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Introduction générale Les processus de décision dans les organisations : une démarche nouvelle ou renouvelée ? Jean-Robert ALCARAS, Patrick GIANFALDONI et Gilles PACHE Pourquoi travailler (encore) sur les processus de décision ? La décision intéresse au premier chef les sciences économiques et les sciences de gestion (et au-delà, l’ensemble des sciences de l’homme et de la société) : c’est (ou du moins, cela devrait être) l’un des concepts majeurs, l’un de ceux qui nous font pénétrer au cœur des problèmes auxquels sont confrontées ces disciplines. En effet, avant de produire ou de consommer des biens ou des services, l’homme produit des décisions ! Mieux encore : afin de produire ou de consommer des biens ou des services, les hommes doivent produire des décisions. Autant dire que ces disciplines doivent et devront toujours rester vigilantes et attentives aux questions relatives à la façon dont nous décidons dans les organisations. Ce livre en est un témoignage manifeste. Il aborde des questions ayant un rapport direct avec la prise de décision dans les organisations, en traversant de chapitre en chapitre différents champs thématiques et disciplinaires relevant de l’économie et de la gestion. Il s’adresse à un triple lectorat. D’abord, celui des étudiants de Licence, de Master et d’Écoles de Commerce, voulant s’imprégner des grands courants issus des théories des organisations qui intègrent tous une dimension décisionnelle. Ensuite, celui des chercheurs, confirmés ou débutants, d’un côté, des préparationnaires aux concours de type CAPES, CAPET et Agrégation de l’autre, souhaitant disposer d’un outil critique sur un sujet majeur pour la connaissance. Enfin, celui des praticiens et des acteurs du monde de l’entreprise en quête de grilles d’analyse pour mieux comprendre les processus de prise de décision auxquels ils sont confrontés. Les différents chapitres ont été conçus pour

Les processus de décision dans les organisations : une démarche nouvelle ou renouvelée ?

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Introduction générale

Les processus de décision dans les organisations : une démarche nouvelle ou renouvelée ?

Jean-Robert ALCARAS, Patrick GIANFALDONI et Gilles PACHE

Pourquoi travailler (encore) sur les processus de décision ?

La décision intéresse au premier chef les sciences économiques et les sciences de gestion (et au-delà, l’ensemble des sciences de l’homme et de la société) : c’est (ou du moins, cela devrait être) l’un des concepts majeurs, l’un de ceux qui nous font pénétrer au cœur des problèmes auxquels sont confrontées ces disciplines. En effet, avant de produire ou de consommer des biens ou des services, l’homme produit des décisions ! Mieux encore : afin de produire ou de consommer des biens ou des services, les hommes doivent produire des décisions. Autant dire que ces disciplines doivent et devront toujours rester vigilantes et attentives aux questions relatives à la façon dont nous décidons dans les organisations.

Ce livre en est un témoignage manifeste. Il aborde des questions ayant un rapport direct avec la prise de décision dans les organisations, en traversant de chapitre en chapitre différents champs thématiques et disciplinaires relevant de l’économie et de la gestion. Il s’adresse à un triple lectorat. D’abord, celui des étudiants de Licence, de Master et d’Écoles de Commerce, voulant s’imprégner des grands courants issus des théories des organisations qui intègrent tous une dimension décisionnelle. Ensuite, celui des chercheurs, confirmés ou débutants, d’un côté, des préparationnaires aux concours de type CAPES, CAPET et Agrégation de l’autre, souhaitant disposer d’un outil critique sur un sujet majeur pour la connaissance. Enfin, celui des praticiens et des acteurs du monde de l’entreprise en quête de grilles d’analyse pour mieux comprendre les processus de prise de décision auxquels ils sont confrontés. Les différents chapitres ont été conçus pour

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permettre des parcours personnalisés aux uns et aux autres, parcours facilités par la présence d’un index thématique.

Afin de présenter plus en détail cet ouvrage collectif, nous mettrons d’abord en exergue les spécificités et les originalités de notre approche de la décision dans les organisations. Seront ensuite présentés succinctement l’articulation et le contenu des neuf chapitres qui le composent, rédigés par des enseignants-chercheurs appartenant comme membres permanents ou associés au PRATIC, Laboratoire de Recherche en Management de l’Université d’Avignon & des Pays de Vaucluse.

Une approche originale des processus de décision en économie et en gestion

Peut-on encore dire quelque chose de nouveau et d’utile sur la décision en sciences économiques et en sciences de gestion ? Le lecteur peut se poser cette question en abordant pour la première fois le présent ouvrage, car il faut bien reconnaître que les articles, livres, colloques sur le thème sont relativement nombreux… La plupart d’entre eux abordent pourtant le thème de la décision sous un angle qui n’est pas celui que nous avons privilégié dans ce travail collectif. Notre réflexion cherche donc à se distinguer des approches traditionnelles de la décision sur au moins trois axes différents.

Étudier les « bonnes » décisions ou plutôt les processus qui les génèrent ?

L’essentiel de la littérature s’intéresse surtout au résultat vers lequel devrait tendre tout processus « rationnel » de décision : le one best way en sciences de gestion ; l’optimum en sciences économiques ou en finance. Si ces approches « normatives » de la décision sont en effet intéressantes (et en tout cas foisonnantes depuis de nombreuses années), elles n’épuisent pas le spectre des réflexions possibles sur la décision. En effet, il est tout aussi important d’étudier les processus qui génèrent les décisions (la manière dont les décisions sont élaborées en situation concrète) que les résultats vers lesquels devraient tendre ces processus. Comme l’a si bien dit Simon (1978/1982), prix Nobel d’Économie en 1978, il ne suffit pas de s’interroger sur le « What to do ? » (Que faire ?) : il faut aussi réfléchir au « How to decide what to do ? » (Comment décider de ce qu’il faut faire ?). Et, en outre, les deux réflexions peuvent apparaître comme relativement indépendantes l’une de l’autre : savoir ce qu’il faut décider dans une situation donnée ne nous dit pas comment cette décision doit être prise ; et inversement, savoir comment décider ne nous assure pas de prendre la « bonne » décision.

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Les réflexions contenues dans cet ouvrage sont donc largement inspirées des apports fondamentaux de l’œuvre de Simon dans le domaine de la décision. Certes, chaque chapitre ne se réfère pas explicitement aux travaux de Simon sur la rationalité et la décision ; la réflexion de l’ensemble des auteurs n’a pas été nécessairement engendrée par une lecture enthousiaste du très célèbre Models of bounded rationality (Simon, 1982) ; et il faut bien reconnaître que quelques-uns parmi nous sont éventuellement réservés par rapport à l’ensemble de sa démarche. Il n’en reste pas moins que chacun s’efforce d’envisager la décision comme un processus à l’œuvre dans des situations organisationnelles fort éloignées de tout système représenté comme boîte noire.

C’est donc la première grande originalité du livre. Il incite le lecteur à s’interroger et à réfléchir sur les processus de décision dans les organisations à la fois sous l’angle :

– de leur diversité en fonction des situations, mais aussi de leur unité en fonction de critères de caractérisation ;

– de leur rationalité, mais aussi parfois de leur absurdité face à la complexité et à la singularité intrinsèquement associées au réel ;

– de leurs contraintes, mais aussi des possibilités éventuelles de les dépasser ;

– du problème de leurs finalités et de leur effectivité ; – de leur aspect collectif et donc nécessairement organisationnel, même

dans les cas les plus inattendus ou apparemment les plus simples.

D’une approche mono disciplinaire de la décision à une volonté de fertilisation croisée : un embryon d’approche transdisciplinaire ?

La plupart des ouvrages qui s’intéressent à la décision s’inscrivent dans une logique disciplinaire très précise. Les ouvrages les plus didactiques et les plus transversaux porteront par exemple sur la décision en sciences économiques ou sur la décision en sciences de gestion. Mais en règle générale, on sera bien plus précis encore. On évoquera par exemple la décision d’investissement ou la décision stratégique dans l’entreprise ; la décision de production en micro-économie ; la décision de coopération ou de non-coopération en théorie des jeux appliquée à l’économie du travail et à l’économie industrielle ; la décision de rémunération des actionnaires en finance ; la décision du consommateur en marketing ou en micro-économie, etc. L’hypothèse sous-jacente à ces approches, rarement voire jamais revendiquée explicitement, est à peu près la suivante : chaque décision a sa spécificité, chaque discipline aussi, il faut donc en quelque sorte

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« saucissonner » l’étude de la décision en autant de parcelles différentes et indépendantes que nécessaires.

Quoi de moins étonnant au pays de Descartes et du réductionnisme qui lui était si cher ? Quoi de plus évident dans un Occident marqué depuis plusieurs siècles par ce que Le Moigne (1995a, 1995b) a fort justement regroupé sous l’appellation générique et plurielle des « épistémologies positivistes » ? Le scientifique se doit d’être spécialisé dans un domaine disciplinaire bien précis : il ne peut décemment déroger à ce principe sans prendre le risque de ne plus savoir parler aucune langue à force de vouloir parler toutes les langues ! Pour autant, des outils méthodologiques ont vocation à transgresser les frontières disciplinaires (comme c’est le cas de l’appareillage logique de la théorie des jeux, de méthodes de calcul statistique ou de simulation).

Les réflexions critiques qui composent le présent ouvrage ne sont pas révolutionnaires au point de remettre brutalement en question les « habitus » ou les « habitudes mentales » de la science moderne (Bourdieu et al., 1968/1983). En effet, la plupart des auteurs est parti de son champ d’appartenance disciplinaire, de l’objet d’étude sur lequel il est spécialisé : de nombreux chapitres ne relèvent donc pas a priori d’une démarche transdisciplinaire.

Ainsi, Patrick Gianfaldoni et Jean-Robert Alcaras appuient leurs réflexions sur leur connaissance des approches de la rationalité en sciences économiques. Gilles Paché et Jean-Laurent Viviani revisitent les théories de la décision en sciences de gestion tandis que la contribution de Laurent Ducau est centrée sur l’étude du processus de décision dans les activités de conception. Jérôme Joubert évoque des questions relatives aux prises de décision collectives en politique économique (et plus précisément dans le domaine de la politique commerciale). François Fulconis se situe clairement dans le domaine de la logistique d’entreprise. Enfin, Nadine Richez-Battesti aborde la décision à travers la gouvernance des réseaux socio-économiques d’appui à la création d’entreprises alors que Stéphanie Loup traite de la décision dans des très petites entreprises (TPE) en privilégiant une démarche gestionnaire.

Notre attitude prudente à l’égard de la transdisciplinarité s’explique par une raison d’ordre pratique, mais qui a toute son importance ici – et qui relève de la méthode qui a été retenue pour réaliser l’ouvrage. Les coordonnateurs ont souhaité, dans un premier temps, inviter des collègues, non-spécialistes a priori de la décision, à s’interroger sur les processus décisionnels qui sont à l’œuvre dans leur domaine et à traiter avec esprit critique et curiosité la question de leur choix sur ce thème. Une grande liberté a donc été laissée à chaque auteur, une liberté que ne permettent généralement pas les contraintes de publication dans certaines revues

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académiques. L’idée était de déboucher alors, dans un second temps, sur une phase de confrontation des réflexions des uns et des autres. À ce stade, le résultat (volontairement recherché dès le départ) fût assez fascinant et enthousiasmant. En effet, personne ne pouvait nier le fait que ses réflexions entraient en résonance avec celles de la plupart des autres. Mieux encore, on pouvait se nourrir de l’expérience ou de la connaissance des autres, même si elle s’était forgée dans un tout autre domaine ou une toute autre discipline… Partant de là, les liens entre les différents chapitres ont commencé à se créer d’eux-mêmes, et chacun a pu reprendre son travail en profitant de l’étape de fertilisation croisée précédente.

Ainsi, si nous ne remettons pas fondamentalement en cause le principe de spécialisation et le réductionnisme en général, nous les bousculons quelque peu malgré tout ! Nous avons en effet glissé tout d’abord de la monodisciplinarité vers la pluridisciplinarité, ce qui a permis de découvrir ensuite progressivement les joies et la fécondité de la transdisciplinarité – qui nous donnent envie d’aller plus loin… L’un des objectifs recherchés est atteint. Nous savons maintenant qu’il existe des réflexions communes possibles entre les différents domaines de l’économie et de la gestion, et certainement bien d’autres disciplines relevant des sciences de l’homme et de la société, sur le thème général de l’étude des processus décisionnels. Nous savons aussi que ces confrontations transdisciplinaires seront utiles, et même nécessaires, à l’avancée des réflexions sur les processus de décision.

Enrichi de cette expérience, on comprend mieux pourquoi Simon (1982), spécialiste internationalement reconnu des processus de décision et de leur rationalité, a travaillé dans des domaines aussi variés que les sciences économiques, les sciences de gestion, les sciences administratives, les sciences politiques, la psychologie cognitive, l’intelligence artificielle ou encore la recherche opérationnelle… Tout en apportant des éclairages considérés comme fondamentaux dans chacune de ces sciences, Simon (1982) a été l’un des tous premiers à saisir la richesse et l’intérêt de la transdisciplinarité pour avancer dans la compréhension des processus de décision. En effet, étudier l’homme en situation concrète de produire des décisions, quel que soit le domaine dans lequel il les prend, c’est toujours contribuer à enrichir notre connaissance pragmatique de ces processus afin d’envisager un peu mieux d’en améliorer l’effectivité.

On peut donc dire que ce livre est bien plus qu’un aboutissement en soi. C’est en quelque sorte un propos d’étape sur une réflexion collective qui s’amorce sur les processus de décision organisationnels, et qui tend à évoluer de la pluridisciplinarité vers la transdisciplinarité. Il est le témoignage de la pertinence d’une recherche de dialogues critiques entre économie et gestion, échanges préalablement nécessaires à tout travail transdisciplinaire ultérieur. C’est là que réside très certainement sa seconde originalité…

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L’organisation : un concept générique et transversal ?

Décider dans les organisations… Nous pourrions presque entendre le lecteur s’étonner fort judicieusement : mais de quelle « organisation » parlez-vous ? En effet, on évoquera tour à tour dans cet ouvrage : l’organisation d’institutions économiques supra-nationales, l’organisation économique et sociale au sens large, l’organisation à l’échelle de l’entreprise en général, l’organisation d’un service de conception pour la R & D, l’organisation d’un partenariat logistique, l’organisation de la TPE ou encore l’organisation de réseaux institutionnels territorialisés. Est-il légitime de traiter de ces diverses configurations organisationnelles sans s’accorder au préalable sur une définition commune de l’organisation ?

Le concept d’organisation peut être décliné à l’infini, comme le montre fort bien Favereau (1988, 1989), et il est donc important de préciser ici quelle est notre acception, car c’est aussi la cohérence globale de notre réflexion collective qui est en jeu. La troisième originalité de l’ouvrage est de considérer que le concept d’organisation est suffisamment générique pour ne pas supposer de cloisonnement disciplinaire ou thématique, et pour autoriser des rapprochements entre des horizons plutôt différents a priori.

Rappelons brièvement le caractère polysémique de la notion d’organisation. Certains ont une approche intégrationniste en considérant le marché, en tant que mécanisme de coordination de décisions décentralisées, comme une organisation spécifique ou particulière. D’autres développent une approche complémentariste, en concevant l’organisation comme un mode de coordination palliatif aux défaillances du marché (quand le système des prix est en défaut ou quand les coûts de transaction marchande sont trop élevés). D’autres encore envisagent les organisations comme des entités collectives ne pouvant résulter que d’une volonté et de finalités communes ou partagées – Hayek (1980/1983) qualifiait cette organisation de Taxis et les gestionnaires l’appellent plus simplement entreprise –, ou bien, à l’inverse comme des effets émergents et non voulus résultant des nécessaires interactions entre des acteurs et des agents – le Kosmos selon Hayek (1980/1983). Et dans une perspective institutionnaliste, l’organisation se réfère explicitement à une structure de coordination ayant des frontières identifiables et nécessitant un système normatif supérieur aux choix et aux valeurs individuelles. Ne serait-ce qu’en suivant et en confrontant les catégorisations précédentes, la déclinaison des diverses acceptions de cette notion fondamentale serait trop longue pour établir une liste exhaustive dans cette introduction générale.

Mais, comme l’ont rappelé fort justement Morin (1977) et Le Moigne (1990b), le concept d’organisation a de tout temps eu un sens à la fois générique et transversal, nécessairement transdisciplinaire. Ce concept

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exprime à la fois l’action (volontaire ou pas, consciente ou pas, il importe peu d’en débattre ici) d’organiser des processus eux-mêmes immergés dans des processus plus larges (des environnements ou un milieu, comme aurait dit Piaget), et le résultat de cette action. Et, au sens où l’entend Livian (2001), nous pouvons difficilement penser l’organisation-entité (« réalité sociale, économique et technique relativement stabilisée ») sans l’action d’organiser (« processus plus ou moins volontaire qui consiste à mettre un ordre dans une situation considérée comme insatisfaisante »).

Une entreprise évoluant dans ses environnements est en effet difficilement concevable si on ne l’imagine pas à la fois organisée et organisante. La même remarque est valable pour décrire, à un niveau plus global, l’organisation socio-économique au niveau mondial ou national, ou, à un niveau plus local, l’organisation d’un réseau d’appui à la création d’entreprises, d’un système de partenariat logistique, voire d’un service de R & D au sein d’une entreprise… « L’organisation est la propriété d’un système complexe permettant de rendre compte à la fois du comportement de chacun des niveaux projectifs que l’on a attribués au système et de l’articulation entre ces niveaux, sans les séparer », précise Le Moigne (1990b).

Y a-t-il vraiment une différence de nature entre, d’une part, la démarche des dirigeants d’un État qui cherchent à prendre des décisions de politique commerciale dans un environnement mondial qu’ils appréhendent dans toute sa complexité, et d’autre part, celle des dirigeants de petite entreprise qui doivent élaborer des décisions au cœur d’un réseau de partenaires qu’ils ne peuvent ignorer et qui contribue à complexifier leur vision des choses ? Est-il si différent d’étudier d’un côté la démarche des membres d’un gouvernement qui doivent définir une politique économique dans un environnement instable qu’ils ne maîtrisent jamais complètement et, de l’autre, celle des responsables d’un service de R & D qui cherchent à concevoir les innovations pouvant aller dans le sens de la stratégie à venir de leur entreprise ? Personne ne pourra jamais le démontrer, au sens fort du terme. Mais selon nous, les pages qui suivent témoignent plutôt du contraire : il y a bien des points communs et des comparaisons possibles et souhaitables entre situations diverses – à travers des dialogues voire, comme nous l’espérons, des échanges transdisciplinaires – à des fins de perception de différents types de processus de décision en environnement complexe. Et ces dialogues, ces échanges peuvent certainement nous aider à mieux comprendre… comment aider les décideurs… à prendre leurs décisions !

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La structure de l’ouvrage

Après avoir confronté les réflexions des neuf auteurs qui contribuent à l’ouvrage, il est apparu très vite que deux types de questionnements étaient abordés et reliaient clairement et profondément les propos des uns et des autres. Ces questionnements dépassent très largement le simple clivage disciplinaire entre l’économie et la gestion ; ils se recoupent, se complètent, et s’enrichissent mutuellement.

Première partie : questionnements et réflexions relatifs à la rationalité de la décision dans les organisations

Le premier thème fondamental est celui de la rationalité des décideurs dans les organisations. Comment peut-on décider rationnellement dans des situations organisationnelles concrètes ? Et que doit-on entendre par la notion de décision « rationnelle » ? Ces thèmes, que nous ne sommes évidemment pas les premiers à traiter, tant ils sont fondamentaux et inépuisables, nous ont conduit à associer deux logiques au sein de chaque chapitre. D’une part, chaque auteur effectue des rappels concernant diverses approches existant aujourd’hui, à la manière d’un « survey » ou d’un « état de l’art ». D’autre part, des propositions critiques et constructives sont avancées, en tenant compte le plus possible des dernières « avancées » (lorsqu’elles existent) de la recherche dans ce domaine.

Dans le premier chapitre, Patrick Gianfaldoni montre que la décision peut se révéler un objet conforme aux normes de prescription des sciences économiques, à la condition de fonder toute démarche de recherche sur les présupposés de l’individualisme méthodologique. Les économistes libéraux, classiques et néoclassiques, se rejoignent dans l’acceptation de postulats utilitaristes, qui les conduisent à adopter une posture réductionniste : ils réduisent ainsi les motifs de l’action à l’intérêt individuel et l’entité organisation à une fonction ou à un ensemble de fonctions de production ou de coordination. Si les libéraux classiques tendent à pondérer leur parti pris utilitariste, en jetant les bases d’une théorie de la valeur qui confère à l’organisation productive et au travail une place centrale, les néoclassiques enferment tout acte relatif à la décision dans des modèles formalisés et simplificateurs. L’élaboration des choix entrepreneuriaux ne prête pas à questionnements et, par voie de conséquence, la figure de l’entrepreneur disparaît en tant que telle. Pourtant, la théorie microéconomique de la firme et, plus largement, les théories contractualistes, tentent de construire des modèles plus réalistes, en particulier en prenant en compte les asymétries d’information, l’opportunisme des agents, l’incertitude décisionnelle liée aux

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déséquilibres de marché ou encore les risques liés à l’incomplétude des contrats. Toutefois, l’organisation est toujours perçue comme un espace d’allocation de ressources assimilé ou complémentaire au marché.

Les théories économiques standards sont donc caractérisées par des critères de rationalité substantive. Par opposition, Patrick Gianfaldoni présente alors des écoles économiques hétérodoxes ayant adopté une posture critique et ayant rendu plus intelligible la décision comme phénomène collectif. L’exigence éthique et les capacités peuvent être reconnues pour appréhender la décision sous l’angle de la liberté de choix des agents économiques. Parallèlement, l’organisation peut être perçue comme un espace cognitif, permettant ainsi une (re)valorisation de la connaissance et de la « croyance collective » dans le domaine décisionnaire. Suivant cette deuxième direction, l’économie de la connaissance et l’économie des conventions ont ouvert la voie à des recherches sur la décision non seulement débarrassées de la vision rationaliste inhérente au paradigme libéral, mais plus encore en état de s’enrichir au contact d’autres disciplines.

Dans le chapitre 2, Jean-Robert Alcaras reprend les travaux de Simon (1982) pour faire la synthèse des grandes conceptions possibles de la rationalité de la décision en sciences économiques. L’étude de la décision est en effet au cœur des problématiques contemporaines des sciences économiques, comme en témoigne la floraison de modèles toujours plus sophistiqués en calcul économique ou en théorie des jeux appliqués à la « théorie de la décision ». Ces modèles sont certes très variés et s’appuient sur des hypothèses parfois fort différentes, mais ils ont pourtant quelques caractéristiques communes : ils s’inscrivent dans une problématique clairement normative, déterministe et analytique. Cela signifie qu’ils cherchent tous à montrer quelle devrait être la « bonne » ou la « meilleure » décision dans un contexte donné (approche normative), que celle-ci est très largement déterminée par le contexte dans lequel on est censé prendre cette décision (approche déterministe), et que cette détermination procède d’une logique analytique relevant essentiellement d’une rationalité mathématique et substantive (démarche analytique).

Sans contester la valeur heuristique de ces modèles, Jean-Robert Alcaras en souligne les limites – en partant notamment des célèbres travaux de Simon (1982) sur la « rationalité limitée » – pour inviter le lecteur à envisager l’opportunité de se placer dans une tout autre problématique : ce que Simon (1982) et Le Moigne (1990b) appellent une « problématique ingénieriale ». Il s’agit en fait d’inciter les économistes à s’intéresser à la manière d’organiser les processus de décision (how to decide what to do ?) bien plus qu’à la nature de la décision elle-même (what to do ?). Cela suppose notamment de passer d’une conception substantive de la rationalité à une conception procédurale. Un changement de problématique que les gestionnaires ont généralement bien mieux intégré au sein de leur discipline que les économistes. On peut alors illustrer ce que pourrait être une approche

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ingénieriale de l’économie à partir d’une relecture contemporaine de l’attitude très pragmatique et originale qu’a adoptée J.-M. Keynes à son époque. Les économistes d’aujourd’hui ne pourraient-ils pas accepter de développer aussi cette approche plus pragmatique et procédurale de la décision afin de concevoir de nouvelles politiques économiques dont certains ressentent le besoin pressant ?

Dans le chapitre 3, Gilles Paché propose une relecture des théories dominantes en sciences de gestion sur la prise de décision, en synthétisant les deux grands courants qui les traversent : l’approche analytique d’un côté, l’approche politico-organisationnelle de l’autre. Aux origines, les sciences de gestion revendiquent incontestablement l’héritage pionnier des sciences de l’ingénieur – au sens classique du terme : technique, optimisation et calcul. Toute organisation peut en effet être envisagée métaphoriquement comme une machine dont il faudrait « huiler » les rouages en s’appuyant sur des méthodes d’optimisation sous contrainte (Livian, 2001). De nombreux auteurs, conscients du caractère désincarné et réducteur d’une telle approche, vont alors chercher à développer des modèles fondés sur des heuristiques pour aider les managers à prendre des décisions jugées satisfaisantes en situation de rationalité limitée.

L’heure est sans doute venue de penser une sorte de syncrétisme en montrant que les différentes approches s’adaptent parfaitement à des contextes décisionnels spécifiques et qu’on peut par conséquent les mixer. Pour illustrer son propos, Gilles Paché fait appel au cas emblématique des décisions de nature logistique. Longtemps les décisions logistiques ont été réduites à la seule application de techniques d’optimisation ; alors qu’il est nécessaire d’intégrer les jeux de pouvoir et d’influence entre acteurs pour comprendre et anticiper les choix effectués par les managers. Ce chapitre prolonge donc la réflexion entamée dans les deux chapitres précédents, en cherchant à dépasser le cadre trop étroit des conceptions substantives de la rationalité, sans les rejeter en tant que telles.

Dans le chapitre 4, Laurent Ducau propose, selon une perspective clairement ingénieriale, de réhabiliter la notion de « bricolage » en s’appuyant sur l’exemple des processus de décision dans les activités de conception. La réutilisation d’objets ou de connaissances d’un projet de conception à l’autre est en effet de plus en plus répandue dans l’industrie à des fins évidentes de compétitivité. Cette pratique constitue aujourd’hui l’un des éléments clés des stratégies d’innovation. Dans le secteur de l’automobile par exemple, les pratiques fondées sur la notion de « plate-forme » tendent à se généraliser : la plupart des constructeurs développent, à cet effet, une base roulante à partir de laquelle ils conçoivent plusieurs véhicules. Comment l’approche du processus de décision en conception s’en trouve-t-elle modifiée ? Comment gérer et capitaliser les connaissances en vue de réutilisations futures ? Quels outils peuvent soutenir ces pratiques ?

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Laurent Ducau montre que la logique à l’œuvre dans les processus de décision en conception est, très souvent, celle d’une réutilisation de l’existant. À partir des travaux sur le garbage can (Cohen et al., 1972/1991), on peut en effet s’apercevoir que dans un processus de conception, les solutions peuvent précéder les problèmes et ainsi modifier leur formulation par les acteurs. Le plus souvent, les acteurs ne cherchent pas à concevoir ex nihilo des objets nouveaux répondant à un cahier des charges. Ils reprennent plutôt les éléments ou les connaissances dont ils disposent en s’efforçant de les adapter à leurs finalités et à leur nouveau problème… On peut rapprocher ces développements théoriques de la notion de « bricolage », en l’illustrant par les pratiques dites de « l’innovation sur étagère », de carry over et de carry across observées dans l’industrie automobile. La réflexion débouche alors très largement dans le champ du management des connaissances dans les organisations, en proposant notamment une approche de capitalisation des connaissances fondée sur le recours aux technologies de l’information et de la communication (les TIC) et à la mise à disposition d’artefacts. La réflexion sur la rationalité à l’œuvre dans des processus décisionnels concrets s’en trouve ainsi largement renouvelée.

Enfin, pour terminer cette première partie, Jean-Laurent Viviani nous propose, dans le chapitre 5, de revisiter à sa façon les théories de la décision et leur conception sous-jacente de la rationalité, en les envisageant à travers le prisme d’un débat important en finance, l’une des spécialités des sciences de gestion. La théorie des parties prenantes (TPP) remet en effet en question l’hypothèse de finalité unique de la firme, pour tenir compte des intérêts de l’ensemble des parties prenantes. Cependant, cet élargissement est refusé par la théorie – clairement libérale – de la valeur pour l’actionnaire (TVA), sur la base de deux lignes d’arguments qui accordent une place centrale à la rationalité de la décision. Primo, la prise en compte des parties prenantes dans les objectifs de la firme réduirait l’efficacité et l’optimalité des décisions. Secundo, la participation des parties prenantes au processus de décision ne serait ni légitime, ni le meilleur moyen de défendre leurs intérêts.

Jean-Laurent Viviani adopte une démarche de réflexion critique vis-à-vis de ces deux arguments libéraux, et nous conduit ainsi à une remise en cause – au moins partielle – des conceptions traditionnelles et substantives de la rationalité. Le premier argument suppose qu’il est impossible de trouver un objectif commun à l’ensemble des parties prenantes et de réaliser des trade off entre les objectifs des différentes parties prenantes. Cependant, il existe des propositions d’objectif global mesurables et des modes de coordination entre les parties prenantes sont toujours possibles. Par ailleurs, le lien entre la diversité des objectifs et l’efficacité de la firme n’est fondé que sur l’approche de la rationalité substantive et n’a pas reçu de validation empirique claire. Le second argument des théoriciens libéraux consiste à dire que, si les transactions sont volontaires, les contrats contiennent toutes les clauses nécessaires de défense des parties prenantes. Il ne serait donc pas nécessaire qu’elles participent aux décisions pour se défendre. Pourtant, les

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dysfonctionnements du marché sont consubstantiels à l’existence des firmes. C’est donc justement parce que des contrats adéquats ne peuvent être signés que les parties prenantes sont naturellement conduites à participer au processus de décision. Au total, la théorie de la TVA, archétype des approches substantives de la rationalité en sciences de gestion, ne résiste pas à l’étude des pratiques possibles sur le terrain.

Deuxième partie : questionnements et réflexions relatifs aux aspects nécessairement collectifs des processus de décision dans les organisations

Le second thème fondamental qui relie logiquement les contributions des auteurs est celui de l’aspect nécessairement collectif des processus de décision dans les organisations. Pourquoi, même quand on est apparemment le seul à décider, le processus décisionnel s’inscrit-il malgré tout dans une logique collective ? Comment modéliser et mettre en évidence ces processus collectifs ? Comment aider les décideurs à prendre en compte le jeu des acteurs et-ou des agents qui œuvrent consciemment ou non en leur sein ? Là encore, nous avons cherché à articuler, d’une part, des rappels des principales théories actuellement en présence sur ces sujets en économie et en gestion, et d’autre part, des propositions critiques et constructives.

Dans le chapitre 6, Jérôme Joubert évoque la question (fondamentale en économie politique internationale) des processus d’influences multiples qui sont à l’œuvre lorsqu’il s’agit de décider la politique commerciale d’un pays – notamment le degré d’ouverture du pays à la concurrence internationale. Il tente de montrer que les analyses (tant normatives que positives) que proposent habituellement les sciences économiques pour répondre à cette question, sont mal adaptées aux situations décisionnelles concrètes. De multiples acteurs et facteurs sont en effet à l’œuvre, et leurs interactions sont souvent déterminantes dans le choix effectif de la politique commerciale du pays. Jérôme Joubert en conclut que la gouvernance d’un système multi-agents et multi-acteurs aussi complexe suppose une approche ingénieriale et pragmatique.

D’une part, l’analyse économique normative tend à indiquer quelle est la meilleure décision dans un contexte donné ; elle ne permet pas en revanche d’aider les décideurs lorsqu’ils sont confrontés à des pressions et des influences multiples qui les éloignent des contextes envisagés par la théorie. D’autre part, l’analyse économique positive n’arrive pas à produire des modèles rendant compte de la complexité de la situation. Jérôme Joubert montre alors comment on peut aider les décideurs de manière pragmatique en enrichissant leur représentation : on peut en effet modéliser le processus de détermination de la politique commerciale comme un système dans lequel un certain nombre de processeurs-acteurs interagissent pour produire un certain type de décision. Cette modélisation systémique permet notamment de remarquer que la variété d’un tel système est très élevée : le nombre de

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configurations possibles étant extrêmement important, il est difficile d’anticiper correctement l’évolution de la politique commerciale dans ces conditions. Le multilatéralisme apparaît ainsi comme un système ingouvernable par les seuls États ou institutions internationales. Une telle vision systémique permet aussi d’interpréter l’histoire des grandes décisions passées et des cycles d’ouverture et de protection, mais également de renforcer notre capacité prédictive sur les évolutions à venir. D’un point de vue ingénierial, elle permet surtout d’accroître la capacité des acteurs à concevoir des stratégies d’action inventives dans le but de peser concrètement sur les évolutions de la politique commerciale.

Dans le chapitre 7, François Fulconis aborde la question des processus collectifs de prise de décision au sein des partenariats d’impartition. Les relations inter-organisationnelles au sein d’une même chaîne logistique (et les processus collectifs de décision qu’elles impliquent) se sont en effet profondément modifiées depuis la fin des années 1980. Elles sont passées, dans bien des cas, du conflit à la coopération verticale, de la sous-traitance au partenariat d’impartition. Elles ont transformé l’organisation industrielle et commerciale traditionnelle, et ont donné naissance à de nouvelles formes organisationnelles qualifiées de « réticulaires ». Si ces dernières ont fait l’objet de très nombreuses recherches dans le domaine des sciences de gestion, se pose toujours la délicate question de leur management.

François Fulconis approfondit cette question à partir de l’étude des processus de prise de décision qui ont été mis en œuvre afin de piloter le projet automobile « Smart », exemple récent de mise en œuvre d’un partenariat d’impartition. Il apparaît des plus intéressants car, dans un environnement hyperconcurrentiel, il a permis de lancer une nouvelle marque automobile et d’imposer de nouveaux modes de production et de distribution au moment même où les constructeurs tentent de se regrouper pour ne pas disparaître. À travers cet exemple, deux catégories de décisions peuvent être assez nettement distinguées. La première renvoie au mode stratégique de management, lequel obéit à une logique d’innovation : il est dominé par une rationalité procédurale. La seconde renvoie au mode opérationnel de management, lequel obéit à une logique d’optimisation : il est dominé par une rationalité substantive.

Les processus de décision revêtent des aspects nécessairement collectifs dans des structures réticulaires ou résiliaires d’un autre type. Ce sont les réseaux d’accompagnement et de financement à la création de TPE, que Nadine Richez-Battesti étudie dans le chapitre 8. Sa réflexion s’est construite à partir d’études empiriques qu’elle a récemment réalisées en collaboration avec Patrick Gianfaldoni. Les services d’accompagnement et de financement, intégrant des dimensions marchandes / non marchandes et monétaires / non monétaires, sont organisés et produits dans le cadre d’une « architecture en réseaux contextualisés » et se caractérisent par une structure de gouvernance au sein de laquelle les normes politiques et publiques sont prédéterminantes aux prises de décision. Primo, elles

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s’avèrent déterminantes lorsqu’il s’agit d’élaborer des critères d’encadrement au sein des réseaux. Secundo, elles jouent un rôle central dans le processus visant à harmoniser les intérêts des différents acteurs en présence au sein du réseau. Les décisions prises dans ce contexte particulier sont donc particulièrement affectées par des processus collectifs et politiques, que la théorie économique standard a bien du mal à appréhender à partir de ses postulats de base habituels.

Si le débat économique sur le gouvernement d’entreprise s’est en effet bien développé depuis une quinzaine d’années, cela s’est fait dans une perspective principalement contractualiste et néo-institutionnaliste. Constatant que la question de la gouvernance des réseaux reste encore peu ou imparfaitement abordée dans le champ des sciences économiques, Nadine Richez-Battesti cherche alors à caractériser les règles de gouvernance d’un réseau, la répartition des pouvoirs et les processus de décision collective qu’elle implique.

L’ouvrage s’achève sur un chapitre 9 dans lequel Stéphanie Loup nous propose une stimulante réflexion sur les processus de décision stratégique du propriétaire-dirigeant dans les TPE. Voilà un domaine où l’on pourrait légitimement penser a priori que le processus de décision est forcément individuel – se rapprochant ainsi des analyses standard de la décision en sciences de gestion. Stéphanie Loup nous démontre que, même dans ce cas, le processus de décision comporte des aspects collectifs qui contraignent à l’aborder sous un angle procédural. En effet, même si le propriétaire-dirigeant de TPE est souvent considéré comme un individualiste, il n’est pas pour autant isolé, notamment au niveau de la prise de décision stratégique. L’étude qu’elle a réalisée dans le secteur de l’artisanat d’art lui permet d’illustrer très clairement que « toute décision est à la fois individuelle, par l’engagement des acteurs qui la prennent, et collective, par l’impact des environnements ou l’intervention d’autrui » (Louart, 1999).

Ainsi, le processus décisionnel mis en œuvre par un propriétaire dirigeant d’une TPE est lui-même sous l’influence des groupes et des environnements dans lesquels il s’insère. Le même entrepreneur prendra par exemple des décisions différentes selon son degré d’intégration dans le collectif et la nature de ce dernier. La confiance et la proximité entre les acteurs du réseau influenceront notamment le processus de décision stratégique auquel se réfère le dirigeant d’une TPE, non seulement en ayant un effet sur les procédures suivies à un temps donné, mais aussi en ayant un impact sur l’évolution du processus de décision. On pourrait presque dire, pour résumer : chassez le collectif, il revient au galop !