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Morphologie (2014) 98, 32—39 Disponible en ligne sur ScienceDirect www.sciencedirect.com ARTICLE ORIGINAL Drainage lymphatique des territoires cutanés de la tête et du cou : approche in vivo par la localisation du ganglion sentinelle Lymphatic drainage of skin areas of head and neck: In vivo approach by the location of the sentinel node A. Lagier a,,b , M. Pénicaud b , T. Le Corroller a , D. Guenoun a , S. Cammilleri c , P. Champsaur a , P. Dessi b , J.J. Grob d , A. Giovanni b , N. Fakhry b a Laboratoire d’anatomie, faculté de médecine de Marseille, Aix-Marseille université, 27, boulevard Jean-Moulin, 13385 Marseille cedex 05, France b Service d’ORL et chirurgie cervico-faciale, CHU Timone Adultes, 264, rue Saint-Pierre, 13385 Marseille cedex 05, France c Service de médecine nucléaire, CHU Timone Adultes, 264, rue Saint-Pierre, 13385 Marseille cedex 05, France d Service de dermatologie et cancérologie cutanée, CHU Timone Adultes, 264, rue Saint-Pierre, 13885 Marseille cedex 05, France Disponible sur Internet le 14 mars 2014 MOTS CLÉS Drainage lymphatique ; Tête et cou ; Tumeur cutanée ; Ganglion sentinelle ; Lymphoscintigraphie Résumé Introduction. L’objectif de l’étude était de déterminer les territoires de drainage préféren- tiels des régions cutanées de la face et du cou. Cette connaissance permet d’orienter la prise en charge diagnostique (recherche de tumeur primitive cutanée devant une adénopathie cer- vicale) et thérapeutique (détermination de l’étendue de l’évidement cervical à réaliser en cas de tumeur cutanée). Matériel et méthodes. Il s’agit d’une étude rétrospective portant sur les interventions de recherche de ganglion sentinelle réalisées entre janvier 2003 et avril 2011. Les données lym- phoscintigraphiques et peropératoires de localisation du site tumoral initial et du ganglion sentinelle ont été collectées. Résultats et discussion. Cent trente-sept patients ont été inclus dans l’étude. La glande paro- tide est un territoire de drainage privilégié du revêtement cutané de la tête et du cou. Au niveau cervical, la région sous-mentale draine la partie inférieure et médiane du visage (lèvres, Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (A. Lagier). 1286-0115/$ see front matter © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. http://dx.doi.org/10.1016/j.morpho.2014.01.001

Drainage lymphatique des territoires cutanés de la tête et du cou : approche in vivo par la localisation du ganglion sentinelle

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Page 1: Drainage lymphatique des territoires cutanés de la tête et du cou : approche in vivo par la localisation du ganglion sentinelle

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orphologie (2014) 98, 32—39

Disponible en ligne sur

ScienceDirectwww.sciencedirect.com

RTICLE ORIGINAL

rainage lymphatique des territoiresutanés de la tête et du cou : approchen vivo par la localisation du ganglionentinelleymphatic drainage of skin areas of head and neck: In vivopproach by the location of the sentinel node

. Lagiera,∗,b, M. Pénicaudb, T. Le Corrollera, D. Guenouna,. Cammilleri c, P. Champsaura, P. Dessib, J.J. Grobd,. Giovannib, N. Fakhryb

Laboratoire d’anatomie, faculté de médecine de Marseille, Aix-Marseille université, 27, boulevardean-Moulin, 13385 Marseille cedex 05, FranceService d’ORL et chirurgie cervico-faciale, CHU Timone Adultes, 264, rue Saint-Pierre, 13385 Marseilleedex 05, FranceService de médecine nucléaire, CHU Timone Adultes, 264, rue Saint-Pierre,3385 Marseille cedex 05, FranceService de dermatologie et cancérologie cutanée, CHU Timone Adultes, 264, rue Saint-Pierre, 13885arseille cedex 05, France

isponible sur Internet le 14 mars 2014

MOTS CLÉSDrainagelymphatique ;Tête et cou ;Tumeur cutanée ;Ganglion sentinelle ;Lymphoscintigraphie

RésuméIntroduction. — L’objectif de l’étude était de déterminer les territoires de drainage préféren-tiels des régions cutanées de la face et du cou. Cette connaissance permet d’orienter la priseen charge diagnostique (recherche de tumeur primitive cutanée devant une adénopathie cer-vicale) et thérapeutique (détermination de l’étendue de l’évidement cervical à réaliser en casde tumeur cutanée).Matériel et méthodes. — Il s’agit d’une étude rétrospective portant sur les interventions derecherche de ganglion sentinelle réalisées entre janvier 2003 et avril 2011. Les données lym-phoscintigraphiques et peropératoires de localisation du site tumoral initial et du ganglion

sentinelle ont été collectées.Résultats et discussion. — Cent trente-sept patients ont été inclus dans l’étude. La glande paro-tide est un territoire de drainage privilégié du revêtement cutané de la tête et du cou. Auniveau cervical, la région sous-mentale draine la partie inférieure et médiane du visage (lèvres,

∗ Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (A. Lagier).

286-0115/$ – see front matter © 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.ttp://dx.doi.org/10.1016/j.morpho.2014.01.001

Page 2: Drainage lymphatique des territoires cutanés de la tête et du cou : approche in vivo par la localisation du ganglion sentinelle

Drainage lymphatique des territoires cutanés de la tête et du cou 33

menton). Les secteurs postérieurs (secteur IIb et V) tumeurs étaient représentés pour leslocalisations « postérieures » de la tête (oreille, vertex), et la région cervicale.© 2014 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

KEYWORDSLymphatic drainage;Head and neck;Skin malignancy;Sentinel node;Lymphoscintigraphy

SummaryIntroduction. — The objective of the study was to determine the preferential territories ofdrainage of skin areas of the face and neck. This knowledge can guide the strategies of diagnostic(search for primary tumor skin to cervical lymphadenopathy) and treatment (determination ofthe extent of neck dissection to achieve in case of skin tumor).Materials and methods. — This is a retrospective study of the surgical procedures of sentinelnode research between January 2003 and April 2011. The lymphoscintigraphic and intraopera-tive localization of the initial tumor site and sentinel lymph node were collected.Results and discussion. — One hundred and thirty-seven patients were included in the study.The parotid gland is a privileged territory of drainage of the head and neck skin. At cervicallevel, the submental region drains the lower and median part of the face (lips and chin). Theposterior segments (IIb and V sector) were represented for the posterior locations of the head

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usutd’intervention, l’absence de radioactivité résiduelle est

(ear, vertex), and cervical r© 2014 Elsevier Masson SAS

Introduction

La question de la prise en charge ganglionnaire des tumeurscutanées malignes se pose dans la plupart des types histolo-giques, à l’exception du cas des carcinomes basocellulairesdont l’agressivité se manifeste quasi exclusivement locale-ment. Les tumeurs malignes de la peau sont des pathologiesfréquentes. En France, en 2000, l’incidence du mélanome :7,6/100 000/an pour les hommes et 9,5/100 000/an pourles femmes [8]. Les carcinomes épidermoïdes sont environ10 fois plus fréquents, mais seule une minorité pose des pro-blèmes de métastases ganglionnaires [3]. Parmi les autrestumeurs lymphophiles mentionnons le carcinome à cellulesde Merckel est une tumeur neuro-endocrine cutanée rare.Son incidence est évaluée à 0,45/100 000/an en 2002 auxÉtats-Unis [9].

Deux méthodes existent dans la prise en charge ganglion-naire des tumeurs cutanées : l’évidement ganglionnaire et latechnique du ganglion sentinelle. L’évidement ganglionnairea pour but l’exérèse de l’ensemble des nœuds lymphatiquesde la région opérée, il peut être plus ou moins étendu :être uni- ou bilatéral, concerner un ou plusieurs secteurscervicaux, inclure ou non la glande parotide. Il n’est pasdénué de morbidité, en fonction des territoires anatomiquesconcernés par la dissection.

La technique du ganglion sentinelle est une techniquemini-invasive dont l’objectif est d’explorer, par une exérèsesélective, le premier nœud lymphatique drainant la tumeurprimitive, que l’on repère par lymphoscintigraphie puis aucours de l’intervention. Ce nœud est alors analysé de faconextrêmement précise à la recherche de micrométastases.

L’objectif de cette étude rétrospective était de déter-miner les territoires de drainage lymphatique privilégiésdes différentes régions cutanées de la tête et du cou,à la lumière des données de localisation des ganglionssentinelles. Cette connaissance permet de déterminer lessecteurs qui doivent être concernés par l’évidement gan-glionnaire lorsqu’il est nécessaire, en fonction du site de latumeur primitive, et réciproquement d’orienter l’examen

clinique à la recherche d’une tumeur primitive en présenced’une métastase ganglionnaire avérée.

vv

n.rights reserved.

atériel et méthodes

l s’agit d’une étude rétrospective portant sur l’ensemblees interventions de recherche du ganglion sentinelle auours de la prise en charge de tumeurs cutanées de la tête etu cou effectuées dans un service d’oto-rhino-laryngologieéférent régional en cancérologie entre janvier 2003 et avril011.

La technique du ganglion sentinelle repose sur l’injectione traceur radio-actif (suspension de nano-colloïdes de sul-ure de rhénium technétiés). Quatre seringues de 0,2 mLhacune sont préparées le jour de l’examen, dans le res-ect des règles d’asepsie et de radioprotection. L’injectionst réalisée dans des locaux agréés par l’institut de radio-rotection et de sûreté nucléaire (IRSN). Le volume injectéoit être faible (< 0,2 mL par point d’injection), en intrader-ique, en plusieurs points à la périphérie de la cicatrice.

’injection est réalisée au maximum 16 à 20 heures avant’intervention chirurgicale. Après l’injection, le traceurasse rapidement dans les collecteurs lymphatiques et laigration vers les nœuds lymphatiques est rapide. Le tra-

eur est ensuite phagocyté dans les sinus périphériqueses nœuds lymphatiques par les cellules histiomonocy-aires. Une acquisition dynamique est réalisée dans les

premières minutes, elle est suivie d’une acquisition sta-ique de 5 minutes, centrée sur la région d’intérêt, avec auoins 2 incidences. Lorsque plusieurs nœuds sont ainsi repé-

és lors de cette acquisition, il s’agit d’autant de ganglionsentinelles. Le nœud lymphatique ainsi mis en évidencest ensuite repéré sur la peau en regard avec un feutrendélébile. Le compte-rendu de l’examen mentionne laéthodologie utilisée et le résultat : nombre de ganglions

etenus comme sentinelles et leur topographie.Lors de l’intervention, la voie d’abord était placée dans

n tracé permettant un éventuel évidement ganglionnaireecondaire. Une sonde de détection de radioactivité esttilisée par le chirurgien en peropératoire pour détec-er et localiser le ou les ganglions lymphatiques. En fin

érifiée dans la zone de drainage : en présence d’une acti-ité > 10 % de l’activité du ganglion sentinelle ou > 150 %

Page 3: Drainage lymphatique des territoires cutanés de la tête et du cou : approche in vivo par la localisation du ganglion sentinelle

34 A. Lagier et al.

Tableau 1 Limites anatomiques des différents groupeslymphatiques du cou.Anatomical boundaries of different groups of neck nodes.

Niveau Limites

Niveau I : sous-mental et sous-mandibulaireIa, groupe sous-mentalEntre le ventre antérieur du

muscle digastrique et la lignemédiane

Ib, groupesous-mandibulaire

Triangle défini par les deuxventres du muscle digastrique etle bord inférieur de la mandibule

Niveau II : groupe jugulaire supérieurSitué autour du tiers supérieur de la veine jugulaire

interne et du nerf spinal depuis la base du crâne jusqu’auniveau de l’os hyoïde ou de la bifurcation carotidienne

IIa En avant du plan du nerf spinalIIb En arrière du plan du nerf spinal

Niveau III : groupe jugulaire moyenSitué autour du tiers moyen de la veine jugulaire interne,

entre la limite inférieure du secteur II et le muscleomo-hyoïdien ou le bord inférieur du cartilage thyroïde

Niveau IV : groupe jugulaire inférieurSitué autour du tiers inférieur de la veine jugulaire

interne, entre la limite inférieure du niveau III et laclavicule

Niveau V : groupe du triangle postérieurSitué autour de la partie inférieure du nerf spinal (en

arrière du muscle sterno-cléido-mastoïdien) et le long dupédicule vasculaire cervical transverse

Va Au-dessous du plan du bordinférieur du cricoïde

Vb Au-dessus du plan du bordinférieur du cricoïde

Niveau VI : groupe centralTissu cellulo-ganglionnaire du défilé trachéo-œsophagien

et de la région péri-thyroïdienne depuis le bord inférieur del’os hyoïde jusqu’à la fourchette sternale, de chaque côtéla limite de ce secteur est la limite antérieure de la gainecarotidienne

dr

det([(

R

Pce

Figure 1 À gauche : localisation des tumeurs cutanées primi-tives. Le diamètre des cercles est proportionnel au nombre decas pour chaque localisation, ce nombre est inscrit à l’intérieurde chaque cercle. À droite : sectorisation des lymphatiques ducou.Left: localization of primitive skin tumors. The diameter of thecircles is proportional to the number of cases for each location,to

d(L

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er

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Selon l’American Joint Comittee on Cancer [5].

u bruit de fond, un ganglion sentinelle supplémentaire estecherché.

La localisation du (ou des) ganglion sentinelle était notéee facon prospective lors de la scintigraphie préopératoiret dans le compte-rendu opératoire selon la systématisa-ion des ganglions cervicaux la plus communément admisevalidée en 2002 par l’Union internationale contre le cancerUICC] et l’American Joint Comittee on Cancer [AJCC]) [5]Tableau 1, Fig. 1).

ésultats

armi les 137 patients (60 femmes et 77 hommes) pris enharge pour recherche et exérèse du ganglion sentinellentre janvier 2003 et avril 2011, trois types histologiques

létr

his number is written inside each circle. Right: sectorizationf lymphatic nodes of the neck.

e tumeurs étaient représentés : carcinome épidermoïden = 10), carcinome de Meckel (n = 10), mélanome (n = 117).’âge moyen des patients était de 61 ans (12—86 ans).

Les localisations des sites tumoraux initiaux sont résu-ées sur la Fig. 1.En moyenne, 1,32 nœuds lymphatiques ont été repérés

n scintigraphie (1 à 8, médiane : 1), dans 15 cas, la lym-hoscintigraphie n’a pas permis de localiser un ganglionentinelle et l’intervention n’a pas été réalisée.

En moyenne, 1,36 nœuds lymphatiques ont été repérést prélevés (extrêmes : 0—7, médiane : 1). Dans 31 cas, leepérage peropératoire du ganglion a échoué.

La comparaison des localisations des ganglions senti-elles en scintigraphie et en peropératoire est résuméeableau 2.

Le secteur Ia n’était atteint que pour les tumeurs desèvres. Le secteur Ib pouvait être le siège du ganglionentinelle pour toutes les localisations sauf le vertex ; la

ocalisation la plus représentée était la joue. Le secteur IIatait représenté pour toutes les localisations, et préféren-iellement l’oreille, et la joue. Le secteur IIb n’était paseprésenté pour les régions médianes de la face (lèvres,
Page 4: Drainage lymphatique des territoires cutanés de la tête et du cou : approche in vivo par la localisation du ganglion sentinelle

Drainage

lymphatique

des territoires

cutanés de

la tête

et du

cou

35

Tableau 2 Localisations des ganglions sentinelles sur la lymphoscintigraphie préopératoire et en peropératoire. Les ganglions multiples peuvent être dans le même territoireou dans des territoires différents.Locations of sentinel lymph nodes on preoperative lymphoscintigraphy and intraoperative. Multiple nodes can be in the same territory or in different territories.

Localisation SecteurIa

SecteurIb

SecteurIIa

SecteurIIb

SecteurIII-IV

SecteurV

Parotide Occipital Absence deganglionsentinelle

Ganglionssentinellesmultiples

Front (n = 13)Préopératoire 0 2 5 1 0 0 4 2 0 4Peropératoire 0 1 5 0 0 0 7 0 1 6

Paupières (n = 9)Préopératoire 0 1 3 0 1 0 2 0 3 0Peropératoire 0 3 1 0 1 0 1 0 4 2

Nez (n = 8)Préopératoire 0 6 0 0 0 0 3 0 0 7Peropératoire 0 6 2 0 0 0 1 0 0 3

Joue (n = 31)Préopératoire 0 15 10 0 1 0 6 0 6 8Peropératoire 0 8 9 1 2 0 5 0 13 11

Lèvres (n = 6)Préopératoire 1 1 1 0 0 0 0 0 1 3Peropératoire 1 3 0 0 1 0 0 0 1 4

Oreille et région mastoïdienne (n = 30)a

Préopératoire 0 3 22 0 1 0 8 1 0 6Peropératoire 0 3 18 2 0 1 11 1 1 18

Vertex (n = 10)Préopératoire 0 0 2 5 1 0 0 3 0 4Peropératoire 0 0 3 3 1 1 0 0 3 5

Cuir chevelu latéral (n = 12)Préopératoire 0 3 6 0 0 0 4 2 0 6Peropératoire 0 0 5 0 0 0 5 0 1 5

Cou (région antérieure et latérale) (n = 11)Préopératoire 0 1 3 1 1 2 0 0 5 1Peropératoire 0 1 1 0 1 2 0 0 6 1

Nuque (n = 6)Préopératoire 0 1 3 2 1 1 0 0 0 4Peropératoire 0 0 1 2 1 2 1 0 1 4

a Présence d’un ganglion sentinelle mastoïdien en scintigraphie, non retrouvé en peropératoire.

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36 A. Lagier et al.

Figure 2 Localisation des sites de ganglion sentinelle en fonction de la localisation de la tumeur cutanée. L’épaisseur des flèchesest proportionnelle à la représentation de chaque secteur cervical.M tiont

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ap of the sentinel lymph node sites depending on the localizao the representation of each cervical area.

ez, paupières). La localisation tumorale la plus représen-ée lorsque le ganglion sentinelle était dans le secteur IIbtait le vertex. La présence de ganglion sentinelle danses secteurs III et IV s’accompagnait toujours d’autres gan-lions dans des secteurs cervicaux plus haut situés. Leecteur V drainait les tumeurs de l’oreille, du vertex, duou et de la nuque, c’est-à-dire les régions postérieures,es localisations les plus représentées étaient le cou et lauque.

La parotide était le siège de ganglion(s) sentinelle(s)our toutes les localisations sauf les lèvres et le cou ; lesocalisations les plus représentées étaient l’oreille et leront.

La région occipitale était le siège du ganglion sentinelleour les localisations au front, à l’oreille, à la nuque, auertex et au cuir chevelu latéral, soit plutôt des régionsostérieures à l’exception du front.

La représentation des aires de drainage lymphatique

localisation du ganglion sentinelle au cours de la chi-urgie) en fonction du site de la tumeur primitive sonteprésentés pour les localisations les plus fréquentes sur laig. 2.

Dscp

of the skin tumor. The thickness of the arrows is proportional

iscussion

ette étude avait pour objectif l’étude anatomique des airese drainage lymphatique de la peau de la tête et du cou inivo. Bien que rétrospective, les données ont été colligéesrospectivement. Son originalité réside dans l’utilisation dea méthode du ganglion sentinelle chez 137 patients pré-entant une tumeur maligne cutanée (toutes histologiesonfondues) de la tête et du cou. La validité de la techniqueu ganglion sentinelle a été prouvée pour l’identification duremier lymphonœud de drainage de tumeurs solides, enarticulier le mélanome et le cancer du sein [7]. L’étude estéanmoins limitée par la disparité des localisations tumo-ales initiales et le faible nombre de cas représentés pourertaines d’entre elles. Aussi, l’interprétation de l’absencee drainage d’un site cutané dans un territoire lympha-ique cervical doit être pondérée au vu du nombre de casrésents dans l’étude et des données de la littérature.

es études complémentaires, prospectives, multicentriqueseront utiles pour pouvoir augmenter la puissance de la des-ription pour chacune des localisations, en particulier leslus rares.
Page 6: Drainage lymphatique des territoires cutanés de la tête et du cou : approche in vivo par la localisation du ganglion sentinelle

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cnrsdrégion médio-inférieure (lèvres, menton) qui se draine dansles secteurs Ia, Ib, IIa, et III ; et une sub-région latérale qui

Drainage lymphatique des territoires cutanés de la tête et d

La prise en charge ganglionnaire et ses objectifs sontdifférents en fonction du type histologique de la tumeurcutanée. Dans le cas des mélanomes, le traitement de réfé-rence est la chirurgie avec exérèse large de la tumeur.L’analyse du ganglion sentinelle présente une valeur pro-nostique et devrait permettre de sélectionner les groupesde patients candidats à un traitement adjuvant à unstade où la masse tumorale est encore peu importante.L’évidement cervical est réservé aux patients présentantune suspicion forte d’atteinte ganglionnaire, cette suspi-cion peut être clinique, radiologique ou histologique aprèsmise en évidence de métastase dans le ganglion sentinelle[13,19].

Dans le cas des carcinomes de Merckel, le traitementde référence au stade non métastatique est la chirurgied’exérèse large de la tumeur, suivie de radiothérapie surle site tumoral et sur les aires ganglionnaires de drainage.L’analyse du ganglion sentinelle a une valeur pronostique. Laprésence de métastase dans ce nœud lymphatique conduità la réalisation d’un évidement cervical suivi de radio-thérapie [10]. Cependant, la place de l’indication de labiopsie-exérèse du ganglion sentinelle et la conduite àtenir en fonction de son analyse ne sont pas encore codi-fiées.

Dans le cas des carcinomes épidermoïdes cutanés, lesmétastases ganglionnaires sont rares. Elles peuvent néan-moins dépasser les 20 % dans les groupes à haut risque définisselon les critères de l’association francaise de dermato-logie. Il est légitime dans ces groupes à risque élevé dediscuter de la prise en charge ganglionnaire. Les recom-mandations présentent la technique du ganglion sentinellecomme une option chirurgicale à proposer dans ce groupe,en alternative à la réalisation d’un évidement cervical [1].On comprend donc que le mélanome soit la population domi-nante dans notre série et que la distribution des tumeurscutanées sur les zones anatomiques soit celles des méla-nomes.

Lorsqu’il est nécessaire, la question de l’étendue del’évidement cervical à réaliser est sous-tendue par uneapproche probabiliste des territoires lymphatiques de drai-nage du site tumoral initial. Le drainage lymphatique dansde cadre des cancers primitifs des voies aéro-digestives(localisations muqueuses) est bien connu et admis [2,12,14].Cette connaissance sert de base pour les recommandationsconcernant la prise en charge ganglionnaire dans ces patho-logies [21]. Dans le cas des tumeurs cutanées, l’anatomiedes territoires de drainage lymphatique est moins éta-blie.

Rouvière et Delmas ont décrit les lymphonœuds cervi-caux et leur territoire de drainage [20]. Ils se répartissenten six groupes : le groupe supérieur ou cercle péri-cervical,le groupe jugulaire antérieur, groupe jugulaire externe, lesgroupes latéraux profonds (jugulaires internes et spinaux),le groupe cervical profond ou rétropharyngien, le groupepéri-laryngo-trachéal.

Dans cette description, les territoires cutanés se drainentdans le groupe supérieur ou à un moindre degré dans le lym-phocentre jugulaire interne. Les autres groupes drainent desterritoires muqueux ou sont des deuxièmes relais lympha-tiques.

Le groupe supérieur est disposé en collier à l’union de latête et du cou. Il comprend :

sd

u 37

un groupe occipital qui draine le cuir chevelu occipital etla nuque ; nos résultats retrouvent un drainage possible àpartir du front également ;

un groupe mastoïdien qui draine l’auricule, le méat acous-tique externe, la partie temporale du cuir chevelu ; notreétude a mis en évidence un cas de drainage mastoïdien,à partir d’une tumeur de l’auricule ;

un groupe parotidien qui draine les zones temporale etfrontale du cuir chevelu, les paupières, la racine du nez,l’oreille externe ; les résultats de notre étude mettenten évidence un territoire de drainage beaucoup plusétendu, comprenant tout le revêtement cutané de larégion cervico-céphalique. Seule la localisation des lèvresne présentait pas de drainage vers la parotide, mais cerésultat doit être pondéré du fait du faible nombre delocalisations initiales aux lèvres (n = 6) ;

un groupe submandibulaire (secteur Ib) qui draine les pau-pières, le nez, la joue, les lèvres ; nos résultats retrouventégalement un territoire plus étendu à tout le revêtementcutané cevico-céphalique à l’exception du vertex ;

un groupe submental (secteur Ia) draine les lèvres, lementon, les joues ; notre étude ne retrouvait pas de drai-nage des joues vers ce secteur.

Le lymphocentre jugulaire interne (secteurs II, III, IV)raine, selon Rouvière, la lymphe de toute la partie infé-ieure de la tête et du cou, alors que notre étude met envidence la prévalence des drainages dans le secteur jugu-aire haut (IIA et IIb) à partir de l’ensemble du revêtementéphalique.

L’équipe de O’Brien (Royal Prince Alfred Hospital, Sydney,ustralie) a proposé des territoires de drainage lymphatiquee prédilection à partir des données cliniques et histolo-iques portant sur les localisations des métastases cervicalesvérées de mélanome de la tête et du cou. Ils proposent deistinguer une région céphalique antérieure et une régionéphalique postérieure séparées par le plan coronal passantar les méats acoustiques externes, et une troisième régionui est l’oreille externe, les auteurs proposent comme ter-itoires de drainage de prédilection : la parotide et lesecteurs I, II, et III pour la région céphalique antérieure et’oreille externe ; la parotide et les secteurs II, III, IV et Vour la région céphalique postérieure et le cou [15]. Lestudes suivantes mettaient en évidence que la présence deétastases dans les secteurs IV et V est peu probable lorsque

es secteurs II et III ne présentaient pas de métastase et quea lésion initiale était située dans la région antérieure et’oreille externe ; cela n’était plus vrai lorsque la lésion étaitans la région postérieure. De même, seules les tumeurs dea région antérieure, faciale, entraînaient des métastasesans le secteur I [4].

Nos résultats sont concordants avec les conclusions dees études, et permettent d’affiner les territoires de drai-age de la région céphalique antérieure. En effet, cetteégion semble pouvoir être séparée en 3 sub-régions : uneub-région médio-supérieure (front, paupières, nez) qui seraine dans les secteurs parotidien, Ib, IIa, et III ; une sub-

e draine dans les secteurs parotidien, Ib, IIa, III. La régione l’oreille externe se draine dans les secteurs parotidien,

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b, IIa, IIb, et III, l’existence d’un drainage mastoïdien estgalement possible pour cette région.

Les études portant sur l’analyse des données desecherches de ganglion sentinelle ont précocement mis envidence des discordances entre ces données et les terri-oires de prédilection des métastases de mélanome. Cesiscordances existent dans 34 % à 43 % selon les séries11,16]. Elles ne correspondent pas, le plus souvent, à deserritoires aberrants, mais à des territoires de drainage plusnférieurs, ou à des territoires où le tissu lymphoïde estnconstant (région mastoïdienne).

Certaines études mettent en évidence la survenue deétastases avérées de mélanome dans des territoires non

ttendus, en particulier dans les territoires controlatéraux la tumeur initiale. Des explications anatomiques de cesiscordances ont été proposées sur la base de l’étude his-ologique des lymphatiques de la tête et du cou sur deséries autopsiques [17,18] : la présence de nœuds lympha-iques inactifs le long du trajet des vaisseaux collecteurs,a grande variabilité de drainage entre les individus etntre les deux côtés chez un même individu, l’existencee shunts lymphatico-veineux dans la région occipitale,’existence de lymphatiques passant en pont les nœudsymphatiques attendus pour gagner un ganglion sentinelle

la base du cou, le caractère multidirectionnel des lym-hatiques de la région antérieure du cou qui ont desrajets horizontaux, obliques ou rétrogrades vers la man-ibule.

La technique du ganglion sentinelle permet en théo-ie de déceler ces drainages lymphatiques aberrants [22].’hypothèse d’une dissémination hématogène avec méta-tase dans un lymhonœud est également possible et échappe

la technique du ganglion sentinelle.L’étendue nécessaire de l’évidement ganglionnaire du

ou lorsqu’il est indiqué, peut être déterminée en fonc-ion de la localisation du site tumoral primitif. Le drainagearotidien est possible pour toutes les localisations, maisompte tenu de sa morbidité potentielle (risque de paraly-ie faciale), la parotidectomie n’est indiquée que lorsqu’ilxiste une adénopathie parotidienne [15]. Dans ce cas, laarotidectomie est acompagnée d’un évidement ganglion-aire cervical. L’évidement du secteur Ia est indispensableour la sub-région faciale médio-inférieure (lèvres et men-on) [4]. L’évidement du secteur IIb est indispensable poures régions postérieures, la région de l’oreille et la régionatérale du visage (joues et tempes).

Par contre, la présence de ganglions sentinelles métasta-iques situés à distance du site primitif dans les territoiresnférieurs (III ou IV) justifie la réalisation d’un évidementervical fonctionnel incluant le secteur IIa quelle que soit laocalisation initiale, et le secteur IIb pour les localisationsostérieures et le front [11].

Notre étude met en évidence le manque de préci-ion de la localisation des ganglions sentinelles lors de laymphoscintigraphie préopératoire, conduisant à une appa-ente discordance entre les données scintigraphiques eteropératoires. Ce sont ces dernières qui ont été prisesn compte in fine pour définir la localisation du ganglion

entinelle. En effet, une limite de la lymphoscintigra-hie est liée à sa résolution spatiale limitée [23]. Il estrobable que l’utilisation d’images de fusion d’imagerien coupe (type tomodensitométrie) à la scintigraphie

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A. Lagier et al.

ermettra une meilleure localisation préopératoire des gan-lions sentinelles [6].

onclusion

a technique du ganglion sentinelle est une techniqueini-invasive qui permet en clinique d’évaluer le statut

anglionnaire sans avoir recours à un évidement cervi-al complet, elle permet d’orienter la prise en chargee la maladie régionale en fonction des résultats de’analyse histologique précise du nœud lymphatique iden-ifié comme sentinelle et d’éviter ainsi la morbidité deombre d’évidements lorsqu’ils ne sont pas à visée théra-eutique.

Grâce à cette technique, il est possible d’étudier, in vivo,’anatomie du drainage lymphatique des différentes régionsutanées de la tête et du cou. Cette connaissance permet,n retour de déterminer l’étendue des évidements cervi-aux, et d’aider dans la recherche d’une tumeur cutanéerimitive devant une adénopathie cervicale métastatique.

éclaration d’intérêts

es auteurs déclarent ne pas avoir de conflits d’intérêts enelation avec cet article.

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