIEUR DU CLAN

    ..---~------

    Supposons d'abord que le olan se compose

    d'un seul fokhe, ce .qui est le cns le plus fréquent.

    A cette question, deux réponses sont don-

    nées:

    - le plus vieux(Fori) est propriétaire

    - tous les hommes du fokhe sont propriétaires

    ensemble.

    En r~alité, le Fori est surtout un gérant.

    C'est à lui que les étrangers s'adressent lors-

    qu'ils veulent emprunter une parcelle ~nrfois ce-

    pendant ils s'adressent à.un autre membre du fo-khe, qui transmet leur demande au Fori. Ce der-

    nier, de toutes façons, ne prête pas un terrain

    (pour la cu~ture d'un champ tempornire ou pour laconstruction d'une case) sans avoir fait purt de

    la demande à ses frères et fils. Mais il est dif-

    ficile de déterminer s'il les consulte ou s'il

    leur communique seulement une décision prise parlui seul; cela vurie )robablement d'un fokhe àl'autre. Il est certain q'ailleurs que, en cas

    de consultation, l'opinion du plus vieux( au desplus vieux), est prépondér::mte.

    Q~~~~~_~~~~_~~~~!~~~~_!~~_E~E~~!!~~_~~~E~_!~~frères et les fils du chef de fokhe ?--..-~--------------------------~~--

    En principe, le chef'de fokhe désigne aux

    autres chefs de dembaya leurs parcelles, chaque

    année. Mais, prutiquement, chacun revient surla parcelle qu'il avait cultivée l'nnn6e précéden-te JilÇ ou bien remet en culture "sa" jachère; cela

    se fni t alltomatiquement, sans que le Fori s'enoccupe. Lorsqu'un homme part, on n'oublie pas

    qu'il avait l'hnbitude de cultiver telle parcel-

  • - 46 -

    le~ et il la récupère à son retour. Quand un chef

    de ménage meurt, ses jachères reviennent normale-

    ment à ses fils.

    Pratiquement, le Fori Il'intervient donc que

    slil y n contestation entre deux chefs de dembhyu#ou pour organiser un nouvenu p~rtage, lorsqu'ilfaut faire une place pour un no~veau ménage.

    ·En dehors de ces cns, on ne reconnait généra-I

    lement pas nu Fori le droit de modifier la répar- .tition hnbituelle des parcelles, notamment de s'em~

    parer/sans l'avoir demand~erde la jaohère d'un deses frères ou fils

    De m~me, lorsqu'un membre du fokhe veut cons-

    truire une case, créer ou agrandir un jardin ou

    une plantation, il demande Bénéralement l'autori-

    sati~n de la faire au Fori, mais cette demande est

    de pure forme, elle est présentée" par politesse"

    Droits accordés aux femmes--~~~-~~--~-~--~-~~-------

    Norm~lement, les femmes ne portent pas le

    titre de bokhi Kandyi (propriétaire), réservé aux

    hOlnmes. Elles ne participent pas à la gestion des

    terres du fokhej en pnrticulier, elles ne sont pas

    consultées lorsqu'un terrain est prêté à un étran-ger.

    Cependant il peut arriver qu'une femme gère

    temporairement les terres d'un fokhe. A Démokhu-lima, deux cultivateurs m'ont dit avoir emprunté

    des terres à deux femmes; il s'agissait, dans uncas, d'une femme âgée et quelque peu intrigante,

    qui, après la mort des vieillards du fokhe, avait

    pri~ beaucoup d'ascendant sur ses neveux; dans le

    deuxième cas, de l'épou~e d'un chef de fokhe ab-sent.

  • ..

    ..--

    ........--

    ...

    Droits accordés aux adoptés~---------~--~-~-----------

    Comme les femmes, les étrangers et parents par

    alliance intégrés à un fokhe n'ont aucun droit de

    propriété sur les terres de ce fokhe (ils peuvent~tre propri6tuires ailleurs, dans leur fokhe d'ori-gine. Mais lorsque le hasard des décès fait que l'und'eux devient le seul homme dgé et respectable du

    fokhe, c'aat lui qui tient le rôle de fokhe ~sndyi,qui répartit les parcelles, reçoit les demandes desemprunteurs etc ..•

    Mis à part ce cas malgré to~t nssez rare, les1

    hommes qui ont été adoptés par un fokhe jouissentdes mêmes droits d'usage que les fils et frères du

    Fori. Eux aussi ont l'habitude d'utiliser réguli~rement les mêmes parcelles) de revenir sur leurs ja-chères, et il est presque toujours admis que ces

    parcelles ne peuvent leur ~tre enlevées • Par rap-port aux membres adoptés, les membr,",s "titulaires"du fokhe ont, en ce qui concerne lt expl oitat1on

    des terres, un simple droit de priorité, en cas decontestation.

    Possibilité de division des terres du clan:~~--~------- ---------~--~---~----~---~---

    Théoriquement t le domaine qui appartient à unclan est indivisible. Lorsque le ehef de !okhemeurt, la gestion des terres est assurée par le

    plQS âgé des survivants, sans qu'il soit questiond'un partage entre ces derniers.

    Mais ce principe semble pouvoir ~tre enfreintpour diverses raisons:

    1°) Les ménages qui composent le fokhe ont l'ha-bitude d'utiliser les m~mes parcelles~ Cette habi-tude peut-elle ontrainer l'apparition de l'idée

    d'un partage de la propriété? Il ne le semblepas. Les ménages ne jouissent que d'un droit d'u- .saga sur ces parcelles et ne songent manifeste-

    ment pas à se considérer comme propriétaires in-

    dépendamment du reste du fokhe. Pour les jardins

    seulement, on dit parfois que le chef de dembaya

  • ..

    - 48 -

    est seul propriétaire du sol, qu'il y a eu partage

    entre les membres du ~okhe. Partout ailleurs,m~medans les bananeraies, " la terre appartient à tous".

    - 2°) Les étrangers intégrés à un fokhe se coneidè-rent p~r~ois comme pleineoent.propriétaires des

    parcelles qu'ils utilisent. ~1ai8 c'est surtout

    'lorsqu'ils s'organisent en un fokhe indépendantque cette revendication a un sens et pose lesproblèmes évoqués dans ln,première partie de ce

    rapport ..

    - 3°) Que se passe-t-il en cas de scission du fokheNous avons vu que cette scission, lorsqu'elle a

    lieu, est généralement à peine consciente. Il n'ya pas de partage officiel, fait par accord entreles deux nouveaux fokhe. Mais, chacun ayant l'ha-bitudo de cultiver de son côté, et chaque chef,de

    'fokhe prêtant aux. étrangers telle ou telle par-celle, une division de fnit s'~tablit, qui finitpar être reconnue; on dit alors, parfois, que

    tel ancêtre a partagé Ses terres entra ses fils.

    La division des terres du fokhe peut ~tre plus,nette lorsque les fokhe issus d'un m~me clan ~abitent dans des hameaux différents, ou défrichent

    des terres nouvelles chacun de son 'c8té.

  • I1I.-LA ~ITUAT10N DESANCIENS CAPTIFS

    1

    -'

    Les anciens captifs sont peu nomb~ux d~ .les villages Susu de la région du Moyen Konkure. Lestraditions ornles, dans beaucoup de villages, racon-

    ~ent que les anc~tres, nu moment de leur installaticnavaient des captifs, mais que ceux-ci, par la suite,sont partis, sans doute à la faveur du désordre quirégna1t dans ces régions. Il ne faut pas oublier que

    jusqutà l~ fin du 19 0 Siècle, les Susu étaient cons-tamment attaqués par les Peuls", et parfois pris eux-m~mes comme captifs. Il semble aussi que beaucoup de

    captifs sont repartis dans leur pays d'origine(Sierra Leone, Basse-Guinée) quand ils ont été li-bérés par les lois françaises.

    C