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1 VERLAINE POEMAS Poèmes saturniens Lassitude De la douceur, de la douceur, de la douceur ! Calme un peu ces transports fébriles, ma charmante. Même au fort du déduit parfois, vois-tu, l'amante Doit avoir l'abandon paisible de la sœur. Sois langoureuse, fais ta caresse endormante, Bien égaux tes soupirs et ton regard berceur. Va, l'étreinte jalouse et le spasme obsesseur Ne valent pas un long baiser, même qui mente ! Mais dans ton cher cœur d'or, me dis-tu, mon enfant, La fauve passion va sonnant l'olifant !... Laisse-la trompeter à son aise, la gueuse ! Mets ton front sur mon front et ta main dans ma main, Et fais-moi des serments que tu rompras demain, Et pleurons jusqu'au jour, ô petite fougueuse ! Lasitud Encantadora mía, ten dulzura, dulzura... calma un poco, oh fogosa, tu fiebre pasional; la amante, a veces, debe tener una hora

Verlaine selección de poemas

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VERLAINE POEMAS

Poèmes saturniens

Lassitude

De la douceur, de la douceur, de la douceur !Calme un peu ces transports fébriles, ma charmante.Même au fort du déduit parfois, vois-tu, l'amanteDoit avoir l'abandon paisible de la sœur.

Sois langoureuse, fais ta caresse endormante,Bien égaux tes soupirs et ton regard berceur.Va, l'étreinte jalouse et le spasme obsesseurNe valent pas un long baiser, même qui mente !

Mais dans ton cher cœur d'or, me dis-tu, mon enfant,La fauve passion va sonnant l'olifant !...Laisse-la trompeter à son aise, la gueuse !

Mets ton front sur mon front et ta main dans ma main,Et fais-moi des serments que tu rompras demain,Et pleurons jusqu'au jour, ô petite fougueuse !

Lasitud

Encantadora mía, ten dulzura, dulzura...calma un poco, oh fogosa, tu fiebre pasional;la amante, a veces, debe tener una hora puray amarnos con un suave cariño fraternal.

Sé lánguida, acaricia con tu mano mimosa;yo prefiero al espasmo de la hora violentael suspiro y la ingenua mirada luminosay una boca que me sepa besar aunque me mienta.

Dices que se desborda tu loco corazóny que grita en tu sangre la más loca pasión;deja que clarinee la fiera voluptuosa.

En mi pecho reclina tu cabeza galana;júrame dulces cosas que olvidarás mañanaY hasta el alba lloremos, mi pequeña fogosa.

Versión de Emilio Carrere

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Mon rêve familier

Je fais souvent ce rêve étrange et pénétrantD'une femme inconnue, et que j'aime, et qui m'aime,Et qui n'est, chaque fois, ni tout à fait la mêmeNi tout à fait une autre, et m'aime et me comprend.

Car elle me comprend, et mon cœur transparentPour elle seule, hélas! cesse d'être un problèmePour elle seule, et les moiteurs de mon front blême,Elle seule les sait rafraîchir, en pleurant.

Est-elle brune, blonde ou rousse? Je l'ignore.Son nom? Je me souviens qu'il est doux et sonore,Comme ceux des aimés que la vie exila.

Son regard est pareil au regard des statues,Et, pour sa voix, lointaine, et calme, et grave, elle aL'inflexion des voix chères qui se sont tues.

Mi sueño familiar

Sueño a menudo el sueño sencillo y penetrantede una mujer ignota que adoro y que me adora,que, siendo igual, es siempre distinta a cada horay que las huellas sigue de mi existencia errante.

Se vuelve transparente mi corazón sangrantepara ella, que comprende lo que mi mente añora;ella me enjuga el llanto del alma cuando lloray lo perdona todo con su sonrisa amante.

¿Es morena ardorosa? ¿Frágil rubia? Lo ignoro.¿Su nombre? Lo imagino por lo blando y sonoro,el de virgen de aquellas que adorando murieron.

Como el de las estatuas es su mirar de suavey tienen los acordes de su voz, lenta y grave,un eco de las voces queridas que se fueron...

Versión de Nicolás Bayona Posada

Chanson d’automne

Les sanglots longsDes violonsDe l'automneBlessent mon coeur

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D'une langueurMonotone.

Tout suffocantEt blême, quandSonne l'heure,Je me souviensDes jours anciensEt je pleure;

Et je m'en vaisAu vent mauvaisQui m'emporteDeçà, delàPareil à laFeuille morte.

Canción de otoño

Los sollozos más hondosdel violín del otoñoson igualque una herida en el almade congojas extrañassin final.

Tembloroso recuerdoesta huida del tiempoque se fue.Evocando el pasadoy los días lejanoslloraré.

Este viento se llevael ayer de tinieblaque pasó,una mala borrascaque levanta hojarascacomo yo.

Versión de Carlos Pujol

Romanzas sin palabras

Ariettes oubliés

III

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Il pleure dans mon coeurComme il pleut sur la ville ;Quelle est cette langueurQui pénètre mon coeur ?

Ô bruit doux de la pluiePar terre et sur les toits ! Pour un coeur qui s'ennuie,Ô le chant de la pluie !

Il pleure sans raisonDans ce coeur qui s'écoeure.Quoi ! nulle trahison ?...Ce deuil est sans raison.

C'est bien la pire peineDe ne savoir pourquoiSans amour et sans haineMon coeur a tant de peine !

Pequeñas arias olvidadas III

Llora en mi corazóncomo llueve en la ciudad.¿Qué es esta desazónque hiere mi corazón?

¡Dulce rumor de la lluviapor tierra y en los tejados!¡Para un alma con abulia,oh el canto de la lluvia!

Porque llueve sin razónen esta alma que se asquea.¡Cómo! ¿ninguna traición?Este duelo es sin razón.

Es, claro, la pena peor,la de no saber por qué,sin encono y sin amor,siente mi alma tal dolor.

Traducción de Francisco Cerrano

Paysages belges

Walcourt

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Briques et tuiles,Ô les charmantsPetits asilesPour les amants ! Houblons et vignes,Feuilles et fleurs,Tentes insignesDes francs buveurs ! Guinguettes claires,Bières, clameurs,Servantes chèresÀ tous fumeurs ! Gares prochaines,Gais chemins grands...Quelles aubaines,Bons juifs-errants !

Paisajes belgas

Walcourt

¡Ladrillos y tejasOh los encantadoresPequeños asilosPara los amantes!

¡Lúpulos y viñasHojas y flores,Tiendas insignesDe francos bebedores!

¡Cafetines alegre,Cervezas, clamores,Sirvientas queridasA todos los fumadores!

Estaciones próximasAlegres caminos anchos…¡Qué ofertasBuenos judíos errantes!

Jadis et naguère

Art poétique

De la musique avant toute chose,Et pour cela préfère l'Impair

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Plus vague et plus soluble dans l'air,Sans rien en lui qui pèse ou qui pose.

Il faut aussi que tu n'ailles pointChoisir tes mots sans quelque méprise :Rien de plus cher que la chanson griseOù l'Indécis au Précis se joint.

C'est des beaux yeux derrière des voiles,C'est le grand jour tremblant de midi,C'est, par un ciel d'automne attiédi,Le bleu fouillis des claires étoiles !

Car nous voulons la Nuance encor,Pas la Couleur, rien que la nuance !Oh ! la nuance seule fianceLe rêve au rêve et la flûte au cor !

Fuis du plus loin la Pointe assassine,L'Esprit cruel et le Rire impur,Qui font pleurer les yeux de l'Azur,Et tout cet ail de basse cuisine !

Prends l'éloquence et tords-lui son cou !Tu feras bien, en train d'énergie,De rendre un peu la Rime assagie.Si l'on n'y veille, elle ira jusqu'où ?

O qui dira les torts de la Rime ?Quel enfant sourd ou quel nègre fouNous a forgé ce bijou d'un souQui sonne creux et faux sous la lime ?

De la musique encore et toujours !Que ton vers soit la chose envoléeQu'on sent qui fuit d'une âme en alléeVers d'autres cieux à d'autres amours.

Que ton vers soit la bonne aventureEparse au vent crispé du matinQui va fleurant la menthe et le thym...Et tout le reste est littérature.

Arte poética

Antes que nada música,Y a lo Impar favorece,Que se pierde en el aireSin que se pose o pese.

En la elección de tus palabras

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Tienes que ser remiso:Nada mejor que el canto grisQue une lo Indeciso a lo Preciso.

La intensa claridad del mediodíaSe vuelve dulce si es de otoño el cielo,¡Ese amasijo azul de las estrellas!Son más bellos los ojos tras el velo.

Porque el matiz queremos todavía,¡Y tan sólo el matiz, nunca el Color!¡Oh, matiz, nuestra única esperanza,Sueño en el sueño y canto en el rumor!

¡La Punta criminal ten a distancia,El espíritu cruel, la Risa impura,Que hacen llorar los ojos de lo AzulCon ese ajo de vulgar fritura!

Tuércele el cuello a la elocuenciaY en este tren enérgico pretendeQue tu rima se esté más avisada.¿Adónde irá si se la desatiende?

¿Quién dirá los errores de la rima?¿Qué niño sordo o qué demente esclavoForjó esta hueca joya de un centavoQue suena a falsedad bajo la lima?

¡Música entonces, todavía y siempre!Que tu palabra tenga ese temblorDel alma que uno siente cómo, alada,Hacia otros cielos vuela y otro amor.

Que tu palabra sea la aventuraEn el viento crucial de la mañanaDonde perfuman menta y mejorana...Y todo el resto es literatura.

Traducción de Raúl Gustavo Aguirre.

L’aubergne

Murs blancs, toit rouge, c'est l'Auberge fraîche au bordDu grand chemin poudreux où le pied brûle et saigne,L'Auberge gaie avec le Bonheur pour enseigne.Vin bleu, pain tendre, et pas besoin de passe-port.

Ici l'on fume, ici l'on chante, ici l'on dort.L'hôte est un vieux soldat, et l'hôtesse, qui peigneEt lave dix marmots roses et pleins de teigne,

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Parle d'amour, de joie et d'aise, et n'a pas tort !

La salle au noir plafond de poutres, aux imagesViolentes, Maleck Adel1 et les Rois Mages,Vous accueille d'un bon parfum de soupe aux choux.

Entendez-vous ? C'est la marmite qu'accompagneL'horloge du tic-tac allègre de son pouls.Et la fenêtre s'ouvre au loin sur la campagne.

El albergue

Muros blancos, techo rojo, es el Albergue fresco al bordeDel gran camino polvoriento donde el pie arde y sangra,El albergue alegre con la Felicidad por enseñaVino azul, pan tierno, y sin necesidad de pasaporte.

Aquí se fuma, aquí se canta, aquí se duerme,El posadero es un viejo soldado, y la posadera, que peinaY lava a diez mocosos rosados y llenos de tiña,Habla de amor, de alegría, de comodidad ¡y no se equivoca!

La sala de techo negro de vigas, con imágenesViolentas, Maleck Adel y Los Reyes MagosOs recibe con buen aroma de sopa de coles.

¿Oyen? Es la marmita que acompañaEl reloj de tictac alegre con su pulso.Y la ventana se abre a lo lejos sobre el campo.

1 Héroe caballeresco de la novela de Madame Cotin Mathilde o Memorias sacadas de la historia de las Crusadas (1805). Hermano de Saladino, ama a Matilde, hermana de Ricardo Corazón de León y es amado por ella a pesar de las diferencias de religiones. Dio lugar a numerosas ilustraciones.