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ECOLE NATIONALE D’ARCHITECTURE ET D’URBANISME DE TUNIS Département d’Architecture
Recueil cours Histoire de l’architecture La Mésopotamie ancienne
Première année
Par Hind KAROUI Enseignante-chercheur
2
P.2/ L’Architecture des civilisations antiques
PARTIE 2, COURS 1, L’EVOLUTION DE L’ARCHITECTURE
AU PROCHE-ORIENT
- LA MESOPOTAMIE -
Plan
INTRODUCTION
I. L’Architecture monumentale
1. Quelques œuvres de référence
2. Les ziggourats en basse Mésopotamie
- La Ziggourat d'Ur
3. Les temples sumériens
- Le temple d’Ishtar-Kititum
4. Les palais royaux
II. Babylone : Histoire d’une cité
I. Organisation de la cité
II. L’Empire néo-babylonien
1. Les monuments les plus remarquables
- La porte d’Ishtar
- Le palais royal de Nabuchodonosor
- La tour de Babel
- Le temple de l’Esagil
REFERENCES BIBLIOGRAPHIQUES
Livres disponibles à la bibliothèque de l’ENAU
BOTTERO, Jean, Il était une fois la Mésopotamie
(Cote bibliothèque E.N.A.U ; RA.027)
Autres
PARROT, André, Ziggurats et tour de Babel, Paris, 1949
VICARI, Jacques, La Tour de Babel, Que sais-je ?, PUF, 2000
(Sous la dir. Francis JOANNES), Dictionnaire de la civilisation mésopotamienne, Coll. Bouquin, Robert Laffont.
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INTRODUCTION
La période que nous allons étudier est celle qui va de 2300 à l’an 800 av.J.-C, marquée par l’émergence des
« cités-Etats »1, dans deux régions phares du Proche-Orient :
1. La Mésopotamie, gouvernée par les grands prêtres et les chefs militaires
2. L’Egypte, sous le régime dynastique des Pharaons.
Notre étude se fera à travers la description et l’analyse de quelques œuvres de référence érigées par les
constructeurs et les « architectes » locaux et reflétant toute une vision du monde et toute une mentalité
relative à la société de l’époque.
« Deux lieux, moteurs de la naissance de l’architecture, la Mésopotamie et l’Egypte… La Mésopotamie en
tant que lieu de naissance de l’architecture monumentale, l’Egypte, lieu de naissance de l’architecture de
pierre et berceau de la proportion. »
S.Giedion, L’éternel présent, La naissance de l’architecture, Editions de la connaissance, Bruxelles, 1966.
Aperçu historique
La Mésopotamie est un terme qui vient du grec et qui signifie : "entre les fleuves". Ces fleuves sont le
Tigre et l'Euphrate. Actuellement, la plus grande partie de la Mésopotamie se trouve en Irak. Plusieurs
civilisations s’y sont succédées depuis le VIIème millénaire (akkadienne (2334 – 2200; centre), sumérienne
(2100 – 1750; sud), assyrienne (1200 – 609; nord), babylonienne (609 – 539; sud)…).
L’écriture fut inventée par les sumériens, fixés au Sud, d’abord sous une forme pictographique ensuite
cunéiforme. Cette importante découverte marquera la formation des premières grandes agglomérations,
dotées d'une structure politique et économique fort développée (Uruk, 3000 av. J.-C). Vers -3300, les
nomades qui vivaient dans le désert du Nord de la péninsule arabique, poussés par la sécheresse, vinrent
progressivement se sédentariser le long de l'Euphrate, au nord, fondant les premières villes sémites : Mari ,
Ebla ,Agadé (la future Akkad, capitale de l'Empire). C'est l'influence et les relations entre ces deux peuples,
Akkadiens (Nord) et Sumériens (Sud), qui fixeront le destin et l'identité de tout le Proche-Orient ancien. A
l’origine de cette unification est le roi Sargon Premier.
1 Les « cités-Etats » étaient les sièges d’un pouvoir politique à caractère monarchique (rois).
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Le mode d’occupation du territoire s’est reposé sur la domestication de l'eau à travers la conception des
canaux d’irrigation et sur l'emploi de la brique. La religion y joua un rôle essentiel: tout événement était
considéré comme un message divin, tout geste humain revêtait une fonction sacrée (attitude
anthropomorphique).
Les cités-Etats mésopotamiennes sont gouvernées par un souverain qui est l’unique représentant d’une
divinité poliade (figure sacrée qui protège la cité). Le roi c’est lui qui assure la médiation, l’échange avec
les dieux. Son pouvoir s'incarne dans le palais, à la fois lieu de résidence et siège de son administration
Début le IIIe millénaire (Ur, Uruk) avec les sumériens et puis successivement sous l'Empire assyrien
(Nord : Ninive, Khorsabad, Nimroud) et sous l’empire néo-babylonien (Sud : Babylone), une vingtaine de
« cités-états » se partagent le sud de la Mésopotamie, appelé "pays de Sumer".
Le centre urbain est divisé en deux zones :
* un quartier d’habitations (maisons modestes)
* un quartier où se regroupent les monuments de la ville, habituellement au bord du fleuve : temples,
ziggourats, tombes et palais.
I. L’architecture monumentale
1. Quelques œuvres de référence
Période Mésopotamie Réalisations les plus remarquables
-3500 /-1000 Dynasties archaïques (-3500 / -2335)
Ziggourats d’Ur, d’Eridu, d’Uruk , de Nippur (Irak)
Période d’Akkad (-2334 / -2100)
Période néo- sumérienne (-2100/ -1750)
Temples Palais royaux
Période paléo-babylonienne (-1750/-1595)
Palais impériaux
Période kassite (-1595 / -1160)
Palais et édifices sacrés monumentaux
-1000 / -700 Empire médio et néo-assyrien (-1200 / -609)
Tour de Babel Palais royal de Khorsabad
Empire néo-babylonien (-609/-539)
Temples et palais impériaux (Ninive)
Cité
Centre urbain
Espace de production agricole
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2. Les ziggourats en basse Mésopotamie
Avec l'édification de sanctuaires et de temples monumentaux en briques crues, à partir de la seconde
moitié du IVème millénaire, naquit une architecture monumentale dont la ziggourat fut la principale
caractéristique.
Ce mot signifie « tour divine » et désigne un édifice rectangulaire en forme de pyramide à degrés surmonté
d’un temple. Cette forme fut inventée par les sumériens et figurait la montagne sur laquelle les dieux se
manifestaient après être descendus du ciel. La figure divine était incarnée par le roi qui assumait donc le
double rôle de chef d’Etat et de prêtre. Dans le temple surélevé le dieu se rencontrait avec la reine, son
épouse.
La ziggourat était donc un édifice religieux et était érigée dans chaque grande ville de la Mésopotamie pour
jouer un rôle protecteur très important dans la société de l’époque. Parfois, une ville peut abriter plusieurs
ziggourats.
Ziggourat d'Ur, 2500 av. J.-C
La ziggourat fut commencée par le roi Ur-Nammu et terminée par
son fils Shulgi sur l'emplacement d'un temple archaïque plus
ancien. Elle était dédiée à Sin (dieu de la lune). Au sommet se
dressait le temple. Toute la masse est construite en briques crues
(séchées au soleil) recouvertes d’un parement en briques cuites au
feu. L’étage inférieur est haut de 11m. On y accédait par trois
escaliers convergeant vers un portail donnant sur un palier
intermédiaire. Le temple était dressé à environ 16m70 de hauteur.
La ziggourat d’Ur est l’une des mieux conservées. Vue sur ce qui en reste : le niveau inférieur avec les rampes des escaliers.
La ziggourat dans la cité d’Ur, au Sud de l’Iraq
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A proximité de la ziggourat d’Ur a été découverte une nécropole1 formée de tombes ayant appartenues à
des gens de différentes classes sociales. Dans certaines sépultures ont été trouvés des bijoux en or, des
armes, des ustensiles de cuisine, et même des cadavres de serviteurs et de valets qui se sont donnés la mort
suite au décès de leur maître.
L’une des tombes les plus volumineuses du cimetière d’Ur comporte trois chambres funéraires en
encorbellement: une centrale et deux autres de part et d’autre.
Sens et signification de la ziggourat
* Une superstructure monumentale qui marque l’omniprésence et la puissance du divin dans la cité
* Les marches servent à monter pour atteindre les divinités
* Le point de contact entre les hommes et les divinités
* Un rôle protecteur très important dans la société de l’époque
1 La nécropole d’Ur en basse Mésopotamie découverte par Leonard Woolley dans les années 1930.
Reconstitution de la ziggourat d’Ur d’après l’archéologue Leonard Woolley (1930). Les coupoles et les créneaux sont des ajouts (pure invention).
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3. Les temples sumériens
Les sanctuaires se caractérisent par leur grande échelle et par une typologie particulière pensée en fonction
du climat. On trouvait plusieurs temples dans une même cité, d’où la caractérisation des cités sumériennes
sous le terme de « villes-temples ».
Les plans se diffèrent les uns des autres mais répondent le plus souvent au type « babylonien » qui prévoit
une cour intérieure autour de laquelle se répartissent les pièces de petites dimensions. Le mode de
couverture est le plafond à poutres horizontales (toit en terrasses). Plus la pièce est grande, et plus les
poutres doivent être longues et solides. Les constructeurs n’ont jamais utilisé les supports verticaux pour
des raisons structurales (poteaux, colonnes, piliers). Les colonnes n’étaient que décoratives, plaquées sur
les façades en créant des jeux d’ombre et de lumière intéressants. Les murs extérieurs étaient épais,
dépourvus de fenêtres et peints avec des compositions murales colorées1. Ces « habitations des dieux »
étaient ornées à l’intérieur de statues et de statuettes.
Un exemple représentatif de l’architecture religieuse sumérienne2 est celui d’Ishtar-Kititum à Ishali (Est de
Baghdad, IIème millénaire) :
Plan rectangulaire de 100m x 67m. Il est constitué de trois temples à cours intérieures (1, 2, 3), répartis
autour d’une grande cour rectangulaire. Le tout est construit sur un socle en briques cuites.
1 A partir de l’an 1300 av J.C, on commencera à utiliser les briques vernissées et émaillées.Voir les temples et les palais royaux néo-assyriens et babyloniens. 2 Concernant l’architecture palatiale, elle était à l’image des temples de dimensions gigantesques (Un seul palais pouvait abriter une centaine de chambres). Les résidences des rois sumériens se distinguaient par leur ampleur, la richesse de la décoration et par le confort qu’on y trouvait.
Plan du temple d’Ishtar
Vue axonométrique du temple avec la succession de cours à ciel ouvert en forme de L autour de la cour principale.
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Le matériau principal de toutes ces constructions est la brique (terre argileuse + sable + eau), utilisée
soit crue soit cuite :
- la brique crue, séchée au soleil, était utilisée au niveau des murs et des assises (fondation). Il s’agit de
la forme la plus ancienne.
- la brique cuite dans des fours spéciaux était utilisée dans les parements des murs (revêtements
extérieurs)
4. Les palais royaux :
Organisation interne des espaces d’un palais royal :
• La structure se fait autour de cours ( Palais sumériens du 2ème millénaire, palais assyriens et
babyloniens)
• La circulation entre les deux parties (logement et administration) se fait principalement par la
salle du trône. (salle oblongue pour les audiences royales et les affaires courantes du royaume).
• Derrière le trône se trouve une petite pièce avec un escalier menant sur le toit ou à un étage
supérieur.
• Une autre salle, située entre la salle du trône et la cour privée du Palais, est une pièce de repos
pour le roi après ces audiences.
Palais de Nimrud (Assyrie, -1000)
Porte monumentale de la cour du palais du roi Sargon II à Khorsabad (Assyrie, -710).
Le palais royal a une surface de 10 hectares. Il était surélevé, bâti sur une terrasse haute de 12 m. A l’extérieur, autour du palais sont regroupés un temple et des résidences princières de même architecture que le palais.
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II. Babylone : Histoire d’une cité
Babel, « la Porte du Dieu »
Babylone était la capitale religieuse et politique de la Mésopotamie méridionale (sud), fondée à partir de la
fin du IIIème millénaire par Hammourabi (dynastie Amorrite, -1900). La cité a connu, à travers les siècles,
diverses périodes de troubles et de guerres.
Elle a été conquise par les Kassites, un peuple de nomades qui ont occupé progressivement la région sud
du pays (Sippar) et dont le pouvoir allait en grandissant après la chute de Hammourabi. Ils seront les
nouveaux maîtres de la Babylonie durant une période de 576 ans (la dynastie Kassite compte une trentaine
de rois dont Gandash, Argum Il, Burnaburiash Ier (vers - 1510), Burnaburiash Il, entre 1359 et 1333 av J.-
C…). Ces siècles de stabilité vont ensuite prendre fin sous l’emprise des Assyriens du Nord (Ninive)
assoiffés de nouvelles conquêtes territoriales. La ville s’est trouvée mainte fois envahie, pillée, détruite et
reconstruite.
C’est à la venue du roi Nabopolassar (626 – 605 av J.-C) que la civilisation babylonienne refleurira et
s’affirmera sur l’empire assyrien. Son fils, Nabuchodonosor II règnera durant 43 années (605 – 562 av J.-
C, dynastie Chaldéenne) et s’illustrera grâce aux grands travaux d’embellissement et d’aménagement
entrepris dans la cité. Babylone connaîtra ainsi son plus haut moment de gloire. Cette période d’apogée
architectural est appelée « néo-babylonienne ».
Ce « monarque d’exception » laissa après sa mort un Empire prospère et stable riche de monuments
somptueux. Le dernier roi néo-babylonien fut Nabonide (556 – 539 av J.-C) qui ne saura faire face à
l’occupation perse de la région menée par Cyrus II le Grand. La cité tombera en - 539 et perdra son
indépendance politique.
I. Organisation de la cité
Babylone était une ville d’environ 850 hectares divisée en 10 quartiers : Six se trouvent à l’Est de
l’Euphrate et quatre à l’ouest. L’ensemble était entouré par une double enceinte ponctuée par huit portes
monumentales (porte d’Ishtar, porte de Sin, porte de Marduk, porte de Zababa, porte d’Enlil, …). Chaque
porte était dédiée à un dieu local : Ishtar la déesse de la guerre et de l’amour, Sin le dieu de la lune, Marduk
le dieu protecteur de la ville, Zababa, époux d’Ishtar et dieu protecteur de la ville de Kish, Enlil dieu de
l’air et de l’atmosphère…
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Vue aérienne de la mégapole (grand pôle urbain) - Maquette –
La ville s’inscrit dans un rectangle (2500 x 1500 m). Plan
du côté Est de l’Euphrate.
N
Temple de Marduk
Tour de Babel Palais royal
Porte d’Ishtar
Un des quartiers d’habitation (Merkès, Est de la ziggourat)
De vastes voies de communication rectilignes
assuraient le passage vers :
- les palais royaux (palais Nord dit « palais
d’été », palais Sud, palais-musée)
- les temples et sanctuaires (43 temples
qui se partagent les divinités les plus
importantes de la région dont : le temple
de Marduk (l’Esagil), temple d’Ishara,
temple de Ninourta le fils d’Enlil, temple
de la déesse sumérienne Nimah, temple
d’Ishtar d’Agadé)
- la tour principale (l’Etemenanki)
- les chapelles et les autels de prière
- les bâtiments administratifs
- les habitations ordinaires1.
Entrée principale à la cité
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1. L’Empire néo-babylonien
La plupart des monuments de la Babylone « néo-babylonienne » découverts par les fouilles datent de
l'époque de Nabuchodonosor II qui les a construits et restaurés. C'est à lui que sont dues les enceintes
définitives, la construction de l'énorme bâtiment appelé "palais d'été" situé au Nord, le palais royal du Sud
avec ses célèbres jardins suspendus dressés en hommage à son épouse Amytis. 1
1. 1. Les monuments les plus remarquables
Grâce à des opérations de fouilles menées entre 1897 et 1914 par l’archéologue Robert Koldewey et
d’autres spécialistes allemands, la partie centrale de la ville, située à l’est de l’Euphrate, a pu être restituée.
Des parties de la ville comme la porte monumentale d’Ishtar, le palais Sud et les murs d’enceinte ont été
restaurées et reconstruites à la fin des années 80 par des archéologues irakiens grâce aux financements de
l’Etat et d’autres organismes de sauvegarde archéologique comme l’UNESCO2.
Dans ce qui suit, une description des monuments les plus importants de la ville.
1 C’est la voie le long de laquelle se déroule la procession, c’est à dire le défilé (ou cortège) religieux : une longue suite de personnes qui marchent à la file ou en colonnes. (Dictionnaire Le Robert) 2 Outre les vestiges architecturaux (les ruines), les historiens et archéologues s’appuient aussi sur les écrits que les rois babyloniens ont fait graver sur les murs. Ces écrits de type cunéiformes (en forme de signes combinés) contiennent des descriptions des œuvres, des informations sur les travaux de restauration et d’embellissement entrepris. Ce sont les tablettes.
Restitution de la procession annuelle
Une fois par an se célébrait la fête de l’Akîtu :
Rite religieux célébré autour de la divinité Marduk, le
protecteur de Babylone. Au huitième jour du commencement
des festivités la statue de Marduk quitte la ville pour y revenir
trois jours plus tard. Ce retour est accompagné d’un très long
cortège présidé par le roi, les religieux et les hommes du
peuple. L’itinéraire entrepris suit la voie processionnelle1 qui
part de la porte principale de la ville, la porte d’Ishtar, et longe
les monuments religieux les plus remarquables : le palais royal,
la tour de Babel et le temple de Marduk. Cette artère
principale est large de 20m et fait 800m de long et était
entièrement pavée de calcaire blanc.
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A. La porte d’Ishtar1
C’est une des huit portes de la ville. De par ses dimensions (23m de haut) et la richesse de son décor
(briques émaillées bleues), elle est la plus imposante. Intégrée à la double enceinte, elle est composée de
deux tours bastions c'est-à-dire en saillie.
La brique émaillée était utilisée pour l’ornementation pariétale. Il s’agit d’un placage d’un décor coloré
(jaune, blanc, bleu, rouge, vert et noir) composé de figures animales, végétales et divines. La brique
émaillée est soit plate soit en relief. La couleur est obtenue après cuisson suivie de l’application d’un
fondant (vernis) obtenu après mélange de chaux, de sable, de soude (ou potasse) coloré avec des oxydes
métalliques (dérivés du plomb, de l’étain, du cuivre, de fer, de cobalt)2.
B. Le palais royal de Nabuchodonosor (palais Sud)
C’est la résidence du roi et siège du gouvernement. Le palais est baptisé « la maison de l’émerveillement du
peuple ». C’est un complexe architectural de forme trapézoïdale, long 322m et large de 190, comprenant
plus de 200 pièces qui s’organisent autour de cinq grandes cours intérieures.
L'entrée principale donnait sur la cour de l'est ou cour d'entrée. Cette cour donnait accès à une deuxième,
la cour des services administratifs appelée aussi la cour moyenne.
La troisième cour ouvre sur la salle du trône (50x20m) qui abrite la chaise royale incrustée d’ivoire, de
pierres et de métaux précieux. Tous les murs intérieurs sont ornés de briques émaillées sur lesquelles se
1 Outre à la porte reconstruite sur le site d’origine, une partie du modèle a été reproduite, grandeur nature, dans le Musée de Berlin (le Vorderasioatisches). 2 Le jaune est obtenu avec de l’antimoniure de plomb, le blanc avec de l’oxyde d’étain, le bleu avec du cobalt, le rouge avec de l’oxyde de cuivre, le vert avec de l’oxyde de fer et de cobalt. Cf. Revue Les Cahiers de Science et Vie, « Enquête au cœur d’une cité mythique : Babylone », N°82, Aout 2004.
Entrée principale du palais Sud (restaurée)
Maquette du palais royal avec ses cinq cours
Vue frontale de la grande porte d’Ishtar (reconstruction)
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détachent des décors en relief reprenant des thèmes végétaux et religieux : arbres, palmiers, lions
(symboles de la déesse Ishtar).
Enfin la quatrième cour devait être la cour des appartements royaux et la cinquième semble être attribuée
à un Harem (appartements privés pour les femmes).
« De l’argent, de l’or et des pierres précieuses…tout ce qui a de la valeur et qui est beau…Je rendis
magnifique ma demeure royale. » Nabuchodonosor II
- Les jardins suspendus
Entre le palais et la porte d’Ishtar furent plantés, sur des terrasses construites sur plusieurs niveaux, des
fleurs et des arbres. Ce sont les « jardins suspendus » considérés avec les hauts murs épais de la ville, l’une
des 7 merveilles du monde. Un des témoignages les plus anciens sur la probable existence de ces
« jardins » est celui du chaldéen Bérose qui écrivit, vers l’an 280 av J.-C, un livre sur l’histoire de Babylone
intitulé Babyloniaca où il dit à propos de la demeure de Nabuchodonosor II : « Dans cette résidence royale,
il (le roi) fit élever de hautes terrasses de pierre, leur donna tout à fait l’aspect de collines puis, en y
plantant des arbres de toute espèce, il exécuta et disposa ce qu’on appelle le parc suspendu, parce que sa
femme, d’origine persane, avait le goût des site montagneux. »1
Philon de Byzance, un ingénieur réputé qui vécut dans les années 250 av J.-C ajoute : « Ce jardin est dit
suspendu car il est plein de plantes cultivées en hauteur, très au dessus du sol, qui s’enracinent dans la
terrasse supérieure et non dans la terre. Cette masse est portée par des colonnes de pierre, si bien que tout
l’espace en dessous est occupé par des bases de colonnes sculptées. Ces terrasses supportent une vaste et
profonde couche de terre dans laquelle sont plantés des arbres à grandes feuilles comme on a coutume
d’en voir dans les jardins, une grande diversité de fleurs de toute espèce et, en somme, tout ce qui peut
réjouir l’œil et ravir les sens. Ainsi, cette plantation se trouve au-dessus de ceux qui se promènent en bas,
entre les colonnes. »
Il est à noter qu’aucune tablette ne les a mentionné. Toutefois, les découvertes archéologiques menées par
Koldeway, Wiseman et l’irakien Damerji sur l’aile Nord-Est du palais Sud, ont mis en lumière des murs
massifs de 25m d’épaisseur ayant servis pour supporter une superstructure très lourde (terrasses à
niveaux), un puits (irrigation) et un « bâtiment voûté » composé d’une succession de 14 cellules voûtées et
qui, selon Koldeway, supportait les jardins suspendus : « Dans l’une de ces cellules, du côté ouest, se
trouve un puits très différent de tous les autres puits babyloniens. Il s’agit d’un ensemble de trois puits
juxtaposés qui a présupposé la présence d’une machine hydraulique à pompes qui aurait fonctionné pour
donner une alimentation d’eau continue. »2
1 Bérose cité dans Flavius Josèphe, Contre Apion, Les Belles lettres, 1930. Cf. Les sept Merveilles du monde de P.Clayton et M.-J Price, « Les jardins suspendus de Babylone » par Irving L. Finkel, 1993, pp.35-50, p.37, 1993. 2R. Koldeway,The excavations at Babylon (Londres, 1914) cité dans Les sept Merveilles du monde, op.cit., p.45.
14
A.
Section montrant la disposition en escaliers des terrasses plantées (arbres,
palmiers, cyprès…)
Le site archéologique : vestiges des murs massifs supportant les terrasses.
Coupe en perspective montrant le principe de structure basé sur la succession de cellules voûtées.
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C. La tour de Babel
C’est la ziggourat de Babylone, baptisée « la maison du fondement du ciel et de la terre » (Etemenanki),
haute de 90m et inscrite dans une enceinte de 400m de coté1. Au sommet, se dressait le temple Shahuru
où se trouvaient le trône et le lit de Marduk.
Nous avons un témoignage d’un voyageur et intellectuel grec, Hérodote (né entre 490 et 480 av J.-C), qui
durant le Ve siècle avant notre ère a parcouru la Mésopotamie et a visité la tour. Il écrit :
"Au milieu se dresse une tour massive, longue et large d'un stade, surmontée d'une autre tour qui en
supporte une troisième, et ainsi de suite, jusqu'à huit tours. Une rampe extérieure monte en spirale jusqu'à
la dernière tour ; à mi-hauteur environ il y a un palier et des sièges, pour qu'on puisse s'asseoir et se
reposer au cours de l'ascension. La dernière tour contient une grande chapelle, et dans la chapelle on voit
un lit richement dressé, et près de lui une table d'or. Aucune statue de divinité n’est placé en ce lieu, et
aucun être humain n’y passe la nuit, si ce n’est une seule femme du pays que le dieu a choisie entre
toutes. » 2
1 Les dimensions de la ziggourat de Babylone sont écrites sur une tablette que l'on nomme : "la tablette de l'Esagil". Cette tablette fut rédigée dans la ville d'Uruk et date du 12 décembre 229 avant notre ère. De nombreux spécialistes ont tenté d'étudier ce texte afin de restituer la ziggourat de Babylone. Les reconstitutions proposées n’ont pas été identiques. 2 Andrée Barguet, Hérodote, l'Enquête, livre à I à IV, Gallimard, Paris, 1964. Extrait du livre I.
La ziggourat
Une des reconstitutions effectuées de la
ziggourat (Auteur : Andreae)
16
D. Le temple de l’Esagil
Dédié à Marduk, le temple est baptisé « la maison à la tête haute » (Esagil) et est le plus grand et vaste
sanctuaire de la ville. Il représente le cœur religieux de Babylone. Selon la légende, se fut Marduk qui a
bâtit cette « demeure » à l’issue de son combat victorieux contre la mer.
C’est un vaste ensemble fortifié en forme de L, de 180 sur 120m organisé autour de trois cours à ciel
ouvert :
- la cour extérieure qui donne sur le côté sud à la cour intérieure et sur le côté est à la cour centrale. Le
passage d’une cour à une autre se fait à travers des portes monumentales. Les salles donnant sur la cour
intérieure, richement décorées d’or et d’argent, étaient des chapelles qui abritaient les statues des divers
dieux de la région. La troisième cour, la cour centrale, appelée aussi la cour de Bêl (dieu), abrite une petite
pièce où se dresse la statue de Marduk. Cette pièce est appelée la cella1.
1 Par définition la cella est la partie la plus importante d’un temple contenant la statue de dieu auquel il est consacré. Quand la pièce se réduit à une niche ancrée dans le mur, on l’appelle naos.
Le noyau religieux de la ville
contenant la ziggourat avec son
enceinte, le temple et les
habitations.
Représentation axonométrique du temple de Marduk
Cella
Cour centrale
Cour intérieure
Entrée principale
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