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Problématique du foncier forestier et des droits locaux en
Afrique centrale
Alain Karsenty
Immatriculation et classement
• Régime foncier « moderne » organisé autour d’un double axe :
• La propriété des terres : Un dispositif puissant mais très lourd pour la création de la propriété privée, l’immatriculation. La
RDC fait exception, puisque seul l’État peut se déclarer propriétaire, Une présomption assez générale de « domanialité » (propriété de l’État) des autres terres, mais
possibilité de se voir octroyer des concessions foncières sous condition « de mise en valeur »
• L’usage des espaces :En Afrique centrale (sauf RDC), le classement sert à constituer les « forêts permanentes » ou le
« domaine forestier permanent »,qui concerne l’usage (aménagement du territoire) Le classement sert aussi à affecter des forêts au domaine privé de l’État (ou des collectivités
publiques locales), Au Cameroun, il ouvre le droit à un titre foncier, mais sa délivrance (inscription au Livre Foncier) dépend de l’administration en charge des affaires foncières (coûts…)
Les administrations forestières se contentent du classement, mais risque juridique: les services des Domaines (administration foncière) ne tiennent pas compte du classement et peuvent attribuer des titres de propriété individuels sur des forêts classées ou des aires protégées, faute de titre foncier au nom de l’État
Domaine(s) de l’État
• Le domaine public : relève d'un régime de droit public• Affectation du bien à l'usage du public, soit en usage collectif (voies publiques, rivages...), soit
en usage privatif (cimetières...)• En principe, il est inaliénable
• Le domaine privé (des personnes morales publiques) peut appartenir soit à l’État (forêts domaniales), soit aux collectivités publiques locales (e.g. forêts communales).
• Le domaine privé est aliénable
• Le domaine national, catégorie spécifique à certains pays africains (Cameroun, Togo, Sénégal…) :• Catégorie « par défaut », en attendant des évolutions vers d’autres statuts fonciers (propriété
individuelle, domanialité privée…)• Logique de « patrimoine collectif » et non de propriété : l’État est « gardien » (Cameroun) du domaine
national et non le propriétaire• Pratiques inappropriées des agents de l’administration qui tendent parfois à confondre domaine
national et propriété de l’État…
Le cadre juridique et institutionnel de gestion des forêts au Cameroun
Vocation issue
des objectifs
d'aménagement
du territoire
(zonage)
DOMAINE FORESTIER
PERMANENT (forêts classées ou
en attente de classement)
FORETS NON PERMANENTES
(dénommée « bande agro-forestière »
dans le plan de zonage)
Dénomination
administrative
FORÊTS
DOMANIALES
FORÊTS
COMMUNALES
FORÊTS
COMMUNAUTAIRES
AUTRES
FORÊTS
Statut
juridique
Domaine privé
de l'État
Domaine privé
de la commune
Portion du domaine
national
Domaine
national, forêts
des particuliers
Affectations forêts de
production,
forêts de
protection, etc.
forêts de
production,
forêts de
protection, etc.
Définies par une
convention de
gestion d’une durée
de 15 ans entre le
village et le service
forestier
Espaces
affectés (forêts
privées) ou en
attente
d'affectation
(immatriculation
au profit de
particuliers ou
de
communautés)
Le foncier coutumier• Les sociétés rurales ont toujours combiné dans des proportions variables la part
de « l'individuel » et du « collectif » qui sont généralement étroitement associés L'exploitation de la ressource se fait sur une base individuelle (en fait, familiale) tandis que
l'utilisation de l'espace est totalement codifiée au niveau collectif
• Les « finages » (aussi appelés « terroirs) communautaires : l'espace aux limites non bornées sur lequel se déploient les droits coutumiers d'une communauté (quel que soit le mode d’appropriation et les statuts fonciers légaux)
• Une appréhension de l'espace à partir de lieux (logique topocentrique) plutôt que de limites Des espaces discontinus à géométrie variable définis par les modes concrets d'usage
des ressources
• Les frontières de ces espaces collectifs ne sont pas toujours connues pour toutes les parties de la forêt Certains droits fonciers sont souvent largement virtuels quand les densités de population sont
très faibles Les droits sur le sol (foncier) se combinent avec des modes d'appropriation des
ressources (arbres, produits non ligneux … ) distincts du foncier
Un État de droit insuffisant
• Les États d’Afrique centrale n’ont pas classé les forêts qu’ils entendent verser dans leur domaine privé (sauf Cameroun, partiellement)
• Ni le domaine forestier permanent, ni la propriété privée de l’Etat ne sont constitués en droit
• Les États vivent sur une présomption de domanialité héritée du début de l’époque coloniale (« terres vacantes et sans maîtres »)
• Les « droits d’usage » reconnus aux populations : catégorie subalterne du droit de propriété
• Sortir de la présomption de domanialité = exiger des États qu’ils classent les forêts, en suivant les normes internationales reconnues (e.g. CLIP)
• Combiner classement et immatriculation?
• Le classement sécurise la vocation forestière des terres et libère de l’espace pour d’autres tenures (forêts communautaires, forêts privées)
Insécurités foncière
• Pour l’État : attribution possible (par le service des domaines) de titres de propriété individuels sur des espaces classés mais non immatriculés
• Pour les communautés : • Faute de reconnaissance de droits coutumiers, possible attribution
de concessions foncières (agrobusiness) et de titres de propriété individuels sur les finages
• Les « propriétaires coutumiers » tendent à traiter directement avec des investisseurs agricoles en quête de terre, au détriment de la communauté
• Certains groupes « autochtones » ont une empreinte agraire peu visible et peuvent perdre l’accès à des ressources « privatisées »
Insécurités foncière (suite)
• Pour les exploitants agricoles : les « propriétaires coutumiers » laissent souvent les ayants droit (exploitants) dans une situation de précarité, surtout si ce sont des « migrants » ou des « allochtones »
• Interdiction fréquente de planter arbres et cultures pérennes
• La « mise en valeur » est obligatoire (déboisement)
• La transmission de la terre aux héritiers peut être contestée par le lignage « autochtone »
• Pour les investisseurs : les attributions foncières faites par l’État peuvent être contestées par les propriétaires coutumiers ou par les communautés
La superposition des usages et des droits
• Les finages des communautés ne s’arrêtent pas aux frontières des concessions et des aires protégées : les territoires sont toujours constitués de plusieurs couches/strates de droits superposés
• La cartographie participative des finages est un premier pas vers la sécurisation des droits fonciers collectifs
• Les finages cartographiés peuvent devenir des instruments de cogestion des concessions forestières et des aires protégées et recevoir un statut juridiques ad hoc (pas de la propriété mais des droits d’exclusion reconnus)
• En RDC, arrêté 025 de 2104 sur l’attribution des forêts des communautés locales: distinction entre « forêt qu’une communauté locale possède régulièrement en vertu de la coutume » (finage?) et « concession communautaire » sur tout ou portion de celle-ci.
La prise en compte du fait communautaire dans les concessions forestières• Cartographies systématique des finages au sein et en dehors des
concessions
• Organisation avec les autorités de la dimension duale (inclusive et exclusive) de la foresterie communautaire, combinant espaces de droits superposés (espace inclusif) et concession communautaires (espace exclusif)
• Classement des forêts sous concession, pas réalisé ou pas achevé en Afrique centrale : opportunité légale pour un ajustement des limites de concessions industrielles afin de permettre la constitution de concessions communautaires de dimension viable pour des entreprises artisanales
Les 4 piliers du concept de Concession 2.0
• Le modèle proposé possède quatre caractéristiques : • (i) la cartographie et la reconnaissances des espaces coutumiers au sein et
autour de la concession industrielle
• (ii) un partage des revenus de l’exploitation du bois indexé sur l’importance des surfaces coutumières incluses dans la concession ainsi que des accords contractuels de gestion avec les communautés (dont le respect conditionneront les paiements)
• (iii) la possibilité d’exploitation commerciale de ressources autres que le bois d’œuvre par différents ayants droit en association et sous la supervision du concessionnaire
• (iv) une gouvernance inclusive pour la gestion des droits superposés dans l’espace de la concession
Je n’ai pas tout
compris…
Merci de votre attention!