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    Fievre mutante

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    Musalangu, Zambie - Douze ans plus tot

    Le soleil couchant embrasait la brousse africaine a la facun feu de foret, dardant des traits dor sur les tentes du camp dase. Dominant les eaux de la Makwele, les collines dessinaientest une rangee de dents vertes dont les silhouettes acerees ecoupaient dans le ciel.

    Mangees de poussiere, les tentes de toile avaient ete erigees ercle autour dun espace denude. Au centre se dressait un bosque venerables msasas dont les branches emeraude offraient amp une fraicheur bienvenue. Un filet de fumee se frayait hemin tortueux a travers la frondaison, porteur dune odellechante de kudu roti au bois de mopane.

    A lombre du plus gros des msasas, un homme et une femmrotaient tranquillement un bourbon glace, assis de part et dautune table pliante. Tous deux etaient vetus de kaki, pantalons lon

    t manches longues, afin de se premunir contre les mouches tse-tttirees par la fraicheur du soir. Lun comme lautre approchaiee la trentaine. Lhomme, particulierement elance et dune palenhabituelle, semblait impermeable a la chaleur ambianontrairement a la femme qui seventait paresseusement a laiune feuille de bananier en faisant voler les meches de son opulen

    hevelure acajou, negligemment nouee a laide dune simple ficel

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    e teint hale, elle donnait limpression de sabandonner a la savee linstant. Le murmure de leur conversation, regulieremeonctue par son rire cristallin, se fondait dans la rumeur de rousse : le cri des singes verts, le chant des francolins, lappel dmarantes, auxquels se melaient les bruits de casseroles provena

    e la tente dintendance. Au loin montait episodiquement de avane le rugissement dun lion.

    La femme assise en face dAloysius X. L. Pendergast netutre que sa compagne, Helene, epousee deux ans plus tot. Louple achevait un safari dans la reserve naturelle de Musalangu

    avait ete autorise a chasser lantilope dans le cadre durogramme de regulation mis en place par les autorites zambienne

    Un autre verre, chere amie ? demanda Pendergast oulevant la cruche a cocktail posee sur la table.

    Encore ? repondit-elle en riant. Aloysius, jose esperer quos intentions sont honorables.

    Loin de moi toute pensee impure. Javais imagine que noourrions passer la nuit a discuter des vertus de limpera

    ategorique de Kant.

    Ma mere mavait pourtant prevenue. On croit epouser omme pour ses dons de chasseur, on finit par sapercevoir qua guere plus de cervelle quun ocelot.

    Pendergast emit un leger ricanement et trempa les levres daon verre avant de poser les yeux sur le liquide quil contenait.

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    Cette menthe africaine est assez agressive.

    Mon pauvre Aloysius, je vois que vosmint juleps[1]

    vo

    manquent. Acceptez le poste que Mike Decker vous offre au FBt vous aurez tout le loisir de boire.

    Il avala une nouvelle gorgee en accordant a sa femme uegard pensif. La facilite avec laquelle elle avait pris le solAfrique ne laissait de le surprendre.

    A vrai dire, jai pris la decision de refuser.

    Pour quelle raison ?

    Je ne suis pas certain davoir le coeur a rester a L

    Nouvelle-Orleans avec les problemes familiaux et autres souvenmers qui sy rattachent. Et puis je crois avoir eu mon conteevenements violents. Vous ne croyez pas ?

    Comment pourrais-je en juger ? Vous me parlez si raremee vous.

    Je ne suis pas taille pour travailler au FBI, je ne me feramais a son fonctionnement. Sans compter que vous etonstamment par monts et par vaux avec Medecins Voyageurs. ondition de rester a portee dun aeroport, nous sommes libres

    ivre ou bon nous semble. Loin de se briser, nos ames etaleeur harmonie, telle la feuille dor sous les coups de lorfevre.

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    Nous ne sommes pas venus en Afrique pour que vous mitiez John Donne. Kipling, a la rigueur.

    La moindre femme sait tout sur tout, recita-t-il aussitot.

    A la reflexion, je me passerai egalement de KiplinComment avez-vous occupe votre adolescence ? Vous appreniez ictionnaire des citations par coeur ?

    Entre autres.

    Pendergast releva la tete en voyant se decouper une silhouetur le soleil couchant. Un grand Nyimba vetu dun short et dun Thirt sale, un fusil antediluvien sur lepaule, approchait en prenappui sur une canne fourchue. Il marqua un temps darret a loru camp et salua a la cantonade en bemba, la langue d

    utochtones, aussitot accueilli par des cris de bienvenue depuis ente dintendance. Quelques instants plus tard, il rejoignait la tabes Pendergast.

    Le mari et la femme se leverent.

    Umu-ntu u-mo umu-suma a-aftka,laccueillit Pendergan prenant sa main chaude et poussiereuse, a la mode zambienne.

    En guise de reponse, lhomme tendit sa canne sur la fourche aquelle etait accrochee une note.

    Pour moi ? setonna Pendergast, en anglais cette fois.

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    De la part du chef de district.

    Pendergast adressa un coup doeil furtif a sa femme et deplia illet.

    Mon cher Pendergast,

    Jaurais souhaite avoir unediscussion par radio avec vousdans les meilleurs delais. Je metrouve confronte a une vilaine

    affaire au camp de Nsefu. Une tresvilaine affaire.

    Alistair WokingChef de district

    Sud LuangwaPS : Cher ami, vous netes passans savoir que la reglementationvous oblige a rester joignable parradio a tout moment. Il est assez

    desagreable de devoir vous envoyer

    un messager de la sorte.

    Cette histoire ne me plait guere, commenta Heleendergast apres avoir lu le contenu du message par-dessepaule de son mari. De quelle > peut-il biagir, a votre avis ?

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    Un amateur de safaris-photos qui aura mal reagi avances dun rhinoceros.

    Ce nest pas drole, repliqua Helene, pourtant incapable arder son serieux.

    Nous sommes en pleine saison des amours, insisendergast en glissant la note, apres lavoir pliee, dans la poche da chemise. Jai bien peur que ce drame sonne le glas de notquipee.

    Il se dirigea vers lune des tentes, souleva le couvercle duoffre et entreprit de visser ensemble les elements dune antennuil accrocha ensuite a la branche superieure dun msasa Une foedescendu de son perchoir, il brancha le fil de lantenne dans unadio, posa celle-ci sur la table, lalluma, regla la frequence nvoya un signal. La voix agacee du chef de district lui reponuelques instants plus tard dans un deluge de crachotements.

    Pendergast ? Nom dun chien, ou etes-vous donc ?

    Dans un camp sur les bords de la Makwele.

    Sacrebleu, jesperais que vous seriez plus pres de la BanRoad. Pourquoi diable votre radio nest-elle pas branchee

    essaie de vous joindre depuis des heures !

    Puis-je vous demander de quoi il sagit ?

    Un incident au camp de Nsefu. Un touriste allemand tue p

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    n lion.

    Quel idiot a pu laisser se produire un drame pareil ?

    Ce nest pas ce que vous croyez. Lanimal a penetre da

    e camp en plein jour et il a saute sur le malheureux au moment elui-ci rentrait dans sa hutte apres le repas. Le lion la aussitntraine dans la savane.

    Et ensuite ?

    Ensuite !!! Vous voulez peut-etre que je vous fasse uessin ? La femme de lAllemand a pique une crise, le camp etens dessus dessous et il a fallu appeler un helico a la rescousour evacuer les touristes du groupe. Le personnel du camp eous le choc. Ce type etait un photographe connu, vous pouvmaginer le ramdam que ca va provoquer.

    A-t-on pu suivre le lion a la trace ?

    Ce ne sont pas les fusils et les pisteurs qui manquent, maersonne na ose se lancer sur les traces dun animal pareil. Enteux qui manquent dexperience et ceux qui nont pas de couilleous navons personne. Cest bien pour ca que je fais appel a vouendergast. Jai besoin de vous pour traquer ce salopard et euecuperer ce quil reste de ce pauvre Allemand avant que le lioait bouffe.

    Vous voulez dire que le corps na pas ete recupere ?

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    Personne na tente de poursuivre un monstre pareil. Vouonnaissez le camp de Nsefu, la brousse est particulierement denans le coin, pour compliquer la tache des braconniers delephanme faut un chasseur experimente et je vous rappelle que vot

    ermis de chasse professionnel vous oblige a chasser le mange

    hommes en cas de besoin.

    Je vois.

    Ou se trouve votre Land Rover ?

    Aux Fala Pans.

    Grouillez-vous de le recuperer. Inutile de demonter amp, prenez vos fusils et rejoignez-moi illico presto.

    Nous aurons besoin dau moins une journee. Vous nav

    ersonne dautre plus pres ?

    Personne, je vous dis. En qui je puisse avoir confiance, out cas.

    Pendergast se tourna vers sa femme. Elle lui repondit par lin doeil et un sourire en imitant la forme dun pistolet de sa maronzee.

    Fort bien. Nous nous mettons en route sur-le-champ.

    Ah ! Un dernier detail.

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    Le chef de district sembla hesiter, au milieu des crachotemenu haut-parleur.

    Eh bien ?

    Ca na peut-etre aucune importance. La femme de ictime se trouvait la au moment de lattaque et elle pretend

    Nouvelle hesitation.

    Oui ?

    Elle pretend que le lion etait bizarre.

    Bizarre ? De quelle facon ?

    Il avait une criniere rouge.

    Une criniere fauve, vous voulez dire ? Le phenomene neas aussi rare quon le croit.

    Non, la criniere du lion etait vraiment rouge. Rouge sang.

    Un long silence ponctua la reponse du chef de district.

    Il ne peut pas sagir du meme, reprit-il enfin. Ca se passaia quarante ans, au nord du Botswana. Je nai jamais entendu di

    uun lion puisse vivre plus de vingt-cinq ans. Et vous ?

    Sans prendre la peine de repondre, Pendergast eteignit adio son re ard ar ente brillant dun eclat fievreux a la lueur

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    repuscule.

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    Camp de Nsefu, pres de la riviere Luangwa

    Le Land Rover avancait en cahotant sur la Banta Road, uniste particulierement remuante dans un pays qui ne manquait pe routes en tole ondulee, et Pendergast multipliait les coups olant a droite et a gauche, avec lespoir deviter les nids-de-poueants. Le couple roulait toutes vitres ouvertes, le climatiseur aya

    endu lame dans une vie anterieure, et une epaisse couche oussiere recouvrait les banquettes.

    Les Pendergast avaient quitte le camp de Makwele peu avaaube, parcourant a pied la vingtaine de kilometres de brousse q

    es separaient de leur destination, emportant avec eux leurs fusils, eau, du pain indien et un salami sec. A midi, ils retrouvaient leuoiture toute cabossee et cela faisait deja plusieurs heures quemontaient la piste en traversant episodiquement des villag

    miserables aux huttes rondes recouvertes de toits de chaume ointe. Au-dessus de leur tete, le ciel etalait son immensite du

    leu immacule, presque laiteux.

    Pour la enieme fois, Helene Pendergast tenta de serrer soulard autour de sa tete dans le vain espoir dechapper a oussiere qui collait a sa peau moite.

    Cest etrange, remarqua-t-elle tandis quils traversaient alenti les ruelles dun hameau en evitant tant bien ue m

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    oupeaux, poules et enfants. Je veux dire, quils naient pas trouvuelquun plus pres pour soccuper de ce lion. En plus, ce nest pomme si vous etiez un as de la gachette, ajouta-t-elle avec uourire frondeur.

    Je sais pouvoir compter sur vous, retorqua Pendergast ac au tac.

    Vous savez tres bien que je neprouve aucun plaisir a tues animaux que je ne mange pas.

    Quen est-il des animaux qui vous mangent ?

    Je devrais pouvoir faire une exception.

    Elle rajusta le pare-soleil et tourna vers son mari deux yeleus constelles de points violets.

    Parlez-moi de ce lion a criniere rouge ?

    De simples balivernes. Une vieille legende locale.

    Je suis impatiente de lentendre ! sexclama-t-elle, le rega

    rillant de curiosite.

    Si lhistoire est veridique, elle est vieille de quarante ans. epoque, la vallee meridionale de la Luangwa subissait une vague secheresse, le gibier commencait a manquer. Une troupe de lio

    es environs voyait ses membres mourir de faim les uns apres lutres, et il ne resta bientot plus quun seul animal ; une lionn

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    nceinte. On raconte quelle aurait survecu en deterrant ladavres dun cimetiere nyimba afin de les devorer.

    Quelle horreur ! secria Helene avec un frisson de plaisir.

    Les autochtones ont alors pretendu quelle avait donaissance a un lionceau a la criniere flamboyante.

    Que sest-il passe ensuite ?

    Les villageois, furieux que les sepultures des leurs aient e

    rofanees, ont pourchasse la lionne quils ont tuee et depecee avae clouer sa peau sur la place du village. Ce soir-la, ils ont celebeur victoire par des danses et ils cuvaient encore la biere de mangurgitee pendant la fete lorsquun lion a criniere rouge sentroduit entre les huttes a laube. Il a tue trois hommes endormis est enfui en emportant un jeune garcon dont on a retrouve l

    ssements quelques jours plus tard, a plusieurs kilometres de la.

    Seigneur !

    Au fil des annees, ce lion rouge - ou plutot leDabu Go

    insi quil etait surnomme en bemba - a multiplie les victimes parmes populations locales. On dit quil etait aussi intelligent quuumain et changeait frequemment de territoire afin dechapper a soursuivants. Les Nyimbas affirment que le Lion Rouge se nourxclusivement de chair humaine et peut ainsi pretendre a la vtemelle.

    Pendergast se tut, le temps de contourner un enorme trou da

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    a route.

    Et alors ?

    Vous en savez autant que moi.

    Quest-il arrive a ce lion ? Les villageois ont-ils fini par uer ?

    Des chasseurs professionnels ont tente de le pister, en vat il a continue a causer des ravages jusqua sa mort. Sil est mo

    onclut Pendergast avec une mimique dramatique.

    Mais enfin, Aloysius ! Vous savez aussi bien que moi que peut pas sagir du meme !

    Cest peut-etre lun de ses descendants, porteur d

    memes caracteristiques genetiques.

    Et des memes gouts culinaires, ajouta Helene avec ourire carnassier.

    Le soleil etait couche lorsquils parvinrent enfin au camp

    Nsefu que recouvrait le manteau bleu de la nuit. Installe le long daux de la Luangwa, le camp etait constitue de quelquondevaals, des huttes de boue et de paille, que completaient uar en plein air et une dependance ouverte, reservee aux repas donvives.

    Cest tout a fait charmant, dit Helene en observant

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    isposition des lieux.

    Nsefu est le camp de safari-photo le plus ancien du payxpliqua Pendergast. Il a ete cree dans les annees 1950 par hasseur Norman Carr, a lepoque ou la Zambie appartenait enco

    la Rhodesie. Carr a ete lun des premiers a comprendre quroposer aux touristes de photographier les animaux au lieu de luer etait moins cruel, et plus lucratif.

    Merci de la lecon, professeur. Vous avez lintentioorganiser un controle surprise apres le cours ?

    Pendergast rangea le Land Rover sur laire poussiereueservee aux voitures. Le bar et le refectoire etaient deserts, ersonnel setant retranche dans les huttes, mais les lumieres amp brillaient et le groupe electrogene ronronnait de toute uissance.

    Ils nont pas lair tres rassures, constata Helene escendant du 4 x 4, accompagnee par le chant des cigales,

    La porte de larondevaalla plus proche secarta en dessina

    n trait jaune sur la terre battue. Un homme en sortit, vetu duhort kaki soigneusement repasse que completaient chaussettmontantes et rangers en cuir.

    Alistair Woking, le chef de district, glissa Pendergast oreille de sa femme.

    Je naurais jamais devine.

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    Le personnage en chapeau de cow-boy australien qaccompagne est Gordon Wisley, le gerant du camp.

    Entrez, je vous en prie, les invita le chef de district en le

    errant la main. Nous serons plus a laise a linterieur pour discute

    Sil vous plait, epargnez-nous ca ! secria Helene. Novons passe la journee enfermes dans la voiture. Prenons plutot uerre au bar.

    Eh bien, balbutia Woking dun air hesitant.

    Et tant mieux si le lion nous rend visite. Ca nous evitera e traquer dans la brousse. Nest-ce pas, Aloysius ?

    Largument est imparable.

    La jeune femme ouvrit la portiere arriere du Land Rover empara de letui de toile dans lequel etait range son fusil. Soompagnon limita, passant en bandouliere une lourde boite en fontenant des munitions.

    Messieurs ? dit-il Si vous voulez bien nous indiquer hemin ?

    Tres bien, repondit le chef de district, partiellement rassuar la vue des armes de chasse, Misumu !

    Un Africain coiffe dun fez de feutre, une echarpe rouge auto

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    u cou, passa la tete par la porte entrouverte de lune des huttes ersonnel.

    Nous souhaiterions prendre un verre, si ca ne tennuie pas

    Le petit groupe gagna le bar au toit de paille tandis quMisumu prenait place derriere le comptoir de bois poli, le visarispe par la peur.

    Un Makers Mark, commanda Helene. Avec des glacons

    Deux, ajouta son mari. Avec des feuilles de menthe, si voun avez.

    Du bourbon pour tout le monde, precisa Woking. Vouussi, nest-ce pas, Wisley ?

    Ce que vous voulez, tant que cest fort, repliqua ce dernvec un rire nerveux. Quelle histoire !

    Le barman remplit quatre verres et Pendergast porta le sienes levres afin de rincer la poussiere qui lui dessechait le gosier.

    Racontez-nous les evenements dhier, monsieur Wisley.

    Le gerant du camp, un grand gaillard aux cheveux rouexprimait avec un fort accent de Nouvelle-Zelande.

    Tout a commence apres le dejeuner. Nous avions dounvites, le camp etait au complet.

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    Tout en lecoutant, Pendergast tira la fermeture eclair de letontenant son fusil et sortit un Holland & Holland a double cane calibre 465. Il ouvrit laction et entama le nettoyage de larme.

    Qua-t-on servi au dejeuner ?

    Des sandwichs. Jambon, dinde, kudu roti et concombvec du the glace. Nous proposons a nos invites un repas leger ejeuner, a cause de la chaleur.

    Pendergast hocha la tete tout en essuyant soigneusement

    rosse de noyer.

    On avait bien entendu un lion rugir cette nuit-la dans avane, mais il semblait setre calme avec larrivee du jour. Lhenomene na rien dexceptionnel par ici, cest meme lun d

    touts du camp.

    Charmant.

    Je ne comprends pas ce qui a pu se passer. Cest remiere fois que survient un tel drame.

    Pendergast observa brievement son interlocuteur avant etourner a sa tache.

    Si je comprends bien, il ne sagit pas dun lion de la region

    Non. Plusieurs troupes cohabitent dans le coin et je connaous les animaux de vue. Celui-ci etait un male solitaire.

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    De grande taille ?

    Detresgrande taille.

    Digne de figurer dans les annales ?

    Wisley grimaca.

    Et meme plus.

    Je vois.

    Le touriste allemand et sa femme, les Hassler, se sont leve table les premiers. Il devait etre 14 heures. Dapres la femme, egagnaient leurrondevaal lorsque le lion a jailli des fourres. Ilaute sur son mari et lui a plante les crocs dans la gorge. La femm

    est mise a hurler tout ce quelle savait, le malheureux ausomme vous pouvez vous en douter, et nous avons accouru, mais on avait disparu dans la brousse en emportant sa proie. Une scenerrible. Le pauvre bougre poussait des cris terrifiants, et puis il seu et on na plus entendu que le bruit de

    Il laissa sa phrase en suspens.

    Mon Dieu, balbutia Helene. Personne na pense a prendn fusil ?

    Bien sur que si, acquiesca Wisley. Nous avons lobligatio

    etre armes lorsque nous partons en expedition avec les touriste

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    mais je nai pas ose me lancer a la poursuite de lanimComprenez-moi, monsieur Pendergast, je nai rien dun tireelite. Jai tout de meme tire plusieurs coups en direction des brut le lion sest eloigne dans la savane. Je lai peut-etre blesse.

    Ce serait regrettable, retorqua Pendergast sechement. Il ait guere de doute quil aura traine le corps dans son sillage. Avezous pense a preserver ses traces sur le lieu de lattaque ?

    Bien sur. Certaines dentre elles ont pu etre effacees dansanique generale, mais jai tout de suite veille a mettre en place

    erimetre de securite.

    Excellente initiative. Je suppose que personne ne seventure dans la savane ?

    Non. Ils etaient tous au bord de la crise de nerfs et no

    vons evacue tout le monde, a lexception dun minimum ersonnel.

    Pendergast lanca un coup doeil vers sa femme. Elle aussi avettoye son arme, un Krieghoff Big Five 500/416, tout en ecouta

    e recit de Wisley dune oreille attentive.

    Le lion a-t-il fait parler de lui depuis ?

    Non. Il a regne un silence de mort toute la nuit, commujourdhui. Il est peut-etre parti.

    Cest peu probable, a moins quil nait termine de devor

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    a victime, repliqua Pendergast. Le lion ne seloigne jamais de plun ou deux kilometres lorsquil tient une proie. Qui la vu ?

    Uniquement lAllemande.

    Et elle affirme quil avait une criniere rouge ?

    Exactement. Au debut, elle etait hysterique et pretenduil etait couvert de sang. Elle a fini par se calmer et nous avons pui poser quelques questions. Il semble que la criniere de lanimtait rouge vif.

    Comment pouvez-vous etre sur quil ne sagissait pas ang ?

    Les lions sont presque maniaques avec leur crinierntervint Helene. Ils la nettoient regulierement. Je nai jamais vu

    ang sur la criniere dun lion, uniquement sur sa gueule.

    Que proposez-vous ? questionna Wisley.

    Pendergast avala une longue gorgee de bourbon.

    Il nous faut attendre laube. Jaurai besoin de votre meilleisteur et dun porteur de fusil. Ma femme maccompagnervidemment.

    Comme Wisley et le chef de district lobservaient en silenun air perplexe, Helene leur adressa un sourire.

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    Le premier, Woking seclaircit la gorge.

    Jai bien peur que ce ne soit pas tres tres regulier.

    Pourquoi ? Parce que je suis une femme ? setonna Hele

    un air amuse. Ne vous inquietez pas, ce nest pas contagieux.

    Non, non ! sempressa de corriger le chef de district. Maous nous trouvons dans une reserve naturelle et seules lersonnes accreditees par les autorites sont autorisees a tirer,

    De nous deux, le meilleur tireur est encore ma femmouta Pendergast. En outre, la chasse au lion se pratique toujourseux.

    Il marqua un leger temps darret avant de poursuivre :

    A moins que vous ne souhaitiez maccompagner ?

    Woking ne repondit pas.

    Je ne laisserai pas mon mari saventurer tout seul dans rousse, reprit Helene. Cest bien trop dangereux. Il pourrait et

    lesse ou pire.

    Je vous remercie de votre confiance, ma chere Helenrinca Pendergast.

    Aloysius, vous vous souvenez de cette antilope que vovez manquee a moins de deux cents metres ? Cest comme si vo

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    viez rate une porte de garage a bout portant.

    Je vous en prie, il y avait un fort vent lateral. En outranimal a bouge inopinement.

    Vous avez mis trop longtemps a viser. Vous reflechisseop, cest bien votre probleme.

    Pendergast se tourna vers Woking.

    Ainsi que vous pouvez le constater, nous avons besoin lu

    e lautre. Ce sera les deux, ou personne.

    Tres bien, soupira le chef de district. Quen pensez-voumonsieur Wisley ?

    Le gerant du camp hocha la tete a contrecoeur.

    Dans ce cas, rendez-vous demain matin a 5 heures. ompte sur vous pour nous fournir un excellent pisteur.

    Nous avons lun des meilleurs de toute la Zambie, JasMfuni, meme sil est surtout habitue a travailler pour des safari

    hotos.

    Tant quil a des nerfs a toute epreuve, cela na gueimportance.

    Cest le cas.

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    Je vous demanderai davertir les populations locales auelles se tiennent a lecart. Il est hors de question que quiconquienne nous deranger.

    Inutile, le rassura Wisley. Les villages voisins sont desert

    A part nous, vous ne trouverez personne a trente kilometres a onde.

    Comment les habitants ont-ils pu senfuir aussi vite etonna Helene. Lattaque na eu lieu quhier.

    Le Lion Rouge, retorqua le chef de district, comme si om expliquait tout.

    Helene et son mari echangerent un regard dans un silenesant, puis Pendergast se leva et prit la main de sa femme.

    Merci pour ce verre. A present, si vous voulez bien noumontrer notre hutte ?

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    Les arbres a fievre

    La nuit avait ete silencieuse. Les bandes de lions, dont lugissements trouaient habituellement le silence, etaient reste

    muettes, a linstar des animaux nocturnes dont la clameur setteinte. Jusquau murmure assourdi de la riviere qui refletait mal uissance de son cours, tout en parfumant lair de senteurs humide

    avait fallu attendre les premieres lueurs de laube pour qesonne enfin le chant caracteristique de leau chaude que lon verans les citernes en prevision des douches du matin.

    Pendergast et sa femme avaient deja quitte leur hutte ttendaient dans le refectoire, assis sous la lueur blafarde dun

    maigre ampoule, leurs fusils poses a cote deux. Aucune etoile narvenait a percer la couverture nuageuse et lobscurite enveloppe reste du camp. Cela faisait trois quarts dheure quils patientaien silence, heureux detre ensemble, se preparant mentalementepreuve qui les attendait. Helene Pendergast avait pose la tete s

    epaule de son compagnon et celui-ci lui caressait la main, jouaarfois avec le saphir etoile de son alliance.

    Inutile dessayer de me le reprendre, declara-t-elle duoix que le silence avait rendue rauque.

    Il se contenta dun sourire et poursuivit son manege.

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    Une silhouette frele se detacha de lombre, celle dun homme petite taille en pantalon et chemise sombres, arme dune sagaie

    Le couple se redressa.

    Jason Mfuni ? senquit Pendergast dune voix sourde.

    Oui, monsieur.

    Pendergast lui tendit la main.

    Si cela ne vous derange pas, Jason, evitez les . Je mappelle Pendergast et voici mon epouse, Helene.

    Lhomme hocha la tete et serra de facon presque flegmatiqua main que lui tendait Helene.

    Le chef de district veut parler a vous, mademoiselle Helen

    La jeune femme se leva et Pendergast limita.

    Excusez-moi, monsieur Pendergast, mais il veut eeulement.

    De quoi sagit-il ?

    Il a peur quelle manquer dexperience.

    Cest ridicule, simpatienta Pendergast. La question a e

    eglee hier soir.

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    Helene balaya largument dun geste en riant.

    Ne vous offusquez pas pour si peu. LEmpire britanniqua visiblement pas dit son dernier mot par ici, la femme est censttendre sagement dans la veranda, un eventail a la main, pres

    efaillir a la vue dune goutte de sang. Je me charge de lui remettes idees en place.

    Pendergast se laissa retomber sur son siege tandis que isteur attendait a cote de lui en se dandinant dun pied sur lautr

    mal a laise.

    Vous pouvez vous asseoir, Jason.

    Non merci.

    Vous etes pisteur depuis longtemps ?

    Plusieurs annees, repondit lhomme dun air laconique.

    Vous connaissez bien le metier ?

    Mfuni haussa les epaules.

    Avez-vous peur des lions ?

    Parfois.

    Vous avez deja tue un felin a laide de cette sagaie ?

    Non.

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    Je vois.

    Cest sagaie toute neuve, monsieur Pendergast. Quand ue un lion avec sagaie, elle est cassee ou tordue, alors jen pren

    ne autre.

    Le silence retomba sur le camp que laube naissanommencait a rosir. Cinq minutes secoulerent, puis dix.

    Que font-ils donc ? sagaca Pendergast. Je ne voudrais p

    artir trop tard.

    Mfuni, appuye sur sa sagaie, haussa a nouveau les epaules.

    Helene apparut au meme moment et reprit sa place a cote on mari.

    Vous avez remis cet animal a sa place ? senquit Pendergan riant.

    Elle ne repondit pas et il constata avec etonnement quelle etleme.

    Que se passe-t-il ?

    Rien. Un peu de de trac avant la chasse.

    Vous pouvez rester ici, si vous preferez.

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    Pas question, secria-t-elle avec vehemence. Je manquerais ca pour rien au monde.

    Dans ce cas, il est temps de nous mettre en route.

    Pas encore, dit-elle dune voix sourde en posant une maraiche sur le bras de son mari. Vous savez quoi, Aloysius ? Nouvons oublie de regarder la lune se lever hier soir. Elle etait pleine.

    Avec cette histoire de lion, ca mest sorti de la tete.

    Alors, au moins regardons-la se coucher.

    Elle prit la main de son compagnon dans la sienne, endergast constata quelle etait brulante.

    Helene

    Elle lui serra les doigts.

    Ne dites rien.

    Le disque pale de la lune descendait lentement dans les refle

    mauves de lhorizon, son reflet dore flottant a la surface des eauumultueuses de la Luangwa. Parce quils setaient connus un soe pleine lune, les Pendergast setaient astreints a toujours assistu lever de lastre nocturne chaque fois que loccasion setresentee, mettant un point dhonneur a sacrifier a ce ritunsemble, quelles que fussent leurs occupations et les circonstance la vie.

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    La lune atteignit le sommet des arbres dont la silhouette ecoupait de lautre cote de leau, puis elle seffaca tandis que iel rosissait. Au mystere de la nuit succedait une nouvelle journee

    Au revoir, chere vieille lune, la salua Pendergast dun to

    eger.

    Helene lui serra une nouvelle fois les doigts et se mit debout oyant le chef de district et Wisley emerger de la tenintendance. Un troisieme personnage les accompagnait, u

    omme grand et mince aux traits emacies troues de deux yeuaunes.

    Je vous presente Wilson Nyala, annonca Wisley. Il porteros armes.

    Des poignees de main furent echangees a la ronde tandis que arman de la veille apparaissait avec une grande theiere de tapsang souchong.

    Les convives burent en silence, et Pendergast donna le signu depart en reposant sa tasse.

    Allons jeter un coup doeil a lendroit ou sest produit rame.

    Nyala prit un fusil en bandouliere sur chaque epaule et le peroupe rejoignit un chemin de terre longeant la riviere. Au-dela du

    pais buisson de miombos se dessinait un carre de terre battu

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    rojectiles de calibre 500/416 a pointe molle.

    Ce fusil me semble bien gros pour une femme aussi menuemarqua Woking.

    Jai un faible pour les gros calibres, retorqua Helene.

    Gros calibre ou pas, je suis heureux de ne pas me lancera poursuite de ce monstre, reprit le chef de district.

    Je vous demanderai de veiller soigneusement a rester

    ormation triangulaire, recommanda Pendergast aux deccompagnateurs. Le vent souffle dans le bon sens, mais a partir

    maintenant, plus un mot. Nous communiquerons par gesniquement. Inutile de nous munir de lampes torches.

    Wilson et Jason approuverent. Latmosphere de faus

    nsouciance qui regnait autour deux setait evaporee, emportee pes premieres lueurs du soleil qui chassaient la penombre. Enfiendergast donna a Mfuni le signal du depart.

    Le pisteur savanca au milieu des hautes herbes, la sagaie a main, en suivant la piste rouge laissee par le mangeur dhomme. Laces seloignaient de la riviere et senfoncaient au milieu dpineux et des buissons de mopane, le long des eaux de la Chiten affluent de la Luangwa. Le petit groupe marchait prudemmenans jamais perdre de vue les traces du felin. Le pisteimmobilisa et montra avec sa sagaie un large cercle dans lherb

    u milieu duquel setalait une tache sinistre encore humide. Du sanvait gicle jusque sur les feuilles des buissons alentour. To

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    ndiquait que le lion setait arrete la pour devorer sa victime encoalpitante, avant detre chasse par les coups de feu de Wisley.

    Jason Mfuni se pencha et ramassa la moitie dune machoiumaine nettoyee de sa chair. Lhorrible trophee portait encore l

    aces des dents de lanimal. Pendergast lexamina sans mot diruis Mfuni reposa lossement avant de pointer du doigt uuverture dans le mur de vegetation qui les entourait.

    Le pisteur se glissa dans la trouee, sarretant tous les vinmetres afin decouter, de humer lair, ou encore dexaminer un

    ace rouge sur une feuille. Le corps avait acheve de se vider de sang a ce stade et seules quelques taches ecarlates signalaiencore le passage de lanimal.

    La lumiere du jour augmentait de minute en minute, le sol

    ommencait a poindre au-dessus des arbres, rendant dautant plnquietant le silence que soulignait le bourdonnement insistant dnsectes.

    La battue se poursuivit sur pres de deux kilometres sous uoleil incandescent qui embrasait la brousse en affolant depa

    uages de mouches tse-tse, dans un air surchauffe charge dundeur de poussiere et dherbes seches. La piste quitta brusquemea savane pour senfoncer sur un espace degage, a lombre ducacia au pied duquel selevait une termitiere. Au centre de cetlairiere naturelle setalait une masse indefinissable rouge et blanu-dessus de laquelle tournoyaient des milliers dinsectourdonnants.

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    Mfuni sapprocha prudemment, suivi par Pendergast, Helene e porteur. Le petit groupe se dispersa en silence autour du corpsemi devore du photographe allemand. Le lion avait defonce oite cranienne du malheureux avant de lui dechiqueter le visage, ui devorer la cervelle et la partie superieure du torse, laissa

    erriere lui deux jambes intactes dont il avait soigneusement leche ang, ainsi quun bras dont la main serrait encore une touffe oils. Les gorges etaient nouees. Mfuni se pencha, saisit quelquns des poils et les examina longuement avant de les tendre endergast : ils etaient dun rouge vif. Helene les observa a s

    our, puis les rendit au pisteur.

    Tandis que ses compagnons patientaient pres du corps, Mfuourna lentement autour de la clairiere, a la recherche de nouvellaces. Un doigt sur la bouche en signe de silence, il designa auois autres unvlei,une sorte de marais seche recouvert dherb

    autes au milieu duquel se dressait un gros bosquet darbres a fievessinant leurs silhouettes en ombrelle. Le pisteur montra dun gese sillon laisse par le lion dans les herbes et sapprocha endergast, lair grave.

    Que se passe-t-il ? lui demanda ce dernier a voix basse.

    Lion malin. Tres malin. Endroit dangereux.

    Pendergast acquiesca et jeta un coup doeil en directiHelene. Toujours aussi pale, la jeune femme avait lair plu

    eterminee que jamais, a linverse de Nyala, le porteur de fusils, qe songeait meme pas a dissimuler sa nervosite. Pendergast hesi

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    uis il ordonna a Mfuni davancer.

    Le petit groupe saventura a pas de loup entre les herbeantes qui limitaient la vision a quelques metres, tout au plus. Lges creuses sagitaient en murmurant sur leur passage, dans un

    deur etouffante de poussiere surchauffee. A mesure quienfoncaient dans la savane, les trois hommes et la femme ouverent enveloppes dans un monde dun vert irreel, inaccessibux rayons du soleil, le bourdonnement des insectes cedarogressivement la place a un sifflement obsedant.

    Le pisteur ralentit en approchant du bosquet darbres a fievruis il leva la main et montra son nez. Pendergast emplit soumons et reconnut lodeur musquee dun felin, a laquelle

    melaient des effluves de charogne.

    Mfuni saccroupit et signala a ses compagnons dagir meme, sachant quils avaient plus de chances dapercevoir le pelaauve du lion au ras du sol. Ils penetrerent de la sorte dans le peois darbres a fievre, avancant centimetre par centimetre. La boechee a leurs pieds, dure comme de la pierre, ne portait aucunace de lanimal, mais les tiges ecrasees sur son passage le

    montraient la voie a suivre.

    Le pisteur simmobilisa une nouvelle fois en leur faisaomprendre quune discussion simposait. Helene et Pendergaapprocherent et ils entamerent un conciliabule, le murmure

    eurs voix couvert par le vrombissement des insectes.

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    ondir a tout moment, tenez-vous prete a le tirer sur ma droite.

    Dun geste, Pendergast demanda au porteur de lui tendre susil. Le canon etait brulant a cause du soleil et il glissa larme soon bras. Dun mouvement du pouce, il degagea le cran de surete

    usta la bille divoire servant de mire nocturne afin de mieux voans la penombre des herbes hautes. A son tour, Helene prit sousil des mains de Nyala.

    Pendergast savanca droit devant lui, suivi par le pisteur renmuet par la peur.

    Il ecartait la vegetation le plus delicatement possible, veillantmettre un pied devant lautre sans bruit, attentif au moindmouvement susceptible de lui signaler que lanimal allait bondir.urait le temps de tirer une seule fois, un lion furieux etant capabe parcourir cent metres en quatre secondes, et la presenHelene dans son dos le rassurait.

    Il se figea dix metres plus loin et attendit. Le pisteur se postaote de lui, lair mecontent. Les deux hommes resterent immobilendant deux bonnes minutes. Tous les sens aux aguets, Penderga

    entendait rien dautre que la sarabande des insectes. Larme etaoisseuse entre ses mains moites, la poussiere lui faisait la boucateuse. Une tres legere brise agita les herbes au-dessus de leuetes et le ronronnement des insectes se transforma en murmuvant de seteindre. Autour deux, le temps setait arrete.

    Avec une lenteur infinie, Mfuni tendit un doigt a quatre-ving

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    ix degres a gauche.

    Parfaitement immobile, Pendergast suivit son manege des yeuuis il explora du regard le labyrinthe qui lentourait, a la rechercun morceau de fourrure ou dun oeil jaune. Rien.

    Un grondement grave, puis un rugissement effroyable, et umasse leur fondit dessus avec la force dun train de marchandiseroit devant eux.

    Pendergast pivota sur lui-meme en voyant une enorme omb

    ougeatre jaillir entre les herbes, la gueule ouverte sur un gouffose garni de dents. Il dechargea le premier canon de son armans un tonnerre assourdissant, mais il navait pas eu le temps iser et le lion etait sur lui, un fauve gigantesque de trois cents kilui lecrasa de toute sa masse. Il sentit les griffes du monstre abourer lepaule et poussa un cri, a moitie etouffe par le poids danimal, essayant desesperement de recuperer de sa main libre usil qui avait vole lors du choc.

    Le fauve etait si bien cache, il se trouvait si pres et avait bonbrusquement quHelene Pendergast navait pas eu le temps

    rer. Il etait trop tard a present, les deux silhouettes emmelempechaient toute tentative. Elle parcourut en quelques enjambea dizaine de metres qui la separaient du lieu du drame, criant esticulant afin dattirer lattention du monstre qui grondait de facbominable. Elle sarreta aux pieds de la bete a linstant precis o

    Mfuni lui enfoncait sa sagaie dans le ventre. Lanimal, dune tail

    monstrueuse, abandonna sa proie et se jeta sur le pisteur a qui

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    rracha une partie de la jambe avant de senfoncer dans la foret derbes hautes, le manche de la sagaie depassant de son ventre.

    Helene visa soigneusement le dos de lanimal et tira, rudemeecouee par la puissance du recul.

    La cartouche Nitro Express manqua sa cible et le lion disparu

    Sans attendre, elle se precipita au secours de son mari qardait toute sa conscience.

    Non, lui intima Pendergast dune voix rauque.Lui

    Un coup doeil lui montra que Mfuni, allonge sur le dos, perdeaucoup de sang de sa blessure a la jambe droite. Lors attaque, le lion lui avait emporte le mollet, le muscle pendait par

    ambeau de peau.

    Mon Dieu !

    Elle dechira aussitot les pans de sa chemise quelle entortilla sux-memes afin de realiser un garrot, puis elle le fixa autour de lessure en serrant a laide dun morceau de bois ramasse par terr

    Jason ? demanda-t-elle dune voix tendue. Jason ! Ne vovanouissez pas, je vous en prie.

    Le visage du pisteur etait couvert de sueur, ses yeuemblaient.

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    Maintenez le garrot en place, en relachant la pressionous etes gagne par lengourdissement.

    Il ecarquilla les yeux.

    Mensahib, le lion revient.

    Tenez-le

    Il revient !insista-t-il dune voix terrorisee.

    Sans se soucier de lavertissement, Helene se pencha vers smari, prostre sur la terre seche, le teint cireux. Son epaule, couvere sang, navait plus forme humaine.

    Helene, balbutia-t-il en tentant de se relever. Recuperotre arme.Tout de suite.

    Mais enfin, Aloysius

    De grace, votre arme !

    Trop tard. Avec un rugissement terrifiant, le lion bondit sur

    eune femme dans un tourbillon de poussiere et dherbes. Heleoussa un cri et tenta dechapper a lemprise du fauve qui grippait le bras. Dun coup de machoire, le monstre serra les denans un bruit sinistre dos brises. Juste avant de sevanouendergast eut le temps de voir lanimal entrainer sa proie hurlanans la savane.

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    Lorsque Pendergast reprit ses esprits, il se trouvait dans lu

    es rondevaals du camp et un helicoptere bourdonnait dans ointain.

    Il se dressa en poussant un cri et vit le chef de district, Wokinaillir dun fauteuil au fond de la hutte.

    Ne vous fatiguez pas, lui recommanda Woking. Vous alletre evacue en helicoptere, votre transfert a ete

    Ma femme ! secria Pendergast, au comble de lagitatioOu est ma femme ?

    Allons, allons ! Soyez

    Pendergast sauta a bas du lit et se leva, dope par ladrenaline

    Ma femme, espece de salaud !

    Personne na rien pu faire, le lion lavait deja emporteAvec un blesse evanoui et un autre en train de perdre tout soang

    Pendergast se dirigea en titubant vers lentree de la hutApercevant son fusil, range sur un ratelier, il le saisit, ouvrit lactiot constata quil contenait encore une balle.

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    Quest-ce que vous ? demanda Woking en tentant de loquer le passage.

    Pendergast referma larme avec un claquement sec et pointa ouble canon vers le chef de district.

    Laissez-moi passer.

    Woking secarta precipitamment et Pendergast poussa la porn vacillant. Le soleil allait se coucher, douze heures setaiecoulees depuis le drame. Le chef de district se rua dehors

    esticulant.

    A laide ! Au secours ! Le blesse est devenu fou !

    Sans preter attention aux cris qui resonnaient dans son doendergast senfonca dans la savane en marchant sur le chemmprunte le matin meme. Insensible a la douleur, sans economises forces, il suivit les traces du lion pendant pres dun quaheure avant de se retrouver a lentree de lespace denude au-deuquel setendaient le vlei et le petit bois darbres a fievre. Louffle rauque, il ecartait les herbes geantes en saidant avec

    anon de son arme tandis que les oiseaux effrayes segaillaient son passage. Les poumons en feu, son bras blesse degoulinant ang, il avancait en articulant des paroles incoherentes, porte penergie du desespoir. Soudain, les mots se figerent dans sa gorgt il simmobilisa en decouvrant un objet blafard entre les tigmmenses, a meme la boue sechee. Les yeux hagards, il reconnne main de femme, a lannulaire de laquelle brillait un saphir etoile

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    Un hurlement qui navait rien dhumain sechappa de ses levrt il savanca dun pas mal assure avant de sarreter quelqu

    metres plus loin en bordure dun espace vierge au milieu duquel on a la criniere flamboyante terminait sagement son repas, ramasur lui-meme. Une vision dhorreur attendait Pendergast dssements avec des lambeaux de chair, le chapeau dHelene, lestes dechiquetes dune tenue de brousse kaki, le tout au miliune odeur de fauve a laquelle se melait le parfum de la jeunemme.

    Brusquement il apercut la tete. Arrachee du corps au momee la curee, elle etait curieusement intacte et deux yeux bleus pique points violets le regardaient fixement.

    Dun pas hesitant, Pendergast sapprocha a moins de dmetres du lion. Celui-ci releva son enorme tete en se lechant l

    abines et posa sur lui un regard parfaitement serein. Le soufourt et hache, Pendergast leva le Holland & Holland avec son bralide, visa lentement en pointant la bille divoire de la mire sur ete du monstre, et appuya sur la detente. Le projectile atteignit on en plein front, entre les deux yeux, faisant eclater la calotranienne dans un brouillard rouge de cervelle. La criniere ecarlae lanimal, a peine agitee par la puissance de lexplosion, retombentement au milieu des restes humains qui gisaient sur le sol.

    Perches dans les branches des arbres a fievre calcines par oleil, des milliers doiseaux saluerent la mort du lion.

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    Paroisse Saint-Charles, Louisiane - Aujourdhui

    La Rolls-Royce Grey Ghost avanca lentement sur lallee ravier en arc de cercle, le crissement des pneus etouffe pepaisses touffes de mauvaises herbes. La Mercedes qui suivait ieille Rolls sarreta aussi devant la colonnade dune vieilantation dont la facade, de style grec, etait encadree

    enerables chenes dou pendaient des guirlandes de mousspagnole. Une plaque de cuivre signalait quePenumbraavait erigee en 1821 par la famille Pendergast et quelle etait inscrite egistre des Monuments historiques.

    A. X. L. Pendergast descendit de la Rolls en examinattentivement le decor qui lentourait. On etait en fevrier, lapre

    midi touchait a sa fin et un soleil pale dessinait des jeux dombre e lumiere entre les colonnes, striant le porche de rayons dores. Dares echarpes de brume diaphanes flottaient au-dessus dunelouse trop haute, envahissant le jardin mange dherbes au-de

    uquel setendaient des marecages bordes de cypres. Une epaisatine de vert-de-gris recouvrait les balustrades en cuivre remier etage, la peinture de la colonnade secaillait et il regnutour de Penumbra une atmosphere dabandon, dhumidite et esuetude.

    Un personnage dallure etrange descendit de la Mercede

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    etit et courtaud, il portait une redingote noire rehaussee dun oeillanc, accroche a la boutonniere.

    Notaire a La Nouvelle-Orleans, lhomme ressemblait a maitre dhotel de club anglais. Malgre le ciel limpide, il ten

    ignement un parapluie roule sous le bras et balancait une mallen peau dalligator dans une main gantee. Dun geste pleelegance, il posa sur sa tete un chapeau melon et savanca.

    Apres vous, monsieur Pendergast, declara-t-il en dirigeaa main libre vers un petit jardin botanique mal entretenu, ferme p

    ne haie, a la droite de la maison.

    Je vous en prie, monsieur Ogilvy.

    Merci a vous, repliqua le petit homme en traversaapidement la pelouse detrempee.

    Ogilvy poussa la barriere qui souvrait au milieu de la haie enetra dans le jardin botanique, suivi par Pendergast. Du memas assure, il emprunta une allee dont le gravier avait fini pisparaitre sous les herbes folles, et marcha vers un tsuga

    Canada derriere lequel on apercevait un carre de terrain ceint rilles rouillees. Des steles de marbre et des pierres tombalmangees par la vegetation selevaient de tous cotes, certaines a erticale, dautres perilleusement penchees.

    Le petit homme se planta devant une sepulture imposante

    aisit a deux mains la poignee de sa mallette en attendant que sompagnon le rejoigne. Peu presse, Pendergast prit le temps

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    arcourir le petit cimetiere familial en se caressant le menton dir songeur avant de sarreter a cote du notaire.

    Fort bien, dit ce dernier avec un sourire de circonstancNous voici a nouveau ici.

    Pendergast acquiesca machinalement, puis il sagenouilcarta les mauvaises herbes qui cachaient linscription et lut a voaute :

    Hic jacet sepultus

    Louis de Frontenac Diogene Pendergast2 avril 1891 - 15 mars 1965

    Tempus edax rerumDebout derriere Pendergast, M. Ogilvy placa sa mallette

    quilibre sur la stele, louvrit et sortit un document quil posa sur

    ouvercle rabattu. Monsieur Pendergast ? dit-il en tendant a son compagn

    n stylo plume en argent.

    Pendergast prit le stylo et apposa sa signature sur la feuille.

    Le notaire y ajouta sa griffe accompagnee de la date, donna uoup de tampon et rangea le document dans la mallette queferma a laide dune petite cle.

    Voila qui est fait ! Il est a present etabli que vous vous et

    endu sur la tombe de votre grand-pere, je ne suis donc pas tenu dous desheriter. Pas encore, tout du moins ! precisa-t-il avec u

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    etit gloussement.

    Pendergast se releva et le petit homme lui tendit une maotelee.

    Cest toujours un plaisir, monsieur Pendergast. Aveespoir de vous retrouver ici meme dans cinq ans, conformemeux dispositions de la rente familiale dont vous etes le beneficiaire.

    Tout le plaisir est pour moi, et il le restera, repliquendergast en souriant sechement.

    Parfait ! Dans ce cas, il ne me reste plus qua retourner ille. Me ferez-vous lhonneur de me suivre ?

    Javais prevu de rendre visite a Maurice. Il men voudraite ne prenais pas le temps de le saluer.

    Tout a fait, tout a fait ! Dautant quil soccupe tout seul denumbra depuis maintenant eh bien douze ans, si je ne mabus

    Vous savez, monsieur Pendergast, ajouta le notaire sur un ton donspirateur, vous devriez remettre cet endroit en etat. Vous ereriez un tres bon prix. Ces vieilles plantations davant la guerre ecession sont extremement a la mode, celle-ci ferait une maishotes ravissante !

    Je vous sais gre de vos conseils, monsieur Ogilvy, mais ompte la garder encore quelque temps.

    A votre guise, a votre guise ! Evitez toutefois la nuit tombe

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    ous risqueriez de croiser un vieux fantome.

    Fier de son bon mot, le petit homme seloigna en gloussant, mallette a la main, et disparut rapidement tandis que Pendergaestait seul au milieu des tombes. Le moteur de la Merced

    onronna au loin et le silence reprit ses droits apres un dernirissement de pneus sur le gravier.

    Pendergast circula quelques minutes encore au milieu des steluil prenait le temps de dechiffrer. Chaque nom faisait surgir deplis de sa memoire des souvenirs inattendus. La plupart de ceu

    ui reposaient la avaient ete exhumes de la crypte de la maisamiliale de Dauphine Street, au lendemain de lincendie qui avetruit la vieille demeure du clan Pendergast a La Nouvell

    Orleans.

    Le soleil disparut derriere les arbres, emportant avec lui sayons dores, et la brume bleme filtrant des eaux du marais envaheu a peu lespace dans une odeur entetante de mousse et ougere. Pendergast resta longtemps immobile au milieu imetiere, dans le silence du soir qui commencait a tomber. avers les arbres du jardin botanique apparurent les premier

    ueurs en provenance des fenetres de la plantation. Un parfum hene brule flottait dans lair, evocateur des annees passees dans ceu au moment de lenfance. En levant les yeux, Pendergast apercn filet de fumee bleutee selevant paresseusement de la granheminee de brique. Rappele a la realite, il quitta le cimetieraversa le jardin botanique et gagna le porche dont les planch

    ordues gemirent sous son poids.

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    Il frappa du poing la porte dentree, recula dun pas et attendUn craquement resonna dans les profondeurs de la maison, suun bruit de pas dune grande lenteur, dun grincement de serrurt le battant secarta sur la silhouette courbee dun vieil hommorigine raciale indeterminee. La mine grave, il portait la tenaracteristique des majordomes dautrefois.

    Maitre Aloysius, dit-il avec reserve et distinction, sans osendre la main a son visiteur.

    Pendergast avanca la sienne et le vieil homme la saisit entre soigts noueux avec une pression amicale.

    Maurice, comment allez-vous ?

    Moyennement, repondit celui-ci. Jai apercu les voitur

    out a lheure. Un verre de sherry, monsieur ?

    Avec grand plaisir, je vous remercie.

    Maurice pivota lentement sur lui-meme et traversa le hentree, Pendergast sur les talons. Les deux hommes penetrere

    ans une bibliotheque au fond de laquelle se consumait un feu heminee dont la chaleur suffisait a peine a chasser lhumidite.

    Maurice sactiva dans un tintement cristallin et remplit minuscule verre a sherry quil deposa sur un plateau dargent avae loffrir ceremonieusement a son hote. Pendergast y trempa l

    evres, puis regarda autour de lui. Le temps poursuiv

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    mpitoyablement son oeuvre. Des taches maculaient les papieeints, des moutons de poussiere saccumulaient dans les coins, endergast crut reconnaitre la course discrete de rats a linteriees cloisons. Le poids des cinq annees qui venaient de secoulvait lourdement affecte Penumbra.

    Si seulement vous mautorisiez a engager une gouvernantMaurice. Ainsi quun cuisinier. Cela vous epargnerait bien d

    acas.

    Mais non ! Je suis parfaitement capable de moccuper to

    eul de cette maison.

    Vous ne pouvez pas continuer a vivre ici seul. Ceangereux.

    Dangereux ? Je ne vois pas ou se trouve le danger. Je vei

    tout verrouiller chaque soir.

    Bien evidemment.

    Pendergast degusta une gorgee de sherry, un Oloroarticulierement sec, en se demandant combien il pouvait en reste bouteilles dans les vastes caves de la plantation. Bien plus que pourrait jamais en boire, tres certainement, sans parler des vines portos et des vieux cognacs. A mesure que les differentranches de la famille setiolaient, les caves a vin lui etaieaturellement revenues, tout comme le reste de la fortune d

    endergast dont il etait lunique heritier encore sain desprit.

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    Il but une nouvelle gorgee et reposa le verre.

    Eh bien, Maurice, je crois que je vais moffrir un petit toe la maison, en souvenir du bon vieux temps.

    Bien sur, monsieur. Je reste ici si vous avez besoin de moi

    Pendergast quitta son fauteuil et traversa la double porte vitrn direction du grand hall dentree. Un quart dheure durant, il visune apres lautre les pieces du rez-de-chaussee : la cuisintierement vide, une suite de salons et de petits salons, le gard

    manger. Il flottait dans lair des odeurs tout droit sorties denfance : des effluves de cire, de vieux chene, et meme uoupcon oublie du parfum de sa mere, noyes dans un melanhumidite et de moisissure. Chaque objet, chaque bibelot, chaquableau etait a sa place, du presse-papier jusquau cendrier rgent, porteur de mille et une reminiscences attachees a droches, disparus depuis longtemps. Des souvenirs de noces, aptemes, de veillees funebres, de receptions, de bals masqueenfants courant dune piece a lautre, pourchasses par eprobation de vieilles tantes.

    Des souvenirs dun passe revolu.

    Il emprunta le grand escalier et sarreta sur le palier ou deuouloirs opposes conduisaient aux chambres des deux ailes atiment, de part et dautre dun grand salon dans lequel ccedait en passant par une double porte en arc de cercle, proteg

    ar des defenses delephant.

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    Il penetra dans la piece au centre de laquelle tronait une pee zebre. Au-dessus dune cheminee immense, lenorme tete duuffle du Cap lobservait mechamment avec ses yeux de verre. Dombreux autres trophees ornaient les murs : kudus, chevreuierfs, biches, sangliers sauvages, elans

    Les mains dans le dos, il traversa lentement la piece ou la vue ces gardiens immobiles devenements oublies lui rappela ouvenir dHelene. Il avait eu le meme cauchemar la nurecedente, un cauchemar dun realisme terrifiant qui lui laissoujours un sentiment de malaise au creux de lestomac. Si un liouvait laider a affronter les fantomes de son passe, cetait bielui-ci, meme sil avait la conviction que ses demons ne uitteraient jamais.

    Le long dun mur se dressait un ratelier ancien dans lequel et

    nfermee sa collection darmes de chasse. Il navait jamais plouche a un fusil depuis ce jour terrible, lidee meme de chasser onnait la nausee. Il sagissait a ses yeux dun sport cruel et bruont il peinait a comprendre quil eut pu le seduire dans sa jeuness

    A vrai dire, cetait Helene qui lui en avait donne le gout. Fait rahez une femme, elle adorait chasser. Mais tout chez Helene eta

    are.

    Son regard se porta machinalement sur le Krieghoff de isparue, avec sa crosse de noyer poli, ses garnitures en or rgent. Ce fusil etait son cadeau de noces, offert en vue de chasse buffle du Cap en Tanzanie. Une arme splendide en bois et metarecieux, dun prix exorbitant, concue pour tuer.

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    A travers la vitre poussiereuse, il crut discerner un anneau douille a lextremite du double canon. En quelques enjambees,ejoignait le palier.

    Maurice ? appela-t-il. Auriez-vous la gentillesse d

    mapporter la cle du ratelier, sil vous plait ?

    Apres une eternite, Maurice surgit enfin dans le hall dentree.

    Bien, monsieur.

    Sur ces mots, il seclipsa avant de reparaitre quelques minutlus tard, une cle entre ses doigts noueux. Il monta lentemeescalier, passa a cote de Pendergast et simmobilisa devaarmoire vitree quil deverrouilla.

    Voila, monsieur.

    Pendergast crut discerner, derriere son masque impassible, uoupcon de fierte.

    Je vous remercie, Maurice.

    Le vieil homme lui repondit par un hochement de tete et quia piece.

    Pendergast ecarta la porte du ratelier et saisit larme avec unenteur desesperante. On aurait dit que le metal lui brulait les doig

    e coeur battant pour une raison quil ne sexpliquait pas vraimennon par le cauchemar de la nuit precedente, il deposa le fusil sur

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    rande table au milieu de la piece. Dun tiroir de larmoire vitree,ra tous les accessoires dont il avait besoin et les rangea a cote darme, puis il sessuya les mains et saisit le Krieghoff quil examioigneusement.

    Il fut surpris de decouvrir que le canon gauche, a linverse roit, etait parfaitement propre. Il reposa larme dun air pensif egagna le haut des marches.

    Maurice ?

    Oui, monsieur ? repliqua aussitot le vieux domestique.

    Savez-vous si quelquun sest servi du Krieghoff depuisepuis la mort de ma femme ?

    Vous avez demande expressement a ce que personne n

    ouche jamais, monsieur. Je suis dailleurs le seul a posseder la cu ratelier. Personne ne sen est approche.

    Je vous remercie, Maurice.

    Il ny a pas de quoi, monsieur.

    Pendergast repassa dans la salle des trophees dont il prit soette fois de refermer les portes. Dans un bureau a cylindre,ouva un vieux bloc quil ouvrit sur une page vierge avant de eposer a cote du fusil. Arme dune baguette, il entreprit d

    ettoyer soigneusement le canon droit en veillant a placer les residur la feuille avant de les examiner : a remiere vue, il sa issait

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    estes de papier calcine. Sortant de sa poche la loupe qui ne uittait jamais, il la fixa sur loeil et etudia les residus. Le douetait plus permis, il sagissait de fragments carbonises de bourreusil.

    La decouverte etait dautant plus surprenante que les munitiotilisees par Helene, des cartouches Nitro Express de calib00/416, constituees dune balle et dune douille remplie ordite, etaient exemptes de bourre. Jamais un projectile de ce typaurait laisse ce type de trace.

    Lexamen du canon gauche demontra quil etait propre et huiendergast sen assura en passant un chiffon a linterieur avec aguette. Aucune trace de brulure.

    Il se redressa, les sourcils fronces. Larme avait servi pour erniere fois le jour fatidique. Il se forca a repenser enchainement des evenements, un exercice quil setait toujoupargne, mais il neut aucun mal a voir resurgir les details dans ete, chaque instant du drame etant reste grave dans sa memoire.

    Helene navait tire quun seul coup. Le Krieghoff etait equi

    e deux detentes, situees lune derriere lautre : la premiectionnait le canon droit, cetait naturellement celle que le chasserivilegiait au moment de tirer, ce quavait fait Helene a en juger pes traces quil venait de trouver.

    Helene avait rate le Lion Rouge, un echec quil avait toujou

    mis sur le compte de lemotion.

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    A cela pres quHelene conservait toujours son sang-froiuelles que soient les circonstances. Helene ratait rarement sa cibt elle ne lavait donc pas ratee cette fois-la non plus. Ou plutot, eaurait pas rate son coup si le canon droit avait ete charge avne balle normale.

    Le fusil avait ete charge avec une balle a blanc.

    Pendergast connaissait suffisamment le maniement des armour savoir quun projectile a blanc ne produisait jamais le memruit et navait jamais le meme recul quune balle normale, a moi

    inserer dans le canon un tampon de bourre, ce quindiquaient laces observees quelques instants plus tot.

    Tout autre individu aurait vu sa raison vaciller en decouvrahorrible verite. Le matin fatidique, au camp, il avait vu Hele

    lisser deux balles Nitro Express dans le canon du fusil. Il souvenait clairement. Il sagissait de projectiles reels et non alles a blanc, jamais Helene naurait commis une erreur aurossiere, et lui-meme voyait encore dans sa tete la jeune femmnserer deux balles a pointe molle dans le double canon Krieghoff.

    Quelquun avait donc remplace les projectiles par des balleslanc entre le moment ou elle avait charge larme et linstant ou evait tire ; la meme personne avait ensuite retire les deartouches, lune intacte et lautre pas, afin de dissimuler les trace son forfait, oubliant toutefois de nettoyer le canon.

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    Pendergast se laissa tomber sur une chaise et posa sur sevres une main qui tremblait imperceptiblement.

    La mort dHelene netait pas accidentelle. Il sagissait dumeurtre.

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    6

    New York - Samedi, 4 heures du matin

    Le lieutenant Vincent DAgosta se fraya un chemin a travers oule, se baissa pour franchir la bande de plastique qui fermait cene de crime et sapprocha dun corps sur le trottoir, face a

    evanture de lun des innombrables restaurants indiens de la 6eRst. Lenseigne au neon qui brillait derriere la vitre crasseuse d

    etablissement projetait des reflets rouges et violets dune beaureelle sur la mare de sang dans laquelle baignait linconnu.

    Lhomme, atteint par une demi-douzaine de projectiles, etmort, et meme bien mort. Il etait recroqueville sur le cote, un br

    n lair, son pistolet a plusieurs metres de la. Lun des enqueteurn metre a la main, mesurait justement la distance entre la mauverte et larme.

    La victime, un avorton au crane degarni, etait de race blancht avait une trentaine bien sonnee. On aurait dit un pant

    esarticule, avec ses jambes tordues sous lui, un genou coinontre la poitrine et lautre dans une position improbable, les brargement ecartes. Les deux flics qui lavaient abattu, un granBlack costaud et un Latino tout maigre, discutaient un peu plus lovec un inspecteur de lInspection generale des services.

    DAgosta sapprocha, salua dun mouvement de tete le typ

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    e la police des polices et serra la main moite des deux agents. Leervosite lui rappela a quel point il etait dur davoir la mort duomme sur la conscience. Une experience traumatisante dont on e remettait jamais tout a fait.

    Lieutenant, lapostropha lun des deux flics, impatient elater une nouvelle fois les evenements. Il venait de piquer la caisu restaurant en menacant le patron dune arme et il etait en train enfuir. On sest identifies en sortant nos badges, mais cet enfoireommence a tirer, il a vide son chargeur sur nous en courant, ilvait des passants dans la rue alors on na pas eu le choix, on a

    abattre. Je vous assure, on navait pas le choix

    DAgosta serra gentiment lepaule du flic en jetant un couoeil a linsigne portant son nom, epingle a la poitrine.

    Ne vous inquietez pas, Ocampo. Vous avez aonformement au reglement, lenquete en apportera la preuve.

    Il a ouvert le feu comme un vrai malade

    Il naura pas ete malade longtemps, le coupa DAgosta

    approchant de linspecteur de la police des polices. Aloromment ca se presente ?

    Rien de special, lieutenant. Ils passeront devant un jugest la loi, mais il ny a pas photo, repondit-il en refermant soalepin.

    DAgosta sapprocha de son interlocuteur en baissant la voix

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    Veillez a ce que nos deux gars voient quelquun de la cellusychologique. Arrangez-vous aussi pour quils aient un entretivec un avocat du syndicat avant de publier la moindre declaratifficielle.

    Promis.

    DAgosta posa sur le corps un regard pensif.

    Combien y avait-il dans la caisse ?

    Dans les deux cent vingt dollars. Un toxico, ca se vomme le nez au milieu de la figure, il est entierement bouffe par ope.

    Un pauvre type de plus. On sait son nom ?

    Warren Zabriskie. Il vivait dans le quartier de FRockaway.

    DAgosta secoua la tete en observant les alentours. Une scene violence ordinaire a New York : deux flics appartenant a de

    minorites, un coupable blanc, des temoins en veux-tu en voila, out filme par une pleiade de cameras de securite. Affaire regleAucun risque de voir se manifester un leader afro-americain commAl Sharpton, aucune manifestation de protestation en vue, aucuccusation possible de brutalite policiere. Le tireur avait eu ce qu

    meritait, personne ny trouverait jamais rien a redire, meme les plegardants.

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    DAgosta se retourna et constata quune masse de badauetait agglutinee malgre le froid. Un melange de rockers de Ea

    Village, de yuppies et de >, pour reprendexpression du moment. Les ambulanciers attendaient que les type la police scientifique aient termine avant demporter le cadavre proprietaire du restaurant repondait aux questions dnspecteurs. Chacun faisait son boulot, tout etait en regle. Le genenquete de merde qui allait pourtant generer son poids aperasses, dinterrogatoires, de rapports, danalyses, dauditiot de conferences de presse. Tout ca pour les deux cen

    malheureux dollars dont avait besoin un petit toxico pour sa douotidienne.

    DAgosta nattendait que le moment de seclipser discretemeorsquil entendit un cri. Il se retourna et vit un mouvement de foulentree du perimetre de securite. Quelquun tentait de franchir

    ande plastique. Il savanca, pret a jeter dehors lintrus lorsqueconnut linspecteur Pendergast que poursuivaient deux agents niforme.

    He vous ! senerva lun des deux flics en agrippant sa

    menagement lepaule de linspecteur.

    Pendergast se degagea dun mouvement adroit et mit sadge sous le nez de lagent.

    Quest-ce que ? demanda le flic en reculant dun pas. H

    Il est du FBI.

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    Quest-ce quil fout ici ? sinquieta son collegue.

    Pendergast ! secria DAgosta en se precipitant. Quest-ue vous fichez ici ? Ce nest pourtant pas la mort dun petit toxicui va

    Pendergast le fit taire dun geste, battant lair de la main. A ueur glauque du neon, on aurait dit un fantome, ses traits blemccentues par la coupe austere dun costume sombre sur mesuui lui donnait des allures de croque-mort de luxe. DAgosta nut pas moins frappe par un air dramatique quil ne lui connaiss

    as.

    Jai besoin de vous parler, Vincent. Tout de suite.

    Pas de probleme. Le temps de terminer ce que

    Non, Vincent.Tout de suite.

    DAgosta ouvrit des yeux ronds. Jamais il navait inspecteur aussi perturbe. Lui, toujours si maitre de sa personne trouvait dans un etat dagitation extreme que soulignait sa tenunhabituellement chiffonnee.

    Jai un service a vous demander, insista Pendergast en renant par le revers de la veste. Et meme plus quun simpervice. Venez avec moi.

    Proprement eberlue par la vehemence dont faisait preuve sieil ami, DAgosta obtempera sans rechigner et quitta la scene

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    rime sous les regards surpris de ses collegues, traversant la fouusqua lendroit ou attendait la Rolls de linspecteur, moteur alenti. Le lieutenant reconnut derriere le pare-brise le masqmpassible de Proctor, le chauffeur de Pendergast.

    Ce dernier avancait dun pas vif et DAgosta etait quasimeontraint de courir derriere lui.

    Vous savez bien que je serai toujours pret a vous aider

    Je vous en prie, Vincent. Pas un mot tant que je ne vo

    urai pas explique de quoi il retourne.

    Bon, bon, tres bien, sempressa de maugreer DAgosta.

    Montez.

    Pendergast grimpa lui-meme a larriere de lauto en intimanton compagnon de limiter. A peine la portiere refermeinspecteur tira une poignee, decouvrant un bar miniature. Il saine carafe en cristal taille et se versa trois doigts de cognac dontvala la moitie dun trait, puis il remit la carafe en place et posa s

    DAgosta un regard fievreux.

    Il ne sagit pas dune requete ordinaire. Je comprendraort bien que vous ne puissiez pas, ou ne vouliez pas, mais de gracas de question inutile, Vincent. Contentez-vous decouter ce quai a vous dire avant de mapporter votre reponse.

    Le lieutenant acquiesca.

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    Jai besoin que vous preniez un conge sans solde lusieurs mois. Peut-etre meme un an.

    Unan ?

    Pendergast vida son verre.

    Plusieurs mois, plusieurs semaines, je nai aucune idee emps que laffaire peut prendre.

    Mais quelleaffaire ?

    Linspecteur ne repondit pas immediatement.

    Vous ai-je deja parle de ma femme, Helene ?

    Non.

    Elle est morte il y a douze ans, alors que nous faisions afari en Afrique. Elle a ete attaquee par un lion.

    Seigneur ! Je suis sincerement desole.

    A lepoque, jai cru a un accident. Je sais a present quen etait rien.

    DAgosta attendait la suite.

    Elle a ete assassinee.

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    Mon Dieu !

    La piste a eu le temps de se refroidir et jai besoin de votide, Vincent. Jai besoin de votre savoir-faire, de votonnaissance de la rue et des strates les moins favorisees de not

    ociete, de votre facon de penser. Jai besoin de vous pour maidretrouver le ou les coupables. Il est bien entendu que je prend

    n charge lintegralite de vos frais tout en massurant que voontinuiez a toucher votre traitement, avec tous les avantagociaux qui y sont attaches.

    Un silence accueillit la proposition de linspecteur. DAgosta navait quoi repondre, incapable de mesurer les consequences dunelle decision sur sa carriere au sein de la criminelle, sa relation avaura Hayward, son avenir, tout simplement. Accepter seraresponsable, ou meme pire. Accepter serait de la folie.

    Sagit-il dune enquete officielle ?

    Non, nous ne pourrons compter que sur nous-memes. Loupable peut se trouver a nimporte quel endroit de la planete ous devrons agir en dehors de toute structure officielle, que

    uelle soit.

    Que ferons-nous de lassassin si nous parvenons a etrouver ?

    Nous veillerons a ce que justice soit faite.

    Cest-a-dire ?

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    Pendergast se versa une nouvelle rasade de cognac qungloutit dans la foulee avant de poser sur DAgosta son regatincelant.

    Nous le tuerons.

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    7

    La Rolls-Royce remontait Park Avenue a toute allure, laissa

    erriere elle le sillage jaune des rares taxis en maraude a cette heuardive. Installe sur la banquette arriere a cote de Pendergast, uDAgosta mal a laise observait son compagnon du coin de loeamais il navait vu linspecteur dans un tel etat dimpatience, avne tenue aussi negligee. Surtout, il ne lavait jamais vu aussi emu.

    Quand avez-vous su ? sautorisa-t-il a demander.

    Cet apres-midi.

    Comment lavez-vous su ?

    Avant de repondre, Pendergast commenca par jeter un couoeil a travers la vitre alors que la Rolls tournait brusquement

    auche sur la 72eRue en direction de Central Park. Il reposa erre a cognac vide quil avait machinalement serre entre ses doigusque-la et prit sa respiration.

    Il y a douze ans de cela, lors dun safari en Zambie, Helet moi avons ete invites a tuer un lion mangeur dhomme. Un lies particulier, dote dune criniere rouge, ressemblant en tout poiun animal qui avait deja fait des ravages, dans la meme regio

    uarante ans plus tot.

    Pourquoi setre adresse a vous en particulier ?

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    En partie parce que je disposais dun permis de chasrofessionnel, un document qui vous oblige a tuer tout anim

    menacant la securite des villages sur simple demande des autoritocales, repliqua Pendergast tout en continuant a regarder par

    enetre. Ce lion avait tue un Allemand dans un camp de touristes, ous avons ete appeles a la rescousse avec Helene, depuis le camu nous nous trouvions.

    Il saisit machinalement la bouteille de cognac quil regarvant de la ranger dans le minibar. La voiture filait a present

    avers Central Park dont les arbres deployaient leurs silhouettecharnees dans la nuit.

    Le lion nous a fonce dessus de sa cachette et sest rue se pisteur et moi. Helene lui a tire dessus au moment ou il battait etraite, et jai cru sur le moment quelle avait rate son coup. Eest occupee du pisteur

    La voix de linspecteur se brisa et il lui fallut quelques instanour reprendre contenance.

    Elle soccupait du pisteur lorsque le lion a surgi une seconois et la emportee avec lui. Cest la derniere fois que je lai vuVivante, jentends.

    Quelle horreur, balbutia DAgosta, parcouru par un frisson

    Cest aujourdhui seulement que jai ouvert par hasard susil alors ue e me trouvais dans la vieille lantation familiale

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    ouisiane. En examinant larme, je me suis apercu que quelquvait remplace les cartouches par des balles a blanc ce matin-la, ildouze ans. Elle na donc pas rate son coup, tout simpleme

    arce que son fusil ne contenait pas de balles reelles.

    Saloperie ! Vous en etes certain ?

    Pendergast tourna la tete afin de regarder son compagnon daes yeux.

    Vincent, est-ce que je serais ici a vous annoncer un

    orreur pareille si je netais pas absolument certain de ce quavance ?

    Je suis desole.

    Le silence retomba, que le lieutenant finit par rompre :

    Et vous avez decouvert la verite cet apres-midi seulement

    Pendergast hocha la tete dun mouvement brusque.

    Jai affrete un avion prive afin de revenir au plus vite.

    La Rolls sarreta devant lentree du Dakota Building, situee s

    a 72e Rue. Pendergast descendit aussitot et se dirigea vers orche voute devant lequel un gardien veillait dans sa guerite, sae soucier des gouttes de pluie qui commencaient a secraser sur

    ottoir. Courant a moitie, DAgosta le suivit dans la cour, au miliees plantations soigneusement entretenues et des fontaines

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    murmure leger, jusqua un etroit hall dentree situe dans un coin da residence. Pendergast appela lascenseur dun doigt nerveux, lortes coulisserent dans un soupir et les deux hommes se glissereans la cabine en silence. Une minute plus tard, ils parvenaient sn petit palier au fond duquel les attendait une porte depourvue

    errure. Pendergast passa la main devant un capteur invisible et ueger claquement retentit. Linspecteur poussa le battant DAgosta penetra a sa suite dans un salon rose a leclairage tamiont lune des parois, de marbre noir, servait de support a unhute deau.

    Pendergast indiqua a son hote lun des canapes de cuir noir.

    Asseyez-vous. Je reviens tout de suite.

    Linspecteur seclipsa et DAgosta, confortablement installcruta dans ses moindres recoins la piece ou flottait un parfum eurs de lotus, et arreta son regard sur les bonsais. Les murs atiment etaient si epais que les premiers grondements du tonnerui parvenaient a peine. Tout dans la piece respirait la quietude, mae lieutenant etait tout sauf, serein, se demandant comment il allresenter sa requete a son superieur, sans meme penser a Lau

    Hayward.

    Dix bonnes minutes secoulerent avant que Pendergast evienne dans la piece, rase de pres, vetu dun costume noir sans li. Il ressemblait a nouveau au Pendergast toujours maitre de lu

    meme que connaissait DAgosta, mais sa nervosite restait palpable

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    Je vous remercie davoir patiente, Vincent, sexcuinspecteur en lui faisant signe de laccompagner.

    DAgosta sengagea a sa suite dans un couloir interminabclaire chichement. Les deux hommes passerent devant un

    ibliotheque, une piece aux murs couverts de toiles de maitre, ellier a vin, et sarreterent devant une porte close que Pendergauvrit avec le meme mouvement de la main que precedemment. Liece etait juste assez grande pour accueillir une table et dehaises. Un coffre de banque, large de plus dun metre, occupun des murs.

    Pendergast invita son hote a sasseoir, puis il disparut dans ouloir avant de revenir quelques instants plus tard avec u

    mallette de cuir quil posa sur la table. Il en sortit une sereprouvettes ainsi que plusieurs flacons munis de bouchons

    erre quil aligna soigneusement sur le bois poli. Un tremblememomentane agita brievement les eprouvettes. Ce travail terminendergast sapprocha du coffre quil ouvrit apres avoir tourne adran a cinq ou six reprises. La lourde porte blindee secarta

    DAgosta decouvrit plusieurs rangees de tiroirs metalliqueendergast tira la poignee de lun deux quil deposa sur la tab

    uis il sassit en face de DAgosta apres avoir referme le coffre.

    Linspecteur resta immobile un bon moment, jusqua ce quurondement de tonnerre lointain larrache a ses pensees. Il tira de

    mallette un mouchoir de soie blanc quil etala devant lui, puispprocha le tiroir metallique, souleva le couvercle et prit a linteriene touffe de poils rouges ainsi quune bague en or ornee d

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    uperbe saphir etoile. Il commenca par ecarter la touffe de poilsaide dune pince avant de saisir la bague avec un geste dune te

    endresse que DAgosta en eut les larmes aux yeux.

    Cest ce que jai pu recuperer des restes dHelen

    xpliqua-t-il, leclairage indirect mettant en relief ses traits tireCest la premiere fois que jy touche depuis douze ans : slliance ainsi que la touffe de poils quelle a arrachee a la crinieu lion pendant quil la devorait. Je lai retrouvee serree entre loigts de sa main gauche, qui avait ete sectionnee.

    DAgosta afficha une grimace.

    Que comptez-vous faire ? demanda-t-il.

    Simple intuition, repliqua linspecteur en debouchauccessivement les flacons dont il tirait diverses poudres quil vers

    ans les tubes a essai.

    Saidant de la pince, il prit quelques-uns des poils rouges queposa un a un dans les eprouvettes. Enfin, il sortit de la mallene petite bouteille de couleur brune, fermee par un compte-goutt

    laide duquel il deposa un peu de liquide dans chacun des tubeAucune reaction ne se produisit initialement, et ce nest qurrivant a la cinquieme eprouvette que le liquide mysterieux voudainement au vert clair. Pendergast observa quelques instants eaction, les yeux brillants, puis preleva avec une pipette quelquouttes du liquide quil deposa sur un petit morceau de papi

    ecupere dans la mallette.

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    DAgosta, visiblement embarrasse, se tenait dans lentree

    etit trois pieces quil occupait avec Laura Haywarappartement etait celui de la jeune femme, mais il avait reusepuis quelque temps a partager le loyer avec elle, une victoibtenue de haute lutte au terme de mois defforts. Restait a esperue la nouvelle quil lui apportait ne vienne pas remettre en cause ragile equilibre etabli entre eux.

    Il glissa un oeil dans la chambre. Assise dans le lit, Haywatait plus belle que jamais, bien quil lait tiree dun profond sommn quart dheure plus tot. La pendule posee sur la commondiquait 5 h 50, DAgosta avait du mal a croire que tout ait p

    asculer aussi vite.Elle posa les yeux sur lui, une expression impenetrable sur

    isage.

    Alors cest comme ca ? Pendergast debarque de je ne sa

    u avec une fable incroyable et hop ! tu te laisses embarquerautre bout du monde.

    Laura, il vient de se rendre compte que sa femme a essassinee, et je suis le seul a pouvoir laider.

    Laider ! Tu ferais mieux de taider toi-meme, oui ! Je appelle que tu viens tout juste de sortir du petrin dans lequel tu t

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    etrouve a la suite de laffaire de Diogene[2]

    . Un petrin dans lequendergast a largement contribue a te plonger, je te le rappelle.

    Cest mon meilleur ami, repliqua DAgosta, conscient de

    aiblesse de largument.

    Tu es incroyable ! secria Hayward en faisant voler songs cheveux noirs dun mouvement de tete. Je me couche moment ou tu pars sur une scene de meurtre tout ce quil y a lus banal, et je te vois en train de preparer ta valise en m

    eveillant, sans que tu sois capable de me dire quand tu comptevenir.

    Le plus vite possible, ma cherie. Je tiens a retrouver moulot, tu sais.

    Et moi, alors ? Je compte pour du beurre ? Je te signauil ny a pas que ton boulot que tu laisses en plan.

    DAgosta franchit le seuil de la chambre et sassit sur le bou lit.

    Laura, je tai promis de ne plus jamais te mentir, et je taconte tout ce que je savais. Tu es la personne qui compte le pluu monde pour moi.

    Il prit sa respiration.

    Si tu me demandes de rester, je reste.

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    Elle le fusilla du regard pendant pres dune minute, puis saits se radoucirent et elle secoua la tete.

    Tu sais tres bien que je ne ferais jamais ca. Je moudrais de tempecher de remplir cette cette mission.

    Il lui saisit la main.

    Je te promets de revenir le plus vite possible et de elephoner tous les jours.

    Dun doigt, elle se glissa une meche rebelle derriere loreille.

    Tu as prevenu Glen ?

    Non, jarrive directement de chez Pendergast.

    Je te conseille de lappeler tout de suite pour lui annoncue tu prends un conge sans solde. Que comptes-tu faire sil refu

    Je nai pas le choix.

    La jeune femme rejeta les couvertures et posa le pied par terrn decouvrant ses jambes, DAgosta sentit une bouffee de de

    monter en lui. Comment pouvait-il abandonner sa compagne ne fue quun jour ? Sans meme parler dune semaine, dun mois, dunnnee ?

    Je vais taider a boucler ta valise, proposa-t-elle.

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    Il seclaircit la gorge.

    Laura

    Elle lui mit un doigt sur la bouche.

    Pas un mot de plus, cest mieux comme ca.

    Il acquiesca.

    Elle se pencha vers lui et posa un baiser delicat sur sa bouche

    Je veux que tu me fasses une promesse.

    Tout ce que tu veux.

    Promets-moi detre prudent. Je me fiche que Pendergast asse tuer dans cette histoire, mais je ten voudrais terriblement sarrivait malheur. Et tu sais comment je suis quand je ne suis pontente.

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    La Rolls, conduite par Proctor, ronronnait le long de la vo

    xpress Brooklyn-Queens. De lautre cote de la vitre, DAgosegardait distraitement deux remorqueurs tirer une enorme penicemontant lEast River avec sa charge de carcasses de voiturmpilees les unes sur les autres. Tout etait alle si vite quil avait d

    mal a realiser ce qui lui arrivait. Avant de se rendre a laeropoFK, Pendergast avait evoque une derniere mission.

    La voix de linspecteur le tira de sa reverie.

    Je ne saurais trop vous preparer a trouver changee mrand-tante Cornelia. Les medecins me disent que son etat serandement deteriore.

    DAgosta sagita sur la banquette.

    Je ne suis pas certain davoir bien compris en quoi cetisite est indispensable.

    Il nest pas impossible quelle puisse nous eclairer, dautauelle avait un faible pour Helene. En outre, jaurais souhainterroger sur certains points precis de lhistoire de ma famille.

    DAgosta repondit par un grognement. Lidee de voir la gran

    ante Cornelia ne lenchantait g