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ELSEVIER Recherche Transports SCcuritC 77 (2002) 259-280 rts www.elsevier.com/locate/rectra fivaluation des potentiels de rkduction des trafics automobiles dans le cas de la zone dense francilienne Evaluating the potential for reducting car traffic in the dense part of the Greater Paris Region Marie-H&he Massot, Jimmy Armoogum hers-Dest, 2, avenue du G.h+al Malleret-Joinville, 94114 Arcueil cedex, France Requ le 29 janvier 2002; accept6 le 6 septembre 2002 Le projet Pari 21 n’a pas pour ambition de justifier un changement radical de systkme de transport - pratiquement tout a Ctk dit sur les avantages et inconvknients de l’automobile dans la ville. En revanche, le projet va simuler et tester, du point de vue de I’individu, la faisabilitb d’un systhme de transport fond6 principalement sur l’usage d’autres modes que le vBhicule individuel dans la zone fortement peuplde de l’agglom&ation parisienne (Paris et petite couronne). En construisant et Cvaluant des scCnarios de transport, le projet vise & mesurer les marges de manceuvre dont on dispose pour rkduire l’usage de l’automobile dans les zones urbanides, en particulier celle qui rksulte des baisses de vitesse de dkplacement associees B ces sdnarios. La m&ode repose sur une succession d’itkrations d’un mod&le de simulation combinant des affectations des dkplacements 2 d’autres modes que l’automobile et des red&initions de I’offre de transport. La demande est orientke vers les modes individuels (marche & pied, bicyclette), les lignes de transport en commun et des combinaisons des deux. Les itkrations s’appuient sur l’Enqu&te globale de transport d’ile-de-France de 1991-1992, qui foumit toutes les boucles de dkplacement effect&es en automobile un jour donnB par tous les habitants d’une zone (autrement dit toutes les sCquences de transport entre l’instant oh la personne quitte son domicile et l’instant 00 elle y revient). 0 2002 fiditions scientifiques et mkdicales Elsevier SAS et INRETS. Tous droits r&ervCs. Abstract The Pari 21 research project does not attempt to justify a move towards a radically different system-practically everything there is to say about the benefits and disadvantages of cars in cities has already been said. Instead, the project will perform simulations and assess, from the point of view of individuals, the feasibility of a transport system that is based mainly on the use of modes other than the private car in the densely populated zone of the Greater Paris Area (Paris city plus the inner suburbs). By constructing and evaluating transport policy scenarios, this research also aims to measure the potential for reducing car use in highly urbanized zones, particularly that which results from the reduction in journey speeds which are a likely consequence of the policies in question The method is based on repeated iterations of a simulation model which combines the assignment of round trips to modes other than the automobile with reformulations of transport supply. Demand is channelled towards personal modes (walking, cycling), public transport and a combination of personal and public modes. These iterations are based on the 1991-1992 Paris Region comprehensive travel survey which recorded all the round trips by car made in a typical day by the individuals living in the zone (i.e. the sequence of all trips made between each time the individual leaves home and returns home). 0 2002 l!!ditions scientifiques et mCdicales Elsevier SAS and INRETS. All rights reserved. Mots cl& Mobilitd individuelle urbaine; Report modal; Scdnarios de dt?veloppement de l’offre de transport; fivaluation Keywords: Urban personal travel; Modal transfer; Transport policy sctnarios; Evaluation Adresse e-mail : [email protected] (M.-H. Massot). 0 2002 editions scientifiques et mtdicales Elsevier SAS et INRETS. Tous droits r&erv&. PII:SO761-8980(02)00021-3

Évaluation des potentiels de réduction des trafics automobiles dans le cas de la zone dense francilienne

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ELSEVIER Recherche Transports SCcuritC 77 (2002) 259-280 rts

www.elsevier.com/locate/rectra

fivaluation des potentiels de rkduction des trafics automobiles dans le cas de la zone dense francilienne

Evaluating the potential for reducting car traffic in the dense part of the Greater Paris Region

Marie-H&he Massot, Jimmy Armoogum hers-Dest, 2, avenue du G.h+al Malleret-Joinville, 94114 Arcueil cedex, France

Requ le 29 janvier 2002; accept6 le 6 septembre 2002

Le projet Pari 21 n’a pas pour ambition de justifier un changement radical de systkme de transport - pratiquement tout a Ctk dit sur les avantages et inconvknients de l’automobile dans la ville. En revanche, le projet va simuler et tester, du point de vue de I’individu, la faisabilitb d’un systhme de transport fond6 principalement sur l’usage d’autres modes que le vBhicule individuel dans la zone fortement peuplde de l’agglom&ation parisienne (Paris et petite couronne). En construisant et Cvaluant des scCnarios de transport, le projet vise & mesurer les marges de manceuvre dont on dispose pour rkduire l’usage de l’automobile dans les zones urbanides, en particulier celle qui rksulte des baisses de vitesse de dkplacement associees B ces sdnarios. La m&ode repose sur une succession d’itkrations d’un mod&le de simulation combinant des affectations des dkplacements 2 d’autres modes que l’automobile et des red&initions de I’offre de transport. La demande est orientke vers les modes individuels (marche & pied, bicyclette), les lignes de transport en commun et des combinaisons des deux. Les itkrations s’appuient sur l’Enqu&te globale de transport d’ile-de-France de 1991-1992, qui foumit toutes les boucles de dkplacement effect&es en automobile un jour donnB par tous les habitants d’une zone (autrement dit toutes les sCquences de transport entre l’instant oh la personne quitte son domicile et l’instant 00 elle y revient).

0 2002 fiditions scientifiques et mkdicales Elsevier SAS et INRETS. Tous droits r&ervCs.

Abstract The Pari 21 research project does not attempt to justify a move towards a radically different system-practically everything there is to

say about the benefits and disadvantages of cars in cities has already been said. Instead, the project will perform simulations and assess, from the point of view of individuals, the feasibility of a transport system that is based mainly on the use of modes other than the private car in the densely populated zone of the Greater Paris Area (Paris city plus the inner suburbs). By constructing and evaluating transport policy scenarios, this research also aims to measure the potential for reducing car use in highly urbanized zones, particularly that which results from the reduction in journey speeds which are a likely consequence of the policies in question The method is based on repeated iterations of a simulation model which combines the assignment of round trips to modes other than the automobile with reformulations of transport supply. Demand is channelled towards personal modes (walking, cycling), public transport and a combination of personal and public modes. These iterations are based on the 1991-1992 Paris Region comprehensive travel survey which recorded all the round trips by car made in a typical day by the individuals living in the zone (i.e. the sequence of all trips made between each time the individual leaves home and returns home).

0 2002 l!!ditions scientifiques et mCdicales Elsevier SAS and INRETS. All rights reserved.

Mots cl& Mobilitd individuelle urbaine; Report modal; Scdnarios de dt?veloppement de l’offre de transport; fivaluation

Keywords: Urban personal travel; Modal transfer; Transport policy sctnarios; Evaluation

Adresse e-mail : [email protected] (M.-H. Massot).

0 2002 editions scientifiques et mtdicales Elsevier SAS et INRETS. Tous droits r&erv&. PII:SO761-8980(02)00021-3

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1. Introduction

L’usage de l’automobile est aujourd’hui dominant et en croissance dans les grandes aires metropolitaines et ce malgre une opinion publique generalement favorable au developpement d’alternatives a la voiture. Les positions et dispositifs politiques recents (loi sur l’air, loi solidarite et renouvellement urbains et plans de deplacements urbains) refletent cette opinion, si bien qu’aujourd’hui nombre d’elus locaux Clabore des plans de deplacements urbains (PDU) visant a reduire le trafic automobile en agglomeration.

On constate cependant que, si la volonte politique est au rendez-vous et les moyens mis en ceuvre diversifies (projets de tramways, tram-train, pistes cyclables, poles d’echanges ou zones pietonnibres), les objectifs afliches dans les PDU en la matiere sont limit& (deux, voire trois pour cent de reduction du trafic automobile). Ces objectifs sont aussi limit& d’ailleurs que les impacts des politiques tradition- nellement envisagees - maitrise du stationnement, deve- loppement du transport public, instruments economiques (peage urbain) ou fiscaux (tipp) -, Ctablis par les modeles et analyses des chercheurs.

Ainsi, dans les projections de la mobilite developpees a I'INRETS a horizon 2020 sur la region Be-de-France, sur la base d’un modble Cconometrique indgrant un modele de- mographique [Madre et Armoogum, 1996, Bresson et al., 20001, les variables structurelles telles que la structure par age de la population, la localisation des m&ages et des activites et le revenu apparaissent en effet largement surde- terminantes pour le processus de formation de la mobilite et d’orientation du choix modal des individus. Les Clasticites calculees du trafic en voiture a un accroissement de l’offre de transport public ou au rencherissement du prix du carburant au kilometre sont tres faibles : une croissance annuelle de ce demier de 7 % laisse en effet quasiment inchangee la croissance de la circulation automobile a l’horizon de 2020 en ile-de-France. Ce resultat est vruisem- blublement faux [Papon, 20011, le modble ne pouvant estimer le comportement des conducteurs sur la base d’une rupture de tendance aussi forte (sur les vingt demieres annees, p&ode de calage du modele, le taux annuel de variation des prix du carburant au kilometre ayant CtC de - 0,37 %).

Dans une approche de court a moyen terme, supposant invariables la population et sa repartition dans l’espace, tout comme la repartition des activitts, isolant ainsi l’impact des politiques de transport sur les trafics, la RATP montre que les modifications du service offert en transport public (tarif, vitesse, frequence, qualite) prises isolement ont la aussi des effets relativement faibles [RATP, 19991 : une augmentation de 10 % de la vitesse de tous les modes de transport en commun entraine une augmentation des deplacements en transport en commun de l’ordre de 1,4 % ; toute diminution

de 10 % des temps d’attente de tous les voyageurs du transport en commun entraine une augmentation des depla- cements par ce mode de 1,5 % ; la suppression de la moitie de l’offre de stationnement licite dans le centre de Paris (dix premiers arrondissements) entraine une baisse de 10 % du trafic en voiture particulibre dans le centre de Paris, mais une hausse d’a peine 1 % du trafic du transport en commun, la majoritt des conducteurs changeant de destination. Ces Clasticites du trafic en transport en commun aux variables d’offre ont Cte estimees a partir du logiciel Impact3 [RATP, 19991, outil de modtlisation dtsagrege integrant six mode- les desagreges hierarchiques, qui permet de reconstituer le choix modal et certains choix de destination, ainsi que les changements de mode et/au de destination induits par des modifications de l’offre de service en transport en commun ou en voiture.

Les approches d&rites plus haut ont leur propre perti- nence et coherence. Elles sont toutefois prisonnikres de leur approche marginaliste, au sens oh elles ne peuvent simuler ou projeter le futur que sur la base des tendances et des comportements passes. De meme, la surdetermination des variables structurelles sur la formation du trafic est le fruit de la prolongation des tendances observtes depuis vingt ans, soit la ptriurbanisation des populations et des activites portte par l’usage de la voiture, dont le coat d’usage en francs constants a baisse sur l’ensemble de la p&ode.

Face a ces resultats et constats largement partages par la communautt scientifique, qui legitiment a priori la prudence des objectifs des politiques locales de transport, se degagent alors les questions auxquelles notre travail a Cte consacre : la voiture particuliere est-elle le mode de transport, pour la majorid des individus qui l’utilisent au quotidien, le plus eficace au regard de leurs activites et des temps qu’ils consacrent a se deplacer ? Ott, au contraire, existe-t-il, parmi les usages constates de la voiture par les individus, un reservoir, un marche potentiel pour les modes altematifs que sont la marche, le vC10 ou le transport collectif? Si reservoir, ou potentiel de report modal des usages de la voiture vers des modes altematifs il y a, quelle est sa sensibilite a toute amelioration de l’offre de transport collectif ?

Dans ces questionnements et le travail presente ci-apres, nous ne cherchons pas a justifier l’orientation vers un systbme de transport oh l’usage de l’automobile serait reduit de facon non marginale - d’un tiers a la moitie des vehicules x kilometres port& par la voiture particuliere pour fixer les idles -, tout ou presque ayant deja Ctt tcrit sur les mefaits et les bienfaits de l’automobile en ville. Nous cherchons a tvaluer, au regard de la mobilitt des personnes et de leurs activites quotidiennes, les marges de manceuvre potentielles associees a une politique de reduction de l’usage de la voiture dans les zones t&s urbanisees. Ces marges de manceuvre potentielles sont estimees a l’issue

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dune procedure de report modal des deplacements r&lids en voiture vers la marche, le ~610, le transport collectif, dans le cadre de sctnarios de croissance de l’offre de transport public dont nous avons pousse a dessein certaines dimen- sions (frequences et vitesses) au-de18 de tout realisme, c’est-a-dire sans considerer les cotits de leur developpement ni les micro-urbanismes dans lesquelles elles s’inscrivent.

Le mode de regulation privilegit dans ce travail repose implicitement sur l’idee que les trafics urbains doivent Ctre adapt& aux capacites de charge de la ville, de ses reseaux, de son environnement et que la recherche de cette adequa- tion pourrait reposer sur une distribution a priori equitable des droits a circuler en voiture. Ce type de dispositif peut paraitre particulierement decal6 et ce n’est pas faux. Cela n’enleve rien a l’interet d’en explorer les contours dans le cadre d’hypothbses, dans lesquelles la preference indivi- duelle actuelle pour la voiture n’est conservee que si aucun autre mode de transport ne permet a l’individu de realiser ses activites avec un temps de transport comparable.

Dans cette recherche, notre objectif n’est done pas de definir ce qui conduirait effectivement les automobilistes a diminuer leur mobilite en voiture en se reportant sur des modes reputes plus lents. 11 consiste a dessiner les limites maximales du report modal, du point de vue des conduc- teurs automobiles, sans remise en cause de leurs program- mes d’activites quotidiens et des temps qu’ils consacrent a leurs deplacements. 11 a aussi pour vocation de nourrir le debat sur les effets de leviers tels que celui de la croissance de l’offre de transport public sur la reduction de l’usage de la voiture. Et d’ouvrir celui sur la remise en cause, que suppose a priori le report modal, de la vitesse de deplace- ment, vitesse qui a preside et preside encore a la definition des systemes de transport de notre sock% et a l’etalement urbain que nous connaissons dans nos agglomerations [Wiel, 19991.

Cet article propose dans un premier temps une presenta- tion detaillee de la methodologie et dans un second temps l’evaluation des potentiels de reduction de l’usage de la voiture sur la zone dense francilienne.

2. La mkthodologie

Ayant pour objectif de contribuer au debat que souleve la reduction de l’usage de la voiture dans les zones urbanides, la methodologie que nous avons developpee n’est en rien predictive. Elle releve de l’analyse prospective et s’appuie pour cela sur un cadre d’intelligibilite, capable de mettre en lumibre et en synergie, d’une part les mutations potentielles dans les contraintes de la mobilit individuelle, d’autre part les leviers sur lesquels les politiques au sens large (pouvoirs publics et entreprises de transport) pourraient agir pour tenir

compte dune nouvelle donne [Bieber et al., 1993 ; Crozet et al., 20011.

La nouvelle donne est ici la reduction de l’usage de la voiture en zone urbanisee au profit de modes plus respec- tueux de l’environnement. Les leviers pour l’atteindre sont clairement identifies dans des scenarios d’offre de transport (une trentaine). Comme dans tout travail prospectif men6 pour Cclairer un debat, ces scCnarios sont concus sur des caricatures, tant sur les leviers que sur les regles comporte- mentales de choix modal : ces caricatures reposent toutefois sur des hypotheses mak-ides, permettant ainsi de definir les potentiels maximaux de report modal.

L’efficacite des leviers en termes de reduction potentielle des vehicules x kilombtres en voiture est Cvaluee a l’aune d’une procedure de transfert modal des dtplacements reali- SCS en voiture vers les modes doux (transport public, bicyclette, marche) : la procedure de transfert modal est concue comme un outil de simulation qui, darts ses hypo- theses, constitue le cadre d’intelligibilite’ et en donne par consequent les limites.

Plus precidment la methode repose sur une succession d’iterations d’un modele de simulation combinant des affectations des dtplacements (et plus precistment des boucles de deplacements) r&lids en voiture particuliere a d’autres modes et des reconstitutions de la consistance des offres de transport. L’affectation a l’un ou l’autre des modes alternatifs se fait sur la base de regles d’elimination (pas de marche a plus de 2 km, pas de vtlo a plus de 8 km, pas de transfert si la boucle est vouee a un motif d’accompagne- ment...) ; de contraintes (budget-temps de transport jouma- lier de l’individu, distance de chaque deplacement, exis- tence dune offre de transport public...). Ce systeme de rbgles et de contraintes constitue le cceur de la prockdure de report modal, laquelle examine les potentiels de substitution dans la consistance actuelle et future de l’offre de transport en commun et permet d’identifier les marges de manceuvre realistes au niveau des boucles de d&placements des person- nes dans le cadre d’hypothbses ma&rides.

A chacune des simulations est associe un potentiel de transfert des vehicules x kilombtres realists en voiture sur chacun des modes, ce qui permet de poursuivre alors l’analyse par un travail d’kvaluation, selon differents crite- res, de chacun des scknarios complets (actions sur l’offre en transport collectif combinee avec d’autres strategies) ou partiek (action uniquement sur l’offre en transport collec- tif).

Certains des criteres a Cvaluer sont relatifs a la collecti- vitt, d’autres aux individus potentiellement concern& par les transfer@. D’autres renvoient aux enjeux Cconomiques et notamment les co&s de fonctionnement pour la collectivite du deploiement de l’offre de transport public, d’autres sont d’ordre environnemental comme les enjeux en termes de consommation d’energie, de reduction des emissions de

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CO, et de polluants atmospheriques. Une analyse des conditions prealables a l’acceptabilite individuelle et sociale est aussi menee pour caracteriser les gagnants et les per- dants en temps et en argent et d&ire la repartition de l’effort de chacun dans la strategic de reduction de l’usage de la voiture.

Au final, les futurs possibles sont alors decrits en termes d’objectifs quantifies de reduction de la voiture dans le marche des deplacements quotidiens, en termes de moyens pour les atteindre et de contraintes pour les individus concern&.

Dans ce qui suit nous reprenons pas a pas les elements constitutifs de la demarche proposee, pour en caracteriser les atouts, les finalites et les limites, en commenGant par le choix du terrain sur lequel elle a CtC mise en ceuvre dam ce travail.

2.1. Choir d’un terrain d’analyse

L’efficacite des systbmes de transport est Ctroitement IiCe aux caracttristiques des territoires qu’ils desservent. 11 est pratiquement certain que les couronnes periurbaines des grandes agglomerations, form&es a l’ere de la motorisation de masse, ne sont pas susceptibles, actuellement, de fonc- tionner Cconomiquement saris un recours massif au trans- port individuel. La question est en revanche plus ouverte pour la partie agglomeree des grands bassins. La pression automobile y est certes importante et l’automobile domine sur les deplacements de banlieue a banlieue. Cependant l’anciennete de l’urbanisation n’a pas permis de realiser tous les investissements routiers qui auraient ett necessaires dans la logique du tout automobile et les densites preexis- tantes ont Cte pour l’essentiel conservees, ainsi que parfois une certaine mixite des espaces, si bien que l’usage des modes de proximite y reste assez important. En revanche, dans Yetat actuel des modes de regulation, les parties agglomerees des grands bassins ne peuvent tchapper a une pression automobile croissante : l’espace de circulation et de stationnement lib&e grace au transfert de certains vers le transport public est rapidement utilise par d’autres.

Forts de ce constat, nous proposons comme terrain d’ttude Paris et la petite couronne (departements 92, 93 et 94). Cette zone est caracdrisee par des densites de resi- dence, d’emplois et d’activites tres Clevees, ainsi que le maintien d’une situation de concurrence reelle entre auto- mobile et transport collectif pour l’ensemble de la popula- tion [Massot et al., 2000a]. Toutefois, les budgets-temps individuels joumaliers consacres au transport y sont en moyenne t&s Cleves, ce qui souleve l’hypothbse qu’a mobilite urbaine et programmes d’activites individuels don- nes le transfert de la mobilite realide en voiture vers des modes significativement moins rapides ne concemerait qu’une part infime des trafics actuels. Cette hypothese, tout

comme la mesure de sa validation et de sa resistance dam le cadre de la simulation de politiques de transport, est au cceur de la methodologie que nous avons developpee.

Sur ce terrain, les don&es utilisees dans la procedure sont issues :

l de l’enqdte globale de transport d’ile-de-France de 1991-1992 (EGT 91-92), qui recense la succession des deplacements realists au tours d’une joumee typique par les personnes vivant dans la zone, en sp&ifiant pour chacun le motif, l’origine-destination, le ou les modes mobilises ;

l des graphes p&is decrivant l’offre de transport public et des algorithmes du modele Impact de la RATP, qui, pour chaque d&placement realise en voiture, identifie l’altemative en transport public de plus faible duree.

2.2. Les cinq grands principes de la prockdure de transfert modal

Cette section presente les grands principes et regles de l’algorithme de transfert des boucles de dtplacements voi- ture vers la marche, la bicyclette et le transport collectif, developpe dam cette recherche. Les cinq grands principes de cet algorithme (voir infra) ont Cte poses des 1996 a I’INRETS sous la direction de J.-P Orfeuil (voir [Gallez et Polacchini, 19961). Dam cette recherche et sur la base de ces principes, nous avons construit un systeme de regles et de contraintes, reposant pour nombre d’entre elles sur des hypotheses comportementales de choix modal largement ttaytes dans la litterature scientifique. Ces regles et contraintes, definies avec precision dans le cadre d’une analyse detaillee des caracteristiques de la mobilite des residants de la zone dense francilienne, constituent l’algo- rithme de report modal. Ce demier, integre a un ensemble de programmes, forme un outil de simulation original.

Nous allons maintenant presenter, dam un premier temps les cinq grands principes fondateurs de la demarche, ainsi que les principales regles associees a chacun de ces princi- pes, dam un second temps le deroulement logique de la procedure.

2.2.1. Premier principe La procedure de transfer-t modal est construite sur des

regles de transfert appliquees a l’echelle des boucles de deplacements ou sorties de domicile, une boucle de dtpla- cements &ant definie comme la succession de tous les deplacements entre un depart du domicile et le retour a ce demier, un individu pouvant realiser une ou plusieurs boucles au cours de la joumte.

Ce principe, qui rompt avec des evaluations de report modal developpees a l’echelle de chaque deplacement [Mackett & Robertson, 20001, est fond6 sur l’hypothbse

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largement demontree (voir notamment [Jones, 1990 ; Bou- lahbal, 1995]), selon laquelle le choix modal d’un individu depend des activids qu’il desire realiser au tours de chacune de ses sorties du domicile, voire au COINS de la journee. Reciproquement, on montre que de l’univers de choix modal de I’individu depend le programme d’activites qu’il peut constmire. En clair, la procedure definie dans ce travail prend en compte l’etroite interaction existant entre la possibilite pour un individu d’utiliser tel ou tel mode de transport et l’organisation, la geographic de ses dtplace- ments au tours de sa sortie.

De ce principe decoulent deux regles : l est soumise au transfert toute boucle de deplacement

dont le premier deplacement est realid en mode voiture en tant que conducteur, car, dbs lors que la voiture est choisie pour le premier deplacement d’une boucle, elle est utilisee Cgalement pour les autres deplacements de la boucle dans la tres grande majorite des cas [Min- vieille, 20001 ; dans notre Cchantillon, 93 % des depla- cements des boucles soumises a la procedure sont realids en voiture en tant que conducteur ; est Cgale- ment soumise au transfer? toute sous-boucle ou aller- retour sur le lieu de travail ou d’etudes realide dans la joumte et dont le premier deplacement est effectut en mode voiture en tant que conducteur ; cette regle s’applique quel que soit le mode de transport utilise pour realiser la boucle dans laquelle la sous-boucle est inseree ;

l si l’un au moins des deplacements d’une boucle est jug6 non transferable, cette decision s’etend a tous les deplacements de la boucle ; par opposition, tous les deplacements d’une boucle sont transfer& sur un mode et un seul ; cette regle a tte assouplie, pour permettre le transfert d’une boucle sur deux modes, transport col- lectif et marche ; cet assouplissement conceme les boucles composees de deplacements dont certains sup- portent le transfert vers le transport collectif, tandis que d’autres, plus courts (jusqu’a un kilometre), ne s’y p&tent pas en raison de l’absence d’offre de transport collectif et se voient proposer la marche comme mode de report.

2.2.2. Deuxi&me principe 11 repose sur la skquentialite’ de la procedure, a savoir que

la procedure s’applique successivement a toutes les sorties du domicile de l’individu realisees en voiture particulibre au tours de la joumte.

La procedure d&rite ici admet une exception concernant les individus realisant plusieurs boucles dam la joumee ; pour ces individus, la transfe’rabilite’ des boucles n’est pas testee de facon sequentielle. La procedure est engagee a partir de la boucle la plus longue, pour ne pas saturer a priori

le budget-temps de transport quotidien des individus a mobilite complexe et soutenue.

2.2.3. TroisGme principe 11 Cdicte, comme condition premiere au transfert, le

respect plus ou moins absolu du budget-temps de transport joumalier de i’individu.

Ce principe permet de controler l’eventuelle augmenta- tion de la duke de deplacement consecutive au transfert de la voiture vers un mode repute plus lent et de conserver la coherence observee sur la joumee pour chaque individu entre le temps associe a ses activids et celui associe a ses deplacements. L’augmentation potentielle du budget-temps de transport joumalier est done contrblee, ce controle s’exprimant a travers la definition d’une marge de crois- sance du budget-temps de transport des individus concern& par la procedure. Cette marge, dont le maximum est fix6 a priori, depend du budget-temps initial de l’individu et du budget-temps moyen de sa categoric (douze categories de personnes ont Cte definies par croisement de la profession, du sexe et de l’activite de l’individu). Les contraintes et regles associees au budget-temps (voir encadre ci-apres) ont Ctt definies a partir d’une analyse detaillke de la mobilite des residants franciliens.

La contrainte tdictee sur le budget-temps de transport joumalier de l’individu agit comme un indicateur de vitesse gtntralisee joumalibre de deplacement que l’on peut action- ner dans la procedure pour augmenter le transfert des boucles de deplacements realistes en voiture : accepter ou non la croissance du budget-temps, et de combien, font partie du programme de simulation. Cette regle place au ceur de la methodologie le temps consacre aux dtplace- ments et fait done de la vitesse un Clement cl6 du dispositif. Ceci permet de mesurer son role dans l’efficacite des scenarios et les enjeux individuels qu’elle Porte dans les strategies de reduction potentielle de l’usage de la voiture dans la zone.

2.2.4. QuatriPme principe 11 tdicte comme condition seconde au transfert le respect

de contraintes Cmises sur certaines caracteristiques des boucles realides en voiture, caractkistiques pour lesquelles la voiture est a priori consideree comme le mode le mieux adapt& voire incontoumable. Ces caracteristiques jouent comme critere d’exclusion de la procedure et concement certains motifs de deplacements associes aux boucles, les heures de debut et de fin de realisation de la boucle. C’est ainsi que :

l les contraintes sur les motifs de deplacement conside- rent la voiture comme incontoumable pour le motif achats exceptionnels et hebdomadaires, lesquels sont souvent lourds ; c’est Cgalement le cas pour toute boucle comportant plus d’un deplacement ayant pour

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LESYST~MEDE~GLESETDEC~NTRAINTESSURLEBUDGET-TEMPSJOURNALIER INDIVIDUELESTHIIhARCHISI?

l Un individu dont le budget-temps initial est strictement supdtieur 21 300 min est exclu de la procedure de transfert, ainsi bien Cvidemment que l’ensemble de ses ddplacements. Cette contrainte repose sur l’hypothbse qu’au-de18 d’une certaine duke journal&e, les changements de mode de transport sont peu probables, voire impossibles en respectant les contraintes. l Pour un individu dont le budget-temps initial est deux fois supkieur au budget-temps moyen de sa catCgotie, le transfert ne peut se faire qu’8 budget-temps constant, voire infkieur. On considere dans ce cas et a priori que la contrainte de temps est saturke et done que le budget-temps individuel ne peut augmenter. l Des lors qu’une croissance du budget-temps est possible au sens des deux regles pr6cCdentes et qu’elle est simulde, sa croissance est contr6lCe par les rkgles suivantes : -la marge de croissance du budget-temps d’un individu ne peut exceder 25 % du budget-temps moyen caractkistique de sa catdgorie ; - quels que soient l’individu et son budget-temps avant transfert, la croissance de ce demier ne peut exckder 30 min. Pour ce travail, le seuil maximal de croissance choisi a Ct6 fix6 B 25 %. On peut cependant choisir un seuil de niveau infkieur ou supkieur.

motif l’accompagnement ; si un et un seul deplacement de la boucle est motive par l’accompagnement, celle-ci est soumise a la procedure de transfert ; si la boucle s’avbre in fine transferable, le dtplacement de la (ou des) personne(s) accompagnBe(s) est transf&ee sur le meme mode que le conducteur, sans tenir compte pour elle(s) d’une evolution des conditions de deplacement, dans la mesure oh, dans la plupart des cas, l’enqubte ne nous renseigne pas sur l’ensemble de la mobilite des personnes accompagnees ;

l les contraintes sur l’heure de realisation de la boucle supposent que les boucles r&lides la nuit en voiture en tant que conducteur ne sont a priori pas transferables sur un autre mode, pour des raisons de s&trite et de disponibilid de l’offre de transport collectif.

2.2.5. CinquiPme principe La procedure repose sur le principe d’une segmentation

du marche des deplacements en sous-marches - celui de la marche, du vtlo, du transport collectif - permettant de prendre en compte leur compttitivite potentielle en termes de distance et de temps.

Le transfert d’un dtplacement automobile vers l’un des trois modes altematifs retenus depend de la distance par- courue. Plusieurs classes de distance ont et6 definies a partir d’une analyse de l’ensemble des boucles de ~‘EGT ayant pour mode principal la marche et le ~510 (voir encadre ci-apt&).

2.2.6. Le d&roulement de la prockdure Des lors ces principes posts, la procedure se deroule

comme SLU la Fig. 1.

Les contraintes sur le budget-temps individuel &ant premieres, le transfer-t de la ou des boucles de deplacements d’un individu n’est examine que si elles sont respecdes. En consequence, si l’une ou l’autre des contraintes sur le budget-temps et des contraintes sur les motifs et heures de realisation de la boucle n’est pas respectee, alors la boucle de I’individu en voiture particuliere comme conducteur n’est pas soumise au transfert.

Si les contraintes sur le budget-temps et celles sur les motifs et heures de realisation de la boucle sont toutes respectees, alors la boucle en voiture particulibre est sou- mise au transfer-t selon la sequence suivante.

l La nature du premier mode de transfer? test6 (marche, vC10 ou transport collectif) depend de la distance totale parcourue dans la boucle ; la duke totale de la boucle apres transfert est estimee a partir de la vitesse moyenue du mode test&

l Si la croissance du budget-temps apres transfert est inferieure au seuil fix6 a priori, alors la procCdure aboutit, le transfert est possible et le budget-temps est modifie en consequence.

l Si la croissance du budget-temps est superieure au seuil fix& on teste le transfert vers un mode plus rapide (le velo s’il s’agissait initialement d’un transfert vers la marche, le transport collectif s’il s’agissait d’un transfert sur le ~510). Si la croissance du budget-temps est inferieure au seuil fix6 a priori, alors la procedure aboutit, le transfert est possible et le budget-temps est modifie en conskquence.

Si aucun mode ne permet de contenir le budget-temps, alors le transfert a Cchout pour l’ensemble des deplace- ments de la boucle.

M.-H. Massot, J. Armoogum / Recherche Transports S.kuritd 77 (2002) 259-280 265

Le transfert vers la marche Sur la base des valeurs de distance et de duree d&A&es pour la marche, nous avons retenu les valeurs de la borne superieure du troisieme quartile pour Ctablir le seuil de distance et la vitesse de d&placement associes a ce mode. La rbgle est simple, elle rend compte de l’homogeneite des distances et des vitesses constatees dans l’echantillon, quelle que soit la dimension consideree (age de la personne, motif du deplacement.. .). Toute boucle de longueur inferieure ou Cgale a 2 km peut Ctre transferee vers la marche ; la vitesse associee aux dtplacements d’une boucle transfer& sur la marche est de 35 km a l’heure.

Le transfert vers le v&o Les deplacements realids a v&o n’ont pas la meme homogeneite que les precedents : malgre les petits effectifs dont nous disposons, nous avons consider6 trois classes de distances differenciant l’usage du vC10 pour le motif travail, le motif achat et les autres motifs ; a ces classes de distances sont associees des vitesses Cgalement differentes. Les valeurs des classes de distance retenues correspondent comme pour la marche aux valeurs de la borne superieure du troisieme quartile de la distribution observee. Toute boucle de longueur superieure a 2 km et inferieure a 11 km peut porter un transfert vers le ~610, si son motif est travail ou etudes ; la vitesse associee aux deplacements d’une boucle transferee est ici de 11 km a 1’ heure. Toute boucle de longueur strictement superieure a 2 km et inferieure a 3 km peut porter un transfert vers le ~610, si son motif n’est pas le travail, ni les achats ; la vitesse associee aux deplacements d’une boucle transferee sur le vC10 est alors de 8 km a l’heure. Toute boucle de longueur superieure a 2 km et inferieure a 8 km peut porter un transfert vers le ~610, si son motif principal reside dans les achats ; la vitesse associee aux deplacements d’une boucle transf6rt% est ici de 5 km a l’heure.

Le transfert vers le transport collectif Toute boucle excedant les seuils de distance preddemment definis peut porter un transfert vers le transport collectif. Le transfert vers les modes collectifs (autobus, metro, RER, train SNCF) est Cvidemment contraint par l’offre. Le niveau d’offre, qu’il s’agisse de l’offre de reference (1990) ou de l’offre scCnarisCe (projetee en 2010 par exemple), est apprtcit indirectement a travers la reconstitution des trajets et des temps en transport collectif des deplacements realises en voiture. Ces temps sont des temps de transport theoriques, reconstitues par le modele Impact de la RATP a partir de l’offre d&rite sur les graphes p&is des reseaux ; la recherche du trajet en transport collectif se fait en considerant : - les gares, les stations ou les art&s d’autobus sur lesquels s’effectuent les rabattements et les diffusions situ& a moins de 2000 m pour une gare ferree, 1500 m pour une station de metro, 1200 m pour le bus de banlieue, 700 m pour le bus parisien ; tout deplacement en voiture particuliere dont l’origine ou la destination se situe a des distances superieures a celles indiquees plus haut mene a une qualification suns alternative en transport collectif ou suns offi-e de transport collectif; - l’algorithme donne la solution transport collectif la plus favorable en temps ; nous obtenons en sortie les temps et les distances d’acds, de diffusion, les temps d’attente et de parcours, le nombre et la duree des correspondances, le nombre et le type des modes mobilises (bus + rail, bus + metro par exemple, metro) ; les temps d’accbs au reseau collectif (et a destination) sont calcules sur la base d’une vitesse de 3 km a l’heure (marche a pied).

266 M.-H. Massot, J. Armoogum / Recherche Transports Skcurite’ 77 (2002) 259-280

I I

non

~,/

oui

Respect des contraintes sur les motifs et des heures de r&alisation de la boucle en voiture par&M&e ?

I non/ I

I DISTb~2km? I

Fig. 1. Proctdure simplifit?e de transfert des chaines de dkplacements des individus. Potentiel dalisable : la procedure de transfert s’applique stquentiellement, pour chaque individu concern& 9 toutes les sorties du domicile (appelkes ici boucles en voiture particulikre). DISTb est la distance totale de cette boucle.

2.3. Scharios pour une rkduction potentielle de la place de la voiture dans la mobilitt! locale francilienne

La contrainte Cdictee sur le budget-temps joumalier de l’individu agit comme un indicateur de vitesse gCn&alisCe joumalibre de deplacement, que l’on peut actionner dans la procedure pour augmenter le transfer-t des boucles de deplacements r&lides en voiture : accepter ou non la croissance du budget-temps et de combien, font partie du programme de simulation. Au-dela de ce levier sur le budget-temps individuel, l’augmentation du potentiel trans-

ferable repose sur la simulation d’un certain nombre d’ac- tions, qui, combinees, constituent la base de la construction des scCnarios portant la reduction potentielle de l’usage de la voiture particuliere (nous avons r&lid une trentaine de simulations dans cet exercice).

Dans le paragraphe qui suit nous presentons les quatre actions (ou leviers), ainsi que leur mise en aeuvre, drastique pour certaines, visant directement a augmenter la vitesse des alternatives modales a la voiture pour faciliter les Cventuels transfer& et determiner les maxima des effets d’offre sur le report modal.

M.-H. Massot, J. Armoogum /Recherche Transports Sdcuritd 77 (2002) 259-280 261

2.3.1. Premier leviel; ame’liorer la consistance de E’offre de transport public

l Ameliorer les vitesses de parcours pratiquees sur le reseau routier : en effet la vitesse de deplacement &ant une variable clC de la procedure, il apparait pertinent de tester des vitesses suptrieures la oti elles sont les plus faibles (les autobus) et ce d’autant plus que le jeu de la simulation et des transferts lib&-e progressivement quelque peu la voirie. L’augmentation des vitesses est introduite de fait par les transformations en sites propres de lignes rout&es et les creations ou prolon- gements de lignes ferrees. Elle est aussi introduite au niveau de l’ensemble du reseau routier : la vitesse commerciale est portee a 15 km a l’heure approxima- tivement pour l’ensemble des lignes parisiennes, a 20 km a l’heure pour celles desservant la proche banlieue et a 25 km a l’heure pour celles de la grande banlieue. La mesure est drastique. Elle mesure le potentiel d’une augmentation moyenne de la vitesse du reseau routier de 35 %, soit des vitesses qui pourraient Ctre pratiquees saris aucune ghe h la progression des autobus, en respectant, d’une part les impCratifs de service (s’arr&er aux arrh, dkposer et prendre les usagers), d’autre part les impe’ratifs du code de la route (s’arrher auxfeux). Cette mesure est notee (15,20,25) dans les scCnarios oti elle est simulee.

l Reduire les intervalles de passage des vehicules en heures creuses, dont on sait qu’ils sont tleves notam- ment en banlieue proche. La mesure simulke est tout aussi brutale que la prectdente et s’applique a toutes les definitions de l’offre simulees, sauf a l’offre de refe- rence (mise en ceuvre en 1990 et notee HP-HC 90). La mesure simulee consiste a generaliser les intervalles de passage des vehicules de transport public dtfinis en heure de pointe a l’ensemble des services de la joumee. Les mesures sont notees HP 90, HP 99, HP 2010, en reference respectivement aux heures de pointe pour l’offre 1990, 1999 et 2010.

l l&rgir la couverture spatiale de la zone par le reseau : des creations et prolongements de lignes de metro, de

Ces actions sur l’offre sont traduites dans six definitions de l’offre de transport public. 11 s’agit de (HP 90), (HP 99), (HP 99 + Mobilien), (HP 99 + Mobilien +15,20,25), (HP 2010 + Mobilien), (HP 2010 + Mobilien + 15,20,25). S’y ajoute la definition de reference (offre de transport public heure de pointe/heure creuse en 1990) node (HP- HC 90).

Les ameliorations portees dans les differentes offres de transport public sirnukes apparaissent non marginales, se situant globalement entre + 30 % et + 45 % de places x kilometres annuelles offertes (PKO) par rapport au sctkrio de reference (HP-HC 90) (Tableau 1). Globalement la crois- sance de l’offre hors SNCF est ltgerement superieure a la croissance de l’offre de transport sur l’ensemble de la region (SNCF comprise).

Analyses par reseau, les taux de croissance relatifs les plus forts se trouvent sur le tramway (qui reste marginal

Tableau 1 Estimation globale de l’evolution de l’offre de transport propre a cbaque scenario

RER et de tramway, ainsi que des restructurations de l’offre rout&e en banlieue sont simules. L’elargisse- ment spatial de l’offre correspond aux creations et prolongements de lignes, notamment ferrees, mis en aeuvre au tours des anntes 1990 par la RATP et la SNCF (definitions de l’offre notees HP 99) et a celles propo- sees dans le cadre des douzibme et treizieme contrats de plan a horizons 2006 et 2010 respectivement. L’offre proposee dans le cadre des reflexions developpees pour le Plan de deplacements urbains d’ile-de-France Cla- bore au debut de l’an 2000 (HP 99 + Mobilien) s’ap- puie sur les graphes de 1999 et consiste en un renfor- cement du service de quelque soixante lignes d’autobus, dites lignes d’armature, au sens oti elles sont aujourd’hui les lignes portant les trafics les plus tleves : vingt lignes sont parisiennes, tandis que quarante des- servent la banlieue. Pour ces lignes, la vitesse est portee approximativement a 15 km a l’heure pour les lignes parisiennes et a 20 km a I’heure pour celles desservant la banlieue, les intervalles de passage des autobus en heure de pointe &ant homogtntists a 4 min pour les lignes de banlieue, la ou bien souvent ils Ctaient de 10 min.

Scdnario Places x kilometres annuelles offertes

Total (en milliards) Croissance (en %) Total hors SNCF (en milliards) Croissance (en %)

HP-HC 90 106.7 46.2 HP 90 137,s + 29,0 59,4 + 29 HP 99 1425 + 33,5 63,8 + 38 HP 99 + Mobilien 143,4 + 34,4 64,7 +40 HP 99 + Mobilien + 15,20,25 143,4 + 34.4 64,7 +40 HP 2010 154,2 + 445 68,9 +49 HP 2010 + 15,20,25 154,2 + 445 68,9 +49

(*) 11 s’agit d’une croissance relative CvaluCe pour cbaque sc&rio par rapport a la reference, respectivement 106.7 milliards et 46.2 milliards de places x kilometres offertes.

268 M.-H. Massot, J. Armoogum / Recherche Transports S&uitt? 77 (2002) 259-280

Tableau 2 Estimation des places x kilomhres offertes ammelles par rheau pour cbaque schrio d’offre de transport public

scenario Places x kilomhres annuelles offertes (en milliards)

M&o RER Bus Zi Paris Bus en banlieue SNCF Tramway Total

HP-HC 90 22,5 14,8 2.6 63 60,5 0 106,7 HP 90 29.0 19.1 3.1 8.3 78,0 0 137,5 HP 99 29,5 21.9 2.9 993 78.7 093 142.5 HP 99 + Mobilien 29,5 21,9 23 10,2 78,7 0,3 143,5 HP 2010 32,0 21,9 2,9 W 85,3 234 154,3

Source : DCpartement du dheloppement, RATP, 2000

dans l’offre totale) et l’offre du rkseau d’autobus de banlieue (+ 61 %, HP 2010), suivis par les amdliorations sur le rkseau RER (+ 48 %, HP 2010), le m&o et la SNCF (+ 41 %, HP 2010). Les bus parisiens ferment la marche avec une croissance relative comparativement faible (+ 11 %, HP 2010) (Tableau 2).

L’analyse plus structurelle des variations de l’offre mon- tre que l’alignement gCnCralisC du niveau de service des heures creuses sur celui du service de pointe Porte le gros de la croissance de l’offre estimke : ainsi la gtntralisation du niveau de service d’heure de pointe sur le graphe de rkfkrence 1990 (HP-HC 90) augmente de 29 % les PKO sur l’ensemble de la rkgion.

Dbs lors que le service de pointe est gCn&alisC, on constate que les autres amCliorations sont beaucoup moins importantes en termes relatifs : ainsi le passage du scknario (HP 90) au sctnario (HP 99) se traduit par une augmenta- tion relative des PKO de 3,6 % ; cette augmentation est de 0,6 % entre le scknario (HP 99) et le scknario (HP 99 + Mobilien) ; elle est de 7,5 % entre le scknario (HP 99 + Mobilien) et le scCnario (HP 2010) (Tableau 1). Les amkliorations progressives et structurelles (i.e. hors gkntralisation des frkquences d’heures de pointe) que nous simulons portent une croissance maximale des PKO de 12 % - croissance relative des PKO entre les scknarios (HP 90) et (HP 2010). 11 ne s’agit 18 toutefois que d’kvolu- tions quantitatives, ne prenant pas en compte les amkliora- tions des vitesses.

2.3.2. Deuxitme levier, amkliorer 1 ‘accessibilite’ temporelle b 1 ‘offre de transport public

On simule pour cela des stratkgies de rabattement en voiture ou B v1510 sur le transport collectif.

L’tlargissement spatial de la couverture de la zone participe de fait g l’anklioration de l’accessibilitt indivi- duelle au r&eau. Systimatiser dans la prockdure des rabat- tements en voiture et A vC10 pour acckder au rkseau de transport collectif a le m&me but et permet de mesurer le potentiel de ce type de mesure sur la rkduction du trafic en voiture particuli&-e. Pour rendre cette action pertinente du point de vue des comportements individuels, nous avons

Cnonct un certain nombre de conditions et d’hypothbses sur les boucles, les dkplacements, les modes de rabattement.

La contrainte premibre pour qu’une stratkgie de rabatte- ment soit appliquke ti une boucle voiture soumise g un transfert vers le transport public est que la station ou gare de dipart du premier ddplacement de la boucle proposde par l’altemative en transport collectif soit identique B la station ou gare d’arrivke du demier dkplacement de la boucle. Cette contrainte considkre que, dbs lors que l’on accbde en transport public avec sa voiture ou sa bicyclette, il est ntcessaire de revenir la chercher pour regagner son domi- cile avec. 11 n’y a pas dans cette action de gtnkralisation de services de voitures ou vtlos partag&, que l’on pourrait prendre et laisser B sa guise. Cette contrainte limite expli- citement 1’amClioration des temps de rabattement et de la diffusion du transport public aux premier et demier dCpla- cements de la boucle.

La seconde contrainte Cmise conceme le mode de rabat- tement proposk par l’algorithme, lequel va dkpendre expli- citement de la distance d’accbs au transport public.

Les boucles potentiellement concemCes par un rabatte- ment en voiture sont les boucles dont I’origine du premier dkplacement se situe entre 2 et 8 km d’une gare SNCF ou d’une station de tramway, de m&o ou de RER IocalisCe en dehors de Paris. En clair, les rabattements sur le transport public en voiture ne sont simulks que dans le cadre d’un accbs au riseau fern+ et ne sont pas envisagts dans Paris intra-muros.

Si transfert il y a, les dkplacements de la boucle ont pour mode principal le mode fern5 concern& associk au rabatte- ment voiture (transport collectif + rabattement voiture) ; les kilomktres du rabattement en voiture restent affect& & la voiture, les autres &ant transf&& sur le transport collectif.

Les boucles potentiellement concemkes par un rabatte- ment B vC10 sont les boucles dont l’origine du premier diplacement se situe entre 500 m et 2 km d’un point d’entree du reseau, quel que soit le mode (autobus, tramway, m&o, gare SNCF) et quelle que soit la localisation du point d’entrke dans l’espace francilien.

Si transfert il y a, les dbplacements de la boucle ont pour mode principal le mode de transport collectif concern&,

M.-H. Massot, .I. Armoogum / Recherche Transports .%curite’ 77 (2002) 259-280 269

associe au rabattement velo (transport collectif + rabattement ~510) et les kilometres du rabattement vC10 sont transferes sur le velo.

2.3.3. Troisitme levier remise en cause des criteres d’exclusion pour les motifs d’achats hebdomadaires et d ‘accompagnement

Cette action vise a reintroduire dans la procedure les boucles pour les motifs achats exceptionnels ou hebdoma- daires et accompagnement, a priori exclues, et permet, comme pour les autres actions ou leviers, d’etablir le potentiel de reduction du trafic automobile lit a ces motifs reputes difficiles pour le transport collectif et de dimension- ner le role des services de mobilite ad-hoc qu’il faudrait creer en consequence (services de livraison a domicile par exemple).

Techniquement, ceci nous conduit simplement a casser le filtre introduit darts la procedure pour exclure ces boucles de la simulation ; comme pour toute autre boucle, les dtplace- ments des passagers accompagnts identifies dans ces bou- cles sont transfer& sur le m&me mode que celui affect6 au conducteur.

2.3.4. Quatrieme levier, adapter a la marge le comportement des individus aux nouveaux horaires

L’augmentation des frequences, des dessertes, la creation de lignes sont autant de mesures qui modifient tant le maillage des reseaux que les horaires de passage des vehicules de transport public ; elles sont autant de nouveau- tCs non integrees dans le comportement des individus, notamment la connaissance des horaires. Notre action consiste done a mettre en coherence les comportements des individus avec les nouveaux horaires que supposent les nouveaux graphes du service. Pour cela, nous avons sup- post pour les individus concern& un temps d’attente maximum de cinq minutes du service de transport pour realiser le premier deplacement, et seulement le premier, de sa boucle. Cette action consiste a ajuster a la marge les comportements des individus aujourd’hui en voiture a la structure de I’offre en transport public, cette demitre &ant supposee par ailleurs d’une fiabilite et d’une regularit totales.

2.3.5. Mise en place des scenarios complets de simulation Les scenarios de simulation ont et6 concus de maniere a

s’emboiter rigoureusement les uns darts les autres pour Cvaluer precisement et successivement les potentiels de transfer-t associes a chacune des actions. Les actions de base de la simulation &ant nombreuses, nous avons choisi de les hierarchiser en prenant pour entree principale les actions sur la definition de l’offre de transport public.

Ainsi pour chacune des sept definitions d’offre de trans- port public (done scenario de reference (HP-HC 90) com-

pris), nous simulons et Cvaluons quatre sous-scenarios de transfert a l’aune de la procedure de transfert ; ces quatre simulations consistent respectivement en :

l une evaluation du potentiel transferable uniquement a partir des modifications de l’offre de transport public, et uniquement de l’offre ;

l une evaluation du potentiel transferable lie aux modi- fications de l’offre de transport public et a l’introduc- tion des strategies de rabattement en voiture ou a ~610 sur le transport public, sachant qu’ici la possibilite de s’adapter aux nouveaux horaires est donnee aux indi- vidus pour leur premier deplacement ;

l une evaluation du potentiel transf&able lie a des modifications de l’offre de transport public et a la levee des contraintes sur les motifs achats exceptionnels et accompagnement, sachant que pour les boucles concer- nees par ces motifs, on introduit ici la possibilite de se rabattre sur le transport collectif de facon plus optimale et d’adapter a la marge son heure de depart du domicile en fonction des horaires du transport collectif ;

l une evaluation globale et complete du potentiel trans- ferable, au sens oii toutes les actions sont considerees.

Sur la base de cette construction, chaque scenario asso- ciant une offre de transport public h l’ensemble des autres actions est denomme scenario complet : nous travaillons ainsi sur sept scCnarios complets, auxquels des marges de croissance des budgets-temps ont Cte associees par ailleurs.

2.4. Mise en perspective methodologique de l’approche

Nous finirons cette presentation methodologique en pre- cisant un certain nombre d’hypothbses sptcifiant la nature du travail et ses limites.

L’originalite de la m&ode tient a la procedure de report modal developpee.

Un de ses points forts vient sans nul doute de ce qu’on travaille au niveau des boucles individuelles de deplace- ments, niveau d’analyse le plus pertinent pour aborder les choix modaux. Un autre de ses points forts vient de ce qu’on place la vitesse en critere absolu et premier du report modal, en faisant l’hypothese que tout individu choisit toujours le mode le plus rapide pour realiser son programme d’activids et inversement qu’il construit ses programmes d’activites selon son acces a la vitesse. Comme dit precedemment, cette hypothese permet de rester dans un principe de realite face a des croissances potentielles de temps de transport dues a des transfer& sur des modes plus lents. Elle n’en demeure pas moins forte au niveau comportemental et demande a &tre validee ; de fait, la procedure telle que definie permet d’en tester la portee dans les comportements observes des Franciliens conducteurs et d’en Cvaluer la resistance dans le cadre de scenarios d’offre mettant en ceuvre des vitesses beaucoup plus fortes. Explicitement,

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Cmettre une telle hypothbe permet d’analyser le role de la vitesse dans les comportements de mobilite dans des espa- ces reputes congestionnes.

Les points faibles proviennent d’une hypothese compor- tementale, qui est la principale limite de la procedure de report modal telle qu’enoncee : en effet, celle-ci suppose invariants les programmes d’activids des individus, ce qui, en termes comportementaux, a pour effet de :

l nier les effets retroactifs du changement de mode sur les programmes d’activids individuels ;

l nier done que toute amelioration de l’offre de transport a des effets sur ces mCmes programmes et leurs lieux de realisation [RATP, 19991, [Morellet, 20021 ;

l nier que des effets importants des modifications de l’offre de transport se situent sur l’induction de trafic, a population constante [Morellet, 20021.

Le caractere simplificateur de cette hypothbse est indis- cutable, suffisamment &aye dans la litterature pour ne pas &tre reconnu ici.

D’autres hypotheses explicites m&tent d’etre Cnoncees ici. En effet, hormis les scenarios d’offre au sens general et leurs implications sur les caracttristiques de la mobilite quotidienne des individus concern& par le transfert, nous considerons Cgalement comme invariants :

l la population et les activites de la zone d’etude, dans leurs effectifs et leurs localisations ;

l les techniques de transport au sens fort du terme (modes de propulsion des moteurs, gamme de vehicu- les) ;

l les co&s unitaires d’usage des modes individuels aussi bien que collectifs.

Certains verront dans ces hypotheses, qu’elles soient ou non comportementales, une limite dans une demarche qui se veut prospective. 11 nous semble cependant que prendre en compte l’ensemble des critiques, bien que recevables, nous conduirait sur un autre terrain que celui sur lequel nous avons choisi de travailler : celui d’une prospective du p&sent permettant d’ouvrir le debat en dimensionnant des enjeux et des potentiels de reduction de la place de la voiture sur la base de comportements observes et d’outils de politiques. Nous nous situons pour notre part dans une problematique d’identification de marges de mamnuvre potentielles d’actions et il nous semble de ce fait peu prejudiciable, voire m&me utile, de caricaturer quelques traits de comportement et d’amtlioration de l’offre pour delimiter les valeurs maximales du report modal.

3. Les principaux dsultats

Les resultats des simulations menees dans ce travail montrent que les marges de manceuvre a la disposition des individus ne sont pas nulles, dans cette zone de l’ile-de-

Tableau 3 RBpartition modale des dkplacements et des traf~cs dans la zone dense francilienne dans l’dtat de rLf&ence

Mode

Marche Bicyclette Deux-roues motoris& Voiture comme passager Voiture comme conducteur Taxi Transport collectif Non-rbponses Total

DCplacements VChicules x kilom&res (en %) (en %)

35.5 36 0,4 02 l,O 1.1 7,8 7,5

28,2 35,8 0,4 0,4

26,3 50.7 0,4 097

100,o 100.0

D’aprBs [DFmF, 19951

France ou la marche, Ie velo et le transport public occupent deja dans l’etat de reference (EGT 91-92), c’est-a-dire avant tout transfer& une place majoritaire : 62,2 % des deplace- ments et 54,5 % des circulations (Tableau 3).

3.1. La formation des potentiels de transfert et de leurs enjeux

3.1.1. Un potentiel initial de r&duction de 4 % de la circulation automobile dans la Zone

A l’issue de la premiere iteration, soit sur la base des usages de la voiture observes en 1991, a offre de transport public et coat constants pour la collectivite (ceux de la reference HP-HC 90) et marge de croissance du budget- temps nulle, on Ctablit que 8 % des conducteurs de la zone dense francilienne auraient pu realiser autrement qu’en voiture et a budget-temps constant, voire inferieur, leur mobilite quotidienne : 8 % des conducteurs, soit quelque 150 000 conducteurs, qui ont done choisi la voiture pour d’autres raisons que la vitesse de deplacement (le gain moyen est Ctabli a 20 mm). 11s n’ont pas non plus, dans leur grande major@ choisi la voiture pour des raisons Ccono- miques : plus de 80 % d’entre eux verraient en effet leur budget monetaire joumalier diminuer de 24 francs en moyenne, diminution du budget estime par la difference entre le coQt marginal d’usage de la voiture (carburant et stationnement) et le cotit de la mobilite transferee sur le velo, la marche (co& pris Cgal a zero) et le transport public (coQt estime grace aux tarifs pratiques sur le reseau de transport collectif francilien) [Massot et al., 20021. Ces personnes ont done choisi la voiture pour son confort, son habitacle individuel, par meconnaissance des offres altema- tives ou par manque de confiance dans ces demibres.. .

Ces conducteurs, dans l’etat de reference, portent en potentiel une reduction de l’ordre de 4 % des circulations automobiles sur la zone : on a ainsi mesure et compris, dans la zone dense francilienne, et toutes chases tgales par ailleurs, qu’atteindre les objectifs du plan de d&placements urbains de la rkgion he-de-France [DREIF, 20001, saris

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degradation de la qua&e’ de service de l’automobile await ete’ potentiellement possible a offre et coat constants et avec une amelioration des vitesses de d&placement par les candidats potentiels au transfer-t. On a aussi compris que la reduction consequente de l’usage de la voiture ne repose en potentiel que t&s marginalement sur des usages de la voiture irrationnels en termes de temps, a programmes d’activitts donnes : de faGon symetrique on Ctablit en effet que 92 % des conducteurs n’auraient pas pu realiser autre- ment qu’en voiture leur programme d’activites quotidien sans croissance de leur budget-temps. Des chercheurs du Laboratoire d’economie des transports, appliquant la metho- dologie developpee B I’INRETS, ont montre que ce pourcen- tage est plus faible dans l’agglomeration lyonnaise : seuls 84 % de conducteurs n’auraient pas pu rtaliser leur pro- gramme d’activites quotidien autrement qu’en voiture sans remettre en question leur budget-temps [Bonnel, 20001. On constate ainsi que, plus les contraintes d’usage de la voiture au sens large (congestion et irregularite des temps de parcours, problbmes de stationnement.. .) sont fortes, moin- dres sont, relativement, les comportements irrationnels d’usage de la voiture au sens des temps de deplacement.

relever de la fameuse chasse aux petits deplacements, pour lesquels la marche et le vC10 sont efficaces, celle-ci se soldera par des reductions assez marginales des circulations automobiles. Dans l’agglomeration lyonnaise, et sous les memes hypotheses, le marche du potentiel transf&able est structure trbs differemment : si la marche n’est pas plus impliquee qu’en zone dense francilienne, le v&lo est poten- tiellement le premier mode concern& absorbant 64 % du potentiel des boucles voiture et 41 % des vehicules x kilometres transfer& On voit par la que la problematique du report modal et de la reduction de la circulation auto- mobile relbve de strategies qui se situent sur des Cchelles differentes dans l’agglombation lyonnaise et en zone dense francilienne.

A l’issue de cette premiere iteration, tout l’enjeu de notre travail, et son inter&, est de montrer comment s’elargit le potentiel transferable au regard des actions que nous avons definies.

L’autre resultat important de cette premiere iteration conceme l’affectation modale des deplacements potentiel- lement transfer& : a offre de transport public et budget- temps des individus constants, le transport public absorbe 66 % des boucles de deplacements potentiellement transfe- rees et 95 % des vehicules x kilombtres associes a ces dernieres. La marche - dont le marche conceme par hypothbse les boucles de distance inferieure a 2 km -, ne touche que 8 % des boucles potentiellement transferees et le velo - dont le marche est situ6 sur des boucles voiture de distance comprise entre 2 et 8 km -, en touche 26 %. Ces deux modes individuels ne portent que 5 % de la reduction de la circulation automobile (exprimee en vehicules x kilometres). A l’evidence, dans la zone dense francilienne, si la problematique du report modal peut effectivement

3.1.2. Les marges de manozuvre associees a une augmentation des budgets-temps joumaliers de transport

Toujours sous la definition de l’offre de transport public de reference (HP-HC 90), on montre que toltrer a priori une croissance cr des budgets-temps des individus de 25 % double le potentiel transferable (Tableau 4) et Porte un potentiel de reduction de la circulation automobile de 9 % ; vingt pour cent des conducteurs de la zone sont concern& par un transfert de tout ou partie de leur mobilite, dont un peu plus de la moitie verrait son temps de transport aprts transfert augmenter (en moyenne de 12 %, soit + 13 min), alors que 43 % gagneraient du temps (- 20 min en moyenne).

Permettre une croissance o de 100 %, soit un doublement des budgets-temps, fixe le potentiel transferable autour de 38 % des boucles automobiles initiales et mene a une reduction de la circulation de 20 % des vthicules x kilome- tres initiaux (Tableau 4). Entre l’hypothbse raisonnable

Tableau 4 Sensibilite du potentiel transferable a la contrainte portee sur la marge de croissance du budget-temps individuel dans le cadre de la definition de l’offre de reference (HP-HC 90)

Croissance toleree sur le budget-temps a

Boucles voiture particuliere en Bchec selon le type d’echec

kchec non lie Inadkcptation de l’offre proposte Pas d’offre de en regard du budget-temps transport collectif i i l’offre

Boucles potentiellement

transferables

Total

Boucles soumises a la procedure

0

0 0,25 0,50 0,75 1

Boucles (milliers) 1 083 238 690 162 2 173

Pourcentages (%) 49.7 11,o 31,s 7s 100 41,7 10,2 31,8 16.3 100 33,0 10,o 31,8 252 100 25,5 9,9 31,8 32.8 100 20,8 9,9 31,7 37,6 100

* La mention Pas d’offre de transport collectif renvoie directement a la definition de l’acces a ce mode dans le modele Impact de la RATP. D’apres [DREIF, 19951

272 M.-H. Massot, J. Armoogum / Rechemhe Transports S&x&i 77 (2002) 25%280

(a = 0,25) et celle plus irrealiste du doublement des temps de deplacement pour certains, le potentiel de transfert modal croft lentement, sans pour cela epuiser le problbme puisque 80 % de la circulation restent attaches a l’automobile dans l’hypothese la plus haute de croissance des budgets-temps individuels.

La croissance mesuree du potentiel transferable est redevable pour une part non negligeable (32 %) d’echecs lies aux motifs et heures de realisation des boucles automo- biles considerees ici comme inadapdes a tout autre mode. Pour une autre part, non moins ntgligeable, elle est due aux vitesses actuellement pratiquees des boucles qui demeurent en Cchec a l’issue des premieres iterations (a compris entre 0 et 0,25). A l’issue de ces demibres, on constate en effet que le gisement des comportements irrationnels d’usage de la voiture au regard des vitesses des alternatives proposees est quasi CpuisC et ne peut porter une croissance des transferts sans mettre en scene d’autres leviers : les boucles en Cchec a la procedure portent ainsi des distances (25 km) et des vitesses (22 km a l’heure), presque deux fois supe- rieures a celles des boucles ayant reussi le transfert (respec- tivement 14 km et 12 km a l’heure), les boucles en Cchec &ant par ailleurs Cgalement plus complexes, c’est-a-dire comportant un nombre de deplacements nettement superieur a celui des boucles transf&ables.

celle observee dans ~‘EGT 90-91, alors m+me que l’offre de transport collectif simulee propose une croissance de 44 % des voyageurs x kilometres par rapport a l’offre de refe- rence (HP-HC 90). Cet effet mesure traduit le fait que 75 % des transfer& potentiels des boucles voiture comme conduc- teur a I’issue du scCnario (HP 2010 + Mobilien + 15,20,25) sont deja presents a partir de la definition de l’offre de reference.

3.1.3. Les potentiels port& par les renforcements de l’ofre de transport public

L’analyse preddente a montre que la croissance force- ment limited que l’on peut imposer au budget-temps ne permet pas d’atteindre les 30 ou 50 % vises de reduction des trafics initiaux port& par la voiture. 11 apparait alors necessaire d’accompagner l’effort sur les budgets-temps (a = 0,25) par d’autres strategies et notamment celle d’une politique volontariste de l’offre de transport public.

Les simulations rktlisees a partir de renforcements consequents de l’offre de transport public (sous l’hypothese a = 0,25) donnent des resultats assez differencits selon les definitions de l’offre.

Le premier constat est l’effet tres mesure de l’augmen- tation de l’offre de transport collectif sur les potentiels de report modal. On constate en effet a l’issue de la procedure me&e sur le scenario d’offre le plus consistant (HP 2010 + Mobilien + 15,20,25) que les reductions poten- tielles de la circulation automobile representent 13 % de

En termes de voyageurs x kilometres transf&t$ l’effica- cite des actions simulees apparait plus grande, le rapport entre les transferts issus du scCnario de reference et ceux issus du scCnario le plus consistant &ant de 67 %. Les ameliorations de l’offre de transport public permettent ainsi de transferer des deplacements plus longs (Tableau 5).

Au dela de ces effets globaux, les analyses permettent de mesurer le potentiel des differentes actions sur l’offre et de dessiner les contours d’une offre plus a mSme d’augmenter les transfer& dans la zone d’analyse, ceci dans le cadre de la procedure et de sa valeur centrale, la vitesse. Quelques resultats parmi les plus marquants sont donnes ci-apres.

l L’alignement des niveaux de service du transport col- lectif en journee sur ceux de l’heure de pointe ne conduit qu’a une augmentation mineure du taux de succes de la procedure. En effet, le differentiel de boucles transferees entre le scenario de reference (HP- HC 90 et le scCnario (HP 90) est d’une vingtaine de milliers, ce qui Porte le taux de transfert des boucles a 17,4 % au lieu de 16,2 % (Tableau 6).

l Les ameliorations successives de la couverture spatiale de la zone telles qu’envisagees produisent des effets plus forts que ceux de l’amelioration de la couverture dans le temps. Les restructurations de r&.eau, les creations de lignes de transport public en site propre, aussi bien radiales que tangentielles, les prolongements de lignes presentes dans le sc&nio (HP 99) permettent a quelque 53 000 boucles supplementaires de remplir les conditions de transfert, faisant passer le taux de transfert de 16,2 % a 18,7 %, soit une croissance relative de 8 % du taux de transfert des boucles par rapport au scenario de reference (HP-HC 90) (Ta- bleau 6).

l Ce qui est encore plus remarquable est l’effet de l’amelioration conjointe des frequences (port&es a 4 min tout au long de la joumee) et des vitesses (+ 30 %) de quelque soixante lignes d’autobus operant

Tableau 5 Transferts potentiels estim6s par rapport ?I la mobilit observke dans EGT 90-91 dans le cadre d’une marge de croissance des budgets-temps de 25 %

Scchrio a = 0.25 Dkplacements Vt?hicules x kilom&res potentiellement transf&ables, en pourcentage des grandeurs soumises au transfert et observkes dans I’EGT 90-91 (%)

HP-HC 90 13,l 9.0 HP 2010 + Mobilien + 15.20.25 17,2 13,3

D’apres [DFWF, 19%]

M.-H. Massot, J. Armoogum / Recherche Transports St%uritd 77 (2002) 259-280 213

Tableau 6 Les grandeurs soumises a la procedure de transfert

Boucles Ddplacements Vehicules x kilomttres soumis a la procedure (milliers)

Individus

2 173 7 812 65 896 1 701 ScCnario a = 0,25 potentiellement transferables, en pourcentage des grandeurs soumises au transfert et observtes dam I’EGT 90-91 (%)

HP-HC 90 16,2 13.1 9,O 19,2 HP 90 17,4 13,9 10,l 20,3 HP 99 18,7 153 11,5 21,9 HP 99 + Mobilien 20,3 16,5 12,6 23.8 HP 99 + Mobilien + 15,20,25 21,2 17,2 13,l 24,6 HP 2010 + Mobilien + 15,20,25 21,l 17,2 13,3 24,5

D’aprts [DREIF, 19951

dans Paris et la petite couronne. Cette offre (HP 99 + Mobilien) est la restructuration de l’offre qui Porte le plus grand potentiel de report modal sur la zone considtree. Cette definition de l’offre permet de trans- ferer presque autant de boucles supplementaires que le scCnario (HP 99). 11 appara?t ainsi que ce reseau portant une amelioration des dessertes en proche couronne (zone oti se concentrent a la fois la moitie des boucles soumises a la procedure et la majorite des Cchecs de cette demibre) est tres efficace par rapport aux moyens mis en ceuvre pour atteindre des objectifs globaux de reduction de l’usage de la voiture ; elle demeure cependant la plus ambitieuse, notamment en ce qui conceme l’obtention de gains de vitesse sur le reseau routier.

La moindre efficacite de l’offre (2010 HP + Mobi- lien + 15,20,25) s’explique quant a elle par la configuration de l’offre simulee. 11 s’agit d’une offre programmee sur un schema largement radial, apte a transferer des deplacements de plus longue distance, mais certainement trop figee dans son inscription spatiale pour rencontrer les deplacements automobiles cheminant et pCrCgrinant dans les banlieues proches, lesquels sont les plus nombreux a Ctre concern& par un transfert dans la zone d’analyse. 11 ne faudrait cependant pas deduire de ce constat que les offres program- mees, notamment dans le cadre des contrats de plan a venir, ne sont pas des offres importantes pour la region ile-de- France. Ces offres s’appuient en effet sur la croissance des

populations residant en grande couronne, facteur que nous ne prenons pas en compte dans ce travail ; programmees sur une logique de transport de masse rapide et a l’abri des congestions, elles permettront sans doute de maintenir la part modale du transport public dans une zone Clargie a forte croissance de population.. . mais elles auront un effet limit6 sur celle de la voiture acquise dans les an&es 1990, en clair sur le report modal des deplacements automobiles actuels sur la zone dense.

3.1.4. Des e$ets d’ofre dh.dtiplib par les stratkgies d ‘accompagnements de l’o$re en transport public

Si les effets d’offre estimes sont reels, bien que limit&, sur la problematique du report modal des usages actuels de la voiture en zone dense, il faut aussi retenir que ces effets d’offre sont fortement dkmultipliks par toute strategic consistant a accompagner ce report sur les modes (Ta- bleau 7).

A l’issue des simulations des scenarios complets, (offre de transport + strategies d’accompagnement), on constate en effet que les strategies de rabattement sur le transport collectif (a velo ou en voiture), la levee des contraintes sur les motifs et les adaptations individuelles aux nouveaux horaires du transport public expliquent a elles seules quel- que 38 % du potentiel de boucles transferables, quelque 43 % des voyageurs x kilometres compris dans ces boucles. La participation de ces actions a la formation du potentiel apparait de plus remarquablement stable, quel soit le sce-

Tableau 7 Les grandeurs potentiellement tmnsferables pour chacun des trois scCnarios complets (offre de transport collectif et strategies d’accompagnement de l’offre)

Boucles Vehicules x kilometres Sctkuio a = 0,25 potentiellement transferables, en pourcentage des grandeurs soumises au transfert et observdes dans I’EGT 90-91 (%)

Offre seule Sckwio complet Offre seule S&ario complet

HP-HC 90 16,2 26,2 930 153 HP 90 17,4 21,3 10,l 17,6 HP 99 + Mobilien 20.3 32 12,6 21,6 HP 99 + Mobilien + 15,20,25 21,2 34 13,l 22,6 HP 2010 + Mobilien + 15,20,25 21,l 34 13,3 22,9

D’apres [DREIF, 19951

214 M.-H. Massot, J. Armoogum / Recherche Transports Skurite’ 77 (2002) 259-280

nario d’offre (HP-HC 90), (HP 99 + Mobilien), (HP 2010 + Mobilien + 15,20,25) ou tout autre.

La croissance du taux de succbs que l’on observe en cas d’application du scCnario complet est non marginale : entre 55 et 60 % pour les boucles de dtplacement. Dans chaque scenario d’offre, elle est portee :

l pour un peu plus de la moitit par la levee des contraintes sur les motifs achats exceptionnels et ac- compagnement, motifs qui par ailleurs se repartissent Cgalement sur cette augmentation du potentiel ; la levee de ces contraintes Porte ainsi quelque 20 % des poten- tiels transferables (en boucles) et augmente la part modale de la marche et du velo, signifiant qu’il s’agit d’un potentiel de deplacements de proximite ;

l pour un petit tiers par la mise en place de strategies de rabattement sur le transport public ; pour tout scknario complet, 14 % des transferts totaux (boucles) ressortent d’une strategic de rabattement et dans 90 % des cas il s’agit d’un rabattement en vC10 ;

l le reste &ant du a l’effet des adaptations individuelles aux horaires du transport public, qui Porte quelque 5 % des transferts totaux.

Ces resultats confirment l’hypothese, largement partagee par le milieu professionnel, selon laquelle l’tvolution vers des repartitions modales sensiblement differentes ne peut &tre que le resultat d’actions combintes. Ils dimensionnent aussi clairement le poids des usages de confort lies a la voiture, usages que le developpement du transport public, m&me assis sur des vitesses de deplacement nettement ameliorees, ne parvient pas a entamer radicalement.

3.2. Une hikarchisation des objectifs de rtfduction et de leurs enjeux

Comme souligne plus haut, l’ensemble des simulations montre que les marges de manceuvre a la disposition des individus sont loin d’etre nulles.

l Ainsi atteindre les objectifs du Plan de deplacements urbains de la region ile-de-France [DREIF, 20001, sans degradation de la qualite de service de l’automobile, aurait CtC potentiellement possible a offre constante.

Ce scenario a offre constante Porte potentiellement des transferts modaux traduisant une reduction de presque cinq points de la part modale de la voiture et de 9 % des circulations automobiles par rapport a la reference 1990. 11 concerne la mobilite de 326 000 conducteurs, dont presque tous verraient leur budget monetaire diminuer, 44 % leur budget-temps diminuer et 56 % augmenter (respective- ment - 20 min et + 13 min en moyenne par jour).

l Doubler les objectifs du PDU, soit atteindre une reduc- tion de onze points de la part modale de la voiture par rapport a 1990, serait potentiellement possible sur la

base du scenario complet (HP 2010 + Mobilien + 15,20,25).

Ce scenario s’appuie sur une evolution de l’offre de transport collectif non marginale par rapport a la reference (HP 90), sur une augmentation des vitesses commerciales des autobus maximale par rapport au champ des possibles, sur des mesures ou politiques d’accompagnement des trans- ferts vers les modes doux, comme la tolerance a priori d’une croissance des budgets-temps individuels de 25 %, des politiques de rabattement sur le transport collectif, des attentes en station reduites lors du premier deplacement potentiel de la joumee en transport collectif.

Ce potentiel conceme en effet 34 % des sorties du domicile en voiture un jour don&, 3 1 % des deplacements, 23 % des voyageurs x kilometres associes a la voiture et 38 % des conducteurs de voiture.

La part des deplacements assures par la voiture sur l’ensemble des deplacements de la zone passemit de 36 % a 25 %, soit une baisse de onze points de part modale, ce qui peut &tre considtre comme consequent. La part des depla- cements en transport collectif, qui absorbe plus de 80 % des transfer@ passerait de 26,3 % a 35,l %, soit une augmen- tation de quelque 1,9 million de deplacements sur ce mode par jour, ce qui est la aussi considerable ; la part du v&o passerait de 0,4 % a 2,l %.

Les analyses menees sur le scCnario complet le plus haut permettent de statuer, a l’aune de trois indicateurs - presence de passagers a bord du vehicule, budget-temps, budget monCtaire -, que le transfert de tout ou partie de la mobilite releverait de strategies gagnantes en budget-temps et/au monetaire pour la majorite (67 %) des conducteurs concern& (soit 25 % des conducteurs de la zone un jour donne) (Tableau 8). Les situations difficiles quant a la mise en muvre des transferts concement toutefois 33 % des conducteurs, qui en grande majorite perdraient en temps et/au en argent et ne pourraient realiser ce transfert sans remettre en cause la mobilite de leurs passagers.

Ces quelques resultats montrent a notre sens que l’effort a produire pour nombre de conducteurs est contenu et serait envisageable, dbs lors que les gains monetaires sont impor- tants et les pertes de temps quasi negligeables (Tableau 8).

Une analyse de la repartition de la reduction du trafic montre cependant que l’effort en termes de vehicules x kilometres potentiels transfer& est reparti sur une petite fraction des conducteurs de la zone (20 % des conducteurs de la zone porteraient 72 % de la reduction potentielle du trafic dans le scenario complet le plus haut). Ces analyses montrent aussi que le transfert est, parmi les actifs, en moyenne moins penalisant en temps pour les cadres suptrieurs et les professions intermediaires que pour les ouvriers et employ&. Elles montrent aussi que les grands gagnants en temps et en argent sont sur-represent& dans la population parisienne et que les grands perdants, en petite

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Tableau 8 Les effets du report modal potentiel sur les budgets-temps et monetaires des individus concern& par un transfert dans le cadre du scenario le plus haut

Nombre d’individus concern& par un transfert

Budget-temps (en min)

avant transfert apres transfert

Budget mont?taire (en francs 1995)

avant transfert apres transfert

Conducteurs saris passagers ni motif achats Gain de temps et gain monttaire 166000 145 123 34,8 937 Gain de temps mais perte monttaire 22 ooo 89 75 3,7 534 Perte de temps mais gain mondtaire 238 000 98 111 25,3 9,9 Perte de temps et perte mon&aire 17 000 81 94 9,7 12,3

Conducteurs avec passagers etlou motif achats Gain de temps et gain monetaire 55 000 141 120 32,9 831 Gain de temps mais perte mondtaire 18 GQO 59 47 493 10,2 Perte de temps mais gain mon&aire 15 000 97 111 22,l 10,3

D’apres [DFCEIF, 19951

couronne, sont les plus defavorises en termes d’altematives modales potentielles et efficaces.

Ces quelques analyses de la distribution des gagnants et des perdants dans l’espace et dans le corps social renvoient a des problematiques d’ordre social, largement ignorees dans la planification. Traitant des disparites que pourraient creer ou renforcer une politique de reduction de l’usage de la voiture dans ces zones, elles peuvent aussi prefigurer certains blocages a l’adhesion individuelle de toute politi- que de reduction radicale d’usage de la voiture.

L’exemple trait6 illustre assez bien les problbmes poses : si, pour nombre de conducteurs, l’effort a produire semble limit6 en temps ou en argent, ou du moins negotiable, il apparaft que la repartition des gagnants et des perdants, qui n’est anodine, ni dans l’espace, ni dans le corps social, est de nature a faire partie du debat sur ce type de politiques. En clair, au terme de cette analyse, si l’evaluation, ebauchee ici, de l’acceptabilite individuelle des transferts permet d’envi- sager des politiques de reduction d’usage de la voiture, sans veritable remise en question des activites et des temps consacres au transport pour la grande majorite des conduc- teurs, la repartition des gagnants et des perdants et des efforts a produire sous-jacents a ces transferts dans le corps social est de nature a faire naitre un debat sur l’acceptabilite sociale des politiques de reduction d’usage de la voiture et sur les actions a mettre en ceuvre pour les rendre plus acceptables, voire tenables politiquement.

l DCpasser et simuler un objectif de reduction potentielle superieur a 25 % des vehicules x kilometres relbve certai- nement d’autres actions et d’autres logiques, que notre methodologie, en l’etat, ne permet pas d’envisager, notam- ment les transferts de destination. Depasser cet objectif ne se ferait pas sans remettre en cause les programmes d’acti- vite individuels, les systemes de localisation, les vitesses de deplacement, les acteurs et services de transport, les alter- natives modales actuelles a la voiture ayant montre leurs limites a l’issue de notre scenario le plus ambitieux, qui sert pour sa part un objectif moins Clew+.

Au regard des boucles de deplacement en tchec de la procedure de transfert a l’issue du sctnario complet le plus haut soit (HP 2010 + Mobilien + 15,20,25), on constate en effet que la majorite des Cchecs h la procedure (70 %) s’explique par une inadequation entre le budget-temps des individus, que l’on peut majorer au plus de 25 % et/au de 30 mitt, et la vitesse des alternatives modales en presence. De plus, toujours pour les boucles en Cchec, on constate que pour 50 % d’entre elles la duree de l’altemative modale proposee en transport en commun est en moyenne au moins deux fois superieure a la duree declaree de la boucle en voiture ; cet &art relatif n’est faible (compris entre 0 et 50 %) que pour une minor& des Cchecs (17 %).

L’analyse par segment de marche est aussi Cclairante par rapport a la necessaire remise en question des programmes d’activites des individus et/au de la nature tres coercitive des mesures a mettre en ceuvre pour aller au-de18 des acquis sur la base du scenario complet le plus haut. En effet, le taux d’echec des boucles de petite vitesse, c’est-a-dire des boucles inferieures a 10 km a l’heure, est encore ClevC (42 %) a l’issue de ce scenario ; celui des boucles relevant d’un transfert sur la marche, soit dune distance inferieure ou Cgale a 2 km, est de 45 %, celui des boucles relevant du ~610 de 52 %, celui des boucles caracterisant des boucles intemes a Paris demeure ClevC malgre la densite de l’offre de transport collectif et l’amtlioration des vitesses et des frequences : 35 % de ces boucles restent en Cchec a l’issue du scenario le plus haut. A l’evidence, ces boucles en Cchec font pat-tie de programmes d’activids joumaliers d’indivi- dus dont le budget-temps est deja Clew! et ne supporte pas une croissance Cgale au plus a 25 % et/au 30 mitt, celle toleree dans la procedure de transfert.

4. Pour conclure

l&ablis a partir d’une procedure de report modal inno- vante qui institue les temps et la vitesse de dtplacement

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arbitres du choix modal et qui suppose que tout automobi- liste pourrait realiser sa mobilite a pied, en vtlo ou en transport collectif, d&s lors que les contraintes de temps sont realides, les rtsultats les plus saillants de notre travail permettent a notre sens d’tclairer le debat sur deux ou trois grandes thematiques concernant la reduction de l’usage de la voiture dans les zones densement urbanisees.

La premiere thematique renvoie au role de la vitesse dans la construction de la mobilite des conducteurs. Un des resultats les plus forts de notre travail est en effet d’avoir montre, que toutes chases Cgales par ailleurs, 92 % des conducteurs de la zone dense francilienne n’auraient pas pu realiser autrement qu’en voiture leurs activites quotidiennes a budget-temps constant. Si, de fait, la m&ode presentee ne now permet pas de preciser si les conducteurs de la zone francilienne ont construit leur programme d’activites en fonction des vitesses des alternatives modales en presence ou, inversement, si c’est la vitesse permise par la voiture qui a conduit ces conducteurs a construire leur programme d’activites, le fait est la : 92 % des conducteurs ont intema- 1isC la vitesse permise par la voiture pour realiser leur programme d’activites, demontrant, pour cette zone au moins, que l’acces a la vitesse est une cl6 comportementale importante du choix modal pour une tres grande majorite des conducteurs.

La confrontation avec les resultats ttablis sur le Grand Lyon, nous permet de relativiser la pregnance de la vitesse dans le choix pour la voiture : dans cette zone, beaucoup moins densement peuplte que la zone parisienne, oii les usages de la voiture sont en proportion plus importants’, 84 % des conducteurs n’auraient pas pu realiser autrement qu’en voiture l’ensemble de leurs activites quotidiennes. Encore tres largement majoritaires dans la population des conducteurs, ils sont done, dans un contexte d’usage de la voiture plus lib&-e, en proportion moins nombreux a Lyon que dans la zone dense parisienne a choisir la voiture dans le cadre de la rationalite de la vitesse.

L’intemalisation de la vitesse dans les choix modaux des conducteurs au niveau constate doit conduire a prendre en compte les consequences de la production de la vitesse dans toute politique de transport. Au-deli de ce constat, ces resultats montrent ainsi que les contextes d’usage de la voiture determinant la vitesse (infrastructure, fluidite et stationnement) sont un des leviers importants des regula- tions potentielles de l’usage de la voiture, y compris en zone dense.

Le deuxibme thtmatique conceme les marges de manceu- vre individuelles et potentielles de reduction de l’usage de la voiture en zone dense. Toutes chases Cgales par ailleurs et

I Pour la zone dense parisienne et la zone du Grand Lyon, la voiture en tant que conducteur conceme respectivement 28.3 % et 44,l % des dkplacements r6aIis6s un jour donnk.

notamment l’offre de transport, on Ctablit que ces marges individuelles ne sont pas nulles, puisque 8 % des conduc- teurs de la zone dense parisienne pourraient realiser leur programme d’activites a budget-temps constant, en utilisant au moins pour une partie de leur mobilite un autre mode que la voiture. Ces conducteurs, qui ont choisi la voiture pour une autre raison que sa performance en temps, portent une reduction du trafic automobile de 4 %. Si, de plus, on admet que realiser des accompagnements ou faire des achats exceptionnels ne sont pas des motifs exclusifs de la voiture, si tant est que les budgets-temps de deplacement des conducteurs restent constants, la reduction potentielle du trafic serait de l’ordre de 5,8 %. L’analyse et les resultats sont certes mecaniques, mais ils montrent l’existence d’un gisement non negligeable pour les autres modes, gisement majoritairement localise sur les liaisons Paris-Paris, et Paris-Petite Couronne.

La troisibme thtmatique conceme l’efficacite des leviers envisages pour augmenter le potentiel initial de reduction de l’usage de la voiture. Plus on s’eloigne des comportements initiaux et des offres de references, plus le caractere radical de la procedure s’aflirme et plus les resultats expriment des zones maximales de report modal et de reduction potentielle des usages de la voiture. Le Tableau 9 rkune l’efficacite maximale des leviers simules.

Dans ce tableau, il apparait nettement que la croissance de l’offre de transport public associee au sc&mrio d’offre de transport public le plus haut qui augure d’une croissance de + 44 % des places x kilometres offertes et de + 35 % des vitesses des autobus sur l’ensemble du reseau, n’augmente que faiblement le potentiel de reduction du trafic acquis sur le scCnario de reference. Dans le cadre d’une tokance de croissance des budgets-temps individuels de 25 %, 70 % des potentiels du sctnario d’offre le plus nourri sont en effet presents dans le scCnario de reference. Les effets d’offre sont done reels, mais mesures, surtout si l’on se refere au c&e mecanique de la procedure, qui ne considere ni les elements de confort lies a l’usage de la voiture, ni l’induc- tion de trafic automobile qui pourrait naitre d’une voirie lib&e pour la voiture. Cette faible sensibilite des potentiels aux accroissements de l’offre traduit en partie les differen- tiels existant entre les vitesses acquises dans les usages actuels de la voiture et celles des autres modes, differentiel que les mesures simultes d’augmentation radicale des vitesses du transport public ne permettent de rejoindre que marginalement.

Pour augmenter plus fortement le potentiel, il faut reconsiderer, a l’aune de la procedure, les usages de la voiture pour les achats exceptionnels et les accompagne- ments, port& par des deplacements de petite distance et des vitesses plus en rapport avec celles de la marche, du vtlo et du transport collectif. 11 faut imaginer aussi que, pour une part non negligeable, les conducteurs seraient prets a faire

Tableau 9

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Evaluation des reductions potentielles du trafic realise en voiture dam la zone dense francilienne selon diverses hypotheses

Hypotheses de simulation Reduction potentielle des v&mules x kilometres (*) (%)

Budget-temps individuel de transport constant Offre de transport collectif constante -4

Croissance toleree sur le budget-temps Sc6nario a = 0,25 Offre de transport collectif constante -9

Croissance toldree sur le budget-temps a = 0,25 Offre de transport collectif constante Strategies - 16 d’accompagnement de l’offre de transport collectif (**)

Croissance toltree sur le budget-temps a = 0,25 Offre de transport collectif la plus haute - 13

Croissance to&de sur le budget-temps a = 0,25 Offre de transport collectif la plus haute // -23 Strategies d’accompagnement de l’offre de transport collectif (**)

(*) En pourcentage du tralic automobile (vkhicules x kilometres) dans la zone en 1991 (EGT-91-92) (**) La simulation de strategies d’accompagnement de l’offre de transport associe a chaque definition de l’offre de transport public des actions comme

le rabattement en vdlo ou en voiture sur le transport public, les reductions du temps d’attente en stations et suppose que les motifs accompagnements et achats hebdomadaires ne sont pas des motifs exclusifs de l’usage de la voiture. D’apres [DREIF, 19951

de l’intermodalite, la&ant leur voiture, et plus massivement leur ~510, a la station de transport collectif la plus proche de leur domicile.

Pour caricaturaux que soient les principes qui sous- tendent le report modal, notamment quand nous faisons l’hypothbse que tout individu peut rouler a vC10 ou marcher, les resultats de ce travail montrent que l’amelioration de l’offre de transport public ne peut avoir que des effets limites sur la reduction de l’usage de la voiture, y compris dans les zones denses. Que pour augmenter sensiblement les reports modaux, il est sans nul doute necessaire de mettre en ceuvre des politiques qui agissent a la fois sur les contextes de l’usage de la voiture (dont le stationnement) et sur les contextes d’usage du transport collectif (partage de la voirie).

Dans cette caricature de choix modal, qui optimise les reports sur les modes altematifs a la voiture et repose sur des hypotheses de croissance importante de l’offre en transport public, la reduction potentielle de 25 % du trafic automobile fait partie du possible, mais sa faisabilite indi- viduelle et collective reste a demontrer. De facon symetri- que, on montre que dans le cadre de ce sctnario maxima- liste, 77 % du trafic automobile reste attache 2 la voiture, ce qui confirme la performance actuelle de la voiture a pro- gramme d’activites individuel donne.

Remerciements

Cet article est issu de la recherche Par-i 21, Ihde de faisabilite’ d’un syskme de transport radicalement di$e’rent pour la zone dense francilienne [Massot et al., 2OOOb et 20021, r&lisee dans le cadre-de l’appel d’offre Prospective du groupe recherches~strategiques du PREDIT et financee par KDirectio~des transports ten-e&es (DTT) du ministere de l’equipement, des transports et du logement et par 1’Agence de l’environnement et de la maitrise de l’tnergie (ADEME).

Nous remercions la DTT et ~‘ADEME, qui ont finance cette recherche. Nous remercions Cgalement nos collegues de I’INRETS pour leur collaboration et plus particulierement C. Gallez et L. Hivert. Nos remerciements vont Cgalement a G. Thibal, C. Laroche et C. Maze1 du departement du deve- loppement de la RATP pour leur disponibilitt et la qualitt de leurs travaux dans le cadre de cette recherche.

Abridged version

The private car currently dominates travel in large metropolitan areas and its use is on the increase, in spite of the fact that public opinion is generally in favour of the development of public transport. Political statements also reflect this view. Thus, at the present time all the elected representatives in major cities are developing Urban Travel Plans aimed at reducing the role of the car in cities. It is however apparent that although the political will is present and a wide variety of means are available (tram, tram-train, cycle paths, pedestrian zones, parking restrictions), the stated objectives in this area remain limited.. . indeed quite as limited as the impacts of the policies that are traditionally envisaged (restricting parking, developing public transport, economic instruments (urban tolls) or taxation (TIEP (do- mestic Tax on Oil Products)) as scientifically measured by models and analyses.

Can we be satisfied with limited objectives (leading to a reduction in car use of a few percent at most)? This is not the issue we shall discuss here, as all there is to say (or almost) about the disadvantages and benefits of cars in cities has already been said. Is it conceivable that car travel in cities, and more specifically in the dense part of the Paris region, could be reduced by a considerable degree (at least one third)? This is the question we shall seek to answer. What we shall do is investigate the potential margins for manoeuvre with respect to a policy to reduce car use in

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highly urbanized zones. These potential margins for ma- noeuvre have been estimated after a procedure by which car trips are transferred to other modes (walking, the bicycle, public transport) as a consequence of scenarios for public transport growth in which some aspects (frequencies and speeds) have been pushed beyond the limits of what is realistic, that is to say without taking account of the cost of such an increase or the local planning measures that would be required.

The regulation mechanism favoured in this research is based on the idea that urban traffic should be adapted to the capacity of the city, its networks and its environment and that a possible starting point for this adaptation is what appears, a priori, to be a fair distribution of the right to use the car. It would not be wrong to consider that such a set up is out of step with reality, but this does not mean that it is not interesting to explore its features within a set of hypotheses in which the current preference for the car is retained only if no other transport mode allows the individual to perform his or her activities with a similar travel time.

The purpose of this research is not therefore to identify what could lead motorists to reduce their car travel by transferring to modes which are considered to be slower. It consists of sketching out the maximum achievable modal transfer of car trips without endangering drivers’ daily activity schedules or increasing their travel times. The intention is also to stimulate debate on the effects of levers such as an increase in public transport supply on the reduction of car use.. . and also to raise the issue of lowering travel speeds (which is required for modal transfers). High car speeds have governed (and indeed still govern) the specification of transport systems in this society and the urban sprawl which affects our cities.

To answer these questions we have developed a proce- dure that simulated and measured the potential market for transport modes that provide an alternative to the private car.

The method is based on repeated iterations of a simula- tion model which combines the assignment of round trips to modes other than the automobile with reformulations of transport supply. Demand is channelled towards personal modes (walking, cycling), public transport and a combina- tion of personal and public modes.

Trips are assigned to one or other of the alternative modes on the basis of elimination rules-no walking for distances over 2 km, no cycling over 8 km, no modal transfer if the purpose of the round trip is for escorting purposes, etc.-and on the basis of constraints-individual travel-time-budgets, the length of each trip, the existence of public transport supply, etc. This system of rules and constraints constitutes the core of the modal transfer proce- dure, which examines the possibilities of substitution in the context of the different transport scenarios and enables us to

identify realistic margins of manoeuvre with regard to the round trips made by individuals. The iterations are based on the 1991-1992 Comprehensive Travel Survey for the Paris Region and on precise reconstructions of the public trans- port supply, with constant population and unchanged indi- vidual activity schedules.

The modal transfer procedure applies thirty or so supply scenarios which provide a picture of what is possible in the area of modal split. These scenarios have been designed to incorporate a progressive improvement in public transport supply: increasing speeds on the roads, increasing off-peak service frequencies, creating exclusive bus lanes, reserving radial roads for public transport, extending metro and regional express rail (RER) lines and reorganizing bus routes in response to this. The new services in the scenarios have been based on the infrastructure and services described in the Urban Travel Plan for the Greater Paris Area, on the Master Plan and on the 12* and 13” State-Region plan contracts.

In addition to reformulating transport supply, we have also devised and simulated a set of appropriate accompa- nying strategies that are intended to improve the effective- ness of public transport supply, for example policies to encourage the use of the bicycle or the car as a feeder mode for public transport (park and ride schemes) and passenger information strategies.

After each simulation the potential transfer of car vehicle x kilometres to each mode is calculated, following which we can evaluate, on the basis of various criteria, each of the full scenarios (measures with regard to public transport combined with other strategies) or each of the partial scenarios (measures that only involve public trans- port supply). Some criteria relate to society, others to individuals potentially affected by modal transfer. Some criteria are economic, in particular the costs for society of deploying of public transport, others are environmental, such as those relating to energy consumption and reducing CO, and atmospheric pollutant emissions. We have also analyzed the conditions for social and individual acceptabil- ity in order to characterize the winners and losers in terms of time and money and describe the distribution of indi- vidual contributions to the reduction of car use.

We shall end this discussion of methodology by stating a number of hypotheses. Apart from the supply scenarios in the general sense of the term and how these affect the daily travel of individuals making a modal transfer, we shall adopt an all other things being equal approach. Thus, we shall consider that the following are invariant: the popula- tion and activities in the study zone, both with regard to the numbers of jobs and their location; the major components of individual activity schedules; the major aspects of transport technology (means of powering engines, the range of vehicles); the unit costs of using both personal and public

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modes. The effects that result from any change in supply, in particularly trips that are generated by increased speeds or improved reliability on transport networks have not been considered either.

Some will see these hypotheses as somewhat limiting in the context of a forecasting process. However, we take the view that if all these criticisms, admittedly justifiable, were taken into account the study would move into different territory from that chosen at the outset, which was to make forecasts on the basis of present-day conditions in order to initiate debate by giving an idea of the scale of the stakes and the potential for reducing the role of the automobile on the basis of observed behaviours and policy options which are frequently suggested but not evaluated with reference to the stated objectives, and by applying a correctly implement- ed, coherent methodology that can be understood by as many people as possible.

Among the most striking results is that the margins of manoeuvre available to individuals are far from non- existent.

l On the basis of the first iteration, i.e. on the basis of 1991 car usage data and constant public transport supply and social cost (those for the base year of 1990) we have shown that 8% of the drivers in the densely populated Paris area could have conducted their daily activity schedule using modes other than the car with the same, or a lower, travel time-budget: 8% of drivers therefore chose the car for reasons other than travel speed. In the reference situation these drivers represent a potential reduction in automobile traflic in the zone (measured in vehicle x kilometres) of about 4%.

l We have also shown that it would be possible to achieve the objectives of the Urban Travel Plan for the Greater Paris Region [DREIF, 20001 without reducing the quality of service provided by the car and while maintaining a constant level of public transport supply.

Potentially, this constant supply scenario can result in modal transfers which reduce the car’s modal share by almost five percentage points and car traflic by 9% as compared with the situation in the base year of 1990. With regard to the 326,000 motorists, the scenario is based on a maximum tolerated increase in travel-time budgets of 25%: the monetary budgets of almost all the drivers affected by this potential transfer will fall, while the travel-time budgets of 44% of them will fall, and that of 56% of them will rise (a 20 min drop and a 13 min rise).

l With the full scenario (HP 2010 + Mobilien + 15,20,25) it would be potentially possible to double the aims of the Urban Travel Plan, i.e. achieve an 11 percentage point reduction in the modal share of the private car and a 23% reduction in car traffic as compared with 1990.

This scenario is based on a non-marginal increase in public transport supply as compared with the base year of 1990, on the maximum possible increase in the commercial speeds of buses, on measures or policies that accompany transfers to more environmentally friendly modes, on the implementation of park and ride schemes, and on the idea that the maximum increase in travel-time budgets that individuals will tolerate is 25%.

The analysis we have conducted of this full scenario has demonstrated that strategies which involve the transfer of some or all travel would result in gains in terms of travel-time budget and or money for most (67%) of the drivers involved (that is to say 25% of the drivers in the zone on a given day). However, 33% of drivers would have difficulties in making a modal transfer, and the vast majority of these would lose time and money and/or would be unable to make the transfer without putting at risk the travel of one or more third parties (the passengers they take in their cars).

l Simulations that achieve more than a 25% vehicle x kilometre reduction would certainly require measures and approaches which cannot be part of our methodology as described here. More ambitious car use reductions could be achieved by introducing tradable riding permits. A recent forward study [Crozet et al., 20011 is based on the hypothesis that this scenario would only be feasible in the event of a major envi- ronmental crisis. In any case, it could not be introduced without threatening individual activity schedules, loca- tion patterns, travel speeds, transport players and ser- vices as our procedure has demonstrated that present- day alternatives to the car have their limits in the context of a less ambitious scenario.

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