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Un lot de céramiques du milieu du XVIIe siècle à Toulouse, site de la Cité judiciaire. par Jean Catalo Communication présentée au SHA en janvier 2014 à Québec (Canada) Présentation Les fouilles d’archéologie préventive réalisées entre 1999 et 2006 par l’Association pour les Fouilles Archéologiques Nationales (AFAN) puis par l’Institut National de Recherches Archéologiques Préventives (INRAP) 1 lors des travaux du palais de justice de Toulouse ont permis la découverte de nombreux vestiges de toutes les périodes historiques (fig. 1). Fig. 1 : Site de la Cité Judiciaire, Tribunal de Grande Instance de Toulouse. © O. Dayrens Inrap Pour l’époque moderne, le site est marqué par le développement de l’emprise du Parlement de Toulouse. Après la démolition de l’ancien château comtal au cœur du complexe parlementaire, son emplacement est occupé par une rue privée constituée de boutiques. L’installation d’une cuve de latrines est apparue comme le seul vestige conservé de cet urbanisme. La construction de la cuve a opportunément réutilisé plusieurs fondations anciennes. Seul un mur est-ouest bâti en briques sur deux mètres de profondeur a fourni une limite méridionale à cette structure. Le comblement des latrines était constitué d’un ensemble hétérogène de terre comportant des lentilles de sable et d’argile verdâtre, avec des inclusions de galets et de débris de briques. L’épaisseur maximale de ce remplissage atteignait 1,78 m. 1 Maîtrise d’ouvrage AMOTMJ. Trois interventions successives en 1999, en 2002-2003 et en 2005-2006. Catalo 1999 et Catalo 2007.

Un lot de céramiques du milieu du XVIIe siècle à Toulouse, site de la Cité judiciaire

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Un lot de céramiques du milieu du XVIIe siècle à Toulouse,

site de la Cité judiciaire.

par Jean Catalo Communication présentée au SHA en janvier 2014 à Québec (Canada) Présentation

Les fouilles d’archéologie préventive réalisées entre 1999 et 2006 par l’Association pour les Fouilles Archéologiques Nationales (AFAN) puis par l’Institut National de Recherches Archéologiques Préventives (INRAP)1 lors des travaux du palais de justice de Toulouse ont permis la découverte de nombreux vestiges de toutes les périodes historiques (fig. 1).

Fig. 1 : Site de la Cité Judiciaire, Tribunal de Grande Instance de Toulouse. © O. Dayrens Inrap

Pour l’époque moderne, le site est marqué par le développement de l’emprise du Parlement de Toulouse. Après la démolition de l’ancien château comtal au cœur du complexe parlementaire, son emplacement est occupé par une rue privée constituée de boutiques. L’installation d’une cuve de latrines est apparue comme le seul vestige conservé de cet urbanisme. La construction de la cuve a opportunément réutilisé plusieurs fondations anciennes. Seul un mur est-ouest bâti en briques sur deux mètres de profondeur a fourni une limite méridionale à cette structure. Le comblement des latrines était constitué d’un ensemble hétérogène de terre comportant des lentilles de sable et d’argile verdâtre, avec des inclusions de galets et de débris de briques. L’épaisseur maximale de ce remplissage atteignait 1,78 m.

1 Maîtrise d’ouvrage AMOTMJ. Trois interventions successives en 1999, en 2002-2003 et en 2005-2006. Catalo 1999 et Catalo 2007.

Après l’abandon de sa fonction initiale, sa surface a été aménagée par la pose d’un carrelage de briques fragmentées et de galets (fig. 2).

Fig. 2 : Latrines, lieu de dépôt du lot 4155. © O. Dayrens Inrap

Le lot de poteries découvert dans ces latrines, unité stratigraphique 4155, représente 950 fragments pour un nombre minimal d’individus (NMI) de 1022 . La datation de cet ensemble repose sur un lot de 95 monnaies dont 86 doubles tournois et deux deniers tournois émis sous le règne de Louis XIII, ou quelques années après, dans les ateliers contrôlés par le roi et dans plusieurs principautés du royaume. Les monnaies les plus récentes portaient des millésimes entre 1650 et 1654, ce qui place leur abandon dans cette décennie du XVIIe siècle. Dans une vision plus élargie de l’utilisation des latrines et de leur comblement, on peut retenir le deuxième tiers du XVIIe siècle pour la chronologie de l’échantillon céramique.  Groupes techniques et quantification

L'inventaire et l'étude du lot de la Cité judiciaire utilisent les modalités de classification de la banque de données ICERAMM de l'université de Tours3, plus axés sur les assemblages typologiques que sur une approche fonctionnelle. Les catégories se définissent sous le terme de « groupes techniques » qui regroupent les critères distinctifs tels que couleur de pâte, nature de la pâte, revêtement ou traitement de surface. Les différentes formes sont ensuite définies pour chaque groupe technique selon une typologie simple, encore en cours d’élaboration pour Midi-Pyrénées.

Pour la période moderne, la diversification des productions, et en particulier des revêtements, induit une classification qui peut inclure des « groupes » d’ateliers fournissant des produits particuliers : groupe de Cox-Lomagne, Giroussens…Cette distinction se fait souvent par la présence de décor peint sur de la céramique fine engobée. Pour autant, ces ateliers produisent également de la céramique plus commune mais dont l’identification spécifique est plus difficile, en particulier en raison de l’utilisation de pâte de couleur variée. La quantification par groupe d’ateliers ne peut donc concerner à ce jour que la céramique décorée. Cette distinction ne signifie nullement que des fragments issus d’une technologie différente ne puissent pas également appartenir à ces ateliers. La distinction de produits

2 Une première approche chronologique avait été réalisée en 2007 par Laurent Llech (Inrap). Pour la présente étude, un nouvel inventaire a été réalisé 3 ICERAMM, réseau d'information sur la céramique médiévale et moderne, http://iceramm.univ-tours.fr/ Le répertoire et les groupes techniques sont encore cours d’élaboration mais la méthode d’analyse croisée des assemblages a été retenue.

peints en pâte claire de pièces en pâte foncée, colorée ou rouge pour les ateliers de Cox-Lomagne s’impose, même si ces variations n’ont pas, à ce jour, trouvées d’explication satisfaisante. Nous reprenons en ce domaine la distinction faite par Joseph Picard (PICARD 2000).

La quantification utilisée ici s’établit sur sept groupes techniques présents. La faïence, production à glaçure stannifère décorée ou non, est très peu présente avec seulement deux fragments. Les productions à la pâte claire ou rouge orangée fabriquée selon les techniques de la glaçure plombifère sur engobe et peintes sont scindées par catégorie de couleur : « peinte claire », « peinte rouge ». Sans décor, seules les céramiques en pâte rouge porte assurément un engobe : « mod glaç/engobe ». Les productions en pâte claire ou en pâte rouge peuvent encore porter une glaçure au plomb mais sans engobe, « mod rouge glaç » et « claire glaç », ou même pas de glaçure du tout. Dans ce dernier cas, la couverte ou la pâte peuvent prendre des teintes plus ou moins sombre en raison des conditions de cuisson.

Dans les tableaux de quantifications en nombre de restes (NR) ou en nombre minimum

d’individus NMI4 (fig. 3), le regroupement par couleur de pâte générique, claire ou rouge, donnent dans les deux cas une large domination des pâtes rouges dont la proportion est entre 70 et 80 %. On note également deux caractéristiques de cet assemblage, aussi bien dans les pourcentages de fragments que dans ceux du nombre d’individus. La première est une majorité proche de la moitié des effectifs (entre 40 et 50 %) pour la céramique à pâte rouge glaçurée sur engobe. La seconde est la préséance quantitative de la céramique peinte en pâte claire sur la céramique peinte en pâte rouge. TCJ 4155 NR % NR % peinte claire 119 12,53 claire glaç 72 7,58 Faïence 2 0,21

193 20,31

peinte rouge 80 8,42 rouge glaç/eng 468 49,26 mod rouge 107 11,26 mod rouge glaç 102 10,74

757 79,68

950 100 950 TCJ 4155 NMI % NMI % peinte claire 17 16,67 claire glaç 13 12,75 Faïence 2 1,96

32 29,63

peinte rouge 11 10,78 rouge glaç/eng 43 42,16 mod rouge 12 11,76 mod rouge glaç 4 3,92

70 70,37

102 100 102

4 Le NMI (nombre minimum d’individus) est ici calculé à partir du nombre le plus élevé des éléments d’une forme (bords ou fonds) ajouté au nombre d’éléments caractéristiques d’une forme ne pouvant induire de compter deux fois le même individu (décor, éléments spécifiques). Un fragment seul n’est pas compté comme un individu. On notera que pour les productions de Midi-Pyrénées le fond est généralement lenticulaire et même parfois totalement bombé sans rupture avec la panse pour la vaisselle culinaire à partir du XVe siècle. Ce particularisme interdit donc une quantification sûre et systématique des fonds, leur nombre n’est donc généralement pas retenu pour le calcul du NMI.

Fig. 3 : Tableaux de quantification du lot 4155 par nombre de restes et nombre minimum d’individus.  

La quantification par catégorie fonctionnelle, établie à partir des effectifs du nombre minimum d’individus, donne une répartition relativement équilibrée entre vaisselle de table décorée, vaisselle de table non décorée, vaisselle culinaire (marmites, couvercles, lèchefrite, poêlon…), vaisselle domestique destinée au transport ou à la conservation (cruches, bassine, cuvier…), hygiène (pots de chambre, pots de chaise, urinoirs). La représentation de toute la typologie céramique montre que le rejet n’a pas été sélectif. Elle démontre surtout que l’assemblage des groupes techniques n’est pas en rapport direct avec les différents usages des formes présentes.   

fonctions

cuisine21%

table peinte25%

table14%

domestique25%

hygiène15%

 Fig. 4 : Graphe de quantification par catégorie fonctionnelle du lot 4155. Comparaisons

Bien que nous ne disposions pas de toutes les données quantitatives nécessaires, la composition de ce lot, en catégories et en types, est très comparable à d’autres lots déjà découverts à Toulouse. Il s’agit des ensembles de céramiques recueillis Grande-rue Saint-Michel en 1973, dans le puits de la place Saint-Etienne et étudié par Jean-Michel Lassure5 (Lassure 2006), ou encore dans une fosse du site du Lycée Ozenne fouillé en 1997 par l’équipe de Jean-Charles Arramond (Arramond 1997). Le puits public de Saint-Etienne a été fouillé en 1987 alors que s’achevait l’opération archéologique du parking souterrain de la place. L’ensemble a été daté par 160 monnaies, dont les plus anciennes sont des frappes de la décennie 1640. Son remplissage d’abandon a été situé en 1649 (Lassure 2006). Pour les fosses dépotoirs du jardin de la Maîtrise de Saint-Sernin au Lycée Ozenne, le lot est également daté par des espèces monétaires frappées entre 1612 et 1642. Bien que légèrement antérieurs, ces ensembles fournissent de nombreuses comparaisons toujours en contexte urbain pour des quartiers différents.  

5 Merci à Jean-Michel Lassure pour son aimable autorisation de l’utilisation des clichés et dessins issus de son rapport de prospection-inventaire de 2006 (Lassure 2006).

La céramique peinte  

Cette corrélation chronologique des trois lots se traduit particulièrement à travers l’examen des céramiques décorées. En effet, les poteries peintes sur engobe des ateliers désignés sous le terme générique de Cox-Lomagne caractérisent ces lots puisque elles représentent la quasi-totalité de la céramique décorée. L’analogie entre les trois sites s’établit tout aussi bien par le registre des formes que celui des décors. Pour l’ensemble issu de l’us 4155, on peut inventorier des assiettes creuses, des écuelles à oreilles, des jattes, un vase à liquide type pichet ou un réchaud de table. En pâte claire, les décors peints sur engobe sont polychromes : vert, bleu et brun, non systématiquement associés. Cette association est celle du décor de la jatte 4155-12-C avec une fleur de lys (fig. 5, n° 8). La fleur de lys est connue sur une écuelle à oreilles du site des Pénitents blancs (Baccrabère 1999, pl. 5). Comme dans ce cas, l’utilisation importante du bleu et de motifs figuratifs est plutôt caractéristique des premières productions de Cox-Lomagne. Les écuelles à oreilles

0 5 cm

4155-35-C

4155-37-C

0 10 cm

0 5 cm

4155-26-C

0 5 cm

4155-15-C

4155-32-C

0 5 cm

0 5 cm

4155-30-C

0 10 cm

4155-19-C

0 5 cm

4155-12-C

0 5 cm

4155-10-C

0 5 cm

4155-05-C

4155-36-C

1 2

3

45

6

7

8

9

1011

Fig. 5 : Céramiques à pâte claire, décor peint sur engobe glaçure plombifère, deuxième tiers XVIIe s. dessin H. Walicka et L. Llech

trapézoïdales ornées de deux traits parallèles portent un motif de « fruits groupés » ou de guirlandes à treillis géométriques et feuillage stylisé (fig. 5, n° 3 et 6).

Cet entrelacs accompagne également le décor zoomorphe de poisson (Raimbault-Deschamps 2000, n°80 à 84) d’une assiette 4155-10-C (fig. 5, n° 5). Pour l’assiette 4155-32-C (fig. 5, n° 2), des barbelures sur des figures en forme de V occupent les parois autour d’un motif central de tente. La stylisation géométrique de dessins phytomorphes est aussi à l’origine des frises colorées qui ornent en deux registres la panse du vase 4155-30-C (fig. 5, n° 7). Enfin, toujours dans la tradition des productions de Cox-Lomagne, le réchaud 4155-19-C porte des aplats de couleur (fig. 5, n° 11). Ce dernier, par sa forme de coupe de type hémisphérique et son pied tronconique avec trois anses rubanées reliant la base du bandeau à la jonction du pied, se rapproche d’un exemplaire découvert dans la Grande-rue Saint-Michel (Baccrabère 2002, fig. 7) ou du site archéologique «Extension Préfecture» (Catalo 1995, pl. 26).

L’association de motifs phytomorphes et géométriques est plus courante de l’évolution stylistique du XVIIe siècle avec des compositions faites au pinceau à deux brins. Le décor de l’assiette 4155-36-C (fig. 5, n° 4), quadripartite à motifs associés deux par deux et aplats verts, est quasi identique à celui de l’écuelle retrouvé au Lycée Ozenne (fig. 6 et 7). Sur l’assiette 4155-05-C ce type de décor stylisé se combine avec une ligne sinueuse pointé de vert sur l’aile (fig. 5, n° 1).

Fig. 6 : Toulouse. Cité judiciaire.TCJ 4155-36-C, jatte, groupe Cox-Lomagne. © O. Dayrens Inrap

 Fig. 7 : Toulouse. Lycée Ozenne. Ecuelle TLO.7.cliché H. Améglio.

Sur pâte rouge toujours, une écuelle à oreilles porte ce type de décor quadripartite de bandes colorées 4155-34-C (fig. 8, n° 1). Ce motif dextrogyre se poursuit sur les deux oreilles arrondies. Il est connu à Cox (Raimbault-Deschamps 2000, n° 202), Grande-rue Saint-Michel et au Lycée-Ozenne à Toulouse (fig. 8, n° 2 et 3) (Lassure 2006). Sur la forme d’assiette 4155-11-C (fig. 8, n° 6), le décor phytomorphe prend la forme de branches découpées en cils, parfois assimilées à une plume dans certain décor (Raimbault-Deschamps 2000, n°93). Plus original et plus rare est l’écuelle 4155-04-C à oreille de préhension festonnée en relief et décorée d’une composition triangulaire typique de cercles croisillonnés

(fig. 8, n° 4) connue aussi au Lycée-Ozenne (fig. 8, n° 5). Le monogramme christique « IHS » occupe le fond simplement souligné de cercles concentriques. Ce motif de lettres a également été retrouvés sur des pièces d’un ensemble découvert dans le quartier des Pé-nitents blancs à Toulouse (Baccrabère 1999, fig. 8 et 9).

4155-34-C

0 10 cm

0 5 cm

4155-11-C

0 5 cm

4155-04-C 0 10 cm

1155. 22

Lycée Ozenne

Toulouse. Grande-Rue Saint-Michel.Ecuelle T.SM.1.2.(cliché H. Améglio ; dessin J.-M. Lassure)

Toulouse. Lycée Ozenne.Ecuelle T.LO.6(cliché H. Améglio ; dessin J.-M. Lassure)

1 2 3

4 5

6

Fig. 8 : Céramiques à pâte rouge, décor peint sur engobe glaçure plombifère, et comparaisons. dessin H. Walicka et L. Llech

La céramique commune  

La céramique commune est également amplement représentée dans le lot de l’us 4155. Un second type de réchaud à coupe plus évasé et anse en boudins est présent (fig. 8, n° 6 et 10). Malgré un décor de bandes sgraffitées très différent des productions de Cox-Lomagne, ce type très répandu est parfois attribué au même groupe d’ateliers (Lassure 2006). On le retrouve sur les sites toulousains avec ou sans supports conservés (Lassure 2006, fig. 59) (Catalo 1995, pl. 29) (Baccrabère 2002, fig. 8 et 9).

Le vaisselier, en majorité en pâte rouge glaçuré sur engobe au moins partiellement, est comparable à celui déjà recensé pour cette période et plus spécialement dans les deux autres lots de référence chronologique identique : puits Saint-Etienne (Lassure 2006) et au lycée Ozenne (Arramond 1997). A côté de poteries à usage culinaire (fig. 9 n° 1 à 5, fig. 10), marmites, couvercles, lèchefrites, figurent des récipients servant pour le trans-port et la conservation des liquides, cruches, pichets, et divers ustensiles utilisés pour la table (écuelles, assiettes, tasses).

Fig. 10 : Toulouse Cité judiciaire, ensemble de céramique à fonction culinaire © O. Dayrens Inrap

On note que la pâte blanche, de type Cox-Lomagne n’est présente que dans certains cas : petit pots culinaires à une ou deux anses (fig. 5, n° 9 et 10). Les marmites en pâte claire à bord aplati et encoche rentrante sont largement minoritaires par rapport aux marmites en pâte rouge sableuse toulousaine qui présentent un bord arrondi sur un col incliné (fig. 9, n° 2, 3 et 4). Dans ces exemplaires, l’engobe interne n’atteint que rarement le bord de manière uniforme. Ainsi la glaçure au plomb, elle aussi répartie de manière aléatoire, donne des variations caractéristiques de couleur du marron au jaune (fig. 11).

0 5 cm

4155-27-C

4155-24-C

4155-25-C

0 5 cm

4155-20-C

4155-22-C

4155-18-C

0 10 cm

0 5 cm

4155-07-C

0 5 cm

0 5 cm

4155-08-C

0 5 cm

4155-09-C

4155-17-C

0 5 cm

1

2

3

4

5

6

7

8

9

10

Fig. 9 : Céramiques culinaires et d’hygiène, pâte rouge glaçure plombifère sur engobe, deuxième tiers XVIIe s. dessin H. Walicka et L. Llech

Fig. 11 : Toulouse Cité judiciaire, marmite en pâte rouge et glaçure plombifère sur engobe © O. Dayrens Inrap

Pour les vases d’hygiène, pot de chambre (fig. 9 n° 7, fig. 11) et pots de chaise percée (fig. 9 n° 8 et 9, fig. 12) à larges bords éversés, l’engobe est réparti de manière plus couvrante que la glaçure. Les anses à section ovoïde de ces vases, de part et d’autre de la panse, semblent caractéristiques de la période considérée.  

   Fig. 12 : Toulouse Cité judiciaire, pot de chambre en pâte rouge et glaçure plombifère sur engobe © O. Dayrens Inrap  

 Fig. 13 : Toulouse Cité judiciaire, pot de chaise percée glaçure plombifère sur engobe © O. Dayrens Inrap

Un assemblage typiquement urbain ?

Au final, l’ensemble du mobilier des latrines de la Cité judiciaire apparaît d’une très grande représentativité. La datation proposée par l’analyse numismatique est confortée par la typologie du vaisselier céramique. La comparaison en lots toulousains de datation comparable, sur la décennie 1640, révèle même un étonnant mimétisme de formes et de productions. Même si certains décors des ateliers de Cox-Lomagne réputés anciens semblent ce maintenir jusqu’au milieu du XVIIe siècle, l’assemblage est parfaitement cohérent avec les découvertes sur les sites de consommation à Toulouse. Cette analogie semble affirmer le caractère chronologique de l’assemblage puisque les autres lots toulousains sont issus de site répartis dans des quartiers différents de la ville : bourg Saint-Sernin pour le site du Lycée Ozenne, le quartier cathédral pour le puits Saint-Etienne, le quartier parlementaire pour la Cité judiciaire.

 La question d’un type assemblage proprement « urbain » peut alors être posée.

Pourtant dans la proche banlieue de Toulouse, dans son ressort administratif d’époque moderne mais en contexte rural, les mêmes types de poterie sont en usage. L’opération d’archéologie préventive réalisée en 2013 sur le site d’En Battut à Flourens (Haute-Garonne) (SALMON 2013) a permis la découverte de lots de céramique moderne en contexte rural. Ce type d’échantillon en « silo » a plusieurs fois été reconnu au sud ouest de Toulouse : à Clermont-le-Fort, à Juzes (GARNIER 1972), à Labruyère-Dorsa (WINCKLER 1991). Dans ces derniers cas, les dépôts accompagnés de monnaies sont généralement datés de la seconde moitié du XVIIe siècle.

A Flourens, une espèce monétaire frappée en 1639 (St 126) vient à l’appui d’une datation postérieure à cette date. Les assemblages en contexte offrent ici de précieuses précisions que seul le ramassage exhaustif des fragments permet. En effet, les catégories et les formes associées montrent une très grande homogénéité au-delà de la céramique décorée. Le lot du « silo » St131 par exemple montre des rapports proportionnels d’un type d’assemblage équivalent à celui du lot urbain 4155 du site de la Cité judiciaire daté du milieu du XVIIe siècle. En nombre de restes pour un total représentatif de 103, on y retrouve les 80 % de céramique en pâte rouge pour 20 % de fragments en pâte claire. Les deux autres caractéristiques quantitatives du milieu du XVIIe siècle toulousain sont remarquables : une prédominance du décor peint sur pâte claire par rapport au décor peint sur pâte foncée, une domination très nette de la céramique à engobe glaçurée sur pâte rouge proche de 50 % des fragments. FLEB St131 NR % NR % peinte claire 19 16,81 glaç claire 5 4,42 mod claire

24 21,24

peinte rouge 2 1,77 glaç/eng rouge 65 57,52 mod rouge 22 19,47 mod rouge glaç

89 78,76

totaux 113 99,99 113  Fig. 3 : Tableaux de quantification du lot St131 de En Battut à Flourens (31) par nombre de restes.

 Conclusion

Le lot 4155 apparaît comme un échantillon référence du deuxième tiers du XVIIe siècle. Il l’est d’abord intrinsèquement par la datation qui peut être proposé pour cet assemblage. Il l’est ensuite par la comparaison de sa composition typologique avec d’autres ensembles de la même période découverts à Toulouse. Il l’est enfin par les caractéristiques quantitatives de cet assemblage céramique. En effet, ces trois caractères ne sont pas le résultat d’une répartition fonctionnelle. L’assemblage n’apparaît non plus comme le résultat d’un mode de consommation urbain puisqu’un assemblage tout à fait comparable a été découvert en contexte rural. Il semble confirmer le rapport entre la composition catégorielle et la chronologie des rejets de consommation.

   Bibliographie ARRAMOND 1997 : ARRAMOND J.-C., CATALO J., LLECH L., MOLET H., RODET-BELARBI I., Site du Lycée Ozenne à Toulouse (Haute-Garonne). D.F.S., A.F.A.N./S.R.A. Midi-Pyrénées, Toulouse, 1997. BACCRABERE 1999 : BACCRABERE G., Céramique toulousaine des XVIe - XVIIe siècles dans le quartier des pénitents blancs à Toulouse, M.S.A.M.F., t. LIX, 1999, p. 203-228. BACCRABERE 2002 : BACCRABERE G., Réchauds toulousains des XVIe-XVIIIe siècles, M.S.A.M.F., t. LXII, 2002, p. 175-188.CARME 2012 : CARME R. dans OLLIVIER J., 16-18 rue des Pénitents-Blancs (Haute-Garonne), Rapport d’opération archéologique, Hadès, 2012, 3 vol. CATALO 1995 : CATALO J. (dir.), LLECH L., RIBEIRO J., RIFA P., RODET-BELARBI I., Extension-Préfecture, rue Sainte-Anne-rue Saint-Jacques, Toulouse, D.F.S. A.F.A.N./S.R.A. Midi-Pyrénées, Toulouse,1995, 2 vol. CATALO 2007 : CATALO J. (dir.), PAYA D., MOLET H., CALLEDE F., LLECH L., RODET-BELARBI I., GENEVIEVE V., DAYRENS O., CORNARDEAU S., Cité Judiciaire, Toulouse Haute-Garonne Midi-Pyrénées, Rapport final d’opération, Inrap, SRA Midi-Pyrénées, 2007, 3 vol. COSTES 1999 : COSTES A., DESCHAMPS L. NAVONNE S. et PIQUES S., Les ateliers de Lomagne, Rapport de prospection 1999, S.R.A. Midi-Pyrénées. COSTES 2000 : COSTES A. Approches de la poterie du Midi-Toulousain et de la Gascogne (XVI-XXe siècles), La Grésale hors-serie, n° 1, 2000, 169 p. LASSURE 2006 : LASSURE J.-M., Village de potiers de Cox (Haute-Garonne), rapport de prospection-inventaire 2006, S.R.A. Midi-Pyrénées, 2006. LASSURE 2009 : LASSURE J.-M., Céramiques importées à Toulouse de la seconde moitié du XVIe au XVIIIe siècle dans Toulouse, une métropole méridionale : vingt siècles de vie urbaine, Actes du 58e Congrès de la Fédération historique de Midi-Pyrénées, Méridiennes, 2009, vol. 1, p.447-455. PICARD 2000 : PICARD J. Quelques éléments d’information sur les matières premières utilisées par les potiers de Cox (Haute-Garonne), La Grésale, n° 2, 2000, p.35-37. RAIMBAULT-DESCHAMPS 2000 : RAIMBAULT-DESCHAMPS L. Le bleu, le vert, le brun en Gascogne toulousaine. Céramiques glaçurées du groupe de Cox. Décors et motifs peints du XVIe au XVIIIe siècle, La Grésale hors-serie, n° 2, 2000. SALMON 2013 : SALMON CH., Flourens (Haute-Garonne), En Battut, Rapport final d’opération archéologique, Inrap, 2013, en cours.