Traitement percutané du carcinome hépatocellulaire

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Traitement percutané du carcinomehépatocellulaire

Percutaneous treatment of the hepatocellularcarcinomaV. Sitruk (ancien Chef de clinique-assistant) a,*,O. Seror (Praticien hospitalier) b,J.-C. Trinchet (Professeur des Universités Praticien hospitalier) a

a Service d’hépato-gastroentérologie, Hôpital Jean Verdier,AP-HP et UPRES EA-3409 - Université Paris 13, 93143, Bondy, Franceb Service de radiologie, Hôpital Jean Verdier, AP-HP et UFR SMBH-Université Paris XIII, 93143 Bondy,France et UFR SMBH-Université Paris XIII, 93000 Bobigny, France

MOTS CLÉSCarcinomehépatocellulaire ;Traitementpercutané ;Alcoolisation ;Radiofréquence ;Micro-ondes

KEYWORDSHepatocellularcarcinoma;Percutaneous ablationprocedure;Ethanol injection;

Résumé Malgré les progrès de l’imagerie et des stratégies de dépistage, la plupart descarcinomes hépatocellulaires sont diagnostiqués à un stade tardif et ne sont pas accessi-bles à un traitement chirurgical curatif. Les méthodes de traitement percutané chimiqueou thermique sont une alternative à la chirurgie dans le traitement du carcinomehépatocellulaire. L’alcoolisation percutanée, première technique développée et étudiée,a démontré son efficacité avec un taux de réponse complète de 80 à 100 % pour lescarcinomes hépatocellulaires de 3 cm de diamètre et moins. C’est par ailleurs uneméthode simple, bien tolérée et peu coûteuse qui reste jusqu’à maintenant le traitementpercutané de référence. Dans les 10 dernières années, des méthodes agissant par effetthermique (radiofréquence, micro-ondes, laser) ont été développées. La radiofréquence,actuellement la plus utilisée, entraîne un taux de réponse au moins égal à celui del’alcoolisation, mais avec un taux de complications qui pourrait être supérieur. Lesméthodes utilisant les micro-ondes ou le laser paraissent prometteuses, mais peu dedonnées sont disponibles. Des études randomisées contrôlées sont nécessaires afind’établir l’efficacité, la survie à long terme, la tolérance et le rapport coût/efficacité desnouvelles techniques.© 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Abstract Despite advances in imaging techniques and surveillance program, most hepa-tocellular carcinoma patients are still diagnosed at advanced stages and cannot benefitfrom surgical curative treatment. Percutaneous destruction of tumour by chemicalsubstances or thermal energy sources is a good alternative to surgery. Percutaneousethanol injection, the earliest developed method, has been widely reported and hasproven its efficacy achieving a complete response in 80-100 % of hepatocellular carcinomaless than 3 cm in diameter. It is simple, safe and cheap and is until now the gold standard

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : veronique.sitruk@jvr.ap-hop-paris.fr (V. Sitruk).

EMC-Hépatologie 1 (2004) 123–130

www.elsevier.com/locate/emchep

1638-6221/$ - see front matter © 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.doi: 10.1016/j.emchep.2004.07.002

Radiofrequency;Microwaves

in percutaneous treatments. Over the past 10 years, methods using thermotherapy(radiofrequency, microwaves, laser) have been developed. Radiofrequency is the mostassessed method and it achieves at least the same response as percutaneous ethanolinjection but with a complication rate which could be higher. Microwave and laser arepromising technologies, but only few clinical data are available. Randomized controlledtrials are needed in order to assess treatment response, long-term survival, safety andcost-efficacy of the new techniques.© 2004 Elsevier SAS. Tous droits réservés.

Introduction

Malgré le développement de stratégies de dépis-tage et les progrès de l’imagerie, le carcinomehépatocellulaire (CHC) n’est que rarement accessi-ble à un traitement chirurgical curatif au momentdu diagnostic.1 L’indication de la transplantationhépatique est limitée par la fréquence des contre-indications et la pénurie de greffons, et la résectionchirurgicale reste compliquée d’une morbidité etd’une mortalité importantes.2 Les méthodes dedestruction percutanée du CHC ont été dévelop-pées à la fin des années 1980, avec en premier lieul’alcoolisation percutanée qui s’est révélée êtreune méthode simple, bien tolérée et peu coû-teuse.3 Au milieu des années 1990, des méthodespercutanées utilisant l’énergie thermique sont ap-parues, au premier rang desquelles se situe la ra-diofréquence.4

Méthodes de traitement percutané

Les traitements percutanés reposent sur l’applica-tion au sein de la tumeur, sous contrôle d’uneméthode d’imagerie, d’agents chimiques ou physi-ques induisant une nécrose tumorale.

Méthodes chimiques

Alcool absoluL’alcool absolu (éthanol à 95°) a été le premieragent utilisé. L’injection intratumorale d’alcool estréalisée après ponction percutanée avec uneaiguille de 10 ou 15 cm de long et de 20 à 22 G.L’alcool diffuse sur 2 à 3 cm à partir de l’extrémitéde l’aiguille et provoque une nécrose de coagula-tion de la tumeur. De plus, le pouvoir thrombogènede l’alcool entraîne une ischémie locale qui poten-tialise son action antitumorale.

Autres agentsL’acide acétique, qui pénétrerait mieux les septafibreux que l’éthanol, permettrait de réduire levolume injecté et le nombre de séances nécessairespour obtenir une nécrose complète,5 mais ce résul-

tat doit être confirmé. L’usage d’agents tels que lesérum salé chauffé ou la mitoxantrone reste anec-dotique.

Méthodes physiques

Elles agissent par effet thermique. Quatre sourcesénergétiques sont actuellement utilisées : d’unepart la radiofréquence, le laser et les micro-ondes,qui provoquent une nécrose immédiate par dénatu-ration protéique au-delà de 60 °C, et d’autre partla cryothérapie, qui provoque également la mortcellulaire au-dessous de -20 °C à -30 °C.

RadiofréquenceC’est la technique physique actuellement la plusemployée. La chaleur secondaire à une agitationionique est produite par un courant de radiofré-quence délivré par une ou plusieurs aiguilles-électrodes reliées à un générateur (Fig. 1). Lesélectrodes standards entraînent une nécrose maxi-male de 1,6 cm de diamètre et ne permettent detraiter que les petites tumeurs. Deux typesd’aiguilles-électrodes ont été développés pour aug-menter le volume de nécrose :

• les aiguilles-électrodes déployables en ombrellecomportant de quatre à dix baleines ;

• les aiguilles-électrodes à refroidissement in-terne qui, en prévenant les phénomènes de car-bonisation et de cavitation tissulaire, favorisentla diffusion de la chaleur.

Figure 1 Aiguilles-électrodes. A. Aiguille simple refroidie. B.Aiguille triple refroidie. C. Aiguille en parapluie. D. Aiguilleperfusée.

124 V. Sitruk et al.

Ces deux types d’aiguille permettent actuelle-ment de traiter des tumeurs de 4 cm de diamètre.6

Micro-ondesUne aiguille reliée à un générateur et placée au seinde la tumeur produit une émission localisée demicro-ondes. L’accélération de la rotation des mo-lécules d’eau qui en résulte provoque l’échauffe-ment tissulaire. Le coût en matériel est plus élevéque celui de la radiofréquence pour une efficacitéthéorique identique.7

LaserL’énergie lumineuse produite par un laser Nd:YAGest délivrée in situ via une fibre optique insérée àtravers des aiguilles positionnées par voie percuta-née dans la tumeur. La production locale de chaleurgénérée par chaque fibre optique induit une né-crose élémentaire limitée.8 Plusieurs fibres peu-vent être introduites dans la tumeur pour augmen-ter le diamètre de la zone de nécrose, qui peut ainsiatteindre de 6 à 7 cm. Ce traitement est compatibleavec un guidage par imagerie par résonance magné-tique (IRM).

CryothérapieEn raison du diamètre important des cryodes, cettetechnique est surtout réalisée sous laparoscopie oupendant une laparotomie. Récemment, il a étépossible de réduire le calibre des cryodes : desmétastases hépatiques ont pu être traitées par voiepercutanée,9 mais on ne dispose pas encore dedonnées concernant le CHC.

Procédure

Les contre-indications à la ponction percutanée dufoie doivent être respectées : ascite abondante outrouble majeur de l’hémostase (nombre de pla-quettes < 50 000/mm3, taux de prothrom-bine < 60 %, temps d’Ivy > 10 minutes). Les tumeurssous-capsulaires nécessitant un abord direct ainsique les tumeurs inabordables de par leur localisa-tion ou le manque de visibilité nécessaire au gui-dage sont également une contre-indication. La ra-diofréquence a des contre-indications spécifiques :les lésions situées en contact avec la convergencebiliaire ou avec le tube digestif (estomac, duodé-num, côlon) et des contre-indications plus relati-ves : tumeurs à proximité des vaisseaux en raisondu risque d’échec, lésions localisées près de lavésicule ou du diaphragme.Chaque procédure se déroule habituellement

pendant une hospitalisation brève de 24 à 48 heu-res. L’antibioprophylaxie n’est pas systématique.La procédure est réalisée dans la plupart des cas

sous contrôle échographique (Fig. 2). La tomoden-sitométrie (TDM) est une modalité de guidage deseconde intention, en particulier pour les lésionspeu visibles en échographie ou les tumeurs inacces-sibles sous guidage échographique, notamment lestumeurs du segment 1 du foie. L’usage des produitsde contraste vasculaires ultrasonores pourraits’avérer utile, notamment en cas de tumeur insuf-fisamment visible en échographie standard. Dansl’avenir, l’IRM pourrait être une modalité intéres-sante.Après repérage, l’abord tumoral est direct par

ponction percutanée. En cas d’alcoolisation, le vo-

Figure 2 Procédure de radiofréquence échoguidée d’un nodulede carcinome hépatocellulaire. A. Positionnement de l’aiguille-électrode (flèche) au sein de la lésion (cercle). B. Extensionprogressive de l’hyperéchogénicité de la lésion (flèche) en coursde traitement. C. En fin de procédure, extension de l’hyperé-chogénicité à l’ensemble de l’aire tumorale.

125Traitement percutané du carcinome hépatocellulaire

lume total d’alcool injecté peut être calculé selonla formule V = 4/3 p [r+0,5]3, où r est le plus grandrayon de la tumeur considérée comme sphérique.L’alcool est injecté en deux à quatre séances surune période de 1 à 3 semaines. Pour la radiofré-quence, chaque application a une durée de 12 à35 minutes ; plusieurs applications peuvent êtrenécessaires au cours d’une même séance pour obte-nir une nécrose de la totalité de la tumeur. Enmoyenne, en fonction du diamètre tumoral, une oudeux séances de radiofréquence sont nécessairespour obtenir une nécrose tumorale complète.Quel que soit l’agent thérapeutique utilisé, la

progression de la nécrose de coagulation est éva-luée en temps réel en échographie par un rehaus-sement extensif de l’échogénicité de la zone trai-tée10 (Fig. 2).

Évaluation de la destruction tumorale

Le critère principal de destruction tumorale com-plète est l’absence de zone vascularisée par voieartérielle au sein de la tumeur en TDM ou en IRMavec injection de produit de contraste vasculaire.L’imagerie de contrôle doit être réalisée au moins2 semaines, en pratique le plus souvent 1 mois,après la fin du traitement. En TDM, examen decontrôle le plus utilisé, une lésion détruite en tota-lité apparaît hypodense et n’est pas réhaussée autemps artériel après injection de produit decontraste10 (Fig. 3).La normalisation de la concentration sérique

d’alpha-fœtoprotéine (AFP) a un intérêt en prati-que limité car la plupart des petits CHC ont uneconcentration sérique normale d’AFP. Enfin, labiopsie de la zone traitée n’a que peu d’intérêt carl’existence de faux négatifs est fréquente.

Résultats des traitements percutanés

Destruction tumorale

AlcoolisationL’examen anatomopathologique de la zone traitéepar alcoolisation percutanée a montré qu’une né-crose complète était obtenue dans plus de 70 % descas.3,11 En TDM, la nécrose complète est obtenuedans 80 à 100 % des cas pour les tumeurs n’excédantpas 3 cm de diamètre,12–14 mais dans à peine lamoitié des cas pour les tumeurs de plus granddiamètre.15 La taille tumorale est le facteur princi-pal déterminant l’extension de la né-crose.3,12,13,16–19 La diffusion intratumorale de l’al-cool étant d’autant plus limitée et aléatoire que latumeur est volumineuse et qu’il existe des septa

fibreux intratumoraux, il a été proposé d’emboliserla tumeur par voie artérielle avant l’alcoolisa-tion,20 d’utiliser des aiguilles multiperforées oud’injecter un plus grand volume d’alcool en uneseule séance sous anesthésie générale.21,22

RadiofréquenceLa radiofréquence, comme l’alcoolisation, a fait lapreuve de son efficacité en termes de nécrosetumorale évaluée sur des pièces opératoires aprèsrésection.23 Par la suite, plusieurs études ont rap-porté les résultats évalués par les méthodes d’ima-gerie.14,24–27 L’efficacité dépend comme pour l’al-coolisation de la taille tumorale. Le pourcentage denécrose complète des tumeurs de moins de 3 cm dediamètre est de 90 %,14 proportion qui n’est passignificativement supérieure à celle obtenue avecl’alcoolisation (80 %). Pour les tumeurs de plus de3 cm, ce chiffre n’atteint pas les 50 %,6 le pourcen-tage de nécrose complète des tumeurs de plus de

Figure 3 Nécrose complète d’un carcinome hépatocellulaireaprès radiofréquence (tomodensitométrie après injection deproduit de contraste vasculaire). A. Avant traitement : nodulehypervascularisé à la phase artérielle précoce (flèches). B. Unmois après deux séances de radiofréquence : absence d’hyper-vascularisation artérielle traduisant la nécrose complète dunodule (flèches).

126 V. Sitruk et al.

3 cm de diamètre était de 47,6 %. Le caractèreinfiltrant de la tumeur est également un facteurpéjoratif, seules 35 % de ces tumeurs étant nécro-sées en totalité. Le développement de nouvellesélectrodes a permis de réduire le nombre moyen deséances pour obtenir une nécrose complète.24,27,28

Livraghi et al.14 ont ainsi obtenu une nécrose com-plète de 90 % des tumeurs après une moyenne de1,2 séances de radiofréquence versus 80 % des casaprès 4,8 séances d’alcoolisation.

Micro-ondesLe traitement par micro-ondes a été moins évaluéque la radiofréquence. Le pourcentage de nécrosecomplète paraît comparable à ce qui est observéaprès radiofréquence, mais requiert un nombreplus élevé de séances de traitement.7,29

Complications (Tableau 1)

AlcoolisationL’alcoolisation percutanée est un traitement bientoléré. Une fièvre et des douleurs abdominales sontfréquentes mais transitoires.14,30 Les complicationsgraves (principalement hémopéritoine, thromboseportale et épanchement pleural) sont rares. Lamortalité liée à la procédure est très faible.14,30,31

Le taux et la gravité des complications sont proba-blement plus élevés en cas de traitement de tu-meurs volumineuses et après injection d’éthanol engrande quantité lors d’une séance unique.21,22 Unessaimage de cellules néoplasiques sur le trajet del’aiguille de ponction a été rapporté dans moins de1 % des cas.30

RadiofréquenceLes effets secondaires mineurs, le plus souvent desdouleurs abdominales, paraissent plus fréquentsqu’après alcoolisation percutanée.14,24,25,32 La sur-venue de complications graves est comparable àcelles observées après alcoolisation.6,14 Des cas debrûlures cutanées ou des organes de voisinage,

notamment le côlon, ont été rapportés. Le risqued’essaimage tumoral plus important après radiofré-quence qu’après alcoolisation dans une étude32

paraît en fait comparable à celui de l’alcoolisation.La thermocoagulation du trajet de l’aiguille-électrode au moment de son retrait permettraitd’éviter la greffe des cellules néoplasiques.

Récidive tumorale

La survenue d’une récidive tumorale intrahépati-que est très fréquente après traitement percutanécomme après résection chirurgicale. Cette récidivecorrespond à deux situations distinctes :

• une récidive de la tumeur précédemment trai-tée ;

• l’émergence d’un ou plusieurs nouveaux CHCdistincts de la tumeur initialement traitée, dueau caractère précancéreux du parenchyme cir-rhotique.La distinction entre ces deux types de récidive

est difficile en pratique et repose surtout sur l’ima-gerie :

• une tumeur développée à l’endroit (ou enmarge) de la tumeur initiale est considéréecomme une récidive ;

• une récidive située dans le même segment à plusde 2 cm de la tumeur initiale ou dans un autresegment est considérée comme un nouveauCHC.Le risque de récidive locale après alcoolisation

percutanée serait surtout important dans les 2 ou3 années suivant le traitement, puis se stabiliserait(Tableau 2). En revanche, les récidives à distanceaugmenteraient de façon linéaire avec le temps, del’ordre de 20 % à 1 an à plus de 80 % à 5 ans.16,18 Lesprincipaux facteurs associés à la survenue d’unerécidive locale seraient la taille et le nombre detumeurs,17,33,34 la présence d’une capsule tumo-rale ou de septa intratumoraux18,33 et le degré dedifférenciation tumorale.17,18,34 La survenue d’unerécidive à distance serait favorisée par le caractère

Tableau 1 Complications des traitements percutanés du carcinome hépatocellulaire par alcoolisation et radiofréquence.

Auteurs (référence) n Traitementpercutané

Complicationsmineures

Complicationsmajeures

Essaimagetumoral

Décès

Livraghi et al.3 746 Alcoolisation Fièvre : 24 % 1,3 % - 0 %Douleurs : 13,5 %

Di Stasi et al.30 1066 Alcoolisation Douleurs : 2 % 2,5 % 0,65 % 0,09 %Livraghi et al.14 44 Alcoolisation Douleurs : 2 % 0 % - -Livraghi et al.14 42 Radiofréquence 9,5 % 2 % - -Llovet et al.32 32 Radiofréquence 15 % 22 % 12,5 % 0 %Buscarini et al.25 88 Radiofréquence Douleurs : 16 % 2,3 % - -Livraghi et al.31 2 320a Radiofréquence < 5 % 2,2 % 0,5 % 0,3 %a dont 1 610 carcinomes hépatocellulaires.

127Traitement percutané du carcinome hépatocellulaire

multifocal de la tumeur,19 l’augmentation de laconcentration sérique d’AFP avant18 et après13 al-coolisation, et une hépatopathie sous-jacente dueau virus de l’hépatite C (VHC).35

Peu d’études ont rapporté l’évolution à longterme après radiofréquence (Tableau 3). Dansl’étude d’Izumi et al.,36 le nombre de tumeurs etl’infection par le VHC étaient associés à la survenued’une récidive. Le taux de récidive tumorale pour-rait être influencé par la technique utilisée : dansune étude25 réalisée avec des électrodes simples oudéployables, une récidive survenait respective-ment dans 29 % et 14 % des cas après un suivi de34 mois.

Survie

La survie après alcoolisation est de l’ordre de 90 à100 % à 1 an, de 50 à 70 % à 3 ans et de 30 à 50 % à

5 ans3,16–19,37,38 (Tableau 2). Le recul est encoreinsuffisant dans la plupart des études portant sur laradiofréquence (Tableau 3). La survie après ra-diofréquence paraît comparable à celle observéeaprès alcoolisation ; en revanche, la survie sansrécidive locale serait meilleure après radiofré-quence.27,39 La survie dépend autant de l’évolutiondu CHC que de celle de la cirrhose sous-jacente.27

Place des traitements percutanésdans le traitement du carcinomehépatocellulaire

Compte tenu de la morbidité et de la mortalité dela résection chirurgicale, le traitement percutanédevrait être envisagé en priorité en cas de tumeurde petite taille, idéalement un CHC comportant aumaximum trois nodules de moins de 3 cm de diamè-

Tableau 2 Traitement percutané du carcinome hépatocellulaire par alcoolisation : résultats.

Auteurs (références) Nombredemalades

Nombredetumeurs

Diamètretumoral(cm)

Classe AdeChild-Pugh

Suivi(mois)a

Récidive tumorale Survielocale à

distance1 an 3 ans 5 ans

Livraghi et al.3 1995 246 b - ≤ 3 68 % 36 17 % 83 % 97 % 68 % 40 %224 b 3-5 55 % 94 % 57 % 37 %50 b > 5 56 % 85 % 53 % 30 %

Lencioni et al.121995 105 125 < 5 60 % 22,5±16,4 3 % 51 % 96 % 68 % 32 %Castellano et al.16

199771 95 ≤ 5 76 % 24,8 20 % 55 % 89 % 54 % 24 %

Hasegawa et al.17

199981 99 ≤ 3 77 % - 38 % 80 % 96 % 84 % 55 %

Koda et al.18 2000 49 73 ≤ 3 53 % 33±19,1 37 % 59 % 100 % 74 % 50 %Orlando et al.19 2000 115 - - 81 % - 23 % 41 % 89 % 43 % -Pompili et al.37 2001 111 129 < 5 100 % 28±20 17 % 45 % 97 % 62 % 41 %Lencioni et al.39 2003 50 73 ≤ 5 70 % 22,4±8,6 26 % 22 % 96 % 98 %

(2 ans)-

a Moyenne ± écart-type.b Issus d’une population totale de 746 malades.

Tableau 3 Traitement percutané du carcinome hépatocellulaire par radiofréquence : résultats.

Auteurs (références) Nombredemalades

Nombredetumeurs

Diamètretumoral(cm)

Classe deChild-PughA/B/C

Suivi(mois) a

Récidive tumorale Survielocale à

distance1 an 3 ans 5 ans

Rossi et al.271996 39 41 ≤ 3 21/16/1 22,6(3-66)

5 % 36 % 94 % 68 % 40 %

Rossi et al.24 1998 23 26 ≤ 3,5 17/6/0 10(6-19)

5 % 23 % - - -

Livraghi et al.14 1999 42 52 ≤ 3 39/3/0 - - - - - -Livraghi et al.6 2000 114 126 3-9,5 100/14/0 - - - - - -Buscarini et al.25 2001 88 101 ≤ 3,5 56/29/1 34

(2-73)29 %b - 89 % 62 % 33 %14 %c

Lencioni et al.39 2003 54 71 ≤ 5 87/13/0 22,9 5 % 24 % 100 % 98 %(2 ans)

-

a Moyenne (extrêmes).b Électrodes conventionnelles.c Électrodes expansives

128 V. Sitruk et al.

tre. Cependant, certaines localisations peu visiblesen échographie ou difficilement accessibles commele dôme ou la pointe du lobe gauche nécessitent untraitement chirurgical en première intention.Bien que l’usage de la radiofréquence se déve-

loppe rapidement, l’alcoolisation reste actuelle-ment la technique la mieux évaluée. La radiofré-quence pourrait se substituer à l’alcoolisation à lacondition de vérifier que le taux de complicationsn’excède pas celui de l’alcoolisation. En termes decoût, bien que le prix du matériel de radiofré-quence soit nettement plus élevé, la réduction dutemps de séjour hospitalier global est en faveur dela radiofréquence.Les méthodes de destruction percutanée peu-

vent aussi être utilisées en association avecd’autres traitements. Dans l’attente d’une trans-plantation hépatique, un traitement percutanépourrait détruire la tumeur ou réduire sa crois-sance, et augmenter ainsi les chances d’accéder àla transplantation.40 En cas de CHC volumineux, laréalisation préalable d’une chimioembolisation ar-térielle pourrait réduire la taille du CHC et lerendre accessible à un traitement percutané.41,42

La chimioembolisation artérielle préalable à l’al-coolisation percutanée pourrait diminuer l’inci-dence des récidives locales et à distance chez desmalades ayant des petites tumeurs.43

Conclusion

Les méthodes de destruction percutanée du CHCreprésentent actuellement un traitement curatifmajeur du petit CHC chez les malades atteints decirrhose. L’alcoolisation percutanée est le traite-ment le plus simple, le mieux toléré et le moinscoûteux. La radiofréquence a l’avantage de nenécessiter que une ou deux séances pour une effi-cacité comparable, même s’il existe encore desincertitudes concernant l’incidence des complica-tions. Dans l’avenir, l’amélioration du matériel uti-lisé pour la destruction percutanée et l’utilisationde thérapeutiques adjuvantes pourraient permet-tre de traiter efficacement des tumeurs de plusgrande taille. Les autres techniques percutanéesd’hyper- ou d’hypothermie locale sont encore peuévaluées. L’évaluation objective de ces nouvellesméthodes se heurte à l’absence d’études compa-rant leurs résultats avec l’histoire naturelle dupetit CHC.Enfin, après traitement efficace d’une première

tumeur, le risque très élevé de récidive tumorale,résultant le plus souvent de la survenue d’un nou-veau CHC, nécessite de développer simultanémentdes stratégies de surveillance et de chimiopréven-tion.

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