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HAL Id: dumas-03321895https://dumas.ccsd.cnrs.fr/dumas-03321895
Submitted on 18 Aug 2021
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Prise en charge de la dépression résistante pareskétamine : étude de cas au centre hospitalier
Guillaume Régnier à RennesMarion Constantin
To cite this version:Marion Constantin. Prise en charge de la dépression résistante par eskétamine : étude de cas au centrehospitalier Guillaume Régnier à Rennes. Sciences du Vivant [q-bio]. 2020. �dumas-03321895�
N° d'ordre : ANNÉE 2020
THÈSE D'EXERCICE / UNIVERSITÉ DE RENNES 1
sous le sceau de l’Université Bretagne Loire
Thèse en vue du
DIPLÔME D'ÉTAT DE DOCTEUR EN PHARMACIE
Présenté sous forme de
MEMOIRE EN VUE DE L’OBTENTION DU DIPLÔME D’ETUDES
SPECIALISEES EN PHARMACIE HOSPITALIERE
présentée par
Marion CONSTANTIN
Née le 26 août 1989 à Caen
PRISE EN CHARGE DE LA
DEPRESSION RESISTANTE PAR
ESKETAMINE
Etude de cas au Centre Hospitalier
Guillaume Régnier de Rennes.
Thèse soutenue à la faculté de pharmacie de
Rennes le 23 novembre 2020.
Devant le jury composé de :
Pascal LE CORRE
Pharmacien PU-PH au CHRU de Rennes /
Président du Jury
Cécilia NAUCZYCIEL
Psychiatre PH au CH de Guillaume
Régnier, Rennes / Membre du jury
Laurence SPIESSER
Pharmacien MCU-PH au CHRU d’Angers /
Membre du jury
Romain BELLAY
Pharmacien assistant spécialiste au CH
Guillaume Régnier, Rennes / Directeur de
thèse.
2
LISTE DES ENSEIGNANTS
Listes des enseignants-chercheurs de la Faculté des Sciences Pharmaceutiques et Biologiques
Année 2019-2020
PROFESSEURS
Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire
BOUSTIE Joël X X
DONNIO Pierre-Yves X X X
FAILI Ahmad X
FARDEL Olivier X X X
FELDEN Brice X X
GAMBAROTA Giulio X
GOUGEON Anne X X
LAGENTE Vincent X X
LE CORRE Pascal X X X
LORANT (BOICHOT) Elisabeth X
MOREL Isabelle X X X
POREE François-Hugues X X
SERGENT Odile X X
SPARFEL-BERLIVET Lydie X X
TOMASI Sophie X X
VAN DE WEGHE Pierre X
VERNHET Laurent X X
3
PROFESSEURS ASSOCIES
Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire
BUREAU Loïc X
DAVOUST Noëlle X
PROFESSEURS EMERITES
Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire
CILLARD Josiane X X
GUILLOUZO André X
URIAC Philippe X X
MAITRES DE CONFERENCES
Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire
ABASQ-PAOFAI Marie-Laurence
ANINAT Caroline X X
AUGAGNEUR Yoann
BEGRICHE Karima
BOUSARGHIN Latifa X
BRANDHONNEUR Nolwenn
BRUYERE Arnaud X
BUNETEL Laurence X
CHOLLET-KRUGLER Marylène X
COLLIN Xavier X
4
CORBEL Jean-Charles X X
DELALANDE Olivier
DELMAIL David
DION Sarah
DOLLO Gilles X X X
GICQUEL Thomas X X
GILOT David X
GOUAULT Nicolas X
HITTI Éric
JEAN Mickaël X
JOANNES Audrey
LECUREUR Valérie X
LE FERREC Éric X
LE GALL-DAVID Sandrine
LE PABIC Hélène
LEGOUIN-GARGADENNEC Béatrice
LOHEZIC-LE DEVEHAT Françoise X X
MARTIN-CHOULY Corinne X
NOURY Fanny
PINEL-MARIE Marie-Laure
PODECHARD Normand
POTIN Sophie X X
RENAULT Jacques X X
ROUILLON Astrid
5
LRU
ASSISTANTS HOSPITALO-UNIVERSITAIRES (AHU)
Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire
AUTIER Brice X X
BACLE Astrid X X
BOUVRY Christelle X X
MENARD Guillaume X X
ATER
Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire
KOWOUVI Koffi
Pharmacien HDR Hospitalo-Universitaire
AFONSO Damien
BELLAMRI Nessrine x
GUILLORY Xavier
6
REMERCIEMENTS
A Monsieur le Professeur Pascal LE CORRE,
Pour l’honneur que vous me faites de présider ce jury de thèse, recevez l’expression de mon
respect et de ma considération.
A Monsieur le Docteur Romain BELLAY,
Je tiens à te remercier de m’avoir accompagné dans ce travail de thèse, pour ta disponibilité, le
temps consacré et tes nombreux conseils. Ce fut un plaisir de travailler avec toi.
A Madame le Docteur Cécilia NAUCZYCIEL,
Pour avoir accepté de juger ce travail, c’est un honneur de vous compter parmi mon jury de
thèse.
A Madame le Docteur Laurence SPIESSER,
Pour avoir accepté de participer au jury de cette thèse, recevez mes sincères remerciements.
7
A l’équipe du Centre Hospitalier Guillaume Régnier de Rennes,
A toi Romain pour avoir accepté d’encadrer ma thèse. Je te remercie pour toutes les heures
passées à la relire, à tes corrections toujours pertinentes, pour ta patience, ta disponibilité et ton
écoute. Promis, si je gagne à l’Euromillions, je penserais à t’acheter une belle voiture.
A Bastien, parce que sans toi Guillaume Régnier aurait été beaucoup moins drôle. Merci pour
tes relectures, tes conseils avisés, ta méthode de lecture d’article qui m’a fait gagner beaucoup
de temps. Et merci de m’avoir fait découvrir Braindead qui manquait à ma culture
cinématographique.
A toi Nicolas qui est un chef à l’écoute, disponible, bienveillant et parfois impitoyable en ce
qui concerne le football, je n’oublierai plus jamais Guirassy et Ramirez.
A vous trois pour m’avoir permis de découvrir tout le potentiel du panneau de configuration,
de m’avoir rafraichi l’été quand il faisait chaud, de m’avoir appris à monter un ordinateur, de
m’avoir appris à toujours déconnecter ma session avant de partir et à ne jamais croire Romain
quand il dit qu’il a besoin de mes clés mais que « non promis il ne touchera pas à ma voiture ».
A ma co-interne Mathilde qui m’a accompagnée pendant trois semestres d’internat. Bon
courage pour ton assistanat.
Au top 2, la fine équipe, Pierrette et Sandrina, j’ai enfin découvert le pot aux roses (photos à
l’appui). Grâce à vous ma ventilation a fait ressortir longtemps des confettis dans la voiture.
A Christelle pour sa gentillesse, bon courage à toi pour la suite. A Catherine pour son écoute et
pour les répliques de films cultes. A Nathalie, la maman et confidente de l’équipe, je compte
sur toi pour finir le photomontage.
Enfin à toute l’équipe, j’étais très heureuse de faire la connaissance de vous tous Fabienne,
Hélène, Aline, Manon, Isabelle, Coralie, Benoît, Tiphaine et toutes les autres personnes que j’ai
rencontrées à la pharmacie de Guillaume Régnier.
Au Docteur Jean-Marie Batail pour m’avoir accordé de son temps afin de discuter de mon sujet
de thèse.
Aux internes en psychiatrie, et particulièrement à Damien, Louise, Marie-Océane, Guillaume
Myriam, Anne-Julie et Julia.
A l’équipe du Centre Hospitalier de Lannion,
8
Merci aux pharmaciens et à l’équipe de préparateurs, ce fut un réel plaisir de débuter mon
internat à vos côtés.
A l’équipe du Centre Hospitalier Universitaire de Brest,
Aux pharmaciens, aux équipes de préparateurs et à toutes les personnes que j’ai croisées.
A l’équipe du Centre Hospitalier Universitaire de Rennes,
A l’équipe de production de l’Hôpital Sud, à Pierre-Nicolas et Marie-Antoinette pour votre
accueil et les projets réalisés ensemble.
A tous mes co-internes qui ont permis de rendre ces quatre années agréables,
Aux co-internes de Brest, la collok Ouassim, Gautier, Adrien, mais aussi Mathilde, Eléonore,
Julia, Alexia et Carmen.
A mon ancienne co-interne de Guillaume Régnier Muriel.
A Sophie et Hervé,
Pour la relecture de mon travail de thèse, j’espère que cela vous a plu. Merci pour tous ces repas
de famille et de m’accueillir si gentiment.
A Titouan et Emilie
Merci pour tous ses apéros et vivement les prochains.
A Team Caen
Mes amis de toujours. Merci à Chouille, Sis, Titi et Anaïs. Plus de 10 ans d’amitié que je chéris.
Merci pour tous ces moments passés ensemble. Depuis le lycée jusqu’à maintenant, nos vies
ont évolué ensemble et le futur s’annonce plein de promesses.
A Romain et Lucie
Enfin, je rejoins comme vous le banc des docteurs. Lucie je suis ravie d’avoir fait ta
connaissance en deuxième années de fac, tant de péripéties… Du week-end de bienvenue, en
passant par les galas et les jours de l’an. Vivement les retrouvailles. Merci à toi Romain d’être
toujours présent.
A Camille et Xavier
Merci pour cette semaine de vacances cet été. Camille tu es une belle rencontre de l’internat,
comme une fleur notre amitié s’est épanouie.
A mes amis Brestois
9
Je vous ai rencontré lors d’un tonus à Aber Wrac’h autour d’une table de ping pong. Qui aurait
cru que cela déboucherait sur autant de bons moments passés ensembles.
A Julien
Je suis tellement heureuse d’avoir croisé ton chemin. Nous avons traversé ensemble cette
aventure, périple, épreuve qu’était cette dernière année d’internat. C’est grâce à toi que j’y suis
arrivée. De mes 30 ans à Saint-Malo à mon emménagement avec toi à Brest, c’est une belle
histoire qui commence. Merci pour ton amour.
A ma famille
A mes parents, à ma sœur Laura, ma mamie et toute ma famille. J’espère vous avoir rendu fier.
A la team des Soirées raclettes
Pour toutes ces soirées de ripailles inoubliables.
10
TABLE DES MATIERES
LISTE DES ENSEIGNANTS .................................................................................................... 2
REMERCIEMENTS .................................................................................................................. 6
TABLE DES MATIERES ....................................................................................................... 10
LISTE DES ANNEXES ........................................................................................................... 13
LISTE DES FIGURES ............................................................................................................. 14
LISTE DES TABLEAUX ........................................................................................................ 15
LISTE DES ABREVIATIONS ................................................................................................ 16
INTRODUCTION .................................................................................................................... 18
I. LA DEPRESSION ............................................................................................................ 19
A. Epidémiologie .............................................................................................................. 19
B. Etiologie ....................................................................................................................... 20
1. Interaction entre gènes et environnement .................................................................. 20
2. Hypothèse monoaminergique .................................................................................... 21
C. Diagnostic ..................................................................................................................... 22
1. Signes cliniques ......................................................................................................... 22
2. Diagnostics différentiels ............................................................................................ 23
3. Outils diagnostiques .................................................................................................. 24
D. Dépression résistante .................................................................................................... 26
1. Définition ................................................................................................................... 26
2. Cause de la résistance aux traitements ...................................................................... 27
E. Suicide .......................................................................................................................... 28
F. Prise en charge ............................................................................................................. 30
1. Traitements pharmacologiques .................................................................................. 30
2. Thérapies non pharmacologiques .............................................................................. 31
i. Psychothérapie ....................................................................................................... 31
ii. Electroconvulsivothérapie .................................................................................. 31
iii. Stimulation Magnétique Transcrânienne ........................................................... 32
3. Stratégie thérapeutique .............................................................................................. 32
4. Cas de la dépression résistante .................................................................................. 36
II. ESKETAMINE ................................................................................................................. 37
11
A. Découverte de la kétamine ........................................................................................... 37
1. Origines ..................................................................................................................... 37
2. Mésusage et réglementation ...................................................................................... 38
3. Propriétés anesthésiantes ........................................................................................... 38
4. Découverte des propriétés antidépressives ................................................................ 38
B. Propriétés pharmacologiques ....................................................................................... 39
1. Généralités ................................................................................................................. 39
2. Pharmacocinétique ..................................................................................................... 41
i. Absorption .............................................................................................................. 41
ii. Distribution ......................................................................................................... 42
iii. Métabolisme ....................................................................................................... 42
iv. Elimination ......................................................................................................... 43
3. Propriétés pharmacodynamiques ............................................................................... 44
i. Mécanisme d’action glutamatergique .................................................................... 44
ii. Action sur les récepteurs opioïdes ...................................................................... 48
iii. Transmission monoaminergique (noradrénaline et sérotonine) ......................... 49
iv. Autres ................................................................................................................. 50
C. Informations cliniques .................................................................................................. 50
1. Modalités d’administration ........................................................................................ 50
2. Posologie ................................................................................................................... 51
3. Contre-indications ..................................................................................................... 53
4. Surdosage................................................................................................................... 54
D. Données d’efficacité ..................................................................................................... 54
E. Données de tolérance ................................................................................................... 58
F. Réglementation ............................................................................................................. 61
1. Autorisation de Mise sur le Marché français ............................................................. 61
2. Autorisation de mise sur le marché à l’international ................................................. 62
3. Agrément aux collectivités ........................................................................................ 63
III. ETUDE DE CAS AU CENTRE HOSPITALIER GUILLAUME REGNIER ................. 64
A. Introduction .................................................................................................................. 64
B. Objectifs ....................................................................................................................... 64
C. Matériel et méthodes .................................................................................................... 65
12
D. Résultats ....................................................................................................................... 66
1. Données cliniques recueillies .................................................................................... 66
2. Synthèse ..................................................................................................................... 71
3. Organisation............................................................................................................... 72
E. Discussion .................................................................................................................... 73
1. Données d’efficacité .................................................................................................. 73
2. Tolérance ................................................................................................................... 75
3. Organisation............................................................................................................... 76
4. Limites ....................................................................................................................... 77
CONCLUSION ........................................................................................................................ 79
REFERENCES ......................................................................................................................... 81
ANNEXE ................................................................................................................................. 94
13
LISTE DES ANNEXES
Annexe 1 : Echelle MADRS .................................................................................................... 94
Annexe 2 : Tableau des différentes classes pharmacologiques et molécules antidépresseurs . 98
14
LISTE DES FIGURES
Figure 1 : Prévalence de l'épisode dépressif caractérisé déclaré au cours des 12 derniers mois
chez les 18-75 ans, selon le sexe et la classe d'âge, France Métropolitaine, 2017 (3) ............. 20
Figure 2 : Taux de rémission pour EDC. (29) .......................................................................... 27
Figure 3 : Prévalence du suicide en Europe en 2016 (33). La légende représente le nombre de
suicides pour 100 000 habitants en 2016. La France se situe parmi les pays avec le plus haut
taux de suicide. ......................................................................................................................... 29
Figure 4 : Prise en charge de l'EDC (53) .................................................................................. 35
Figure 5 : Structure chimique de la phencyclidine et de la kétamine (63) ............................... 37
Figure 6 : La kétamine est composée d'un mélange racémique de deux énantiomères (73) .... 39
Figure 7 : Représentation de l'affinité de la kétamine pour ses récepteurs. L'affinité décroit de
la gauche vers la droite. La barre verticale représente la cible engagée aux doses efficaces (74)
.................................................................................................................................................. 40
Figure 8 : Métabolisme de la kétamine et les cytochromes impliqués (91) ............................. 43
Figure 9 : Récepteur NMDA en configuration fermée. (98) .................................................... 45
Figure 10 : Site de fixation de la kétamine sur le site PCP (74) ............................................. 46
Figure 11 : Inhibition de l'interneurone inhibiteur GABAergique par la kétamine. (100)....... 47
Figure 12 : Mécanisme d'action de la kétamine dans la dépression : 1) Inhibition de
l'interneurone GABA menant à la désinhibition du neurone glutamatergique 2) Augmentation
de la libération de glutamate 3) Activation des récepteurs AMPA 4) Libération du BDNF 5)
Activation en cascade de la voie de signalisation mTOR qui va stimuler la neurogénèse (101)
.................................................................................................................................................. 48
Figure 13 : Effets des populations spécifiques sur la pharmacocinétique de l'eskétamine (89)
.................................................................................................................................................. 53
Figure 14 : Evaluation du score MADRS au cours des administrations d'eskétamine : Score
allant de 0 (asymptomatique) à 60 (score maximum de l'EDC). ............................................. 71
15
LISTE DES TABLEAUX
Tableau 1 : Classification de l'épisode dépressif caractérisé.................................................... 23
Tableau 2 : Paramètres pharmacocinétiques de l'eskétamine................................................... 44
Tableau 3 : Essais cliniques à court terme de l’eskétamine ..................................................... 54
Tableau 4 : Essai clinique sur l’eskétamine en traitement d’entretien ..................................... 56
Tableau 5 : Principaux effets secondaires statistiquement significatifs issus de la méta-analyse
de Zheng et al. (113). Les pourcentages sont tirés de deux essais cliniques de phase III (108)
(114) ......................................................................................................................................... 59
16
LISTE DES ABREVIATIONS
5-HT : Sérotonine
AD : Antidépresseur
AFSSAPS : Agence Française de Sécurité Sanitaire des Produits de Santé
Akt : Protéine kinase B
AMM : Autorisation de Mise sur le Marché
AMPA : Acide α-amino-3-hydroxy-5-methyl-4-isoxazolepropionique
AMPAR : Récepteur à l’acide α-amino-3-hydroxy-5-methyl-4-isoxazolepropionique
ATU : Autorisation Temporaire d’Utilisation
AUC : Aire sous la courbe
BDNF : Facteur neurotrophique issu du cerveau
BPCO : BronchoPneumopathie Chronique Obstructive
CIM-10 : Classification Internationale des Maladies, 10ème version
Cmax : Concentration maximale
CME : Commission Médicale d’Etablissement
CHGR : Centre Hospitalier Guillaume Régnier
COMEDIMS : Commission du Médicament et des Dispositifs Médicaux Stériles
COVID-19 : Coronavirus
DHNK : Déhydronoreskétamine
DREES : Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation et des Statistiques
DSM : Manuel Diagnostique et Statistique
ECT : Electroconvulsivothérapie
EDC : Episode Dépressif Caractérisé
EEF2 : Facteur d’élongation eucaryote 2
EI : Effets indésirables
EMA : Agence Européenne du Médicament
ERK : Extracellular signal-regulated kinase
17
FDA : Food and Drug Administration
GABA : Acide γ-aminobutyrique
HDJ : Hospitalisation De Jour
HNK : Hydroxynoreskétamine
Ki : Constante de dissociation
ISRS : Inhibiteur Sélectif de la Recapture de la Sérotonine
IRSNA : Inhibiteur de la Recapture de la Sérotonine et de la Noradrénaline
MADRS : Montgomery Asberg Depression Rating Scale
mTOR : Cible mammalienne de la rapamycine
NET : Transporteur de la noradrénaline
NMDA : N-méthyl-D-aspartate
NMDAR : Récepteur au N-méthyl-D-aspartate
NNH : Number Needed to Harm
OMS : Organisation Mondiale de la Santé
PCP : Phenylcyclidine
PUT : Protocole d’Utilisation Thérapeutique
RCP : Résumé des Caractéristiques du Produit
SMTr : Stimulation Magnétique Transcrânienne répétée
Récepteur α : Récepteur adrénergique
Réseau PIC : Réseau Psychiatrie-Information-Communication
RCP : Réunion de Concertation Pluridisciplinaire
SERT : Transporteur de la sérotonine
S-norKET : Noreskétamine
STAR*D : Sequenced Treatment Alternatives to Relieve Depression
TrkB : Récepteur à la tyrosine kinas
18
INTRODUCTION
Le trouble dépressif caractérisé concerne environ 15 à 20% de la population quel que soit
l’âge. A terme, la maladie a des répercussions importantes sur la vie du patient : cadre
professionnel, social, comorbidités somatiques (suicide, diabète, cardiopathies, etc.). Ainsi, on
estime que 10 à 20% des personnes souffrant de cette pathologie décèdent par suicide (1).
L’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) classe ce trouble au premier rang de l’ensemble
des maladies en termes de dépenses globales pour la société (2). Il s’agit d’un véritable
problème de santé publique.
La prise en charge de la dépression peut être complexe et les classes thérapeutiques
disponibles ont une efficacité limitée. En effet, un tiers des patients ne répondent pas aux
traitements de manière satisfaisante, c’est la dépression résistante. Une innovation
thérapeutique, l’eskétamine, administrée par voie nasale, est disponible depuis 2019 dans cette
indication.
Au centre hospitalier Guillaume Régnier (CHGR), établissement public spécialisé en santé
mentale, l’eskétamine a été proposée aux patients en échec thérapeutique. Cette thèse a pour
objectif d’apporter des données d’efficacité et de tolérance de ce nouveau traitement au travers
des données de la littérature et d’une étude de cas au sein de notre établissement. Ce travail va
permettre d’établir une organisation commune dans notre établissement pour les patients traités
par eskétamine étant données les différentes contraintes liées à ce traitement.
La première partie de ce travail est consacrée à la pathologie dépressive et son évolution
possible en dépression résistante. Dans un second temps, nous axerons ce travail sur
l’eskétamine (propriétés pharmacologiques, données cliniques, tolérance, etc.). Puis, nous
présenterons les résultats obtenus au sein de notre établissement suite aux traitements par
eskétamine. Enfin, nous discuterons des résultats en les rapportant à la littérature.
19
I. LA DEPRESSION
A. Epidémiologie
La santé mentale est inscrite au premier rang des priorités de santé publique par la charge
sanitaire, économique et sociale qu’elle représente. Elle regroupe l’ensemble des troubles
mentaux définis dans le DSM V (manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux, 5ème
édition) : troubles du spectre de la schizophrénie, troubles dépressifs, troubles bipolaires,
troubles neurocognitifs, etc. Les comorbidités somatiques et psychologiques ainsi que l’effet
néfaste sur les habitudes de vie (tabagisme, alcoolisme, diminution de l’activité physique,
pratiques sexuelles à risque) alourdissent le fardeau (3).
La dépression est la pathologie mentale chronique la plus fréquemment retrouvée dans
la population. Elle représente la première cause d’incapacité et de morbidité dans le monde. Le
nombre grandissant de personnes touchées par cette pathologie fait qu’en France, un tiers des
patients parmi les 2,1 millions d’adultes hospitalisés pour un motif psychiatrique, l’était pour
un épisode dépressif caractérisé (EDC) en 2013, selon le Comité Stratégique de la Santé
Mentale et de la Psychiatrie (4).
En 2017, d’après Santé publique France, parmi les personnes âgées de 18 à 75 ans
presque 10% avait vécu un EDC au cours des 12 derniers mois. Elle est en augmentation depuis
2010 et est 2 fois plus élevée chez les femmes que chez les hommes (Figure 1, page 20) (3).
Cette vulnérabilité chez la gente féminine s’explique à la fois par les bouleversements
hormonaux qui peuvent survenir à la puberté, après l’accouchement (dépression du post-
partum), et à la ménopause, ainsi que par les inégalités et les discriminations liées au sexe (5).
Les personnes au chômage, en situation de précarité et les moins de 45 ans sont celles pour
lequel les EDC déclarés sont les plus nombreux. Chez la personne âgée, les EDC sont réduits à
l’avancée de l’âge et sont sous-diagnostiqués alors que le risque suicidaire est plus important
(6). Les troubles dépressifs seraient ainsi responsables de 35 à 45% des arrêts de travail et
seraient retrouvés dans plus de la moitié des cas de décès par suicide (3)(4)(7).
20
B. Etiologie
L’étiologie de la dépression est multifactorielle : génétique, psychologique,
environnementale et biologique. Ces éléments interagissent entre eux de manière complexe. En
vérité, la recherche n’a pas encore élucidé tous les mécanismes en jeu.
1. Interaction entre gènes et environnement
On sait qu’un individu à 2 à 4 fois plus de risques de développer un EDC si un de ses parents
au 1er degré en a souffert. On peut chiffrer la part d’hérédité à un tiers selon une méta-analyse
réalisée sur des jumeaux (8). C’est moins que pour la schizophrénie ou les troubles bipolaires
dont la part d’hérédité atteint 70%. Mais la génétique n’est pas la seule responsable. En effet,
une étude menée sur des jumeaux homozygotes a montré des discordances au sein des fratries
mettant en relief le rôle de l’environnement dans la genèse de la pathologie (9).
Figure 1 : Prévalence de l'épisode dépressif caractérisé déclaré au cours des 12 derniers mois chez les
18-75 ans, selon le sexe et la classe d'âge, France Métropolitaine, 2017 (3)
21
La méta-analyse de Hyde et al. a réussi à identifier 17 variations génétiques associées à la
dépression sur 75 000 personnes d’origine caucasienne avec des antécédents d’EDC. Ces
variations sont réparties sur 15 régions du génome connues pour être exprimées au niveau
cérébral. L’un des gènes est commun à d’autres pathologies du système nerveux tels que
l’épilepsie et les déficits intellectuels. Un autre est retrouvé dans un modèle de dépression chez
la souris. La prévalence des états dépressif est plus élevée chez la femme, mais aucun locus
spécifique au genre n’a été localisé (10). Cependant, les gènes pris indépendamment les uns des
autres n’expliquent pas à eux seuls le phénotype. Il faut prendre en compte leurs connexions.
Même s’il existe une vulnérabilité génétique, elle n’explique pas à elle seule la survenue
d’un EDC. L’histoire d’un individu entre en jeu : traumatisme, environnement stressant ou
survenue d’un évènement malheureux sont des facteurs de risques. La réponse individuelle de
chaque personne varie et ne suffit pas à prédire un EDC. C’est pourquoi, il est plus juste de
parler d’interactions gène-environnement. C’est le domaine de l’épigénétique : notre
patrimoine génétique modère notre réponse à des facteurs de risques environnementaux (11).
L’étude prospective de grande ampleur de Caspi et al. en 2003 le démontre. En effet, le
polymorphisme génétique du transporteur sérotoninergique influence la réponse à des facteurs
de stress. Les personnes homozygotes pour le variant court manifestent plus de symptômes
dépressifs que les autres en réaction à un évènement traumatique (12). De même, des variants
du gène FBKP5, impliqué dans la voie du cortisol, augmentent les risques d’avoir un EDC si
pendant l’enfance les personnes ont été exposées à des facteurs de stress (13).
Les réponses émotionnelles à ces événements sont donc modulées par la constitution
génétique de chaque individu (9)(14).
2. Hypothèse monoaminergique
L’hypothèse monoaminergique postule que la dépression serait due à une diminution de
la concentration des monoamines (notamment sérotonine et noradrénaline) au niveau
cérébral. Cette théorie datant des années 50 est à l’origine de la découverte des classes
pharmacologiques d’antidépresseurs (AD). Ces différentes classes agissent en facilitant la
neurotransmission sérotoninergique et noradrénergique : en inhibant leurs recaptures ou en
limitant leurs dégradations dans la fente synaptique. Les AD tricycliques ou imipraminiques
sont les premiers à être synthétisés, suivis par les inhibiteurs de la monoamine oxydase (IMAO)
et les inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine (ISRS) mieux tolérés. Une nouvelle
22
classe d’AD d’action duale a ensuite fait son apparition : ce sont les inhibiteurs de la recapture
de la sérotonine et de la noradrénaline (IRSNa). elle serait plus efficace sur les symptômes de
ralentissement moteur mais cette donnée reste contestée (15).
La simplicité du modèle monoaminergique est cependant remise en cause. En effet, les
découvertes d’une hypersensibilisation des récepteurs sérotoninergiques et noradrénergiques
ainsi qu’une désensibilisation des transporteurs des monoamines rendent plus complexes
l’hypothèse de base. Aussi, le délai d’action des AD reste inexpliqué. Des modifications
concernant la neuroplasticité ont été décelées par le biais d’administrations sur le long terme
des AD. Des mécanismes complexes sont donc à l’œuvre dans la genèse de la dépression
(15)(16).
C. Diagnostic
1. Signes cliniques
Il existe deux principales classifications internationales des diagnostics psychiatriques : la
Classification Internationale des Maladies, 10ème version (CIM-10), qui est celle de référence
et le Manuel diagnostique et statistique des maladies mentales, 5ème version (DSM-V) utilisé
en pratique clinique. Les deux se rejoignent sur l’expression des symptômes et peuvent se
résumer d’après le tableau suivant (Tableau 1 page 23). Le diagnostic d’EDC repose sur la
présence de symptômes caractéristiques provoquant une souffrance cliniquement significative
depuis au moins deux semaines, avec observation d’une rupture avec l’état antérieur du patient.
Les symptômes les plus fréquemment observés sont la tristesse, l’anhédonie (absence de
capacité à ressentir le plaisir), la perte de l’appétit, les troubles du sommeil ou encore le
ralentissement psychomoteur. Des difficultés socio-professionnelles viennent très souvent
compléter le tableau clinique (16).
23
Symptômes
Durée minimale 2 semaines
Critères essentiels
majeurs
Présence d’au moins 2 des symptômes toute la journée :
1. Humeur dépressive
2. Perte d’intérêt et de plaisir
3. Fatigue ou perte d’énergie
Autres critères
Présence d’au moins 2 critères mineurs sur 7 :
1. Modification de l’appétit avec variation pondérale
2. Troubles du sommeil
3. Baisse de l’estime de soi et de la confiance en soi
4. Modification de l’activité psychomotrice
5. Sentiment de culpabilité / dévalorisation
6. Baisse de la concentration / attention
7. Idées suicidaires
Le nombre de critères définit la sévérité : légère, modérée, sévère.
2. Diagnostics différentiels
Il faut distinguer l’EDC d’autres pathologies psychiatriques telles que les troubles anxieux,
les troubles bipolaires ou les troubles schizophréniques. En effet, ces pathologies dans leurs
expressions diverses peuvent ressembler ou avoir des symptômes communs à la dépression.
Cependant, la physiopathologie et la prise en charge thérapeutique diffèrent.
• Troubles anxieux : pathologies durables avec majoration du stress et de l’angoisse. Ils
regroupent un ensemble de pathologies diverses (le trouble anxieux généralisé, le
trouble panique, le trouble anxiété sociale, la phobie spécifique, le trouble obsessionnel
compulsif, l’état de stress post-traumatique)
• Troubles bipolaires : caractérisés par un trouble de l’humeur avec une alternance
d’épisodes maniaques (excitation caractérisée) et dépressifs. Ce sont troubles
Tableau 1 : Classification de l'épisode dépressif caractérisé
24
complexes difficiles à diagnostiquer. Le recours aux soins a lieu majoritairement lors
des épisodes dépressifs tandis que les épisodes de manie et surtout d’hypomanie peuvent
passer inaperçus. On peut donc conclure à tort à une dépression unipolaire retardant sa
prise en charge. En cas de dépression, il faut systématiquement rechercher des
antécédents de manie et des indicateurs de bipolarité. Les indicateurs devant faire
suspecter une bipolarité en phase dépressive sont une dépression avant 25 ans, des
antécédents familiaux de troubles bipolaires, un changement brutal dans le
fonctionnement psychique, plus de trois antécédents d’épisodes dépressifs, des
symptômes dépressifs atypiques, des tentatives de suicides répétées ou une réaction
anormale à un traitement AD (17).
• Troubles schizophréniques : associe syndrome dissociatif (désorganisation de la
pensée et du comportement), symptômes productifs (délires, hallucinations),
symptômes négatifs (appauvrissement émotionnel et affectif, isolement) et troubles
cognitifs. La schizophrénie déficitaire qui se caractérise par la prédominance de
symptômes négatifs peut se confondre au début avec des manifestations dépressives.
L’EDC provoqué par l’abus ou le sevrage de substances psychoactives (médicaments,
drogues) sont à exclure du diagnostic. Cependant, ces comorbidités sont fréquentes avec par
exemple l’alcoolodépendance.
3. Outils diagnostiques
Différentes échelles ou outils permettent en pratique courante le diagnostic de dépression,
d’en apprécier la sévérité et de quantifier le risque suicidaire encouru. Certaines ne sont pas
spécifiques de la dépression et peuvent être appliquées dans d’autres pathologies
psychiatriques.
Echelles de diagnostic et d’évaluation de la sévérité de la dépression :
• MADRS (Montgomery Asberg Depression Rating Scale) (Annexe 1 : Echelle MADRS:
échelle permettant d’évaluer la sévérité de la dépression. Composée de 10 items, elle
permet de coter l’intensité des symptômes concernant le degré de tristesse, l’humeur,
les troubles somatiques (appétit, sommeil), l’épuisement physique et psychique,
l’anhédonie et enfin le suicide. Elle est utilisée en pratique pour déterminer l’efficacité
d’un traitement AD. Le score varie de 0 à 60, 15 est la valeur seuil au-delà de laquelle
25
le patient est considéré en dépression. Cette échelle est utilisée fréquemment par les
psychiatres et dans les essais cliniques (16).
• HDRS score ou HAM-D (Hamilton Depression Rating Scale). Initialement, cette
échelle était utilisée dans les années 50 pour évaluer l’efficacité de la première
génération d’AD. Elle est utilisée chez des sujets dont le diagnostic de dépression est
déjà établi. Elle juge de la sévérité du trouble par hétéro-évaluation grâce à 21 items.
Son but est donc de mettre en évidence les modifications de l’état de la maladie (16).
• BPRS (Brief Psychiatric Rating Scale) : cette échelle, non spécifique de la dépression,
est destinée à la mesure des changements symptomatiques chez des patients hospitalisés
en psychiatrie. L’évaluation repose sur un ensemble d’items : 18 classiquement (18).
• BDI (Beck Depression Inventory) : elle permet dans sa version révisée, grâce à 21
questions, de statuer sur la sévérité de la dépression via le score global obtenu. Sont
évalués les domaines cognitif, affectif, les symptômes somatiques et végétatifs. Un
score ≥ 14 signe une dépression (19).
• MINI (mini-entretien neuropsychiatrique international) : entretien diagnostic structuré,
d’une vingtaine de minutes, qui explore les principaux troubles psychiatriques classés
par modules. Ceux-ci regroupent par exemple l’état dépressif majeur (EDM), l’EDM
avec caractéristiques mélancoliques, le risque suicidaire, les troubles paniques (20).
• IDS-C 30 (Inventory of Depressive Symptomatology) : hétéro-questionnaire réalisé par
le médecin (C pour Clinician) fait de 30 items quantifiant la sévérité d’un EDM. Le
IDS-SR est, lui, rempli par le patient (Self Report) (21).
• CGI-S (Clinical Global Impression Severity Scale) jauge de la sévérité d’une
pathologie. La cotation varie de 0 à 7, soit de « non évalué » à « extrêmement malade »
et évalue les changements avant et après traitement (22).
Echelles d’évaluation du risque suicidaire :
• SSI (Scale for Suicidal Ideation) est une échelle regroupant 19 items qui cotent le risque
suicidaire de 0 à 2 (0 = fort, 2 = aucun). Exemple de question : « évalue ton désir de
vivre » (23).
• SIBAT (Suicide Ideation and Behavior Assessment Tool) est une échelle d’évaluation
du risque suicidaire, complétée à la fois par le patient et le clinicien (24).
• C-SSRS (Columbia–Suicide Severity Rating Scale) est une échelle d’évaluation du
risque suicidaire créée par les chercheurs de l’Université de Columbia. Elle identifie
26
pour cela des comportements spécifiques, pouvant indiquer l’intention de se donner la
mort. Le questionnaire peut être complété par le patient ou le psychiatre (25).
D. Dépression résistante
1. Définition
La dépression résistante est définie par l’absence de réponse ou une réponse
insuffisante à au moins deux traitements antidépresseurs de classe pharmacologique
différente bien conduits en termes de dose, de durée et d’observance. Elle affecte 15 à 30
% des patients dépressifs (26)(27).
La notion de dépression résistante aux traitements a été évaluée notamment grâce à
l’étude STAR*D de Rush et al. achevée en 2006. Cette étude de grande ampleur (plus de 4000
patients) assure 4 niveaux de prise en charge successifs en fonction de la présence ou non d’une
réponse au traitement initié. En première intention, les patients étaient traités par citalopram
(ISRS). Le traitement était maintenu en cas de réponse clinique. En cas d’échec, une autre
stratégie, pharmacologique ou non, en association ou non, était mise en place (et ce, réappliqué
à chaque ligne de traitement). L’étude STAR*D atteste d’un fait : plus le patient progresse dans
les étapes, plus les taux de rémissions sont faibles allant de 36,8% à 13% après le 4ème niveau
de prise en charge. Les taux de rechutes sont également plus élevés. Le taux de rémission
cumulée est de 67% correspondant à un tiers de patients atteints de dépression dite résistante
(28) (Figure 2, page 27).
27
2. Cause de la résistance aux traitements
Il existe un terrain de la dépression résistante. Les facteurs favorisant la résistance sont (30):
- Socio démographiques : La proportion est plus élevée chez les femmes, les célibataires,
et elle augmente avec l’âge. La précarité sociale, le bas niveau d’éducation et de
scolarisation augmentent le risque également.
- Cliniques
o Caractéristiques du trouble dépressif : Le nombre d’EDC, leurs intensités, leurs
durées, et le délai avant l’initiation d’un premier traitement sont associés à la
résistance. Les symptômes psychotiques couplés à l’EDC rendent le diagnostic
plus difficile.
o Comorbidités psychiatriques : L’anxiété, le syndrome de stress post-
traumatique, les addictions et les troubles de la personnalité sont des facteurs de
mauvais pronostic sur le long terme.
o Comorbidités somatiques : Les troubles endocriniens (hypothyroïdie),
métaboliques, cardio-respiratoires, neurologique (maladie de Parkinson) et les
douleurs chroniques, sont parfois en cause dans la non réponse aux traitements.
o Facteurs psychologiques
o Pharmacologique : Beaucoup d’AD sont métabolisés au niveau hépatique, la
variabilité interindividuelle des cytochromes peut être responsable d’une
Figure 2 : Taux de rémission pour EDC. (29)
28
diminution de la concentration plasmatique des principes actifs (31). Certains
médicaments inhibiteurs ou inducteurs enzymatiques peuvent également
interagir. Les interactions médicamenteuses peuvent limiter les possibilités de
traitement en cas de contre-indication. Des traitements ont aussi une action
dépressogène (ex : bêta-bloquants).
E. Suicide
Le suicide est l’acte de mettre fin à ses jours. Dans le monde, près de 800 000 personnes
se donnent la mort tous les ans, soit un décès toutes les 40 secondes. C’est plus que les guerres
et les homicides réunis (32). En Europe, la France se situe parmi les pays ayant un taux élevé
de suicides Figure 3 : Prévalence du suicide en Europe en 2016 (33). La légende représente le
nombre de suicides pour 100 000 habitants en 2016. La France se situe parmi les pays avec le
plus haut taux de suicide. (Figure 3, page29).
29
Si l’on s’intéresse à l’âge des personnes, le suicide est la deuxième cause de mortalité
chez les 15-29 ans derrière les accidents de la route (34). Les individus de 15 ans ou moins sont
ceux ayant le taux de suicide le plus bas (35). Cependant, les taux de suicide les plus élevés
sont retrouvés chez les individus âgés de plus de 70 ans (35). En termes de sexe, les hommes
se suicident 1,8 fois plus que les femmes. L’ingestion de pesticides, la pendaison et les armes à
feu sont les méthodes de suicide les plus répandues (36). Les tentatives de suicide sont 10 à 30
fois plus importantes que le suicide (37). Le facteur de risque identifié dans la genèse du suicide
est la présence de troubles psychiatriques. Le passage à l’acte est généralement secondaire à
une dépression (30%), à la consommation de substances (18%), aux troubles psychotiques
(14%) et aux troubles de la personnalité (13%) (38). Les autres facteurs sont les difficultés
financières ou relationnelles.
La France présente un des taux de suicides les plus élevés d’Europe, avec 9000 décès
par suicide par an (Figure 3). En 2017, 7% de la population déclarait avoir fait une tentative de
suicide (39). Les secteurs d’activité les plus touchés sont la restauration et l’hébergement, les
arts et spectacles et l’enseignement. La situation des jeunes filles est particulièrement
préoccupante avec une augmentation des tentatives de suicide et pensées suicidaires depuis
2011, associée à la consommation de substances psychoactives et au décrochage scolaire (39).
Figure 3 : Prévalence du suicide en Europe en 2016 (33). La légende représente le nombre de suicides
pour 100 000 habitants en 2016. La France se situe parmi les pays avec le plus haut taux de suicide.
30
Ainsi, le suicide est un comportement répandu et courant, majoritairement associé à une
pathologie psychiatrique pour lequel une prévention existe.
F. Prise en charge
La prise en charge des EDC repose sur l’association de traitements pharmacologiques
et de thérapies non pharmacologiques, devant être associés pour une prise en charge optimale.
1. Traitements pharmacologiques
Les différentes classes thérapeutiques regroupent principalement les ISRS (inhibiteurs
sélectifs de la recapture de la sérotonine), les IRSNA (inhibiteur de la recapture de la sérotonine
et de la noradrénaline), les imipraminiques et les IMAO (inhibiteur de la monoamine oxydase).
Au total, une vingtaine de médicaments AD sont disponibles en France (Annexe 2).
Actuellement, aucun essai clinique n’a montré de différences entre les taux de réponses quel
que soit les AD prescrits. Cependant, les ISRS, IRSNA ou autres AD ont une meilleure
tolérance que les IMAO et les imipraminiques c’est pourquoi ils sont initiés prioritairement.
Cependant, il est judicieux d’adapter les AD en fonction du sous-type de dépression (40).
Le traitement médicamenteux n’est prescrit que dans les dépressions d’intensité modérée à
sévère, selon les recommandations de la HAS (16)(41). En effet, l’action d’une telle médication
administrée chez des patients souffrant d’épisodes dépressifs non caractérisés ou d’EDC léger
n’a pas mis en évidence de bénéfice thérapeutique (16).
Le choix d’une classe d’AD est multifactoriel :
- Symptomatologie
- Sévérité des symptômes
- Âge du patient (interactions médicamenteuses du sujet âgé, autorisation de mise sur le
marché - AMM - chez l’enfant)
- Classe thérapeutique déjà utilisée avec efficacité et bien tolérée lors d’un épisode
dépressif antérieur.
L’objectif du traitement est l’obtention d’une rémission complète des symptômes
dépressifs. La présence d’une symptomatologie résiduelle devient même un facteur prédictif de
récidive (42). L’échelle MADRS est un des étalons permettant de juger de la guérison. Le
31
patient est considéré comme guéri lorsque son score est inférieur à 9, en rémission partielle
pour un résultat entre 10 et 20. Au-delà, il est estimé non répondeur. Généralement, un tiers des
patients répondent au traitement, un tiers y répondent partiellement et un tiers n’y répondent
pas.
Par ailleurs, le risque suicidaire par levée d’inhibition, reste polémique. Si ce risque est
l’un des principaux éléments de gravité de la dépression, l’introduction de nouveaux
médicaments AD a engendré une baisse du taux de suicide (43). Il n’en reste pas moins que
l’apparition d’un comportement suicidaire suite à leur administration est rapportée depuis
longtemps (44)(45). Une revue de 702 essais issus de MedLine et de la bibliothèque Cochrane
portant sur 87 650 patients met en évidence une association entre les tentatives de suicide et le
traitement par ISRS chez l’adulte (46). Ainsi, le rapport entre AD et risque suicidaire demeure
complexe et controversé. De fait, des précautions doivent être prises pour éviter tout risque
accru de suicide à l’instauration d’un traitement AD.
2. Thérapies non pharmacologiques
i. Psychothérapie
La psychothérapie est un exemple de prise en charge non pharmacologique, avec différentes
approches :
- De soutien (empathie, écoute, soutien permettant une restauration des projets)
- Cognitivo-comportementale (rassemblent les données les plus nombreuses)
- D’inspiration analytique
- Systémique
En l’absence de données comparatives suffisantes, toutes ces psychothérapies peuvent être
mises en œuvre (47).
ii. Electroconvulsivothérapie
Dans l’arsenal de traitement, il existe aussi l’électroconvulsivothérapie (ECT). Ce procédé,
autrement appelé sismothérapie, a été introduit en France dans les années 40. Son principe
consiste à provoquer une crise comitiale généralisée via un courant électrique transcrânien, chez
un malade endormi sous anesthésie générale et curarisé. Elle permet une rémission complète de
la dépression dans 65% des cas. Chez les patients pharmaco-résistants, le pourcentage diminue
à 48% (48).
32
iii. Stimulation Magnétique Transcrânienne
La Stimulation Magnétique Transcrânienne répétée ou SMTr est une neurostimulation non
invasive au moyen d’un champ magnétique focalisé et répété de haute intensité, introduite en
1985. Le cortex pré-frontal dorso-latéral est visé (49), au moyen d’une bobine inductrice placée
au contact du scalp, pour en moduler l’activité électrique. Cette thérapeutique n’est disponible
que dans 150 centres en France. Une note de cadrage, émise par la HAS (50) en octobre 2020,
préconise son utilisation en cas de dépression unipolaire pharmaco-résistante clairement établie
ou dans les « cas graves » de dépression unipolaire en alternative à la sismothérapie, dans le but
de potentialiser les traitements déjà en cours Elle semble être une option intéressante dans
l’arsenal des traitements de la dépression, cette technique garantissant sécurité, rapidité et
efficacité (51).
3. Stratégie thérapeutique
Le traitement d’un épisode dépressif découle de la sévérité des symptômes (Figure 4, page
35) (52).
- Dépression légère : psychothérapies par thérapies cognitivo-comportementales et
thérapies interpersonnelles.
- Dépression modérée : traitement ambulatoire, initiation d’un traitement AD en
favorisant les molécules les mieux tolérées (par exemple ISRS), dont le délai d’action
est de 3 à 5 semaines. On peut y allier une psychothérapie, comme dans la dépression
légère.
- Dépression sévère : traitement ambulatoire ou en hospitalisation en cas de risque
suicidaire élevé, de retentissement somatique marqué (anorexie), d’entourage familial
ou social du patient insuffisant, en cas d’agitation, de violence, de conduite addictive ou
en présence de symptômes psychotiques. Le traitement est le même que celui de la
dépression modérée.
- Dépression mélancolique : Hospitalisation pour réalisation d’ECT en première
intention ou IRSNA (venlafaxine) ou tricyclique et antipsychotique atypique. L’ECT,
par sa plus grande rapidité d’action et sa bonne tolérance, est indiquée en première
intention dans les formes mélancoliques sévères, en particulier chez les patients âgés
présentant des symptômes somatiques ou des idées suicidaires mettant en jeu le
pronostic vital (53).
33
L’efficacité du traitement sera systématiquement réévaluée au bout de 4 à 8 semaines de
traitement.
En cas de :
- Traitement efficace :
- Réponse complète : maintien du traitement à posologie efficace, pour 6 mois à
1 an. Arrêt progressif au décours.
- Réponse partielle : majoration de la dose, changement de classe voire
association d’AD.
- Échec du traitement dans une dépression modérée : il est important dans un
premier temps de vérifier l’observance du patient (régularité des prises, doses
suffisantes, un dosage plasmatique peut être effectué le cas échéant). Un changement de
classe d’AD devra être envisagé. Le choix de la nouvelle classe (par exemple IRSNA)
se fera en fonction des antécédents de traitement du patient (efficacité et tolérance) et de
la symptomatologie (54).
- Échec du traitement dans une dépression sévère : une hospitalisation devra être
envisagée avec réévaluation du traitement.
Une nouvelle évaluation est menée après 4 à 8 semaines.
En cas de :
- Traitement efficace : maintien du traitement à dose efficace pour 6 mois à 1 an, puis
arrêt progressif. S’il s’agit du troisième épisode, alors le traitement est poursuivi pour
au moins 2 ans.
- Échec du traitement : un avis spécialisé est requis, l’historique des traitements
médicamenteux du patient sera analysé.
- Absence de forme mélancolique ou de risque suicidaire élevé : stratégie de
potentialisation par :
▪ Association d’un AD au lithium (hors AMM), de tri-iodothyronine
(hors AMM) ou d’aripiprazole (hors AMM).
▪ Association d’AD comme fluoxétine et miansérine ou venlafaxine et
mirtazapine.
34
▪ Changement de classe : le choix de la nouvelle classe se fera en
fonction des antécédents de traitement du patient (efficacité et
tolérance) et de la symptomatologie (par exemple imipraminiques).
- Forme mélancolique ou risque suicidaire élevé : ECT.
35
Sp : symptômes
Figure 4 : Prise en charge de l'EDC (53)
36
4. Cas de la dépression résistante
Elle nécessite un avis spécialisé. Le psychiatre confirme le statut de dépression résistante
en réévaluant le diagnostic et en s’assurant que les traitements déjà administrés étaient
cohérents (posologie, durée, molécule, observance). Enfin, il élimine toute étiologie organique
ou psychologique de résistance.
Le médecin a alors plusieurs stratégies thérapeutiques :
- L’augmentation de posologie tout en respectant l’intervalle de posologie recommandé
par l’AMM, après dosage plasmatique. La relation dose-efficacité a été retrouvée chez
les patients traités par tricyclique et IRSNA (55). Le suivi thérapeutique
pharmacologique (STP) des AD permet de vérifier que la concentration des traitements
est comprise dans une fourchette de valeurs adéquates. Si la concentration est en dessous
de la valeur seuil cela peut expliquer l’inefficacité thérapeutique. Les causes peuvent
être l’inobservance, une interaction médicamenteuse ou encore la métabolisation de la
molécule qui varie d’un patient à l’autre (31). Le dosage n’est pas utile pour tous les
AD, il est cependant fortement recommandé pour les AD tricycliques et le citalopram.
- Le changement d’antidépresseur : le choix de la nouvelle classe se fera en fonction
des antécédents de traitement du patient (efficacité et tolérance) et de la
symptomatologie (par exemple imipraminiques, venlafaxine ou IMAO).
- La potentialisation par l’adjonction de sels de lithium ou de triodothyronine. Elle
évite la perte du bénéfice du premier traitement et pourrait avoir un effet plus rapide
(56).
- L’adjonction d’une psychothérapie pour renforcer l’effet des AD (57).
- L’ECT (58).
- Les associations d’antidépresseurs : devront être choisies après avoir essayé les
stratégies suscitées (59).
Depuis peu, une nouvelle molécule venant compléter l’arsenal thérapeutique est disponible
pour le traitement de la dépression résistante : l’eskétamine.
37
II. ESKETAMINE
A. Découverte de la kétamine
1. Origines
La kétamine est un anesthésique synthétique dérivé du phencyclidine (PCP) synthétisée par
Calvin L. Stevens en 1962 (Figure 5). Son nom provient des groupements chimiques qui la
composent : une cétone et une amine (60). Le PCP fut alors abandonné au profit de la kétamine
car elle présentait le double avantage d’avoir une plus courte durée d’action et un meilleur profil
de tolérance. Par la suite, elle fut testée sur des prisonniers qui décrivaient des sensations
étranges de déréalisation et de dissociations. Ces effets psychotropes à la phase d’émergence
mimaient les symptômes psychotiques de la schizophrénie. Ces propriétés ont conduit à
l’émergence d’un nouveau modèle pharmacologique schizophrénique impliquant une
dysfonction glutamatergique et non uniquement dopaminergique (61). Elle fut alors décrite
comme « anesthésiant dissociatif » c’est-à-dire qu’elle induit une catalepsie, une amnésie et une
analgésie sans perte réelle de conscience (62).
Figure 5 : Structure chimique de la phencyclidine et de la kétamine (63)
Kétamine : C13H16ClNO Phencyclidine
38
2. Mésusage et réglementation
En 1970, la Food and Drug Administration (FDA), organisation américaine de santé
publique, autorisa l’usage de la kétamine pour soigner les soldats blessés lors de la guerre du
Vietnam. En raison de ses effets psychédéliques, la kétamine était détournée de son usage
médical à des fins toxicomaniaques (64). En 1992, les premiers cas d’abus en France lors de
« rave-party » étaient rapportés, engendrant une surveillance accrue suite à des hospitalisations
et à des décès. Puis en 1997, l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé
(AFSSAPS) inscrivit la kétamine sur la liste des stupéfiants à l’exception des préparations
injectables. Depuis avril 2017, elle suit la réglementation des stupéfiants et est retirée de la liste
I des substances vénéneuses (65).
3. Propriétés anesthésiantes
La kétamine est un anesthésique général, d'action rapide, administrable par voie
intraveineuse ou intramusculaire. Elle entraîne une anesthésie particulière, dite dissociative,
puisqu’elle déconnecte le système nerveux central de tous stimuli extérieurs (66). Elle présente
comme avantage sa rapidité d’action, l’absence de dépression respiratoire et une stimulation
cardiovasculaire stable. Elle est plus souvent utilisée comme adjuvant à l’anesthésie générale
grâce à son action analgésique puissante. Elle est aussi utilisée en péri-opératoire pour
potentialiser l’action des opioïdes et prévenir la chronicisation des douleurs (67). C’est à cause
de ses effets psychodysleptiques que le champ d’action de la kétamine a été limité pendant
plusieurs dizaines d’années. Cependant, un regain d’intérêt pour cette molécule est constaté,
par sa nouvelle indication dans la prise en charge de la dépression. Enfin, des études sont en
cours concernant la kétamine dans la prise en charge de la douleur aigüe et chronique ainsi que
les douleurs cancéreuses (déjà utilisée en pratique hors AMM), mais aussi dans la prise en
charge des addictions à l’alcool et l’héroïne (68).
4. Découverte des propriétés antidépressives
En 2000, Berman et al. ont étudié pour la première fois les propriétés antidépressives de la
kétamine dans une étude randomisée en double-aveugle versus placebo sur 7 patients suivis
pour un EDC. Soixante-douze heures après l’administration de la kétamine par voie
intraveineuse, tous les patients ont connu une diminution significative des symptômes
dépressifs. La dose utilisée de 0,5mg/kg en une prise était plus faible que la dose utilisée en
39
anesthésie (2mg/kg). Les effets indésirables psychomimétiques disparaissent quant à eux en
quelques heures. La rapidité d’action de la kétamine en fit une découverte intéressante.
L’hypothèse d’une action antidépressive médiée par l’utilisation d’antagonistes aux récepteurs
NMDA (N-méthyl-D-aspartate) fut renforcée (69). De même, des études de plus grande
ampleur comparant la kétamine à dose unique versus placebo ont suggéré une réduction
substantielle des idées suicidaires chez les patients souffrant de dépression résistante au
traitement ou bipolaire (70)(71).
B. Propriétés pharmacologiques
1. Généralités
La kétamine racémique est composée des énantiomères eskétamine (S-kétamine) et
arketamine (R-kétamine) (Figure 6). Cette configuration optique opposée leur confère des
propriétés pharmacologiques différentes. C’est une molécule liposoluble dont l’administration
peut se faire par diverses voies (intramusculaire, intraveineuse, nasale, rectale) et qui a une
distribution étendue dans l’organisme (72).
La molécule de kétamine possède différentes affinités pour plusieurs récepteurs. La plus
forte est pour le récepteur N-méthyl-D-aspartate (NMDA) au glutamate : antagonisme non
sélectif et non compétitif (Figure 7, page 40) (74).
Figure 6 : La kétamine est composée d'un mélange racémique de deux énantiomères (73)
40
La constante d’inhibition Ki de l’eskétamine pour le récepteur NMDA est de 0,30µM alors
qu’elle est de 1,40µM pour l’arketamine. L’eskétamine possède donc une affinité quatre fois
supérieure pour ce récepteur que son énantiomère (75)(76). Cela explique une meilleure
analgésie et anesthésie à des doses plus faibles que le mélange racémique (77). L’eskétamine
présente également une meilleure clairance et une durée de récupération plus faible après
anesthésie comparée à la kétamine (13)(78). Elle entraine aussi moins de somnolence, de
troubles cognitifs et d’effets psychotiques (77). C’est pourquoi l’eskétamine a été
commercialisée comme anesthésique sur le marché européen (79) puis par la suite comme AD.
Un essai clinique est en cours pour étudier la non infériorité de l’eskétamine par rapport à la
kétamine dans la dépression résistante (80).
Figure 7 : Représentation de l'affinité de la kétamine pour ses récepteurs. L'affinité décroit de la gauche
vers la droite. La barre verticale représente la cible engagée aux doses efficaces (74)
41
En revanche, des études précliniques sur des modèles animaux de dépression ont
démontré une meilleure efficacité, une plus longue durée d’action et moins d’effets indésirables
chez le groupe traité par arketamine. L’incidence des effets psychomimétiques est aussi plus
faible que dans le groupe eskétamine avec des doses pourtant plus élevées (81)(82).
Vollenweider et al. ont montré qu’aux mêmes doses, l’eskétamine entraine plus de réactions
psychotiques que l’arkétamine (83)(76). Ainsi, de plus amples investigations doivent être
menées pour évaluer l’intérêt de l’arkétamine. Il manque en particulier des études sur la
comparaison entre eskétamine et arkétamine en termes d’efficacité et de tolérance dans la
dépression résistante. Seules l’eskétamine et la kétamine racémique sont actuellement
commercialisées.
2. Pharmacocinétique
i. Absorption
La kétamine administrée par voie veineuse, première forme commercialisée en
anesthésie, n’est pas adaptée à un usage quotidien pour traiter la dépression. En effet, la voie
veineuse a l’inconvénient d’augmenter le risque infectieux et le risque de complications
(thrombose, œdème, etc.). La voie orale est la voie d’administration la plus fréquente mais sa
biodisponibilité est faible (20%) en raison de l’effet de premier passage hépatique. La voie
nasale quant à elle présente une biodisponibilité plus élevée de l’ordre de 45% (75) car elle
shunte l’effet de premier passage hépatique. Son utilisation est indolore et son usage facile.
L’absorption nasale est la deuxième voix la plus rapide après la voie intraveineuse grâce à la
riche vascularisation de la muqueuse des voies respiratoires et sa surface relativement grande.
Cependant, la diffusion est mauvaise en cas d’encombrement par du mucus. Une grande
variabilité interindividuelle est retrouvée tant dans le délai que dans l’intensité des effets. Elle
peut s’expliquer par la technique d’administration : une partie du médicament peut être avalée
ou évacuée par le nez (84)(85)(86)(87). Les données de pharmacocinétique proviennent
principalement d’articles sur l’usage de la kétamine ou de l’eskétamine en anesthésie dans la
population pédiatrique par voie intraveineuse et nasale. Les essais cliniques de phase Ⅰ de
l’eskétamine commercialisée dans la dépression n’ont pas été publiés (88).
La concentration plasmatique maximale (Cmax) est atteinte en 20 à 40 minutes après la
dernière pulvérisation nasale, c’est le Tmax (temps au bout duquel on obtient la concentration
maximale). On peut déjà mesurer l’eskétamine dans le plasma 7 minutes après une dose de
42
28mg. Les doses de 28, 56 et 84mg ont entrainé des augmentations dose-dépendantes de la
Cmax et de l’aire sous la courbe (AUC). La Cmax et l’AUC affichent des variations inter-
individuelles importantes. En effet, d’un individu à l’autre, les valeurs de Cmax et d’AUC
oscillent respectivement de plus ou moins 66% et 45% de la valeur moyenne. Pour un même
individu, la Cmax peut varier de 15% et l’AUC de 10% (variation intra-individuelle) (89). Le
profil pharmacocinétique de l’eskétamine est similaire après administration d’une dose unique
ou de doses répétées, sans accumulation plasmatique lorsque l’eskétamine est administrée deux
fois par semaine (88).
ii. Distribution
Le volume de distribution (Vd) de l’eskétamine est de 709L à l’équilibre grâce à sa lipophilie
(88). Cette molécule diffuse donc largement au niveau tissulaire dans les organes richement
vascularisés, particulièrement au niveau cérébral (84). Son métabolite, la noreskétamine,
diffuse également au niveau cérébral mais en concentration moindre (89). La liaison aux
protéines plasmatiques est faible allant de 43 à 45%. L’eskétamine n’est pas un substrat des
transporteurs P-glycoprotéines (P-gP) ou du transporteur d’anions organiques (OATP) (88).
iii. Métabolisme
Dans les microsomes hépatiques humains, l’eskétamine va majoritairement être
métabolisée en noreskétamine (S-norKET) et minoritairement en hydroxyeskétamine.
L’eskétamine subit une N-déméthylation réalisée en grande partie par le cytochrome P450 2B6
(CYP2B6) et aussi 3A4 (CYP3A4). Par la suite, la noreskétamine est rapidement métabolisée
en hydroxynorkétamine (HNK) ou en déhydronoreskétamine (DHNK) qui sont les métabolites
majeurs actifs (90) (Figure 8, page 43). Le polymorphisme génétique des cytochromes P45O
est une source de variabilité interindividuelle concernant la concentration sanguine de
nombreux médicaments. Cependant, une étude sur le cytochrome CYP2B6 n’a pas montré de
concentrations plasmatiques différentes de kétamine ou de ses métabolites parmi les variants
génétiques du CYP2B6 (91). On peut ajouter qu’il n’y a pas d’interactions avec les inducteurs
et les inhibiteurs enzymatiques des cytochromes P450 selon le laboratoire qui commercialise
l’eskétamine (92). Cependant, dans le « Journal of Clinical Psychiatry », il est rapporté que la
rifampicine, inducteur enzymatique connu, augmente la métabolisation de l’eskétamine et de la
norkétamine. La ticlopidine et les macrolides, inhibiteurs enzymatiques, augmentent la
concentration d’eskétamine tandis que l’itraconazole n’a pas montré d’effet (93). En ce qui
43
concerne l’activité des métabolites de l’eskétamine, une étude effectuée sur des souris a montré
que la norkétamine (mélange racémique de noreskétamine et norarkétamine) était mieux tolérée
et aussi efficace que l’eskétamine, et serait donc potentiellement une alternative à l’eskétamine
(94). Paul et al. ont démontré que la norkétamine et l’hydroxynorkétamine stimulaient au même
titre que la kétamine la protéine kinase mTOR responsable de la plasticité synaptique (95) (96)
(voir la partie sur les propriétés pharmacodynamiques).
iv. Elimination
La clairance (Cl) de l’eskétamine est de 89L/heure. Une baisse rapide de la
concentration plasmatique est observée dans les premières heures puis elle devient plus
progressive. La demi-vie terminale (T1/2) oscille entre 7 et 12h en moyenne. L’excrétion est
majoritairement hépatique et on retrouve un faible pourcentage de métabolites de l’eskétamine
dans les urines (88). L’élimination de la noreskétamine est plus lente que celle de l’eskétamine.
Elle se fait aussi en deux phases, avec une demi-vie de 8 heures (89). On n’observe aucune
accumulation plasmatique d’eskétamine suite à des prises répétées deux fois par semaine.
Cependant, des injections intraveineuses répétées de kétamine prolongent son élimination (90).
On peut se demander dans quelle mesure l’eskétamine peut connaitre le même phénomène.
Figure 8 : Métabolisme de la kétamine et les cytochromes impliqués (91)
44
Les principaux paramètres pharmacocinétique de l’eskétamine sont répertoriés dans le tableau
ci-dessous (Tableau 2)
Paramètres Valeurs
Tmax 20 à 40 min
Biodisponibilité 48%
Cl 89 L/h
T 1/2 7 à 12 h
VD 709 L
Liaison aux protéines plasmatiques 43-45%
3. Propriétés pharmacodynamiques
i. Mécanisme d’action glutamatergique
Le glutamate est le neuromédiateur majeur responsable de l’excitation neuronale dans le
système nerveux central. Les récepteurs NMDA (N-méthyl-D-aspartate) et AMPA (acide α-
amino-3-hydroxy-5-methyl-4-isoxazolepropionique) sont des récepteurs à canaux calciques
ligand-dépendants au glutamate. Ils sont situés préférentiellement sur les neurones post-
synaptiques et fonctionnent ensemble pour moduler la neurotransmission glutamatergique. Une
densité importante de neurones pyramidaux glutamatergiques a été retrouvée dans le cortex,
ainsi qu’au niveau sous-cortical dans l’hypothalamus, le noyau caudé, le nucléus thalamus et le
cervelet.
Les récepteurs NMDA sont des hétérotétramères formés de 7 sous-unités (NR1, NR2A,
NR2B, NR2C, NR2D, NR3A et NR3B). A l’état de repos, ils sont normalement bloqués par le
magnésium, modulateur allostérique négatif qui obstrue le canal calcique. Pour que le canal
laisse passer le calcium, il faut que le glutamate et la glycine, co-transmetteur, se fixent sur les
sous-unités NR2 et NR1 respectivement et que la dépolarisation se produise en même temps
délogeant ainsi le magnésium du récepteur (Figure 9, page 45) (74)(97).
Tableau 2 : Paramètres pharmacocinétiques de l'eskétamine
45
Une partie de ces récepteurs NMDA est située sur des interneurones GABAergiques qui,
lorsqu’ils sont activés, vont réguler négativement les neurones pyramidaux glutamatergiques
notamment.
La kétamine agit au niveau du cortex préfrontal, siège de la régulation des émotions et des
fonctions cognitives. Une réduction d’activité de cette zone est observée chez les patients
victimes EDC (99). Elle possède une haute affinité pour les récepteurs NMDA. Elle se fixe
alors à l’intérieur du canal calcique du récepteur sur le site PCP en configuration ouverte lorsque
la dépolarisation déloge la molécule de Mg2+(Figure 10, page 46).
Figure 9 : Récepteur NMDA en configuration fermée. (98)
46
• Inhibition de l’interneurone
En bloquant le récepteur NMDA situé sur l’interneurone GABAergique, la kétamine
inhibe la libération de GABA. Le neurotransmetteur inhibiteur ne peut plus inactiver le neurone
pyramidal pré-synaptique glutamatergique. Par conséquent, l’absence de GABA augmente la
libération de glutamate du neurone pyramidal par absence d’inhibition (Figure 11, page 47).
Figure 10 : Site de fixation de la kétamine sur le site PCP (74)
47
• Modulation post synaptique
En outre, le blocage du récepteur NMDA par la kétamine empêche la liaison du glutamate
sur les neurones post-synaptiques pyramidaux. Cela augmente donc la concentration en
glutamate dans la fente synaptique. Au niveau du cortex préfrontal, le glutamate en excès va
stimuler les récepteurs AMPA post-synaptiques des neurones pyramidaux. Cela aboutit à une
cascade d’activation impliquant les protéines ERK, TrkB, Akt, voie de signalisation mTOR et
conduit à l’augmentation de la densité d’épines dendritiques. Cette réaction est responsable en
partie de l’effet AD de la kétamine (Figure 12, page 48) (98).
Les deux mécanismes d’action, que ce soit le blocage des récepteurs NMDA ou
l’amélioration de la signalisation neurotrophique médiée par le récepteur AMPA, sont à
l’origine de la rapidité d’action de la kétamine.
Figure 11 : Inhibition de l'interneurone inhibiteur GABAergique par la kétamine. (100)
48
ii. Action sur les récepteurs opioïdes
La kétamine possède des propriétés analgésiques et est utilisée en association avec la
morphine en anesthésie (67). Son intérêt réside dans la potentialisation de l’effet antalgique et
la réduction de la tolérance aux opioïdes. Les opioïdes exercent leurs mécanismes d’action par
le biais des récepteurs opioïdes µ (mu), δ (delta) et Κ (kappa). La kétamine a également une
Figure 12 : Mécanisme d'action de la kétamine dans la dépression : 1) Inhibition de l'interneurone GABA
menant à la désinhibition du neurone glutamatergique 2) Augmentation de la libération de glutamate 3)
Activation des récepteurs AMPA 4) Libération du BDNF 5) Activation en cascade de la voie de
signalisation mTOR qui va stimuler la neurogénèse (101)
NMDA : N-méthyl-D-aspartate au
glutamate
GABA : acide γ-aminobutyrique
AMPA : acide α-amino-3-
hydroxy-5-methyl-4-
isoxazolepropionique
BDNF : facteur neurotrophique
issu du cerveau
ERK : extracellular signal-
regulated kinase
TrkB : récepteur à la tyrosine
kinase
Akt : protéines kinases
mTOR : cible mammalienne de la
rapamycine
49
affinité pour ces récepteurs mais moindre que pour les récepteurs NMDA. L’eskétamine en
particulier a une affinité 2 à 3 fois supérieure que l’arkétamine pour ces récepteurs (90)(84).
L’action analgésique de la kétamine est supposée liée à son affinité pour les récepteurs opioïdes
mais cette hypothèse est controversée. Bien que l’administration intracérébrale des antagonistes
des récepteurs µ et δ bloque l’action analgésique de la kétamine, lorsque que l’on administre
un médicament antagoniste (la naloxone) par voie systémique, l’analgésie de la kétamine
perdure chez l’homme (102).
Le système opioïde joue un rôle dans les troubles dépressifs, sa dérégulation a été
associée à des troubles dépressifs (103). Il est connu que la buprénorphine est un agoniste partiel
des récepteurs opioïdes mu et un antagoniste des récepteurs kappa. Des études ont montré que
la buprénorphine produit des effets AD chez des patients victimes de dépression résistante et
réduit les idées suicidaires (104)(105). L’étude de Williams et al. (103) suggère que la rapidité
de l’effet AD de la kétamine nécessite l’activation du système opioïde. Selon cette étude
réalisée sur 30 patients, la naloxone inhibe l’effets AD de la kétamine. Ce serait donc
l’association du blocage des récepteurs NMDA et de la liaison aux récepteurs opioïdes qui serait
responsable de l’effet thérapeutique. Cependant, la réponse de Zhang et al. (106) nuance cette
hypothèse en soulignant que l’étude incluait trop peu de patients. En étudiant les modèles de
souris dépressives, contrairement aux études chez l’homme, Zhang et al. n’ont pas réussi à
montrer le rôle du système opioïde dans l’action antidépressive de la kétamine.
Des éclaircissements sont nécessaires quant à l’effet antagoniste ou agoniste de la
kétamine sur les récepteurs opioïdes. De plus amples études devront être menées pour évaluer
le potentiel de ces récepteurs dans le traitement de la dépression.
iii. Transmission monoaminergique (noradrénaline et sérotonine)
La sérotonine (5-HT) est un neurotransmetteur impliqué dans la dépression. Le transporteur
de la sérotonine (SERT) recapture la sérotonine libérée dans la fente synaptique pour la stocker
dans le neurone pré-synaptique. C’est la cible d’action des médicaments inhibiteurs de la
recapture de la sérotonine (ISRS). La molécule de kétamine a une affinité pour les transporteurs
de la sérotonine (SERT) (74). L’étude réalisée par Yamamoto et al. montre qu’à des doses sub-
anesthésiques (utilisées dans la dépression), la kétamine améliore la transmission
sérotoninergique par inhibition de l’activité des SERT. L’administration de kétamine augmente
aussi la concentration extracellulaire de sérotonine dans le cortex pré-frontal des rats.
50
La noradrénaline est un autre neurotransmetteur cible des traitements de la dépression. Sa
recapture se fait par le biais du transporteur NET. La kétamine inhibe ces transporteurs et
augmente la concentration de noradrénaline au niveau neuronal. Cependant, son affinité pour
ces transporteurs est faible, et aux doses cliniquement pertinentes elle n’aurait pas d’effet
suffisant pour expliquer une action antidépressive. Il en va de même pour les métabolites (107).
En raison de sa faible affinité pour les transporteurs monoaminergiques (74), le mécanisme
AD de la kétamine n’est pas médié par ces neurotransmetteurs. Il existe peu de littérature à ce
sujet.
iv. Autres
D’autres voies seraient impliquées dans l’action antidépressive de l’eskétamine :
- Inhibition de la phosphorylation de la kinase du facteur d’élongation eucaryote 2 (eEF2)
- L’activation de la voie de signalisation mTOR (75).
C. Informations cliniques
L’eskétamine est commercialisée en France par un seul laboratoire sous le nom de spécialité
Spravato®.
1. Modalités d’administration
L’usage d’eskétamine est réservé au milieu hospitalier. Son administration doit être réalisée
dans un environnement calme, en chambre seule, en évitant au maximum les stimulations
extérieures (sonores et visuelles notamment). Le personnel soignant doit être formé à
l’administration et aux gestes de réanimation avec du matériel d’urgence à disposition. Une
présence médicale doit être assurée dans l’unité au moment de l’administration.
Avant chaque administration, un contrôle de la pression artérielle doit être effectué et toutes
mesures en dehors des valeurs recommandées (PAS ≥ 140 ou PAD ≥ 90 mmHg) doit être
explorées et corrigées. En effet, l’eskétamine est contre indiquée chez tout patient pour qui une
hypertension artérielle ou une hyperpression intracrânienne est susceptible d’être délétère.
Le malade inhale lui-même le traitement par voie nasale, sous surveillance d’un
professionnel de santé, pendant et après administration. Le dispositif est à usage unique et
délivre un total de 28mg d’eskétamine en deux pulvérisations (une dans chaque narine). Les
51
indicateurs verts virent au blanc pour indiquer que les pulvérisations sont bien délivrées. Si
plusieurs dispositifs sont utilisés, il est préférable d’attendre 5 minutes entre chaque. En raison
des nausées et vomissements induits, il est déconseillé aux patients de manger pendant au moins
2 heures ou de boire au moins 30 minutes avant l’administration. De même, il est recommandé
chez les personnes traitées par corticoïde nasal ou un décongestionnant nasal de ne pas les
prendre dans l’heure précédant l’administration de l’eskétamine.
Le patient doit se moucher avant l’inhalation du traitement et pas ensuite. A 40 minutes
de la prise, un contrôle de la tension artérielle doit être réalisé. Celui-ci sera répété selon les
résultats jusqu’à ce que les valeurs se normalisent. De manière concomitante, le surveillant
dépiste tout symptôme évocateur de sédation ou de dissociation. A noter que la prise
d’eskétamine conjuguée à d’autres dépresseurs du système nerveux central (benzodiazépines,
opioïdes …) peut augmenter la sédation et diminuer la vigilance. Si aucun effet secondaire n’est
décelé, le patient peut quitter le cadre hospitalier et rentrer à domicile. Il ne doit cependant pas
conduire de véhicule ou entreprendre des activités nécessitant une totale vigilance avant le
lendemain (88).
2. Posologie
La posologie varie selon l’âge et l’ethnie. Elle s’articule en deux étapes : une première phase
d’induction (un mois) puis une phase d’entretien. A la fin de la première phase, il est décidé de
maintenir ou cesser la thérapie selon le bénéfice obtenu. Des adaptations de doses sont possibles
suivant l’efficacité du traitement et la tolérance de la dernière quantité administrée. Le but est
de trouver la posologie optimale pour chaque patient, à savoir la fréquence la plus basse
permettant de garantir une rémission.
Chez le patient de moins de 65 ans, la dose initiale à J1 est de 56mg. Elle est ensuite de 56
ou 84mg à raison de deux fois par semaine pendant 4 semaines. Entre la 5ème et la 8ème semaine,
la même dose est conservée, mais son administration devient hebdomadaire. A partir de la 9ème
semaine, la fréquence d’administration peut être diminuée à un rythme bi-mensuel si l’état
clinique le permet.
Chez le patient de plus de 65 ans ou d’origine japonaise, la dose initiale est de 28mg.
Ensuite, les posologies sont modifiées par paliers de 28mg : les doses sont donc de 28, 56 ou
84mg en fonction de la tolérance et de l’efficacité. En dehors de la diminution des doses, le
rythme d’administration reste comparable à celui précédemment décrit.
52
La nécessité de l’eskétamine est régulièrement réexaminée tout au long du traitement. Après
amélioration des symptômes dépressifs, la médication est maintenue pour au moins 6 mois.
Il n’y a pas d’adaptation posologique d’eskétamine nécessaire liée au : poids, à
l’insuffisance rénale (légère à sévère), à l’insuffisance hépatique (légère à modérée), en cas de
congestion nasale (administration à éviter, risque d’inefficacité). Plusieurs études n’ont pas mis
en évidence de différences au niveau des paramètres pharmacocinétiques liés au genre (78)
(89). Cependant, une étude comparant des personnes âgées à des patients plus jeunes a montré
une augmentation de la Cmax et de l’AUC en fonction de l’âge. L’augmentation de ces
paramètres pharmacocinétiques était proportionnelle à la dose. C’est pourquoi, chez les adultes
de plus de 65 ans, l’initiation se fait à la posologie la plus faible. Il en va de même pour les
patients d’origine japonaise, métaboliseurs lents, qui nécessitent un ajustement posologique
(88) (Figure 13, page 53).
53
3. Contre-indications
L’eskétamine est contre-indiquée :
- En cas d’hypersensibilité à la substance active, la kétamine, ou à l’un des excipients.
- Chez les patients pour qui une augmentation de la tension artérielle ou de la pression
intracrânienne constitue un risque grave (maladie anévrismale, antécédents d’hémorragie
intracérébrale, événement cardiovasculaire datant de moins de 6 semaines).
Même s’il n’existe pas d’étude sur son effet chez les femmes enceintes, elle n’est pas
recommandée pendant la grossesse et chez les femmes en âge de procréer n’ayant pas de
Figure 13 : Effets des populations spécifiques sur la pharmacocinétique de l'eskétamine (89)
54
contraception. De même, il n’existe pas de données sur le passage d’eskétamine dans le
lait maternel et donc de son utilisation pendant l’allaitement.
4. Surdosage
Le risque de surdosage est limité du fait de l’administration sous surveillance dans un
environnement hospitalier. Le taux d’effets indésirables augmente avec la quantité absorbée.
On peut citer parmi les effets les plus fréquents : vertige, hyperhidrose, somnolence, sensation
d’état anormal, nausées et vomissements.
Il semble peu vraisemblable qu’un patient atteint de dépression soit exposé à un risque vital
comme peut l’être une personne sous kétamine administrée à dose anesthésiante, en raison des
doses bien plus faibles administrées. Le dispositif est par ailleurs borné par une dose fixe de
28mg. Le risque d’erreur lié à un surdosage ne pourrait advenir que par l’inhalation d’une trop
grande quantité de dispositif lié à une erreur de prescription ou d’administration. Mais la
probabilité semble faible en raison de la surveillance exigée.
D. Données d’efficacité
Le laboratoire commercialisant l’eskétamine a réalisé 4 études de phase III, randomisées
en double aveugle, multicentriques versus placebo. Elles évaluent l’efficacité de l’eskétamine
en association à un traitement AD en la comparant à un groupe de patients traité uniquement
par AD. Les patients recrutés sont atteints de dépression résistante modérée à sévère. Le critère
primaire est le changement à 28 jours du score MADRS pour les trois études TRANSFORM 1,
2 et 3 (108)(109)(110). L’étude SUSTAIN-1 a évalué la capacité de l’eskétamine à diminuer le
taux de rechute en traitement d’entretien sur 48 semaines (111). Les études sont présentées dans
les deux tableaux suivants (Tableau 3 et Tableau 4, page 51, 52 ,53 et 54).
Essais cliniques TRANSFORM-1 TRANSFORM-2 TRANSFORM-3
Objectif principal de
l’étude
Evaluer l’efficacité de l’eskétamine intranasale par rapport au
placebo, tous deux en association à un nouvel AD oral chez des
patients atteints de dépression résistante après échec de 2 traitements
AD.
Tableau 3 : Essais cliniques à court terme de l’eskétamine
55
Posologie de
l’eskétamine
Dose fixe (1 groupe à
56mg et 1 groupe à
84 mg)
Dose flexible (les patients initient
l’eskétamine à 56mg, la dose par la suite
peut être augmenter en fonction de la
tolérance et de l’efficacité)
Age De 18 à 64 ans ≥ 65 ans
Nombre d’AD
précédents
Patients non répondeurs à ≥ 2 mais ≤ 5 AD Patients non
répondeurs à ≥ 2
mais ≤ 8 AD
Traitements étudiés Randomisation
(Ratio 1 :1 :1)
- Groupe
eskétamine à
dose fixe 56 mg
- Groupe
eskétamine à
dose fixe 84 mg
- Groupe placebo
+ nouvel AD (ISRS
ou ISRNA)
Randomisation (Ratio 1 :1)
- Groupe eskétamine à dose flexible 56
mg à 84mg
- Groupe placebo
+ nouvel AD (ISRS ou ISRNA)
Critère de jugement
principal
Variation du score
MADRS total à la
phase d’induction de
4 semaines sur le
groupe 84 mg
Variation du score MADRS totale à la fin de
la phase d’induction (J28) en double-aveugle
de 4 semaines
Résultats Pas de différences
significatives
Diminution
significative du
score MADRS de -
3,5 points IC95% = [-
6,7 ; -0,3]
Pas de différences
significatives
56
Critères de jugement
secondaires
Interrompu car
critère de jugement
principal non
significatif
Réponse clinique dès
J2 (24h) maintenue
jusqu’à J28
Interrompu car
critère de jugement
principal non
significatif
Résultats Pas de différences
significatives
Essais cliniques SUSTAIN-1
Objectif principal de
l’étude
Evaluer l'efficacité de l'eskétamine intranasale par rapport à un
placebo intranasal, tous deux en association à un AD oral pour
retarder la rechute des symptômes dépressifs chez les patients
souffrant de dépression résistante au traitement qui sont en rémission
stable après une phase d'induction et d'optimisation de l'eskétamine
intranasale + AD oral
Posologie de
l’eskétamine
Dose flexible (les patients initient l’eskétamine à 54mg, la dose par
la suite peut être augmenter en fonction de la tolérance et de
l’efficacité)
Age De 18 à 64 ans
Nombre d’AD
précédents au cours
de l’EDC
Patients non répondeurs à ≥ 1 mais ≤ 5 AD
Traitements étudiés Randomisation (Ratio 1 :1)
- Groupe eskétamine à dose flexible (56 ou 84 mg), une fois par
semaine ou toutes les deux semaines
- Groupe placebo
+ nouvel AD (Duloxetine 60mg, escitalopram 10mg, sertraline
50mg ou venlafaxine LP 150mg)
Tableau 4 : Essai clinique sur l’eskétamine en traitement d’entretien
57
Critère de jugement
principal
Délai de rechute évalué par un comité de relecture indépendant et
défini comme le délai entre la randomisation et la première rechute
pendant la phase de traitement d’entretien chez les patients traités par
eskétamine intranasal + AD oral qui ont atteint une rémission stable
à la fin de la phase d’optimisation. Pour évaluer le délai de rechute,
le score MADRS total a été utilisé de manière hebdomadaire
Résultats Au cours de la phase de traitement d’entretien, 26,7 % des patients
traités par eskétamine intranasal + AD oral et 45,3 % des patients
traités par placebo intranasal +AD oral ont eu une rechute. La
supériorité du groupe eskétamine par rapport au groupe placebo a été
démontrée en termes de délai jusqu’à la rechute.
Aucune amélioration clinique dans l’essai clinique TRANSFORM-1 sur les groupes
rassemblés de patients à 86mg et 54mg n’a été démontrée. La même conclusion a été retrouvée
dans l’essai TRANFORM-3 concernant les patients âgés de plus de 65 ans ce qui explique que
la prise en charge dans le cadre de l’AMM exclu cette catégorie d’âge. Seul l’essai
TRANFORM-2 a affiché une diminution du score MADRS de 3,5 IC95% [-6,7 ; -0,3] par
rapport au placebo. Or la pertinence clinique de cette différence est discutable. La quantité
d’effets observée est faible dans un contexte où une différence de -6,5 points était prévue au
protocole (109).
L’HAS souligne que ces études ont été réalisées versus placebo au lieu de se confronter à
un comparateur clinique pertinent. En France, il n’existe pas de traitements ayant l’AMM dans
la dépression résistante mais des alternatives étaient disponibles (ECT, potentialisation avec le
lithium, ajout d’un autre AD oral). Le choix du placebo est critiquable dans la mesure où la
majorité des patients ont reçu 2 AD antérieurs (50 à 60 % des patients dans l’étude
TRANSFORM-2 et 62 à 68% dans l’étude SUSTAIN-1) (112). On peut souligner que les
patients des deux groupes avaient toujours un traitement, l’AD initié pour la première fois avait
des chances de fonctionner. L’eskétamine n’est pas prescrite en monothérapie et de ce fait
l’appréciation de son efficacité est difficile. Au cours des essais, on peut constater la diminution
brutale du score MADRS sur quelques jours mais qui évolue plus lentement ensuite (quelques
points). On peut évoquer l’hypothèse d’une action rapide de l’eskétamine qui est ensuite
complétée par l’action de l’AD avec un délai de plusieurs semaines.
58
Les données de tolérance à long terme sont limitées avec un recul jusqu’à douze mois au
maximum dans un contexte de maladie chronique (112). L’absence de hiérarchisation des
critères secondaires des essais cliniques ne permet pas l’exploitation des données. Des
informations manquent concernant la qualité de vie et l’efficacité sur les patients seulement
répondeurs et non en rémission dans l’étude SUSTAIN-1.
En conclusion, seule l’étude TRANSFORM-2 étudiant des doses flexibles de 56 à 84mg chez
des patients de moins de 65ans a montré une amélioration significative du score MADRS à
28jours de -3,5, IC95% = [-6,7 ; -0,3] sur 60. Les patients sous eskétamine 84mg à l’inclusion
(TRANFORM-1) ne présentent pas d’amélioration significative du score MADRS par rapport
au placebo. De même, les patients de plus de 65 ans (TRANSFORM-3) n’ont pas montré
d’amélioration significative. L’étude SUSTAIN-1 a réussi à montrer un délai de rechute plus
long dans le groupe traité par eskétamine.
E. Données de tolérance
La revue systématique de Zheng & al. publiée en 2019 sur 708 patients nous montre que la
prise d’eskétamine est associée à plus d’effets indésirables que dans les groupes placebo. On
peut citer comme effets : les vertiges, la sédation, les nausées, la dissociation, les sensations
d’ébriété et les paresthésies (Tableau 5, page 59). Leurs fréquences est significativement plus
élevées dans le groupe traité (113). Les effets indésirables les plus fréquents décrits dans l’essai
clinique SUSTAIN-2 sur 802 patients sont par ordre décroissant : les étourdissements, la
dissociation, les nausées, les maux de tête, rapportés par plus de 20% des patients (114).
Toutefois, si les maux de tête sont signalés comme effet secondaire dans l’étude SUSTAIN-2,
ils ne le sont pas dans la méta-analyse de Zheng & al (113).
Le Number Needed to Harm (NNH) est de 5 pour 1 concernant la dissociation (effet
redouté) : pour 5 patients traités, 1 patient développera cet effet indésirable. On retrouve le
même NNH pour les étourdissements, celui des vertiges est de 7 pour 1. La dissociation, les
étourdissements et la somnolence apparaissent le jour de l’administration et ne perdurent pas
dans le temps (108). Ils sont directement liés aux propriétés de la molécule, anesthésiante et
dissociative. Généralement, la sédation démarre 15 minutes après l’administration, avec un pic
à 45 minutes, qui se résout au bout d’une heure et demie, sans hypoxémie (109).
59
Effet indésirable
Fréquence (Wajs et
al.)
802 patients
Fréquence (Fedgchin et al.)
231 patients
NNH
(Zheng et al.)
Flou visuel - 7% 13
Vertige 11% 21% 7
Étourdissement 33% 25% 5
Somnolence 17% 20% 14
Sensation d’ébriété - 4% 20
Sédation 0,2% 6% 17
Troubles dissociatifs 28% 27% 9
Hypoesthésie 12% 13% 11
Léthargie 25% 5% 25
Paresthésie - 13% 10
Irritation
oropharynx 10% 6% 33
Vomissement 11% 9% 13
Nausées 25% 29% 6
Aucune overdose, dépendance ou recherche d’augmentation de dose n’ont été signalées
(crainte liée à l’usage détourné de la kétamine). Lors de l’administration, des symptômes
psychotiques post-dose ont été rapportés mais se sont révélés transitoires. Un des effets
indésirables de la kétamine connus est la cystite interstitielle ulcérative : aucun cas n’a été
communiqué avec l’eskétamine. Cependant des cystites, ou des signes fonctionnels urinaires
ont été décrits et ont été spontanément résolutif sans arrêt du traitement (114). L’eskétamine
provoque une augmentation de la pression artérielle 40 minutes après administration. Elle
revient à la normale la plupart du temps au bout d’une heure et demie. L’incidence de
Tableau 5 : Principaux effets secondaires statistiquement significatifs issus de la méta-analyse de Zheng
et al. (113). Les pourcentages sont tirés de deux essais cliniques de phase III (108) (114)
60
l’hypertension est plus forte chez les patients avec des antécédents d’hypertension artérielle et
10% de ces patients ont dû initier un traitement antihypertenseur contre 5% chez les patients
sans antécédents.
La prise d’eskétamine est associée à une plus grande fréquence de sortie d’étude selon la
méta-analyse de Zheng & al. (113). Dans l’étude SUSTAIN-2, 10% des patients ont arrêté leur
traitement en raison d’effets indésirables modérés à graves (114). Dans l’étude de phase 3 de
Popova & al, 7% des patients ont arrêté leurs traitements toujours à cause d’effets indésirables
(dépression, anxiété, intolérance, nausées vertiges) (109). De plus, un des patients a été victime
d’un accident de la voie publique 28 heures après administration d’eskétamine.
Un essai clinique a été réalisé pour évaluer la capacité à prendre la route 8 heures après
administration d’eskétamine à la dose de 84mg. Elle a été comparée à la mirtazapine. Alors que
la mirtazapine a un impact négatif significatif sur la conduite 8 heures après la prise,
l’eskétamine n’a pas montré de différence par rapport au placebo. Cependant, deux études
testant la sécurité de la conduite après administration d’eskétamine n’ont pas été achevées sans
que l’on en connaisse la raison (115).
Parmi les effets indésirables graves ayant nécessité une sortie d’étude liée à la prise
d’eskétamine dans l’étude de Wajs & al., un patient a eu des idées suicidaires et un autre a fait
une tentative de suicide. Deux autres patients sont morts dont un après suicide, sans que l’on
sache si cela est imputable à la prise du traitement (114). Dans d’autres essais de phase 3
(108)(109)(116), les critères d’exclusion englobaient les comportement et idées suicidaires avec
intention de passage à l’acte. Ces patients exclus ont été inclus dans une autre étude de phase
3. Celle-ci a démontré une diminution significative du risque suicidaire à 4 heures qui n’a pas
été retrouvée sur le long terme. Deux patients ont eu des idées suicidaires parmi les effets
indésirables graves mais ont fini l’étude (117). Dans le Résumé des Caractéristiques du Produit
(RCP) de l’eskétamine, une mise en garde sur le risque suicidaire après initiation du traitement
est formulée (88).
Les études cliniques réalisées par le laboratoire (SYNAPSE, TRANFORM-1,
TRANFORM-2, TRANSFORM-3, SUSTAIN-1 et SUSTAIN-2) ont rapporté 4 décès sur 1708
patients dont 2 considérés comme hypothétiquement lié au traitement (une insuffisance
respiratoire aigüe et une insuffisance cardiaque aigüe). Dans l’étude SUSTAIN-3 sur la
tolérance à long terme l’eskétamine est suspecté d’avoir provoqué un infarctus du myocarde.
61
Les performances cognitives ont été évaluées dans l’essai clinique de Morrison & al.
(118) à partir d’un groupe de patients sous eskétamine 84 mg comparé à un groupe placebo.
Les performances déclinaient 40 minutes après inhalation de manière transitoire et revenaient
à la normale 2 heures plus tard. Cet effet était concomitant de la sédation. Certains patients
montraient même une amélioration 10 heures après la prise. En effet, l’eskétamine augmente la
plasticité synaptique. D’autres études sont nécessaires pour évaluer l’impact de doses répétées
sur la cognition.
Concernant l’âge, l’essai clinique TRANSFORM-3 a montré une tolérance similaire chez
les patients de plus de 75 ans et chez les patients plus jeunes. Il n’y pas de nouveaux effets
indésirables déclarés dans cette tranche d’âge malgré les comorbidités incluant les pathologies
cardiaques et thyroïdiennes ainsi que la polymédication observée chez la personne âgée.
L’eskétamine a été initiée à dose plus faible (28mg). Environ deux tiers des patients (64,5%)
ont reçu une dose de 84mg au final (110).
Toutefois, tous ces essais cliniques ont été financés par le laboratoire qui a commercialisé
l’eskétamine. De plus, tous les essais conduits n’ont pas été publiés. Les essais cliniques ont été
réclamés au laboratoire qui n’a pas souhaité nous les transmettre.
En conclusion, l’eskétamine est un traitement qui comporte plusieurs effets indésirables
dose-dépendants, de gravité variable. L’espacement des prises ainsi que la surveillance post-
administration permet de réduire l’impact de ces effets indésirables majoritairement
transitoires.
F. Réglementation
1. Autorisation de Mise sur le Marché français
L’eskétamine a obtenu une Autorisation Temporaire d’Utilisation (ATU) de cohorte
le 2 août 2019, qui a débuté le 23 septembre 2019 en France. A compter de cette date, l’Agence
Nationale de Sécurité du Médicament et des produits de santé (ANSM) a permis l’utilisation
exceptionnelle de cette spécialité ne bénéficiant pas encore de l’AMM en France. Ce
médicament était alors destiné à un groupe de patients traités et surveillés suivant des critères
définis dans le Protocole d’Utilisation Thérapeutique (PUT). Le 18 décembre 2019,
l’eskétamine, solution pour pulvérisation nasale, commercialisé sous le nom de spécialité
SPRAVATO ® a obtenu une AMM pour l’indication suivante : « Spravato, en association à
62
un ISRS ou un IRSN, est indiqué chez les adultes pour le traitement des épisodes dépressifs
caractérisés résistants n'ayant pas répondu à au moins deux AD différents au cours de l'épisode
dépressif actuel modéré à sévère » (112). Le 24 juin 2020 a eu lieu la première évaluation de la
commission de transparence par la Haute Autorité de Santé (HAS) (112).
La prise en charge du coût de l’eskétamine par la sécurité sociale est évaluée après
appréciation du Service Médical Rendu (SMR) par la commission de transparence. La HAS
a conclu à un SMR faible de l’eskétamine uniquement pour une partie de l’indication de
l’AMM à savoir seulement pour les patients âgés de moins de 65 ans, en cas de contre-
indication, de résistance ou pour les patients n’ayant pas accès ou ayant refusé les ECT. En
dehors de cette indication précise, le SMR est insuffisant pour être pris en charge par la
solidarité nationale. En effet, l’eskétamine lors de l’essai TRANFORM-3 chez les personnes
âgées de plus de 65 ans, n’a pas montré d’efficacité versus placebo. Par conséquent, l’utilisation
de l’eskétamine après échec de deux lignes de traitements AD bien conduits est autorisée quel
que soit l’âge mais non pris en charge chez le patient de plus de 65 ans. D’autre part,
l’Amélioration du Service Médical Rendu (ASMR) est inexistante (ASMR V). Compte tenu
de l’absence d’étude comparative versus des comparateurs cliniquement pertinents et bien que
l’efficacité de l’eskétamine soit concluante versus placebo après 4 semaines de traitement, la
diminution du score MADRS est jugée trop faible. En outre, le profil de tolérance est mitigé à
cause des effets indésirables modérés à sévères comme les troubles dissociatifs,
cardiovasculaires et l’augmentation des idées suicidaires. En conclusion, la HAS considère que
l’eskétamine n’apporte aucun progrès dans la stratégie thérapeutique de la prise en charge de la
dépression mais peut constituer une alternative thérapeutique dans la prise en charge des
EDC résistants chez le patient de moins de 65 ans, en cas de résistance/contre-
indication/non accès aux ECT (112).
2. Autorisation de mise sur le marché à l’international
L’eskétamine a obtenu une AMM européenne le 18 décembre 2019 ainsi qu’une AMM
aux Etats-Unis le 3 mai 2019 (112) dans la même indication qu’en France. Cependant aux
Etats-Unis son utilisation est contrainte par un programme appelé « Spravato Risk Evaluation
and Mitigation Strategy (REMS) program » en raison de ses effets indésirables. La Food and
Drug Administration (FDA) a approuvé en aout 2020 l’extension de l’application de
l’eskétamine aux patients atteints de dépression caractérisée avec idées ou comportements
suicidaires (119). En Angleterre, la « National Institute for Health and Care Excellence » a
63
publié le 28 janvier 2020 une première recommandation non définitive et négative concernant
l’usage de l’eskétamine dans l’indication de l’AMM (120).
3. Agrément aux collectivités
Les médicaments doivent être inscrits sur la liste des spécialités pharmaceutiques
agréées à l’usage des collectivités pour être achetés et utilisés à l’hôpital, cette liste est établie
par le ministère des solidarités et de la santé après avis de la HAS (121). Cet agrément a été
octroyé à l’eskétamine le 1er octobre 2020. Le prix d’un dispositif d’eskétamine, solution pour
pulvérisation nasale de 28 mg a été fixé à 257 euros. Le médicament est inscrit sur la liste des
stupéfiants, sa prescription est réservée aux psychiatres et son usage est strictement hospitalier
(122).
64
III. ETUDE DE CAS AU CENTRE HOSPITALIER
GUILLAUME REGNIER
A. Introduction
Un tiers des patients atteints de dépression résistent aux traitements standards. Les
propositions thérapeutiques s’appuient alors sur des stratégies pharmacologiques (associations
médicamenteuses, augmentation des doses) ou non pharmacologiques (ECT). Cependant, leurs
efficacités ou disponibilités (ECT) sont parfois limitées. C’est pourquoi l’arrivée d’un nouveau
traitement est une option bienvenue pour les psychiatres.
Le Centre Hospitalier Guillaume Régnier (CHGR) de Rennes est un établissement public
de santé mentale composé de 785 lits d’hospitalisation complète ainsi que 787 places sanitaires
et sociales. Cette structure couvre une population d’environ 800 000 habitants pour une file
active de plus de 26 786 patients représentant environ 239 030 journées d’hospitalisation par
an (123).
Selon les données de littérature exposées précédemment, l’intérêt de l’eskétamine reste
discuté. Une étude observationnelle a été réalisée dans notre établissement sur les patients ayant
bénéficié d’un traitement par eskétamine.
B. Objectifs
L’objectif principal de cette étude est de suivre l’évolution en termes d’efficacité et de
tolérance des patients traités par eskétamine dans notre établissement. L’objectif secondaire
était de mettre en évidence les contraintes administratives et/ou organisationnelles liées à
ce traitement afin de proposer dans le futur un circuit type au sein de notre établissement.
65
C. Matériel et méthodes
Tous les patients ayant initié un traitement par eskétamine au sein de notre établissement
entre novembre 2019 et septembre 2020 ont été inclus dans l’étude. Il s’agit d’une étude de cas
rétrospective.
Une partie des données a été recueillie grâce aux outils informatiques :
- Le dossier patient informatisé permettait de récupérer les informations sur l’histoire de la
maladie, le diagnostic selon la classification CIM-10, les antécédents, l’âge au début du
traitement, l’historique des traitements, les commentaires réalisés par le personnel soignant
et les médecins.
- Le logiciel d’aide à la prescription permettait l’analyse pharmaceutique des prescriptions
d’eskétamine et l’accès à l’historique médicamenteux des patients.
D’autres informations ont été recueillies directement au contact du personnel affecté à
l’unité spécialisée dans la dépression résistante (IDE, psychiatre, interne en psychiatrie). Les
dossiers sous format papier ont également été consultés après accord du psychiatre référent.
Les patients ont été informés et ne se sont pas opposés à l’utilisation de leurs données
médicales (envoi d’une lettre d’information et de non opposition aux patients) conformément
au code de la santé publique pour les recherches rétrospectives n’étant pas dans le cadre de la
loi Jardé.
66
D. Résultats
1. Données cliniques recueillies
Patient n°1 Patient n°2 Patient n°3 Patient n°4
Age Entre 18 et 65 ans Entre 18 et 65 ans Entre 18 et 65 ans Entre 18 et 65 ans
Sexe Masculin Féminin Masculin Masculin
Diagnostic
(CIM-10)
EDC sévère pharmaco-
résistant sans symptômes
psychotiques.
Trouble dépressif récurrent
EDC sévère pharmaco-
résistant sans symptômes
psychotiques.
EDC sévère pharmaco-
résistant sans symptômes
psychotiques.
Trouble dépressif récurrent
EDC sévère pharmaco-
résistant sans symptômes
psychotiques.
Trouble dépressif récurrent
Histoire de la
maladie
- Début des troubles à
l’âge de 19 ans avec
attaque de panique.
- Depuis 5 ans : phase
dépressive caractérisée
sans récupération.
- Etiologie organique
éliminée.
- EDC en 2016 persistant
et résistant.
- Etiologie organique
éliminée.
- Premier épisode en 2006
- Récidive d’un EDC
résistant.
- Etiologie organique
éliminée.
- Récidive d’un EDC
résistant.
- Troubles anxieux
- Etiologie organique
éliminée.
67
Risque
suicidaire
- Pas d’antécédents de
tentative de suicide.
- Pas de risque suicidaire à
l’admission.
- Absence d’idées
suicidaires
- Plusieurs tentatives de
suicide, la dernière
remontait à une semaine
avant l’initiation de
l’eskétamine.
- Risque suicidaire moyen
Risque suicidaire faible
Antécédents
médicaux
Diabète non insulino-
dépendant
Aucun Aucun Aucun
Echecs
traitements
médicamenteux
antérieurs
Monothérapies :
- ISRS (molécule non
retrouvée)
- IRSNA (molécule non
retrouvée)
- TC : imipramine
- IMAO : moclobémide
- AA : agomélatonine
- AE : lamotrigine
- AP : quétiapine
- TR : lithium
Association :
Monothérapies :
- ISRS : paroxétine,
fluoxétine
- IRSNA : venlafaxine
- TC : imipraminique,
clomipramine
- IMAO : phénelzine
Associations :
- TC + AP :
clomipramine +
aripiprazole
Monothérapie :
- ISRS : paroxétine
fluoxétine, paroxétine
- TC : imipraminique
clomipramine
- Aα : miansérine
Associations :
- Aα + AP : miansérine +
quétiapine
- Aα + ISRS : miansérine
+ fluoxétine
Monothérapie :
- ISRS : escitalopram,
paroxétine
- TC : clomipramine
Associations :
- ISRS + AE :
citalopram + valpromide
- ISRS + AP
citalopram + rispéridone
- ISRS + AP
fluoxetine + quetiapine
- TC + TR + AP
68
- AE + IMAO + APK :
lamotrigine + phénelzine
+ pramipexole
- TC + TR + APK :
clomipramine + lithium
+ pramipexole
clomipramine + lithium
+ aripiprazole
Echecs
traitements
non
médicamenteux
antérieurs
- SMTr : inefficacité
- ECT : inefficacité
- STMr : inefficacité
- ECT : mauvaise
tolérance
- ECT : inefficacité - STMr : inefficacité
- ECT : mauvaise
tolérance
Traitements
psychotropes à
l’initiation de
l’eskétamine
(en gras les
traitements de
l’EDC)
- IMAO : phénelzine
15mg x6/j
- AA : agomélatine
25mg x1/j
- AE : lamotrigine
200mg x2/j
- H : lormétazépam 2mg,
x2/j
- H : zopiclone 7,5mg
x2/j
- H : mélatonine LP 2mg
x1/j
- TC : clomipramine
75mg x1/j
- H : zolpidem 10mg x2/j
- Anx : alprazolam 2mg
x2/j
- Aα : mirtazapine
15mgx3/j
- ISRS : fluoxétine 20mg
x1.5/j
- APC : cyamémazine
25mg *1/j
- Anx : vlorazépate
10mg*1/j
- Anx : alprazolam 2mg
x2/j
- ISRS : Paroxétine
69
MADRS à
l’inclusion
30/60 35/60 27/60 35/60
MADRS
évolution
Diminution du score
MADRS dès la 3ème séance
avec MADRS chiffré à 5 à la
4ème inhalation. Rémission
jusqu’à la semaine 15 (retour
au score initial)
Diminution du score
MADRS à 6 après l’unique
administration.
Diminution du score
MADRS à 15 deux semaines
après initiation du traitement.
Puis retour à 35 à la 4ème
semaine motivant un
renforcement thérapeutique
par clomipramine puis
olanzapine.
Pas d’évolution
Effets
indésirables
- Vertiges
- Dissociation
- Xérostomie
Les effets indésirables ont
cessé quelques heures après
l’administration du
traitement. Ils ont été
retrouvés lors des deux
premières séances mais ont
cessé par la suite. Bonne
- Coma (Non réponse aux
stimulations verbale et
douloureuses) sans
défaillance respiratoire
ou cardiovasculaire
associée. Etat résolutif à
H+1 (réponse aux
ordres simples).
- Rétention aigüe
urinaire et céphalées
au décours. Retour à
- Céphalées
- Vision floue
- Xérostomie
- Dissociation
- Asthénie
- Tremblements
Les effets indésirables
(céphalées, vision floue,
sensation de shoot et
asthénie) ont cessé quelques
- Vertiges
- Dissociation
- Recrudescence
anxieuse
Les vertiges ont été
retrouvés à chaque séances.
Une recrudescence anxieuse
avec idées suicidaires a été
notée le week-end suivant la
70
tolérance cardio-vasculaire et
psychique.
l’état antérieur 24
heures après.
Déclaration au centre
régional de
pharmacovigilance de
Rennes
heures après l’administration
du traitement. Ils ont
fréquemment été retrouvés et
ont décru au fur et à mesure
des séances. Les
tremblements et la
xérostomie sont
concomitants de
l’instauration de la
clomipramine au cours du
traitement par eskétamine.
première semaine
d’initiation de l’eskétamine.
La dissociation est survenue
au cours de la dernière
administration
d’eskétamine. Cette
sensation n’était jamais
arrivée auparavant lors des
séances
Durée du
traitement par
eskétamine
19 semaines Administration unique 12 semaines 4 semaines
Causes de
l’arrêt du
traitement
Rechute à partir de la 15ème
semaine de traitement.
Effets indésirables Rechute dépressive précoce Echec thérapeutique
Aα : Agoniste des récepteurs α2, AA : Autre antidépresseur, AE : Antiépileptique, Anx : Anxiolytique, AP : Antipsychotique, APK :
Antiparkinsonien, H : Hypnotique, IMAO : Inhibiteur de la monoamine oxydase, ISRS : Inhibiteur sélectif de la recapture de sérotonine, IRSNA :
Inhibiteur de la recapture de la sérotonine et de la noradrénaline, TC : Imipraminique, TR : Thymorégulateur.
71
2. Synthèse
Quatre patients atteints de dépression résistante ont donc bénéficié d’une prise en charge
par eskétamine dans notre établissement de novembre 2019 à septembre 2020. Ces patients
respectaient les critères d’inclusion de l’ATU ou de l’AMM selon la date d’instauration du
médicament. En ce qui concerne l’historique médicamenteux, entre 3 et 8 classes
pharmacologiques différentes (classes d’AD ou non) avaient été essayées en monothérapie dont
systématiquement un imipraminique et un ISRS. Ces tentatives se soldèrent par une réponse
insuffisante ou une rechute. Par la suite, plusieurs associations de différents traitements de la
dépression ont été essayées, allant de deux à trois molécules. Les réponses étaient toujours
incomplètes. Les patients ont tous été traités par ECT et/ou SMTr mais aucune efficacité n’a pu
être mise en évidence (deux patients ont arrêté les ECT pour cause d’effets indésirables).
Au total, une patiente (n°2) a dû arrêter le traitement pour cause d’effets indésirables graves
(perte de conscience et rétention aigüe urinaire). Cependant même après une seule
administration, nous avons constaté une chute du score MADRS à 6 pendant plusieurs jours
chez cette patiente. Un autre (patient n°4) n’a jamais connu d’amélioration clinique pendant le
mois entier de traitement ce qui a justifié son arrêt. Enfin, les deux derniers patients ont rechuté,
0
5
10
15
20
25
30
35
40
45
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19
MA
DR
S
Administations
Patient 1 Patient 2 Patient 3 Patient 4
Arrêt car inefficacité
Coma
Rechute
Rechute
Figure 14 : Evaluation du score MADRS au cours des administrations d'eskétamine : Score allant de
0 (asymptomatique) à 60 (score maximum de l'EDC).
72
l’un précocement au bout d’un mois et l’autre à 3 mois. Néanmoins, on peut souligner que pour
le patient n°1 ayant été traité par eskétamine pendant 5 mois, une rémission complète a été
obtenue pendant deux mois. Le patient n°3 pour lequel l’eskétamine a été arrêtée après 3 mois
de traitement, a connu une amélioration de l’humeur les premières semaines avec un MADRS
au plus bas à 15 mais qui est remonté rapidement à 35 à la quatrième semaine de traitement.
L’instauration de clomipramine après la remontée du score MADRS à 35 a probablement
influencé les mesures du score suivantes. En conclusion, malgré ces tentatives infructueuses
une évolution positive des scores MADRS a été constatée notamment en début de traitement.
En termes de tolérance, les effets indésirables sont apparus rapidement après l’administration
(vertiges, dissociation, …) et ont disparu spontanément. L’exception est la « recrudescence
anxieuse » qui est arrivée à distance des prises chez un patient. Enfin, le traitement a été
globalement bien supporté chez trois patients sur quatre.
3. Organisation
L’unité Kraepelin est une unité d’hospitalisation de jour (HDJ) du CHGR spécialisée
dans la dépression résistante. Elle accueille les patients traités par eskétamine dans un cadre
adapté. Pour veiller au bon déroulement de la séance, les patients sont admis en effectif réduit
dans un environnement calme.
Lors de la première administration, le psychiatre référent était présent pour rappeler aux
patients le déroulement de la séance, les potentiels effets indésirables et revérifier l’absence de
contre-indication. Un pharmacien ou interne en pharmacie était également sur place pour
dispenser le médicament et apporter des conseils de bon usage. Lors des séances suivantes, le
psychiatre ou les internes en psychiatrie accompagnaient le patient pour veiller à l’auto-
administration et l’interroger sur l’efficacité et la tolérance du traitement ainsi que pour réaliser
une visite de suivi. Une infirmière était affectée à la surveillance du patient pendant 2 heures.
Elle vérifiait alors la tension artérielle avant initiation du traitement et effectuait une observation
post-administration dépistant l’apparition d’effets indésirables (sédation, dissociation,
vérification de la tension artérielle 40 minutes après l’administration comme stipulé dans le
RCP (112) ). Le psychiatre, les infirmières ainsi que le pharmacien avaient auparavant été
formés à l’administration par le biais du module de formation du laboratoire commercialisant
le produit. Un chariot d’urgence avec du matériel de réanimation était présent dans l’unité.
Chaque séance se déroulait en général sur une journée, le patient pouvait cependant rester
plusieurs jours dans l’unité en fonction de la gravité des symptômes dépressifs.
73
Chaque dispositif était dispensé le jour même par un pharmacien ou un interne en
pharmacie avec respect des conditions particulières de délivrance liées au statut de stupéfiant.
D’un point de vue administratif, pour chaque initiation de traitement dans le cadre de
l’ATU de cohorte, le psychiatre complétait une fiche de demande d’accès au traitement et la
transmettait à la pharmacie à usage intérieur (PUI). Le pharmacien était en charge de la
validation de la demande (analyse pharmaceutique, respect des critères d’accès et non accès à
l’ATU de cohorte). Le pharmacien était également responsable des commandes d’eskétamine
et de la gestion des stocks.
E. Discussion
1. Données d’efficacité
La dépression est la première cause de handicap au monde et est responsable de 30 % des
suicides (38)(16). C’est une maladie à haut potentiel de rechute. A partir de trois rechutes, il
existe une forte probabilité de passage à la chronicité. Depuis la découverte des IMAO et des
tricycliques, peu de progrès en termes d’efficacité ont été fait au niveau pharmacologique. La
classe des ISRS découverte plus récemment est mieux tolérée mais n’a pas montré d’efficacité
supérieure (56). Comme vu précédemment, il existe entre 15% et 30% de patients atteints de
dépression résistante. Après échec des médicaments, l’ECT est proposée et a montré une
véritable amélioration avec un taux de 50% de rémission en moyenne (48). Cependant, elle
n’est pas disponible dans tous les centres hospitaliers ou cliniques et sa répartition au sein du
territoire français est inégale. En outre, c’est une intervention effectuée sous anesthésie
générale, or il est parfois difficile d’obtenir du « temps anesthésiste ». La liste d’attente peut
s’étendre à plusieurs mois pour démarrer une cure d’ECT. Aussi, la sismothérapie présente
plusieurs effets indésirables : un syndrome confusionnel post-administration et des amnésies
rétrogrades et antérogrades. Elle n’est donc pas toujours bien tolérée et peut être refusée par le
patient. Dans ce contexte de difficulté d’accès ou de refus de l’ECT, l’eskétamine montre son
intérêt. Dans le cas des patients traités dans notre établissement, l’eskétamine a été instauré
après échec de nombreuses lignes de traitements pharmacologiques ou non et représentait donc
un espoir pour ces patients en tant que « nouvel antidépresseur ». L’eskétamine est actuellement
le seul AD ayant l’AMM dans la dépression résistante.
74
L’avantage de l’eskétamine est aussi sa rapidité d’action. Les AD ont un délai d’action de
2 à 4 semaines or la kétamine administrée par voie intraveineuse a montré une diminution du
score MADRS dès les premières injections (124). Au CHGR, nous avons constaté une
diminution rapide et importante du score MADRS dès les premières administrations
d’eskétamine pour certains patients. Cependant, l’étude TRANSFORM-2 (109) (qui compare
l’eskétamine par voie nasale à un placebo tous les deux associés à un AD) n’a pas montré de
différence significative 24 heures après administration.
Au CHGR, aucun des quatre patients n’a eu de rémission prolongée. Le seul patient pour
lequel une rémission a été obtenue a eu une rechute 4 mois après avoir démarré le traitement.
Dans l’étude TRANFORM-1 comparant l’eskétamine par voie nasale à dose fixe versus
placebo (également par voie nasale), une diminution du score MADRS a été observée dans les
deux bras mais aucune différence significative avec le placebo n’a pu être observée au bout de
28 jours. Une des explications est possiblement le fort impact de l’effet placebo. Les
suppositions expliquant ce fort effet placebo sont : la voie d’administration (seule spécialité à
utiliser cette voie dans cette indication) et le suivi très important du patient dû à la surveillance
post administration de 2 heures (108). De plus, les patients avaient une forte attente vis-à-vis
de ce traitement qui était pour eux le traitement de la « dernière chance ». Or ils ont pu être
encore plus affectés si le résultat n’était pas celui escompté (125). Nos patients ont connu de
multiples échecs après avoir essayé plusieurs classes thérapeutiques en monothérapie et en
associations. On peut également raisonnablement penser que plus la durée de la maladie
symptomatique est longue plus il est difficile d’obtenir une rémission.
L’efficacité de l’eskétamine ne semble pas durer dans le temps. Les données sur l’usage
détourné de la kétamine nous indiquent qu’il existe vraisemblablement une tolérance rapide au
produit. On peut donc supposer que pour continuer à produire le même effet, il soit nécessaire
d’augmenter les doses jusqu’à un seuil au-delà de posologies acceptables en clinique (125).
Le score MADRS n’est pas aussi précis que peut l’être une valeur biologique, le recueil des
réponses peut être influencé par le ressenti du patient ou celui de l’examinateur.
Nous avons contacté d’autres établissements français ayant utilisé l’eskétamine pendant
la phase d’ATU. Les contacts ont été récupérés par l’intermédiaire du réseau Psychiatrie-
Information-Communication (Réseau PIC), réseau national de professionnels hospitaliers au
service du soin médicamenteux en psychiatrie et santé mentale. Neufs établissements ont
répondu à nos demandes d’informations sur 25 qui ont participé au traitement. Au total, sur ces
75
établissements 33 patients ont été traités par eskétamine. Des résultats positifs ont été observés
pour 16 patients soit la moitié d’entre eux.
Plusieurs établissements de santé ont utilisé la kétamine par voie intraveineuse dans le
traitement de dépression résistante ou mélancolique. Nous avons eu précédemment deux
patients au CHGR pour qui cette alternative avait été proposée sans succès. L’eskétamine
administrée par voie nasale présente plusieurs avantages dont la sécurité d’utilisation, les
moindres contraintes organisationnelles et l’usage d’une voie d’abord moins risquée. En effet,
la voie intraveineuse est susceptible d’entrainer des complications mécaniques (embolie
gazeuse), infectieuses et thrombotiques.
La voie nasale présente un autre intérêt. En effet, une patiente a bénéficié de l’eskétamine
après avoir perdu une partie de son système digestif. Cette patiente était sous citalopram per os
or la qualité de l’absorption n’était plus garantie. L’inhalation par voie nasale offre une
alternative intéressante dans ce cas de figure.
L’eskétamine semble donc avoir un intérêt mais l’amélioration clinique parait brève, cela
serait à confirmer avec des études de plus grande ampleur. L’association à un AD est donc
primordiale pour une action sur le plus long terme comme précisé dans l’indication de l’AMM.
Se pose alors la question de l’indication limitée en France car aux Etats-Unis elle est élargie à
la crise suicidaire ce qui correspondrait peut-être mieux au profil et la cinétique d’action. La
rapidité de la prise en charge de l’EDC améliore le pronostic or l’eskétamine augmente la
vitesse de réponse au traitement des patients (125). Réserver le traitement aux dépressions
résistantes après échec de n lignes de traitement rend la démonstration de son efficacité plus
difficile. En effet, plus une dépression est ancrée plus elle reste difficile à soigner, notamment
après échecs multiples des traitements commercialisés. Cette place en dernière intention est
guidée notamment par la tolérance de la molécule.
2. Tolérance
L’eskétamine possède un profil de tolérance marqué par des effets indésirables (EI) graves
comme mis en évidence chez un de nos patients dès la première administration. En France,
d’après le recueil d’information effectué auprès des centres hospitaliers, quelques patients ont
eu des effets indésirables graves ayant nécessité l’arrêt du traitement (hallucinations visuelles,
état dissociatif marqué, dépersonnalisation, idées suicidaires, augmentation de la pression
artérielle). Les effets indésirables psychiatriques sont concordants avec les données du résumé
76
des caractéristiques du produit, l’eskétamine étant une molécule dissociative. Un de nos patients
a également eu une recrudescence des idées suicidaires mais transitoire qui n’a pas nécessité
l’arrêt de traitement. Il est compliqué d’estimer la part d’imputabilité de l’eskétamine et/ou de
la pathologie dépressive dans la responsabilité des idées suicidaires. La levée d’inhibition avec
risque suicidaire, bien que complexe, est également discuté avec les autres AD, nécessitant
l’ajout de benzodiazépines en début de traitement. Dans les essais cliniques étudiant la tolérance
de l’eskétamine, deux suicides ont été répertoriés mais considérés comme non imputables au
traitement (112). Les autres effets indésirables expérimentés par nos patients étaient communs
à ceux retrouvés dans les essais cliniques. En France, aucun effet indésirable nouveau lors de
l’ATU de cohorte n’a été mis en évidence, les plus fréquents étant les vertiges, la sédation, la
somnolence, l’anxiété et la dissociation. Concernant les EI cardiovasculaires, la surveillance de
la pression artérielle avant administration et après 40 minutes permet de repérer rapidement les
poussées hypertensives.
3. Organisation
D’un point de vue organisationnel, la prise en charge par eskétamine nécessite des
dispositions particulières et un circuit bien établi. Les équipes soignantes et médicales du
CHGR se sont montrées motivées pour instaurer une nouvelle dynamique au sein de l’unité
concernée. Cependant, la prise en charge est chronophage. En effet, elle nécessite la mise à
disposition de temps soignant pendant au moins deux heures (administration et surveillance)
deux fois par semaine le premier mois et plusieurs fois par mois ensuite. L’administration
devant se faire dans un cadre calme et nécessitant une surveillance, celle-ci ne peut pas être
réalisée dans toute les unités notamment d’admission. Il est nécessaire que le personnel soit
auparavant formé, et que la pharmacie soit informée des nouvelles instaurations de traitement.
Un équipement de réanimation et du personnel qualifié sont nécessaires pour les patients
atteints d’une affection cardiovasculaire ou respiratoire. Une organisation au sein de notre
établissement est en cours d’élaboration afin de déterminer le circuit idéal d’un patient traité
par eskétamine. La création d’une Réunion de Concertation Pluridisciplinaire pour les
dépressions complexes est à l’étude afin de sélectionner les patients éligibles. Par ailleurs,
certains établissements avaient déjà mis en place des RCP pendant l’ATU de cohorte. Une fiche
d’information réalisée par une préparatrice en pharmacie hospitalière est en cours de rédaction
et sera délivrée à chaque dispensation afin d’y synthétiser les principaux conseils de bon usage.
77
Selon les différentes organisations des centres hospitaliers, les lieux de mise en place de
l’eskétamine diffèrent. L’instauration du traitement varie entre les hôpitaux de jours, les
hôpitaux de semaines, les unités d’hospitalisation continue. Des unités spécialisées dans les
troubles résistants étaient déjà en place dans certains centres.
Les contraintes pour les patients en ambulatoire sont la venue deux fois par semaine en HDJ
au moins une matinée et une contre-indication à la conduite de véhicule pour le retour. En raison
des contraintes de temps, l’exigence attendue des patients au niveau de l’efficacité du traitement
est importante. Cependant, une partie des patients n’était pas concernée car la gravité de leurs
pathologies nécessitait une prise en charge en hospitalisation.
4. Limites
Les limites de notre étude résident principalement sur l’effectif trop faible de patients.
Plusieurs facteurs expliquent cela. Tout d’abord, le champ d’indication de l’eskétamine était
très restreint dans le cadre de l’ATU. En effet, elle ne concernait que les malades en
échappement thérapeutique après deux lignes de traitement AD bien conduits et échec,
intolérance ou refus des ECT. De plus, les épisodes dépressifs résistants s’inscrivant dans un
trouble bipolaire étaient exclus.
Les critères d’exclusions étaient les suivants :
- Patient médicalement stable d'après l'examen physique, les antécédents médicaux et les
signes vitaux,
- Patient avec diagnostic actuel ou antérieur de DSM-5 d'un trouble psychotique ou d'une
dépression avec psychose, troubles bipolaires ou apparentés, trouble obsessionnel
compulsif comorbide, déficience intellectuelle, trouble de personnalité limite, trouble
antisocial, trouble de personnalité histrionique ou trouble narcissique de personnalité,
- Patient avec idéations suicidaires actives avec intention de passage à l’acte.
L’effet indésirable grave subit par la deuxième patiente de notre étude a freiné l’instauration
de nouveaux patients car le personnel de psychiatrie est peu souvent confronté au « coma ».
D’autant que le manque d’efficacité chez les 4 patients a réduit l’enthousiasme lié à l’effet
« d’innovation ».
Ensuite, le service Kraepelin a été contraint de suspendre l’inclusion des patients pendant
plusieurs mois car l’unité a été choisie comme unité « COVID » accueillant les patients positifs
au SARS-COV2. Enfin, le psychiatre référent, à l’origine des initiations de traitement par
78
eskétamine a quitté notre établissement pour raisons professionnelles, freinant de fait
l’inclusion de nouveaux patients. Par ailleurs, le statut ATU représentait également un frein
pour certains professionnels du fait des contraintes administratives notamment.
L’usage détourné de la kétamine peut faire craindre un risque d’abus ou de dépendance à
cette molécule. Cependant, l’administration étant réservée au secteur psychiatrique hospitalier
et les patients étant régulièrement suivis, le mésusage de l’eskétamine n’a pas été un frein à son
utilisation au CHGR.
De plus, seul le pôle universitaire s’est investi dans ce projet, il est par ailleurs le principal
pourvoyeur de prescriptions d’ECT. Une disparité des prises en charge existe entre les différents
pôles. Par exemple, en ce qui concerne l’ECT, ce sont les internes du service universitaire qui
se relaient pour accompagner et surveiller le patient. Or cette activité chronophage n’est pas
réalisable dans les autres pôles par manque de ressources humaines. En ce qui concerne les AD
sous ATU (phénelzine, tranylcypromine), ils sont aussi principalement prescrits par le pôle
universitaire.
Une autre contrainte non négligeable est celle du prix et de la prise en charge de cette
thérapie couteuse par les hôpitaux, notamment en fonction de leurs modes de financement. En
effet, le prix d’un dispositif de 28mg est de 257 euros. Cela correspond pour 1 mois de
traitement à 56mg à 4412 euros (à la posologie de référence) et le montant peut s’alourdir si la
posologie augmente à 84mg. Or en psychiatrie peu de traitements onéreux existent. Si on
compare avec un traitement AD classique type ISRS (moins de 10 euros par mois), la différence
est considérable. La durée de traitement n’est actuellement pas connue et il est possible que les
patients restent à vie sous eskétamine. Selon la commission de transparence la population-cible
incidente de l’eskétamine est estimée à un maximum de 29 000 patients par an (112).
La commercialisation du traitement depuis début octobre et la publication des données post-
ATU devraient faciliter l’accès à ce traitement. L’eskétamine a été présenté au CHGR en
commission médicale d’établissement et commission du médicament, des dispositifs médicaux
stériles et de l’innovation thérapeutique ce qui a permis de la faire connaitre aux autres
psychiatres.
79
IV. CONCLUSION
L’eskétamine est une nouveauté thérapeutique bienvenue en psychiatrie ou les
innovations sont rares. Elle offre l’espoir d’une meilleure prise en charge des patients atteints
de dépression résistante. Les études actuelles ont montré une efficacité modeste du traitement.
Or, le traitement présente des effets indésirables graves (trouble de la conscience, troubles
dissociatifs et troubles cardiovasculaires) et l’incertitude quant à la tolérance sur le long terme
dans le cadre d’une pathologie chronique est problématique. On peut ajouter que ces réserves
sont à l’origine d’une décision de la commission de transparence d’accorder un avis favorable
à l’eskétamine uniquement « en association à un ISRS ou un IRSN, chez les adultes de moins
de 65 ans pour le traitement des épisodes dépressifs caractérisés résistants n'ayant pas répondu
à au moins deux AD différents de classes différentes au cours de l'épisode dépressif actuel
modéré à sévère et en cas de contre-indication ou de résistance à l’électroconvulsivothérapie
ou pour les patients n’y ayant pas accès ou l’ayant refusé et aux posologies de l’AMM. Aussi,
selon la commission de transparence, l’eskétamine n’apporte pas d’amélioration du service
médical rendu dans cette indication.
Au sein de notre établissement spécialisé en santé mentale, l’eskétamine a été utilisée
par 4 patients. L’efficacité sur le long terme n’a pas été maintenue pour les patients qui en ont
bénéficié. Un effet indésirable grave a été répertorié. Cependant, l’importante amélioration
clinique à court terme du traitement expérimenté au sein du CHGR questionne sur une ouverture
de l’indication chez les patients souffrant d’EDC avec une recrudescence d’idées suicidaires.
Cette indication a déjà été validée aux Etats-Unis. Néanmoins le profil de tolérance nécessite
une surveillance particulière du traitement qui doit être réalisée à l’hôpital, avec une présence
appropriée du personnel soignant préalablement formé.
Bien qu’au CHGR nos patients n’aient pas atteint une rémission durable, une
amélioration des symptômes dépressifs a été constatée chez plusieurs patients au sein des autres
centres hospitaliers en France. L’eskétamine continue d’être prescrit au CHGR car certains
patients n’ont plus d’alternatives médicamenteuses et l’ECT n’est pas toujours réalisable. En
outre, le profil d’activité de l’eskétamine peut être sélectif d’un certain type de dépression.
Une surveillance à long terme au niveau national est mise en place pour observer la
pratique clinique et les conditions d’utilisation du traitement. En outre, un suivi de l’évolution
80
des patients en termes d’efficacité est instauré. Enfin une réévaluation dans un délai maximum
de 5 ans grâce à l’obtention des données d’une étude de tolérance à long terme est programmée.
81
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94
VI. ANNEXES
Annexe 1 : Echelle MADRS
95
96
97
98
Médicament Dose initiale Posologie thérapeutique
Inhibiteurs sélectifs de la recapture de la Sérotonine (ISRS)
Citalopram
Escitalopram
Fluoxétine
Paroxétine
Sertraline
Fluvoxamine
20 mg / jour
10 mg / jour
10 mg / jour
20 mg / jour
50 mg / jour
50 mg / jour
20-40 mg / jour
10-20 mg / jour
20-60 mg / jour
20-50 mg / jour
50-200 mg / jour
100-200 mg / jour
Inhibiteurs de la recapture de la Sérotonine Noradrénaline (IRSNA)
Duloxétine
Venlafaxine
Milnacipran
20 mg / jour
37,5 mg / jour
50-100 mg / jour
60-120 mg / jour
75-375 mg / jour
100-200 mg / jour
Inhibiteur du transporteur SERT, agoniste du récepteur 5-HT1A, agoniste partiel du
récepteur 5-HT1B, antagoniste du récepteur 5-HT1D, 3, 7
Vortioxétine 5-10 mg / jour 10-20 mg / jour
Antidépresseurs tricycliques ou imipraminique
Amitriptyline
Clomipramine
Imipramine
Maprotiline
Dosulépine
Trimipramine
Doxépine
50 mg / jour
25 mg / jour
25 mg / jour
25-50 mg / jour
75 mg / jour
25 mg/ jour
25 mg / jour
150-300 mg / jour
100-250 mg / jour
150-300 mg / jour
150 – 225 mg / jour
75 – 150 mg / jour
100 – 300 mg / jour
100 – 300 mg / jour
Inhibiteurs de la Monoamine Oxydase (IMAOs)
Moclobémide
Iproniazide
300 mg / jour
50-100 mg / jour
450-600 mg
100-150 mg
Annexe 2 : Tableau des différentes classes pharmacologiques et molécules antidépresseurs
99
Phenelzine (ATU)
Tranylcypromine (ATU)
15mg
30mg 60mg
Agoniste des récepteurs mélatoninergiques
Agomélatine 25 mg 25 mg
Antagoniste des récepteurs 2, 5-HT2 et 5-HT3
Miansérine
Mirtazapine
10 mg / jour
15 mg / jour
30-90 mg
15-30 mg
Autre
Tianeptine 5 mg 12,5 mg
U.F.R. DE PHARMACIE DE RENNES N°
CONSTANTIN Marion
PRISE EN CHARGE DE LA DEPRESSION RESISTANTE PAR ESKETAMINE :
Etude de cas au Centre Hospitalier Guillaume Régnier de Rennes.
99 feuilles, 14 illustrations, 5 tableaux. Thèse : Pharmacie ; Rennes 1 ; 2020.
L’eskétamine est une innovation thérapeutique indiquée dans la prise en charge de la dépression
résistante. Actuellement, plus de 15% des patients atteints d’épisode dépressif caractérisé ne
bénéficient pas d’une rémission complète car ils sont résistants aux différents traitements existants.
L’électroconvulsivothérapie est une alternative qui doit être proposée dans cette indication or elle
n’est parfois pas possible ou peut-être refusée. Depuis sa mise à disposition en France en 2019,
l’eskétamine a été proposée à plusieurs patients après de multiples échecs thérapeutiques dans une
vingtaine de centres hospitaliers en France.
L’objectif de ce travail est d’apporter des données d’efficacité et de tolérance concernant ce nouveau
traitement au travers des données de la littérature et d’une étude de cas au sein de notre établissement.
Au sein du centre hospitalier Guillaume Régnier, quatre patients ont pu bénéficier de ce traitement.
Aucun n’a atteint de rémission stable. L’hypothèse principale est l’inclusion de ces patients après de
trop nombreux échecs thérapeutiques. Les effets indésirables observés sont les même que ceux
retrouvés dans les essais cliniques menés par le laboratoire. La Haute Autorité de Santé a octroyé un
service médical rendu faible à ce traitement en accord avec le manque d’efficacité démontré dans les
essais cliniques et les nombreux effets indésirables. L’électroconvulsivothérapie est efficace dans 50 %
des dépressions résistantes. Quand elle est possible, elle reste l’option de premier choix. Cependant,
l’eskétamine grâce à sa rapidité d’action pourrait être un nouvel outil dans le panel thérapeutique des
psychiatres. Sa place dans la stratégie thérapeutique de la prise en charge de la dépression est amenée
à évoluer. La publication des données en France et de l’étude de tolérance en cours par le laboratoire,
nous donnera de plus amples informations sur l’efficacité et la tolérance du traitement.
Rubrique de classement : Pharmacie clinique
Mots-clés : Pharmacie clinique, psychiatrie, antidépresseur, dépression résistante
Mots-clés anglais MeSH : Antidepressant, efficacy, safety, esketamine, treatment-resistant depression
JURY :
Président : Pr LE CORRE Pascal, Pharmacien, Professeur des universités
Dr NAUCZYCIEL Cécilia, Psychiatre, Praticien Hospitalier
Dr SPIESSER Laurence, Pharmacien, Maître de conférences des
universités
Dr BELLAY Romain, Pharmacien assistant spécialiste
Assesseurs :