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HAL Id: dumas-03321895 https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-03321895 Submitted on 18 Aug 2021 HAL is a multi-disciplinary open access archive for the deposit and dissemination of sci- entific research documents, whether they are pub- lished or not. The documents may come from teaching and research institutions in France or abroad, or from public or private research centers. L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, est destinée au dépôt et à la diffusion de documents scientifiques de niveau recherche, publiés ou non, émanant des établissements d’enseignement et de recherche français ou étrangers, des laboratoires publics ou privés. Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine : étude de cas au centre hospitalier Guillaume Régnier à Rennes Marion Constantin To cite this version: Marion Constantin. Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine: étude de cas au centre hospitalier Guillaume Régnier à Rennes. Sciences du Vivant [q-bio]. 2020. dumas-03321895

Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

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Page 1: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

HAL Id: dumas-03321895https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-03321895

Submitted on 18 Aug 2021

HAL is a multi-disciplinary open accessarchive for the deposit and dissemination of sci-entific research documents, whether they are pub-lished or not. The documents may come fromteaching and research institutions in France orabroad, or from public or private research centers.

L’archive ouverte pluridisciplinaire HAL, estdestinée au dépôt et à la diffusion de documentsscientifiques de niveau recherche, publiés ou non,émanant des établissements d’enseignement et derecherche français ou étrangers, des laboratoirespublics ou privés.

Prise en charge de la dépression résistante pareskétamine : étude de cas au centre hospitalier

Guillaume Régnier à RennesMarion Constantin

To cite this version:Marion Constantin. Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine : étude de cas au centrehospitalier Guillaume Régnier à Rennes. Sciences du Vivant [q-bio]. 2020. �dumas-03321895�

Page 2: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

N° d'ordre : ANNÉE 2020

THÈSE D'EXERCICE / UNIVERSITÉ DE RENNES 1

sous le sceau de l’Université Bretagne Loire

Thèse en vue du

DIPLÔME D'ÉTAT DE DOCTEUR EN PHARMACIE

Présenté sous forme de

MEMOIRE EN VUE DE L’OBTENTION DU DIPLÔME D’ETUDES

SPECIALISEES EN PHARMACIE HOSPITALIERE

présentée par

Marion CONSTANTIN

Née le 26 août 1989 à Caen

PRISE EN CHARGE DE LA

DEPRESSION RESISTANTE PAR

ESKETAMINE

Etude de cas au Centre Hospitalier

Guillaume Régnier de Rennes.

Thèse soutenue à la faculté de pharmacie de

Rennes le 23 novembre 2020.

Devant le jury composé de :

Pascal LE CORRE

Pharmacien PU-PH au CHRU de Rennes /

Président du Jury

Cécilia NAUCZYCIEL

Psychiatre PH au CH de Guillaume

Régnier, Rennes / Membre du jury

Laurence SPIESSER

Pharmacien MCU-PH au CHRU d’Angers /

Membre du jury

Romain BELLAY

Pharmacien assistant spécialiste au CH

Guillaume Régnier, Rennes / Directeur de

thèse.

Page 3: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

2

LISTE DES ENSEIGNANTS

Listes des enseignants-chercheurs de la Faculté des Sciences Pharmaceutiques et Biologiques

Année 2019-2020

PROFESSEURS

Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire

BOUSTIE Joël X X

DONNIO Pierre-Yves X X X

FAILI Ahmad X

FARDEL Olivier X X X

FELDEN Brice X X

GAMBAROTA Giulio X

GOUGEON Anne X X

LAGENTE Vincent X X

LE CORRE Pascal X X X

LORANT (BOICHOT) Elisabeth X

MOREL Isabelle X X X

POREE François-Hugues X X

SERGENT Odile X X

SPARFEL-BERLIVET Lydie X X

TOMASI Sophie X X

VAN DE WEGHE Pierre X

VERNHET Laurent X X

Page 4: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

3

PROFESSEURS ASSOCIES

Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire

BUREAU Loïc X

DAVOUST Noëlle X

PROFESSEURS EMERITES

Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire

CILLARD Josiane X X

GUILLOUZO André X

URIAC Philippe X X

MAITRES DE CONFERENCES

Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire

ABASQ-PAOFAI Marie-Laurence

ANINAT Caroline X X

AUGAGNEUR Yoann

BEGRICHE Karima

BOUSARGHIN Latifa X

BRANDHONNEUR Nolwenn

BRUYERE Arnaud X

BUNETEL Laurence X

CHOLLET-KRUGLER Marylène X

COLLIN Xavier X

Page 5: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

4

CORBEL Jean-Charles X X

DELALANDE Olivier

DELMAIL David

DION Sarah

DOLLO Gilles X X X

GICQUEL Thomas X X

GILOT David X

GOUAULT Nicolas X

HITTI Éric

JEAN Mickaël X

JOANNES Audrey

LECUREUR Valérie X

LE FERREC Éric X

LE GALL-DAVID Sandrine

LE PABIC Hélène

LEGOUIN-GARGADENNEC Béatrice

LOHEZIC-LE DEVEHAT Françoise X X

MARTIN-CHOULY Corinne X

NOURY Fanny

PINEL-MARIE Marie-Laure

PODECHARD Normand

POTIN Sophie X X

RENAULT Jacques X X

ROUILLON Astrid

Page 6: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

5

LRU

ASSISTANTS HOSPITALO-UNIVERSITAIRES (AHU)

Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire

AUTIER Brice X X

BACLE Astrid X X

BOUVRY Christelle X X

MENARD Guillaume X X

ATER

Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire

KOWOUVI Koffi

Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire

AFONSO Damien

BELLAMRI Nessrine x

GUILLORY Xavier

Page 7: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

6

REMERCIEMENTS

A Monsieur le Professeur Pascal LE CORRE,

Pour l’honneur que vous me faites de présider ce jury de thèse, recevez l’expression de mon

respect et de ma considération.

A Monsieur le Docteur Romain BELLAY,

Je tiens à te remercier de m’avoir accompagné dans ce travail de thèse, pour ta disponibilité, le

temps consacré et tes nombreux conseils. Ce fut un plaisir de travailler avec toi.

A Madame le Docteur Cécilia NAUCZYCIEL,

Pour avoir accepté de juger ce travail, c’est un honneur de vous compter parmi mon jury de

thèse.

A Madame le Docteur Laurence SPIESSER,

Pour avoir accepté de participer au jury de cette thèse, recevez mes sincères remerciements.

Page 8: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

7

A l’équipe du Centre Hospitalier Guillaume Régnier de Rennes,

A toi Romain pour avoir accepté d’encadrer ma thèse. Je te remercie pour toutes les heures

passées à la relire, à tes corrections toujours pertinentes, pour ta patience, ta disponibilité et ton

écoute. Promis, si je gagne à l’Euromillions, je penserais à t’acheter une belle voiture.

A Bastien, parce que sans toi Guillaume Régnier aurait été beaucoup moins drôle. Merci pour

tes relectures, tes conseils avisés, ta méthode de lecture d’article qui m’a fait gagner beaucoup

de temps. Et merci de m’avoir fait découvrir Braindead qui manquait à ma culture

cinématographique.

A toi Nicolas qui est un chef à l’écoute, disponible, bienveillant et parfois impitoyable en ce

qui concerne le football, je n’oublierai plus jamais Guirassy et Ramirez.

A vous trois pour m’avoir permis de découvrir tout le potentiel du panneau de configuration,

de m’avoir rafraichi l’été quand il faisait chaud, de m’avoir appris à monter un ordinateur, de

m’avoir appris à toujours déconnecter ma session avant de partir et à ne jamais croire Romain

quand il dit qu’il a besoin de mes clés mais que « non promis il ne touchera pas à ma voiture ».

A ma co-interne Mathilde qui m’a accompagnée pendant trois semestres d’internat. Bon

courage pour ton assistanat.

Au top 2, la fine équipe, Pierrette et Sandrina, j’ai enfin découvert le pot aux roses (photos à

l’appui). Grâce à vous ma ventilation a fait ressortir longtemps des confettis dans la voiture.

A Christelle pour sa gentillesse, bon courage à toi pour la suite. A Catherine pour son écoute et

pour les répliques de films cultes. A Nathalie, la maman et confidente de l’équipe, je compte

sur toi pour finir le photomontage.

Enfin à toute l’équipe, j’étais très heureuse de faire la connaissance de vous tous Fabienne,

Hélène, Aline, Manon, Isabelle, Coralie, Benoît, Tiphaine et toutes les autres personnes que j’ai

rencontrées à la pharmacie de Guillaume Régnier.

Au Docteur Jean-Marie Batail pour m’avoir accordé de son temps afin de discuter de mon sujet

de thèse.

Aux internes en psychiatrie, et particulièrement à Damien, Louise, Marie-Océane, Guillaume

Myriam, Anne-Julie et Julia.

A l’équipe du Centre Hospitalier de Lannion,

Page 9: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

8

Merci aux pharmaciens et à l’équipe de préparateurs, ce fut un réel plaisir de débuter mon

internat à vos côtés.

A l’équipe du Centre Hospitalier Universitaire de Brest,

Aux pharmaciens, aux équipes de préparateurs et à toutes les personnes que j’ai croisées.

A l’équipe du Centre Hospitalier Universitaire de Rennes,

A l’équipe de production de l’Hôpital Sud, à Pierre-Nicolas et Marie-Antoinette pour votre

accueil et les projets réalisés ensemble.

A tous mes co-internes qui ont permis de rendre ces quatre années agréables,

Aux co-internes de Brest, la collok Ouassim, Gautier, Adrien, mais aussi Mathilde, Eléonore,

Julia, Alexia et Carmen.

A mon ancienne co-interne de Guillaume Régnier Muriel.

A Sophie et Hervé,

Pour la relecture de mon travail de thèse, j’espère que cela vous a plu. Merci pour tous ces repas

de famille et de m’accueillir si gentiment.

A Titouan et Emilie

Merci pour tous ses apéros et vivement les prochains.

A Team Caen

Mes amis de toujours. Merci à Chouille, Sis, Titi et Anaïs. Plus de 10 ans d’amitié que je chéris.

Merci pour tous ces moments passés ensemble. Depuis le lycée jusqu’à maintenant, nos vies

ont évolué ensemble et le futur s’annonce plein de promesses.

A Romain et Lucie

Enfin, je rejoins comme vous le banc des docteurs. Lucie je suis ravie d’avoir fait ta

connaissance en deuxième années de fac, tant de péripéties… Du week-end de bienvenue, en

passant par les galas et les jours de l’an. Vivement les retrouvailles. Merci à toi Romain d’être

toujours présent.

A Camille et Xavier

Merci pour cette semaine de vacances cet été. Camille tu es une belle rencontre de l’internat,

comme une fleur notre amitié s’est épanouie.

A mes amis Brestois

Page 10: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

9

Je vous ai rencontré lors d’un tonus à Aber Wrac’h autour d’une table de ping pong. Qui aurait

cru que cela déboucherait sur autant de bons moments passés ensembles.

A Julien

Je suis tellement heureuse d’avoir croisé ton chemin. Nous avons traversé ensemble cette

aventure, périple, épreuve qu’était cette dernière année d’internat. C’est grâce à toi que j’y suis

arrivée. De mes 30 ans à Saint-Malo à mon emménagement avec toi à Brest, c’est une belle

histoire qui commence. Merci pour ton amour.

A ma famille

A mes parents, à ma sœur Laura, ma mamie et toute ma famille. J’espère vous avoir rendu fier.

A la team des Soirées raclettes

Pour toutes ces soirées de ripailles inoubliables.

Page 11: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

10

TABLE DES MATIERES

LISTE DES ENSEIGNANTS .................................................................................................... 2

REMERCIEMENTS .................................................................................................................. 6

TABLE DES MATIERES ....................................................................................................... 10

LISTE DES ANNEXES ........................................................................................................... 13

LISTE DES FIGURES ............................................................................................................. 14

LISTE DES TABLEAUX ........................................................................................................ 15

LISTE DES ABREVIATIONS ................................................................................................ 16

INTRODUCTION .................................................................................................................... 18

I. LA DEPRESSION ............................................................................................................ 19

A. Epidémiologie .............................................................................................................. 19

B. Etiologie ....................................................................................................................... 20

1. Interaction entre gènes et environnement .................................................................. 20

2. Hypothèse monoaminergique .................................................................................... 21

C. Diagnostic ..................................................................................................................... 22

1. Signes cliniques ......................................................................................................... 22

2. Diagnostics différentiels ............................................................................................ 23

3. Outils diagnostiques .................................................................................................. 24

D. Dépression résistante .................................................................................................... 26

1. Définition ................................................................................................................... 26

2. Cause de la résistance aux traitements ...................................................................... 27

E. Suicide .......................................................................................................................... 28

F. Prise en charge ............................................................................................................. 30

1. Traitements pharmacologiques .................................................................................. 30

2. Thérapies non pharmacologiques .............................................................................. 31

i. Psychothérapie ....................................................................................................... 31

ii. Electroconvulsivothérapie .................................................................................. 31

iii. Stimulation Magnétique Transcrânienne ........................................................... 32

3. Stratégie thérapeutique .............................................................................................. 32

4. Cas de la dépression résistante .................................................................................. 36

II. ESKETAMINE ................................................................................................................. 37

Page 12: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

11

A. Découverte de la kétamine ........................................................................................... 37

1. Origines ..................................................................................................................... 37

2. Mésusage et réglementation ...................................................................................... 38

3. Propriétés anesthésiantes ........................................................................................... 38

4. Découverte des propriétés antidépressives ................................................................ 38

B. Propriétés pharmacologiques ....................................................................................... 39

1. Généralités ................................................................................................................. 39

2. Pharmacocinétique ..................................................................................................... 41

i. Absorption .............................................................................................................. 41

ii. Distribution ......................................................................................................... 42

iii. Métabolisme ....................................................................................................... 42

iv. Elimination ......................................................................................................... 43

3. Propriétés pharmacodynamiques ............................................................................... 44

i. Mécanisme d’action glutamatergique .................................................................... 44

ii. Action sur les récepteurs opioïdes ...................................................................... 48

iii. Transmission monoaminergique (noradrénaline et sérotonine) ......................... 49

iv. Autres ................................................................................................................. 50

C. Informations cliniques .................................................................................................. 50

1. Modalités d’administration ........................................................................................ 50

2. Posologie ................................................................................................................... 51

3. Contre-indications ..................................................................................................... 53

4. Surdosage................................................................................................................... 54

D. Données d’efficacité ..................................................................................................... 54

E. Données de tolérance ................................................................................................... 58

F. Réglementation ............................................................................................................. 61

1. Autorisation de Mise sur le Marché français ............................................................. 61

2. Autorisation de mise sur le marché à l’international ................................................. 62

3. Agrément aux collectivités ........................................................................................ 63

III. ETUDE DE CAS AU CENTRE HOSPITALIER GUILLAUME REGNIER ................. 64

A. Introduction .................................................................................................................. 64

B. Objectifs ....................................................................................................................... 64

C. Matériel et méthodes .................................................................................................... 65

Page 13: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

12

D. Résultats ....................................................................................................................... 66

1. Données cliniques recueillies .................................................................................... 66

2. Synthèse ..................................................................................................................... 71

3. Organisation............................................................................................................... 72

E. Discussion .................................................................................................................... 73

1. Données d’efficacité .................................................................................................. 73

2. Tolérance ................................................................................................................... 75

3. Organisation............................................................................................................... 76

4. Limites ....................................................................................................................... 77

CONCLUSION ........................................................................................................................ 79

REFERENCES ......................................................................................................................... 81

ANNEXE ................................................................................................................................. 94

Page 14: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

13

LISTE DES ANNEXES

Annexe 1 : Echelle MADRS .................................................................................................... 94

Annexe 2 : Tableau des différentes classes pharmacologiques et molécules antidépresseurs . 98

Page 15: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

14

LISTE DES FIGURES

Figure 1 : Prévalence de l'épisode dépressif caractérisé déclaré au cours des 12 derniers mois

chez les 18-75 ans, selon le sexe et la classe d'âge, France Métropolitaine, 2017 (3) ............. 20

Figure 2 : Taux de rémission pour EDC. (29) .......................................................................... 27

Figure 3 : Prévalence du suicide en Europe en 2016 (33). La légende représente le nombre de

suicides pour 100 000 habitants en 2016. La France se situe parmi les pays avec le plus haut

taux de suicide. ......................................................................................................................... 29

Figure 4 : Prise en charge de l'EDC (53) .................................................................................. 35

Figure 5 : Structure chimique de la phencyclidine et de la kétamine (63) ............................... 37

Figure 6 : La kétamine est composée d'un mélange racémique de deux énantiomères (73) .... 39

Figure 7 : Représentation de l'affinité de la kétamine pour ses récepteurs. L'affinité décroit de

la gauche vers la droite. La barre verticale représente la cible engagée aux doses efficaces (74)

.................................................................................................................................................. 40

Figure 8 : Métabolisme de la kétamine et les cytochromes impliqués (91) ............................. 43

Figure 9 : Récepteur NMDA en configuration fermée. (98) .................................................... 45

Figure 10 : Site de fixation de la kétamine sur le site PCP (74) ............................................. 46

Figure 11 : Inhibition de l'interneurone inhibiteur GABAergique par la kétamine. (100)....... 47

Figure 12 : Mécanisme d'action de la kétamine dans la dépression : 1) Inhibition de

l'interneurone GABA menant à la désinhibition du neurone glutamatergique 2) Augmentation

de la libération de glutamate 3) Activation des récepteurs AMPA 4) Libération du BDNF 5)

Activation en cascade de la voie de signalisation mTOR qui va stimuler la neurogénèse (101)

.................................................................................................................................................. 48

Figure 13 : Effets des populations spécifiques sur la pharmacocinétique de l'eskétamine (89)

.................................................................................................................................................. 53

Figure 14 : Evaluation du score MADRS au cours des administrations d'eskétamine : Score

allant de 0 (asymptomatique) à 60 (score maximum de l'EDC). ............................................. 71

Page 16: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

15

LISTE DES TABLEAUX

Tableau 1 : Classification de l'épisode dépressif caractérisé.................................................... 23

Tableau 2 : Paramètres pharmacocinétiques de l'eskétamine................................................... 44

Tableau 3 : Essais cliniques à court terme de l’eskétamine ..................................................... 54

Tableau 4 : Essai clinique sur l’eskétamine en traitement d’entretien ..................................... 56

Tableau 5 : Principaux effets secondaires statistiquement significatifs issus de la méta-analyse

de Zheng et al. (113). Les pourcentages sont tirés de deux essais cliniques de phase III (108)

(114) ......................................................................................................................................... 59

Page 17: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

16

LISTE DES ABREVIATIONS

5-HT : Sérotonine

AD : Antidépresseur

AFSSAPS : Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé

Akt : Protéine kinase B

AMM : Autorisation de Mise sur le Marché

AMPA : Acide α-amino-3-hydroxy-5-methyl-4-isoxazolepropionique

AMPAR : Récepteur à l’acide α-amino-3-hydroxy-5-methyl-4-isoxazolepropionique

ATU : Autorisation Temporaire d’Utilisation

AUC : Aire sous la courbe

BDNF : Facteur neurotrophique issu du cerveau

BPCO : BronchoPneumopathie Chronique Obstructive

CIM-10 : Classification Internationale des Maladies, 10ème version

Cmax : Concentration maximale

CME : Commission Médicale d’Etablissement

CHGR : Centre Hospitalier Guillaume Régnier

COMEDIMS : Commission du Médicament et des Dispositifs Médicaux Stériles

COVID-19 : Coronavirus

DHNK : Déhydronoreskétamine

DREES : Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques

DSM : Manuel Diagnostique et Statistique

ECT : Electroconvulsivothérapie

EDC : Episode Dépressif Caractérisé

EEF2 : Facteur d’élongation eucaryote 2

EI : Effets indésirables

EMA : Agence Européenne du Médicament

ERK : Extracellular signal-regulated kinase

Page 18: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

17

FDA : Food and Drug Administration

GABA : Acide γ-aminobutyrique

HDJ : Hospitalisation De Jour

HNK : Hydroxynoreskétamine

Ki : Constante de dissociation

ISRS : Inhibiteur Sélectif de la Recapture de la Sérotonine

IRSNA : Inhibiteur de la Recapture de la Sérotonine et de la Noradrénaline

MADRS : Montgomery Asberg Depression Rating Scale

mTOR : Cible mammalienne de la rapamycine

NET : Transporteur de la noradrénaline

NMDA : N-méthyl-D-aspartate

NMDAR : Récepteur au N-méthyl-D-aspartate

NNH : Number Needed to Harm

OMS : Organisation Mondiale de la Santé

PCP : Phenylcyclidine

PUT : Protocole d’Utilisation Thérapeutique

RCP : Résumé des Caractéristiques du Produit

SMTr : Stimulation Magnétique Transcrânienne répétée

Récepteur α : Récepteur adrénergique

Réseau PIC : Réseau Psychiatrie-Information-Communication

RCP : Réunion de Concertation Pluridisciplinaire

SERT : Transporteur de la sérotonine

S-norKET : Noreskétamine

STAR*D : Sequenced Treatment Alternatives to Relieve Depression

TrkB : Récepteur à la tyrosine kinas

Page 19: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

18

INTRODUCTION

Le trouble dépressif caractérisé concerne environ 15 à 20% de la population quel que soit

l’âge. A terme, la maladie a des répercussions importantes sur la vie du patient : cadre

professionnel, social, comorbidités somatiques (suicide, diabète, cardiopathies, etc.). Ainsi, on

estime que 10 à 20% des personnes souffrant de cette pathologie décèdent par suicide (1).

L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) classe ce trouble au premier rang de l’ensemble

des maladies en termes de dépenses globales pour la société (2). Il s’agit d’un véritable

problème de santé publique.

La prise en charge de la dépression peut être complexe et les classes thérapeutiques

disponibles ont une efficacité limitée. En effet, un tiers des patients ne répondent pas aux

traitements de manière satisfaisante, c’est la dépression résistante. Une innovation

thérapeutique, l’eskétamine, administrée par voie nasale, est disponible depuis 2019 dans cette

indication.

Au centre hospitalier Guillaume Régnier (CHGR), établissement public spécialisé en santé

mentale, l’eskétamine a été proposée aux patients en échec thérapeutique. Cette thèse a pour

objectif d’apporter des données d’efficacité et de tolérance de ce nouveau traitement au travers

des données de la littérature et d’une étude de cas au sein de notre établissement. Ce travail va

permettre d’établir une organisation commune dans notre établissement pour les patients traités

par eskétamine étant données les différentes contraintes liées à ce traitement.

La première partie de ce travail est consacrée à la pathologie dépressive et son évolution

possible en dépression résistante. Dans un second temps, nous axerons ce travail sur

l’eskétamine (propriétés pharmacologiques, données cliniques, tolérance, etc.). Puis, nous

présenterons les résultats obtenus au sein de notre établissement suite aux traitements par

eskétamine. Enfin, nous discuterons des résultats en les rapportant à la littérature.

Page 20: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

19

I. LA DEPRESSION

A. Epidémiologie

La santé mentale est inscrite au premier rang des priorités de santé publique par la charge

sanitaire, économique et sociale qu’elle représente. Elle regroupe l’ensemble des troubles

mentaux définis dans le DSM V (manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 5ème

édition) : troubles du spectre de la schizophrénie, troubles dépressifs, troubles bipolaires,

troubles neurocognitifs, etc. Les comorbidités somatiques et psychologiques ainsi que l’effet

néfaste sur les habitudes de vie (tabagisme, alcoolisme, diminution de l’activité physique,

pratiques sexuelles à risque) alourdissent le fardeau (3).

La dépression est la pathologie mentale chronique la plus fréquemment retrouvée dans

la population. Elle représente la première cause d’incapacité et de morbidité dans le monde. Le

nombre grandissant de personnes touchées par cette pathologie fait qu’en France, un tiers des

patients parmi les 2,1 millions d’adultes hospitalisés pour un motif psychiatrique, l’était pour

un épisode dépressif caractérisé (EDC) en 2013, selon le Comité Stratégique de la Santé

Mentale et de la Psychiatrie (4).

En 2017, d’après Santé publique France, parmi les personnes âgées de 18 à 75 ans

presque 10% avait vécu un EDC au cours des 12 derniers mois. Elle est en augmentation depuis

2010 et est 2 fois plus élevée chez les femmes que chez les hommes (Figure 1, page 20) (3).

Cette vulnérabilité chez la gente féminine s’explique à la fois par les bouleversements

hormonaux qui peuvent survenir à la puberté, après l’accouchement (dépression du post-

partum), et à la ménopause, ainsi que par les inégalités et les discriminations liées au sexe (5).

Les personnes au chômage, en situation de précarité et les moins de 45 ans sont celles pour

lequel les EDC déclarés sont les plus nombreux. Chez la personne âgée, les EDC sont réduits à

l’avancée de l’âge et sont sous-diagnostiqués alors que le risque suicidaire est plus important

(6). Les troubles dépressifs seraient ainsi responsables de 35 à 45% des arrêts de travail et

seraient retrouvés dans plus de la moitié des cas de décès par suicide (3)(4)(7).

Page 21: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

20

B. Etiologie

L’étiologie de la dépression est multifactorielle : génétique, psychologique,

environnementale et biologique. Ces éléments interagissent entre eux de manière complexe. En

vérité, la recherche n’a pas encore élucidé tous les mécanismes en jeu.

1. Interaction entre gènes et environnement

On sait qu’un individu à 2 à 4 fois plus de risques de développer un EDC si un de ses parents

au 1er degré en a souffert. On peut chiffrer la part d’hérédité à un tiers selon une méta-analyse

réalisée sur des jumeaux (8). C’est moins que pour la schizophrénie ou les troubles bipolaires

dont la part d’hérédité atteint 70%. Mais la génétique n’est pas la seule responsable. En effet,

une étude menée sur des jumeaux homozygotes a montré des discordances au sein des fratries

mettant en relief le rôle de l’environnement dans la genèse de la pathologie (9).

Figure 1 : Prévalence de l'épisode dépressif caractérisé déclaré au cours des 12 derniers mois chez les

18-75 ans, selon le sexe et la classe d'âge, France Métropolitaine, 2017 (3)

Page 22: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

21

La méta-analyse de Hyde et al. a réussi à identifier 17 variations génétiques associées à la

dépression sur 75 000 personnes d’origine caucasienne avec des antécédents d’EDC. Ces

variations sont réparties sur 15 régions du génome connues pour être exprimées au niveau

cérébral. L’un des gènes est commun à d’autres pathologies du système nerveux tels que

l’épilepsie et les déficits intellectuels. Un autre est retrouvé dans un modèle de dépression chez

la souris. La prévalence des états dépressif est plus élevée chez la femme, mais aucun locus

spécifique au genre n’a été localisé (10). Cependant, les gènes pris indépendamment les uns des

autres n’expliquent pas à eux seuls le phénotype. Il faut prendre en compte leurs connexions.

Même s’il existe une vulnérabilité génétique, elle n’explique pas à elle seule la survenue

d’un EDC. L’histoire d’un individu entre en jeu : traumatisme, environnement stressant ou

survenue d’un évènement malheureux sont des facteurs de risques. La réponse individuelle de

chaque personne varie et ne suffit pas à prédire un EDC. C’est pourquoi, il est plus juste de

parler d’interactions gène-environnement. C’est le domaine de l’épigénétique : notre

patrimoine génétique modère notre réponse à des facteurs de risques environnementaux (11).

L’étude prospective de grande ampleur de Caspi et al. en 2003 le démontre. En effet, le

polymorphisme génétique du transporteur sérotoninergique influence la réponse à des facteurs

de stress. Les personnes homozygotes pour le variant court manifestent plus de symptômes

dépressifs que les autres en réaction à un évènement traumatique (12). De même, des variants

du gène FBKP5, impliqué dans la voie du cortisol, augmentent les risques d’avoir un EDC si

pendant l’enfance les personnes ont été exposées à des facteurs de stress (13).

Les réponses émotionnelles à ces événements sont donc modulées par la constitution

génétique de chaque individu (9)(14).

2. Hypothèse monoaminergique

L’hypothèse monoaminergique postule que la dépression serait due à une diminution de

la concentration des monoamines (notamment sérotonine et noradrénaline) au niveau

cérébral. Cette théorie datant des années 50 est à l’origine de la découverte des classes

pharmacologiques d’antidépresseurs (AD). Ces différentes classes agissent en facilitant la

neurotransmission sérotoninergique et noradrénergique : en inhibant leurs recaptures ou en

limitant leurs dégradations dans la fente synaptique. Les AD tricycliques ou imipraminiques

sont les premiers à être synthétisés, suivis par les inhibiteurs de la monoamine oxydase (IMAO)

et les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) mieux tolérés. Une nouvelle

Page 23: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

22

classe d’AD d’action duale a ensuite fait son apparition : ce sont les inhibiteurs de la recapture

de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSNa). elle serait plus efficace sur les symptômes de

ralentissement moteur mais cette donnée reste contestée (15).

La simplicité du modèle monoaminergique est cependant remise en cause. En effet, les

découvertes d’une hypersensibilisation des récepteurs sérotoninergiques et noradrénergiques

ainsi qu’une désensibilisation des transporteurs des monoamines rendent plus complexes

l’hypothèse de base. Aussi, le délai d’action des AD reste inexpliqué. Des modifications

concernant la neuroplasticité ont été décelées par le biais d’administrations sur le long terme

des AD. Des mécanismes complexes sont donc à l’œuvre dans la genèse de la dépression

(15)(16).

C. Diagnostic

1. Signes cliniques

Il existe deux principales classifications internationales des diagnostics psychiatriques : la

Classification Internationale des Maladies, 10ème version (CIM-10), qui est celle de référence

et le Manuel diagnostique et statistique des maladies mentales, 5ème version (DSM-V) utilisé

en pratique clinique. Les deux se rejoignent sur l’expression des symptômes et peuvent se

résumer d’après le tableau suivant (Tableau 1 page 23). Le diagnostic d’EDC repose sur la

présence de symptômes caractéristiques provoquant une souffrance cliniquement significative

depuis au moins deux semaines, avec observation d’une rupture avec l’état antérieur du patient.

Les symptômes les plus fréquemment observés sont la tristesse, l’anhédonie (absence de

capacité à ressentir le plaisir), la perte de l’appétit, les troubles du sommeil ou encore le

ralentissement psychomoteur. Des difficultés socio-professionnelles viennent très souvent

compléter le tableau clinique (16).

Page 24: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

23

Symptômes

Durée minimale 2 semaines

Critères essentiels

majeurs

Présence d’au moins 2 des symptômes toute la journée :

1. Humeur dépressive

2. Perte d’intérêt et de plaisir

3. Fatigue ou perte d’énergie

Autres critères

Présence d’au moins 2 critères mineurs sur 7 :

1. Modification de l’appétit avec variation pondérale

2. Troubles du sommeil

3. Baisse de l’estime de soi et de la confiance en soi

4. Modification de l’activité psychomotrice

5. Sentiment de culpabilité / dévalorisation

6. Baisse de la concentration / attention

7. Idées suicidaires

Le nombre de critères définit la sévérité : légère, modérée, sévère.

2. Diagnostics différentiels

Il faut distinguer l’EDC d’autres pathologies psychiatriques telles que les troubles anxieux,

les troubles bipolaires ou les troubles schizophréniques. En effet, ces pathologies dans leurs

expressions diverses peuvent ressembler ou avoir des symptômes communs à la dépression.

Cependant, la physiopathologie et la prise en charge thérapeutique diffèrent.

• Troubles anxieux : pathologies durables avec majoration du stress et de l’angoisse. Ils

regroupent un ensemble de pathologies diverses (le trouble anxieux généralisé, le

trouble panique, le trouble anxiété sociale, la phobie spécifique, le trouble obsessionnel

compulsif, l’état de stress post-traumatique)

• Troubles bipolaires : caractérisés par un trouble de l’humeur avec une alternance

d’épisodes maniaques (excitation caractérisée) et dépressifs. Ce sont troubles

Tableau 1 : Classification de l'épisode dépressif caractérisé

Page 25: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

24

complexes difficiles à diagnostiquer. Le recours aux soins a lieu majoritairement lors

des épisodes dépressifs tandis que les épisodes de manie et surtout d’hypomanie peuvent

passer inaperçus. On peut donc conclure à tort à une dépression unipolaire retardant sa

prise en charge. En cas de dépression, il faut systématiquement rechercher des

antécédents de manie et des indicateurs de bipolarité. Les indicateurs devant faire

suspecter une bipolarité en phase dépressive sont une dépression avant 25 ans, des

antécédents familiaux de troubles bipolaires, un changement brutal dans le

fonctionnement psychique, plus de trois antécédents d’épisodes dépressifs, des

symptômes dépressifs atypiques, des tentatives de suicides répétées ou une réaction

anormale à un traitement AD (17).

• Troubles schizophréniques : associe syndrome dissociatif (désorganisation de la

pensée et du comportement), symptômes productifs (délires, hallucinations),

symptômes négatifs (appauvrissement émotionnel et affectif, isolement) et troubles

cognitifs. La schizophrénie déficitaire qui se caractérise par la prédominance de

symptômes négatifs peut se confondre au début avec des manifestations dépressives.

L’EDC provoqué par l’abus ou le sevrage de substances psychoactives (médicaments,

drogues) sont à exclure du diagnostic. Cependant, ces comorbidités sont fréquentes avec par

exemple l’alcoolodépendance.

3. Outils diagnostiques

Différentes échelles ou outils permettent en pratique courante le diagnostic de dépression,

d’en apprécier la sévérité et de quantifier le risque suicidaire encouru. Certaines ne sont pas

spécifiques de la dépression et peuvent être appliquées dans d’autres pathologies

psychiatriques.

Echelles de diagnostic et d’évaluation de la sévérité de la dépression :

• MADRS (Montgomery Asberg Depression Rating Scale) (Annexe 1 : Echelle MADRS:

échelle permettant d’évaluer la sévérité de la dépression. Composée de 10 items, elle

permet de coter l’intensité des symptômes concernant le degré de tristesse, l’humeur,

les troubles somatiques (appétit, sommeil), l’épuisement physique et psychique,

l’anhédonie et enfin le suicide. Elle est utilisée en pratique pour déterminer l’efficacité

d’un traitement AD. Le score varie de 0 à 60, 15 est la valeur seuil au-delà de laquelle

Page 26: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

25

le patient est considéré en dépression. Cette échelle est utilisée fréquemment par les

psychiatres et dans les essais cliniques (16).

• HDRS score ou HAM-D (Hamilton Depression Rating Scale). Initialement, cette

échelle était utilisée dans les années 50 pour évaluer l’efficacité de la première

génération d’AD. Elle est utilisée chez des sujets dont le diagnostic de dépression est

déjà établi. Elle juge de la sévérité du trouble par hétéro-évaluation grâce à 21 items.

Son but est donc de mettre en évidence les modifications de l’état de la maladie (16).

• BPRS (Brief Psychiatric Rating Scale) : cette échelle, non spécifique de la dépression,

est destinée à la mesure des changements symptomatiques chez des patients hospitalisés

en psychiatrie. L’évaluation repose sur un ensemble d’items : 18 classiquement (18).

• BDI (Beck Depression Inventory) : elle permet dans sa version révisée, grâce à 21

questions, de statuer sur la sévérité de la dépression via le score global obtenu. Sont

évalués les domaines cognitif, affectif, les symptômes somatiques et végétatifs. Un

score ≥ 14 signe une dépression (19).

• MINI (mini-entretien neuropsychiatrique international) : entretien diagnostic structuré,

d’une vingtaine de minutes, qui explore les principaux troubles psychiatriques classés

par modules. Ceux-ci regroupent par exemple l’état dépressif majeur (EDM), l’EDM

avec caractéristiques mélancoliques, le risque suicidaire, les troubles paniques (20).

• IDS-C 30 (Inventory of Depressive Symptomatology) : hétéro-questionnaire réalisé par

le médecin (C pour Clinician) fait de 30 items quantifiant la sévérité d’un EDM. Le

IDS-SR est, lui, rempli par le patient (Self Report) (21).

• CGI-S (Clinical Global Impression Severity Scale) jauge de la sévérité d’une

pathologie. La cotation varie de 0 à 7, soit de « non évalué » à « extrêmement malade »

et évalue les changements avant et après traitement (22).

Echelles d’évaluation du risque suicidaire :

• SSI (Scale for Suicidal Ideation) est une échelle regroupant 19 items qui cotent le risque

suicidaire de 0 à 2 (0 = fort, 2 = aucun). Exemple de question : « évalue ton désir de

vivre » (23).

• SIBAT (Suicide Ideation and Behavior Assessment Tool) est une échelle d’évaluation

du risque suicidaire, complétée à la fois par le patient et le clinicien (24).

• C-SSRS (Columbia–Suicide Severity Rating Scale) est une échelle d’évaluation du

risque suicidaire créée par les chercheurs de l’Université de Columbia. Elle identifie

Page 27: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

26

pour cela des comportements spécifiques, pouvant indiquer l’intention de se donner la

mort. Le questionnaire peut être complété par le patient ou le psychiatre (25).

D. Dépression résistante

1. Définition

La dépression résistante est définie par l’absence de réponse ou une réponse

insuffisante à au moins deux traitements antidépresseurs de classe pharmacologique

différente bien conduits en termes de dose, de durée et d’observance. Elle affecte 15 à 30

% des patients dépressifs (26)(27).

La notion de dépression résistante aux traitements a été évaluée notamment grâce à

l’étude STAR*D de Rush et al. achevée en 2006. Cette étude de grande ampleur (plus de 4000

patients) assure 4 niveaux de prise en charge successifs en fonction de la présence ou non d’une

réponse au traitement initié. En première intention, les patients étaient traités par citalopram

(ISRS). Le traitement était maintenu en cas de réponse clinique. En cas d’échec, une autre

stratégie, pharmacologique ou non, en association ou non, était mise en place (et ce, réappliqué

à chaque ligne de traitement). L’étude STAR*D atteste d’un fait : plus le patient progresse dans

les étapes, plus les taux de rémissions sont faibles allant de 36,8% à 13% après le 4ème niveau

de prise en charge. Les taux de rechutes sont également plus élevés. Le taux de rémission

cumulée est de 67% correspondant à un tiers de patients atteints de dépression dite résistante

(28) (Figure 2, page 27).

Page 28: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

27

2. Cause de la résistance aux traitements

Il existe un terrain de la dépression résistante. Les facteurs favorisant la résistance sont (30):

- Socio démographiques : La proportion est plus élevée chez les femmes, les célibataires,

et elle augmente avec l’âge. La précarité sociale, le bas niveau d’éducation et de

scolarisation augmentent le risque également.

- Cliniques

o Caractéristiques du trouble dépressif : Le nombre d’EDC, leurs intensités, leurs

durées, et le délai avant l’initiation d’un premier traitement sont associés à la

résistance. Les symptômes psychotiques couplés à l’EDC rendent le diagnostic

plus difficile.

o Comorbidités psychiatriques : L’anxiété, le syndrome de stress post-

traumatique, les addictions et les troubles de la personnalité sont des facteurs de

mauvais pronostic sur le long terme.

o Comorbidités somatiques : Les troubles endocriniens (hypothyroïdie),

métaboliques, cardio-respiratoires, neurologique (maladie de Parkinson) et les

douleurs chroniques, sont parfois en cause dans la non réponse aux traitements.

o Facteurs psychologiques

o Pharmacologique : Beaucoup d’AD sont métabolisés au niveau hépatique, la

variabilité interindividuelle des cytochromes peut être responsable d’une

Figure 2 : Taux de rémission pour EDC. (29)

Page 29: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

28

diminution de la concentration plasmatique des principes actifs (31). Certains

médicaments inhibiteurs ou inducteurs enzymatiques peuvent également

interagir. Les interactions médicamenteuses peuvent limiter les possibilités de

traitement en cas de contre-indication. Des traitements ont aussi une action

dépressogène (ex : bêta-bloquants).

E. Suicide

Le suicide est l’acte de mettre fin à ses jours. Dans le monde, près de 800 000 personnes

se donnent la mort tous les ans, soit un décès toutes les 40 secondes. C’est plus que les guerres

et les homicides réunis (32). En Europe, la France se situe parmi les pays ayant un taux élevé

de suicides Figure 3 : Prévalence du suicide en Europe en 2016 (33). La légende représente le

nombre de suicides pour 100 000 habitants en 2016. La France se situe parmi les pays avec le

plus haut taux de suicide. (Figure 3, page29).

Page 30: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

29

Si l’on s’intéresse à l’âge des personnes, le suicide est la deuxième cause de mortalité

chez les 15-29 ans derrière les accidents de la route (34). Les individus de 15 ans ou moins sont

ceux ayant le taux de suicide le plus bas (35). Cependant, les taux de suicide les plus élevés

sont retrouvés chez les individus âgés de plus de 70 ans (35). En termes de sexe, les hommes

se suicident 1,8 fois plus que les femmes. L’ingestion de pesticides, la pendaison et les armes à

feu sont les méthodes de suicide les plus répandues (36). Les tentatives de suicide sont 10 à 30

fois plus importantes que le suicide (37). Le facteur de risque identifié dans la genèse du suicide

est la présence de troubles psychiatriques. Le passage à l’acte est généralement secondaire à

une dépression (30%), à la consommation de substances (18%), aux troubles psychotiques

(14%) et aux troubles de la personnalité (13%) (38). Les autres facteurs sont les difficultés

financières ou relationnelles.

La France présente un des taux de suicides les plus élevés d’Europe, avec 9000 décès

par suicide par an (Figure 3). En 2017, 7% de la population déclarait avoir fait une tentative de

suicide (39). Les secteurs d’activité les plus touchés sont la restauration et l’hébergement, les

arts et spectacles et l’enseignement. La situation des jeunes filles est particulièrement

préoccupante avec une augmentation des tentatives de suicide et pensées suicidaires depuis

2011, associée à la consommation de substances psychoactives et au décrochage scolaire (39).

Figure 3 : Prévalence du suicide en Europe en 2016 (33). La légende représente le nombre de suicides

pour 100 000 habitants en 2016. La France se situe parmi les pays avec le plus haut taux de suicide.

Page 31: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

30

Ainsi, le suicide est un comportement répandu et courant, majoritairement associé à une

pathologie psychiatrique pour lequel une prévention existe.

F. Prise en charge

La prise en charge des EDC repose sur l’association de traitements pharmacologiques

et de thérapies non pharmacologiques, devant être associés pour une prise en charge optimale.

1. Traitements pharmacologiques

Les différentes classes thérapeutiques regroupent principalement les ISRS (inhibiteurs

sélectifs de la recapture de la sérotonine), les IRSNA (inhibiteur de la recapture de la sérotonine

et de la noradrénaline), les imipraminiques et les IMAO (inhibiteur de la monoamine oxydase).

Au total, une vingtaine de médicaments AD sont disponibles en France (Annexe 2).

Actuellement, aucun essai clinique n’a montré de différences entre les taux de réponses quel

que soit les AD prescrits. Cependant, les ISRS, IRSNA ou autres AD ont une meilleure

tolérance que les IMAO et les imipraminiques c’est pourquoi ils sont initiés prioritairement.

Cependant, il est judicieux d’adapter les AD en fonction du sous-type de dépression (40).

Le traitement médicamenteux n’est prescrit que dans les dépressions d’intensité modérée à

sévère, selon les recommandations de la HAS (16)(41). En effet, l’action d’une telle médication

administrée chez des patients souffrant d’épisodes dépressifs non caractérisés ou d’EDC léger

n’a pas mis en évidence de bénéfice thérapeutique (16).

Le choix d’une classe d’AD est multifactoriel :

- Symptomatologie

- Sévérité des symptômes

- Âge du patient (interactions médicamenteuses du sujet âgé, autorisation de mise sur le

marché - AMM - chez l’enfant)

- Classe thérapeutique déjà utilisée avec efficacité et bien tolérée lors d’un épisode

dépressif antérieur.

L’objectif du traitement est l’obtention d’une rémission complète des symptômes

dépressifs. La présence d’une symptomatologie résiduelle devient même un facteur prédictif de

récidive (42). L’échelle MADRS est un des étalons permettant de juger de la guérison. Le

Page 32: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

31

patient est considéré comme guéri lorsque son score est inférieur à 9, en rémission partielle

pour un résultat entre 10 et 20. Au-delà, il est estimé non répondeur. Généralement, un tiers des

patients répondent au traitement, un tiers y répondent partiellement et un tiers n’y répondent

pas.

Par ailleurs, le risque suicidaire par levée d’inhibition, reste polémique. Si ce risque est

l’un des principaux éléments de gravité de la dépression, l’introduction de nouveaux

médicaments AD a engendré une baisse du taux de suicide (43). Il n’en reste pas moins que

l’apparition d’un comportement suicidaire suite à leur administration est rapportée depuis

longtemps (44)(45). Une revue de 702 essais issus de MedLine et de la bibliothèque Cochrane

portant sur 87 650 patients met en évidence une association entre les tentatives de suicide et le

traitement par ISRS chez l’adulte (46). Ainsi, le rapport entre AD et risque suicidaire demeure

complexe et controversé. De fait, des précautions doivent être prises pour éviter tout risque

accru de suicide à l’instauration d’un traitement AD.

2. Thérapies non pharmacologiques

i. Psychothérapie

La psychothérapie est un exemple de prise en charge non pharmacologique, avec différentes

approches :

- De soutien (empathie, écoute, soutien permettant une restauration des projets)

- Cognitivo-comportementale (rassemblent les données les plus nombreuses)

- D’inspiration analytique

- Systémique

En l’absence de données comparatives suffisantes, toutes ces psychothérapies peuvent être

mises en œuvre (47).

ii. Electroconvulsivothérapie

Dans l’arsenal de traitement, il existe aussi l’électroconvulsivothérapie (ECT). Ce procédé,

autrement appelé sismothérapie, a été introduit en France dans les années 40. Son principe

consiste à provoquer une crise comitiale généralisée via un courant électrique transcrânien, chez

un malade endormi sous anesthésie générale et curarisé. Elle permet une rémission complète de

la dépression dans 65% des cas. Chez les patients pharmaco-résistants, le pourcentage diminue

à 48% (48).

Page 33: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

32

iii. Stimulation Magnétique Transcrânienne

La Stimulation Magnétique Transcrânienne répétée ou SMTr est une neurostimulation non

invasive au moyen d’un champ magnétique focalisé et répété de haute intensité, introduite en

1985. Le cortex pré-frontal dorso-latéral est visé (49), au moyen d’une bobine inductrice placée

au contact du scalp, pour en moduler l’activité électrique. Cette thérapeutique n’est disponible

que dans 150 centres en France. Une note de cadrage, émise par la HAS (50) en octobre 2020,

préconise son utilisation en cas de dépression unipolaire pharmaco-résistante clairement établie

ou dans les « cas graves » de dépression unipolaire en alternative à la sismothérapie, dans le but

de potentialiser les traitements déjà en cours Elle semble être une option intéressante dans

l’arsenal des traitements de la dépression, cette technique garantissant sécurité, rapidité et

efficacité (51).

3. Stratégie thérapeutique

Le traitement d’un épisode dépressif découle de la sévérité des symptômes (Figure 4, page

35) (52).

- Dépression légère : psychothérapies par thérapies cognitivo-comportementales et

thérapies interpersonnelles.

- Dépression modérée : traitement ambulatoire, initiation d’un traitement AD en

favorisant les molécules les mieux tolérées (par exemple ISRS), dont le délai d’action

est de 3 à 5 semaines. On peut y allier une psychothérapie, comme dans la dépression

légère.

- Dépression sévère : traitement ambulatoire ou en hospitalisation en cas de risque

suicidaire élevé, de retentissement somatique marqué (anorexie), d’entourage familial

ou social du patient insuffisant, en cas d’agitation, de violence, de conduite addictive ou

en présence de symptômes psychotiques. Le traitement est le même que celui de la

dépression modérée.

- Dépression mélancolique : Hospitalisation pour réalisation d’ECT en première

intention ou IRSNA (venlafaxine) ou tricyclique et antipsychotique atypique. L’ECT,

par sa plus grande rapidité d’action et sa bonne tolérance, est indiquée en première

intention dans les formes mélancoliques sévères, en particulier chez les patients âgés

présentant des symptômes somatiques ou des idées suicidaires mettant en jeu le

pronostic vital (53).

Page 34: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

33

L’efficacité du traitement sera systématiquement réévaluée au bout de 4 à 8 semaines de

traitement.

En cas de :

- Traitement efficace :

- Réponse complète : maintien du traitement à posologie efficace, pour 6 mois à

1 an. Arrêt progressif au décours.

- Réponse partielle : majoration de la dose, changement de classe voire

association d’AD.

- Échec du traitement dans une dépression modérée : il est important dans un

premier temps de vérifier l’observance du patient (régularité des prises, doses

suffisantes, un dosage plasmatique peut être effectué le cas échéant). Un changement de

classe d’AD devra être envisagé. Le choix de la nouvelle classe (par exemple IRSNA)

se fera en fonction des antécédents de traitement du patient (efficacité et tolérance) et de

la symptomatologie (54).

- Échec du traitement dans une dépression sévère : une hospitalisation devra être

envisagée avec réévaluation du traitement.

Une nouvelle évaluation est menée après 4 à 8 semaines.

En cas de :

- Traitement efficace : maintien du traitement à dose efficace pour 6 mois à 1 an, puis

arrêt progressif. S’il s’agit du troisième épisode, alors le traitement est poursuivi pour

au moins 2 ans.

- Échec du traitement : un avis spécialisé est requis, l’historique des traitements

médicamenteux du patient sera analysé.

- Absence de forme mélancolique ou de risque suicidaire élevé : stratégie de

potentialisation par :

▪ Association d’un AD au lithium (hors AMM), de tri-iodothyronine

(hors AMM) ou d’aripiprazole (hors AMM).

▪ Association d’AD comme fluoxétine et miansérine ou venlafaxine et

mirtazapine.

Page 35: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

34

▪ Changement de classe : le choix de la nouvelle classe se fera en

fonction des antécédents de traitement du patient (efficacité et

tolérance) et de la symptomatologie (par exemple imipraminiques).

- Forme mélancolique ou risque suicidaire élevé : ECT.

Page 36: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

35

Sp : symptômes

Figure 4 : Prise en charge de l'EDC (53)

Page 37: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

36

4. Cas de la dépression résistante

Elle nécessite un avis spécialisé. Le psychiatre confirme le statut de dépression résistante

en réévaluant le diagnostic et en s’assurant que les traitements déjà administrés étaient

cohérents (posologie, durée, molécule, observance). Enfin, il élimine toute étiologie organique

ou psychologique de résistance.

Le médecin a alors plusieurs stratégies thérapeutiques :

- L’augmentation de posologie tout en respectant l’intervalle de posologie recommandé

par l’AMM, après dosage plasmatique. La relation dose-efficacité a été retrouvée chez

les patients traités par tricyclique et IRSNA (55). Le suivi thérapeutique

pharmacologique (STP) des AD permet de vérifier que la concentration des traitements

est comprise dans une fourchette de valeurs adéquates. Si la concentration est en dessous

de la valeur seuil cela peut expliquer l’inefficacité thérapeutique. Les causes peuvent

être l’inobservance, une interaction médicamenteuse ou encore la métabolisation de la

molécule qui varie d’un patient à l’autre (31). Le dosage n’est pas utile pour tous les

AD, il est cependant fortement recommandé pour les AD tricycliques et le citalopram.

- Le changement d’antidépresseur : le choix de la nouvelle classe se fera en fonction

des antécédents de traitement du patient (efficacité et tolérance) et de la

symptomatologie (par exemple imipraminiques, venlafaxine ou IMAO).

- La potentialisation par l’adjonction de sels de lithium ou de triodothyronine. Elle

évite la perte du bénéfice du premier traitement et pourrait avoir un effet plus rapide

(56).

- L’adjonction d’une psychothérapie pour renforcer l’effet des AD (57).

- L’ECT (58).

- Les associations d’antidépresseurs : devront être choisies après avoir essayé les

stratégies suscitées (59).

Depuis peu, une nouvelle molécule venant compléter l’arsenal thérapeutique est disponible

pour le traitement de la dépression résistante : l’eskétamine.

Page 38: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

37

II. ESKETAMINE

A. Découverte de la kétamine

1. Origines

La kétamine est un anesthésique synthétique dérivé du phencyclidine (PCP) synthétisée par

Calvin L. Stevens en 1962 (Figure 5). Son nom provient des groupements chimiques qui la

composent : une cétone et une amine (60). Le PCP fut alors abandonné au profit de la kétamine

car elle présentait le double avantage d’avoir une plus courte durée d’action et un meilleur profil

de tolérance. Par la suite, elle fut testée sur des prisonniers qui décrivaient des sensations

étranges de déréalisation et de dissociations. Ces effets psychotropes à la phase d’émergence

mimaient les symptômes psychotiques de la schizophrénie. Ces propriétés ont conduit à

l’émergence d’un nouveau modèle pharmacologique schizophrénique impliquant une

dysfonction glutamatergique et non uniquement dopaminergique (61). Elle fut alors décrite

comme « anesthésiant dissociatif » c’est-à-dire qu’elle induit une catalepsie, une amnésie et une

analgésie sans perte réelle de conscience (62).

Figure 5 : Structure chimique de la phencyclidine et de la kétamine (63)

Kétamine : C13H16ClNO Phencyclidine

Page 39: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

38

2. Mésusage et réglementation

En 1970, la Food and Drug Administration (FDA), organisation américaine de santé

publique, autorisa l’usage de la kétamine pour soigner les soldats blessés lors de la guerre du

Vietnam. En raison de ses effets psychédéliques, la kétamine était détournée de son usage

médical à des fins toxicomaniaques (64). En 1992, les premiers cas d’abus en France lors de

« rave-party » étaient rapportés, engendrant une surveillance accrue suite à des hospitalisations

et à des décès. Puis en 1997, l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé

(AFSSAPS) inscrivit la kétamine sur la liste des stupéfiants à l’exception des préparations

injectables. Depuis avril 2017, elle suit la réglementation des stupéfiants et est retirée de la liste

I des substances vénéneuses (65).

3. Propriétés anesthésiantes

La kétamine est un anesthésique général, d'action rapide, administrable par voie

intraveineuse ou intramusculaire. Elle entraîne une anesthésie particulière, dite dissociative,

puisqu’elle déconnecte le système nerveux central de tous stimuli extérieurs (66). Elle présente

comme avantage sa rapidité d’action, l’absence de dépression respiratoire et une stimulation

cardiovasculaire stable. Elle est plus souvent utilisée comme adjuvant à l’anesthésie générale

grâce à son action analgésique puissante. Elle est aussi utilisée en péri-opératoire pour

potentialiser l’action des opioïdes et prévenir la chronicisation des douleurs (67). C’est à cause

de ses effets psychodysleptiques que le champ d’action de la kétamine a été limité pendant

plusieurs dizaines d’années. Cependant, un regain d’intérêt pour cette molécule est constaté,

par sa nouvelle indication dans la prise en charge de la dépression. Enfin, des études sont en

cours concernant la kétamine dans la prise en charge de la douleur aigüe et chronique ainsi que

les douleurs cancéreuses (déjà utilisée en pratique hors AMM), mais aussi dans la prise en

charge des addictions à l’alcool et l’héroïne (68).

4. Découverte des propriétés antidépressives

En 2000, Berman et al. ont étudié pour la première fois les propriétés antidépressives de la

kétamine dans une étude randomisée en double-aveugle versus placebo sur 7 patients suivis

pour un EDC. Soixante-douze heures après l’administration de la kétamine par voie

intraveineuse, tous les patients ont connu une diminution significative des symptômes

dépressifs. La dose utilisée de 0,5mg/kg en une prise était plus faible que la dose utilisée en

Page 40: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

39

anesthésie (2mg/kg). Les effets indésirables psychomimétiques disparaissent quant à eux en

quelques heures. La rapidité d’action de la kétamine en fit une découverte intéressante.

L’hypothèse d’une action antidépressive médiée par l’utilisation d’antagonistes aux récepteurs

NMDA (N-méthyl-D-aspartate) fut renforcée (69). De même, des études de plus grande

ampleur comparant la kétamine à dose unique versus placebo ont suggéré une réduction

substantielle des idées suicidaires chez les patients souffrant de dépression résistante au

traitement ou bipolaire (70)(71).

B. Propriétés pharmacologiques

1. Généralités

La kétamine racémique est composée des énantiomères eskétamine (S-kétamine) et

arketamine (R-kétamine) (Figure 6). Cette configuration optique opposée leur confère des

propriétés pharmacologiques différentes. C’est une molécule liposoluble dont l’administration

peut se faire par diverses voies (intramusculaire, intraveineuse, nasale, rectale) et qui a une

distribution étendue dans l’organisme (72).

La molécule de kétamine possède différentes affinités pour plusieurs récepteurs. La plus

forte est pour le récepteur N-méthyl-D-aspartate (NMDA) au glutamate : antagonisme non

sélectif et non compétitif (Figure 7, page 40) (74).

Figure 6 : La kétamine est composée d'un mélange racémique de deux énantiomères (73)

Page 41: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

40

La constante d’inhibition Ki de l’eskétamine pour le récepteur NMDA est de 0,30µM alors

qu’elle est de 1,40µM pour l’arketamine. L’eskétamine possède donc une affinité quatre fois

supérieure pour ce récepteur que son énantiomère (75)(76). Cela explique une meilleure

analgésie et anesthésie à des doses plus faibles que le mélange racémique (77). L’eskétamine

présente également une meilleure clairance et une durée de récupération plus faible après

anesthésie comparée à la kétamine (13)(78). Elle entraine aussi moins de somnolence, de

troubles cognitifs et d’effets psychotiques (77). C’est pourquoi l’eskétamine a été

commercialisée comme anesthésique sur le marché européen (79) puis par la suite comme AD.

Un essai clinique est en cours pour étudier la non infériorité de l’eskétamine par rapport à la

kétamine dans la dépression résistante (80).

Figure 7 : Représentation de l'affinité de la kétamine pour ses récepteurs. L'affinité décroit de la gauche

vers la droite. La barre verticale représente la cible engagée aux doses efficaces (74)

Page 42: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

41

En revanche, des études précliniques sur des modèles animaux de dépression ont

démontré une meilleure efficacité, une plus longue durée d’action et moins d’effets indésirables

chez le groupe traité par arketamine. L’incidence des effets psychomimétiques est aussi plus

faible que dans le groupe eskétamine avec des doses pourtant plus élevées (81)(82).

Vollenweider et al. ont montré qu’aux mêmes doses, l’eskétamine entraine plus de réactions

psychotiques que l’arkétamine (83)(76). Ainsi, de plus amples investigations doivent être

menées pour évaluer l’intérêt de l’arkétamine. Il manque en particulier des études sur la

comparaison entre eskétamine et arkétamine en termes d’efficacité et de tolérance dans la

dépression résistante. Seules l’eskétamine et la kétamine racémique sont actuellement

commercialisées.

2. Pharmacocinétique

i. Absorption

La kétamine administrée par voie veineuse, première forme commercialisée en

anesthésie, n’est pas adaptée à un usage quotidien pour traiter la dépression. En effet, la voie

veineuse a l’inconvénient d’augmenter le risque infectieux et le risque de complications

(thrombose, œdème, etc.). La voie orale est la voie d’administration la plus fréquente mais sa

biodisponibilité est faible (20%) en raison de l’effet de premier passage hépatique. La voie

nasale quant à elle présente une biodisponibilité plus élevée de l’ordre de 45% (75) car elle

shunte l’effet de premier passage hépatique. Son utilisation est indolore et son usage facile.

L’absorption nasale est la deuxième voix la plus rapide après la voie intraveineuse grâce à la

riche vascularisation de la muqueuse des voies respiratoires et sa surface relativement grande.

Cependant, la diffusion est mauvaise en cas d’encombrement par du mucus. Une grande

variabilité interindividuelle est retrouvée tant dans le délai que dans l’intensité des effets. Elle

peut s’expliquer par la technique d’administration : une partie du médicament peut être avalée

ou évacuée par le nez (84)(85)(86)(87). Les données de pharmacocinétique proviennent

principalement d’articles sur l’usage de la kétamine ou de l’eskétamine en anesthésie dans la

population pédiatrique par voie intraveineuse et nasale. Les essais cliniques de phase Ⅰ de

l’eskétamine commercialisée dans la dépression n’ont pas été publiés (88).

La concentration plasmatique maximale (Cmax) est atteinte en 20 à 40 minutes après la

dernière pulvérisation nasale, c’est le Tmax (temps au bout duquel on obtient la concentration

maximale). On peut déjà mesurer l’eskétamine dans le plasma 7 minutes après une dose de

Page 43: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

42

28mg. Les doses de 28, 56 et 84mg ont entrainé des augmentations dose-dépendantes de la

Cmax et de l’aire sous la courbe (AUC). La Cmax et l’AUC affichent des variations inter-

individuelles importantes. En effet, d’un individu à l’autre, les valeurs de Cmax et d’AUC

oscillent respectivement de plus ou moins 66% et 45% de la valeur moyenne. Pour un même

individu, la Cmax peut varier de 15% et l’AUC de 10% (variation intra-individuelle) (89). Le

profil pharmacocinétique de l’eskétamine est similaire après administration d’une dose unique

ou de doses répétées, sans accumulation plasmatique lorsque l’eskétamine est administrée deux

fois par semaine (88).

ii. Distribution

Le volume de distribution (Vd) de l’eskétamine est de 709L à l’équilibre grâce à sa lipophilie

(88). Cette molécule diffuse donc largement au niveau tissulaire dans les organes richement

vascularisés, particulièrement au niveau cérébral (84). Son métabolite, la noreskétamine,

diffuse également au niveau cérébral mais en concentration moindre (89). La liaison aux

protéines plasmatiques est faible allant de 43 à 45%. L’eskétamine n’est pas un substrat des

transporteurs P-glycoprotéines (P-gP) ou du transporteur d’anions organiques (OATP) (88).

iii. Métabolisme

Dans les microsomes hépatiques humains, l’eskétamine va majoritairement être

métabolisée en noreskétamine (S-norKET) et minoritairement en hydroxyeskétamine.

L’eskétamine subit une N-déméthylation réalisée en grande partie par le cytochrome P450 2B6

(CYP2B6) et aussi 3A4 (CYP3A4). Par la suite, la noreskétamine est rapidement métabolisée

en hydroxynorkétamine (HNK) ou en déhydronoreskétamine (DHNK) qui sont les métabolites

majeurs actifs (90) (Figure 8, page 43). Le polymorphisme génétique des cytochromes P45O

est une source de variabilité interindividuelle concernant la concentration sanguine de

nombreux médicaments. Cependant, une étude sur le cytochrome CYP2B6 n’a pas montré de

concentrations plasmatiques différentes de kétamine ou de ses métabolites parmi les variants

génétiques du CYP2B6 (91). On peut ajouter qu’il n’y a pas d’interactions avec les inducteurs

et les inhibiteurs enzymatiques des cytochromes P450 selon le laboratoire qui commercialise

l’eskétamine (92). Cependant, dans le « Journal of Clinical Psychiatry », il est rapporté que la

rifampicine, inducteur enzymatique connu, augmente la métabolisation de l’eskétamine et de la

norkétamine. La ticlopidine et les macrolides, inhibiteurs enzymatiques, augmentent la

concentration d’eskétamine tandis que l’itraconazole n’a pas montré d’effet (93). En ce qui

Page 44: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

43

concerne l’activité des métabolites de l’eskétamine, une étude effectuée sur des souris a montré

que la norkétamine (mélange racémique de noreskétamine et norarkétamine) était mieux tolérée

et aussi efficace que l’eskétamine, et serait donc potentiellement une alternative à l’eskétamine

(94). Paul et al. ont démontré que la norkétamine et l’hydroxynorkétamine stimulaient au même

titre que la kétamine la protéine kinase mTOR responsable de la plasticité synaptique (95) (96)

(voir la partie sur les propriétés pharmacodynamiques).

iv. Elimination

La clairance (Cl) de l’eskétamine est de 89L/heure. Une baisse rapide de la

concentration plasmatique est observée dans les premières heures puis elle devient plus

progressive. La demi-vie terminale (T1/2) oscille entre 7 et 12h en moyenne. L’excrétion est

majoritairement hépatique et on retrouve un faible pourcentage de métabolites de l’eskétamine

dans les urines (88). L’élimination de la noreskétamine est plus lente que celle de l’eskétamine.

Elle se fait aussi en deux phases, avec une demi-vie de 8 heures (89). On n’observe aucune

accumulation plasmatique d’eskétamine suite à des prises répétées deux fois par semaine.

Cependant, des injections intraveineuses répétées de kétamine prolongent son élimination (90).

On peut se demander dans quelle mesure l’eskétamine peut connaitre le même phénomène.

Figure 8 : Métabolisme de la kétamine et les cytochromes impliqués (91)

Page 45: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

44

Les principaux paramètres pharmacocinétique de l’eskétamine sont répertoriés dans le tableau

ci-dessous (Tableau 2)

Paramètres Valeurs

Tmax 20 à 40 min

Biodisponibilité 48%

Cl 89 L/h

T 1/2 7 à 12 h

VD 709 L

Liaison aux protéines plasmatiques 43-45%

3. Propriétés pharmacodynamiques

i. Mécanisme d’action glutamatergique

Le glutamate est le neuromédiateur majeur responsable de l’excitation neuronale dans le

système nerveux central. Les récepteurs NMDA (N-méthyl-D-aspartate) et AMPA (acide α-

amino-3-hydroxy-5-methyl-4-isoxazolepropionique) sont des récepteurs à canaux calciques

ligand-dépendants au glutamate. Ils sont situés préférentiellement sur les neurones post-

synaptiques et fonctionnent ensemble pour moduler la neurotransmission glutamatergique. Une

densité importante de neurones pyramidaux glutamatergiques a été retrouvée dans le cortex,

ainsi qu’au niveau sous-cortical dans l’hypothalamus, le noyau caudé, le nucléus thalamus et le

cervelet.

Les récepteurs NMDA sont des hétérotétramères formés de 7 sous-unités (NR1, NR2A,

NR2B, NR2C, NR2D, NR3A et NR3B). A l’état de repos, ils sont normalement bloqués par le

magnésium, modulateur allostérique négatif qui obstrue le canal calcique. Pour que le canal

laisse passer le calcium, il faut que le glutamate et la glycine, co-transmetteur, se fixent sur les

sous-unités NR2 et NR1 respectivement et que la dépolarisation se produise en même temps

délogeant ainsi le magnésium du récepteur (Figure 9, page 45) (74)(97).

Tableau 2 : Paramètres pharmacocinétiques de l'eskétamine

Page 46: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

45

Une partie de ces récepteurs NMDA est située sur des interneurones GABAergiques qui,

lorsqu’ils sont activés, vont réguler négativement les neurones pyramidaux glutamatergiques

notamment.

La kétamine agit au niveau du cortex préfrontal, siège de la régulation des émotions et des

fonctions cognitives. Une réduction d’activité de cette zone est observée chez les patients

victimes EDC (99). Elle possède une haute affinité pour les récepteurs NMDA. Elle se fixe

alors à l’intérieur du canal calcique du récepteur sur le site PCP en configuration ouverte lorsque

la dépolarisation déloge la molécule de Mg2+(Figure 10, page 46).

Figure 9 : Récepteur NMDA en configuration fermée. (98)

Page 47: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

46

• Inhibition de l’interneurone

En bloquant le récepteur NMDA situé sur l’interneurone GABAergique, la kétamine

inhibe la libération de GABA. Le neurotransmetteur inhibiteur ne peut plus inactiver le neurone

pyramidal pré-synaptique glutamatergique. Par conséquent, l’absence de GABA augmente la

libération de glutamate du neurone pyramidal par absence d’inhibition (Figure 11, page 47).

Figure 10 : Site de fixation de la kétamine sur le site PCP (74)

Page 48: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

47

• Modulation post synaptique

En outre, le blocage du récepteur NMDA par la kétamine empêche la liaison du glutamate

sur les neurones post-synaptiques pyramidaux. Cela augmente donc la concentration en

glutamate dans la fente synaptique. Au niveau du cortex préfrontal, le glutamate en excès va

stimuler les récepteurs AMPA post-synaptiques des neurones pyramidaux. Cela aboutit à une

cascade d’activation impliquant les protéines ERK, TrkB, Akt, voie de signalisation mTOR et

conduit à l’augmentation de la densité d’épines dendritiques. Cette réaction est responsable en

partie de l’effet AD de la kétamine (Figure 12, page 48) (98).

Les deux mécanismes d’action, que ce soit le blocage des récepteurs NMDA ou

l’amélioration de la signalisation neurotrophique médiée par le récepteur AMPA, sont à

l’origine de la rapidité d’action de la kétamine.

Figure 11 : Inhibition de l'interneurone inhibiteur GABAergique par la kétamine. (100)

Page 49: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

48

ii. Action sur les récepteurs opioïdes

La kétamine possède des propriétés analgésiques et est utilisée en association avec la

morphine en anesthésie (67). Son intérêt réside dans la potentialisation de l’effet antalgique et

la réduction de la tolérance aux opioïdes. Les opioïdes exercent leurs mécanismes d’action par

le biais des récepteurs opioïdes µ (mu), δ (delta) et Κ (kappa). La kétamine a également une

Figure 12 : Mécanisme d'action de la kétamine dans la dépression : 1) Inhibition de l'interneurone GABA

menant à la désinhibition du neurone glutamatergique 2) Augmentation de la libération de glutamate 3)

Activation des récepteurs AMPA 4) Libération du BDNF 5) Activation en cascade de la voie de

signalisation mTOR qui va stimuler la neurogénèse (101)

NMDA : N-méthyl-D-aspartate au

glutamate

GABA : acide γ-aminobutyrique

AMPA : acide α-amino-3-

hydroxy-5-methyl-4-

isoxazolepropionique

BDNF : facteur neurotrophique

issu du cerveau

ERK : extracellular signal-

regulated kinase

TrkB : récepteur à la tyrosine

kinase

Akt : protéines kinases

mTOR : cible mammalienne de la

rapamycine

Page 50: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

49

affinité pour ces récepteurs mais moindre que pour les récepteurs NMDA. L’eskétamine en

particulier a une affinité 2 à 3 fois supérieure que l’arkétamine pour ces récepteurs (90)(84).

L’action analgésique de la kétamine est supposée liée à son affinité pour les récepteurs opioïdes

mais cette hypothèse est controversée. Bien que l’administration intracérébrale des antagonistes

des récepteurs µ et δ bloque l’action analgésique de la kétamine, lorsque que l’on administre

un médicament antagoniste (la naloxone) par voie systémique, l’analgésie de la kétamine

perdure chez l’homme (102).

Le système opioïde joue un rôle dans les troubles dépressifs, sa dérégulation a été

associée à des troubles dépressifs (103). Il est connu que la buprénorphine est un agoniste partiel

des récepteurs opioïdes mu et un antagoniste des récepteurs kappa. Des études ont montré que

la buprénorphine produit des effets AD chez des patients victimes de dépression résistante et

réduit les idées suicidaires (104)(105). L’étude de Williams et al. (103) suggère que la rapidité

de l’effet AD de la kétamine nécessite l’activation du système opioïde. Selon cette étude

réalisée sur 30 patients, la naloxone inhibe l’effets AD de la kétamine. Ce serait donc

l’association du blocage des récepteurs NMDA et de la liaison aux récepteurs opioïdes qui serait

responsable de l’effet thérapeutique. Cependant, la réponse de Zhang et al. (106) nuance cette

hypothèse en soulignant que l’étude incluait trop peu de patients. En étudiant les modèles de

souris dépressives, contrairement aux études chez l’homme, Zhang et al. n’ont pas réussi à

montrer le rôle du système opioïde dans l’action antidépressive de la kétamine.

Des éclaircissements sont nécessaires quant à l’effet antagoniste ou agoniste de la

kétamine sur les récepteurs opioïdes. De plus amples études devront être menées pour évaluer

le potentiel de ces récepteurs dans le traitement de la dépression.

iii. Transmission monoaminergique (noradrénaline et sérotonine)

La sérotonine (5-HT) est un neurotransmetteur impliqué dans la dépression. Le transporteur

de la sérotonine (SERT) recapture la sérotonine libérée dans la fente synaptique pour la stocker

dans le neurone pré-synaptique. C’est la cible d’action des médicaments inhibiteurs de la

recapture de la sérotonine (ISRS). La molécule de kétamine a une affinité pour les transporteurs

de la sérotonine (SERT) (74). L’étude réalisée par Yamamoto et al. montre qu’à des doses sub-

anesthésiques (utilisées dans la dépression), la kétamine améliore la transmission

sérotoninergique par inhibition de l’activité des SERT. L’administration de kétamine augmente

aussi la concentration extracellulaire de sérotonine dans le cortex pré-frontal des rats.

Page 51: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

50

La noradrénaline est un autre neurotransmetteur cible des traitements de la dépression. Sa

recapture se fait par le biais du transporteur NET. La kétamine inhibe ces transporteurs et

augmente la concentration de noradrénaline au niveau neuronal. Cependant, son affinité pour

ces transporteurs est faible, et aux doses cliniquement pertinentes elle n’aurait pas d’effet

suffisant pour expliquer une action antidépressive. Il en va de même pour les métabolites (107).

En raison de sa faible affinité pour les transporteurs monoaminergiques (74), le mécanisme

AD de la kétamine n’est pas médié par ces neurotransmetteurs. Il existe peu de littérature à ce

sujet.

iv. Autres

D’autres voies seraient impliquées dans l’action antidépressive de l’eskétamine :

- Inhibition de la phosphorylation de la kinase du facteur d’élongation eucaryote 2 (eEF2)

- L’activation de la voie de signalisation mTOR (75).

C. Informations cliniques

L’eskétamine est commercialisée en France par un seul laboratoire sous le nom de spécialité

Spravato®.

1. Modalités d’administration

L’usage d’eskétamine est réservé au milieu hospitalier. Son administration doit être réalisée

dans un environnement calme, en chambre seule, en évitant au maximum les stimulations

extérieures (sonores et visuelles notamment). Le personnel soignant doit être formé à

l’administration et aux gestes de réanimation avec du matériel d’urgence à disposition. Une

présence médicale doit être assurée dans l’unité au moment de l’administration.

Avant chaque administration, un contrôle de la pression artérielle doit être effectué et toutes

mesures en dehors des valeurs recommandées (PAS ≥ 140 ou PAD ≥ 90 mmHg) doit être

explorées et corrigées. En effet, l’eskétamine est contre indiquée chez tout patient pour qui une

hypertension artérielle ou une hyperpression intracrânienne est susceptible d’être délétère.

Le malade inhale lui-même le traitement par voie nasale, sous surveillance d’un

professionnel de santé, pendant et après administration. Le dispositif est à usage unique et

délivre un total de 28mg d’eskétamine en deux pulvérisations (une dans chaque narine). Les

Page 52: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

51

indicateurs verts virent au blanc pour indiquer que les pulvérisations sont bien délivrées. Si

plusieurs dispositifs sont utilisés, il est préférable d’attendre 5 minutes entre chaque. En raison

des nausées et vomissements induits, il est déconseillé aux patients de manger pendant au moins

2 heures ou de boire au moins 30 minutes avant l’administration. De même, il est recommandé

chez les personnes traitées par corticoïde nasal ou un décongestionnant nasal de ne pas les

prendre dans l’heure précédant l’administration de l’eskétamine.

Le patient doit se moucher avant l’inhalation du traitement et pas ensuite. A 40 minutes

de la prise, un contrôle de la tension artérielle doit être réalisé. Celui-ci sera répété selon les

résultats jusqu’à ce que les valeurs se normalisent. De manière concomitante, le surveillant

dépiste tout symptôme évocateur de sédation ou de dissociation. A noter que la prise

d’eskétamine conjuguée à d’autres dépresseurs du système nerveux central (benzodiazépines,

opioïdes …) peut augmenter la sédation et diminuer la vigilance. Si aucun effet secondaire n’est

décelé, le patient peut quitter le cadre hospitalier et rentrer à domicile. Il ne doit cependant pas

conduire de véhicule ou entreprendre des activités nécessitant une totale vigilance avant le

lendemain (88).

2. Posologie

La posologie varie selon l’âge et l’ethnie. Elle s’articule en deux étapes : une première phase

d’induction (un mois) puis une phase d’entretien. A la fin de la première phase, il est décidé de

maintenir ou cesser la thérapie selon le bénéfice obtenu. Des adaptations de doses sont possibles

suivant l’efficacité du traitement et la tolérance de la dernière quantité administrée. Le but est

de trouver la posologie optimale pour chaque patient, à savoir la fréquence la plus basse

permettant de garantir une rémission.

Chez le patient de moins de 65 ans, la dose initiale à J1 est de 56mg. Elle est ensuite de 56

ou 84mg à raison de deux fois par semaine pendant 4 semaines. Entre la 5ème et la 8ème semaine,

la même dose est conservée, mais son administration devient hebdomadaire. A partir de la 9ème

semaine, la fréquence d’administration peut être diminuée à un rythme bi-mensuel si l’état

clinique le permet.

Chez le patient de plus de 65 ans ou d’origine japonaise, la dose initiale est de 28mg.

Ensuite, les posologies sont modifiées par paliers de 28mg : les doses sont donc de 28, 56 ou

84mg en fonction de la tolérance et de l’efficacité. En dehors de la diminution des doses, le

rythme d’administration reste comparable à celui précédemment décrit.

Page 53: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

52

La nécessité de l’eskétamine est régulièrement réexaminée tout au long du traitement. Après

amélioration des symptômes dépressifs, la médication est maintenue pour au moins 6 mois.

Il n’y a pas d’adaptation posologique d’eskétamine nécessaire liée au : poids, à

l’insuffisance rénale (légère à sévère), à l’insuffisance hépatique (légère à modérée), en cas de

congestion nasale (administration à éviter, risque d’inefficacité). Plusieurs études n’ont pas mis

en évidence de différences au niveau des paramètres pharmacocinétiques liés au genre (78)

(89). Cependant, une étude comparant des personnes âgées à des patients plus jeunes a montré

une augmentation de la Cmax et de l’AUC en fonction de l’âge. L’augmentation de ces

paramètres pharmacocinétiques était proportionnelle à la dose. C’est pourquoi, chez les adultes

de plus de 65 ans, l’initiation se fait à la posologie la plus faible. Il en va de même pour les

patients d’origine japonaise, métaboliseurs lents, qui nécessitent un ajustement posologique

(88) (Figure 13, page 53).

Page 54: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

53

3. Contre-indications

L’eskétamine est contre-indiquée :

- En cas d’hypersensibilité à la substance active, la kétamine, ou à l’un des excipients.

- Chez les patients pour qui une augmentation de la tension artérielle ou de la pression

intracrânienne constitue un risque grave (maladie anévrismale, antécédents d’hémorragie

intracérébrale, événement cardiovasculaire datant de moins de 6 semaines).

Même s’il n’existe pas d’étude sur son effet chez les femmes enceintes, elle n’est pas

recommandée pendant la grossesse et chez les femmes en âge de procréer n’ayant pas de

Figure 13 : Effets des populations spécifiques sur la pharmacocinétique de l'eskétamine (89)

Page 55: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

54

contraception. De même, il n’existe pas de données sur le passage d’eskétamine dans le

lait maternel et donc de son utilisation pendant l’allaitement.

4. Surdosage

Le risque de surdosage est limité du fait de l’administration sous surveillance dans un

environnement hospitalier. Le taux d’effets indésirables augmente avec la quantité absorbée.

On peut citer parmi les effets les plus fréquents : vertige, hyperhidrose, somnolence, sensation

d’état anormal, nausées et vomissements.

Il semble peu vraisemblable qu’un patient atteint de dépression soit exposé à un risque vital

comme peut l’être une personne sous kétamine administrée à dose anesthésiante, en raison des

doses bien plus faibles administrées. Le dispositif est par ailleurs borné par une dose fixe de

28mg. Le risque d’erreur lié à un surdosage ne pourrait advenir que par l’inhalation d’une trop

grande quantité de dispositif lié à une erreur de prescription ou d’administration. Mais la

probabilité semble faible en raison de la surveillance exigée.

D. Données d’efficacité

Le laboratoire commercialisant l’eskétamine a réalisé 4 études de phase III, randomisées

en double aveugle, multicentriques versus placebo. Elles évaluent l’efficacité de l’eskétamine

en association à un traitement AD en la comparant à un groupe de patients traité uniquement

par AD. Les patients recrutés sont atteints de dépression résistante modérée à sévère. Le critère

primaire est le changement à 28 jours du score MADRS pour les trois études TRANSFORM 1,

2 et 3 (108)(109)(110). L’étude SUSTAIN-1 a évalué la capacité de l’eskétamine à diminuer le

taux de rechute en traitement d’entretien sur 48 semaines (111). Les études sont présentées dans

les deux tableaux suivants (Tableau 3 et Tableau 4, page 51, 52 ,53 et 54).

Essais cliniques TRANSFORM-1 TRANSFORM-2 TRANSFORM-3

Objectif principal de

l’étude

Evaluer l’efficacité de l’eskétamine intranasale par rapport au

placebo, tous deux en association à un nouvel AD oral chez des

patients atteints de dépression résistante après échec de 2 traitements

AD.

Tableau 3 : Essais cliniques à court terme de l’eskétamine

Page 56: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

55

Posologie de

l’eskétamine

Dose fixe (1 groupe à

56mg et 1 groupe à

84 mg)

Dose flexible (les patients initient

l’eskétamine à 56mg, la dose par la suite

peut être augmenter en fonction de la

tolérance et de l’efficacité)

Age De 18 à 64 ans ≥ 65 ans

Nombre d’AD

précédents

Patients non répondeurs à ≥ 2 mais ≤ 5 AD Patients non

répondeurs à ≥ 2

mais ≤ 8 AD

Traitements étudiés Randomisation

(Ratio 1 :1 :1)

- Groupe

eskétamine à

dose fixe 56 mg

- Groupe

eskétamine à

dose fixe 84 mg

- Groupe placebo

+ nouvel AD (ISRS

ou ISRNA)

Randomisation (Ratio 1 :1)

- Groupe eskétamine à dose flexible 56

mg à 84mg

- Groupe placebo

+ nouvel AD (ISRS ou ISRNA)

Critère de jugement

principal

Variation du score

MADRS total à la

phase d’induction de

4 semaines sur le

groupe 84 mg

Variation du score MADRS totale à la fin de

la phase d’induction (J28) en double-aveugle

de 4 semaines

Résultats Pas de différences

significatives

Diminution

significative du

score MADRS de -

3,5 points IC95% = [-

6,7 ; -0,3]

Pas de différences

significatives

Page 57: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

56

Critères de jugement

secondaires

Interrompu car

critère de jugement

principal non

significatif

Réponse clinique dès

J2 (24h) maintenue

jusqu’à J28

Interrompu car

critère de jugement

principal non

significatif

Résultats Pas de différences

significatives

Essais cliniques SUSTAIN-1

Objectif principal de

l’étude

Evaluer l'efficacité de l'eskétamine intranasale par rapport à un

placebo intranasal, tous deux en association à un AD oral pour

retarder la rechute des symptômes dépressifs chez les patients

souffrant de dépression résistante au traitement qui sont en rémission

stable après une phase d'induction et d'optimisation de l'eskétamine

intranasale + AD oral

Posologie de

l’eskétamine

Dose flexible (les patients initient l’eskétamine à 54mg, la dose par

la suite peut être augmenter en fonction de la tolérance et de

l’efficacité)

Age De 18 à 64 ans

Nombre d’AD

précédents au cours

de l’EDC

Patients non répondeurs à ≥ 1 mais ≤ 5 AD

Traitements étudiés Randomisation (Ratio 1 :1)

- Groupe eskétamine à dose flexible (56 ou 84 mg), une fois par

semaine ou toutes les deux semaines

- Groupe placebo

+ nouvel AD (Duloxetine 60mg, escitalopram 10mg, sertraline

50mg ou venlafaxine LP 150mg)

Tableau 4 : Essai clinique sur l’eskétamine en traitement d’entretien

Page 58: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

57

Critère de jugement

principal

Délai de rechute évalué par un comité de relecture indépendant et

défini comme le délai entre la randomisation et la première rechute

pendant la phase de traitement d’entretien chez les patients traités par

eskétamine intranasal + AD oral qui ont atteint une rémission stable

à la fin de la phase d’optimisation. Pour évaluer le délai de rechute,

le score MADRS total a été utilisé de manière hebdomadaire

Résultats Au cours de la phase de traitement d’entretien, 26,7 % des patients

traités par eskétamine intranasal + AD oral et 45,3 % des patients

traités par placebo intranasal +AD oral ont eu une rechute. La

supériorité du groupe eskétamine par rapport au groupe placebo a été

démontrée en termes de délai jusqu’à la rechute.

Aucune amélioration clinique dans l’essai clinique TRANSFORM-1 sur les groupes

rassemblés de patients à 86mg et 54mg n’a été démontrée. La même conclusion a été retrouvée

dans l’essai TRANFORM-3 concernant les patients âgés de plus de 65 ans ce qui explique que

la prise en charge dans le cadre de l’AMM exclu cette catégorie d’âge. Seul l’essai

TRANFORM-2 a affiché une diminution du score MADRS de 3,5 IC95% [-6,7 ; -0,3] par

rapport au placebo. Or la pertinence clinique de cette différence est discutable. La quantité

d’effets observée est faible dans un contexte où une différence de -6,5 points était prévue au

protocole (109).

L’HAS souligne que ces études ont été réalisées versus placebo au lieu de se confronter à

un comparateur clinique pertinent. En France, il n’existe pas de traitements ayant l’AMM dans

la dépression résistante mais des alternatives étaient disponibles (ECT, potentialisation avec le

lithium, ajout d’un autre AD oral). Le choix du placebo est critiquable dans la mesure où la

majorité des patients ont reçu 2 AD antérieurs (50 à 60 % des patients dans l’étude

TRANSFORM-2 et 62 à 68% dans l’étude SUSTAIN-1) (112). On peut souligner que les

patients des deux groupes avaient toujours un traitement, l’AD initié pour la première fois avait

des chances de fonctionner. L’eskétamine n’est pas prescrite en monothérapie et de ce fait

l’appréciation de son efficacité est difficile. Au cours des essais, on peut constater la diminution

brutale du score MADRS sur quelques jours mais qui évolue plus lentement ensuite (quelques

points). On peut évoquer l’hypothèse d’une action rapide de l’eskétamine qui est ensuite

complétée par l’action de l’AD avec un délai de plusieurs semaines.

Page 59: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

58

Les données de tolérance à long terme sont limitées avec un recul jusqu’à douze mois au

maximum dans un contexte de maladie chronique (112). L’absence de hiérarchisation des

critères secondaires des essais cliniques ne permet pas l’exploitation des données. Des

informations manquent concernant la qualité de vie et l’efficacité sur les patients seulement

répondeurs et non en rémission dans l’étude SUSTAIN-1.

En conclusion, seule l’étude TRANSFORM-2 étudiant des doses flexibles de 56 à 84mg chez

des patients de moins de 65ans a montré une amélioration significative du score MADRS à

28jours de -3,5, IC95% = [-6,7 ; -0,3] sur 60. Les patients sous eskétamine 84mg à l’inclusion

(TRANFORM-1) ne présentent pas d’amélioration significative du score MADRS par rapport

au placebo. De même, les patients de plus de 65 ans (TRANSFORM-3) n’ont pas montré

d’amélioration significative. L’étude SUSTAIN-1 a réussi à montrer un délai de rechute plus

long dans le groupe traité par eskétamine.

E. Données de tolérance

La revue systématique de Zheng & al. publiée en 2019 sur 708 patients nous montre que la

prise d’eskétamine est associée à plus d’effets indésirables que dans les groupes placebo. On

peut citer comme effets : les vertiges, la sédation, les nausées, la dissociation, les sensations

d’ébriété et les paresthésies (Tableau 5, page 59). Leurs fréquences est significativement plus

élevées dans le groupe traité (113). Les effets indésirables les plus fréquents décrits dans l’essai

clinique SUSTAIN-2 sur 802 patients sont par ordre décroissant : les étourdissements, la

dissociation, les nausées, les maux de tête, rapportés par plus de 20% des patients (114).

Toutefois, si les maux de tête sont signalés comme effet secondaire dans l’étude SUSTAIN-2,

ils ne le sont pas dans la méta-analyse de Zheng & al (113).

Le Number Needed to Harm (NNH) est de 5 pour 1 concernant la dissociation (effet

redouté) : pour 5 patients traités, 1 patient développera cet effet indésirable. On retrouve le

même NNH pour les étourdissements, celui des vertiges est de 7 pour 1. La dissociation, les

étourdissements et la somnolence apparaissent le jour de l’administration et ne perdurent pas

dans le temps (108). Ils sont directement liés aux propriétés de la molécule, anesthésiante et

dissociative. Généralement, la sédation démarre 15 minutes après l’administration, avec un pic

à 45 minutes, qui se résout au bout d’une heure et demie, sans hypoxémie (109).

Page 60: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

59

Effet indésirable

Fréquence (Wajs et

al.)

802 patients

Fréquence (Fedgchin et al.)

231 patients

NNH

(Zheng et al.)

Flou visuel - 7% 13

Vertige 11% 21% 7

Étourdissement 33% 25% 5

Somnolence 17% 20% 14

Sensation d’ébriété - 4% 20

Sédation 0,2% 6% 17

Troubles dissociatifs 28% 27% 9

Hypoesthésie 12% 13% 11

Léthargie 25% 5% 25

Paresthésie - 13% 10

Irritation

oropharynx 10% 6% 33

Vomissement 11% 9% 13

Nausées 25% 29% 6

Aucune overdose, dépendance ou recherche d’augmentation de dose n’ont été signalées

(crainte liée à l’usage détourné de la kétamine). Lors de l’administration, des symptômes

psychotiques post-dose ont été rapportés mais se sont révélés transitoires. Un des effets

indésirables de la kétamine connus est la cystite interstitielle ulcérative : aucun cas n’a été

communiqué avec l’eskétamine. Cependant des cystites, ou des signes fonctionnels urinaires

ont été décrits et ont été spontanément résolutif sans arrêt du traitement (114). L’eskétamine

provoque une augmentation de la pression artérielle 40 minutes après administration. Elle

revient à la normale la plupart du temps au bout d’une heure et demie. L’incidence de

Tableau 5 : Principaux effets secondaires statistiquement significatifs issus de la méta-analyse de Zheng

et al. (113). Les pourcentages sont tirés de deux essais cliniques de phase III (108) (114)

Page 61: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

60

l’hypertension est plus forte chez les patients avec des antécédents d’hypertension artérielle et

10% de ces patients ont dû initier un traitement antihypertenseur contre 5% chez les patients

sans antécédents.

La prise d’eskétamine est associée à une plus grande fréquence de sortie d’étude selon la

méta-analyse de Zheng & al. (113). Dans l’étude SUSTAIN-2, 10% des patients ont arrêté leur

traitement en raison d’effets indésirables modérés à graves (114). Dans l’étude de phase 3 de

Popova & al, 7% des patients ont arrêté leurs traitements toujours à cause d’effets indésirables

(dépression, anxiété, intolérance, nausées vertiges) (109). De plus, un des patients a été victime

d’un accident de la voie publique 28 heures après administration d’eskétamine.

Un essai clinique a été réalisé pour évaluer la capacité à prendre la route 8 heures après

administration d’eskétamine à la dose de 84mg. Elle a été comparée à la mirtazapine. Alors que

la mirtazapine a un impact négatif significatif sur la conduite 8 heures après la prise,

l’eskétamine n’a pas montré de différence par rapport au placebo. Cependant, deux études

testant la sécurité de la conduite après administration d’eskétamine n’ont pas été achevées sans

que l’on en connaisse la raison (115).

Parmi les effets indésirables graves ayant nécessité une sortie d’étude liée à la prise

d’eskétamine dans l’étude de Wajs & al., un patient a eu des idées suicidaires et un autre a fait

une tentative de suicide. Deux autres patients sont morts dont un après suicide, sans que l’on

sache si cela est imputable à la prise du traitement (114). Dans d’autres essais de phase 3

(108)(109)(116), les critères d’exclusion englobaient les comportement et idées suicidaires avec

intention de passage à l’acte. Ces patients exclus ont été inclus dans une autre étude de phase

3. Celle-ci a démontré une diminution significative du risque suicidaire à 4 heures qui n’a pas

été retrouvée sur le long terme. Deux patients ont eu des idées suicidaires parmi les effets

indésirables graves mais ont fini l’étude (117). Dans le Résumé des Caractéristiques du Produit

(RCP) de l’eskétamine, une mise en garde sur le risque suicidaire après initiation du traitement

est formulée (88).

Les études cliniques réalisées par le laboratoire (SYNAPSE, TRANFORM-1,

TRANFORM-2, TRANSFORM-3, SUSTAIN-1 et SUSTAIN-2) ont rapporté 4 décès sur 1708

patients dont 2 considérés comme hypothétiquement lié au traitement (une insuffisance

respiratoire aigüe et une insuffisance cardiaque aigüe). Dans l’étude SUSTAIN-3 sur la

tolérance à long terme l’eskétamine est suspecté d’avoir provoqué un infarctus du myocarde.

Page 62: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

61

Les performances cognitives ont été évaluées dans l’essai clinique de Morrison & al.

(118) à partir d’un groupe de patients sous eskétamine 84 mg comparé à un groupe placebo.

Les performances déclinaient 40 minutes après inhalation de manière transitoire et revenaient

à la normale 2 heures plus tard. Cet effet était concomitant de la sédation. Certains patients

montraient même une amélioration 10 heures après la prise. En effet, l’eskétamine augmente la

plasticité synaptique. D’autres études sont nécessaires pour évaluer l’impact de doses répétées

sur la cognition.

Concernant l’âge, l’essai clinique TRANSFORM-3 a montré une tolérance similaire chez

les patients de plus de 75 ans et chez les patients plus jeunes. Il n’y pas de nouveaux effets

indésirables déclarés dans cette tranche d’âge malgré les comorbidités incluant les pathologies

cardiaques et thyroïdiennes ainsi que la polymédication observée chez la personne âgée.

L’eskétamine a été initiée à dose plus faible (28mg). Environ deux tiers des patients (64,5%)

ont reçu une dose de 84mg au final (110).

Toutefois, tous ces essais cliniques ont été financés par le laboratoire qui a commercialisé

l’eskétamine. De plus, tous les essais conduits n’ont pas été publiés. Les essais cliniques ont été

réclamés au laboratoire qui n’a pas souhaité nous les transmettre.

En conclusion, l’eskétamine est un traitement qui comporte plusieurs effets indésirables

dose-dépendants, de gravité variable. L’espacement des prises ainsi que la surveillance post-

administration permet de réduire l’impact de ces effets indésirables majoritairement

transitoires.

F. Réglementation

1. Autorisation de Mise sur le Marché français

L’eskétamine a obtenu une Autorisation Temporaire d’Utilisation (ATU) de cohorte

le 2 août 2019, qui a débuté le 23 septembre 2019 en France. A compter de cette date, l’Agence

Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM) a permis l’utilisation

exceptionnelle de cette spécialité ne bénéficiant pas encore de l’AMM en France. Ce

médicament était alors destiné à un groupe de patients traités et surveillés suivant des critères

définis dans le Protocole d’Utilisation Thérapeutique (PUT). Le 18 décembre 2019,

l’eskétamine, solution pour pulvérisation nasale, commercialisé sous le nom de spécialité

SPRAVATO ® a obtenu une AMM pour l’indication suivante : « Spravato, en association à

Page 63: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

62

un ISRS ou un IRSN, est indiqué chez les adultes pour le traitement des épisodes dépressifs

caractérisés résistants n'ayant pas répondu à au moins deux AD différents au cours de l'épisode

dépressif actuel modéré à sévère » (112). Le 24 juin 2020 a eu lieu la première évaluation de la

commission de transparence par la Haute Autorité de Santé (HAS) (112).

La prise en charge du coût de l’eskétamine par la sécurité sociale est évaluée après

appréciation du Service Médical Rendu (SMR) par la commission de transparence. La HAS

a conclu à un SMR faible de l’eskétamine uniquement pour une partie de l’indication de

l’AMM à savoir seulement pour les patients âgés de moins de 65 ans, en cas de contre-

indication, de résistance ou pour les patients n’ayant pas accès ou ayant refusé les ECT. En

dehors de cette indication précise, le SMR est insuffisant pour être pris en charge par la

solidarité nationale. En effet, l’eskétamine lors de l’essai TRANFORM-3 chez les personnes

âgées de plus de 65 ans, n’a pas montré d’efficacité versus placebo. Par conséquent, l’utilisation

de l’eskétamine après échec de deux lignes de traitements AD bien conduits est autorisée quel

que soit l’âge mais non pris en charge chez le patient de plus de 65 ans. D’autre part,

l’Amélioration du Service Médical Rendu (ASMR) est inexistante (ASMR V). Compte tenu

de l’absence d’étude comparative versus des comparateurs cliniquement pertinents et bien que

l’efficacité de l’eskétamine soit concluante versus placebo après 4 semaines de traitement, la

diminution du score MADRS est jugée trop faible. En outre, le profil de tolérance est mitigé à

cause des effets indésirables modérés à sévères comme les troubles dissociatifs,

cardiovasculaires et l’augmentation des idées suicidaires. En conclusion, la HAS considère que

l’eskétamine n’apporte aucun progrès dans la stratégie thérapeutique de la prise en charge de la

dépression mais peut constituer une alternative thérapeutique dans la prise en charge des

EDC résistants chez le patient de moins de 65 ans, en cas de résistance/contre-

indication/non accès aux ECT (112).

2. Autorisation de mise sur le marché à l’international

L’eskétamine a obtenu une AMM européenne le 18 décembre 2019 ainsi qu’une AMM

aux Etats-Unis le 3 mai 2019 (112) dans la même indication qu’en France. Cependant aux

Etats-Unis son utilisation est contrainte par un programme appelé « Spravato Risk Evaluation

and Mitigation Strategy (REMS) program » en raison de ses effets indésirables. La Food and

Drug Administration (FDA) a approuvé en aout 2020 l’extension de l’application de

l’eskétamine aux patients atteints de dépression caractérisée avec idées ou comportements

suicidaires (119). En Angleterre, la « National Institute for Health and Care Excellence » a

Page 64: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

63

publié le 28 janvier 2020 une première recommandation non définitive et négative concernant

l’usage de l’eskétamine dans l’indication de l’AMM (120).

3. Agrément aux collectivités

Les médicaments doivent être inscrits sur la liste des spécialités pharmaceutiques

agréées à l’usage des collectivités pour être achetés et utilisés à l’hôpital, cette liste est établie

par le ministère des solidarités et de la santé après avis de la HAS (121). Cet agrément a été

octroyé à l’eskétamine le 1er octobre 2020. Le prix d’un dispositif d’eskétamine, solution pour

pulvérisation nasale de 28 mg a été fixé à 257 euros. Le médicament est inscrit sur la liste des

stupéfiants, sa prescription est réservée aux psychiatres et son usage est strictement hospitalier

(122).

Page 65: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

64

III. ETUDE DE CAS AU CENTRE HOSPITALIER

GUILLAUME REGNIER

A. Introduction

Un tiers des patients atteints de dépression résistent aux traitements standards. Les

propositions thérapeutiques s’appuient alors sur des stratégies pharmacologiques (associations

médicamenteuses, augmentation des doses) ou non pharmacologiques (ECT). Cependant, leurs

efficacités ou disponibilités (ECT) sont parfois limitées. C’est pourquoi l’arrivée d’un nouveau

traitement est une option bienvenue pour les psychiatres.

Le Centre Hospitalier Guillaume Régnier (CHGR) de Rennes est un établissement public

de santé mentale composé de 785 lits d’hospitalisation complète ainsi que 787 places sanitaires

et sociales. Cette structure couvre une population d’environ 800 000 habitants pour une file

active de plus de 26 786 patients représentant environ 239 030 journées d’hospitalisation par

an (123).

Selon les données de littérature exposées précédemment, l’intérêt de l’eskétamine reste

discuté. Une étude observationnelle a été réalisée dans notre établissement sur les patients ayant

bénéficié d’un traitement par eskétamine.

B. Objectifs

L’objectif principal de cette étude est de suivre l’évolution en termes d’efficacité et de

tolérance des patients traités par eskétamine dans notre établissement. L’objectif secondaire

était de mettre en évidence les contraintes administratives et/ou organisationnelles liées à

ce traitement afin de proposer dans le futur un circuit type au sein de notre établissement.

Page 66: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

65

C. Matériel et méthodes

Tous les patients ayant initié un traitement par eskétamine au sein de notre établissement

entre novembre 2019 et septembre 2020 ont été inclus dans l’étude. Il s’agit d’une étude de cas

rétrospective.

Une partie des données a été recueillie grâce aux outils informatiques :

- Le dossier patient informatisé permettait de récupérer les informations sur l’histoire de la

maladie, le diagnostic selon la classification CIM-10, les antécédents, l’âge au début du

traitement, l’historique des traitements, les commentaires réalisés par le personnel soignant

et les médecins.

- Le logiciel d’aide à la prescription permettait l’analyse pharmaceutique des prescriptions

d’eskétamine et l’accès à l’historique médicamenteux des patients.

D’autres informations ont été recueillies directement au contact du personnel affecté à

l’unité spécialisée dans la dépression résistante (IDE, psychiatre, interne en psychiatrie). Les

dossiers sous format papier ont également été consultés après accord du psychiatre référent.

Les patients ont été informés et ne se sont pas opposés à l’utilisation de leurs données

médicales (envoi d’une lettre d’information et de non opposition aux patients) conformément

au code de la santé publique pour les recherches rétrospectives n’étant pas dans le cadre de la

loi Jardé.

Page 67: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

66

D. Résultats

1. Données cliniques recueillies

Patient n°1 Patient n°2 Patient n°3 Patient n°4

Age Entre 18 et 65 ans Entre 18 et 65 ans Entre 18 et 65 ans Entre 18 et 65 ans

Sexe Masculin Féminin Masculin Masculin

Diagnostic

(CIM-10)

EDC sévère pharmaco-

résistant sans symptômes

psychotiques.

Trouble dépressif récurrent

EDC sévère pharmaco-

résistant sans symptômes

psychotiques.

EDC sévère pharmaco-

résistant sans symptômes

psychotiques.

Trouble dépressif récurrent

EDC sévère pharmaco-

résistant sans symptômes

psychotiques.

Trouble dépressif récurrent

Histoire de la

maladie

- Début des troubles à

l’âge de 19 ans avec

attaque de panique.

- Depuis 5 ans : phase

dépressive caractérisée

sans récupération.

- Etiologie organique

éliminée.

- EDC en 2016 persistant

et résistant.

- Etiologie organique

éliminée.

- Premier épisode en 2006

- Récidive d’un EDC

résistant.

- Etiologie organique

éliminée.

- Récidive d’un EDC

résistant.

- Troubles anxieux

- Etiologie organique

éliminée.

Page 68: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

67

Risque

suicidaire

- Pas d’antécédents de

tentative de suicide.

- Pas de risque suicidaire à

l’admission.

- Absence d’idées

suicidaires

- Plusieurs tentatives de

suicide, la dernière

remontait à une semaine

avant l’initiation de

l’eskétamine.

- Risque suicidaire moyen

Risque suicidaire faible

Antécédents

médicaux

Diabète non insulino-

dépendant

Aucun Aucun Aucun

Echecs

traitements

médicamenteux

antérieurs

Monothérapies :

- ISRS (molécule non

retrouvée)

- IRSNA (molécule non

retrouvée)

- TC : imipramine

- IMAO : moclobémide

- AA : agomélatonine

- AE : lamotrigine

- AP : quétiapine

- TR : lithium

Association :

Monothérapies :

- ISRS : paroxétine,

fluoxétine

- IRSNA : venlafaxine

- TC : imipraminique,

clomipramine

- IMAO : phénelzine

Associations :

- TC + AP :

clomipramine +

aripiprazole

Monothérapie :

- ISRS : paroxétine

fluoxétine, paroxétine

- TC : imipraminique

clomipramine

- Aα : miansérine

Associations :

- Aα + AP : miansérine +

quétiapine

- Aα + ISRS : miansérine

+ fluoxétine

Monothérapie :

- ISRS : escitalopram,

paroxétine

- TC : clomipramine

Associations :

- ISRS + AE :

citalopram + valpromide

- ISRS + AP

citalopram + rispéridone

- ISRS + AP

fluoxetine + quetiapine

- TC + TR + AP

Page 69: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

68

- AE + IMAO + APK :

lamotrigine + phénelzine

+ pramipexole

- TC + TR + APK :

clomipramine + lithium

+ pramipexole

clomipramine + lithium

+ aripiprazole

Echecs

traitements

non

médicamenteux

antérieurs

- SMTr : inefficacité

- ECT : inefficacité

- STMr : inefficacité

- ECT : mauvaise

tolérance

- ECT : inefficacité - STMr : inefficacité

- ECT : mauvaise

tolérance

Traitements

psychotropes à

l’initiation de

l’eskétamine

(en gras les

traitements de

l’EDC)

- IMAO : phénelzine

15mg x6/j

- AA : agomélatine

25mg x1/j

- AE : lamotrigine

200mg x2/j

- H : lormétazépam 2mg,

x2/j

- H : zopiclone 7,5mg

x2/j

- H : mélatonine LP 2mg

x1/j

- TC : clomipramine

75mg x1/j

- H : zolpidem 10mg x2/j

- Anx : alprazolam 2mg

x2/j

- Aα : mirtazapine

15mgx3/j

- ISRS : fluoxétine 20mg

x1.5/j

- APC : cyamémazine

25mg *1/j

- Anx : vlorazépate

10mg*1/j

- Anx : alprazolam 2mg

x2/j

- ISRS : Paroxétine

Page 70: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

69

MADRS à

l’inclusion

30/60 35/60 27/60 35/60

MADRS

évolution

Diminution du score

MADRS dès la 3ème séance

avec MADRS chiffré à 5 à la

4ème inhalation. Rémission

jusqu’à la semaine 15 (retour

au score initial)

Diminution du score

MADRS à 6 après l’unique

administration.

Diminution du score

MADRS à 15 deux semaines

après initiation du traitement.

Puis retour à 35 à la 4ème

semaine motivant un

renforcement thérapeutique

par clomipramine puis

olanzapine.

Pas d’évolution

Effets

indésirables

- Vertiges

- Dissociation

- Xérostomie

Les effets indésirables ont

cessé quelques heures après

l’administration du

traitement. Ils ont été

retrouvés lors des deux

premières séances mais ont

cessé par la suite. Bonne

- Coma (Non réponse aux

stimulations verbale et

douloureuses) sans

défaillance respiratoire

ou cardiovasculaire

associée. Etat résolutif à

H+1 (réponse aux

ordres simples).

- Rétention aigüe

urinaire et céphalées

au décours. Retour à

- Céphalées

- Vision floue

- Xérostomie

- Dissociation

- Asthénie

- Tremblements

Les effets indésirables

(céphalées, vision floue,

sensation de shoot et

asthénie) ont cessé quelques

- Vertiges

- Dissociation

- Recrudescence

anxieuse

Les vertiges ont été

retrouvés à chaque séances.

Une recrudescence anxieuse

avec idées suicidaires a été

notée le week-end suivant la

Page 71: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

70

tolérance cardio-vasculaire et

psychique.

l’état antérieur 24

heures après.

Déclaration au centre

régional de

pharmacovigilance de

Rennes

heures après l’administration

du traitement. Ils ont

fréquemment été retrouvés et

ont décru au fur et à mesure

des séances. Les

tremblements et la

xérostomie sont

concomitants de

l’instauration de la

clomipramine au cours du

traitement par eskétamine.

première semaine

d’initiation de l’eskétamine.

La dissociation est survenue

au cours de la dernière

administration

d’eskétamine. Cette

sensation n’était jamais

arrivée auparavant lors des

séances

Durée du

traitement par

eskétamine

19 semaines Administration unique 12 semaines 4 semaines

Causes de

l’arrêt du

traitement

Rechute à partir de la 15ème

semaine de traitement.

Effets indésirables Rechute dépressive précoce Echec thérapeutique

Aα : Agoniste des récepteurs α2, AA : Autre antidépresseur, AE : Antiépileptique, Anx : Anxiolytique, AP : Antipsychotique, APK :

Antiparkinsonien, H : Hypnotique, IMAO : Inhibiteur de la monoamine oxydase, ISRS : Inhibiteur sélectif de la recapture de sérotonine, IRSNA :

Inhibiteur de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline, TC : Imipraminique, TR : Thymorégulateur.

Page 72: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

71

2. Synthèse

Quatre patients atteints de dépression résistante ont donc bénéficié d’une prise en charge

par eskétamine dans notre établissement de novembre 2019 à septembre 2020. Ces patients

respectaient les critères d’inclusion de l’ATU ou de l’AMM selon la date d’instauration du

médicament. En ce qui concerne l’historique médicamenteux, entre 3 et 8 classes

pharmacologiques différentes (classes d’AD ou non) avaient été essayées en monothérapie dont

systématiquement un imipraminique et un ISRS. Ces tentatives se soldèrent par une réponse

insuffisante ou une rechute. Par la suite, plusieurs associations de différents traitements de la

dépression ont été essayées, allant de deux à trois molécules. Les réponses étaient toujours

incomplètes. Les patients ont tous été traités par ECT et/ou SMTr mais aucune efficacité n’a pu

être mise en évidence (deux patients ont arrêté les ECT pour cause d’effets indésirables).

Au total, une patiente (n°2) a dû arrêter le traitement pour cause d’effets indésirables graves

(perte de conscience et rétention aigüe urinaire). Cependant même après une seule

administration, nous avons constaté une chute du score MADRS à 6 pendant plusieurs jours

chez cette patiente. Un autre (patient n°4) n’a jamais connu d’amélioration clinique pendant le

mois entier de traitement ce qui a justifié son arrêt. Enfin, les deux derniers patients ont rechuté,

0

5

10

15

20

25

30

35

40

45

1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19

MA

DR

S

Administations

Patient 1 Patient 2 Patient 3 Patient 4

Arrêt car inefficacité

Coma

Rechute

Rechute

Figure 14 : Evaluation du score MADRS au cours des administrations d'eskétamine : Score allant de

0 (asymptomatique) à 60 (score maximum de l'EDC).

Page 73: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

72

l’un précocement au bout d’un mois et l’autre à 3 mois. Néanmoins, on peut souligner que pour

le patient n°1 ayant été traité par eskétamine pendant 5 mois, une rémission complète a été

obtenue pendant deux mois. Le patient n°3 pour lequel l’eskétamine a été arrêtée après 3 mois

de traitement, a connu une amélioration de l’humeur les premières semaines avec un MADRS

au plus bas à 15 mais qui est remonté rapidement à 35 à la quatrième semaine de traitement.

L’instauration de clomipramine après la remontée du score MADRS à 35 a probablement

influencé les mesures du score suivantes. En conclusion, malgré ces tentatives infructueuses

une évolution positive des scores MADRS a été constatée notamment en début de traitement.

En termes de tolérance, les effets indésirables sont apparus rapidement après l’administration

(vertiges, dissociation, …) et ont disparu spontanément. L’exception est la « recrudescence

anxieuse » qui est arrivée à distance des prises chez un patient. Enfin, le traitement a été

globalement bien supporté chez trois patients sur quatre.

3. Organisation

L’unité Kraepelin est une unité d’hospitalisation de jour (HDJ) du CHGR spécialisée

dans la dépression résistante. Elle accueille les patients traités par eskétamine dans un cadre

adapté. Pour veiller au bon déroulement de la séance, les patients sont admis en effectif réduit

dans un environnement calme.

Lors de la première administration, le psychiatre référent était présent pour rappeler aux

patients le déroulement de la séance, les potentiels effets indésirables et revérifier l’absence de

contre-indication. Un pharmacien ou interne en pharmacie était également sur place pour

dispenser le médicament et apporter des conseils de bon usage. Lors des séances suivantes, le

psychiatre ou les internes en psychiatrie accompagnaient le patient pour veiller à l’auto-

administration et l’interroger sur l’efficacité et la tolérance du traitement ainsi que pour réaliser

une visite de suivi. Une infirmière était affectée à la surveillance du patient pendant 2 heures.

Elle vérifiait alors la tension artérielle avant initiation du traitement et effectuait une observation

post-administration dépistant l’apparition d’effets indésirables (sédation, dissociation,

vérification de la tension artérielle 40 minutes après l’administration comme stipulé dans le

RCP (112) ). Le psychiatre, les infirmières ainsi que le pharmacien avaient auparavant été

formés à l’administration par le biais du module de formation du laboratoire commercialisant

le produit. Un chariot d’urgence avec du matériel de réanimation était présent dans l’unité.

Chaque séance se déroulait en général sur une journée, le patient pouvait cependant rester

plusieurs jours dans l’unité en fonction de la gravité des symptômes dépressifs.

Page 74: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

73

Chaque dispositif était dispensé le jour même par un pharmacien ou un interne en

pharmacie avec respect des conditions particulières de délivrance liées au statut de stupéfiant.

D’un point de vue administratif, pour chaque initiation de traitement dans le cadre de

l’ATU de cohorte, le psychiatre complétait une fiche de demande d’accès au traitement et la

transmettait à la pharmacie à usage intérieur (PUI). Le pharmacien était en charge de la

validation de la demande (analyse pharmaceutique, respect des critères d’accès et non accès à

l’ATU de cohorte). Le pharmacien était également responsable des commandes d’eskétamine

et de la gestion des stocks.

E. Discussion

1. Données d’efficacité

La dépression est la première cause de handicap au monde et est responsable de 30 % des

suicides (38)(16). C’est une maladie à haut potentiel de rechute. A partir de trois rechutes, il

existe une forte probabilité de passage à la chronicité. Depuis la découverte des IMAO et des

tricycliques, peu de progrès en termes d’efficacité ont été fait au niveau pharmacologique. La

classe des ISRS découverte plus récemment est mieux tolérée mais n’a pas montré d’efficacité

supérieure (56). Comme vu précédemment, il existe entre 15% et 30% de patients atteints de

dépression résistante. Après échec des médicaments, l’ECT est proposée et a montré une

véritable amélioration avec un taux de 50% de rémission en moyenne (48). Cependant, elle

n’est pas disponible dans tous les centres hospitaliers ou cliniques et sa répartition au sein du

territoire français est inégale. En outre, c’est une intervention effectuée sous anesthésie

générale, or il est parfois difficile d’obtenir du « temps anesthésiste ». La liste d’attente peut

s’étendre à plusieurs mois pour démarrer une cure d’ECT. Aussi, la sismothérapie présente

plusieurs effets indésirables : un syndrome confusionnel post-administration et des amnésies

rétrogrades et antérogrades. Elle n’est donc pas toujours bien tolérée et peut être refusée par le

patient. Dans ce contexte de difficulté d’accès ou de refus de l’ECT, l’eskétamine montre son

intérêt. Dans le cas des patients traités dans notre établissement, l’eskétamine a été instauré

après échec de nombreuses lignes de traitements pharmacologiques ou non et représentait donc

un espoir pour ces patients en tant que « nouvel antidépresseur ». L’eskétamine est actuellement

le seul AD ayant l’AMM dans la dépression résistante.

Page 75: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

74

L’avantage de l’eskétamine est aussi sa rapidité d’action. Les AD ont un délai d’action de

2 à 4 semaines or la kétamine administrée par voie intraveineuse a montré une diminution du

score MADRS dès les premières injections (124). Au CHGR, nous avons constaté une

diminution rapide et importante du score MADRS dès les premières administrations

d’eskétamine pour certains patients. Cependant, l’étude TRANSFORM-2 (109) (qui compare

l’eskétamine par voie nasale à un placebo tous les deux associés à un AD) n’a pas montré de

différence significative 24 heures après administration.

Au CHGR, aucun des quatre patients n’a eu de rémission prolongée. Le seul patient pour

lequel une rémission a été obtenue a eu une rechute 4 mois après avoir démarré le traitement.

Dans l’étude TRANFORM-1 comparant l’eskétamine par voie nasale à dose fixe versus

placebo (également par voie nasale), une diminution du score MADRS a été observée dans les

deux bras mais aucune différence significative avec le placebo n’a pu être observée au bout de

28 jours. Une des explications est possiblement le fort impact de l’effet placebo. Les

suppositions expliquant ce fort effet placebo sont : la voie d’administration (seule spécialité à

utiliser cette voie dans cette indication) et le suivi très important du patient dû à la surveillance

post administration de 2 heures (108). De plus, les patients avaient une forte attente vis-à-vis

de ce traitement qui était pour eux le traitement de la « dernière chance ». Or ils ont pu être

encore plus affectés si le résultat n’était pas celui escompté (125). Nos patients ont connu de

multiples échecs après avoir essayé plusieurs classes thérapeutiques en monothérapie et en

associations. On peut également raisonnablement penser que plus la durée de la maladie

symptomatique est longue plus il est difficile d’obtenir une rémission.

L’efficacité de l’eskétamine ne semble pas durer dans le temps. Les données sur l’usage

détourné de la kétamine nous indiquent qu’il existe vraisemblablement une tolérance rapide au

produit. On peut donc supposer que pour continuer à produire le même effet, il soit nécessaire

d’augmenter les doses jusqu’à un seuil au-delà de posologies acceptables en clinique (125).

Le score MADRS n’est pas aussi précis que peut l’être une valeur biologique, le recueil des

réponses peut être influencé par le ressenti du patient ou celui de l’examinateur.

Nous avons contacté d’autres établissements français ayant utilisé l’eskétamine pendant

la phase d’ATU. Les contacts ont été récupérés par l’intermédiaire du réseau Psychiatrie-

Information-Communication (Réseau PIC), réseau national de professionnels hospitaliers au

service du soin médicamenteux en psychiatrie et santé mentale. Neufs établissements ont

répondu à nos demandes d’informations sur 25 qui ont participé au traitement. Au total, sur ces

Page 76: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

75

établissements 33 patients ont été traités par eskétamine. Des résultats positifs ont été observés

pour 16 patients soit la moitié d’entre eux.

Plusieurs établissements de santé ont utilisé la kétamine par voie intraveineuse dans le

traitement de dépression résistante ou mélancolique. Nous avons eu précédemment deux

patients au CHGR pour qui cette alternative avait été proposée sans succès. L’eskétamine

administrée par voie nasale présente plusieurs avantages dont la sécurité d’utilisation, les

moindres contraintes organisationnelles et l’usage d’une voie d’abord moins risquée. En effet,

la voie intraveineuse est susceptible d’entrainer des complications mécaniques (embolie

gazeuse), infectieuses et thrombotiques.

La voie nasale présente un autre intérêt. En effet, une patiente a bénéficié de l’eskétamine

après avoir perdu une partie de son système digestif. Cette patiente était sous citalopram per os

or la qualité de l’absorption n’était plus garantie. L’inhalation par voie nasale offre une

alternative intéressante dans ce cas de figure.

L’eskétamine semble donc avoir un intérêt mais l’amélioration clinique parait brève, cela

serait à confirmer avec des études de plus grande ampleur. L’association à un AD est donc

primordiale pour une action sur le plus long terme comme précisé dans l’indication de l’AMM.

Se pose alors la question de l’indication limitée en France car aux Etats-Unis elle est élargie à

la crise suicidaire ce qui correspondrait peut-être mieux au profil et la cinétique d’action. La

rapidité de la prise en charge de l’EDC améliore le pronostic or l’eskétamine augmente la

vitesse de réponse au traitement des patients (125). Réserver le traitement aux dépressions

résistantes après échec de n lignes de traitement rend la démonstration de son efficacité plus

difficile. En effet, plus une dépression est ancrée plus elle reste difficile à soigner, notamment

après échecs multiples des traitements commercialisés. Cette place en dernière intention est

guidée notamment par la tolérance de la molécule.

2. Tolérance

L’eskétamine possède un profil de tolérance marqué par des effets indésirables (EI) graves

comme mis en évidence chez un de nos patients dès la première administration. En France,

d’après le recueil d’information effectué auprès des centres hospitaliers, quelques patients ont

eu des effets indésirables graves ayant nécessité l’arrêt du traitement (hallucinations visuelles,

état dissociatif marqué, dépersonnalisation, idées suicidaires, augmentation de la pression

artérielle). Les effets indésirables psychiatriques sont concordants avec les données du résumé

Page 77: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

76

des caractéristiques du produit, l’eskétamine étant une molécule dissociative. Un de nos patients

a également eu une recrudescence des idées suicidaires mais transitoire qui n’a pas nécessité

l’arrêt de traitement. Il est compliqué d’estimer la part d’imputabilité de l’eskétamine et/ou de

la pathologie dépressive dans la responsabilité des idées suicidaires. La levée d’inhibition avec

risque suicidaire, bien que complexe, est également discuté avec les autres AD, nécessitant

l’ajout de benzodiazépines en début de traitement. Dans les essais cliniques étudiant la tolérance

de l’eskétamine, deux suicides ont été répertoriés mais considérés comme non imputables au

traitement (112). Les autres effets indésirables expérimentés par nos patients étaient communs

à ceux retrouvés dans les essais cliniques. En France, aucun effet indésirable nouveau lors de

l’ATU de cohorte n’a été mis en évidence, les plus fréquents étant les vertiges, la sédation, la

somnolence, l’anxiété et la dissociation. Concernant les EI cardiovasculaires, la surveillance de

la pression artérielle avant administration et après 40 minutes permet de repérer rapidement les

poussées hypertensives.

3. Organisation

D’un point de vue organisationnel, la prise en charge par eskétamine nécessite des

dispositions particulières et un circuit bien établi. Les équipes soignantes et médicales du

CHGR se sont montrées motivées pour instaurer une nouvelle dynamique au sein de l’unité

concernée. Cependant, la prise en charge est chronophage. En effet, elle nécessite la mise à

disposition de temps soignant pendant au moins deux heures (administration et surveillance)

deux fois par semaine le premier mois et plusieurs fois par mois ensuite. L’administration

devant se faire dans un cadre calme et nécessitant une surveillance, celle-ci ne peut pas être

réalisée dans toute les unités notamment d’admission. Il est nécessaire que le personnel soit

auparavant formé, et que la pharmacie soit informée des nouvelles instaurations de traitement.

Un équipement de réanimation et du personnel qualifié sont nécessaires pour les patients

atteints d’une affection cardiovasculaire ou respiratoire. Une organisation au sein de notre

établissement est en cours d’élaboration afin de déterminer le circuit idéal d’un patient traité

par eskétamine. La création d’une Réunion de Concertation Pluridisciplinaire pour les

dépressions complexes est à l’étude afin de sélectionner les patients éligibles. Par ailleurs,

certains établissements avaient déjà mis en place des RCP pendant l’ATU de cohorte. Une fiche

d’information réalisée par une préparatrice en pharmacie hospitalière est en cours de rédaction

et sera délivrée à chaque dispensation afin d’y synthétiser les principaux conseils de bon usage.

Page 78: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

77

Selon les différentes organisations des centres hospitaliers, les lieux de mise en place de

l’eskétamine diffèrent. L’instauration du traitement varie entre les hôpitaux de jours, les

hôpitaux de semaines, les unités d’hospitalisation continue. Des unités spécialisées dans les

troubles résistants étaient déjà en place dans certains centres.

Les contraintes pour les patients en ambulatoire sont la venue deux fois par semaine en HDJ

au moins une matinée et une contre-indication à la conduite de véhicule pour le retour. En raison

des contraintes de temps, l’exigence attendue des patients au niveau de l’efficacité du traitement

est importante. Cependant, une partie des patients n’était pas concernée car la gravité de leurs

pathologies nécessitait une prise en charge en hospitalisation.

4. Limites

Les limites de notre étude résident principalement sur l’effectif trop faible de patients.

Plusieurs facteurs expliquent cela. Tout d’abord, le champ d’indication de l’eskétamine était

très restreint dans le cadre de l’ATU. En effet, elle ne concernait que les malades en

échappement thérapeutique après deux lignes de traitement AD bien conduits et échec,

intolérance ou refus des ECT. De plus, les épisodes dépressifs résistants s’inscrivant dans un

trouble bipolaire étaient exclus.

Les critères d’exclusions étaient les suivants :

- Patient médicalement stable d'après l'examen physique, les antécédents médicaux et les

signes vitaux,

- Patient avec diagnostic actuel ou antérieur de DSM-5 d'un trouble psychotique ou d'une

dépression avec psychose, troubles bipolaires ou apparentés, trouble obsessionnel

compulsif comorbide, déficience intellectuelle, trouble de personnalité limite, trouble

antisocial, trouble de personnalité histrionique ou trouble narcissique de personnalité,

- Patient avec idéations suicidaires actives avec intention de passage à l’acte.

L’effet indésirable grave subit par la deuxième patiente de notre étude a freiné l’instauration

de nouveaux patients car le personnel de psychiatrie est peu souvent confronté au « coma ».

D’autant que le manque d’efficacité chez les 4 patients a réduit l’enthousiasme lié à l’effet

« d’innovation ».

Ensuite, le service Kraepelin a été contraint de suspendre l’inclusion des patients pendant

plusieurs mois car l’unité a été choisie comme unité « COVID » accueillant les patients positifs

au SARS-COV2. Enfin, le psychiatre référent, à l’origine des initiations de traitement par

Page 79: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

78

eskétamine a quitté notre établissement pour raisons professionnelles, freinant de fait

l’inclusion de nouveaux patients. Par ailleurs, le statut ATU représentait également un frein

pour certains professionnels du fait des contraintes administratives notamment.

L’usage détourné de la kétamine peut faire craindre un risque d’abus ou de dépendance à

cette molécule. Cependant, l’administration étant réservée au secteur psychiatrique hospitalier

et les patients étant régulièrement suivis, le mésusage de l’eskétamine n’a pas été un frein à son

utilisation au CHGR.

De plus, seul le pôle universitaire s’est investi dans ce projet, il est par ailleurs le principal

pourvoyeur de prescriptions d’ECT. Une disparité des prises en charge existe entre les différents

pôles. Par exemple, en ce qui concerne l’ECT, ce sont les internes du service universitaire qui

se relaient pour accompagner et surveiller le patient. Or cette activité chronophage n’est pas

réalisable dans les autres pôles par manque de ressources humaines. En ce qui concerne les AD

sous ATU (phénelzine, tranylcypromine), ils sont aussi principalement prescrits par le pôle

universitaire.

Une autre contrainte non négligeable est celle du prix et de la prise en charge de cette

thérapie couteuse par les hôpitaux, notamment en fonction de leurs modes de financement. En

effet, le prix d’un dispositif de 28mg est de 257 euros. Cela correspond pour 1 mois de

traitement à 56mg à 4412 euros (à la posologie de référence) et le montant peut s’alourdir si la

posologie augmente à 84mg. Or en psychiatrie peu de traitements onéreux existent. Si on

compare avec un traitement AD classique type ISRS (moins de 10 euros par mois), la différence

est considérable. La durée de traitement n’est actuellement pas connue et il est possible que les

patients restent à vie sous eskétamine. Selon la commission de transparence la population-cible

incidente de l’eskétamine est estimée à un maximum de 29 000 patients par an (112).

La commercialisation du traitement depuis début octobre et la publication des données post-

ATU devraient faciliter l’accès à ce traitement. L’eskétamine a été présenté au CHGR en

commission médicale d’établissement et commission du médicament, des dispositifs médicaux

stériles et de l’innovation thérapeutique ce qui a permis de la faire connaitre aux autres

psychiatres.

Page 80: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

79

IV. CONCLUSION

L’eskétamine est une nouveauté thérapeutique bienvenue en psychiatrie ou les

innovations sont rares. Elle offre l’espoir d’une meilleure prise en charge des patients atteints

de dépression résistante. Les études actuelles ont montré une efficacité modeste du traitement.

Or, le traitement présente des effets indésirables graves (trouble de la conscience, troubles

dissociatifs et troubles cardiovasculaires) et l’incertitude quant à la tolérance sur le long terme

dans le cadre d’une pathologie chronique est problématique. On peut ajouter que ces réserves

sont à l’origine d’une décision de la commission de transparence d’accorder un avis favorable

à l’eskétamine uniquement « en association à un ISRS ou un IRSN, chez les adultes de moins

de 65 ans pour le traitement des épisodes dépressifs caractérisés résistants n'ayant pas répondu

à au moins deux AD différents de classes différentes au cours de l'épisode dépressif actuel

modéré à sévère et en cas de contre-indication ou de résistance à l’électroconvulsivothérapie

ou pour les patients n’y ayant pas accès ou l’ayant refusé et aux posologies de l’AMM. Aussi,

selon la commission de transparence, l’eskétamine n’apporte pas d’amélioration du service

médical rendu dans cette indication.

Au sein de notre établissement spécialisé en santé mentale, l’eskétamine a été utilisée

par 4 patients. L’efficacité sur le long terme n’a pas été maintenue pour les patients qui en ont

bénéficié. Un effet indésirable grave a été répertorié. Cependant, l’importante amélioration

clinique à court terme du traitement expérimenté au sein du CHGR questionne sur une ouverture

de l’indication chez les patients souffrant d’EDC avec une recrudescence d’idées suicidaires.

Cette indication a déjà été validée aux Etats-Unis. Néanmoins le profil de tolérance nécessite

une surveillance particulière du traitement qui doit être réalisée à l’hôpital, avec une présence

appropriée du personnel soignant préalablement formé.

Bien qu’au CHGR nos patients n’aient pas atteint une rémission durable, une

amélioration des symptômes dépressifs a été constatée chez plusieurs patients au sein des autres

centres hospitaliers en France. L’eskétamine continue d’être prescrit au CHGR car certains

patients n’ont plus d’alternatives médicamenteuses et l’ECT n’est pas toujours réalisable. En

outre, le profil d’activité de l’eskétamine peut être sélectif d’un certain type de dépression.

Une surveillance à long terme au niveau national est mise en place pour observer la

pratique clinique et les conditions d’utilisation du traitement. En outre, un suivi de l’évolution

Page 81: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

80

des patients en termes d’efficacité est instauré. Enfin une réévaluation dans un délai maximum

de 5 ans grâce à l’obtention des données d’une étude de tolérance à long terme est programmée.

Page 82: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

81

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VI. ANNEXES

Annexe 1 : Echelle MADRS

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Médicament Dose initiale Posologie thérapeutique

Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la Sérotonine (ISRS)

Citalopram

Escitalopram

Fluoxétine

Paroxétine

Sertraline

Fluvoxamine

20 mg / jour

10 mg / jour

10 mg / jour

20 mg / jour

50 mg / jour

50 mg / jour

20-40 mg / jour

10-20 mg / jour

20-60 mg / jour

20-50 mg / jour

50-200 mg / jour

100-200 mg / jour

Inhibiteurs de la recapture de la Sérotonine Noradrénaline (IRSNA)

Duloxétine

Venlafaxine

Milnacipran

20 mg / jour

37,5 mg / jour

50-100 mg / jour

60-120 mg / jour

75-375 mg / jour

100-200 mg / jour

Inhibiteur du transporteur SERT, agoniste du récepteur 5-HT1A, agoniste partiel du

récepteur 5-HT1B, antagoniste du récepteur 5-HT1D, 3, 7

Vortioxétine 5-10 mg / jour 10-20 mg / jour

Antidépresseurs tricycliques ou imipraminique

Amitriptyline

Clomipramine

Imipramine

Maprotiline

Dosulépine

Trimipramine

Doxépine

50 mg / jour

25 mg / jour

25 mg / jour

25-50 mg / jour

75 mg / jour

25 mg/ jour

25 mg / jour

150-300 mg / jour

100-250 mg / jour

150-300 mg / jour

150 – 225 mg / jour

75 – 150 mg / jour

100 – 300 mg / jour

100 – 300 mg / jour

Inhibiteurs de la Monoamine Oxydase (IMAOs)

Moclobémide

Iproniazide

300 mg / jour

50-100 mg / jour

450-600 mg

100-150 mg

Annexe 2 : Tableau des différentes classes pharmacologiques et molécules antidépresseurs

Page 100: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

99

Phenelzine (ATU)

Tranylcypromine (ATU)

15mg

30mg 60mg

Agoniste des récepteurs mélatoninergiques

Agomélatine 25 mg 25 mg

Antagoniste des récepteurs 2, 5-HT2 et 5-HT3

Miansérine

Mirtazapine

10 mg / jour

15 mg / jour

30-90 mg

15-30 mg

Autre

Tianeptine 5 mg 12,5 mg

Page 101: Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine

U.F.R. DE PHARMACIE DE RENNES N°

CONSTANTIN Marion

PRISE EN CHARGE DE LA DEPRESSION RESISTANTE PAR ESKETAMINE :

Etude de cas au Centre Hospitalier Guillaume Régnier de Rennes.

99 feuilles, 14 illustrations, 5 tableaux. Thèse : Pharmacie ; Rennes 1 ; 2020.

L’eskétamine est une innovation thérapeutique indiquée dans la prise en charge de la dépression

résistante. Actuellement, plus de 15% des patients atteints d’épisode dépressif caractérisé ne

bénéficient pas d’une rémission complète car ils sont résistants aux différents traitements existants.

L’électroconvulsivothérapie est une alternative qui doit être proposée dans cette indication or elle

n’est parfois pas possible ou peut-être refusée. Depuis sa mise à disposition en France en 2019,

l’eskétamine a été proposée à plusieurs patients après de multiples échecs thérapeutiques dans une

vingtaine de centres hospitaliers en France.

L’objectif de ce travail est d’apporter des données d’efficacité et de tolérance concernant ce nouveau

traitement au travers des données de la littérature et d’une étude de cas au sein de notre établissement.

Au sein du centre hospitalier Guillaume Régnier, quatre patients ont pu bénéficier de ce traitement.

Aucun n’a atteint de rémission stable. L’hypothèse principale est l’inclusion de ces patients après de

trop nombreux échecs thérapeutiques. Les effets indésirables observés sont les même que ceux

retrouvés dans les essais cliniques menés par le laboratoire. La Haute Autorité de Santé a octroyé un

service médical rendu faible à ce traitement en accord avec le manque d’efficacité démontré dans les

essais cliniques et les nombreux effets indésirables. L’électroconvulsivothérapie est efficace dans 50 %

des dépressions résistantes. Quand elle est possible, elle reste l’option de premier choix. Cependant,

l’eskétamine grâce à sa rapidité d’action pourrait être un nouvel outil dans le panel thérapeutique des

psychiatres. Sa place dans la stratégie thérapeutique de la prise en charge de la dépression est amenée

à évoluer. La publication des données en France et de l’étude de tolérance en cours par le laboratoire,

nous donnera de plus amples informations sur l’efficacité et la tolérance du traitement.

Rubrique de classement : Pharmacie clinique

Mots-clés : Pharmacie clinique, psychiatrie, antidépresseur, dépression résistante

Mots-clés anglais MeSH : Antidepressant, efficacy, safety, esketamine, treatment-resistant depression

JURY :

Président : Pr LE CORRE Pascal, Pharmacien, Professeur des universités

Dr NAUCZYCIEL Cécilia, Psychiatre, Praticien Hospitalier

Dr SPIESSER Laurence, Pharmacien, Maître de conférences des

universités

Dr BELLAY Romain, Pharmacien assistant spécialiste

Assesseurs :