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GROUPES DE DISCUSSION DE JEUNES ADULTES DÉPRESSIFS HOSPITALISÉS AVEC LEURS FAMILLES Lieven Migerode et al. Médecine & Hygiène | Thérapie Familiale 2005/4 - Vol. 26 pages 365 à 390 ISSN 0250-4952 Article disponible en ligne à l'adresse: -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- http://www.cairn.info/revue-therapie-familiale-2005-4-page-365.htm -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Pour citer cet article : -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Migerode Lievenet al., « Groupes de discussion de jeunes adultes dépressifs hospitalisés avec leurs familles », Thérapie Familiale, 2005/4 Vol. 26, p. 365-390. DOI : 10.3917/tf.054.0391 -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- Distribution électronique Cairn.info pour Médecine & Hygiène. © Médecine & Hygiène. Tous droits réservés pour tous pays. La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites des conditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votre établissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière que ce soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur en France. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit. 1 / 1 Document téléchargé depuis www.cairn.info - ku_leuven - - 134.58.179.35 - 30/04/2012 14h09. © Médecine & Hygiène Document téléchargé depuis www.cairn.info - ku_leuven - - 134.58.179.35 - 30/04/2012 14h09. © Médecine & Hygiène

Groupes de discussion de jeunes adultes dépressifs hospitalisés avec leurs familles

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GROUPES DE DISCUSSION DE JEUNES ADULTES DÉPRESSIFSHOSPITALISÉS AVEC LEURS FAMILLES Lieven Migerode et al. Médecine & Hygiène | Thérapie Familiale 2005/4 - Vol. 26pages 365 à 390

ISSN 0250-4952

Article disponible en ligne à l'adresse:

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------http://www.cairn.info/revue-therapie-familiale-2005-4-page-365.htm

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Pour citer cet article :

--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------Migerode Lievenet al., « Groupes de discussion de jeunes adultes dépressifs hospitalisés avec leurs familles »,

Thérapie Familiale, 2005/4 Vol. 26, p. 365-390. DOI : 10.3917/tf.054.0391

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Distribution électronique Cairn.info pour Médecine & Hygiène.

© Médecine & Hygiène. Tous droits réservés pour tous pays.

La reproduction ou représentation de cet article, notamment par photocopie, n'est autorisée que dans les limites desconditions générales d'utilisation du site ou, le cas échéant, des conditions générales de la licence souscrite par votreétablissement. Toute autre reproduction ou représentation, en tout ou partie, sous quelque forme et de quelque manière quece soit, est interdite sauf accord préalable et écrit de l'éditeur, en dehors des cas prévus par la législation en vigueur enFrance. Il est précisé que son stockage dans une base de données est également interdit.

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1 Psychologue systémicien, Service psychothérapeutique, Universitaire Ziekenhuizen Leuven, forma-teur.

2 Psychiatre systémicien, formateur, U.Z. Leuven.3 Psychologue systémicienne, Service de gérontopsychiatrie U.Z. Leuven.4 Psychologue, thérapeute cognitivo-comportementaliste, U.Z. Leuven.5 Pédopsychiatre systémicienne qui a revu la mise en forme.

GROUPES DE DISCUSSION

DE JEUNES ADULTES DÉPRESSIFS

HOSPITALISÉS AVEC LEURS FAMILLES

Lieven MIGERODE1, Gilbert LEMMENS2, An HOOGHE3, Els BRUNFAUT 4

et Muriel MEYNCKENS5

Résumé: Groupes de discussion de jeunes adultes dépressifs hospitalisés avec leurs familles. – Lesauteurs décrivent ici le dispositif mis en place pour la prise en charge de jeunes adultes dépressifs hospita-lisés ou fréquentant un centre de jour. Outre diverses formes de thérapie de groupe, les patients bénéficientd’entretiens individuels et familiaux. L’originalité du traitement consiste en un travail avec plusieursfamilles ensemble.L’article développe le cadre et les outils utilisés lors de ces séances. La dépression est recadrée avant toutcomme une problématique liée au stade de vie que traversent les jeunes adultes et leur famille. Les discus-sions de groupe offrent des possibilités d’échanges entre participants, permettent aux uns et aux autres devoir les choses autrement. Les thérapeutes sont particulièrement vigilants à transformer les plaintes endemandes constructives, à éviter de stigmatiser la pathologie. Ils veillent à faire entrevoir toutes les signi-fications possibles d’un même mot, d’une même situation pour ouvrir à d’autres possibles.

Summary: A Multiple Family Group intervention for depressed young adults and their families. – Whenyoung adults are confronted with anxiety or depression these troubles are embedded in their developmen-tal phase. This article describes a specific multifamily intervention method developed at the psychothera-peutic ward of the University Hospital of Leuven.Literature describes many links between family and depression, although their seems to be a lack in theresearch concerning the specific place of family therapy in the treatment of young adults suffering fromdepression or anxiety. We describe the specific goals, group composition, organisation and methods basedon five consecutive multifamily groups of inward and daycare patients.

Resumen: Grupos de discusión familiar para adultos jóvenes y sus familiares. – Los autores describen laubicación de grupos de discusión familiar dentro del tratamiento de adultos jóvenes que, debido a que pre-sentan quejas de tipo depresivo, se encuentran en tratamiento clínico. Junto con las intervenciones tera-péuticas en grupo, hay atención para el tratamiento individual y la terapía familiar. La originalidad resideen el trabajo simultaneo con varias familias.El artículo describe el marco terapéutico y la forma de trabajo durante las diferentes sesiones. La depre-sión se enmarca, en primer lugar, como unida a la etapa de desarrollo por la que atraviesan los adultos

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Introduction

Le service psychothérapeutique de la Universitaire Ziekenhuizen Leuven (Hôpi-tal Universitaire de Leuven en Belgique) accompagne des adultes présentant destroubles anxieux et dépressifs. Un sous-groupe de patients jeunes adultes demandeune attention spécifique. Agés de plus de 18 ans ils se trouvent dans une zone inter-médiaire sur le plan socio-économique : pas vraiment dépendants, pas vraimentautonomes. Leurs problématiques et leurs demandes s’inscrivent dans ce stade devie, phase caractérisée par le développement d’une indépendance personnelle etéconomique, par la recherche d’une identité propre, d’une carrière et d’un contextesocial personnel (24). Les problèmes anxieux et les plaintes dépressives se greffentsur les thèmes habituels et les tâches développementales «normales» à cet âge. S’ensuit souvent un développement perturbé. Inversement, le déroulement chaotique destâches peut faire naître une souffrance d’ordre dépressif ou anxieux. Tous ces pro-cessus se déroulent simultanément tant au niveau des jeunes adultes, de leursparents que de l’entièreté de la famille.

Ces jeunes patients manifestent souvent une grande peur lors des examens, pré-sentent des problèmes d’identité sexuelle, d’autonomie, dans le domaine relationnelen général, avec l’intimité plus spécifiquement, vivent des difficultés dans la rencon-tre avec le monde du travail. Leurs histoires dépressives sont colorées des thèmesdéveloppementaux : dépendance, image de soi, futur incertain comme adulte, rela-tions intimes, succès dans la vie, sens de la vie, impression de vide. De même, lesparents sont en lutte dans cette phase de vie. Souvent ils se trouvent à la recherched’un «bon» rapport avec leur «enfant adulte» : Jusqu’où faut-il le protéger? Doit-onlui laisser le champ libre? Que faire quand l’action choisie conduit à l’échec? Peut-on montrer son inquiétude après une tentative de suicide? Et sa colère? Est-ce que jel’invite à la maison parentale quand il se trouve pris de panique? Après un échecrelationnel? Combien de temps continue-t’on à financer les études?

Parents et jeunes adultes ont paradoxalement tendance de s’impliquer fortementl’un et l’autre pendant cette phase de formation de l’indépendance. Le jeune adultedoit négocier son autonomie envers ses parents en maintenant un lien sain et intime.Pour réussir cette négociation, les familles doivent faire appel à une capacité demanier des conflits (19) tout en maintenant un lien solide. Il est évident que cette

jóvenes y sus familias. Durante las conversaciones en grupo se crea la ocasión para el intercambio, lo queofrece a los participantes la oportunidad de encontrar nuevas formas de expresión. Los terapeútas ponenespecial atención en transformar quejas en deseos constructivos, y en evitar percepciones en términos depatología. Los terapeútas promueven la apertura de nuevas posibilidades a través de la búsqueda de dife-rentes significados para una misma palabra, para el mismo suceso.

Mots-clés : Dépression – Suicide – Jeunes adultes – Thérapie multifamiliale – Stade de vie.

Keywords : Depression – Suicide – Young adults – Multiple family therapy – Developmental stage.

Palabras claves: Depresión – Suicidio – Adultos jovenos – Grupos de discusión familiar – Etapa dedesarrollo.

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capacité de supporter des conflits peut être entravée par la dépression d’un membrede la famille (enfants ou parents). Nos patients jeunes adultes font facilement réfé-rence à leurs parents. Ils mentionnent des difficultés de contact dans le présent oudans le passé, le poids des appréhensions de leurs parents et des conflits non résolus.On pourrait comprendre ces thèmes comme des démarches visant à transformer lastructure de la famille. Parents et enfants se cherchent des nouveaux contenus pourleur rôle respectif. Il est clair qu’une dépression ou des troubles anxieux peuventcompliquer ce processus.

La clinique semble indiquer des interactions capables d’intensifier l’angoisseou des sentiments dépressifs. Ainsi en est-il de jeunes adultes anxieux ayant un oudeux parents anxieux, des enfants dépressifs avec un parent triste. L’un et l’autre seconfirment dans un cercle vicieux. Les enfants de parents ayant un trouble d’ordreaffectif ont une probabilité de 40 % de souffrir d’une dépression majeure avant leurmajorité. (8). Non seulement le risque dépressif est énorme, la recherche nousmontre un même risque pour des troubles anxieux et pour l’alcoolisme. (51). Lesfacteurs familiaux sont très importants dans la dépression juvénile (16). Critiqueparentale, conflit conjugal et difficultés dans la communication parent-enfant ontune influence sur le développement et le cours d’une dépression chez les jeunes(25, 13, 17). En plus, un manque de cohésion dans la famille est associé à ladépression (27), et les conflits familiaux sont prédictifs d’un déroulement négatif(16). En dépit de liens clairs entre dépression et facteurs familiaux, il existe trèspeu d’interventions familiales qui ont été évaluées dans ce groupe de patients (16,25, 33, 34, 35, 10, 9). Par contre, les quelques études qui se penchent sur ce groupeindiquent que la participation parentale diminue la dépression chez le jeune (33) etqu’une thérapie familiale améliore plus le fonctionnement familial que la Cogni-tive Behavior Therapy (10).

Tout en axant le travail sur le stade de vie et tout en incluant la famille, nousavons mis en place un groupe de discussion familiale « Jeunes Adultes et Parents»(JAP). L’idée se base sur des expériences préalables de thérapie multifamiliale engroupe avec des patients psychiatriques en centre de jour (32), avec des patientssouffrant de douleur chronique (32), et avec des patients dépressifs et mariés. Cetype de thérapie familiale a été moins appliqué chez les jeunes dépressifs et lesmembres de leur famille (26, 28, 36, 29) que chez les jeunes schizophrènes (38),(46) ou les anorexiques (20). Anderson et al. (2) ont trouvé qu’une thérapie fami-liale traditionnelle et une thérapie de groupe de type psychoéducatif aidaient lespatients dépressifs adultes à se sentir plus optimistes, à mieux contrôler leur dépres-sion et à avoir une attitude plus positive envers leurs familles. Les membres de lafamille, à leur tour, acquièrent plus d’espoir et sont moins critiques envers lespatients. Récemment une étude portant sur un groupe familial à visée psychoéduca-tive avec des jeunes enfants dépressifs et leurs parents a démontré une améliorationdes interactions familiales et l’augmentation du soutien parental (21).

Cet article décrit successivement le groupe, les objectifs, l’organisation et ledéroulement du groupe JAP. Ensuite quelques observations cliniques et une discus-sion clôturent l’article.

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Description du groupe «Jeunes Adultes et Parents» (JAP)

Le Service Psychothérapeutique

Le service psychothérapeutique offre un programme clinique de psychothérapied’une durée de trois mois. Les patients ont la possibilité d’être hospitalisés ou defréquenter un centre de jour. Les thérapies de groupe forment le noyau de la prise encharge. Les séances reposent sur quatre piliers théoriques : la thérapie cognitivo-comportementaliste, la systémique, la thérapie psychocorporelle et un pilier quis’axe sur la réactivation. Les thérapies de groupe consistent en : groupe d’interac-tion, groupe sur la dépression, groupe sur l’angoisse, ergothérapie, groupe non ver-bal, exercices de communication, groupe narratif, groupe de travail expressif sur lesimages, groupe d’aptitude sociale. La plupart des patients suivent en plus un traite-ment psychopharmacologique. Chaque patient a aussi la possibilité d’un contactindividuel avec l’infirmier psychiatrique référent et avec le psychiatre en formation.Après une période de prise de contact, des thérapies spécifiques et individuellespeuvent se joindre à cette offre. Ces thérapies se basent sur les quatre piliers vusplus haut. On accorde beaucoup d’importance à la création et au maintien de la posi-tion du client, à la recherche d’aide active, pendant toute la durée de l’accueil dansle service (40, 43). Formellement ceci s’appuie sur un entretien préalable, concer-nant les objectifs thérapeutiques, et par des entretiens mensuels d’évaluation. D’unefaçon plus informelle l’équipe cherche à obtenir une attitude favorisant un équilibreentre «provoking» et «caring» (3). Après le passage dans le service, il est mis fin àl’hospitalisation et un suivi externe est mis en place. En plus des séances systé-miques de groupe, les thérapeutes familiaux proposent des thérapies familiales àchaque famille et des groupes de discussion pour plusieurs familles. Cet article rendcompte de cinq cycles de groupes JAP qui se sont déroulés dans le service.

Les jeunes adultes

Les critères d’inclusion pour le groupe JAP sont les suivants :

a) Admission pour problématique dépressive ou anxieuse.

b) Age entre 18 et 28 ans.

c) Ne pas habiter dans une famille fondée par soi.

d) Dépendance économique des parents.

Des jeunes adultes mariés ou ayant des enfants ne sont donc pas invités augroupe. Les personnes vivant ensemble avec un(e) ami(e) mais dépendant économi-quement de leurs parents par contre sont admises. Notre échantillon porte sur 20jeunes adultes et cinq groupes JAP successifs.

La moyenne d’âge est de 21.5 ans (Déviation Standard = 2.3, âge entre 25 et 17).Il s’agit de 14 jeunes femmes et de 6 jeunes hommes. Quatorze participants ont uncursus d’études plutôt chaotique. Quatorze sont toujours étudiants, dont deux enapprentissage. Deux ont achevé leurs études avec succès et sont au travail, quatre

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autres sont au chômage. Quatre participants vivent actuellement dans la maisonparentale, les autres vivent plus au moins «autonomes», la plupart en «kot6». Cinqsur vingt ont un lien amoureux, sept viennent de vivre une rupture relativementrécemment, huit n’ont pas de partenaire. Deux jeunes adultes n’ont jamais trouvé depetit copain ou de petite copine

Onze familles sont les familles nucléaires d’origine. Trois des familles sont eninstance de divorce. Quatre couples de parents ont déjà divorcé. Deux familles sontrecomposées. Trois familles ont été éprouvées par un décès : deux ont perdu unenfant, une, un parent. Trois des participants sont enfant unique, treize ont un frèreou une sœur, les quatre autres ont plus de deux frères ou sœurs. Une partie de la fra-trie participe.

Tous les jeunes adultes ont un diagnostic de dépression (11) ou de problèmeanxieux (9) selon le DSM IV. Sept d’entre eux ont fait une tentative de suicide.Deux autres sont admis pour menace de suicide.

Nous utilisons la Symptom Checklist (SCL-90: version néerlandaise (4) (tableau I,p. 370). Qu’ils soient hommes ou femmes, les participants ont des scores très élevésen comparaison avec la population normale. Les jeunes hommes se trouvent au-des-sus de la moyenne des scores obtenus dans une population psychiatrique, les scoresdes jeunes femmes sont les mêmes que la moyenne d’un groupe psychiatrique. Lesmères présentent des scores élevés par rapport à une population normale. Huit d’entreelles ont des scores individuels hauts, et une mère se situe même au-dessus de lamoyenne d’une population psychiatrique. Les scores de la fratrie se situent dans lamoyenne d’une population normale.

Ces données semblent confirmer notre impression de clinicien qu’il s’agit d’uneproblématique sévère. Les scores élevés de dix des parents (neuf mères, un père)peuvent indiquer que nous retrouvons dans notre population le phénomène signalédans la littérature : il existe un lien entre la dépression parentale et les difficultés desenfants (8, 51). Le nombre important de plaintes présentées par les parents peutaussi traduire la façon dont ils vivent la crise actuelle. La fratrie par contre semblesouvent ne pas trop en souffrir.

Ce sont les thèmes suivants qui préoccupent les jeunes adultes de l’étude :

• Des difficultés concernant le passage au monde du travail. Les études sont termi-nées ou touchent à leur fin. L’intégration dans le monde du travail suscite de lapeur ou échoue, avec comme corollaire, une dépendance financière prolongéeaux parents.

• Des échecs répétitifs dans les études avec dépendance aux parents.• Des liens amoureux suscitant des conflits avec les parents.• La fin d’une relation amoureuse comme facteur déclenchant de réactions dépres-

sives et motivant une admission dans le service. Dans cette tranche de vie,s’engager dans une relation amoureuse implique ici plus qu’ailleurs un change-ment dans l’attachement à la famille d’origine. Perdre un amour est soudainement

6 Chambre d’étudiant ou de jeune adulte louée à un particulier.

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perdre tout, le partenaire ou le partenaire futur imaginé. Ceci interpelle à la foisles jeunes adultes et les parents. Faut-il retourner vivre à la maison? Est-ce sou-haitable pour le jeune adulte, pour la famille? Comment cela va-t-il entraver leprocessus d’indépendance en cours?

• Se débattre avec les grandes questions de la vie et du futur :

– «Quel est le sens de tout? Quel est le sens, le but, la valeur d’une vie d’adulte?La vie se limite-t-elle à toujours travailler ? Comment trouver un bon équili-bre entre travail/plaisir, entre le temps pour moi-même et le temps pour lesautres? Dois-je vraiment devenir plus égoïste ? Où est ma voie? Dans quelledirection m’orienter ? Quelle est la route que mes parents, la société ont choi-sie pour moi? Dois-je la suivre ou pas?»…

• Des discussions entre jeune adulte anxieux et parents (souvent anxieux) : Faut-ilse mêler ou pas, aider ou s’abstenir ? Où sont les frontières personnelles ? Lejeune doit-il demander de l’aide ou refuser l’aide reçue?

Les objectifs thérapeutiques

Avec la mise en place des groupes de discussion familiale, nous poursuivonstrois objectifs :

1. la promotion de l’autonomie tout en maintenant le lien ;

2. la promotion de la famille comme ressource ;

3. la création d’une communauté de soutien.

Tableau I : Scores SCL-90 en début de groupe.

Normes Groupe

Hommes Femmes Pt M Pt F Pères Mères Fratrie

SD M M SD M M M M M

Anxiété 4,3 13 15 5,7 28 28 14 19 13

Phobie 2,1 7,9 8,7 3,4 16 15 7,7 9,9 7,4

Dépression 6,3 21 24 8,6 59 51 24 37 21

Somatisation 5,7 17 19 7,1 31 27 16 21 16

Insatisfaction 4,6 13 14 5,1 30 25 14 18 12

Sensitivité 6,8 25 26 8,8 54 48 25 33 24

Agressivité 2,5 7,5 7,6 2,4 15 13 8,2 9,3 7,6

Sommeil 2,4 4,6 5,2 2,8 7,5 8,5 6 7,6 5,2

Totalité 27 117 129 36 240 214 126 156 107

Patient Masculin, N = 6 Patient Féminin, N = 12

Pères, N = 14 Mères, N = 16 Fratrie, N = 13

M = moyenne SD = déviation standard

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1. La tentative de maintenir les liens tout en favorisant une démarche d’auto-nomie se révèle dans le désir de rompre l’isolement des parents tout comme despatients : nous promouvons les contacts entre la famille (parents) et le service.Une admission dans un centre de jour crée moins d’occasions spontanées de ren-contre qu’une hospitalisation complète. Malgré les contacts spontanés pour despatients admis en temps plein, les parents se plaignent de la distance et de leurimpuissance, tant à l’égard de l’institution que du jeune adulte. Par les groupesJAP ce contact est formellement réinstallé.

Créer des liens signifie aussi intensifier l’intégration des narrations au sein d’unefamille et entre les familles. Les discussions de groupe permettent de relier laproblématique actuelle aux «narrations» d’autres membres de la famille et aurécit de la vie familiale en général. En donnant au jeune adulte l’occasion de par-ler en son nom propre, le groupe offre l’opportunité de changer grâce àl’échange langagier. Ce même dialogue et la liberté donnée aux parents deraconter des récits personnels diminuent l’identification du parent à ce seul rôle.

L’échange avec d’autres familles offre la possibilité tant aux parents qu’aux jeu-nes adultes de créer une signification propre à soi dans un contexte élargi. Ledialogue permet d’intégrer ses expériences dans un contexte plus large. Pouvoirs’insérer dans un monde de significations au-delà de soi est un des élémentsamenant à une plus grande « résilience» individuelle et familiale, nous montreWalsh (50). La résilience étant la capacité de se sentir plus fort après coup.

«Que signifie choisir son avenir et comment s’y prendre?» est une des ques-tions que les jeunes adultes se posent en parlant ensemble dans le cercleintérieur du « fish bowl7 ». (Nous y reviendrons plus loin) Il y a tant de choixà faire et ils semblent tous si définitifs. Tous incluent et excluent tantd’options. Les parents s’accrochent à cette question quand c’est à leur tourde parler au milieu. Ils réfléchissent à leurs propres choix, choix qui étaientplus limités ou faits par d’autres. Choisir son futur prend un sens historiquependant cette conversation. Les jeunes adultes d’aujourd’hui ne se trouventpas devant les mêmes choix qu’à la génération précédente.

Favoriser des liens est important pour nous, qu’il s’agisse de liens entre person-nes ou des liens entre les différentes significations. Dans la théorie de l’attache-ment, cette notion est aussi fondamentale. Une «sécurité de base» est une res-source pour arriver à l’autonomie pendant cette tranche de vie. Des élémentscomme un conflit conjugal (5), un conflit enfant-parent, un attachement non fia-ble entre parents, un attachement non « sécure» de la part d’un des parents, – enraison d’anxiété, de dépression parentale, d’expérience de deuil – peuvent per-turber la «sécurité de base» et l’accessibilité des figures d’attachement. La théo-rie de l’attachement nous sert d’inspiration pour poser des questions, stimuler les

7 «Bocal à poissons» : technique particulière utilisée dans le travail de groupe. Elle consiste à mettre aucentre un sous-groupe (comme les poissons dans un bocal) chargé de discuter pendant que les autresparticipants observent. Dans un second temps, les rôles sont inversés et ainsi de suite.

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discussions et rechercher comment augmenter la sécurité de base. Trouver dusoutien chez d’autres parents accroît le pouvoir individuel d’offrir une certainesécurité à leur enfant (19). Un foyer accessible et fiable crée l’espace à l’explo-ration et à la formation d’une identité ; il en est de même pour la formation derelations amoureuses (22). Le groupe offre une atmosphère suffisamment sûrepour permettre l’expérimentation du relâchement des liens et d’autonomie. Legroupe est en même temps un tremplin et un filet pour le jeune adulte.

2. Comme deuxième objectif thérapeutique majeur, la famille est considéréecomme ressource et chacun est interpellé dans sa compétence (7). Les parentssont là pour aider. Le patient est là pour s’aider et pour aider ses parents, safamille et le thérapeute. Des expressions issues du vocabulaire psychopatholo-gique (« femmes castratrices», « familles dysfonctionelles», «pères autoritaires»,«mères trop protectrices») sont recadrées. Dans une pensée circulaire, les diffi-cultés sont liées à la famille et bousculent la famille en crise. La création d’unespace pour les familles en crise leur offre l’opportunité de partager leurs com-pétences et leurs hésitations. En même temps que les parents reçoivent du sou-tien dans leur rôle, le groupe suscite des conversations sur l’angoisse et les dou-tes. Pour cette raison « l’autorévélation» est promue.

Les narrations (ou récits) qui s’organisent autour du problème ont tendance àêtre prépondérants (53). Afin de créer une vision alternative, l’admission dans leservice psychothérapeutique est cadrée dans un contexte de développement de lavie. Les concepts de «maladie» et de «problème» sont renvoyés à un secondplan. Toute personne est donc plutôt impliquée dans son humanité : «parent de»,«enfant de», « frère de» et moins dans son statut de malade. Ceci se rapprochede la vision actuelle sur le traitement de la dépression (37). Le thérapeute libéréde son rôle «médical» dans lequel il est demandé de répondre aux questions tel-les que : que se passe-t-il, quel est votre diagnostic, quel est le pronostic ?… peutjouer son rôle d’expert de la conversation. Autrement les tâches développemen-tales risquent d’être interprétées comme des troubles. Un dialogue axé sur ledéveloppement de la vie et la croissance est dépourvu de pathologie.

Nous faisons aussi appel aux compétences et aux ressources des familles enorientant les discussions de groupe vers le futur. En focalisant l’intérêt sur lesbuts, les rêves de familles, l’espoir, la collaboration et la compétence sont stimu-lés. Dans ce sens, chaque personne est prise en compte comme actrice de sa vie,plutôt que comme victime. Une partie importante de ce travail se déroule sou-vent pendant l’entretien préliminaire. Connotation positive, reformulation de laplainte en désir, aident à orienter le dialogue vers l’avenir. Une expressioncomme «mes parents m’étouffent avec leurs inquiétudes» (qui renvoie sur leplan sémantique à : culpabiliser, victime, opposition) se transforme alors en « jevoudrais chercher avec eux un rapport agréable» (qui fait référence à : collabora-tion, acteur, construire). Les plaintes concernant le passé sont vues comme unetentative de favoriser l’interaction présente et future. Cela nécessite souvent lacapacité d’accepter l’imperfection de soi et de l’autre. Nous proposons de réser-

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ver d’emblée un a priori positif aux parents. Ils ont voulu cet enfant, lui ont sou-haité une vie heureuse et doivent maintenant intégrer le fait que cet enfant neveut plus de la vie, la refuse.

3. Un troisième objectif majeur des groupes JAP est de stimuler l’aspect com-munautaire. Dans cet espace, les significations sont partagées et nuancées. Par-ler ensemble dans ce groupe favorise les associations où chacun peut expérimen-ter des significations nouvelles et élargies. Les thérapeutes y travaillent envalorisant le plus de positions possibles en même temps. Les techniques utiliséessont les messages de forme «et/et » et des messages liant l’un à l’autre. Tout avispeut s’exprimer. La décentralisation du thérapeute favorise la conversation ausein même des familles et surtout au-delà des frontières familiales.

La communauté fonctionne aussi comme « tuteur». Une personne soutenue pard’autres sera plus capable de se soutenir elle-même. Par le groupe, la force por-tante de tous s’accroît : il peut s’agir de soutien émotionnel, de support pourl’affirmation de valeurs, d’appréciation réciproque, de soutien en réseau, de sou-tien altruiste (15). Les groupes de discussion peuvent fonctionner comme réseaupour les familles stressées (50). Donner l’opportunité aux patients d’apporter dusoutien aux autres engendre un changement de rôle spécialement pour lespatients dépressifs et leurs familles. De plus, il est connu que pouvoir offrir del’aide sauve davantage de vies que d’en recevoir.

Impliquer les parents dans le traitement de jeunes adultes contient aussi unedimension éthique. Les thérapeutes systémiques ont l’habitude de respecter lafamille. Dans ce système où tous sont liés, parents, frères et sœurs souffrentensemble. En participant au groupe JAP, ils sont reconnus dans cette dimen-sion. Créer une distance entre parents et enfants n’est pas notre option. Il s’agitplutôt de favoriser un processus de différenciation, et ce, grâce au dialogue.Impliquer les parents trouve un autre point d’ancrage éthique, dans la mesureoù la littérature souligne les effets perturbateurs des difficultés des enfants surles parents et sur leur relation conjugale. En les impliquant on respecte leurrelation (23).

Si possible, les thérapeutes introjecteront leurs connaissances professionnellesdans la conversation. Cela se fait prudemment, en reliant ces connaissances à dessignifications qui circulent dans le groupe. Ceci afin d’éviter d’étouffer le dialo-gue par une position d’expert.

Organisation et déroulement des groupes JAP

Avant le début du groupe, les jeunes adultes et leurs parents bénéficient dequelques entretiens préliminaires afin de motiver les familles à participer et de créerun espace pour prendre en considération leurs points de vue. Après la description del’entretien préliminaire individuel et de l’entretien préliminaire en famille, nousdécrirons le déroulement du groupe JAP lui-même.

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La route vers le groupe JAP

L’entretien préliminaire avec le jeune adulte

Les jeunes adultes ont des réactions très diversifiées à l’invitation de leurfamille. Certains la proposent d’emblée ou se montrent immédiatement enthousias-tes, d’autres sont pris de panique. Cette dernière réaction est très compréhensible.Certains, impliqués dans un processus laborieux d’individuation, frémissent à l’idéed’inviter leurs parents. Vu que se détacher est un processus circulaire dans lequeljeunes adultes et parents interagissent (dans une certaine histoire et une certaine cul-ture), l’accompagnement de ce processus est facilité en présence des acteurs.Comme C. Whitaker (52) l’écrit : «Your ultimate capacity to be an autonomous,self-sufficient person is directly linked to your capacity to be a part of and to reallybelong to others». «Votre capacité fondamentale d’être autonome et auto-supportifest directement liée à votre capacité de faire partie d’un ensemble et d’apparteniraux autres. »

Pour respecter le désir d’autonomie des jeunes adultes, la première étape condui-sant au groupe JAP commence par un entretien individuel. Pendant cet entretien, laposition du service est clarifiée : impliquer la famille dans le traitement est notrechoix, mais seulement si le jeune adulte est d’accord. Par cette démarche la positionde l’équipe est claire et le jeune adulte est interpellé dans sa capacité de choisir.

La plupart du temps les jeunes adultes sont immédiatement enthousiastes àl’idée d’inviter leurs parents. Ceux qui «hésitent» expriment rarement leur positionpersonnelle : « Je ne le veux pas». La plupart formulent l’hésitation en évoquant lepoint de vue de l’autre : « Ils ne voudront pas». Cette position de doute donne lieu àune négociation hebdomadaire entre thérapeute et jeune adulte. L’hésitation elle-même comporte en soi des éléments d’interactions familiales, des significationsimportantes ou une peur de la réaction parentale. («Ma mère fera une scène, et moij’aurai honte encore une fois. »)

Karen (20 ans) nous dit qu’elle se sent mal depuis un certain temps. Elle aperdu tout contact avec ses sentiments et avec elle-même. Au moment del’admission, les rapports psychiatriques signalaient des éléments dissocia-tifs, des fugues, des sentiments de dépersonnalisation et des menaces de sui-cide. Deux semaines avant l’admission, Karen a arrêté ses études. Elle nousdit qu’elle éprouve des difficultés à maintenir une certaine distance enversson ex-petit copain. La proposition d’inviter ses parents et sa fratrie metKaren en colère. L’exploration de cette colère nous montre une attitudedéfensive face à une mère perçue comme « intrusive» et « faisant des criseshystériques». Karen a peur que sa maman se mette au centre de la thérapie etqu’elle essaie de tout diriger. Elle craint qu’ici encore, sa mère lui reprennela petite liberté qu’elle a découverte. Nous apprenons donc que le refus deKaren est une tentative de protége sa dignité. Plus tard la négociation per-mettra un rendez-vous avec son frère, pour arriver quelques semaines plustard à une invitation des parents, cette fois-ci à la demande de Karen.

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Après avoir obtenu l’accord, l’entretien individuel sert à formuler les objectifspour la séance familiale. Ici, le thérapeute envisageant une collaboration, resteattentif à transformer les intentions parfois agressives des jeunes adultes (« Je vaisenfin pouvoir leur dire ma vérité!») en désirs de changement. Parfois les jeunes adul-tes demandent d’exclure certains contenus du rendez-vous avec leur famille (exem-ple : une expérience d’inceste fraternel méconnu). Cette demande est discutée etrespectée. Ensuite il faudra décider qui invitera la famille. Cette invitation doit sefaire dans un souci de collaboration et de respect de la souffrance de tous ; elle tientcompte de leur grande compétence à s’entraider au sein de la famille. Un objectifgénéral de la rencontre avec la famille est d’éviter le phénomène de la « meule»dans lequel, sans concertation, parents et thérapeutes auraient des actions contradic-toires qui écraseraient le patient coincé entre eux. Les parents qui refusent une telleinvitation sont très rares. Lorsque les jeunes adultes choisissent d’inviter les parentseux-mêmes, nous les «coachons» si nécessaire.

L’entretien familial préliminaire

La plupart du temps il s’agit d’un seul entretien. L’idée du groupe de discussionfamiliale est introduite. D’emblée, il s’agit de créer une ambiance de collaboration.Les objectifs supplémentaires des jeunes adultes ou d’autres membres de leur famillesont discutés.

Jef veut parler à son père d’un secret difficile à porter : après le décès demaman il y a huit ans, papa s’est vite remarié. Jef a trouvé ceci douloureux.Mais son empathie pour la souffrance de papa et sa reconnaissance pour lesbons soins qu’il leur apportait l’ont empêché de parler d’indignation. Lepremier entretien de famille y est consacré.

Les parents de Mathias ont divorcé il y a sept années. Depuis lors, Mathiaséprouve des difficultés à « trouver sa place». Il n’y a point de collaborationentre les parents. L’entretien familial est seulement la quatrième occasion,en sept ans, pour les membres de la famille d’origine de se retrouver. Tout endirigeant l’attention vers la demande de Mathias, nous nous efforçons detrouver une base de collaboration.

Le frère de Thérèse souffre d’un handicap moteur. La famille s’est organiséeautour de ses besoins. Dans ce contexte, Thérèse n’ose pas parler de sesbesoins personnels. Elle a peur de blesser son frère et ses parents.

Afin de promouvoir la collaboration, le thérapeute a recours à des techniques de« joining», de connotation positive et de reconnaissance. Une critique parentale esttransformée en désir de changement, les tensions sont recadrées comme des tâchesdéveloppementales en attente de solution. Enfin les infos (dates, temps) concernantle groupe JAP sont discutées et la famille est invitée.

Le groupe de discussion familiale JAP

Dans un premier temps, nous présenterons la structure et l’organisation desgroupes JAP. Ensuite, nous décrirons le déroulement. Une attention spéciale estapportée à l’introduction et à la mise en place du groupe.

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La structure et l’organisation des séances JAP

Un groupe est constitué de 3 à 5 jeunes adultes accompagnés de leur famille. Laséance est dirigée par deux thérapeutes et une cinéaste. Les séances sont structuréessur le principe de la thérapie du centre de Milan (45). De ce fait, une séance sedécoupe en cinq parties : un échange préalable, la discussion en groupe, une discus-sion intermédiaire, un message final, une discussion dans l’après-coup.

Les thérapeutes démarrent la soirée par un échange entre eux. Le but n’est pasexplicitement de formuler des hypothèses, mais plutôt de mettre en commun lesimpressions laissées soit par les jeunes adultes et les familles lors de la dernière ren-contre, soit par les jeunes patients pendant les journées de thérapie de groupe. Par-fois les thérapeutes décrivent les familles et les jeunes adultes par des phrases méta-phoriques ou titres d’histoire (par exemple : famille A : «Améliorer le monde estplus facile que vivre ensemble», fille A «Et si j’étais un Indien»). Visionner unextrait de la dernière séance donne souvent l’occasion de se mettre dans l’ambiance.

Suit alors la discussion de groupe.Les deux premières séances (séance 1 : présentation, séance 2 : conversation

entre parents) se déroulent selon un schéma plus ou moins fixe. Le contenu dechaque séance se développe au travers du dialogue. Un des buts est d’engager acti-vement le plus grand nombre possible de personnes. Avec certains groupes, celaexige que le thérapeute soit actif et directif. D’autres fois, une simple question suffitpour démarrer le processus. Le temps disponible et la possibilité de faire le tourd’un « thème» déterminent la fin de la discussion de groupe.

Une pause-café est prévue après une heure et demie. Pendant cette pause, appe-lée « la discussion intermédiaire», les thérapeutes discutent du déroulement de laséance. Ils préparent un message final. Autour du café se développent des conversa-tions animées entre les membres des différentes familles. Ce phénomène a été décritpar l’équipe de Milan, où les pauses pouvaient être observées derrière un miroirsans tain. Diverses interactions entre les membres d’une famille sont parfois plusintenses que pendant la séance. Ce même phénomène d’échanges actifs s’observeau sein du groupe JAP, tant au niveau intrafamilial qu’interfamilial. Une mèreconsole une autre mère en instance de divorce ; un père s’entretient avec un filsd’une autre famille sur son choix d’études ; après une rupture de plusieurs années,une mère et une fille, qui se rencontrent uniquement lors des séances de groupe, res-tent dans l’espace du groupe et parlent ensemble.

Avec le message final, les thérapeutes font part de leurs associations. Celles-citouchent tant au contenu qu’à la forme. Le contenu du message final est introduitpar une conclusion, une métaphore, un nom pour un thème qui reprend et synthétiseune grande partie de l’échange. Ces conclusions, métaphores, peuvent en mêmetemps donner des éléments de réponse et soulever des questions nouvelles. Ainsi,les thérapeutes peuvent souligner les diverses réactions au thème abordé. Une autrefaçon d’introduire une conclusion peut se faire sous la forme suivante : les thérapeutesfont référence à des expressions, à des phrases dites pendant la discussion degroupe. Ainsi, ils essaient de construire une trame pour étoffer la conclusion avec ce

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qui a été amené par certaines familles et certaines personnes. Les thèmes sont sou-vent introduits sous forme de «dilemme», «d’équilibre» entre deux éléments quisemblent indépendants voire opposés.

Nous empruntons ce style au travail avec le « reflecting team » («équipe réflé-chissante») (1). Il s’apparente aux évolutions récentes du modèle intégré de DBT(Dialectical Behavior Therapy) et de thérapie familiale (41). Trouver l’équilibre, lejuste milieu, devient ainsi un devoir implicite pour les membres de familles. Lesparticipants ont l’occasion de faire quelques brèves remarques pendant et après lemessage final. Les thérapeutes montrent à chaque fois leur considération et leuradmiration pour la largeur d’esprit et la confiance établie pendant la discussion. Par-fois ce petit discours crée l’opportunité d’introduire une partie de «connaissances».Il ne s’agit pas de la psychoéducation pure et simple, car chaque «petit détour théo-rique» sert seulement de point de départ d’une conversation. La séance se clôtureformellement par une invitation à la prochaine rencontre et par les adieux.

Un exemple de message final :

«Je voudrais vous faire part de quelques réflexions. Nous avons abordé laquestion : “Comment s’accepter soi-même? Comment choisir son futur,devenir soi-même?…. ”. Pendant la discussion nous avons perçu de lacolère, de l’irritation. Nous avons réfléchi à cette colère pendant le break.J’avais le sentiment qu’il s’agissait d’une colère sensée, parce que nousavons parlé de l’essentiel de la vie. La colère fait partie de la vie. Ici, il mesemble qu’une partie de la colère tient au fait que chaque génération doit ànouveau se battre avec le “ shit” de la génération précédente. Plusieursparents nous ont raconté qu’ils venaient d’un monde “ où il n’y avait pointde choix”. Leur histoire les a poussés, en partie, à offrir ce choix à leursenfants. En tant que parents, vous essayez d’offrir à vos enfants le plus grandcadeau : la liberté et puis ils vous disent : “ Nom d’une pipe, ne pouvez-vouspas garder vos frustrations pour vous, moi maintenant je DOIS choisir.Donc où est la liberté?”…Vous vous rendez bien compte des difficultésdevant lesquelles vous nous mettez en nous offrant tant de possibilités, dechoix. Stefan par exemple, je me rappelle que tu nous disais comme c’étaitfrustrant de recevoir comme réponse à tes questions : “ Fais ce que, toi, tudésires”. Cela te donnait l’impression de te trouver sans soutien ; tu as tiréla conclusion qu’il valait mieux t’arrêter de demander…»

La colère parentale se perçoit aussi dans l’impossibilité de réussir. Unparent n’a d’autre désir que de réassurer son enfant hésitant, anxieux quantau futur : «Viens ici, fais ceci, deviens cela,… » Seulement vous savez que sivous donnez des conseils trop rassurants cela vous vaudra aussi une colère :«Vos attentes me pèsent comme du plomb, ils me coupent les ailes», commeon vient de l’entendre dans l’histoire de Tessa et son papa. Chez vous, Tessa,on peut entendre que les jeunes adultes sont aussi fâchés avec les parents quisemblent tout savoir : «Si vous avez toutes ces connaissances, si vous savezsi bien comment vivre la vie, dites-le nous !» Et ensuite la colère qu’engen-dre la réponse : «Je ne le sais vraiment pas». Comme si vos parents vous

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refusaient de donner la chose la plus importante. Si le parent admet : «Oui,moi aussi je ne sais pas comment aborder la vie», il s’en suit également de larage : «Si toi tu ne le sais pas, comment, moi, pourrais-je le savoir !». Tantde colère traduit une tâche bien difficile à réaliser. Vous m’apprenez que lesdeux attitudes opposées ont leurs travers. Quel poids la phrase : «Fais ceque tu veux» peut-il représenter? Quel poids l’attitude : «Fais ce que moi jeveux» peut-il avoir? De bonnes intentions peuvent être interprétées très dif-féremment. On est si vulnérable quand de telles complexités doivent passerpar des mots.Par ailleurs, il me semble que vous dites que la confirmation d’un choix estimportante. Mais comment trouver cette confirmation? Chacun de nous sem-ble avoir besoin de l’appui d’autres. Chacun de nous recherche un regardauto-validant, qui signifie que nos choix conviennent. Peut-être une partie desavoir-vivre se trouve-t-elle dans la recherche de gens proches de nous?

Après la séance, les thérapeutes et l’opératrice vidéo discutent ensemble pourétablir un bilan final : décompression, évaluation de la séance et du message,conversation sur des éléments non utilisés. Le tout est noté brièvement afin dedémarrer la séance suivante.

La première séance de groupe

Pendant la première séance de groupe, nous veillons à la création d’un espacethérapeutique (40). Nous référant aux principes de base, il convient à celui qui lancel’invitation (ici le service, le thérapeute familial) de poser un cadre pour la rencon-tre. Au début, les participants se trouvent souvent sous tension, les familles manifes-tent des signes de stress. Pour cela, au départ, nous accordons beaucoup d’attentionà la sécurité en groupe, à la raison d’être thérapeutique de cette rencontre et àl’importance du dialogue.

D’un point de vue méthodologique, le thérapeute commence par un petit dis-cours d’introduction et par les présentations. Il donne quelques règles pour la ren-contre et définit les participants comme soutiens mutuels (donc tous aussi commedes demandeurs potentiels d’aide).

Un exemple :

«Des jeunes adultes viennent nous trouver parce qu’ils se demandent quelchemin suivre dans la vie. A ce moment, ils craignent d’avoir perdu la direc-tion à prendre. Vous les parents, vous cherchez quelle est la bonne placepour vos enfants, dans votre famille. Il est assez courant que des famillessoient en recherche, qu’elles se questionnent sur l’avenir, sur la manière dese comporter. Il est aussi possible qu’un parent lui-même soit en questiondans cette tranche de vie…. »

Parents et fratrie sont donc interpellés dans leur responsabilité de trouver uneissue, de partager cette responsabilité avec le service… A l’intérieur de cette méta-

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phore de la recherche d’une issue, d’un chemin à suivre, il est fait allusion auxidées : «apprendre l’un de l’autre» et «apprendre par différence et ressemblance».

En plus, nous énonçons une règle de base, selon laquelle personne n’est obligéde répondre et chacun peut dire : «Sur ce sujet, je préfère me taire». Avec un peud’humour, il est annoncé que cette règle permet au thérapeute de tout demander. Ilne doit pas être trop prudent, les participants prendront soin d’eux-mêmes.

La caméra est alors introduite et l’accord de tous les participants est enregistré.Si possible, nous travaillons à trois : deux thérapeutes et un stagiaire psychologuecomme opérateur de caméra.

Pendant le tour de présentation, la parole est donnée en premier lieu aux jeunesadultes. Le thérapeute fait appel à eux pour démarrer le processus. D’un côté, ceciest un choix d’opportunité : ils sont plus familiers avec le service et avec l’exercicede parler en groupe. La probabilité qu’ils s’ouvriront est plus élevée. De cette façon,ils pourront donner le ton au reste du groupe.

Du fait même que les jeunes adultes sont reconnus dans leur compétence, lemessage suivant est donné implicitement : «Prenez le devant ici, vous en êtes capa-bles». Ce message contredit souvent l’auto-description faite de plaintes anxieusesou dépressives. De cette manière le jeune adulte regagne une voix. Parfois ils ontperdu leur voix de peur de blesser les parents, ou parce qu’ils ont tellement crié queplus personne ne les écoute, ou encore parce que leur voix a été disqualifiée par la«maladie ».

Les questions sont toujours posées de manière positive. Les thérapeutes deman-dent aux jeunes adultes de présenter leur famille par un élément, une caractéristique,qu’ils vivent positivement. L’humour sert à les provoquer : « Ils peuvent remonter letemps jusqu’au moment où ils étaient dans le ventre de leur maman». Ce dispositifintervient dans l’organisation de la famille. Souvent ces jeunes adultes et leursparents ont beaucoup d’expériences de contact négatif ou douloureux dans le passéproche. Les parents se sentent souvent mal compris et mal traités, ils se sententdénommés «coupables» ou, encore plus souvent, ils se culpabilisent d’emblée. Lesparents apportent leur «moi» blessé («parent manqué», «enfant blessé») tout encraignant une instruction ou une humiliation en groupe. Cette introduction contre-balance cette crainte. Cela montre aux parents que les enfants sont reconnaissantsmême si la relation est difficile. De cette manière l’intervention parvient à diminuerune attitude défensive possible.

Les parents de Joren se montrent très tendus en arrivant pour la séance. Ilsse présentent comme une famille traditionnelle, plutôt fermée. La maladiechronique du papa a engendré une certaine isolation sociale. Leur attitudeinitiale est décrite comme incertaine/défensive. Joren se montre surpris parla question initiale. Après une hésitation, il raconte des excursions convi-viales qu’ils faisaient avant en famille. Papa y ajoute un épisode comiquequand il s’est trouvé dans le fossé avec sa chaise roulante. Papa et mamanse montrent plus relaxes, ils se redressent dans leur chaise et retrouvent unecertaine fierté.

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Après cette première étape suit une présentation des motifs de l’admission desjeunes adultes dans le service et de la manière dont ils vivent leur séjour. Une partiede leur douleur est partagée. Cette intervention favorise un sentiment d’apparte-nance à une communauté où circulent reconnaissance et intérêt de se trouver ensem-ble. La tension du groupe diminue, la franchise augmente. L’authenticité des jeunesadultes transmet le message qu’ils se trouvent ici ensemble dans une tentative des’aider.

Ce tour de parole clôture le plus souvent la phase d’introduction. Cependant, sile thérapeute a le sentiment d’un manque de sécurité dans la dynamique de groupe,il peut choisir de poursuivre sa démarche. Les thérapeutes vont alors à la recherchedes sujets de conversation qui rassemblent les familles et les différents participants.Ainsi démarre le travail de « raconter» (53) et d’apprentissage indirect (30). Suite àl’introduction dans laquelle on donne surtout la parole aux jeunes adultes, d’autresquestions essaient d’activer et d’impliquer les parents et la fratrie. Ce choix est basésur l’expérience que, pendant une séance de groupe, le seuil pour participer active-ment est d’autant plus bas que chacun a eu l’occasion de prendre la parole. Les thé-rapeutes se mettent immédiatement à établir des rapports entre les diverses manifes-tations des participants et des familles. Tout signe verbal ou non-verbal indiquantqu’un sujet résonne chez quelqu’un d’autre est repêché et constitue une invitation àune question ou à une réflexion. Le thérapeute conduit la conversation autour de cesthèmes, propose des choix, les relie à d’autres sujets et vérifie si le groupe embraye.De plus, il introduit lui-même les histoires concernant sa pratique de thérapeute.Explicitement, il respecte chaque position et chaque souffrance. Les différentesexpériences sont juxtaposées sans jugement.

Après l’introduction, le thérapeute demande :

«On vient d’utiliser l’image de la “ recherche de la bonne route dans lavie” : Que cherchez-vous? En quoi consiste votre plus grand désir de trou-ver votre voie?» Je voudrais poser cette question aux mamans et papas.Monique, mère de Thomas, répond : «Je me trouve avec beaucoup d’incom-préhension. Je voudrais comprendre. Tout est arrivé si soudainement. Jen’arrive pas à organiser ce qui arrive, et j’en ressens une grande douleur.»Le thérapeute offre une paraphrase et sélectionne une partie de ce qui estdit : «Vous nous apportez deux choses : “ ne pas comprendre” et “ soudaine-ment”. Quelqu’un d’autre peut-il associer là-dessus? Partons de ces deuxmots. »Quelques parents réagissent et racontent leur histoire. Ils nous montrent desressemblances et des différences. Ils introduisent de nouveaux éléments. Lamaman de Thomas raconte combien elle était effrayée par ce que la théra-peute ambulatoire lui avait dit après l’admission : «Elle aussi s’était fait dusouci pour la vie de Thomas.» La mère de Karla rejoint la conversation enexpliquant qu’une dépression est quelque chose d’incompréhensible pourelle, qu’elle s’est emberlificotée en mélangeant les expressions de soutien(«Allez, ça va aller») et sa tendance surprotectrice. Même dans cette situa-tion, la tentative de suicide de Karla l’avait complètement surprise. Les

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parents de Véronique se joignent à la discussion sur la dépression : la mère atraversé une période dépressive il y a deux ans. A ce moment-là, cette der-nière se battait avec son mari pour les mêmes motifs que Véronique avec sonpapa actuellement. Le père ne connaît que la volonté en raison d’une jeu-nesse où il a été confronté à beaucoup de pertes. Karla ajoute que le suicidelui semblait la seule solution pour échapper. A ce moment-là, elle réalisel’effet douloureux de son acte sur sa mère, d’autant plus que son père neprend plus aucun contact avec elles. Les autres jeunes adultes décrivent leurdilemme: réaliser que leur tristesse, leur tentative de suicide blessent leursparents, et que ce fait-même leur faisait encore plus perdre « leur chemin».

La deuxième séance de groupe

Cette séance est réservée aux parents. Les jeunes adultes n’y participent pas.Cette démarche crée une espace pour parler des soucis parentaux sans avoir à se sou-cier de la façon dont leurs mots seront perçus par leurs enfants. Ainsi les parentsobtiennent un espace pour s’exprimer avec moins d’appréhensions sur leurs blessu-res et leurs craintes. Le message implicite est que les parents peuvent préférer abor-der leurs craintes et le sentiment de leur responsabilité dans le sous-système parental.

Souvent, dans ce contexte, les parents se sentent libres de parler plus ouverte-ment de leur peur du suicide, de leur inquiétude par rapport au futur. Ils peuventlâcher le rôle de responsable. Par exemple, la colère envers son enfant qui a osé ten-ter de se suicider peut émerger sans crainte de blesser. Souvent, il est fait référence àleurs propres difficultés dans le présent ou dans le passé. La séance se termine parun «décision-dialogue» (48) dans lequel les membres du groupe décident quel estle message que le thérapeute peut transmettre aux jeunes adultes. Néanmoins, rienn’exclut qu’ils parlent eux-mêmes à leur enfant.

La discussion sur le «décision-dialogue» s’est acheminée dans la plupart desgroupes vers une décision de transparence totale. Ceci a comme conséquence qu’iln’y avait pas de message transmis par le thérapeute et que ce dernier pouvait faireréférence à tout ce qui avait été échangé.

La troisième séance de groupe

Le déroulement des séances est plus «souple» dès la troisième séance. Les théra-peutes essaient de démarrer un processus de dialogue au-delà des divers rôles présents.Le dialogue est stimulé en utilisant diverses frontières : parents/enfants, hommes/fem-mes, mères/pères, parents seuls, parents mariés, patients/aidants (et non soignants),tout en estompant ces frontières. La conversation est stimulée dans l’optique d’unerencontre de personnes (moi et toi). De temps en temps, ceci donne place à un «enact-ment», «mise en scène ou jeu de rôles». La rencontre de personnes dans un dialoguede «moi» à «toi» progresse en demandant à ceux qui parlent d’expliciter d’où leurviennent leurs connaissances (53). C’est-à-dire que les thérapeutes leur demandentd’expliquer quelles sont les expériences de vie qui leur ont donné cette connaissance.Les thèmes, les sujets de conversation peuvent émerger du «décision-dialogue» oubien être une réponse à la simple question: «Comment allez-vous?»

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D’autres techniques comme la disposition du « fish bowl» peuvent aider à initierle dialogue. Cette technique est une variante du Reflecting Team (1). Un des théra-peutes se place avec un sous-groupe (exemple : les jeunes adultes) dans un cercle aumilieu, l’autre thérapeute reste dans le cercle extérieur avec les autres participants.Le choix de mettre tous les jeunes adultes ensemble, en incluant fratrie et éventuelcopain, change déjà la division en catégories patient/non patient. Un contact directentre cercle intérieur et cercle extérieur est interdit pendant la durée du fish bowl.Pour cette raison, il est demandé aux participants de se placer de manière tellequ’aucun contact visuel ne soit possible avec les membres de la famille. Donc, seulun contact unidirectionnel entre certains participants est autorisé. Cette technique sebase sur l’idée que c’est l’écoute qui est à l’origine du changement (40).

Après un certain temps de discussion les rôles sont renversés : le cercle intérieurdevient cercle extérieur et vice versa. Les membres du nouveau cercle intérieur par-tagent les considérations, les questions, les remarques personnalisées sur ce qui aété dit pendant qu’ils écoutaient. Le thérapeute les aide à se concentrer sur lesmêmes thèmes, et sur les effets que certaines expressions ont eus pour eux. Lescommentaires émanant du cercle extérieur et les commentaires sans implicationpersonnelle sont bloqués. Le nouveau cercle extérieur à son tour, est influencé parl’écoute du nouveau cercle intérieur. La question ou le sujet de conversation du pre-mier cercle intérieur est introduit par le thérapeute et se base sur les conversationsdes séances préalables. Par exemple des questions comme: «Qu’aimeriez-vous cla-rifier pour vos parents/enfants ? Quelle est l’expérience de vouloir critiquer une per-sonne qu’on aime bien? En quoi est-il difficile de demander de l’aide à sesparents/enfants ?»

Le dispositif se termine par une conversation en cercle uni. A chaque reprise, lecontact direct est plus intense. Les participants s’impliquent plus dans leurs paroles.Celles-ci prennent un caractère plus personnel.

Parfois, les techniques de sculpting ou d’objets métaphoriques sont utilisées audébut de la troisième séance. Les objets métaphoriques (3) sont des objets symbo-liques que les participants ont amenés à la demande du thérapeute.

Un exemple :

Chaque participant (donc pas uniquement les patients) a apporté un objetsymbolisant l’aide qu’il a obtenue après avoir perdu le «chemin vers le bon-heur» et le dépose au centre. Ensuite tous les jeunes choisissent un objetdans le tas placé au milieu et inventent une histoire pour expliquer pourquoiils pensent que cet objet appartenait à telle personne. Le propriétaire a alorsl’opportunité de décrire ce que cet objet évoque pour lui. Après cet échange,les parents se mettent au milieu et disent quels sont les objets et les histoiresde jeunes qui les ont le plus touchés, au niveau de leur histoire personnelle,notamment par rapport au fait de perdre et de retrouver le chemin vers lebonheur. Après ils (les parents) décrivent l’histoire de leur objet.Les objets et les histoires relatées concernent des histoires d’amour, d’ami-tié, ils peuvent être des objets transitionnels, des formes de méditation, desreprésentations du travail etc. Grâce à ce médiateur et pour la première fois,

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une mère fait allusion à sa propre histoire et à l’éventualité qu’elle risque demourir du cancer. Trois autres parents lient leur propre dépression au sensde la vie. (Une de ces mères nous écrit ses pensées qui ont continué à mûriraprès le groupe). A la fin de la rencontre, les participants sont libres de don-ner leur objet à quelqu’un d’autre du groupe comme amulette.

La quatrième et cinquième séances de groupe

Ces séances coïncident souvent avec la fin du séjour de quelques jeunes adultesdans le service. Soudainement le contexte sécurisant et soutenant disparaît pour unepartie des familles. La thérapie au sein de l’hôpital est remplacée par des contactsambulatoires. A chaque fois cette situation a orienté la conversation sur le thème del’angoisse et de l’incertitude. Comment se supporter ? Comment dépasser les crisesmaintenant ? Signe d’incertitude : souvent les parents reprennent des questions dediagnostic et de «déroulement » de la maladie. Pour aborder cette incertitude, estutilisée comme technique la suggestion de demander un conseil directement auxautres participants. La seule restriction concerne l’interdiction de demander conseilà un membre de sa propre famille. Une fois encore, on peut reconnaître le désir decréer communauté dans cette consigne.

Un jeune adulte vient de terminer son séjour, deux autres partiront lasemaine suivante. Une inquiétude grandissante est signalée. La techniquedécrite est utilisée :

Sara, sœur de 16 ans de Jef, parle :

– «Au début ils ne m’ont pas assez raconté. Ce n’est que plus tard que j’aiappris que des choses graves m’avaient été cachées comme la tentativede suicide de Jef…»

– Th: «Que t’est-il arrivé quand tu l’as découvert?»

– Sara : «Je me suis mise en colère (hésite, pleure)…»

– Th: «Une grande colère comme ça hein?… Je reviens vers toi tout àl’heure, d’accord?»

– Sara : (salue de la tête).

– Karen : «Moi aussi je préfère la vérité en direct».

– Mère de Stéphane : «Moi aussi je préfère dire la vérité en direct. Maissouvent je n’ose pas. Je sais que mon angoisse de la réaction possiblem’en empêche. J’ai peur de blesser Stéphane.»

– Mère de Karen : «Cela me donne l’impression que je devrais retourner àla situation d’avant. Je crains que cela ne soit plus jamais possible deretrouver la confiance que j’avais. La peur est là. »

– Th: «Quand vos parents ont peur, serait-il préférable de montrer ou decacher cette peur?»

– Stéphane : « Le montrer serait mieux pour moi. Cela me semble logiqueque, comme parents, vous ayiez peur quand votre enfant se trouve en

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psychiatrie. Moi je sais que les angoisses sont là, donc il est préférablede les montrer. Au moins cela crée l’opportunité d’en parler. »

– Th: «Qu’est ce qui te fait dire : je serai capable de supporter l’angoissede maman?»

– Stéphane : «Je ne sais pas si je serai capable de supporter son angoisse.Je pense seulement que si maman peut se permettre de montrer sa peur,elle me permettra aussi d’en parler et cela me semble plus facile. »

– Th: (pose la question à la mère de Karen) «Est ce que cela répond unpeu à votre demande? Voulez vous continuer à poser des questions à Jefjusqu’à vous ayez quelques points de repères?»

– Mère de Karen : «Ce que tu dis me fait penser à ce que Sara disait tantôt.Notre autre fille te comprendrait très bien, elle aussi, elle voudrait savoir.Moi par contre je ne me suis toujours pas décidée à penser qu’il seraitmeilleur de montrer mon angoisse en tant que parent. »

– Jef : «Moi, je pense que oui. Mes parents montrent plus leurs soucis main-tenant. Aucun de leurs soucis ne m’étonne. Notre conversation est deve-nue plus franche. Avant Sara était un peu protégée. Maintenant elle sesent en sécurité et perçoit qu’elle est à la hauteur des choses.»

– Th: «Et toi?» (à la sœur, 10 ans, de Stef).

– Frédérique : «Moi on m’a assez raconté. Et en même temps pas trop. Pasles choses les plus graves. Je le préfère comme cela.»

Plus tard, au fil de cette conversation, les thérapeutes introduisent l’idée quel’inverse de «dépression» n’est pas « force». Dépression et « faiblesse» nesont pas synonymes, dépressif s’apparente plutôt à «morne». Dépression etforce peuvent même coexister chez une même personne. On peut s’appuyersur ces jeunes adultes, même en période de dépression…

Souvent une partie des jeunes adultes se situe mieux lors des quatrième ou cin-quième séances. Ils ont obtenu des résultats positifs de leur passage au service, ilsorganisent un nouveau départ dans la vie, ils reprennent étude ou travail, ils plani-fient de vivre seuls, ils ont surmonté certaines de leurs angoisses. Pour une partiedes familles, des sujets difficiles ont été clarifiés, les contacts sont vécus commeaméliorés. Prêter attention à ces histoires de succès et de progrès fonctionne commeporteur d’espoir pour d’autres qui ont encore plus de chemin à parcourir.

La séance de suivi ambulatoire

La cinquième séance se clôture en prenant rendez-vous pour une séance de suivideux à quatre mois plus tard. A ce moment-là, il semble clair que cinq séances ontcréé un lien entre les participants. A l’exception d’un seul groupe, tout le monde estprésent à la séance de suivi : la discussion ressemble beaucoup aux conversationspendant les séances quatre ou cinq. Le contenu est souvent orienté vers les retom-bées et les contrecoups, et aussi vers les succès obtenus. En élaborant davantage lessuccès, ils sont approfondis, ancrés dans une histoire commune. Ils sont reconnus et

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confirmés en public. La réussite de l’un devient moteur pour la persévérance del’autre. Persévérer et recommencer à chercher, se relever après être tombé devient leguide de la discussion lors d’un contrecoup. «Chercher» est plus une ligne direc-trice que « trouver».

Thérèse ne se sent pas si bien, nous dit-elle à la cinquième séance. Aprèsavoir quitté l’hôpital elle n’a pas eu d’autre choix (financier) que de retour-ner vivre à la maison. Même si les soins pour son frère handicapé restent unorganisateur majeur des interactions familiales, le passage au service depsychothérapie et le groupe JAP ont permis à Thérèse de trouver une plusgrande liberté à la maison. A l’intérieur de cet espace de choix, elle risquaitde nouveau de perdre son rythme nycthéméral. Elle recommençait à vivre lanuit devant son ordinateur et à se sentir mal pendant la journée.Maintenant, trois mois plus tard Thérèse a persévéré dans son désir de trou-ver la liberté et les moyens pour aller vivre de manière plus autonome en«kot». Papa raconte avec gestes et humour comment eux (les parents)s’étaient presque retrouvés dans le piège d’une trop grande appréhension.Pendant sa démarche vers une plus grande autonomie, Thérèse leur avaitdemandé de l’aide, et ils avaient offert un soutien démesuré et encombrant.Par une bonne engueulade Thérèse leur avait clairement montré que deman-der de l’aide ne signifie pas se sentir délaissée.

Victor raconte que pour lui cela tourne différemment. A la cinquième séance,il réussissait à faire face à une trop grande appréhension de la part de sesparents. On se rappelle qu’eux aussi s’étaient donné l’autorisation d’avoirdes conflits et que cela les avait aidés. Victor a découvert pendant la périodequi vient de se passer que vivre à la maison pendant les vacances le confron-tait à une masse beaucoup plus grande, trop grande, de craintes émises parses parents. Il a l’impression de retomber dans une situation très fatigantedans laquelle il essaye de tenir ses parents – plus particulièrement maman –à distance. Maman et papa se rappellent que la confrontation de la cin-quième séance les avait aidés. Maman laissait plus d’espace pour Victor,papa pouvait montrer plus son engagement. Maman se dit surprise d’enten-dre que Victor a l’impression de devoir faire face à l’appréhension de deuxparents au lieu d’un.

Marianne essaye d’encourager en racontant son évolution : elle s’est instal-lée seule à la campagne, a repris ses études comme prévu, a rétabli un liende bonne qualité avec sa maman et avec la nouvelle famille de son papa :«Comme je peux enfin me construire mon chez moi, je peux me sentir enfin àla maison chez chacun de mes parents». Le groupe poursuit la discussionsur l’opportunité d’intensifier la thérapie en ambulatoire pour Victor.

Les séances se terminent en prenant congé de tout le monde. Les thérapeutestrouvent important de remercier chacun en personne. Spontanément les autres mem-bres du groupe suivent l’exemple. Certains prennent rendez-vous pour une rencon-tre à l’extérieur du groupe. Une tranche de vie, un passage ensemble de cinq à septmois est clôturé.

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Discussion

Cet article décrit le pourquoi et le comment d’un groupe JAP. Pendant toute ladurée de ces groupes, des familles de jeunes adultes dépressifs ou anxieux admisdans un service psychiatrique forment une communauté de conversation. La rapiditéavec laquelle les participants à ces groupes passent vers un dialogue franc reste unemerveille. Des éléments propres à la formule facilitent cette évolution. Hormis lesentretiens avec les professionnels, pour plusieurs participants/patients, ces groupesétaient le premier endroit où ils se sentaient libres de parler des motifs qui les ontconduits dans le service. Les jeunes adultes clarifient la raison de leur admissionface aux membres de leur famille et face à leurs «collègues patients». Parents et fra-trie partagent déjà dans les premières séances des parties de leurs expériences inédi-tes avec des membres de leur famille ou des «externes». Les thérapeutes aimentcroire que l’attention portée à une préparation soigneuse et respectueuse, le choixpour un dispositif qui ne stigmatise pas la pathologie, le recadrage du travail degroupe comme un processus de développement normal, et les interventions dirigéesvers les ressources et possibilités des participants y contribuent.

Outre des échanges intrafamiliaux, le groupe offre un cadre pour des discussionsentre les familles. Tout participant a la possibilité d’occuper trois positions dans ledialogue : parler, écouter (celui à qui on parle), observer. Nous sommes convaincusque l’écoute est spécialement importante, tout comme la position d’observateur :quelqu’un parle à votre fils, fille, père, mère, frère, sœur, etc. et en souligne diffé-rents aspects. En tant que personne extérieure au dialogue, vous avez la possibilitéd’écouter, d’observer, et de voir comment cette personne réagit. Le groupe des obser-vateurs montre des regards intéressés et des réactions émotionnelles pendant cesconversations interfamiliales. Cette écoute en communauté semble avoir des liensavec le travail initiateur de Seikulla sur la psychose (49) même s’il y aussi des diffé-rences liées à notre position théorique qui se réfère à la systémique.

Parfois le contexte installé est en soi assez fort pour initier le dialogue, d’autresfois les thérapeutes doivent intervenir. Le principe du « fish bowl» s’est montré trèsconstructif.

Entendre et remarquer que des dialogues s’installent en dehors du temps officielconstituent un bon indicateur selon lequel le but de créer des liens entre diversespersonnes est atteint. Nous avons su que des conversations s’étaient poursuivies ausein même des familles et entre elles. Il en est de même pour les échanges remar-qués pendant la pause ou avant et après la séance. A chaque reprise, des dialoguesanimés s’engageaient dans plusieurs sous-groupes. Deux mères se consolent, unpère parle au fils d’une autre famille, certains pleurent, d’autres sèchent les larmes.

La fidélité des participants nous semble signifier que les objectifs thérapeutiquessont plus ou moins atteints (réciprocité, créations de liens, soutien, espace de parole,etc.) A chaque reprise tous les participants sont présents. Ceci, à l’exception d’unpère qui a déclaré ne plus revenir après la première séance, et de la famille de celui-ci qui se présente en ordre partiel à la séance de suivi. Autre absent, au moment decette rencontre ultérieure, la famille dont les parents ont décidé de divorcer pendant

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l’admission de leur enfant. D’après une autre famille qui garde encore des contactsavec la première, nous apprenons que la séparation est particulièrement houleuse.

L’accompagnement des groupes JAP demeure une activité très captivante etenrichissante pour les thérapeutes. Leur travail consiste surtout à créer un contextethérapeutique et à diriger le processus au moyen de questions. Les questions sont latechnique la plus importante pour rechercher des liens et pour favoriser des associa-tions. Le contenu des questions découle des positions thérapeutiques prises. Lessignaux non verbaux des participants constituent un élément très important poursavoir quand et à qui il faut poser la question. En même temps nous gardons le soucide créer l’espace pour que chacun puisse s’exprimer. Le message final donnel’opportunité de faire des interventions de type «psychoéducatif » adapté aux cir-constances.

La forte connexion et les thèmes récurrents d’un groupe à l’autre nous font pen-ser qu’il pourrait s’agir d’une communauté qui crée et partage des significations.Comme, la plupart du temps, les groupes dépassent la durée de séjour à l’hôpital ouau centre de jour, le thème de vivre dans un monde avec moins d’aide se pose àchaque reprise. A chaque fois, la responsabilité de créer sa propre vie faisait réfé-rence à une multitude d’histoires et à des significations diverses.

La poursuite des recherches doit démontrer si ces impressions cliniques s’avére-ront confirmées. Ces groupes apportent-ils réellement une influence saine au déve-loppement des personnes et des familles ? Les éléments repris dans notre analysesont-ils réellement les éléments thérapeutiques?

Une partie des résultats des questionnaires (SCL-90) a été intégrée dans la pré-sentation des participants au groupe JAP. Continuer à rassembler et à travailler lesautres questionnaires (Subjective Emotional Health, Adult Attachment scale, FamilyAssesment device), est un objectif que nous nous donnons pour le futur. L’analysedes bandes vidéo reste une autre possibilité d’étude.

Lieven MigerodeUZLeuven, Psychiatrie

33, KapucijnenvoerB-3000 Leuven

[email protected]

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