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= 1 =
MINISTÈRE DE L’ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR ET DE LA RECHERCHE SCIENTIFIQUE
-----=====----- UNIVERSITÉ DE TOAMASINA
-----=====----- FACULTÉ DES LETTRES & SCIENCES HUMAINES
-----=====----- DÉPARTEMENT DE PHILOSOPHIE
-----=====-----
Fahaizaña sy Fañahy
DU MATERIALISME ANCIEN
AU MATERIALISME DE KARL MARX
Mémoire en vue de l’obtention du diplôme de Maîtrise en philosophie présenté par :
M lle RANDRIAMANANTOANINA Miarintsoanirina
Sous la direction de Monsieur RAZAFITSIAMIDY Antoine Maître de Conférences
20 Décembre 2011
Année universitaire : 2011
= 2 =
DÉDICACE
À mes parents.
= 3 =
REMERCIEMENTS
Nous pouvons dire que le présent ouvrage n’aurait pu être réalisé
sans l’aide de personnes de très bonne volonté avec leurs expériences et
leur compétence.
Pour cela, nous tenons à remercier de prime abord, Monsieur
Antoine RAZAFITSIAMIDY, Maître de conférences, enseignant et
encadreur, qui, malgré ses occupations, a pu nous diriger dans la
réalisation de cet ouvrage.
Nos vifs remerciements s’adressent aussi à nos parents qui nous
ont soutenue matériellement, voire moralement, lors de la réalisation de
ce mémoire.
Pour terminer, nous adressons également nos vifs remerciements à
tous ceux qui ont participé de près ou de loin à la réalisation de ce
travail ;
M lle RANDRIAMANANTOANINA Miarintsoanirina
= 4 =
INTRODUCTION
= 5 =
Karl Marx est un grand philosophe matérialiste de l’époque
contemporaine. Parmi les grands penseurs et philosophes connus du
XIX e siècle, Marx tient la place la plus importante dans la stratégie
créatrice d’une nouvelle société en vue de l’amélioration des conditions
de vie.
Selon Marx, les philosophes d’avant lui n’avaient fait
qu’interpréter le monde et toutes les théories politiques et sociales
avaient été, en règle générale, l’œuvre des classes possédantes ignorant
les intérêts de la masse populaire. L’histoire de la société reconnaît, en
effet, que le monopole des sciences est entre les mains de la classe
dominante au pouvoir, comme les sciences de la culture, de l’instruction
et des activités sociopolitiques. De plus, toujours avant Marx, la théorie
de l’histoire n’est pas une science basée sur la pratique sociale. Cette
théorie n’est que le processus de l’idée seulement.
Depuis 1844, époque où se formèrent ses idées, Marx a rejeté
catégoriquement l’idéalisme hégélien, pourtant une idéologie acceptée
par lui auparavant, avant d’avoir été influencé par la lecture de Ludwig
Feuerbach. Le marxisme donne plus de potentialité à l’étude des rapports
entre les hommes vivant socialement et la nature.
Les idées marxistes, de par cette étude, ne consistent pas qu’à
l’amélioration des conditions d’existence de la vie matérielle, au sein
desquelles, d’après Marx, les hommes établissent des rapports non
seulement entre eux, mais aussi et surtout avec la nature qui leur donne
naissance. C’est cette vision des rapports sociaux qui faisait de Marx un
« matérialiste ». D’où l’idée fondamentale de notre thème que nous
avons intitulé : « Du matérialisme ancien au matérialisme selon Karl
Marx ».
= 6 =
En face de cette situation des questions se posent : quelles sont les
sources du matérialisme marxiste. Sous quelles formes se présentent ces
idées ?
Une solution meilleure du problème nous oblige à expliquer en
premier lieu ce qu’on entend par matérialisme, ensuite, en second lieu,
ce qu’est le matérialisme philosophique selon Marx. En troisième lieu,
nous allons essayer de parler et de réfléchir sur les principes du
matérialisme marxiste. C’est la raison pour laquelle nous insisterons
surtout sur l’analyse du matérialisme dialectique et de la conception
matérialiste de l’histoire.
= 7 =
PREMIÈRE PARTIE
QU’EST-CE QUE LE MATÉRIALISME ?
= 8 =
Le mot matérialisme désigne une attitude philosophique
caractérisée par le recours exclusif à la notion de matière pour expliquer
la totalité des phénomènes du monde physique et du monde moral. Cette
conception est attestée dès le moment où se forme, dans la Grèce
classique, la spéculation occidentale. Refoulée à l’arrière-plan par la
culture chrétienne de l’âge médiéval, elle se réaffirme avec force après la
Renaissance et semble dès lors avoir fait partie avec lui dans le
développement de la science moderne. Le matérialisme demeure par
excellence, jusqu’à nos jours, une philosophie de référence, ou de
prétention scientifique.
Ce matérialisme a été interprété par plusieurs philosophes depuis
l’Antiquité jusqu’à l’époque moderne. Mais, nous semble-t-il, seul est
arrivé à une interprétation exacte le matérialisme marxiste.
Pour mieux comprendre ce matérialisme marxiste, il semble
nécessaire de se référer à l’histoire du matérialisme depuis l’Antiquité
jusqu’à nos jours.
= 9 =
CHAPITRE I
LE MATÉRIALISME ANCIEN
Le matérialisme ancien est apparu quelques siècles avant notre
ère, c’est-à-dire dans l’Antiquité.
Ce matérialisme ancien est né dans la société esclavagiste. Il
suscita la haine des conservateurs qui prônaient l’idéalisme, soutenaient
la religion et les superstitions, s’opposaient aux conceptions scientifiques
avancées pour se maintenir en place. Le matérialisme antique reflétait
globalement les intérêts de certains groupes progressistes de prolétaires
et d’esclaves.
L’apparition de ce matérialisme et les besoins des artisans, des
paysans, des marchands et des navigateurs ont fait naître et développer la
connaissance de l’astronomie, de la météorologie, des mathématiques, de
la mécanique et de la géographie. Ainsi, l’humanité a pu se libérer du
joug que lui imposaient les conceptions religieuses. Les germes de
matérialisme que renfermaient ces sciences et ces connaissances
s’organisèrent en système et donnèrent naissance à une philosophie
matérialiste de type élémentaire.
Ce matérialisme ancien, d’un point de vue général, a donc tenté
de faire progresser les sciences, mais il est encore faible. Selon le
matérialisme ancien, face à l’explication du monde, l’eau, le feu et la
terre sont la base de toutes choses et la formation de toutes choses. C’est
la combinaison d’atomes. Cette conception a abouti à l’athéisme.
On peut dire que le matérialisme ancien était basé sur l’atome,
surtout chez les matérialistes grecs anciens, comme Héraclite,
Démocrite, etc.
= 10 =
À vrai dire, ce matérialisme ancien a été connu aussi en Chine et
en Inde par les philosophes les plus remarquables dans l’histoire du
matérialisme. En Chine, par exemple, nous connaissons Wang Chung,
Fan Zhen, etc. Et en Inde, il y a le Lokayata.
I.- LE MATÉRIALISME DE L’INDE
ANCIENNE
Le matérialisme de l’Inde ancienne a, parallèlement, la même
conception que le matérialisme chinois ancien qui croyait que l’eau, la
terre, le feu et le vent constituent le monde ou toutes les choses qui
existent dans l’univers.
Ce matérialisme de l’Inde ancienne est connu par le Lokayata.
Le Lokayata a des passages de caractère athéistique, qui sont
attribués à Charvaka, personnage mythique lui aussi. C’est pourquoi,
certains textes anciens donnent le nom de « charvaka » à ce courant
matérialiste.
Du point de vue ontologique, le Lokayata repose sur l’idée que
tous les objets de l’univers se composent de quatre éléments : terre, feu,
eau et air.
Ces éléments sont éternels et constants. Toutes les propriétés des
objets dépendent de la combinaison des éléments dont ils se composent
et de la proportion dans laquelle ces éléments se combinent. La
conscience, la raison et les organes des sens dérivent également d’une
combinaison d’éléments. Après la mort d’un être vivant, cette
combinaison se désagrège et ses composantes viennent s’ajouter aux
éléments correspondants du monde inorganique. Certains textes
comportent l’idée d’évolution, dans la mesure où ils précisent que les
éléments naissent les uns des autres.
La terre étant à l’origine de cette transformation, la gnoséologie
du Lokayata est sensualiste.
= 11 =
La sensation est considérée comme la seule source de
connaissance. Les organes des sens sont susceptibles de percevoir les
objets, car les uns et les autres se composent des mêmes éléments.
Partant de ce principe, le Lokayata nie l’existence des objets non
perceptibles et suprasensibles, avant tout celle de Dieu, de l’âme, du
paradis, de l’enfer, etc.
II.- LE MATÉRIALISME CHINOIS ANCIEN
Les matérialistes chinois de l’Antiquité pensaient que toutes les
choses dans l’univers n’étaient pas des créations de l’esprit mais le
résultat d’une évolution et d’une transformation concrète de la matière
primitive et que tout objet pouvait retourner à son état initial. Ils
croyaient, par exemple, que le métal, le bois, l’eau, le feu et la terre
étaient les cinq éléments les plus fondamentaux qui constituent le
monde.
En Chine, quelques siècles avant Jésus-Christ, il existait déjà des
philosophes qui prônaient le matérialisme tels que Yang Zhy, Sun Zi,
Wang Chung, Fan Zhen, etc.
Des historiens chinois de la fin de la dynastie des Zhou
occidentaux (1121 – 771 avant Jésus-Christ), soutenaient :
« Toutes les choses dans l’univers sont nées de la combinaison de la terre et du métal, du bois, de l’eau, du feu »1.
Presque tous les matérialistes chinois anciens se sont basés sur
cette conception et contre les conceptions idéalistes et religieuses de leur
temps. Ainsi, le matérialisme de Yang Zhu (environ 395 – 335 avant
Jésus-Christ) est un matérialisme naïf qui critique sévèrement les
croyances religieuses et la foi en l’immortalité.
1 Ai Siqi, Matérialisme dialectique, et le matérialisme historique, Paris, Édition du
Centenaire p. 16.
= 12 =
Il affirmait, par exemple, que tous les événements et les
phénomènes de la nature et de la société sont gouvernés par le principe
de la nécessité naturelle qu’il définissait comme le destin. Sur ce plan,
ses opinions ne sont pas libres à cause d’un déterminisme fataliste. Il
disait, en effet, que tout est voué à la mort et à l’anéantissement. Et par
voie de nécessité naturelle, la vie fait place à la mort, tout ce qui apparaît
va vers sa destruction.
Dans le domaine de l’éthique, il met au premier plan l’individu
qui aspire à une satisfaction maximale de ses passions et de ses désirs, et
il appelle à jouir du présent dans sa vie et à ne pas se donner la peine de
penser à ce qui adviendra après la mort. Mais il n’a pas poussé à
l’extrême l’expression de son hédonisme et de son eudémonisme.
L’individualisme de Yang Zhu fut une réaction contre la hiérarchisation
éthique et sociale des hommes, prêchée par le confucianisme.
Face à la domination de l’idéalisme de Confucius et de Mencius,
Xun Zi (298 – 235 avant Jésus-Christ) donne l’explication sur les
mouvements naturels. Par contre, Confucius vécut à l’époque des
printemps et automnes (722 – 481 avant Jésus-Christ), fut le représentant
de l’idéologie de l’aristocratie esclavagiste en déclin et le fondateur de
l’école confucéenne idéaliste. Il prônait la théorie du mandat du ciel et
de la volonté divine, était partisan des cérémonies religieuses
traditionnelles. Son humanisme plaidait en faveur des zhouli (rites des
Zhou) qui maintenaient l’esclavage.
Il tenait le « juste milieu » pour effacer les contradictions et
s’opposer aux réformes. Il entreprit aussi une compilation systématique
de la culture traditionnelle.
L’idéal de Mencius qui vécut à l’époque des royaumes
combattants (405 – 222 avant Jésus-Christ), développa l’idéalisme de
Confucius et répandit l’idée suivante :
« Toutes choses sont innées en moi »,
= 13 =
c’est-à-dire que Xun Zi était donc contre l’idéalisme de Confucius et de
Mencius. En les opposant, Xun Zi disait que
« Les mouvements naturels obéissent à des lois dont l’existence ne dépend pas socialement de la vie de Yao et dont l’extinction n’est pas lui non plus à l’anéantissement de Jie »1.
Reprenant par là l’idée matérialiste que tout changement répond
à des lois objectives, Wang Chung (104 – 27 avant Jésus-Christ), face à
la domination des Han (206 avant Jésus-Christ – 220 après Jésus-Christ),
nie complètement l’existence d’un Dieu personnifié, partant du point de
vue que le ciel et la terre sont des réalités matérielles que le monde
naturel évolue au rythme des mille et une choses qui le composent. Il
s’oppose aux idéalistes représentés par Dong Zhoushu (175 – 105 avant
Jésus-Christ) qui affirmait que « le ciel et l’homme sont un ». L’homme
est la réplique du ciel et que le ciel confère au roi tous ses pouvoirs. Le
souverain règne en vertu d’un mandat céleste.
Whang Chung critique de manière incisive toutes les absurdités
sur la religion et les superstitions, sur l’immortalité de l’âme. Whang
Chung s’éleva contre la théorie confucéenne du « ciel » qui attribuait à
ce dernier la qualité de démiurge déterminant l’apparition et l’évolution
des phénomènes et des choses.
Conformément à la doctrine de Whang Chung, les éléments
matériels qi constituent l’essence du monde et l’homme fait partie de la
nature, sa genèse résulte de la condensation du qi. La dissipation du qi
signifie la mort et la destruction. Whang Chung attribuait aux sensations
le rôle du point de vue du départ de la connaissance du monde objectif. Il
niait l’existence de connaissance « innée ». Whang Chung prit la
position contre la théorie subordonnant la vie sociale aux manifestations
spontanées des forces de la nature. Selon lui, l’histoire aurait un
1 Yao et Jie sont deux empereurs mythologiques de la haute Antiquité chinoise, le
premier réputé pour sa bonté, le second pour sa cruauté. Ai Siqi, Matérialisme dialectique et matérialiste historique, p. 18.
= 14 =
caractère cyclique, la période de déclin succédant à la période de
prospérité et ainsi de suite.
Fan Zhen qui vécut à l’époque des dynasties du Nord et du Sud
(420 – 581) développa le matérialisme en luttant contre le bouddhisme.
S’appuyant sur l’idée que :
« Tant que la forme existe, l’esprit l’habite, dès que la forme disparaît, l’esprit s’éteint »1.
Il en tira des arguments pour montrer que l’esprit est le produit
de la matière et s’en prit violemment à la religion et à la superstition
prêchées par les bouddhistes (immortalité de l’âme et rétribution selon
les mérites).
III.- LE MATÉRIALISME GREC ANCIEN
Le matérialisme grec ancien a aussi sa propre conception sur le
matérialisme comme sur le matérialisme chinois et indien de l’Antiquité.
La caractéristique du matérialisme grec ancien est de s’élever contre
l’idéalisme et les conceptions religieuses de son temps, car la vision du
monde de l’idéalisme et de la religion ne font qu’un.
En opposant l’idéalisme et la religion, il interprète le monde
selon les lois objectives et scientifiquement progressistes, etc.
Le matérialisme grec antique était la source de développement du
processus de la connaissance humaine dans des domaines scientifiques.
C’est grâce au courage des matérialistes grecs que les sciences de
l’astronomie, des mathématiques, de la physique, etc. ont pu se
développer.
Ressemblant aux matérialistes chinois et indiens, les matérialistes
grecs ont aussi la même vision sur la reconnaissance de la matérialité du
1 Ai Siqi, Matérialisme dialectique et matérialiste historique, p. 20.
= 15 =
monde et la croyance que le métal, le bois, l’eau, le feu et la terre étaient
les éléments les plus fondamentaux qui constituent le monde.
Dans l’Antiquité grecque, Empédocle, Héraclite, Leucippe,
Démocrite, Épicure et Lucrèce sont les grands matérialistes les plus
célèbres.
Empédocle est un matérialiste grec ancien. Pour lui, la diversité
des choses est ramenée à quatre éléments naturels : terre, eau, air et feu.
Cette doctrine subsista au cours des siècles dans la philosophie antique et
médiévale, l’action de deux forces opposées. Attraction et repoussement
expliquent, selon Empédocle, l’union et la séparation des éléments. La
prédominance de telle ou telle force explique les différents stades par
lesquels passe le développement de l’univers. Empédocle a pressenti le
phénomène de l’évolution des êtres vivants par la sélection naturelle des
combinaisons plus viables. Cette idée d’Empédocle a eu une énorme
portée historique.
Pour Héraclite, le feu est l’élément premier de la nature, le plus
apte au changement et le plus mobile. C’est du feu que tirent leur
origine, le monde dans son ensemble aussi bien que toute chose, en
particulier, et même l’âme.
Héraclite affirme que
« le monde, unité du tout, n’a été créé par aucun des dieux, ni par aucun des hommes, mais a été, est et sera un feu éternellement vivant, qui s’allume et s’éteint selon des lois1 ».
Toute chose naît du feu en vertu d’une nécessité qu’Héraclite
nomme le logos. Mais le processus universel revêt un caractère
cyclique : toute chose redevient « feu ». La vie de la nature est un
mouvement ininterrompu au cours duquel toute chose, toute propriété, se
transforme en son contraire, le froid devient chaud, le chaud devient
froid.
1 Dictionnaire philosophique, p. 223.
= 16 =
Du fait que tout est en perpétuelles transformation et rénovation,
« on ne peut se baigner deux fois dans le même fleuve, car de nouvelles eaux coulent toujours sur toi »1.
Dans la vie de l’homme, cette transformation de chaque chose en
son contraire est non pas un simple changement, mais une lutte
universelle. Or, la lutte des contraires met en évidence leur identité, celle
du haut et du bas, de la vie et de la mort, etc.
Le caractère universel du changement et la transformation de
chaque propriété en son contraire rendent toute qualité relative.
Les sensations sont à la base de la connaissance. Mais seule la
pensée mène à la sagesse. Si même une chose se dérobait au monde
perceptible à la sensation ; elle n’échapperait pas au monde de la raison.
Héraclite oppose sa vision du monde à celle de la plupart de ses
contemporains et concitoyens. Une conception aristocratique de la
société se trouve associée chez lui à des éléments progressistes. C’est
ainsi qu’il s’élève contre le droit non écrit traditionnel auquel restaient
attachés les aristocrates et lui oppose la loi instituée par l’État, pour
laquelle les citoyens doivent se battre comme pour les murs de leur cité.
Parmi les matérialistes anciens, Leucippe, Démocrite, Épicure et
Lucrèce furent la marque du développement de la doctrine atomiste
matérialiste.
Leucippe et Démocrite sont les premiers fondateurs de la théorie
atomiste dans l’Antiquité. Le mérite d’avoir fondé cette théorie revient à
Leucippe, mais la tâche de Démocrite était d’expliquer ou de continuer
la théorie de son maître. Les autres (Épicure et Lucrèce) ne sont que
leurs commentateurs.
Plusieurs siècles plus tard, Marx prend comme thèse de doctorat :
« La différence entre la philosophie de la nature de Démocrite et
Épicure ».
1 Dictionnaire philosophique, p. 223.
= 17 =
Parlons du matérialisme de Démocrite. Il est considéré par
Lénine comme l’interprète le plus brillant du matérialisme dans
l’Antiquité. Démocrite est un des fondateurs de l’atomisme. Il
reconnaissait l’existence de deux principes premiers : les atomes et le
vide. Les atomes, corpuscules indivisibles dont se compose la matière,
sont immuables, éternels, en mouvement perpétuel et se distinguent
uniquement par la forme, la grosseur, la position et l’ordre dans lequel ils
se trouvent placés. Les qualités sensibles (son, couleur, odeur, etc.) ne
sont pas inhérentes aux atomes, elles sont purement subjectives et ne
proviennent nullement de la nature des choses.
Il y a déjà là un embryon de la théorie des qualités primaires et
secondaires des choses. Les corps sont formés par une combinaison
d’atomes, et la séparation de ces derniers entraîne mort de ces corps. Une
quantité infinie d’atomes se meuvent perpétuellement dans un vide
atomisé infini, mais divisible, se déplaçant dans différentes directions, ils
entrent parfois en collision et forment des tourbillons d’atomes.
Telle est l’origine de l’infinité des mondes qui naissent et
meurent, qui ne sont pas créés par un Dieu, mais apparaissent et
disparaissent naturellement en vertu d’une nécessité.
Identifiant causalité et nécessité, Démocrite niait la contingence
qu’il considérait comme résultant de l’ignorance. Dans sa théorie de la
connaissance, il parlait de l’hypothèse que les corps émettent de fines
enveloppes (des idoles ou images des choses) qui affectent nos sens.
La perception sensorielle est la source première de la raison dans
la connaissance. C’était, en politique, un partisan de la démocratie telle
qu’on la concevait dans la Grèce antique et un adversaire de
l’aristocratie esclavagiste. Son matérialisme eut pour continuateurs
Épicure et Lucrèce.
Inspirés par la doctrine atomiste de Leucippe et de Démocrite,
Épicure et Lucrèce allaient élaborer l’atomisme encore une fois dans
l’Antiquité. Même s’ils étaient atomistes, la façon d’expliquer leurs
= 18 =
théories reste différente. Marx la distingue bien dans sa thèse de
doctorat.
Pour Épicure (341 – 270 avant Jésus-Christ), Dieu reste dans
l’au-delà, n’a rien à voir avec les affaires des hommes. Donc, il niait
l’intervention des Dieux dans les affaires du monde et reconnaissait la
matière en tant que principe éternel, possédant une source de mouvement
interne.
Réprimant les théories atomistes de Leucippe et de Démocrite, il
apporta des modifications originales. Pour expliquer la possibilité de
collision entre des atomes se déplaçant dans le vide à la même vitesse, il
introduisit la notion de déviation spontanée (entièrement conditionné) de
l’atome de sa trajectoire rectiligne.
Cela fonde une vision plus profonde du rapport entre la nécessité
et la contingence qui constitue un pas en avant, par rapport au
déterminisme mécaniste de Démocrite.
Dans sa théorie de la connaissance, Épicure est sensualiste. Les
sensations sont vraies en soi, parce qu’elles résultent de la réalité
objective, les erreurs n’étant dues qu’à leur mauvaise interprétation. Son
explication matérialiste de son émergence des sensations est naïve. La
surface des corps et des particules très fines dont le flux ininterrompu
pénètre dans les sens et produit les images des choses.
La connaissance vise à délivrer l’homme de l’ignorance et de la
superstition, de la peur des dieux et de la mort, sans quoi le bonheur est
impassible. Son éthique préconise un désir raisonnable fondé sur un
idéal individualiste qui consiste à éviter la souffrance et à atteindre un
état d’esprit joyeux et serein.
Selon Épicure, ce n’est pas l’activité qui est la plus rationnelle
pour l’homme, mais la tranquillité de l’âme, l’ataraxie. Sa doctrine
matérialiste fut déformée par la philosophie idéaliste, par exemple, celle
de Hegel.
= 19 =
Lucrèce a continué la doctrine d’Épicure. Lucrèce voulait que sa
philosophie indique la voie du bonheur à l’individu emporté par le
tourbillon des luttes sociales et des désastres abattus par la terreur des
Dieux, de la mort et des châtiments dans l’au-delà. Pour se délivrer de
ses peurs, il faut, estime Lucrèce, se pénétrer des idées épicuriennes sur
la nature des choses, de l’homme et de la société. L’âme est mortelle, car
elle n’est, enseigne Lucrèce, qu’une combinaison provisoire de
particules de matières et, après la mort, se désagrège en atomes isolés.
Le fait d’avoir appris que l’âme est mortelle exclut non
seulement la foi dans l’au-delà, mais aussi celle des châtiments après la
mort, et libère l’homme de la terreur de l’enfer. La peur de la mort se
dissipe en conséquence, en tant que nous ne sommes plus. La peur des
dieux s’évanouit aussi, dès que nous apprenons qu’ils n’habitent pas ce
monde, mais mènent leur vie bienheureuse dans les espaces vides entre
les mondes, aussi ne peuvent-ils exercer aucune influence sur la destinée
humaine.
Lucrèce donna une belle image et une explication matérialiste de
l’univers, de la nature de l’homme, du développement de la culture
matérielle et de la technique. Ce fut un grand penseur de l’Antiquité
romaine.
Le poème de Lucrèce contribua énormément au développement
de la philosophie matérialiste de la Renaissance. Le matérialisme antique
est donc le signe ou le témoin premier du développement de la science
physique, cosmologique, astronomique, naturelle des la formation du
monde, etc.
En ayant le courage de développer ces sciences, tous les
matérialistes grecs anciens prenaient de la haine ou de la position contre
l’idéalisme ou la conception religieuse qui estime que l’être surnaturel
est destiné à la vie de l’homme et partisan de l’idéologie démocratique
esclavagiste.
À la différence des dialectiques idéalistes qui affirmaient que
l’idée est antérieure à la matière, on négligeait totalement l’existence
= 20 =
objective du monde. Les matérialistes grecs antiques ont des conceptions
contraires à l’idéalisme qui disait que la matière est antérieure à la
conscience. Le sens est le premier organe et intermédiaire entre l’objet et
la raison. Le matérialisme antique a pour but d’émanciper l’homme sous
le joug de l’esclave qu’on a appliqué par la religion et l’idéalisme, et
pour s’organiser en une nouvelle société dans laquelle le matérialisme
antique met en place la valeur de la classe inférieure (l’esclave) et met
l’homme au-dessus de toute la nature qui existe dans le monde.
En résumé, le matérialisme antique est la première doctrine qui
dégage la méthode du processus de la connaissance le plus véritable,
spécialement pour les matérialistes grecs anciens en quête de principe
unifiant au sein de la mutabilité universelle de toutes choses. Il a formé
le concept de matière cosmique, substance universelle se substituant à
toutes les transformations et dont toute chose individuelle émerge pour y
retourner plus tard. Cette matière était en partie identifiée avec quelques
matières spécifiques, comme l’eau, l’air ou le feu, mais partiellement
seulement, car cette dernière n’avait d’autres attributs que d’être matériel
avec lequel toutes choses étaient faites.
De plus, Ai Siqi disait : « Le matérialisme primitif de l’Antiquité
présente généralement les caractéristiques fondamentales suivantes :
Premièrement, il affirmait l’unité de la substance du monde
mais, dans son essence, il faisait une large place à la sensibilité et à
l’intuition et ramenait concrètement le monde unifié à telle ou à telle
forme matérielle.
Deuxièmement, il recelait un début de pensée dialectique en
affirmant que le monde est un tout unifié où toutes les choses et tous les
êtres sont mutuellement en rapport et exercent réciproquement leurs
effets les uns sur les autres ; tous les objets qui composent l’univers
évoluent, se meuvent, naissent et périssent ensemble. Les matérialistes
de l’Antiquité avaient commencé à percevoir les causes fondamentales
de changement et de développement dans les effets réciproques des
= 21 =
forces antagonistes contenues en toutes choses et entrent en conflit : « le
froid et le chaud, l’ombre et la lumière, la droite et la courbe, etc.) »1
1 Ai Siqi, Matérialisme dialectique et matérialiste historique, p. 18.
= 22 =
CHAPITRE II
LE MATÉRIALISME DU MOYEN ÂGE (NOMINALISME)
Le Moyen Âge féodal en Europe fut entièrement dominé par le
christianisme, la philosophie était l’humble servante de la théologie.
Mais, au sein de cette philosophie institutionnalisée, servant directement
la religion et l’Église, le nominalisme s’opposait au réalisme : les
nominalistes pensaient que tout objet est antérieur aux concepts
universels, ce qui revient à reconnaître la primauté de l’objet sur le
concept, l’idée :
Au Moyen Age, les tendances matérialistes se manifestèrent
dans le nominalisme, dans les doctrines affirmant l’éternité de la nature
et de Dieu, et dans les hérésies panthéistes du haut Moyen Age.
« Chez les matérialistes anglais, écrivait Marx, le nominalisme est un élément capital, et il constitue d’une façon générale la première expression du matérialisme. »1
Les réalistes affirmaient, quant à eux, que le concept est
antérieur à toutes choses, que les objets concrets dérivent des concepts.
Les luttes entre nominalistes et réalistes représentent dans une
certaine mesure l’opposition entre matérialisme et idéalisme à cette
époque.
1 Karl Marx et Friedrich Engels, La sainte famille, Paris, Éditions Sociales, 1969,
p. 154.
= 23 =
En réalité, nominalisme (représentant du matérialisme du Moyen
Age, à l’opposé des adeptes du réalisme médiéval, les nominalistes
affirmaient aussi que seules les choses isolées avec leurs qualités
individuelles, existent réellement.
Les notions générales (créées par notre pensée) de ces choses,
loin d’exister indépendamment d’elles, ne reflètent même pas leurs
qualités et propriétés. Le nominalisme s’approchait du matérialisme
quant à la reconnaissance de la primauté de la chose et du caractère
secondaire de la notion.
Pour reprendre les termes de Marx, ce fut la première expression
du matérialisme au Moyen Age. Les nominalistes ne comprenaient
toutefois pas que les notions générales reflètent des qualités réelles des
choses objectivement existantes et que les choses singulières ne sont pas
séparées de l’universel mais le contiennent en elles.
Duns Scot et Roscelin étaient les représentants les plus en vue du
nominalisme du XIe au XIVe siècle.
I.- LE NOMINALISME DE DUNS SCOT
Duns Scot (1270 - 1308), est un théologien et philosophe
écossais, représentant de la scolastique. Il critique vivement le thomisme.
À la différence de saint Thomas d’Aquin, il entendait séparer la
philosophie de la théologie, démontrant l’impossibilité de fonder
rationnellement l’idée d’une création à partir du néant, et faisait
dépendre la raison de la volonté. Dieu est la liberté absolue. Dans les
controverses des universaux, il prit parti pour le nominalisme. Il
introduisit dans la logique, le concept d’« intention » et fut le premier à
opposer les notions de concret (le terme est de lui) et d’abstrait.
= 24 =
II.- LE NOMINALISME DE ROSCELIN
Roscelin (vers 1050 - vers 1122), est un philosophe scolastique
né en Compiègne, connu pour sa polémique avec Anselme, archevêque
de Canterbury et Abélard, ainsi que pour son interprétation hérétique de
la Trinité, formée, selon lui, de trois personnes complètement distinctes.
Cette doctrine trithéïste fut condamnée par l’Église, et Roscelin se vit
contraint de l’abjurer. Roscelin fut l’un des fondateurs de la tradition
nominaliste dans la philosophie médiévale (nominalisme).
Au témoignage d’Anselme, il affirmait que les notions générales
ne sont que des sons produits par un « ébranlement de l’air » (flatus
vocis). Pour Roscelin seuls existent réellement les objets isolés pouvant
être perçus par les sens. Il ne subsiste de ses œuvres qu’une lettre à
Abélard.
= 25 =
CHAPITRE III
LE MATÉRIALISME MODERNE
En passant par des périodes historiques (Antiquité, Moyen Age,
temps modernes, époque contemporaine), le matérialisme a toujours de
la haine contre la religion, le mysticisme, l’idéalisme, et plus tard, la
métaphysique et ne cesse d’avoir des progressions vers la victoire et
d’avoir une envie de surpasser ses adversaires.
Depuis l’Antiquité, ses adversaires (idéalisme, religion,
mysticisme, à plus tard, la métaphysique) prenaient la place la plus
dominante, la plus élevée pendant ces longues périodes. C’était difficile
de contrarier et d’ébranler les propositions qui venaient de l’idéalisme et
de la religion. Tous les matérialistes s’entendaient à embrasser
l’athéisme dont l’objectif était le renversement définitif de ces régimes
qui haussaient Dieu au-dessus de toutes les natures.
Seul Dieu, selon eux, peut guider la vie des hommes. L’homme
ne peut rien faire sans se laisser guidé par la volonté de Dieu.
En passant cette période historique de l’époque contemporaine,
le matérialisme se met debout et a une grande victoire contre l’idéalisme
et la religion, parce que les sciences de la nature se développent vers des
tendances matérialistes.
Donc c’est à l’étape suivante du développement du matérialisme
que le matérialisme contemporain est connu par les ouvrages des
matérialistes européens (Français, Anglais, Allemands) qui commencent
au début du XVIIe siècle jusqu’au XIXe siècle.
Comment évolue-t-il ce matérialisme contemporain ?
= 26 =
I.- LE MATÉRIALISME FRANÇAIS
Le matérialisme français est connu par D’Holbach, Diderot,
Helvétius, La Mettrie.
Le matérialisme de D’Holbach critique la religion et la
philosophie idéaliste, surtout celle de Berkeley et aussi la philosophie
mécaniste.
Le matérialisme de D’Holbach est aussi parmi les matérialismes
atomistes modernes, car il parle d’atomes :
« La matière est tout ce qui, d’une façon ou d’une autre, agit sur nos organes des sens, elle est composée d’atomes immuables et indivisibles dont les propriétés fondamentales sont l’étendue, la pesanteur, la forme et l’impénétrabilité. »1
Donc, le matérialisme de D’Holbach est aussi parmi les
matérialismes atomistes modernes parce qu’il parle d’atome.
Le matérialisme de D’Holbach considère le mouvement comme
attribut de la matière, comme un simple déplacement des corps dans
l’espace. L’homme fait partie de la nature aux lois de laquelle il obéit.
Défenseur du déterminisme, D’Holbach a toutefois de la causalité une
conception purement mécaniste. Il nie l’existence objective de la
contingence qui n’est pour lui que ce dont nous ignorons les causes.
Sensualiste dans sa théorie de la connaissance, il s’élève contre
l’agnosticisme.
En politique, il est partisan de la monarchie constitutionnelle,
voire de l’absolutisme éclairé. Sa conception de la société est idéaliste.
Pour lui, c’est l’opinion qui gouverne le monde. D’Holbach voit dans
l’instruction le moyen de libérer les hommes. L’ignorance de sa propre
nature a fait que le genre humain s’est trouvé asservi, est devenu victime
1 Dictionnaire philosophique, p. 232.
= 27 =
des gouvernements. Pour D’Holbach, la société bourgeoise en
développement est celle du royaume de la raison.
Pour Diderot (1713 - 1784), cependant, en philosophie, passa
rapidement du déisme et de l’idéalisme éthique au matérialisme (en
psychologie, dans sa théorie de la nature et de la connaissance) et à
l’athéisme. À la conception matérialiste mais mécaniste de la nature qui
était aussi celle de La Mettrie et de D’Holbach, il apporta des éléments
de dialectique, idée d’une relation entre la matière et le mouvement, de
la corrélation des processus naturels, du caractère éternellement
changeant de toutes les formes dans la nature, au sujet de la manière dont
le mouvement mécanique des particules matérielles est susceptible
d’engendrer le contenu spécifique des sensations.
Diderot défend l’idée d’une sensibilité générale de la matière.
Développant ce point de vue, il esquisse une théorie matérialiste des
fonctions psychiques, anticipant sur la théorie des réflexes, et les
hommes, et les animaux sont des instruments pourvus de la faculté de
sentir et de se souvenir. Sa théorie de la connaissance rejette la thèse
idéaliste du caractère spontané de la pensée : toute spéculation a sa
source dans la nature, et nous ne faisons qu’enregistrer les phénomènes
connus empiriquement entre lesquels existe une relation, soit nécessaire,
soit conventionnelle. Il ne s’ensuit pas, selon Diderot que nos sens
reflètent les objets avec l’exactitude d’un miroir, il n’y a pas entre la
plupart des sensations et leurs causes extérieures plus de ressemblance
qu’entre les représentations et les noms qu’elles reçoivent dans le
langage.
Diderot développe la thèse de Bacon selon laquelle la
connaissance, dont la source est tout empirique, n’a point pour fin la
vérité en soi, mais la recherche des moyens de rendre l’homme plus
parfait et d’accroître sa puissance. Diderot tient compte du rôle des
techniques et de l’industrie dans le développement de la pensée et de la
connaissance.
= 28 =
Cette dernière a pour guide et pour méthode l’expérimentation et
l’observation. C’est en prenant appui sur elles que la pensée parvient à
un savoir, sinon tout à fait certain, du moins hautement probable.
Diderot dit que le fondateur du marxisme tenait en haute estime
son matérialisme. On trouve chez lui, écrivait Engels, des « chefs-
d’œuvre de dialectique ». Diderot, dit Lénine, est parvenu jusqu’au seuil
de la conception moderne du matérialisme et « a opposé nettement les
principales tendances philosophiques »1.
Mais il est demeuré idéaliste dans sa conception des phénomènes
sociaux. Il lutta contre le despotisme féodal, mais faisait de la monarchie
éclairée son idéal politique.
Le sensualisme de Locke, à l’exclusion de ses éléments
idéalistes est à la base de sa philosophie. Selon lui, c’est par les
sensations que nous apprenons à connaître la matière dans sa réalité
objective.
La mémoire était pour lui un autre instrument de la
connaissance. De façon très simpliste, il concevait la pensée comme une
simple combinaison de sensations. Il soulignait le rôle du milieu social
dans la formation du caractère de l’homme, justifiant ainsi la nécessité
de remplacer les rapports féodaux par des rapports capitalistes.
Toutefois, ce sont la connaissance humaine et les passions qui
jouent, selon lui, un rôle déterminant dans le développement social.
Marx a très bien défini la doctrine d’Helvétius :
« Les propriétés sensibles et l’amour-propre, la jouissance et l’intérêt personnel bien compris sont le fondement de toute morale. L’égalité naturelle des facultés humaines, l’unité entre les progrès de la raison et le progrès de l’industrie, la bonté naturelle de l’homme, la toute-puissance de l’éducation, voilà les éléments principaux de son système »2.
1 Vladimir Ilitch Oulianov dit Lénine, Œuvres, tome 14, p. 36. 2 Karl Marx et Friedrich Engels, La sainte famille, p. 157.
= 29 =
La reconnaissance par Helvétius de la nécessité d’une
harmonisation des intérêts sociaux, de l’égalité des facultés
intellectuelles, a joué un rôle important dans l’élaboration du socialisme
utopique.
La Mettrie (1709 - 1751) se fondant sur la physique de Descartes
et le sensualisme de Locke, considérait le monde comme la
manifestation d’une substance matérielle étendue, intérieurement active,
sensible, dont les formes sont les règnes minéral, végétal et animal (ce
dernier incluant l’homme). Il appréhendait le processus de la pensée, qui
n’est propre qu’à l’homme et est le résultat de son organisation
complexe, comme la comparaison et la combinaison des représentations
résultant de la perception et de la mémoire. Adepte du mécanisme, La
Mettrie était proche des idées évolutionnistes. Il estimait que les causes
principales du progrès historique étaient l’instruction publique et
l’activité des personnalités éminentes et était un partisan de
l’absolutisme éclairé.
La Mettrie professait l’athéisme et fut persécuté pour ses
opinions, mais en même temps, il reconnaissait cependant que la foi
religieuse est nécessaire aux masses populaires.
En général, le matérialisme français est une nouvelle étape du
développement de la pensée matérialiste, supérieur sur le plan tant
national que mondial, au matérialisme du XVIIe siècle. À la différence
du matérialisme anglais du XVIIe siècle, qui reflète, à bien des égards,
un compromis entre la noblesse et la bourgeoisie, le matérialisme
français était l’idéologie de la bourgeoisie progressiste. Il avait pour but
de dispenser les lumières et d’armer idéologiquement une large fraction
de la société : bourgeois artisans, intellectuels bourgeois et une partie de
l’aristocratie aux opinions avancées.
Les origines de ce matérialisme français sont incarnées, au XVIIe
siècle, par Gassendi, et surtout par le matérialisme mécaniste de la
physique de Descartes, ainsi que par le matérialisme anglais.
= 30 =
La doctrine de Locke de l’origine empirique, du savoir, la
critique des idées innées cartésiennes, une conception essentiellement
matérialiste de l’expérience y ont ajouté un rôle important. Non moins
considérable fut l’influence exercée par les thèses pédagogiques et
politiques de Locke, selon lesquelles, la formation de la personnalité est
conditionnée par l’éducation et l’ordre social. Mais loin d’assimiler
purement et simplement le sensualisme matérialiste et empirique du
philosophe anglais, le matérialisme français a délivré sa théorie de tout
penchant pour le rationalisme cartésien.
En plus de la mécanique qu’il considérait toujours comme
prépondérante, le matérialisme français s’est appuyé sur la médecine, la
physiologie et la biologie. Grâce à cela, il a pu développer un certain
nombre d’idées nouvelles par rapport au matérialisme du XVIIe siècle,
dont les plus significatifs furent les éléments de dialectique dans la
doctrine de la nature de Diderot. Les théories éthiques, sociales et
politiques de ce dernier sont encore plus originales.
Poursuivant dans ce domaine l’œuvre de Hobbes, de Spinoza et
de Locke, le matérialisme français a dégagé la pensée de l’abstraction
naturaliste qui l’enserrait ainsi, contrairement à Hobbes qui établissait
une analogie entre l’instinct de conservation chez l’homme et l’inertie
mécanique du corps physique. Helvétius et de D’Holbach considéraient
l’intérêt comme un moteur spécifique du comportement humain.
Rejetant l’accommodement que constituent le panthéisme et le déisme,
le matérialisme français faisait ouvertement la propagande d’un athéisme
fondé sur les conclusions des sciences de la nature et de l’homme. Marx
a fait un bref historique, extrêmement riche d’idées du matérialisme
français dans l’ouvrage La sainte famille. Dans Matérialisme et
empiriocriticisme, Lénine a montré le rôle immense joué par le
matérialisme français du XVIIIe siècle.
Dans l’élaboration des bases philosophiques de tout
matérialisme, tout expliquait les défauts de la théorie : le caractère
métaphysique des méthodes et l’interprétation idéaliste des phénomènes
du développement social et du progrès.
= 31 =
Le paragraphe suivant nous permettra de parler du matérialisme
anglais. Qu’en est-il exactement ?
II.- LE MATÉRIALISME ANGLAIS
En Angleterre, le matérialisme connut un développement
remarquable grâce à Bacon (1561 - 1626), Hobbes (1588 - 1679) et
Locke (1632 - 1704). Le principal mérite de Francis Bacon fut
d’appliquer pour la première fois à la connaissance des sciences
naturelles. Les idées matérialistes consistaient à affirmer que les
véritables sources de la connaissance humaine sont les sensations et
l’expérience. Elles affirmaient aussi l’existence objective de la matière et
pressentaient que le mouvement est une propriété inhérente à la matière.
Mais la philosophie de Bacon et de Locke en resta au niveau
d’un matérialisme métaphysique, tandis que Hobbes est un mécaniste.
En politique, les matérialistes anglais sont des partisans de la révolution
bourgeoise qui, plus tard, s’étend en France et en Allemagne.
Le matérialisme anglais fut donc la source du développement de
la science de la nature contemporaine en Europe. En réalité, en Europe,
les sciences naturelles modernes commencèrent à se développer à partir
de la seconde moitié du XVe siècle. Pour connaître les lois qui régissent
les différentes formes du mouvement de la nature, les naturalistes
commencèrent par rassembler et par classer les matériaux. Puis la nature
fut décomposée en ses parties distinctes, les divers processus et les objets
naturels furent séparés en classes déterminées et la constitution interne
des corps organiques fut étudiée dans la variété de leurs aspects
anatomiques. À cette époque, les sciences de la nature en étaient, comme
l’a fait remarquer Engels :
« Mais cette méthode nous a également légué l’habitude d’appréhender les objets et les processus naturels dans leur isolement, en dehors de la grande connexion d’ensemble, par conséquent non dans leur mouvement, mais dans leur repos, comme des éléments non essentiellement variables, mais fixes, non dans leur
= 32 =
vie mais dans leur mort. Et quand, grâce à Bacon et à Locke, cette manière de voir passa de la science de la nature à la philosophie, elle produisit l’étroitesse d’esprit spécifique des derniers siècles, le mode de pensée métaphysique »1.
Néanmoins, ces différentes branches des sciences naturelles, à
l’exception de la mécanique et des mathématiques, étaient à l’époque
très mal connues. Comme le matérialisme devait s’appuyer sur le succès
des sciences naturelles pour expliquer l’univers, il fut lui-même
inévitablement limité par l’insuffisance de leur développement. C’est la
raison pour laquelle, le matérialisme antérieur aux XVII e et XVIII e
siècles n’a pu se débarrasser de son aspect métaphysique et mécaniste.
Comme le matérialisme français, sa conception sociale demeure
à la conception sociale idéaliste.
1.- Le matérialisme de Hobbes
Hobbes est aussi un matérialiste mécaniste et parmi les
révolutionnaires bourgeois contemporains en Angleterre. Hobbes
systématisa le matérialisme de Francis Bacon. Marx relève le caractère
unilatéral du matérialisme de Hobbes :
« Le monde sensible perd son charme original et devient le sensible abstrait du géomètre. Le mouvement physique est sacrifié au mouvement mécanique ou mathématique, la géométrie est proclamée science principale »2.
Pour Hobbes, le monde est un ensemble de corps obéissant aux
lois du mouvement mécanique. Hobbes réduit aussi la vie intellectuelle
des êtres vivants à des mouvements et à des efforts. Ils sont, selon
Hobbes, des mécanismes complexes obéissant entièrement à des
influences extérieures. Hobbes nie le caractère objectif de la diversité
1 Friedrich Engels, Anti-Dühring, Moscou, Éditions du Progrès, 1987, p. 51. 2 Karl Marx et Friedrich Engels, La sainte famille, p. 155.
= 33 =
qualitative de la nature qu’il considère comme procédant des sensations
humaines fondées sur les différences mécaniques entre les choses.
Dans sa théorie du droit et de l’État, Hobbes rejette l’idée de
l’origine divine des institutions sociales et défend la théorie du contrat
social. Tout en considérant la monarchie absolue comme la forme la
meilleure de l’État, il ouvre la voie à bien des principes révolutionnaires.
Son idéal est moins le principe monarchique en tant que tel, qu’un
caractère limité du pouvoir de l’État.
Les droits de l’État sont à ses yeux compatibles avec les intérêts
des classes qui, au milieu de XVIIe siècle, avaient accompli la révolution
bourgeoise en Angleterre. Dans sa théorie de la société et de l’État, on
trouve en germe une conception matérialiste des phénomènes sociaux.
2.- Le matérialisme de Bacon
Le matérialisme de Bacon (1561 – 1626) est un matérialisme
métaphysique. Il est considéré comme un des fondateurs du matérialisme
et de la science expérimentale des temps modernes. Dans sa philosophie
matérialiste, il développa une nouvelle conception de la science et une
théorie de l’induction.
Le but suprême de la connaissance était d’accroître l’emprise de
l’homme sur la nature. Bacon estimait que seule la science étudiant les
causes authentiques des phénomènes était susceptible d’y parvenir.
Aussi, combattait-il la scolastique.
Toute la science antérieure était marquée soit par le dogmatisme
(le savant tisse ses démonstrations par la méthode déductive, à la
manière d’une araignée, en partant de ses propres notions), soit par
l’empirisme caractérisé par un assemblage de faits non raisonnés. Bacon
préconise le scepticisme à l’égard du savoir déjà acquis. Mais il admet la
possibilité d’acquérir un savoir authentique à condition de reformer la
méthode.
= 34 =
Dans un premier temps, il fallait, selon lui, débarrasser l’esprit
des erreurs (idoles) qui l’obsèdent en permanence. Les fausses
représentations, une fois éliminées, il devenait possible d’arriver à la
vraie méthode de la science nouvelle. D’après Bacon cette science serait
une synthèse rationnelle des données empiriques. Ses déductions
(axiomes moyens) seraient fondées sur les données d’une classification
méthodologique ou de l’induction. L’induction partirait de la conception
analytique de l’expérience.
Le développement étroit de ce principe incita Bacon (et plus tard
Locke) à appliquer la méthode métaphysique des sciences de la nature
propre à la science des XVe et XVIe siècles à la philosophie.
Dans la théorie de l’induction, il insista, pour la première fois,
sur l’importance des instances négatives, c'est-à-dire la sélection des cas
contredisant la classification, laquelle, s’avérant insuffisamment fondée,
exige une considération. Bacon en tant que philosophe, a le mérite
d’avoir, premièrement, rétabli dans ses droits la tradition matérialiste et
revu sous ce jour, les philosophes du passé en revalorisant le
matérialisme de la haute Antiquité grecque et en mettant en lumière les
erreurs de l’idéalisme.
Deuxièmement il mit au point sa propre conception matérialiste
de la nature, fondée sur la matière considérée comme un ensemble de
corps dotés d’une grande diversité de qualités.
Tous ces concepts de Francis Bacon répondaient aux besoins
nouveaux présentés à la science à l’époque de l’accumulation capitaliste
initiale en Angleterre.
Mais le matérialisme de Bacon était entaché d’inconséquences.
Ses convictions politiques se trouvèrent exprimées dans La nouvelle
Atlantide (1617), une utopie représentant une société idéale prospère
fondée sur les progrès de la science et une technique évoluée mais
divisée en classes dominées et dominantes.
= 35 =
Le sous-titre suivant nous permettra de parler des idées de
l’Anglais John Locke concernant son matérialisme
3.- Le matérialisme de Locke
Locke (1632 - 1704), est un matérialiste métaphysique anglais. Il
développe la théorie de la connaissance de l’empirisme matérialiste.
Rejetant les idées cartésiennes, Locke déclare que l’expérience est
l’unique source de toutes les idées. Celles-ci naissent de l’action d’objets
extérieurs sur les organes des sens (l’idée sensitive). Ce dernier point fut
une concession à l’idéalisme. Par les idées de la sensation, nous
percevons dans les choses des qualités soit primaires, soit secondaires
(qualités primaires et secondaires).
Les idées acquises par l’expérience constituent les matériaux du
savoir, mais non le savoir lui-même. Pour devenir un savoir, le matériau
des idées doit être transformé par l’entendement dont l’activité n’est ni
sensation ni réflexion. L’entendement transforme les idées simples en
idées complexes.
À L’instar de Hobbes, Locke estime que le savoir général est
possible grâce au langage.
Bien que Locke ait été convaincu de nos capacités limitées de
connaître les substances matérielles et, qui plus est, spirituelles, on ne
peut le considérer comme un agnostique.
Selon lui, notre objectif n’est pas de connaître tout, mais
uniquement ce qui essentiel à notre comportement et à la vie pratique.
Or, un tel savoir est tout à fait à notre portée.
Dans sa doctrine du pouvoir politique et du droit, Locke
développe l’idée d’un passage de l’état naturel à l’état civique et aux
formes du gouvernement. La raison d’être de l’État, estime Locke, est la
sauvegarde de la liberté et la défense de la propriété acquise par le
travail. Aussi le pouvoir exercé par l’État ne peut-il être qu’arbitraire.
= 36 =
Ce pouvoir se subdivise, dans le système de Locke, en premier,
législatif, deuxième, exécutif et troisième, fédéral.
La doctrine de l’État, élaboré par Locke, fut une tentative
d’adapter la théorie à la forme politique du gouvernement qui s’établit en
Angleterre à l’issue de la révolution bourgeoise de 1688 et du
compromis entre la bourgeoisie et le parti embourgeoisé de la noblesse.
La philosophie de Locke eut une grande portée historique.
L’idée que les hommes doivent changer eux-mêmes l’ordre social établi,
s’il n’assure pas à la personnalité une éducation et un épanouissement
dignes d’elle, fut largement utilisée pour justifier la révolution
bourgeoise. Un des courants du matérialisme français prend sa source
dans la doctrine de Locke.
D’autre part,
« La distinction, faite par Locke entre les qualités primaires et secondaires fut reprise par l’idéaliste Berkeley et l’agnostique Hume »1.
Si telles sont les idées anglaises concernant le matérialisme, de
l’autre côté de la Manche, qu’en pensent les Allemand ?
III.- LE MATÉRIALISME ALLEMAND
Vers le XVIIIe siècle, c’est l’étape suivante du développement
du matérialisme en Allemagne. Ce type de matérialisme atteignit son
apogée dans le matérialisme anthropologique de Feuerbach et le
matérialisme assez complet de Marx et Engels. Grâce à ces deux
tendances matérialistes, la critique de la religion, surtout l’essence du
christianisme et de l’idéalisme, devient de plus en plus forte.
1 Dictionnaire philosophique, p. 284.
= 37 =
1.- Le matérialisme de Feuerbach
Feuerbach (1804 - 1872), est une philosophe athée allemand.
Son athéisme lui valut d’être destitué de l’université d’Erlanger. Ses
convictions évoluèrent, au cours de sa lutte contre la religion, passant
des positions des jeunes hégéliens au matérialisme.
Le matérialisme de Feuerbach a été le point de départ de la
formation de la philosophie marxiste. Sa défense du matérialisme eut
une influence énorme sur ses contemporains. L’évolution de sa
philosophie débuta par une critique de la conception hégélienne idéaliste
de l’essence de l’homme, qui, la réduisait à la conscience de soi. Rejeter
ce point de vue impliquait nécessairement le rejet de l’idéalisme en tant
que tel.
Le mérite de Feuerbach est d’avoir mis en lumière les liens entre
l’idéalisme et la religion. Il critique aussi sévèrement le caractère
idéaliste de la dialectique hégélienne. Sa critique de Hegel ouvrait la
voie à une mise en valeur du contenu rationnel de la philosophie
hégélienne. Mais en réalité, Feuerbach rejeta purement et simplement la
philosophie hégélienne et pour cette raison, fut incapable d’en apprécier
l’acquis principal.
La dialectique de la défense du matérialisme constitue le contenu
essentiel et le sens de la philosophie feuerbachienne.
Son anthropologie se traduit par la primauté attribuée au
problème de l’essence de l’homme conçu par lui-même comme l’objet
unique, universel et suprême de la philosophie.
Cependant, il ne parvient pas à pousser jusqu’au bout de sa
logique le point de vue matérialiste sur cette question, puisque l’homme
reste pour lui un individu abstrait, un être biologique. Dans sa doctrine
de la connaissance, il défendit les thèses d’empirisme et de sensualisme
en combattant résolument l’agnosticisme.
= 38 =
Toutefois, il ne niait pas le rôle de la pensée dans la
connaissance et tenta de définir l’objet en fonction de ses rapports avec
l’activité du sujet. Il émit aussi des hypothèses sur la nature sociale de la
connaissance humaine et de la conscience, etc. Mais dans l’ensemble,
Feuerbach n’a pas su surmonter le caractère contemplatif du
matérialisme pré-marxiste. Cela est dû au fait que son interprétation de
l’histoire reposait entièrement sur des positions idéalistes. Sa vision
idéaliste des phénomènes sociaux tient à son désir d’appliquer
l’anthropologie, en tant que science universelle, à l’étude de la vie
sociale.
L’idéalisme de Feuerbach se manifeste clairement dans son
analyse de la religion et de la morale. Il envisage la religion comme une
aliénation des attributs de l’homme : l’homme se dédouble et contemple,
à travers Dieu, sa propre essence.
Feuerbach voit la cause de ce dédoublement dans le sentiment de
dépendance qu’éprouve l’homme face aux éléments naturels et à la
société. Ses conjectures concernant les racines sociales et historiques de
la religion présentent un intérêt particulier.
Néanmoins, Feuerbach n’a pas réussi à trouver un instrument de
lutte efficace contre la religion. Il l’a cherché dans la diffusion de la
lumière, et prêchait même la nécessité d’une religion nouvelle.
Faute de comprendre, le monde réel où vit l’homme, il fonde les
principes de sa morale sur le désir du bonheur inhérent à la nature
humaine, qui ne peut se réaliser qu’à condition que chacun limite
raisonnablement ses besoins et aime son prochain.
La morale forgée par Feuerbach est abstraite et en dehors de
l’histoire taillée sur la même mesure pour toutes les époques et toutes les
nations, on retrouve les idées de l’anthropologisme feuerbachien
interprétées dans un sens manifestement idéaliste chez un certain nombre
de philosophes idéalistes contemporains.
= 39 =
2.- La naissance du matérialisme de Karl Marx et de Friedrich Engels
Après Feuerbach, Marx et Engels furent les grands matérialistes
des Lumières. C’est grâce à leur travail que le matérialisme tient son
fondement actuel, parce qu’ils ont abouti à l’interpréter scientifiquement
et méthodiquement par rapport aux matérialismes antérieurs.
En passant par des périodes historiques, le matérialisme réside
dans la conception idéaliste des sciences de la société
Marx, dès cette époque, avait vu les points faibles de la pensée
de Feuerbach. Elle ne s’encrait pas suffisamment dans l’actualité, dans
l’effort pour modeler la réalité selon les normes de la philosophie. Sans
doute, avait-elle réintégré l’homme concret et le réel dans la pensée
philosophique, mais elle semble en avoir chassé l’histoire.
Il n’empêche que le matérialisme de Feuerbach sera une porte
décisive. Il va mettre la philosophie en désir de remplir sa mission de
prouver sa vérité et de servir ainsi à la transformation du réel, mais il
faudra pour cela qu’il soit repensé par Marx.
Partant de l’analyse du matérialisme antérieur, Marx trouve que
tous les matérialistes ne sont pas capables de donner une notion véritable
du matérialisme, parce qu’ils ont la même conception de l’idéalisme,
surtout dans l’analyse du système social, en oubliant la valeur immense
de la classe ouvrière ou prolétarienne.
Le matérialisme de Marx et d’Engels se manifeste dans le
matérialisme historique et dialectique. La première analyse ou la critique
de tous les systèmes sociaux antérieurs sont en vue de dominer les autres
ou de les exploiter. Il s’agit surtout des systèmes capitalistes de Ricardo
qui développaient une théorie économique basée sur la propriété privée,
et laisse ou oublie la valeur immense des ouvriers.
= 40 =
À l’époque, les théories politiques bourgeoises se sont
développées dans le monde européen et furent développées par quelques
matérialistes français.
Marx critique aussi ce système pour mettre en valeur le
prolétariat.
À l’époque de Hegel, l’idéalisme règne dans le monde de
l’Allemagne, selon la théorie politique de Hegel qui part de l’aliénation,
de l’asservissement populaire dans lesquels le peuple obéit à l’État.
Par cette analyse de toutes les conceptions sociales antérieures,
Marx aboutit au socialisme ou à la lutte des classes, à la démocratie
populaire.
Le matérialisme dialectique est la critique de toute conception
dialectique antérieure. Pour lui, toutes les conceptions dialectiques
antérieures ne sont pas capables de donner une explication véritable de la
dialectique. D’une façon générale, l’un des plus grands mérites de Marx
et d’Engels envers le matérialisme, est d’avoir élaboré une méthode
juste. Feuerbach a concentré ses efforts sur la lutte contre l’élément
spéculatif de la philosophie de Hegel, et il en a peu apprécié et utilisé
l’élément dialectique. Lénine, à ce propos, dit :
« La dialectique véritable n’est nullement le dialogue du penseur solitaire avec lui-même : elle est le dialogue entre moi et toi »1.
Premièrement, la dialectique de Hegel n’avait pas non plus le
sens d’un dialogue de penseur solitaire avec lui-même, et deuxièmement,
la remarque de Feuerbach détermine correctement le point de départ de
la philosophie, mais non pas sa méthode. Cette lacune a été comblée par
Marx et Engels, qui ont compris que c’eût été une erreur, en combattant
la philosophie spéculative de Hegel, de méconnaître sa dialectique.
Marx critique cette théorie dialectique de Hegel. Le matérialisme
dialectique marxiste est constitué par la loi de l’unité et la lutte des
1 Vladimir Ilitch Oulianov dit Lénine, Œuvres choisies, tome 38, p. 390.
= 41 =
contraires, la loi du passage des changements quantitatifs à des
changements qualitatifs, la loi de la négation de la négation.
C’est le mérite de Marx d’avoir inventé cette nouvelle
conception matérialiste qui est la plus complète et la plus méthodique. Et
tous les matérialistes après Marx ne font que développer le matérialisme
marxiste comme Lénine et Mao Tsé-Toung.
Voilà donc l’histoire du matérialisme, en général, qui part de
l’Antiquité jusqu’à l’époque contemporaine. Chaque étape périodique du
matérialisme a son propre degré de l’interprétation du matérialisme.
Face à ces différentes explications du matérialisme, c’est le
matérialisme marxiste qui nous semble complet et applicable dans la
société.
Mais voyons de plus près tout cela, qu’est ce que vraiment le
matérialisme marxiste ?
Pour répondre à cette question, nous allons voir le matérialisme
dialectique et le matérialisme historique qui sont les bases de la
philosophie marxiste.
= 42 =
DEUXIÈME PARTIE
LE MATÉRIALISME PHILOSOPHIQUE PROPREMENT
DIT
= 43 =
CHAPITRE I
DÉFINITION DU MATÉRIALISME
La connaissance humaine de la réalité quotidienne est un aspect
qui représente la philosophie; c’est la raison pour laquelle, elle est un
champ de bataille pour les philosophes, sur l’expression de leurs idées.
Ce qui revient à dire que la philosophie leur provoque différentes
visions, différentes conceptions et différentes interprétations des choses
et de la réalité existante.
Cependant, il faut bien préciser que souvent dans la philosophie,
la question de l’existence de l’idée et de la matière est la première source
de divergence entre les philosophes.
C'est-à-dire, à cause de cela, la doctrine philosophique se divise,
à son tour, en deux grands camps diamétralement opposés, à savoir,
d’une part, la doctrine idéaliste et d’autre part, la doctrine matérialiste.
Autrement dit, le matérialisme dit le contraire ou l’opposé de ce
qu’affirme l’idéalisme, selon lequel le monde et la matière n’ont pas été
créés par un être supérieur, suprême. Ce qui signifie qu’ils se sont
formés eux-mêmes.
En effet, la matière est la première par rapport à l’idée et par
rapport à la pensée. Cela aboutit à la non-croyance aux esprits, aux
forces surnaturelles et aux dieux. Pour le matérialiste donc, ce qui est
visible est placé au premier plan, le concret prime sur l’abstrait.
= 44 =
I.- LA VISION MATERIALISTE DE LA NATURE
1.- Qu’est-ce que la nature ?
Le matérialiste prétend que la nature est l’élément primordial
dans la constitution du monde. En effet, elle n’est pas d’un seul type
d’objet matériel, mais constituée par un assemblage de diverses matières
comme, par exemple, les arbres, les animaux, la vie, le feu, les oiseaux,
les mers, les océans, l’air, la terre, le tonnerre… Cela veut dire, tout ce
qui existe autour des êtres humains.
Cependant, l’existence ou l’apparition de la nature autour de
l’homme ne signifie nullement qu’elle dépend de lui. Au contraire, elle
lui échappe. C’est la raison pour laquelle, la nature est, en quelque sorte,
une composition des éléments matériels ou bien des réalités et qui, en
dernière analyse, répond à l’appellation d’“environnement matériel”.
2.- Origine de la nature
A.- Le point de vue d’Épicure
La base de la philosophie d’Épicure repose plus particulièrement
sur la recherche du “plaisir”. Ce qui revient à dire que pour lui,
l’important pour l’homme, c’est de profiter de la vie matérielle. Pour
cela, il faut connaître dans sa philosophie que la vie de l’homme n’est
possible que seulement dans le monde matériel et sensible. Ce qui
signifie qu’en dehors de la vie terrestre ou bien après la mort, il n’y a
plus rien. C’est pour cette raison donc qu’Épicure cherche la voie qui
mène à la rencontre du “plaisir”, en vue de la satisfaction de tout un
chacun, pour arriver au but à atteindre dans la vie.
Autrement dit, Épicure montre le chemin du plaisir comme la
satisfaction en vue du bonheur des hommes. Avant tout, il faut savoir
qu’en tant que continuateur de Démocrite, Épicure confirme sa vision
matérialiste de la genèse de la nature selon laquelle, les atomes,
= 45 =
corpuscules indivisibles dont se compose la matière, sont immuables,
éternels et en perpétuel mouvement. Ainsi, les atomes se distinguent
uniquement par la forme, la grosseur, la position et l’ordre dans lequel ils
se trouvent placés. Ce qui revient à dire que tous les corps sont formés
par une combinaison d’atomes.
En effet, la séparation des atomes entraîne la disparition d’un
corps et donne, à cette occasion, naissance à un autre corps. Une quantité
infime d’atomes se place dans différentes directions où ils entrent en
combinaison et forme des tourbillons d’atomes. Telle est l’origine d’une
infinité de choses qui naissent, se meuvent, sans qu’elles aient besoin
d’un Dieu pour les créer. Bref, tout cela signifie que le monde est formé
par un assemblage de particules d’atomes en perpétuel mouvement.
B.- Le point de vue de Démocrite
Démocrite est un philosophe atomiste célèbre de l’Antiquité. On
appelle “atomisme”, une doctrine qui soutient que la matière, principe
premier de tout être, est formée d’atomes dont les propriétés engendrent,
par leur composition, tous les phénomènes du monde sensible.
Démocrite est cependant une des sources de la doctrine matérialiste.
C’est pourquoi on l’appelle “le père du matérialisme”. Pour lui, le monde
est formé par la réunion d’éléments naturels, comme l’air, l’eau, le feu,
la terre, etc. En ce sens, tous ces éléments sont produits par la
combinaison d’atomes de toute nature, c’est-à-dire, l’air est formé par la
combinaison d’atomes de l’air, l’eau est formée par la combinaison
d’atomes de l’eau, le feu est formé par la combinaison d’atomes de feu,
la terre par la combinaison d’atomes de la terre.
C'est pour cela que toute création ne sera possible sans
l’existence du mouvement ininterrompu. En d’autres termes, le
mouvement perpétuel est donc la force motrice de la formation de la
nature et du monde depuis toujours ; à défaut, il n’y a rien.
= 46 =
Cependant, ce que Démocrite veut nous apprendre dans sa
philosophie, c’est la formation du monde par la combinaison d’atomes
en perpétuel mouvement. Alors, le mouvement est bel et bien nécessaire,
d’après la philosophie de Démocrite, pour une nouvelle création.
Pour terminer, la conception de la nature de Démocrite et
d’Épicure, pour eux, les dieux n’interviennent pas dans la genèse de
l’univers, car disait Démocrite, s’ils existent, ils sont formés par le même
processus de formation possible que celui des autres natures, c’est-à-
dire, faits par la combinaison d’atomes. En ce sens, Démocrite admet
donc l’existence des dieux, mais ils sont de même titre que les autres
éléments de la nature. Ce qui signifie qu’ils sont tous produits de
combinaisons d’atomes passagères et soumises à la nécessité universelle,
apparaissant et disparaissant naturellement. Les dieux de Démocrite sont
donc mortels, au même titre que les hommes et tous les êtres de
l’univers. En un mot, le monde n’a pas été créé, mais il s’est créé tout
seul par la combinaison des éléments constitutifs et contradictoires de
l’univers comme l’air, la terre, l’eau et le feu, qui sont tous produits de
combinaisons d’atomes.
Tout cela signifie que la formation du cosmos a été faite par la
matière toute seule. En effet, l’existence et le mouvement de la nature
sont expliqués tout au long du déroulement de la formation du monde
par la matière.
II.- LA CONCEPTION MATÉRIALISTE DE L’HOMME
L’étude de la nature de l’homme est l’une des particularités de la
doctrine matérialiste. Les matérialistes pensent que l’homme est un être
abandonné sur terre, solitaire et exposé aux aléas du destin. Cela signifie
que l’homme n’a pas de véritable créateur, comme le dit le christianisme.
Ainsi, il est condamné à assumer tout seul son avenir.
Cependant, il est clair que l’homme est la mesure de toutes
choses, c’est-à-dire que tout dépend de lui. Alors, d’après cette vision,
= 47 =
Dieu n’existe pas ou s’il existe, il ne s’occupe pas des affaires de
l’homme. C’est pour cette raison que la plupart des matérialistes invitent
l’homme à se délivrer de la crainte, non seulement de la mort, mais aussi
et surtout des dieux, en vue de se contenter du bonheur et des joies que la
vie lui offre.
1.- Le point de vue de Karl Marx
La conception marxiste de l’homme est tout à fait en parfait
accord avec celle des autres matérialistes. Il dit même que l’homme est
pour l’homme l’être suprême. Cela explique l’appartenance de l’homme
à lui-même. L’homme est le possesseur de lui-même, c’est-à-dire que ce
qu’il fait n’est pas pour autre chose, mais c’est pour lui-même. En
d’autres termes, l’homme agit selon ses besoins et selon ses désirs. On
peut dire dans ce sens que son avenir dépend de lui-même. En un mot, il
est le maître de son destin.
À cet effet, l’idée du philosophe matérialiste Ludwig Feuerbach
dont Marx a été fasciné, proclame ouvertement l’athéisme qui dénonce
les caractères illusoires de la religion. Pour Feuerbach, la religion, en
l’occurrence, le christianisme, est en réalité l’ensemble des rapports de
l’homme avec lui-même, c’est-à-dire de son rapport avec son être qu’il
idéalise dans un monde. Dans L’essence du christianisme, il dit que
l’être divin n’est autre chose que l’être de l’homme délivré des liens et
des bornes de l’individu…
Toutes les déterminations de l’essence divine sont par
conséquent des déterminations de l’essence humaine. Cela veut tout
simplement dire que pour Feuerbach, le Dieu des chrétiens n’est autre
chose que l’homme total, l’homme parvenu au plein épanouissement de
son être, c’est-à-dire, l’idée que l’homme a de ce qu’il devrait être. Cette
idée n’est, en réalité, que le produit de son cerveau, donc l’homme la
protège hors de lui, la vénère et l’appelle “Dieu”. Ce qui fait que Dieu
est une idée produite par le cerveau humain et que la religion, définie
= 48 =
comme le lien qui unit l’homme à Dieu, est une illusion de la pensée de
l’homme.
En face de cette situation, les idées marxistes excluent toute idée
de Dieu, puisque, pour Marx, Dieu est une grande aliénation pour
l’homme. Autrement dit, la croyance à l’existence de Dieu fait l’homme
prisonnier d’une situation pénible. À cause de cela, Marx a vivement
critiqué la religion parce que, pour lui, elle est un produit de l’oppression
de la nature, c’est-à-dire, par exemple, une impuissance matérielle
devant les cataclysmes naturels. C’est en quelque sorte, une faiblesse
intellectuelle. C’est aussi une oppression de classes.
Dans la société de classes, l’existence et le développement de la
religion trouvent leur origine dans l’oppression et l’exploitation de
classes, car la classe au pouvoir utilise au maximum la religion pour en
faire une arme et préserver sa domination.
Cependant, à l’époque de Marx, la religion est considérée comme
un instrument spirituel, une arme entre les mains de la classe dominante,
c’est-à-dire entre les mains de la bourgeoisie pour défendre son intérêt
afin de pouvoir continuer sa domination en vue d’une exploitation. Le
christianisme devient la religion de l’État Prussien de Frédéric
Guillaume III et les autorités religieuses sont totalement du côté de la
classe dominante qui détient le pouvoir politique et économique de cette
époque. En plus, même les thèmes des messes dominicales que les
autorités religieuses célèbrent, sont faits pour soulager moralement la
misère de la classe dominée et cacher l’exploitation en cours que font les
classes dominantes.
En effet, ces dernières préservent le système d’exploitation et
endorment les classes dominées à travers la religion, plus exactement à
travers les messes par les versets de promesses de la Bible. L’Église
catholique, elle-même dirigée par le Vatican, protège le système
capitaliste selon lequel le capitalisme et le travail salarié sont dans
l’ordre de la volonté divine. En ce sens, les ouvriers doivent accepter
sans se plaindre la place qui leur a été accordée par la volonté céleste.
= 49 =
Cela veut dire que pour l’Église catholique, dans la société
capitaliste, tout est dicté par Dieu. C’est pourquoi Marx considère la
religion comme étant une organisation conservatrice entre les mains de
la classe dominante qui n’est rien d’autre que les bourgeois. Par
conséquent, les bourgeois utilisent la religion comme une arme
spirituelle efficace pour asservir le peuple. Alors, il faut démystifier la
mystification religieuse pour pouvoir dévoiler aux dominés la vérité
concrète de leur condition matérielle d’existence. C’est-à-dire, il faut
conscientiser les défavorisés en les amenant dans l’athéisme par
l’éducation, car avec le progrès de la société et l’aide de la science,
l’athéisme gagnera du terrain.
De toute façon, Marx estime que la religion disparaîtra quand la
cause de son apparition aura disparu, plus exactement, les hommes se
délivreront des préjugés religieux, lorsque le système capitaliste sera
détruit et que le communisme se réalise.
En plus de cela, Marx s'en explique plus en détail dans une page
qui ne laisse aucun doute sur sa pensée:
“… La religion est la conscience de soi et la valeur de l’homme qui, ou bien ne s’est pas encore conquis lui-même ou bien s’est déjà perdu à nouveau”1.
Cela veut dire que la religion ne fait pas l’homme, mais
inversement, c’est l’homme qui la fait véritablement. En ce sens,
l’homme n’est pas un être abstrait, installé hors du monde, mais
l’homme c’est le monde de l’homme, l’État, la société. Cet État, cette
société produisent la religion.
Toutefois, la religion est la théorie générale de ce monde ; ainsi,
elle est la réalisation fantastique de l’être humain parce que ce dernier ne
possède pas de réalité vraie. En effet, la lutte contre la religion est une
lutte contre ce monde dont la religion est l’arôme spirituel. La misère
religieuse est à la fois l’expression de la misère réelle et la protestation
1 Karl Marx, Contribution à la critique de la philosophie du droit de Hegel, pp. 51 et
55.
= 50 =
contre cette misère réelle. C’est pourquoi, la religion est le soupir de la
créature tourmentée, l’âme du monde sans cœur. De même, elle est
l’esprit de situation dépourvue d’esprit. En un mot, la religion est
l’opium du peuple.
L’exigence de son bonheur véritable c'est l'abolition de la
religion en tant que bonheur illusoire du peuple, c’est-à-dire le bonheur
occasionné par la jouissance matérielle, plus précisément, le bonheur de
la vie matérielle. À cet effet, la critique de la religion déçoit l’homme,
qu’il réfléchisse, qu’il agisse, qu’il élabore sa réalité, comme le fait un
homme déçu, devenu raisonnable, afin qu’il gravite autour de lui-même
et par là, autour de son véritable soleil.
En somme, la religion n’est que le soleil illusoire qui se meut
autour de l’homme tant qu’il se meut autour de lui-même. Pour Marx
donc, la religion est nocive au peuple, c’est-à-dire qu’elle est un opium
pour le peuple dans un monde absurde, celui de la misère et de
l’exploitation préservée dans la société et légalisée par l’État. La religion
sert donc de refuge.
À cause de cette circonstance, Marx nous conseille de nous
délivrer de la religion et de l’idée de Dieu. Au moment où tout cela aura
disparu, l’homme deviendra capable, sans doute, d’agir sur la nature en
vue d’une modification par le travail à son gré.
2.- Le point de vue de l’évolutionnisme et de la biologie
La première créature, ancêtre des hommes, apparaît sur la terre, il
y a trois millions d’années, suppose la paléontologie. Cet ancêtre humain
ou l’homme primitif fut découvert par l’étude d’une fossile trouvée au
lac Turkana au Kenya. Cet être s’est dégagé d’une souche première
apparentée au grand singe, et cet ancêtre a évolué jusqu’à devenir cette
créature appelée homme. L’évolution s’est passée très lentement, car si
le premier ancêtre de l’homme a vécu il y a trois millions d’années, les
hommes primitifs ou préhominiens , ont vécu seulement un million
= 51 =
d’années. Le temps passa et finalement apparut l’homme actuel, c’est-à-
dire, l’homo-sapiens sapiens.
Si l’on analyse la conception évolutionniste et biologiste de la
nature de Marx, on constate, en général, que l’homme est un produit de
l’évolution et non pas la créature de Dieu. Ce qui veut dire que dans la
nature, il y a de l’ordre et non pas du hasard. L’évolution permet
d’identifier l’homme des animaux. Ainsi, elle le fait apparaître comme
un être d’exception du fait que l’homme est le seul être capable
d’abstraction, d’invention, de pensée conceptuelle, qui peut agir en
fonction d’une fin, concevoir le bien et le mal, avoir une vie morale. Il
est un être capable de décision.
En plus de cela, l’homme est aussi par sa nature, un être social et
les influences sociales et affectives sont essentielles pour lui.
Pour conclure, d’après la conception matérialiste, l’homme est un
être vivant produit de l’évolution. Il vit dans l’univers et dans la nature.
Il est fait de corps, il est un être matériel, physique. Il se nourrit, se
chauffe, se vêt, construit un habitat, survit aux modifications du climat et
aux catastrophes naturelles. Donc, l’espèce humaine est née au sein de la
nature : avec et contre elle.
Si donc, à l’origine, par nature, l’homme est prisonnier, esclave
de la nature, de l’univers, par son travail, il a acquis la connaissance de
l’univers par son effort de dominer la nature, de la maîtriser et de la plier
à ses besoins. Ceci nous permettra d'approfondir dans le chapitre suivant
le fondement de l'idée et de la matière.
= 52 =
CHAPITRE II
APERÇU SUR LE FONDEMENT DE L’IDÉE ET DE LA MATIÈRE
I.- RELATION ENTRE L’IDÉE ET LA MATIÈRE
La question de savoir ce qui est l’élément primordial entre la
matière et l’idée est l’une des raisons qui opposent le matérialisme aux
autres doctrines, entre autres, l’idéalisme et la métaphysique. Puisque,
comme le disait Engels :
“La grande question fondamentale de toute philosophie, et spécialement de la philosophie moderne, est celle du rapport de la pensée à l’être, de l’esprit à la nature ; la question de savoir quel est l’élément primordial, l’esprit ou la nature… Selon qu’ils répondaient de telle ou telle façon à cette question, les philosophes se divisaient en deux grands camps. Ceux qui affirmaient le caractère primordial de l’esprit par rapport à la nature et qui admettaient par conséquent, en dernière instance, une création du monde de quelque espèce que ce fût… formaient le camp de l’idéalisme. Les autres qui considéraient la nature comme l’élément primordial, appartenaient au camp du matérialisme”1.
Toutefois, tout autre emploi des notions d’idéalisme et de
matérialisme, au sens philosophique, ne fait que créer la confusion.
1 Vladimir Ilitch Oulianov dit Lénine, Karl Marx, p. 11.
= 53 =
1.- Le point de vue de Marx
Karl Marx, en tant que matérialiste, a une vision tout à fait
contradictoire à la vision de l’idéaliste sur le rapport de la matière à
l’idée. À cet effet, il attaque particulièrement la pensée de Hegel. Marx
écrivait :
“Le mouvement de la pensée qu’il personnifie sous le nom de l’idée est le démiurge de la réalité…”1.
Dans ce sens, pour Hegel, c’est l’idée qui existe bien avant toutes
choses. Ainsi, elle est le créateur de toutes formes d’existence comme
celle du monde et celle de la nature de l’homme.
En d’autres termes, la philosophie hégélienne apprend que c’est
de l’idée que toutes formes d’existence trouvent leur origine. À défaut,
tout restera vide. Bref, l’idée est la première source de l’existence du
monde et de la matière, selon la vision hégélienne.
Cependant, Hegel considérait les objets et leur développement
comme de simples copies réalisées de l’idée. Ce qui veut dire, en
dernière analyse, que la formation des objets matériels n’est rien d’autre
que le produit de la manifestation extérieure du mouvement de la pensée
désignée sous le nom d’idée.
En face de cette circonstance, Marx n’hésite pas à apporter son
attaque contre la pensée hégélienne. Il disait :
“Pour moi, au contraire, le mouvement de la pensée n’est que le reflet du mouvement réel transporté et transposé dans le cerveau de l’homme”2.
Il n’est donc pas étonnant si Marx a critiqué la philosophie
hégélienne, puisque d’après la vision matérialiste, la nature avait déjà
son existence bien avant l’existence de l’idée et que cette dernière n’est
1 Karl Marx, Le Capital, critique de l’économie politique. Livre 1er, Le
développement de la production capitaliste, Paris, Éditions Sociales, 1976, Moscou, Éditions du Progrès, 1982, postface de la deuxième édition, titre abrégé : Le Capital.
2 Ibidem.
= 54 =
rien d’autre que le produit, la copie du mouvement extérieur de la nature.
Ce qui indique aussi que l’idée est une créature de la nature, en ce sens
que le développement de l’idée dépend nécessairement du
développement du mouvement réel de la nature.
2.- Le point de vue d’Engels
La matière joue ainsi un rôle capital vis-à-vis du rapport à
l’homme, en ce sens que ce dernier est un produit de l’évolution de la
matière. En plus, l’idée est aussi, d’après la logique des choses, un
produit de la matière, du fait, non seulement qu’elle se trouve dans le
cerveau de l’homme, mais aussi en tant qu’une manifestation extérieure
du mouvement, du développement de la nature. En un mot, tout dépend
de la matière.
La philosophie matérialiste affirme donc l’importance majeure
de l’existence de la nature avant tout. Malgré tout cela, bien que l’idée
soit une créature de la nature, cela ne veut pas dire que prendre en
considération la fonction du cerveau humain signifie une contradiction
avec le matérialisme. Au contraire, parce que d’après le naturaliste
Thomas Henry Huxley :
“tant que nous observons et pensons réellement, nous ne pouvons jamais sortir du matérialisme”1.
En parfait accord avec la philosophie matérialiste de Marx,
Engels, en l’exposant dans l’Anti-Dühring. À ce propos, Lénine écrivait :
“L’unité du monde ne consiste pas en son être… L’unité réelle du monde consiste en sa matérialité, et celle-ci se prouve… par un long et laborieux développement de la philosophie et de la science de la nature… Le mouvement est le mode d’existence de la matière. Jamais, et nulle part, il n’y a eu de matière sans mouvement, et il ne peut y en avoir… Mais si l’on demande
1 Naturaliste anglais (1825 - 1895). Défenseur du transformisme, il s’est attaché à
montrer les affinités entre l’homme et le singe. (Larousse classique, p. 578).
= 55 =
ensuite ce que sont la pensée et la conscience et d’où elles viennent, on trouve qu’elles sont des produits du cerveau humain et que l’homme est lui-même un produit de la nature, qui s’est développé dans et avec son milieu ; d’où il résulte naturellement que les productions du cerveau humain, qui en dernière analyse, sont aussi des produits de la nature, ne sont pas en contradiction, mais en conformité avec l’ensemble de la nature”1.
Dans ce passage, il est clair qu’Engels confirme le caractère
indépendant et primordial de la matière, en ce sens que l’intégrité du
monde ne signifie nullement l’achèvement de l’œuvre de l’idée du
monde, ni l’achèvement de l’œuvre de l’essence du monde. Au contraire,
l’intégrité du monde consiste surtout dans le caractère matériel du monde
lui-même. Cette vision est donc prouvée, partagée par une longue
investigation de la philosophie moderne, comme celle du matérialisme,
plus particulièrement, et de la science de la nature.
II.- MARX ET LA CRITIQUE DE LA MÉTAPHYSIQUE
Tout ce qui existe au-delà de la physique signifie la
métaphysique, autrement dit, en dehors de la réalité matérielle ou
sensible. Elle est comme une réflexion sur l’être, sur les principes
premiers et fondateurs d’une tendance inévitable de la raison. Elle est
aussi comme une recherche de la vérité.
1.- Au niveau de l’Être
Pour Platon et en l'occurrence pour la plupart des
métaphysiciens, le monde connaît une division en deux, à savoir, le
monde sensible et le monde intelligible.
Selon Platon, le “sensible” concerne toutes les formes d’objets
palpables, c’est-à-dire tout ce qu’on peut toucher, tout ce qu’on peut voir
et tout ce qu’on peut sentir. Bref, tout ce qui est perçu par les organes
des sens. 1 Vladimir Ilitch Oulianov dit Lénine, Karl MARX, p. 10.
= 56 =
Toutefois, il faut souligner que selon la conception platonicienne,
le monde sensible, en tant que tel, n’est pas vraiment un monde réel qui
peut être considéré comme une véritable réalité, du fait de son caractère
changeant, singulier et multiple.
En effet, il ne peut pas faire l’objet de connaissance véritable à
laquelle correspondent nos opinions. C’est pourquoi Platon dit :
“Il n’y a pas de science de ce qui est en perpétuel mouvement”1.
C’est la raison pour laquelle le sensible est considéré par Platon
comme une source d’erreurs, puisqu’il est impossible d’avoir une
connaissance fiable sur ce qui change à chaque instant.
C'est la raison pour laquelle, Platon a fait intervenir l’existence
du monde intelligible. Étymologiquement, l’intelligible signifie tout ce
qui est uniquement saisi par l’intelligence, par l’esprit, ou ce qui est
concevable par la raison. Autrement dit, l’intelligible est uniquement
conçu par l’esprit, saisissable par la raison et est considéré comme une
réalité véritable à cause de son caractère universel, éternel, fixe et
immuable, donc certain.
Si on analyse à fond la conception platonicienne de la
dichotomie du monde, on trouve qu’il y a deux différents niveaux de
l’être, à savoir, l’être sensible, considéré par Platon comme le plus bas
degré de l’être et l’être intelligible qui est considéré comme le plus haut
niveau de l’être.
En face de cette circonstance, le matérialiste ne baisse pas les
bras pour défendre son opinion selon laquelle la réalité véritable se
trouve certainement dans le monde sensible, dans le monde visible,
c’est-à-dire dans le monde perçu par les sens. Ce qui veut tout
simplement dire que la raison et la pensée de l’homme ne sont que des
produits de la nature du monde sensible.
1 Platon, Euthydème, Méxène, Menon, Cratyle, pp. 13 - 14.
= 57 =
Différemment de la pensée de Platon, le matérialiste insiste
surtout sur l’importance du mouvement et du changement de la nature
puisque sans eux, il est impossible d’avoir une nouvelle création, non
seulement au niveau de la nature elle-même, mais aussi au niveau de
l’idée.
En guise de conclusion, le matérialiste trouve dans la conception
métaphysique un gène fictif de la réalité existante alors qu’il n’existe
pourtant pas. Par exemple, le monde des idées de Platon est la source du
monde matériel, selon lui. Mais effectivement ce monde est utopique.
C’est à cause de cela que l’homme est plongé dans l’illusion totale. On
peut dire même que l’enseignement platonicien fait marcher l’homme à
l’aveuglette, c’est-à-dire qu’au lieu d’apprendre ce qui est devant, autour
de lui, Platon, au contraire, l’amène dans des représentations
fantasmatiques.
2.- Au niveau de la connaissance
L’étude de la ligne dans le livre VI de La République1 nous
explique clairement le rapport du sensible à l’intelligible. Il s’agit plus
particulièrement du rapport d’obscurité en ce sens que le sensible
correspond à l’opinion. Ce qui veut dire qu’il est le plus bas degré de la
connaissance. Il peut donc faire surgir des erreurs.
En effet, l’opinion est le premier degré de la connaissance ayant
pour objet le sensible et le devenir. Ainsi, l’opinion se caractérise par
l’inconsistance et l’ambiguïté. En un mot, l’opinion fausse n’est pas
claire, donc elle est mensongère et obscure.
Cependant, au niveau de la connaissance, on peut dire que le
monde sensible ne peut être l’objet de science véritable, à cause de son
caractère toujours changeant qui ne nous permet pas d’accéder à la
connaissance vraie. On ne peut en former que des opinions fausses, qui
1 Platon, La République, 509 e - 510 e.
= 58 =
sont incapables de se justifier elles-mêmes, car elles sont en
contradiction permanente.
Selon Platon, la véritable science est fixe et immuable, sûre et
certaine. Ce qui veut dire en ce sens que la connaissance intelligible est
tout à fait constante et permanente car :
“Il n’y a pas, dit-il, de science que de ce qui est fixe et immuable”1.
Ainsi,
“Il n’est pas possible de saisir un objet qui change”2.
Tout cela signifie que d’après la philosophie de Platon, on ne
peut avoir de connaissance vraie qu’en dehors du monde sensible, plus
précisément, dans le monde intelligible.
D’après le naturaliste John Locke, l’unique source de la
connaissance ce sont les sens, les expériences et la répétition des
expériences. Cela veut dire que pour l’empirisme et la science, la
connaissance ne se trouve qu’au niveau du monde sensible et elle est
incontestablement saisie par les sens et acquise par l’expérience. En
d’autres termes, c’est l’expérience sensible qui peut être la seule source
de la connaissance vraie. Ce qui se prouve à travers la vie quotidienne
des hommes.
Voici deux exemples : comment pouvoir dire que le sucre est
doux sans l’avoir goûté ? Et comment pouvoir dire que la glace est si
froide sans l’avoir touchée ? Ce qui signifie que la connaissance vraie
n’est acquise qu’à travers les sens. Contrairement à Descartes, affirmant
que nos sens nous trompent, le matérialiste et l’empiriste soutiennent que
nos sens ne nous trompent jamais.
En bref, selon la conception matérialiste, le monde sensible
dispose de la réalité vraie. Ainsi, il est uniquement la seule source de
1 Platon, Euthydème, Ménéxène, Menon, Cratyle, pp. 13 - 14. 2 Eugène Régis Mangalaza, Lire et comprendre Platon, p. 35.
= 59 =
toutes sortes de connaissances humaines, car en dehors, tout est
pratiquement impossible.
Le philosophe à coup de marteau Nietzsche va nous faire découvrir un nouveau sens de la métaphysique.
III.- NIETZSCHE ET LE RENVERSEMENT DE LA
MÉTAPHYSIQUE
La philosophie de Nietzsche est une dénonciation de l’idéalisme
et un renversement de la métaphysique puisque, d’après lui, cette
dernière est une fable, un mensonge, un produit de la haine de la vie, en
ce sens qu’elle se caractérise par la condamnation de ce monde du
devenir, du changement et l’invention d’un au-delà qui serait le monde
vrai, le monde de l’être.
En effet, la métaphysique forge la fiction d’un dualisme :
dualisme d’un monde apparent qui est le monde sensible et d’un monde
authentique, idéal. Ce qui revient à dire qu’elle consiste à discréditer le
monde des sens : le monde sensible est le monde de l’illusion, de la
contradiction :
“Toute la diversité et le bariolage du monde empirique, dit Nietzsche, ses qualités changeantes, l’ordre qui en règle le flux et le reflux, tout cela est impitoyablement rejeté comme pure apparence et illusion”1.
Est construite ainsi la fable d’un arrière-monde de la vérité.
Donc, par opposition au monde sensible qui est le monde de la
souffrance et du mal, l’arrière-monde est le monde du bien et le bonheur
suprême ne peut se trouver que dans ce monde idéal. Ainsi, l’être au-delà
du monde sensible est identifié au Bien. “Le monde vrai serait le
bon…”2
1 Friedrich Nietzsche, La naissance de la philosophie à l’époque de la tragédie
grecque, in Vie et vérité, Paris, Gallimard, 1951; p. 29. 2 Friedrich Nietzsche, La volonté de puissance, Paris, Librairie Générale Française,
1991, tome I, livre I, § 182.
= 60 =
1.- Critique des origines de la métaphysique
Nietzsche renverse et dépasse la métaphysique par une critique
radicale. La construction d’un arrière-monde, d’un au-delà du monde,
n’est, en effet, que la conséquence du refus de la seule réalité : la réalité
du monde du devenir. Et la métaphysique n’est ainsi que “déguisement”
du néant, car selon l’adage :
“L’homme cherche un principe au nom duquel il puisse mépriser l’homme ; il invente un autre monde pour pouvoir calomnier et salir ce monde-ci, en fait, il ne saisit jamais que le néant et fait de ce néant un Dieu, une vérité appelés à juger et à condamner cette existence-ci”1.
Cependant, le refus de la réalité, le devenir, a sa source dans la
haine de la vie. Le monde du devenir est le monde de l’imprévisible, du
changement, de l’incertain, et cette imprévisibilité, ce changement
engendrent la peur chez l’homme craintif, faible. D’où l’affirmation
selon laquelle :
“Ceux qui sont las, souffrants ou craintifs, entendent par “bonheur suprême” l’immortalité, le repos, quelque chose de très voisin du sommeil profond…”2
Cela veut dire que la peur et la douleur qui sont à l’origine des
raisonnements métaphysiques et de la fiction d’un au-delà, arrière-
monde qui serait le monde du permanent parce que :
“Un monde qui ne puisse ni se contredire, ni tromper, ni changer, un monde vrai où l’on ne souffre pas”3.
En d’autres termes, le monde de l’au-delà sera un monde
meilleur. Il sera ainsi le monde du bien. Cette projection des valeurs
morales dans un arrière-monde vient là, encore d’une dépréciation de ce
monde-ci, d’un dénigrement du changement et de la multiplicité, d’une
impuissance devant la vie et la lutte qu’elle exige. Donc, 1 Friedrich Nietzsche, La volonté de puissance, tome I, livre I, § 210. 2 Friedrich Nietzsche, Œuvres posthumes, § 133, in Vie et vérité, pp. 33-34. 3 Nietzsche, La volonté de puissance, tome II, Introduction, § 6.
= 61 =
“Le vrai monde serait le bon parce que l’apparence, le changement, la contradiction, la lutte sont jugés immoraux ; besoin d’un monde d’où ils seraient absents”1.
Parce que c’est l’homme faible devant la vie, le “raté”, c’est-à-
dire celui qui dénigre la vie, les valeurs vitales de la lutte, celui qui n’a
plus de force devant la vie, qui va consacrer toutes les valeurs opposées à
ce qu’exige la lutte vitale et les projeter dans un monde autre qui en sera
la justification. Ainsi, pour se venger des esprits plus forts que le sien, le
raté a besoin de la moralité du manteau du silence supérieur, de
l’affabilité de la douceur, et d’autres drapés idéalistes sous lesquels nous
voyons aller les contempteurs incurables d’eux-mêmes qui sont les
incurables vaniteux.
En plus, l’homme se venge de la vie et des valeurs vitales. La
morale est une expression de la volonté de vengeance et ainsi, l’origine
du mensonge métaphysique.
À l’origine des contradictions métaphysiques, Nietzsche
démontre donc la présence d’une haine de la vie. Il dit :
“douleur et impuissance ont créé tous les outre-monde”2.
D’où le terme “nihilisme” de Nietzsche, c’est-à-dire la volonté de
nier la vie. Ainsi, la métaphysique est le produit d’une vie déclinante,
l’expression de la décadence, d’une lassitude de vivre, voire d’une
volonté de ne pas vivre.
2.- L’affirmation de la vie et l’éternel retour
Le renversement de la métaphysique et l'affirmation du devenir
comme seule réalité, c'est la lutte contre le nihilisme, contre la haine de
la vie. L’homme fort affirme la réalité, la vie et le devenir. Donc, d’après
la philosophie de Nietzsche, l’affirmation de la vie s’exprime dans la
1 Friedrich Nietzsche, La volonté de puissance, tome I, § 182. 2 Friedrich Nietzsche, Ainsi parlait Zarathoustra, I, p. 4.
= 62 =
doctrine de l’éternel retour , “au lieu de métaphysique et de religion, la
doctrine du retour éternel”1.
C'est-à-dire que toutes choses reviennent éternellement et nous
sommes toujours avec elles. Par exemple, la moindre douleur, le
moindre plaisir, la moindre pensée, le moindre soupir, tout de la vie
reviendra encore, tout ce qu’il y a en elle d’indiciblement grand et
d’indiciblement petit, tout reviendra et reviendra dans le même ordre ;
c’est pour cette raison donc que la philosophie de Nietzsche exclut toute
idée d’un être ou d’une idée absolue et universelle.
Toutefois, l’affirmation de la vie est inséparable de l’affirmation
de l’éternel retour, de tout le courant du devenir. L’homme fort,
autrement dit, le surhomme, est celui qui parvient à se dépasser lui-
même, c’est-à-dire il dépasse sa faiblesse par une volonté de vie qui est
la volonté de puissance ; il est aussi celui qui affirme chaque moment,
qui transfigure le monde par cette affirmation.
En bref, il est donc clair que la doctrine matérialiste, plus
particulièrement le marxisme est catégoriquement optimiste, non
seulement sur la qualité primordiale de la nature vis-à-vis de l’idée, mais
aussi sur l’importance du rapport qui existe entre la nature et l’homme.
En ce sens que, selon Marx, en tant qu’être du besoin, en tant qu’être du
progrès, l’homme transforme la nature par le biais du travail et de
l’action. Maintenant, on va voir le matérialisme dialectique et le
matérialisme historique qui sont les principes de la philosophie marxiste.
Ainsi finit la deuxième partie de ce travail, nous allons aborder
maintenant la troisième partie intitulée Les principes du matérialisme
marxiste.
1 Friedrich Nietzsche, La volonté de puissance, tome II, Introduction, § 19.
= 63 =
TROISIÈME PARTIE
LES PRINCIPES DU MATÉRIALISME MARXISTE
= 64 =
CHAPITRE I
LE MATÉRIALISME DIALECTIQUE
Le matérialisme dialectique créé au milieu du XIXe siècle par
Marx et Engels fut la forme la plus avancée et la plus conséquente du
matérialisme. Non seulement il corrigea les insuffisances déjà
mentionnées de l’ancien matérialisme, mais il dépassa la conception
idéaliste de la société, commune à tous ses représentants.
Au cours de l’histoire ultérieure du matérialisme, deux lignes
foncièrement distinctes se sont dégagées avec netteté : l’une c’est le
développement dialectique et historique, l’autre c’est l’apparition de
multiples variétés de matérialisme vulgaire et simple.
Parmi ces dernières, la plus typique fut une sorte de matérialisme
vulgaire, proche du positivisme, variante du matérialisme, apparue à la
charnière des XIXe et XXe siècles, qui dénatura le matérialisme
dialectique, s’inspira, elle aussi du positivisme. Dans la seconde moitié
du XIXe siècle, le matérialisme venu à maturité s’est avéré incompatible
avec les intérêts des classes étriquées de la bourgeoisie.
Les philosophes bourgeois le taxent d’amoralisme, l’identifiant à
un matérialisme simpliste. Certains idéalistes (Camap, Bachelard, Sartre)
prétendent représenter le matérialisme « vrai » et le « plus moderne ».
Estompant, dans bien des cas, l’opposition du matérialisme et de
l’idéalisme, les philosophes bourgeois ont recours, non seulement au
positivisme et au néoréalisme, mais à des constructions aussi amorphes
et ambiguës que l’est l’actuel naturalisme américain.
= 65 =
On constate chez les chercheurs progressistes contemporains, une
évolution du matérialisme naturaliste, vers le matérialisme et finalement
le matérialisme dialectique (Langevin, Joliot, Curie et d’autres…). Le
développement du matérialisme dialectique se caractérise notamment par
un enrichissement constant d’idées nouvelles. L’étape actuelle de la
science exige, en effet, que de nombreux chercheurs naturalistes
deviennent des partisans du matérialisme dialectique.
Par ailleurs, l’évolution de la pratique socio-historique et celle de
la science requièrent que la philosophie du matérialisme elle-même se
développe et se concrétise perpétuellement. C’est ce qu’elle fait dans une
lutte incessante contre les nouvelles variantes d’idéalisme.
Le matérialisme dialectique, à la suite de l’enseignement de
Hegel, se réduit aux trois lois suivantes : la loi de l’unité et de la lutte des
contraires, la loi du passage des changements quantitatifs à des
changements qualitatifs et la loi de la négation de la négation. C’est
encore au mérite de Hegel de les avoir découvertes, mais elles sont
développées d’une manière idéaliste. Pour lui, elles sont de pures lois de
la pensée. Mais Marx va transposer dans le monde vivant les lois de la
dialectique.
I.- HISTOIRE DE LA DIALECTIQUE
Le mot dialectique a été déterminé ou défini par plusieurs
philosophes. Chaque conception dialectique au cours de l’histoire est
connue par son développement progressiste. En effet, la dialectique est une science qui a pour objet l’étude
des lois les plus générales du développement de la nature, de la société et
de la pensée. Une longue histoire précède la conception scientifique de la
dialectique, et pour aboutir à la notion dialectique marxiste, il a fallu
transformer, dépasser le sens primitif de ce terme.
= 66 =
1.- Les dialectiques classiques
Avant, la dialectique désignait une méthode de discussion par
question et réponse fondée par Socrate. Chez les sophistes, la dialectique
socratique, c’est le mouvement habile du discours afin de persuader le
plus possible, même si les choses sont contraires à la vérité : c’est de la
rhétorique.
Socrate avance un argument ou une définition au départ, mais qui
sera nié à la fin de la discussion. Il trouve l’intérêt dans l’attente. La
vérité capable de résister, de critiquer un tel schéma de la dialectique,
garde encore sa valeur. On trouve une idée analogue dans la dialectique
moderne.
Les dialectiques anciennes soulignaient déjà le caractère
changeant de tout ce qui existe, elle concevait la réalité comme un
processus, le passage de toute propriété en son contraire. Par exemple,
Héraclite fut considéré comme le premier dialecticien, il est connu pour
avoir élaboré une théorie du devenir fondée sur l’idée des contradictions.
Du conflit des contradictions naît un accord, une harmonie. Tout est en
mouvement perpétuel.
Aristote a entrepris d’analyser les contradictions que soulevait la
tentative de penser les notions de mouvement et de pluralité. Il a lui-
même distingué la dialectique (science des opinions probables) de
l’analytique (science de la démonstration).
La dialectique de Platon, comme le chemin de la connaissance
vers l’intelligible, vers la science, vers l’immuable, vers la contemplation
des idées éternelles, c’est la dialectique ascendante.
Il faut dépasser la dispersion dans le sensible, pour trouver le
chemin de l’intelligible, le repos où l’un et le multiple sont
simultanément donnés. L’achèvement de la montée se trouve dans la
contemplation, dans la vision d’un être transcendant, immuable.
= 67 =
Malheureusement, le dynamisme de sa dialectique ne concerne que
l’esprit, l’idée, en négligeant le sensible.
Selon Marx, une telle dialectique doit réétudier et se dépasser
pour trouver sa valeur exacte dans la connaissance du monde objectif et
son développement, comme chez Hegel.
Nous ferons une brève incursion au Moyen Âge, pour connaître
un peu la dialectique de cette époque. 2.- La conception dialectique au Moyen Âge
Au Moyen Âge, la scolastique donne le nom de dialectique à la
logique formelle qu’elle oppose à la rhétorique. Cette logique formelle
est une science qui étudie les formes de la pensée (concepts, jugements,
raisonnements, démonstrations), quant à leur structure logique, c’est-à-
dire abstraction faite du contenu concret de la pensée, afin de dégager le
mode général de relation entre les composantes de ce contenu.
Sa tâche principale consiste à édicter des lois et des principes
dont le respect constitue une condition indispensable pour parvenir à des
conclusions vraies qui fondent toute connaissance humaine. La logique
formelle (dialectique scolastique du Moyen Âge) tire son origine des
travaux d’Aristote qui créa la syllogistique. Une contribution importante
y fut apportée par les premiers stoïciens, au Moyen Âge, par les
scolastiques Duns Scot et Guillaume d’Occam.
Mais cette conception dialectique se poursuit à l’époque de la
Renaissance. Le sous-titre suivant nous reportera à cette époque.
3.- La conception dialectique à l’époque de la
Renaissance
À l’époque de la Renaissance, Nicolas de Cuse et Giordano
Bruno, avancent l’idée dialectique de la coïncidence des contraires.
Giordano Bruno développait également une série de thèses
dialectiques relative à l’unité, à la cohérence et au mouvement universel
= 68 =
dans la nature ainsi qu’à la convergence des contraires dans l’infiniment
grand et l’infiniment petit.
Ainsi, pour Nicolas de Cuse, la coïncidence des contraires vient
de la conception de la philosophie chrétienne, une doctrine plaçant Dieu
au-dessus des contraires. Tous les contraires coïncident en Dieu : le fini
et l’infini, le plus petit et le plus grand, l’unique et le multiple, etc. La
doctrine de Nicolas de Cuse relative à la coïncidence des contraires en
Dieu, contient, en dépit de sa teneur mystique et idéaliste, plusieurs idées
fécondes : la critique du caractère borné des oppositions discursives ;
l’anticipation du concept des quantités infinitésimales ; la question des
limites de l’application de la loi de la contradiction aux connaissances
mathématiques.
Ce bref aperçu de la dialectique à l’époque de la Renaissance
nous conduit aux temps modernes. C’est l’objet du développement
suivant. 4.- La dialectique dans les temps modernes
Dans les temps modernes, Descartes et Spinoza furent les
dialecticiens les plus connus, et ils donnèrent malgré le règne de la
métaphysique, des modèles de raisonnement dialectique.
Descartes, sur le développement de la connaissance, place au
premier plan le doute. Selon lui, il faut d’abord mettre en doute ce qui
existe. Ce doute n’est nullement inspiré par la conviction que tout ce qui
existe est inconnaissable. C’est uniquement un moyen de remonter à la
vérité première et incontestable de toute connaissance, vérité qu’il
résume dans cette affirmation : « Cogito, ergo sum ». Partant de là, il
tente de démontrer l’existence de Dieu, puis de fonder sa conviction en
la réalité du monde extérieur.
Les théories de Descartes relatives à l’authenticité immédiate de
la conscience de soi, aux idées innées (parmi lesquelles il rangeait l’idée
de Dieu et celle de la substance spirituelle ou corporelle) ont influencé la
= 69 =
philosophie idéaliste postérieure et ont été critiquées par les partisans du
matérialisme.
Spinoza, imitant à la dialectique de Descartes, interprète sa
théorie de la connaissance à la manière métaphysique. Il place le savoir
intellectuel fondé sur l’esprit au-dessus du savoir sensible, inférieur et a
abaissé le rôle de l’expérience
On peut dire aussi que la dialectique métaphysique à l’époque
moderne se rapproche de la dialectique réelle, mais elle reste
métaphysique ; on peut le dire antidialectique.
« À l’époque moderne, la notion de métaphysique apparaît en tant que mode de pensée antidialectique résultant d’une connaissance unilatérale, dans laquelle les choses et les événements sont considérés comme immuables et indépendants les uns des autres, tandis que le rôle des contradictions internes en tant que source de développement de la nature et de la société est méconnu ».1
Marx et Engels ont montré l’inconsistance scientifique du mode
de pensée métaphysique et lui ont opposé la méthode dialectique
matérialiste, en s’appuyant sur l’ensemble des données formées par les
sciences et par l’évolution sociale. Lénine a montré qu’ériger en absolu
tel ou tel aspect ou moment du processus cognitif, c’est faire de la
métaphysique.
5.- La dialectique du XVIII e siècle
Les idées dialectiques abondent en France au XVIIIe siècle, chez
Rousseau et Diderot. Pour le premier, les contradictions sont une
condition du développement historique. La dialectique de Rousseau
aboutit à professer le déisme. Il croyait non seulement à l’existence de
Dieu, mais aussi à l’immortalité de l’âme. Il considérait la matière et
l’esprit comme deux principes existants de toute éternité (dualisme).
1 Dictionnaire philosophique, p. 320.
= 70 =
Sensualité dans la théorie de la connaissance (sensualisme), il admettait
néanmoins l’innéité des idées morales.
En outre, Diderot étudie les contradictions de la conscience
sociale chez les contemporains. En principe, sa dialectique est
sensualiste, c'est-à-dire que la source de la connaissance est la sensation.
Il apporta des éléments de dialectique, idée d’une relation entre la
matière et le mouvement, la corrélation des processus naturels, le
caractère éternellement changeant de toutes les formes dans la nature.
Au sujet de la manière dont le mouvement mécanique des
particules matérielles est susceptible d’engendrer le contenu spécifique
des sensations, Diderot défend l’idée d’une sensibilité générale de la
matière.
Développant ce point de vue, il esquisse une théorie matérialiste
des fonctions psychiques, anticipant sur la théorie des réflexes, et les
hommes et les animaux sont des instruments pourvus de la faculté de
sentir et de se souvenir.
Sa théorie de la connaissance rejette la thèse idéaliste du
caractère spontané de la pensée. Toute spéculation a sa source dans la
nature et nous ne faisons qu’enregistrer les phénomènes connus
empiriquement entre lesquels, existe une relation soit nécessaire, soit
conventionnelle.
Diderot développe la thèse de Bacon selon laquelle la
connaissance dont la source est tout empirique, n’a point pour finalité la
vérité en soi, mais la recherche des moyens de rendre l’homme plus
parfait et d’accroître sa puissance.
Les fondateurs du marxisme tenaient en haute estime son œuvre
et ses théories. On trouve chez lui, écrivait Engels, des « chefs-d’œuvre
de la dialectique ».
« Diderot, dit Lénine, est parvenu jusqu’au seuil de la conception moderne du matérialisme et « a
= 71 =
opposé nettement les principales tendance philosophique »1.
S’il en ainsi de la dialectique au XVIIIe siècle, nous allons voir
maintenant les trois lois fondamentales régissant le matérialisme
dialectique
II.- LES TROIS LOIS FONDAMENTALES DU
MATÉRIALISME DIALECTIQUE
Le matérialisme dialectique, comme nous l’avons déjà dit plus
haut, est constitué par trois lois fondamentales, telles que, la loi de
l’unité et de la lutte des contraires, la loi du passage des changements
quantitatifs à des changements qualitatifs et la loi de la négation de la
négation.
Le premier fondateur de ces termes est Hegel, mais le problème,
il l’explique d’une manière idéaliste. Marx va transformer dans le monde
vivant les lois de la dialectique ? À ce propos, voici ce que Engels, l’ami
de Marx, écrit :
« La dialectique est non seulement la science théorique de la pensée, mais aussi science du développement de la nature et de la société. »2
1- Loi de l’unité et de la lutte des contraires
La loi de l’unité, c’est la loi générale de la réalité et de la
connaissance par la pensée humaine exprimant l’essence de la
dialectique matérialiste.
Chaque objet concret contient des contraires. Par contraires, le
matérialisme dialectique entend des éléments, des aspects, etc., qui se
trouvent dans une unité indissoluble, qui s’excluent mutuellement et cela
non seulement sous divers rapports, mais encore sous un réel et même 1 Vladimir Ilitch Oulianov dit Lénine, Œuvres, t. 14, p. 36. 2 Friedrich Engels, Anti-Dürhing, p. 220.
= 72 =
rapport, c'est-à-dire qu’ils s’interpénètrent. Il n’existe pas de contraires
sans unité comme il n’existe pas d’unité sans contraires : par exemple, la
coexistence de la bourgeoisie et du prolétariat.
Ces deux classes forment la société capitaliste, elles sont
constamment en lutte et en conflit. La lutte va aboutir à un
bouleversement révolutionnaire, le prolétariat s’émancipe. La lutte des
contraires conditionne la vie future et harmonieuse de l’humanité.
Dans cette étude, l’unité contient en soi la différence, c'est-à-dire
le prolétariat et l’autre classe différente de la bourgeoisie. Pourtant, il est
son complément. On doit ici vérifier que la véracité de la dialectique au
sens marxien et hégélien ne se limite pas seulement à l’origine de la
pensée subjective, mais elle s’étend au processus de l’histoire de la
société et de la nature.
L’unité des contraires est relative, temporaire, alors que leur lutte
est absolue. Cette loi explique la source interne objective de tout
mouvement et, sans recourir à une force étrangère, permet de concevoir
le mouvement comme automouvement. La pensée dialectique ne
morcelle pas le tout, en isolant abstraitement les extrêmes, mais au
contraire, elle appréhende le tout comme organique, comme un système
dans lequel le contraire s’interpénètre en conditionnant tout le processus
de développement. C’est à travers cette loi que s’exprime sous sa forme
la plus concentrée, l’opposition de la pensée dialectique à la pensée
métaphysique spéculative, qui interprète la source du mouvement
comme étant seulement distincte du mouvement lui-même et comme lui
étant extérieur, et l’unité comme quelque chose qui coexiste avec la
variété.
Toute l’histoire de la dialectique est celle de la lutte menée
autour de l’unité des contraires comme Héraclite, Nicolas de Cuse,
Bruno, Kant et Hegel faisaient l’analyse des contradictions.
Le marxisme a interprété et développé la loi de l’unité et de la
lutte des contraires comme loi de la connaissance et loi du monde
objectif d’un point de vue matérialiste. Aborder cette loi à partir du
= 73 =
principe de la coïncidence de la dialectique, de la logique et de la théorie
de la connaissance, revient à combattre les tentatives de la réduire à la
somme des exemples, et à la concevoir comme loi générale de l’être et
de la pensée.
L’universalité de cette loi est la base de ses fonctions
méthodologiques dans le processus de la connaissance. La solution des
contradictions fait avancer la recherche selon la logique de l’objet lui-
même, et est un moyen rationnel d’élaboration des concepts nouveaux et
de leur synthèse.
La contradiction dialectique dans la connaissance ne se réduit
pas à l’opposition de la thèse à l’antithèse. Elle consiste dans le
mouvement vers la solution. Comprendre une contradiction dialectique
veut dire comprendre comment elle se développe et se résout. Le
processus de développement se réalise à travers le heurt des contraires
tant intérieurs qu’extérieurs.
La dialectique envisage les contraires extérieurs non point
comme des essences au départ différentes par nature, mais comme le
résultat du dédoublement de l’un, et en dernière analyse, comme
émanant des contraires internes.
La théorie marxiste de l’évolution sociale est fondée sur cette loi.
Sur l’étude des contradictions de la société, elle était la thèse de la lutte
des classes comme force motrice du développement de la société divisée
en classes et déduit de cette thèse ses conclusions révolutionnaires. Le
socialisme est le résultat logique du développement et de la révolution au
moyen de la révolution sociale des contradictions du capitalisme. Quant
aux contradictions et aux formes de leur résolution, elles sont
extrêmement variées. Le socialisme se développe aussi par voie de
contradictions, mais ces dernières ont un caractère spécifique
(contradictions antagoniques et non antagoniques).
La catégorie de la contradiction dialectique revêt également une
grande importance méthodologique pour les sciences naturelles
contemporaines, qui se heurtent de plus en plus souvent à la nature
= 74 =
contradictoire des objets. Le marxisme-léninisme a fait de la catégorie de
la contradiction le propre d’un mode de pensée fondé sur une
assimilation intégrale du monde par un homme qui n’a point à craindre
les contradictions ni à empêcher leur résolution. L’importance
conceptuelle et informative de cette loi, selon laquelle aucun degré de
développement ni aucun acquis de l’histoire ne devraient être considérés
comme définitifs, réside aussi dans le fait qu’elle oriente sur l’œuvre de
création infinie.
Voilà ce qui concerne la première loi, la loi de l’unité et de la
lutte des contraires. Actuellement, nous allons essayer de voir un peu
plus en profondeur la loi du passage des changements quantitatifs à des
changements qualitatifs. 2- Loi du passage des changements quantitatifs à des
changements qualitatifs
La deuxième loi qui fait partie du matérialisme dialectique, c’est
la loi du passage des changements quantitatifs à des changements
qualitatifs. Dans cette loi, le marxisme veut démontrer que les sociétés
de classes ont besoin de transformation et d’être succédées par la classe
prolétarienne.
Engels prenait comme exemple l’eau. Un certain changement de
température fait passer l’eau de l’état liquide, soit à l’état solide, soit à
l’état gazeux. La dialectique marxiste n’est rien d’autre que la
dialectique hégélienne remise sur ses pieds et appliquée au réel. Fidèles
au principe du matérialisme dialectique, Marx et Engels se montrent
optimistes qu’un jour, la classe anciennement opprimée aura tous les
pouvoirs, puisque rien n’existe éternellement. Ce qui est puissant
deviendra un jour impuissant. De la réalité mourante naît une nouvelle
réalité plus viable. La démocratie prolétarienne chassera de l’histoire la
démocratie bourgeoise. Seule la classe prolétarienne pourra se charger de
réaliser une transformation sociale radicale.
En réalité, La loi du passage des changements quantitatifs à des
changements qualitatifs est une des lois fondamentales de la dialectique
= 75 =
expliquant le mécanisme du mouvement et du développement. D’après
cette loi universelle du développement, une accumulation graduelle de
changements quantitatifs imperceptibles, aboutit, à une certaine étape, à
des changements qualitatifs radicaux, à un bond de l’ancienne qualité à
une qualité nouvelle (qualité et quantité, mesure, bond). Cette loi est
inhérente à tous les processus du développement dans la nature, la
société de la pensée. Elle permet de comprendre la conception
dialectique du développement et ce qui la distingue des diverses
conceptions métaphysiques qui réduisent le mouvement et le
développement uniquement à des changements quantitatifs de ce qui
existe sans destruction de l’ancien ni création du nouveau, le
développement de toute science (physique, chimie, biologie, etc.).
L’expérience historique universelle de transformation sociale intervenue
au cours des dernières décennies confirme et enrichit la théorie
dialectique du développement en tant que processus des changements
qualitatifs consécutifs aux changements quantitatifs.
Les changements quantitatifs et qualitatifs sont interdépendants
et se déterminent les uns les autres ; on assiste non seulement au passage
de la quantité à la qualité, mais aussi au processus inverse, à un
changement des caractéristiques quantitatives par suite du changement
de la qualité des objets et des phénomènes.
C’est ainsi que le passage du capitalisme au socialisme a
provoqué un changement considérable des indices quantitatifs ;
développement économique et culturel plus rapide, croissance de revenu
national, etc. Les changements quantitatifs et qualitatifs ne sont pas
absolus. Les mêmes changements sont qualitatifs par rapport à certaines
propriétés (moins générales) et quantitatifs par rapport à d’autres
propriétés (plus générales). Le passage du capitalisme du stade pré-
monopoliste au stade monopoliste n’est donc pas un changement
qualitatif absolu : la qualité du capitalisme n’a changé que dans la
mesure où il y a acquis certains nouveaux traits et propriétés substantiels,
sa nature étant restée la même.
= 76 =
Tout processus de développement est à la fois continu et
discontinu. Ceci dit, la discontinuité se manifeste sous la forme d’un
bond qualitatif et la continuité sous celle d’un changement quantitatif
(évolution et révolution).
Le marxisme démontre le caractère antiscientifique des vues des
idéologues bourgeois et des révisionnistes de droite, qui ramènent le
développement de la société à une lente évolution, à de petites réformes,
et nient les bonds, les bouleversements révolutionnaires, ainsi que des
idées avancées par les anarchistes et les révisionnistes de « gauche », qui
méprisent la nécessité de longs efforts persévérants pour rassembler les
forces, organiser et préparer les masses, en vue d’actions
révolutionnaires décisives.
Hegel fut le premier à formuler cette loi. Or, les catégories de la
quantité, de la qualité et leur passage réciproque, se présentent chez lui,
d’abord, sous une forme abstraite dans le cadre de l’idée absolue et
seulement ensuite, dans la nature.
La philosophie marxiste considère cette loi, non comme une
prémisse de la construction du monde, mais comme le résultat de l’étude
du monde, comme le reflet de ce qui se passe en réalité. Étant une loi des
plus importantes du monde objectif, elle est à la fois un principe
important de la connaissance du monde et de sa transformation
consciente. À mesure que changent les conditions de l’évolution sociale,
on voit changer également les formes de la manifestation des lois de la
dialectique.
Le passage des changements quantitatifs à des changements
qualitatifs prend la forme de révolutions politiques : les changements
sociaux s’y opèrent graduellement en éliminant ce qui a fait son temps,
et en engendrant les éléments nouveaux. C’est la loi principale de la
transformation du socialisme en communisme.
3- Loi de la négation de la négation
= 77 =
La loi de la négation de la négation est une des lois
fondamentales de la dialectique. Cette loi permet d’expliquer la loi de la
transformation d’une chose en son contraire par la lutte des
contradictions internes, la loi du remplacement de l’ancien par le
nouveau et la loi de la progression par vagues.
La négation de la négation fut pour la première fois formulée
dans le système idéaliste de Hegel qui l’applique au développement de
l’esprit, c’est-à-dire qu’elle est l’union ou le retour de l’esprit à Dieu,
après s’être aliéné dans le monde. Le marxiste a remis cette loi sur la
terre.
« Exemple : un grain d’orge, s’il rencontre les conditions normales et de l’humidité, il subit sous l’action de la chaleur et de l’humidité, une métamorphose spéciale, il germe ; le grain périt comme tel, il est remplacé par la plante née de lui, qui est la négation du grain.
Mais quel est le cours normal de la vie de cette plante ? Elle grandit, fleurit et féconde, et finalement produit de nouveau des grains d’orge et dès que ceci est mûr, la tige meurt, elle est aussi de son côté niée. Résultat de cette négation de la négation, nous avons de nouveau des grains d’orge du commencement, non simplement, multiplié, 10, 20 ou 30 fois »1.
Nous voyons dans ce même grain, la négation de l’autre et le
processus de son développement. Si on transporte la triade dialectique à
ce grain, on peut dire que le premier grain représente l’affirmation au
sein de laquelle se cache la négation.
La plante née du premier grain, cette nouvelle plante sera niée à
son tour au bout d’un certain temps. La négation de la négation devient
le point de départ de la nouvelle négation et ainsi de suite. La négation
de la négation devient le fonctionnement sans cesse de la plante : la
vieille plante est dépassée en laissant derrière elle la plus jeune.
1 Friedrich Engels, Anti-Dühring, p. 210.
= 78 =
En réalité, la loi de la négation de la négation exprime la
succession, la liaison du nouveau avec l’ancien. La répétition, au stade
supérieur du développement, de certaines propriétés du stade inférieur,
prouve le caractère progressif de l’évolution.
En dialectique, la catégorie de la négation signifie la
transformation d’un objet en un autre, s’accompagne de la destruction du
premier objet. Mais il s’agit d’une destruction qui ouvre l’horizon à une
nouvelle évolution et intervient comme élément de liaison, en conservant
tout le contenu positif des stades déjà franchis. Engendrée par les lois
internes des phénomènes, la négation dialectique intervient comme une
auto-négation. L’essence de la négation dialectique conditionne
également cette particularité de l’évolution qui s’exprime par la double
négation (ou par la négation de la négation). L’auto-développement de
l’objet est le fait des contradictions internes qui lui sont inhérentes (unité
et lutte des contraires, loi de la négation, présence en lui de sa propre
négation).
La contradiction est levée au cours du mouvement de l’objet (et
de la connaissance), ce qui signifie l’émergence d’une « tierce » négation
par rapport aux deux contraires. Mais comme non seulement ils
s’excluent l’un et l’autre, mais s’interpénètrent aussi. La « tierce »
négation est une négation qui intervient comme une conservation
(dépassement-conservation).
Les prémisses et les conditions ayant engendré un objet, loin de
disparaître avec son développement, sont reproduites par lui. Dans la
pensée, ceci s’exprime par la négation de la négation, par une
intellection plus profonde à une nouvelle étape de l’évolution de la
théorie des aspects de la vérité auxquels on est déjà parvenu. Il découle
du principe de l’unité de la dialectique, de la logique et de la théorie de
la connaissance qu’on ne saurait donner une interprétation correcte du
caractère universel de la loi de la négation de la négation que si on
l’étudie comme une loi de l’activité pratique et théorique. La pratique
étant à la base des rapports humains avec le monde extérieur, ses
particularités conditionnent aussi le rapport théorique (cognitif). Celui-ci
= 79 =
consiste à ce que la reproduction d’un objet en évolution n’est possible
qu’en tant qu’histoire de sa connaissance, à travers les théories et les
conceptions, se niant les unes les autres dialectiquement.
C’est par ce mouvement que s’opèrent le développement de la
connaissance universelle et la négation d’une théorie par une autre, que
se manifestent les lois des mouvements du monde matériel comme
négation de l’un de ses états par un autre. C’est ici aussi qu’on trouve
l’explication du fait que l’état nié n’est pas rejeté, mais conservé sous
une forme modifiée.
En effet, l’approche unilatérale de l’objet dégage en lui quelque
chose de constant qui se conserve au cours de la négation. Aussi
l’évolution de la théorie scientifique n’est-elle possible que si l’on
préserve le contenu positif d’une connaissance niée, que si on
l’incorpore dans une théorie nouvelle.
Dans les sciences de la nature, ce rapport entre l’ancienne théorie
et la théorie nouvelle se traduit dans le principe de correspondance, qui
révèle la dialectique propre du monde objectif. Voici pourquoi la loi de
la négation de la négation intervient tout comme une loi de la
connaissance que comme une loi du monde objectif.
Ce premier chapitre de la troisième partie nous a permis
d’étudier le matérialisme dialectique. Le prochain chapitre étudiera le
matérialisme historique de Karl Marx.
= 80 =
CHAPITRE II
LE MATÉRIALISME HISTORIQUE
I.- L’ÉCONOMIE POLITIQUE, PRAXIS ET HISTOIRE
Pour les marxistes, elle prend en considération la seule structure
sociale de la production des biens matériels aux divers stades historiques
de la société. L’économie politique consiste dans l’étude des rapports
sociaux de production.
Cependant, l’économie politique ne se limite pas à l’étude des
seules catégories économiques telles qu’elles existent dans le système
capitaliste, elle doit appréhender l’origine de celles-ci et suivre les
différentes formes historiques qu’elles ont pu revêtir au cours de
l’histoire et prévoir les conditions sociales de leur disparition.
À cet égard, la méthode utilisée est le matérialisme historique qui
est l’application de la philosophie matérialiste et le principe de la
dialectique à l’étude de l’évolution des sociétés depuis l’Antiquité.
Engels définit le matérialisme historique comme étant une conception
marxiste de l’histoire qui cherche la cause première et le grand moteur
de tous les événements historiques importants dans le développement
historique de la société, dans la transformation des modes de production
d’échange, dans la division de la société qui en résulte et dans la lutte de
classes entre elles. Ce qui signifie que le matérialisme historique, science
marxiste de la société, est une conception matérialiste de la société elle-
même. En plus de cela, pour Marx, la production matérielle à partir de la
praxis constitue la base concrète de l’existence sociale des hommes. En
ce sens que chaque forme des sociétés historiques se caractérise par un
= 81 =
mode de production donné : la différence entre la société qui existe dans
l’histoire tient donc à la différence de son mode de production.
En d'autres termes, le matérialisme historique est une conception
dialectique, c’est-à-dire une conception selon laquelle la société est une
réalité en transformation constante, transformation résultant du
développement de la praxis dans la production et en particulier au
développement des contradictions internes d’ordre matériel entre les
forces productives et les rapports de production. À un certain stade de la
production sociale, ces contradictions prennent la forme de la lutte de
classes. Celle-ci, élément constitutif de la praxis, constitue le principe
d’explication du remplacement d’une forme de société par une autre.
En termes plus simples, le matérialisme historique est une
conception selon laquelle l’histoire de toute société s’explique
essentiellement dans la production et dans la lutte de classes par le biais
de la praxis.
En effet, en considérant le processus de production, le
matérialisme historique ne se contente pas d’expliquer l’aspect technique
qui préside dans la production de biens matériels, mais surtout arrive à
déceler la place détenue par l’homme dans le processus de la production.
Contrairement aux auteurs classiques, Marx et Engels estiment que dans
l’étude de l’économie, l’accent doit être avant tout mis sur la praxis de la
production qui détermine, en dernière analyse, la répartition des biens et
ses manifestations sociales. Pour les marxistes, la compréhension de tout
phénomène social doit avant tout passer par l’économie qui étudie des
rapports sociaux de production.
= 82 =
II.- LA DÉTERMINATION DE LA VIE SOCIALE PAR
L’ÉCONOMIE
1.- Praxis et rapport de production
En tant que fait social, la production entraîne la relation
nécessaire entre les hommes. Ce qui revient à définir le rapport de
production comme un ensemble de relations qui s’établissent entre les
hommes dans le processus social de production. En d’autres termes, on
appelle rapports de production, l’ensemble des rapports qui s’établissent
entre les hommes dans l’accomplissement social du travail (par exemple,
l’organisation et l’exécution du travail? C'est encore le rapport entre
patron et salarié qui s’exprime sur le travail indirect et le travail
direct…), leur rapport à la propriété des moyens de production
(propriétaire et non propriétaire), ainsi que leur rapport au produit du
travail social? En d'autres termes, c’est la répartition du point de vue de
la distribution et de l’échange ainsi que leur position vis-à-vis de la
consommation effective des produits du travail. Finalement donc, c'est
leur position vis-à-vis de la richesse nationale.
À un certain stade du développement historique de la société, ces
rapports de production deviennent rapports de classes, c’est-à-dire des
rapports d’exploitation des dominés par les dominants et par là-même,
des rapports de lutte de classes. Cela veut dire en ce sens que l’élément
essentiel des rapports de production (conditionnant la position des
individus dans l’accomplissement du travail et vis-à-vis du produit du
travail, c’est le rapport des individus aux propriétaires des moyens de
production. D’une part, les propriétaires des moyens de production sont
des classes privilégiées dans la production et d’autre part, les non-
propriétaires des moyens de production sont des classes défavorisées,
exploitées et obligées de vendre leur force de travail.
Dans ces conditions, la praxis est un élément essentiel des
rapports de production car l’accomplissement du travail social dans la
production est le produit du travail social dépendant de la praxis.
= 83 =
2.- Praxis et force productive
Les forces productives sont constituées par l’ensemble des
modes de production et des forces de travail des hommes dans le
processus de la praxis productive, particulièrement les forces
productives sont constituées par :
- Les conditions naturelles de production, c’est-à-dire les
ressources naturelles, la matière première et le sol qu’il s’agit de
transformer dans la praxis productive.
- Les moyens techniques de travail qui ne sont rien d’autre que
l’ensemble des instruments créés par l’homme pour transformer la
nature.
- La force de travail des hommes ou bien la qualité de la main-
d’œuvre, la puissance physique des travailleurs ainsi que leur savoir et
leur savoir-faire.
En un mot, les forces productives sont l’ensemble des éléments
naturels, techniques et humains dont la combinaison rend possible la
création des biens matériels nécessaires pour l’existence sociale. Dans
les forces productives, ce sont les éléments techniques qui constituent les
éléments essentiels car la productivité générale de la société en dépend.
Cependant, les éléments techniques et les éléments humains forment ce
qu’on appelle “moyen de production”.
Dans ces conditions, la praxis en est également un élément
essentiel car la transformation de la nature par les moyens de production
et par les forces de travail ne se fait que par le biais de la praxis.
3.- Praxis et mode de production
Les forces productives déterminent les rapports, c’est-à-dire qu’à
chaque degré du développement des forces productives (degré qui se
mesure en fonction de l’état et de la qualité des instruments techniques
= 84 =
de travail utilisés, en fonction de leur efficacité et de leur productivité)
correspond nécessairement un type particulier des rapports de
production. C’est la combinaison à un moment historique du
développement de la société des forces productives correspondant qui
constituent ce qu’on appelle “mode de production”, en ce sens que celui-
ci permet de distinguer chaque forme historique des sociétés.
4.- Rapport entre infrastructure et superstructure
Dans une société donnée, les rapports de production forment les
structures fondamentales de base et constituent l’infrastructure de la
société. Les rapports sociaux dépendant des rapports de production,
c’est-à-dire que dans une société donnée, il y a d’autres activités
(juridique, politique et idéologique) auxquelles les hommes doivent se
livrer et qui sont liées directement à l’activité de production. Autrement
dit, le rapport entre infrastructure et superstructure est un rapport de
dépendance c’est-à-dire que finalement, la superstructure d’une société
(juridique, politique et idéologique) dépend de son infrastructure laquelle
est constituée par les rapports de production dont la forme essentielle est
la structure économique de cette société.
En termes plus simples, la forme d’une société ou d’un mode de
production dépend entièrement de son économie selon Marx.
5.- Le processus de la transformation de la société
La correspondance entre les forces productives et les rapports de
production caractérise un mode de production, mais les forces
productives sont mobiles, c’est-à-dire qu’elles ne restent pas dans le
même état mais elles se développement progressivement.
Ce développement se traduit par la découverte ou l’utilisation de
nouvelles ressources, de nouvelles matières premières, ainsi que par
l’augmentation de la main-d’œuvre, l’augmentation de la population et
surtout l’amélioration des moyens techniques de production. De leur
= 85 =
côté, les rapports de production sont statiques, les éléments de la
superstructure, c’est-à-dire la structure juridico-politique et idéologique,
contribue au maintien des rapports de production. Ce qui signifie que la
classe dominante de ce rapport de production veut toujours continuer à
pérenniser le rapport d’exploitation en cours.
Cela veut dire que les lois, le pouvoir politique et idéologique
d’une société y sont instaurées pour défendre les intérêts de la classe
dominante. Or, à un certain stade du développement des forces
productives issues du développement des moyens de production, les
rapports de production n’y conviennent plus et entrent en contradiction
avec les forces productives : il y a donc non-correspondance entre les
forces productives et les rapports de production, or selon la loi de la
dialectique marxiste héritée de la dialectique hégélienne, toute
contradiction entraîne un mouvement et par conséquent un
développement vers une autre réalité. D’où la contraction entre forces
productives et rapports de production constitue la condition objective de
la transformation de la société.
Dans ces conditions, il nécessite une révolution sociale pour
mettre en place de nouveaux rapports de production plus conformes aux
nouvelles forces productives ; c’est-à-dire la transformation du mode de
production. L’ensemble de la société est donc rendu nécessaire par le
développement des forces productives et de sa contradiction avec les
anciens rapports de production.
Toutefois, le facteur principal expliquant le passage d’un mode
de production à un autre, donc, le changement historique de la société,
c’est le développement des forces productives. Selon la théorie marxiste,
l’histoire de la société se résume à la succession des moyens de
production.
- Le mode de production communautaire primitif se caractérise
par la faiblesse des moyens techniques de production, par la propriété
collective des moyens de production et par la répartition égalitaire du
produit des travaux.
= 86 =
- Le mode de production esclavagiste fut caractérisé par la
propriété privée des moyens de production, par l’amélioration des
moyens techniques grâce à la maîtrise des métaux et des pierres
permettant ainsi le sur-travail de l’esclave qui est lui-même un moyen de
production.
- Le mode de production féodale se caractérise par l’amélioration
des instruments de production fondamentalement agricole. Ce sont les
propriétaires fonciers, c’est-à-dire les nobles qui dominent socialement :
la subdomination des serfs a engendré le sur-travail en vue de redevance
ou d’impôt.
- Le mode de production capitaliste est caractérisé par la
production industrielle dominante, par la propriété de la minorité
bourgeoise utilisant des moyens techniques à haut degré d’efficacité et
une main-d’œuvre salariée.
- Le mode de production socialiste est caractérisé par la propriété
collective des moyens de production, l’égalité dans le travail, la
production planifiée et la répartition en fonction du travail. Par
conséquent, le développement de la production entraînerait la
suppression progressive des formes de propriétés privées et constituerait
les conditions principales de passage au communisme.
6.- Classe sociale et lutte de classes à travers l’histoire des
sociétés
“On appelle “classe” des vastes groupes d’hommes qui se distinguent par la place qu’ils occupent dans un système historiquement défini de production sociale, par leur rapport vis-à-vis des moyens de production, par leur rôle dans leur organisation sociale du travail donc par les modes d’obtention et l’importance des richesses dont ils disposent”1.
Selon la théorie marxiste, l’existence de classes sociales a été la
conséquence historique de l’apparition et de la généralisation des
1 Roger-Gérard, Sociologie politique, p. 39.
= 87 =
propriétés. En effet, avec la propriété privée, les membres de la société
se divisent en deux groupes distincts. Il s'agit des propriétaires des
moyens de production, qui dans l’organisation sociale du travail,
exercent une fonction de direction et de contrôle. Mais ils profitent
également du produit du travail social, formant la classe dominante
économiquement. D'autre part, il y a les non-propriétaires des moyens de
production, qui sont les travailleurs effectifs. Ce sont eux qui créent les
biens matériaux nécessaires mais qui ne reçoivent qu’une faible partie du
produit de leur travail formant la classe dominée.
Avec la propriété privée, les rapports de production sont devenus
des rapports d’exploitation en ce sens que la conséquence nécessaire de
tels rapports est l’apparition des conflits et d’affrontements entre les
classes.
Cependant, la lutte des classes désigne l’ensemble de ces conflits
plus ou moins violents résultant de la contradiction des intérêts matériels
de classes. Ce qui veut dire que la lutte de classes est donc
essentiellement une lutte économique avant d’être politique et elle se
trouve à tous les niveaux de la société, c’est-à-dire dans l’infrastructure
comme dans la superstructure. En effet, dans la société de classes, ce qui
domine économiquement domine aussi politiquement. L’État en tant
qu’une institution politique des classes dominantes a pour fonction
essentielle la répression de la classe dominée, c’est-à-dire que l’appareil
de l’État sert à empêcher la suppression des rapports d’exploitation.
Donc, il sert à maintenir les rapports de production existants : d’où
chaque classe dominante instaure une structure politique particulière
pour défendre ses intérêts de classes.
C’est la raison pour laquelle, dans la société de classes, il y a
deux grandes idéologies correspondant aux deux classes principales du
mode de production, mais la classe dominante économiquement domine
aussi idéologiquement : l’idéologie dominante d’une société est celle de
la classe dominante.
= 88 =
7.- Classe en soi et classe pour soi
À partir d’un moment, dans un mode de production donné, des
individus se trouvent dans une situation identique au sein de la
production sociale, en particulier vis-à-vis de la propriété des moyens de
production. En réalité, ils ont des conditions matérielles d’existence plus
ou moins semblables même s’ils ne sont pas conscients de cette identité
fondamentale de leur situation sociale, ils forment objectivement une
classe.
On appelle “classe en soi” une classe inconsciente de sa situation
sociale, c’est-à-dire une classe où les membres ne sont pas conscients de
leur situation commune et que par conséquent, chacun agit socialement
pour défendre ses intérêts personnels sans penser aux intérêts de classes.
Elle devient classe pour-soi lorsque les membres sont devenus
conscients de leur situation commune dans la société laquelle situation
détermine les intérêts communs, qu’ils s’organisent pour défendre leurs
intérêts non seulement sur le plan économique mais aussi sur le plan
politique. La classe pour-soi est donc une classe devenue consciente,
agissant comme force sociale, économique et politique.
En résumé, dans la société, il y a une évolution de classe,
laquelle commence par l’existence de la classe soi-disant vulgaire, c’est-
à-dire une classe qui ne tient pas compte de la situation commune mais
qui agit selon ses intérêts particuliers. Ensuite, la classe cohésive selon
laquelle chaque membre agit non selon chaque intérêt personnel mais
selon son intérêt commun.
Bref, on constate que la pratique sociale est incontestablement la
base de tout développement non seulement au niveau de la connaissance
mais aussi au niveau des conditions d’existence des hommes au sein de
la société. Cependant, la pratique connaît deux phases différentes : la
première, il s’agit d’une théorie de la connaissance qui essaie de trouver
de véritables connaissances de la réalité existante pour pouvoir
transformer le monde et qui se traduit sous le terme de “matérialisme
= 89 =
dialectique”. La seconde est une théorie de l’histoire, selon Marx,
d’après laquelle ce sont l’économie, les rapports de production, les
inégalités sociales qui sont à la base de toute société et qui conditionnent
son développement ou son appauvrissement. Cela se traduit sous le
terme de “matérialisme historique”. Ce qui signifie que le matérialisme
dialectique et le matérialisme historique sont deux théories-clé de la
pratique sociale en ce sens qu’elles sont inséparables l’une de l’autre
dans le processus du développement de la société humaine.
= 90 =
CONCLUSION
= 91 =
La conception matérialiste dans la philosophie de Karl Marx a
provoqué un grand bouleversement de la situation dans la société
presque à travers le monde.
La conception matérialiste marxiste critique tous les systèmes
philosophiques classiques, et le système capitaliste de production qui se
basent sur l’exploitation de l’homme par l’homme. Ce système
d’exploitation se manifeste dans la domination des classes ouvrières par
les moyens de propriété privée ou capital.
Vu cette circonstance et en critiquant tous ces systèmes
philosophiques, Marx avançait une nouvelle conception philosophique
pour éradiquer les théories sociales et les systèmes philosophiques
classiques.
Cette nouvelle conception se caractérise dans l’élaboration du
matérialisme dialectique et du matérialisme historique. Dans le premier
cas, il critique tous les systèmes dialectiques classiques, surtout le
système dialectique de Hegel qui était son maître.
Hegel a avancé aussi sa dialectique par le moyen de la
transcendance laquelle coïncide avec Dieu. Cette coïncidence avec Dieu
est appliquée dans le monde avant.
Marx trouve que ce système dialectique de son maître conduit à
l’aliénation politique, religieuse et économique. En critiquant ce système
dialectique, Marx avançait les trois lois fondamentales de la dialectique,
telles que la loi de l’unité et la lutte des contraires, la loi de la négation
de la négation et appliquait cette théorie à la société.
= 92 =
Hegel a le mérite d’avoir fondé la dialectique, mais il l’a
expliquée d’une manière idéaliste.
Dans le second cas, Marx se lance dans l’analyse du système
social en critiquant les systèmes sociaux antérieurs, surtout l’idéalisme
de son temps et le capitalisme qui ont pris naissance avec l’apparition de
la société de classes basées sur un système d’exploitation de classe et sur
la distinction entre le travail manuel et le travail intellectuel.
Dans une société dominée par une classe dominante, la lourde
tâche du travail productif repose sur la classe exploitée tandis que la
gestion de la société, l’administration monopolisée par les membres de la
classe exploiteuse exagérant unilatéralement le rôle du travail intellectuel
auquel ils confèrent un pouvoir absolu.
L’analyse du système social marxiste aboutit à la suppression
de toutes les sociétés de classes et rend l’égalité à l’humanité tout entière
et la propriété collective de production.
Ainsi donc, la conception matérialiste dans la philosophie de
Karl Marx est un système philosophique plus scientifique et plus
méthodique par rapport aux systèmes philosophiques et aux régimes
classiques. Si on veut supprimer le décalage entre les riches et les
pauvres à notre époque imposé par le capitalisme, il faut réétudier le
socialisme marxiste en accordant la même valeur et la même égalité au
peuple tout entier.
= 93 =
BIBLIOGRAPHIE
= 94 =
I. ŒUVRES DE KARL MARX MARX (K.), Critique de la philosophie du droit de Hegel, traduction par
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II. ŒUVRES DE FRIEDRICH ENGELS
ENGELS (Friedrich), Anti-Dühring, Moscou, Éditions du Progrès, 1987,
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III. ŒUVRES DE KARL MARX ET DE FRIEDRICH ENGELS
MARX (Karl) et ENGELS (Friedrich), La Sainte Famille, Paris, Éditions
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KUNZMANN (Peter), BURKARD (Franz Peter) et WIEDMANN
(Franz), Atlas de la philosophie, réalisation graphique d’Axel
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Paris, Librairie Générale Française, La Pochothèque, Le Livre de
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= 95 =
LENINE (Vladimir Ilitch OULIANOV dit), Œuvres, tome 38, Paris,
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ROGER-GERARD Sociologie politique, Paris, éditions Montchestien,
1974, 700 p.
= 96 =
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LAFFONT-BOUPIANI, Dictionnaire des œuvres de tous les temps et de
tous les pays, Paris, édition 1953, 679 p.
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VI. WEBOGRAPHIE Karl Marx, Contribution à la critique de la philosophie de Hegel,
htt://sep.frée.fr/Karl Marx/texte/1843 critiquch.htm. (Date de consultation 20/12/2010 à 15 :35).
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htm. (Date de navigation 17/12/2010 à 15 :45). Karl Marx, Question juive, htt://perso.wanadoo.fr/Karl
Marxiens/philo/petapen.drathom.htm. (Date de navigation 18/12/2010 à 15 :55).
= 97 =
INDEX
= 98 =
NOMS COMMUNS
A
Absolutisme éclairé ........... 26, 29
Abstraction .............................. 51
Absurde ................................... 50
Agnosticisme ..................... 26, 37
Air ........ 10, 15, 20, 24, 44, 45, 46
Aliénation .......................... 38, 39
Aliénation politique ................. 91
Âme .... 11, 13, 14, 15, 18, 19, 50,
69
Amour-propre .......................... 28
Analytique ......................... 34, 66
Anarchistes .............................. 75
Anthropologie ................... 37, 38
Anthropologisme feuerbachien
............................................. 38
Antiquité . 8, 9, 11, 14, 15, 16, 17,
19, 20, 25, 34, 40, 45, 80
Antithèse.................................. 73
Aristocratie .............................. 29
Aristocratie esclavagiste ... 12, 17
Artisans................................ 9, 29
Astronomie .......................... 9, 14
Ataraxie ................................... 18
Athéisme..... 9, 25, 27, 29, 30, 36,
47, 49
Atome ...................................... 26
Atomes . 9, 17, 18, 19, 26, 44, 45,
46
Atomes de feu ......................... 45
Atomes de l’air ........................ 45
Atomes de l’eau ....................... 45
Atomes de la terre ................... 45
Atomisme .......................... 17, 45
B
Besoins .............................. 34, 38
Bond .................................. 74, 75
Bonds....................................... 75
Bonheur ................................... 38
Bouddhisme ............................ 14
Bourgeois ................................ 49
Bourgeoise .............................. 86
Bourgeoisie ..... 29, 36, 48, 71, 72
C
Capacités ................................. 35
Capital ......................... 22, 54, 91
Capitalisme ............ 48, 73, 75, 92
Capitaliste ................................ 34
Causalité ............................ 17, 26
Changement ............................ 20
Changements qualitatifs ... 40, 65,
71, 74, 75, 76
Changements quantitatifs . 40, 65,
71, 74, 75, 76
Charvaka ................................. 10
Charvaka ................................. 10
Christianisme .. 22, 36, 46, 47, 48
Classe dominante .. 48, 49, 85, 87
Classe dominée ................. 48, 87
Classe ouvrière ........................ 39
Classe prolétarienne ................ 74
Classes ..................................... 48
Classes dominantes ........... 48, 87
Classes dominées .................... 48
= 99 =
Classes possédantes ................... 5
Combinaison ..................... 28, 29
Communisme .............. 49, 76, 86
Conception biologiste ............. 51
Conception dialectique 65, 74, 81
Conception évolutionniste ....... 51
Conception marxiste.......... 47, 80
Conception matérialiste 6, 27, 33,
34, 40, 51, 58, 80, 91, 92
Conception scientifique ........... 65
Concepts ................ 22, 34, 67, 73
Confucinisme .......................... 12
Connaissance .... 9, 11, 13, 14, 16,
17, 18, 20, 26, 27, 28, 31, 33,
35, 37, 43, 51, 56, 57, 58, 66,
67, 68, 69, 70, 71, 72, 73, 76,
78, 79, 88
Connaissances ......................... 58
Conscience ...... 37, 49, 54, 68, 69
Contingence ................. 17, 18, 26
Contradiction .. 54, 55, 57, 59, 60,
85, 87
Contradictions 61, 66, 69, 72, 73,
76, 78, 81
Contrat social .......................... 33
Corps ............... 26, 30, 31, 32, 34
Couleur .................................... 17
Courage ............................. 14, 19
Culture ....................... 5, 8, 12, 19
D
Déductions ............................... 34
Déisme ............................... 27, 30
Démiurge ........................... 13, 53
Démocratie .................. 17, 39, 74
Démocratie bourgeoise ........... 74
Démocratie populaire .............. 39
Démocratie prolétarienne ........ 74
Démonstrations ................. 33, 67
Dépassement-conservation ..... 78
Despotisme .............................. 28
Déterminisme .............. 12, 18, 26
Développement progressiste ... 65
Dialecticien ............................. 66
Dialectique20, 27, 28, 30, 37, 40,
65, 66, 67, 68, 69, 70, 71, 72,
73, 74, 76, 77, 78, 79, 80
Dialectique ascendante ............ 66
Dialectique hégélienne ............ 85
Dialectique marxiste ......... 65, 85
Dialectique moderne ............... 66
Dialectique socratique ............. 66
Doctrine .... 24, 28, 30, 35, 36, 37,
45, 61
Doctrine idéaliste .................... 43
Doctrine marxiste .................... 48
Doctrine matérialiste .. 43, 45, 46,
62
Doctrine philosophique ........... 43
Doctrines ................................. 52
Droit .................................. 33, 35
E
Eau .. 9, 10, 11, 14, 15, 20, 45, 46,
74
Économie .................... 81, 84, 89
Économie politique ................. 80
Éducation .............. 28, 30, 36, 49
= 100 =
Égalité .......................... 28, 29, 86
Église ................................. 22, 24
Église catholique ............... 48, 49
Empirisme ................... 33, 35, 37
Enfer .................................. 11, 19
Entendement ............................ 35
Esclavage ................................. 12
Esclaves ..................................... 9
Essence .............................. 47, 55
Essence de l’homme ................ 37
État16, 33, 35, 36, 39, 48, 49, 50,
87
Éthique ........................ 12, 18, 27
Eudémonisme .......................... 12
Évolution .. 10, 11, 13, 15, 37, 50,
51, 54, 65, 69, 73, 75, 76, 77,
78, 79, 80, 88
Exécutif ................................... 35
Existence .. 43, 44, 46, 48, 49, 53,
54, 56, 60, 80, 83, 86, 88
Exploitation de l’homme par
l’homme ............................... 91
F
Feu ..9, 10, 11, 14, 15, 20, 44, 45,
46
Flatus vocis ............................. 24
Fleuve ...................................... 16
Foi ................................ 11, 19, 29
Forces productives 81, 83, 84, 85
G
Géographie ................................ 9
Gnoséologie ............................. 10
H
Haine ........... 9, 19, 25, 59, 60, 61
Harmonie ................................. 66
Hédonisme .............................. 12
Hérésies panthéistes ................ 22
Histoire ..... 5, 6, 8, 10, 13, 37, 38,
39, 40, 64, 65, 72, 73, 74, 78,
80, 81, 85, 86, 89
Homo-sapiens sapiens ............ 51
Humanisme ............................. 12
I
Idéalisme 5, 9, 12, 14, 19, 20, 22,
25, 27, 34, 35, 36, 37, 38, 39,
43, 52, 59, 64, 65
Idéalisme hégélien..................... 5
Idées éternelles ........................ 66
Idées innées ....................... 30, 68
Idéologie ............ 5, 12, 19, 29, 87
Idéologie dominante ................ 87
Idéologies ................................ 87
Idoles ................................. 17, 33
Ignorance ..................... 17, 18, 26
Individualisme ......................... 12
Induction ........................... 33, 34
Industrie ............................ 27, 28
Inégalités sociales ................... 89
Infrastructure ..................... 84, 87
Intelligible ............................... 66
Intention .................................. 23
J
Jeunes hégéliens ...................... 36
Jugements ................................ 67
= 101 =
L
Législatif.................................. 35
Liberté ............................... 23, 35
Logique.............................. 23, 37
Logique formelle ..................... 67
Logos ....................................... 15
Lois ........................ 26, 31, 32, 85
Lokayata ............................ 10, 11
Lumières ............................ 29, 38
Lutte de classes ..... 80, 81, 82, 87
Lutte des classes ...................... 39
Lutte des contraires .... 16, 40, 65,
71, 72, 78, 91
M
Mandat du ciel ......................... 12
Marchands ................................. 9
Marxisme ................................. 62
Marxisme-léninisme ................ 73
Masse populaire ........................ 5
Matérialisme ... 6, 8, 9, 10, 11, 14,
17, 22, 23, 25, 26, 27, 28, 30,
31, 32, 33, 34, 36, 37, 38, 39,
40, 43, 45, 52, 54, 55, 64, 65,
68, 70
Matérialisme ancien ........ 5, 9, 10
Matérialisme anglais ......... 29, 31
Matérialisme anthropologique 36
Matérialisme antique ..... 9, 19, 20
Matérialisme contemporain ..... 25
Matérialisme de Feuerbach37, 39
Matérialisme dialectique .... 6, 40,
41, 62, 64, 65, 71, 74, 89, 91
Matérialisme français . 26, 28, 29,
30, 32, 36
Matérialisme historique ... 39, 41,
62, 80, 81, 89, 91
Matérialisme historique et
dialectique ............................ 39
Matérialisme marxiste .... 6, 8, 40,
41
Matérialisme mécaniste .......... 29
Matérialisme métaphysique ... 31,
33
Matérialisme naïf .................... 11
Matérialisme philosophique ...... 6
Matérialisme pré-marxiste ...... 37
Matérialisme primitif .............. 20
Matérialisme simpliste ............ 64
Matérialisme vulgaire ............. 64
Mathématique .......................... 32
Mathématiques ........ 9, 14, 32, 68
Matière 26, 27, 28, 31, 34, 69, 70
Mécanique ......... 9, 27, 30, 32, 70
Métal ................................. 11, 14
Métaphysique . 25, 30, 32, 35, 52,
55, 57, 59, 61, 68, 69, 72
Métaphysiques ........................ 60
Météorologie ............................. 9
Méthode déductive .................. 33
Méthode métaphysique ........... 34
Mode de production ... 81, 84, 85,
86, 87
Monarchie constitutionnelle .... 26
Monarchie éclairée .................. 28
Monde objectif ...... 67, 72, 76, 79
Morale ............................... 28, 38
= 102 =
Mort .... 10, 12, 13, 16, 17, 18, 19,
31, 44, 47
Mouvement .... 15, 18, 26, 27, 31,
32, 45, 46, 53, 54, 56, 66, 67,
70, 72, 73, 74, 78, 85
Mouvement perpétuel........ 17, 45
Moyen Âge ............ 22, 23, 25, 67
Moyens de production 82, 83, 85,
86, 87, 88
Mysticisme .............................. 25
N
Naturalisme américain ............ 64
Nature ... 5, 11, 13, 15, 17, 19, 20,
22, 25, 26, 27, 30, 31, 32, 33,
34, 37, 38, 44, 45, 46, 48, 50,
51, 52, 53, 54, 55, 56, 62, 65,
67, 69, 70, 71, 72, 73, 74, 75,
76, 79, 83
Natures .................................... 46
Navigateurs ............................... 9
Nécessité... 12, 15, 17, 18, 28, 29,
38, 46, 76
Négation de la négation .... 40, 65,
71, 76, 77, 78, 79, 91
Néoréalisme ............................. 64
Noblesse ............................ 29, 36
Nominalisme ............... 22, 23, 24
O
Odeur ....................................... 17
Opium ...................................... 50
Opium du peuple ..................... 50
Ordre social ....................... 30, 36
Orge ......................................... 77
Ouvriers ................................... 39
P
Paléontologie ........................... 50
Paradis ..................................... 11
Parti ......................................... 23
Paysans ...................................... 9
Pensée subjective .................... 72
Peur ............................. 18, 19, 60
Phénomènes ... 27, 28, 30, 33, 37,
70, 75, 78
Philosophe atomiste ................ 45
Philosophe matérialiste ........... 47
Philosophes ....................... 43, 52
Philosophie ...... 43, 44, 46, 52, 54
Philosophie de Nietzsche . 59, 61,
62
Philosophie de Platon .............. 58
Philosophie feuerbachienne .... 37
Philosophie hégélienne ..... 37, 53
Philosophie idéaliste ......... 26, 68
Philosophie marxiste ... 37, 41, 76
Philosophie matérialiste ... 33, 54,
80
Philosophie moderne ............... 55
Physique ..... 8, 14, 19, 29, 30, 32,
51, 55, 75, 83
Plaisir....................................... 44
Politique .... 26, 28, 31, 35, 36, 39
Positivisme .............................. 64
Praxis .................... 80, 81, 82, 83
Préhominiens ........................... 50
Prolétaires .................................. 9
= 103 =
Prolétariat .................... 39, 71, 72
Propriété collective ...... 85, 86, 92
Propriété privée ..... 39, 86, 87, 91
Psychologie ............................. 27
Q
Qi ............................................. 13
R
Raison ... 6, 10, 16, 17, 20, 23, 26,
28, 32, 35, 37, 43, 44, 47, 55,
56, 62, 87
Raisonnements ........................ 67
Rapports capitalistes................ 28
Rapports de production .... 81, 82,
84, 85, 87, 89
Rapports féodaux .................... 28
Rationalisme cartésien ............ 30
Réalisme .................................. 22
Réalité objective ................ 18, 28
Religion 9, 13, 14, 20, 22, 25, 26,
36, 37, 38, 47, 48, 49, 50, 61
Renaissance ................... 8, 19, 67
Révisionnistes ......................... 75
Révolution ............................... 85
Révolution bourgeoise 31, 33, 36
Révolution sociale ................... 73
Rhétorique ......................... 66, 67
S
Sagesse .................................... 16
Scepticisme ............................. 33
Science ............ 31, 32, 33, 34, 38
Sciences .. 5, 9, 14, 19, 25, 30, 31,
32, 34, 38, 69, 73, 79
Sciences naturelles
contemporaines .................... 73
Scolastique .................. 23, 33, 67
Sensation ................................. 35
Sensations . 13, 16, 18, 27, 28, 31,
32, 70
Sensible ................. 29, 32, 66, 68
Sensualisme ........... 28, 29, 30, 37
Socialisme ....... 29, 39, 73, 75, 76
Socialisme marxiste ................ 92
Socialisme utopique ................ 29
Société .... 5, 9, 11, 16, 19, 20, 26,
29, 33, 34, 38, 40, 48, 49, 50,
64, 65, 69, 71, 72, 73, 74, 75,
80, 81, 82, 83, 84, 85, 87, 88,
89, 91, 92
Société bourgeoise .................. 26
Société capitaliste .............. 49, 71
Société de classes .................... 48
Société esclavagiste................... 9
Sociétés ................................... 80
Sociétés historiques ................. 80
Sophistes ................................. 66
Souffrance ......................... 18, 59
Superstructure ............. 84, 85, 87
Syllogistique ............................ 67
Système capitaliste 48, 49, 80, 91
Système social marxiste .......... 92
Systèmes dialectiques classiques
............................................. 91
Systèmes philosophiques .. 91, 92
= 104 =
T
Techniques .............................. 27
Temps modernes ..................... 68
Terre ..... 9, 10, 11, 13, 14, 15, 44,
45, 46, 50, 77
Théologie ........................... 22, 23
Théorie ............ 49, 85, 86, 88, 89
Théories sociales ..................... 91
Théories-clé ............................. 89
Thèse ........................... 27, 70, 73
Thomisme ................................ 23
Tourbillons ........................ 17, 45
Transcendance ......................... 91
Transformation ..... 39, 74, 75, 76,
77, 80, 81
Transformation de la nature .... 83
Transformation de la société ... 85
Transformation du mode de
production ............................ 85
Travail ..................................... 35
Travail intellectuel .................. 92
Travail manuel ........................ 92
Travail salarié .......................... 48
U
Utopie ...................................... 34
V
Vent ......................................... 10
Vérité . 27, 39, 49, 59, 60, 66, 68,
70, 78
Vide ............................. 17, 18, 53
Vie . 5, 12, 13, 15, 16, 19, 25, 31,
32, 35, 38, 44, 47, 50, 51, 58,
59, 60, 61, 62, 71, 77
Volonté .............................. 23, 25
Z
Zhouli ...................................... 12
= 105 =
NOMS PROPRES DE PERSONNES
A
Abélard .................................... 24
Ai Siqi ..................................... 20
Allemands ............................... 25
Anglais .................................... 25
Anselme ............................. 23, 24
Aristote .............................. 66, 67
B
Bacon ......... 27, 31, 32, 33, 34, 70
Berkeley ............................ 26, 36
C
Confucius ................................ 12
Curie ........................................ 65
D
D'Holbach .................... 26, 27, 30
Démocrite .. 9, 15, 16, 17, 18, 44,
45, 46
Descartes ..................... 29, 58, 68
Diderot ....... 26, 27, 28, 30, 69, 70
Dieu ... 11, 13, 17, 18, 22, 23, 25,
38, 45, 47, 48, 49, 50, 51, 60,
68, 69, 76, 91
Dieux ......... 15, 18, 19, 43, 46, 47
Dong Zhoushu ......................... 13
Duns Scot .......................... 23, 67
E
Empédocle ............................... 15
Engels . 28, 31, 36, 38, 39, 40, 52,
54, 55, 69, 70, 74, 80, 81
Épicure 15, 16, 17, 18, 19, 44, 46
F
Fan Zhen ..................... 10, 11, 14
Feuerbach ... 5, 36, 37, 38, 39, 40,
47
Français ................................... 25
Frédéric Guillaume III ............ 48
G
Giordano Bruno....................... 67
Guillaume d’Occam ................ 67
H
Han .......................................... 13
Hegel . 18, 37, 39, 40, 53, 65, 67,
71, 72, 76, 91, 92
Helvétius ............... 26, 28, 29, 30
Héraclite ............ 9, 15, 16, 66, 72
Hobbes............. 30, 31, 32, 33, 35
Hume ....................................... 36
J
Joliot ........................................ 65
K
Kant ......................................... 72
L
La Mettrie .......................... 26, 29
Langevin .................................. 65
Lénine ........ 17, 28, 30, 40, 69, 70
Leucippe ................ 15, 16, 17, 18
= 106 =
Locke ... 28, 29, 30, 31, 34, 35, 36
Lucrèce .................. 15, 16, 17, 19
M
Mao Tsé-Toung ....................... 40
Marx 5, 6, 16, 18, 22, 23, 28, 30,
32, 36, 39, 40, 41, 47, 48, 49,
50, 51, 52, 53, 54, 62, 64, 65,
67, 69, 71, 74, 79, 80, 81, 84,
89, 91, 92
Mencius ................................... 12
N
Nicolas de Cuse ........... 67, 68, 72
Nietzsche ................................. 59
P
Platon ..................... 55, 56, 57, 58
R
Ricardo .................................... 39
Roscelin ............................. 23, 24
S
Socrate ..................................... 66
Spinoza .............................. 30, 68
Sun Zi ...................................... 11
T
Thomas d’Aquin ...................... 23
Thomas Henry Huxley ............ 54
Trinité ...................................... 24
W
Wang Chung ................ 10, 11, 13
Whang Chung ......................... 13
X
Xun Zi ..................................... 12
Y
Yang Zhu ........................... 11, 12
Yang Zhy ................................. 11
Z
Zhou .................................. 11, 12
= 107 =
NOMS PROPRES DE LIEUX
A
Allemagne ................... 31, 36, 39
Angleterre ........ 31, 32, 33, 34, 36
C
Canterbury ............................... 24
Chine ................................. 10, 11
Compiègne .............................. 23
E
Erlanger ................................... 36
État Prussien ............................ 48
Europe ............................... 22, 31
F
France ...................................... 31
G
Grèce ................................... 8, 17
I
Inde .......................................... 10
K
Kenya ...................................... 50
T
Turkana ................................... 50
V
Vatican .................................... 48
TABLE DES MATIÈRES
DU MATÉRIALISME ANCIEN AU MATÉRIALISME DE KARL MARX ................................................................................................................................................................................ 1 DÉDICACE .................................................................................................................................................................. 2 REMERCIEMENTS ........................................................................................................................................... 3 INTRODUCTION ................................................................................................................................................. 4 PREMIÈRE PARTIE : QU’EST-CE QUE LE MATÉRIALISME ? ............ 7
CHAPITRE I : LE MATÉRIALISME ANCIEN ............................................................ 9
I.- LE MATÉRIALISME DE L’INDE ANCIENNE ......................................... 10
II.- LE MATÉRIALISME CHINOIS ANCIEN ...................................................... 11
III.- LE MATÉRIALISME GREC ANCIEN ............................................................. 14
CHAPITRE II : LE MATÉRIALISME DU MOYEN ÂGE
(NOMINALISME) ............................................................................................................................ 22
I.- LE NOMINALISME DE DUNS SCOT .................................................................. 23
II.- LE NOMINALISME DE ROSCELIN .................................................................... 24
CHAPITRE III : LE MATÉRIALISME MODERNE ............................................ 25
I.- LE MATÉRIALISME FRANÇAIS .............................................................................. 26
II.- LE MATÉRIALISME ANGLAIS ............................................................................... 31
1.- Le matérialisme de Hobbes ................................................................................................... 32
2.- Le matérialisme de Bacon ...................................................................................................... 33
3.- Le matérialisme de Locke ....................................................................................................... 35
III.- LE MATÉRIALISME ALLEMAND .................................................................... 36
1.- Le matérialisme de Feuerbach ........................................................................................... 37
2.- La naissance du matérialisme de Karl Marx et de Friedrich
Engels .......................................................................................................................................................... 39
DEUXIÈME PARTIE : LE MATÉRIALISME PHILOSOPHIQUE ......... 42
CHAPITRE I : DÉFINITION DU MATÉRIALISME .................................... 43
I.- LA VISION MATERIALISTE DE LA NATURE ...................................... 44
1.- Qu’est-ce que la nature ? ......................................................................................................... 44
2.- Origine de la nature ....................................................................................................................... 44
A.- Le point de vue d’Épicure ..................................................................................................... 44
B.- Le point de vue de Démocrite ........................................................................................... 45
II.- LA CONCEPTION MATÉRIALISTE DE L’HOMME...................... 46
1.- Le point de vue de Karl Marx ............................................................................................ 47
2.- Le point de vue de l’évolutionnisme et de la biologie ............................. 50
CHAPITRE II : APERÇU SUR LE FONDEMENT DE L’IDÉE ET
DE LA MATIÈRE ......................................................................................................................... 52
I.- RELATION ENTRE L’IDÉE ET LA MATIÈRE ........................................ 52
1.- Le point de vue de Marx .......................................................................................................... 53
2.- Le point de vue d’Engels ......................................................................................................... 54
II.- MARX ET LA CRITIQUE DE LA MÉTAPHYSIQUE ..................... 55
1.- Au niveau de l’Être ........................................................................................................................ 55
2.- Au niveau de la connaissance ............................................................................................. 57
III.- NIETZSCHE ET LE RENVERSEMENT DE LA
MÉTAPHYSIQUE........................................................................................................................ 59
1.- Critique des origines de la métaphysique .............................................................. 60
2.- L’affirmation de la vie et l’éternel retour .............................................................. 61
TROISIÈME PARTIE : LES PRINCIPES DU MATÉRIALISME MARXISTE ............................................................................................................................................................... 63
CHAPITRE I : LE MATÉRIALISME DIALECTIQUE ..................................... 64
I.- HISTOIRE DE LA DIALECTIQUE ........................................................................... 65
1.- Les dialectiques classiques .................................................................................................... 66
2.- La conception dialectique au Moyen Âge ............................................................. 67
3.- La conception dialectique à l’époque de la Renaissance ...................... 67
4.- La dialectique dans les temps modernes ................................................................. 68
5.- La dialectique du XVIIIe siècle ......................................................................................... 69
II.- LES TROIS LOIS FONDAMENTALES DU MATÉRIALISME
DIALECTIQUE ............................................................................................................................... 71
1- Loi de l’unité et de la lutte des contraires ............................................................... 71
2- Loi du passage des changements quantitatifs à des changements
qualitatifs ................................................................................................................................................. 74
3- Loi de la négation de la négation ...................................................................................... 76
CHAPITRE II : LE MATÉRIALISME HISTORIQUE ................. 80
II.- LA DÉTERMINATION DE LA VIE SOCIALE PAR L’ÉCONOMIE82
1.- Praxis et rapport de production ........................................................... 82
2.- Praxis et force productive ..................................................................... 83
3.- Praxis et mode de production .............................................................. 83
4.- Rapport entre infrastructure et superstructure.................................. 84
5.- Le processus de la transformation de la société .............................. 84
6.- Classe sociale et lutte de classes à travers l’histoire des sociétés 86
7.- Classe en soi et classe pour soi ............................................................ 88
CONCLUSION ...................................................................................................................................................... 90 BIBLIOGRAPHIE ............................................................................................................................................. 93
I. ŒUVRES DE KARL MARX ............................................................................................... 94
II. ŒUVRES DE FRIEDRICH ENGELS ...................................................................... 94
III. ŒUVRES DE KARL MARX ET DE FRIEDRICH ENGELS .... 94
IV. OUVRAGES GÉNÉRAUX ................................................................................................ 94
V. DICTIONNAIRES .......................................................................................................................... 96
VI. WEBOGRAPHIE ........................................................................................................................... 96
INDEX .................................................................................................................................................................. 96
TABLE DES MATIÈRES ...................................................................................................................... 108