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Lettres a ` l’e ´ diteur Paralysie faciale pe ´ riphe ´ rique secondaire a ` une thrombose veineuse ce ´re ´brale Peripheral facial palsy after cerebral venous thrombosis 1. Introduction Les manifestations cliniques des thromboses veineuses ce ´re ´ brales (TVC) sont polymorphes et tre `s varie ´es et de ´ pen- dent des sinus et ou des veines thrombose ´es (Bousser et Ferro, 2007). Les signes les plus fre ´ quemment rencontre ´s sont les ce ´phale ´es, les crises e ´ pileptiques, le de ´ ficit moteur ou sensitif, et les troubles de la conscience (Souirti et al., 2009). L’atteinte des nerfs cra ˆ niens en dehors de l’atteinte du nerf oculomoteur externe est rare. Plusieurs hypothe `ses formule ´es pour expliquer cette atteinte seront discute ´es dans cet article a ` travers le cas d’une patiente de 12 ans admise pour tableau de TVC complique ´e d’une paralysie faciale pe ´ riphe ´ rique (PFP) droite. 2. Observation Une fillette de dix ans, fut hospitalise ´e pour prise en charge d’un syndrome d’hypertension intracra ˆ nienne (HIC). La patiente rapportait l’apparition de ce ´ phale ´es violentes avec vomissements et baisse de l’acuite ´ visuelle deux semaines avant son admission, e ´ voluant dans un contexte apyre ´tique et en dehors de toute convulsion ou de ´ ficit moteur. Une asyme ´ trie faciale e ´ tait apparue une semaine apre `s le de ´but des sympto ˆ mes. A ` son admission, la patiente pre ´ sentait une baisse de l’acuite ´ visuelle bilate ´ rale, une paralysie du nerf moteur oculaire late ´ral gauche (abduction de l’œil gauche), une PFP (signe des cils de Souques) droite. Une tomodensitome ´trie ce ´re ´brale sans et avec injection de produit de contraste montra une thrombose veineuse ce ´re ´- brale e ´ tendue inte ´ ressant le sinus sagittal supe ´ rieur, le torcular, la partie poste ´ rieure du sinus transverse gauche et l’ensemble du sinus late ´ral droit. Ces anomalies ont e ´te ´ confirme ´es a ` l’imagerie par re ´ sonance magne ´ tique (IRM) ce ´re ´ brale (Fig. 1 et 2). L’e ´ tude du liquide ce ´ phalorachidien e ´ tait normale, alors que la mesure de la pression intracra ˆ- nienne e ´ tait de 80 cmH 2 O. Le fond d’œil objectiva un œde `me papillaire bilate ´ral stade III. Sur le plan e ´ tiologique, les bilans infectieux, inflammatoire, me ´ tabolique et d’he ´ mostase ont e ´te ´ re ´ alise ´s et e ´ taient normaux : l’he ´ mogramme, CRP, ECBU, BK-crachats, TPHA- VDRL, IDR a ` la tuberculine, Pathergy-test, anticorps anti- nucle ´ aires, anticorps anti-phospholipides, homocyste ´ine plasmatique, dosage de l’antithrombine III, prote ´ine C et S. Les ponctions lombaires de ´ple ´ tives, associe ´es a ` la cortico- the ´ rapie orale (Cortancyl 1 1,5 mg/kg par jour), et aux anti- œde ´ mateux (Diamox 1 1 cp  3/j) ont permis d’abaisser la pression intracra ˆ nienne jusqu’a ` 14 cmH 2 O, et de soulager les ce ´ phale ´es et de faire disparaı ˆtre la PFP. Paralle ` lement, un traitement anticoagulant par he ´ parine de bas poids mole ´cu- laire (Lovenox 1 ) a ` dose curative (0,4 mL/12 h) a e ´te ´ de ´ marre ´, avec relais par antivitamine K (Sintrom 1 ). 3. Discussion Bien que l’atteinte de tous les nerfs cra ˆ niens ait e ´te ´ de ´ crite dans la TVC, la PFP y est tre `s rare, sa physiopathologie reste r e v u e n e u r o l o g i q u e 1 6 7 ( 2 0 1 1 ) 9 5 5 9 5 9 Fig. 1 Angio-IRM veineuse vue de face montrant l’amputation du sinus late ´ral droit. Venous MRI: anterior view showing amputation of the right lateral sinus.

Paralysie faciale périphérique secondaire à une thrombose veineuse cérébrale

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Page 1: Paralysie faciale périphérique secondaire à une thrombose veineuse cérébrale

Lettres a l’editeur

r e v u e n e u r o l o g i q u e 1 6 7 ( 2 0 1 1 ) 9 5 5 – 9 5 9

Fig. 1 – Angio-IRM veineuse vue de face montrant

l’amputation du sinus lateral droit.

Venous MRI: anterior view showing amputation of the right

lateral sinus.

Paralysie faciale peripherique secondaire a unethrombose veineuse cerebrale

Peripheral facial palsy after cerebral venousthrombosis

1. Introduction

Les manifestations cliniques des thromboses veineuses

cerebrales (TVC) sont polymorphes et tres variees et depen-

dent des sinus et ou des veines thrombosees (Bousser et Ferro,

2007). Les signes les plus frequemment rencontres sont les

cephalees, les crises epileptiques, le deficit moteur ou sensitif,

et les troubles de la conscience (Souirti et al., 2009). L’atteinte

des nerfs craniens en dehors de l’atteinte du nerf oculomoteur

externe est rare. Plusieurs hypotheses formulees pour

expliquer cette atteinte seront discutees dans cet article a

travers le cas d’une patiente de 12 ans admise pour tableau de

TVC compliquee d’une paralysie faciale peripherique (PFP)

droite.

2. Observation

Une fillette de dix ans, fut hospitalisee pour prise en charge

d’un syndrome d’hypertension intracra nienne (HIC).

La patiente rapportait l’apparition de cephalees violentes

avec vomissements et baisse de l’acuite visuelle deux

semaines avant son admission, evoluant dans un contexte

apyretique et en dehors de toute convulsion ou deficit moteur.

Une asymetrie faciale etait apparue une semaine apres le

debut des sympto mes.

A son admission, la patiente presentait une baisse de

l’acuite visuelle bilaterale, une paralysie du nerf moteur

oculaire lateral gauche (abduction de l’œil gauche), une PFP

(signe des cils de Souques) droite.

Une tomodensitometrie cerebrale sans et avec injection de

produit de contraste montra une thrombose veineuse cere-

brale etendue interessant le sinus sagittal superieur, le

torcular, la partie posterieure du sinus transverse gauche et

l’ensemble du sinus lateral droit. Ces anomalies ont ete

confirmees a l’imagerie par resonance magnetique (IRM)

cerebrale (Fig. 1 et 2). L’etude du liquide cephalorachidien

etait normale, alors que la mesure de la pression intracra-

nienne etait de 80 cmH2O. Le fond d’œil objectiva un œdeme

papillaire bilateral stade III.

Sur le plan etiologique, les bilans infectieux, inflammatoire,

metabolique et d’hemostase ont ete realises et etaient

normaux : l’hemogramme, CRP, ECBU, BK-crachats, TPHA-

VDRL, IDR a la tuberculine, Pathergy-test, anticorps anti-

nucleaires, anticorps anti-phospholipides, homocysteine

plasmatique, dosage de l’antithrombine III, proteine C et S.

Les ponctions lombaires depletives, associees a la cortico-

therapie orale (Cortancyl1 1,5 mg/kg par jour), et aux anti-

œdemateux (Diamox1 1 cp � 3/j) ont permis d’abaisser la

pression intracra nienne jusqu’a 14 cmH2O, et de soulager les

cephalees et de faire disparaıtre la PFP. Parallelement, un

traitement anticoagulant par heparine de bas poids molecu-

laire (Lovenox1) a dose curative (0,4 mL/12 h) a ete demarre,

avec relais par antivitamine K (Sintrom1).

3. Discussion

Bien que l’atteinte de tous les nerfs craniens ait ete decrite

dans la TVC, la PFP y est tres rare, sa physiopathologie reste

Page 2: Paralysie faciale périphérique secondaire à une thrombose veineuse cérébrale

Fig. 2 – IRM cerebrale en coupe sagittale sequence

T1 montrant un hypersignal spontane du sinus transverse

droit.

Brain MRI: T1 sagittal showing spontaneous high intensity

signal in the right transversal sinus.

r e v u e n e u r o l o g i q u e 1 6 7 ( 2 0 1 1 ) 9 5 5 – 9 5 9956

mal comprise. Dans une serie recente de 62 patients, elle a ete

retrouvee dans 2 % des cas (Damak et al., 2009).

Chez notre patiente la survenue de la PFP etait sans cause

identifiable clinique ou radiologique initialement, notamment

il n’y avait pas d’atteinte otologique. Ainsi, la chronologie des

sympto mes cliniques nous a incite a attribuer la PFP a la TVC.

L’atteinte des nerfs cra niens dans la TVC a ete attribuee

initialement a une compression nerveuse, soit directement

par le thrombus situe a proximite du nerf soit par le biais de

l’elevation de la pression intracranienne.

Plus recemment Kuehnen et al. (1998) ont propose que la

paralysie des nerfs craniens pourrait etre due a une privation

reversible en oxygene et glucose causee par un defaut de

drainage des veines des nerfs craniens dans le sinus transverse.

Cette theorie a ete appuyee par une etude neurophysiolo-

gique realisee chez une patiente de 17 ans ayant presente une

PFP droite compliquant une thrombose du sinus lateral droit.

Cette exploration electrophysiologique etait en faveur d’une

neurapraxie transitoire du segment intracra nien du nerf

facial, suggerant que l’elevation de la pression veineuse

transmurale dans la veine satellite du nerf, pourrait causer

un dysfonctionnement de la barriere hemato-nerveuse du

nerf, avec des fuites de fluides et d’ions dans l’espace

endoneural et donc une augmentation de la resistance

interstitielle (Straub et al., 2000).

4. Conclusion

La PFP secondaire a la thrombose veineuse cerebrale est rare.

Plusieurs hypotheses ont ete formulees pour expliquer cette

atteinte, mais celle qui reste la plus plausible est la souffrance

du nerf facial par un defaut de retour veineux du nerf lui-meme.

Declaration d’interets

Les auteurs declarent ne pas avoir de conflits d’interets en

relation avec cet article.

r e f e r e n c e s

Bousser MG, Ferro JM. Cerebral venous thrombosis: an update.Lancet Neurol 2007;6:162–70.

Damak M, Crassard I, Wolff V, Bousser MG. Isolated lateral sinusthrombosis: a series of 62 patients. Stroke 2009;40:476–81.

Kuehnen J, Schwartz A, Neff W, Hennerici M. Cranial nervesyndrome in thrombosis of the transverse/sigmoid sinuses.Brain 1998;121:381–8.

Souirti Z, Messouak O, Belahsen MF. Cerebral venousthrombosis. Retrospective study of 30 cases. Afr J Neurol Sci2009;28(2):14–5.

Straub J, Magistris MR, Delavelle J, Landis T. Facial palsy incerebral venous thrombosis: transcranial stimulation andpathophysiological considerations. Stroke 2000;31(7):1766–9.

A. Babakhouyaa

Z. Souirtib*

S. Chaouikia

S. Atmania

O. Messouakb

F. Belahsenb

A. Bouharroua

M. Hidaa

aService de pediatrie, CHU Hassan II de Fes, BP 1835,

Atlass, Fes, Marocb Service de neurologie, CHU Hassan II de Fes, BP 1835,

Atlass, Fes, Maroc

*Auteur correspondant.

Adresse e-mail : [email protected] (Z. Souirti)

Recu le 31 octobre 2010

Recu sous la forme revisee le 21 fevrier 2011

Accepte le 5 avril 2011

Disponible sur Internet le 25 aout 2011

0035-3787/$ – see front matter

# 2011 Elsevier Masson SAS. Tous droits reserves.

doi:10.1016/j.neurol.2011.04.004

Une cause rare d’osteoarthropathie nerveuse

A rare case of neuropathic osteoarthropathy

Les osteoarthropathies nerveuses (OAN) relevent d’etiologies

diverses, les neuropathies peripheriques sont rarement en

cause. Nous rapportons un cas d’osteoarthropathie nerveuse

secondaire a une polyradiculonevrite chronique (PRNC) idiopa-

thique. Il s’agit de Mme A.B agee de 52 ans non diabetique suivie