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Tél. : 01 44 39 75 75 - www.frm.org 89 / 1 er trimestre / janvier 2002 / 2,29 u / 15 F Fondation pour la Recherche Médicale & RECHERCHE SANTÉ 54, rue de Varenne 75007 Paris p. 8 Enjeu médical et social La maladie d’Alzheimer Vos dons en action p. 20 Une maladie rare : agglutinines froides p. 26 Point de vue : Christian Bréchot p. 28 La Fondation à l’écoute p. 30 Questions-réponses p. 36

frm 5889 couv baf - Fondation pour la Recherche Médicale

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Tél. : 01 44 39 75 75 - www.frm.org

n°89

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vier

2002

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29u

/ 15

FFondation pour la Recherche Médicale

&RECHERCHE SANTÉ

54, rue de Varenne 75007 Paris

p. 8 Enjeu médical et social

La maladie d’Alzheimer

Vos dons en action p. 20

Une maladie rare :agglutinines froides p. 26

Point de vue : Christian Bréchot p. 28

La Fondation à l’écoute p. 30

Questions-réponses p. 36

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2 Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1e tr imestre - janvier 2002

La maladie d’Alzheimer altère les capacités cognitives, entraîne la pertedes repères dans le temps et dans l’espace. Elle provoque des troublesgraves du comportement, une perte progressive et irrévocable de l’au-tonomie. Ce sont des situations terribles; la prise en charge matérielleet psychique est lourde pour les familles de malades. Les associations

font valoir dans de nombreuses situations la souffrance, l’isolement et la lourdeurde cet accompagnement nécessaire. Ce sont ces difficultés des proches ainsi que lafréquence de cette pathologie qui m’ont conduit à annoncer, début octobre, un pro-gramme d’actions sur la maladie d’Alzheimer. Je souhaite favoriser le diagnosticprécoce qui permet de mettre en œuvre un projet de soins médico-psycho-social etde retarder, par des thérapeutiques, l’évolution de certaines formes de la maladie.Je veux structurer le dispositif de soins en renforçant les consultations mémoire surl’ensemble du territoire français. Je souhaite, également, que soient mieux prises encompte les situations critiques qui posent de redoutables problèmes éthiques. Eneffet, les particularités cliniques de la maladie d’Alzheimer rendent les personnessouffrant de cette pathologie très vulnérables. Leur dignité doit être impérativementprotégée. La loi du 20 juillet 2001 qui institue une allocation personnalisée d’auto-nomie (l’APA) est une réforme majeure qui va modifier profondément la prise encharge des personnes âgées en perte d’autonomie. Les prestations financières quiseront fournies constitueront une aide appréciable pour les malades et leurs famillesqui font face à des charges financières extrêmement importantes. Par ailleurs, uneffort important sera réalisé pour l’hébergement. L’accueil de jour qui doit per-mettre à l’aidant, à la famille de «souffler» pendant le temps de répit, sera renforcéde 7000 places en quatre ans. Les conditions d’accueil des établissements d’héber-gement pour personnes âgées (les EHPAD) seront adaptées et les moyens humainsrenforcés : 1,2 milliard y est consacré dès 2002. Enfin j’attache une attention touteparticulière à la recherche source d’espoir et en particulier à la recherche clinique.Je pense notamment à l’identification des facteurs de risque qui, à terme, pourraitpermettre de proposer une stratégie de prévention, domaine dans lequel noussommes démunis. Les performances de notre système de soins permettent à nosaînés et demain à nous-mêmes de vivre plus longtemps. Des maladies particulièresse manifestent alors et nous devons orienter nos efforts vers d’autres pathologies.

Nous devons inventer une autre médecine, celle de certainesdémences évitables, celle du grand âge. C’est un beau combatpour la médecine et un beau combat de santé publique : doncune démarche politique.

Une aide indispensable

La Fondation pour la RechercheMédicale, établissement reconnu

d’utilité publique par décret du 14 mai 1965, est membre

fondateur du Comité de la Chartede Déontologie des associations

humanitaires.

É D I T O R I A L Directeur de la publication :Pierre Joly,Président de la Fondation pour la Recherche MédicaleDirecteur général :Eric Palluat de BessetComité de rédaction :Servane ChiniahPr Claude DreuxCarole HeurtaultMarie-Françoise LescourretEric Palluat de BessetMarie-Christine RebourcetPériodicité trimestrielleCopyright : la reproduction des textes, même partielle, est soumise à notre autorisationsur demande écrite préalable.Ont participé au dossier :Yves AgidAnnick AlpérovitchDominique CampionBruno DuboisCharles DuyckaertsFrançoise ForetteStéphane LehéricyFrançois PietteJacques TouchonOnt participé à la rédaction :Rachel BenmouharLouise BlottièreCorinne Dupuy (dossier)Corinne DraultChantal GuéniotValérie GuezMartine Lochouarn Marielle MayoFrançoise MoinetPhoto de couverture :MasterfileConception, réalisation :

26, rue du Sentier75002 Paris

Date et dépôt légal à parution :ISSN 0241-0338Dépôt légal n° 8117Numéro CP 62273

Pour tous renseignements ou si vous souhaitez vous

abonner, adressez-vous à :Fondation pour la Recherche

Médicale54, rue de Varenne

75007 ParisService donateurs :

0144397576Information scientifique :

0144397568/92Publication :0144397565

Prix de l’abonnement pour 4 numéros :

9,15 €/60 FChèque à l’ordre de la Fondation

pour la Recherche Médicale

Site Internet : www.frm.org

Bernard KOUCHNERMinistre délégué à la SantéDR

frm_5889_02_baf2 11/12/01 16:37 Page 2

Page 32François Guillot, chercheur et entrepreneur, spécialiste de la culture cellulaire.ED

DY M

OTTA

Z

ÉCHOS SCIENTIFIQUESProtéger le cerveau après un accident vasculaire cérébral,deux pas en avant contre le diabète, de nouvelles pistes contre l’hypertension artérielle… Tout savoir sur les espoirs que suscite la recherche médicale.

DOSSIERLa maladie d’AlzheimerDevenue un véritable problème de santé publiqueavec quelque 350000 personnes touchées en France,elle fait aujourd’hui partie des maladies du systèmenerveux dont la connaissance a le plus progressé ces dix dernières années.

Une maladie bien connue mais pas assez reconnueDossier réalisé avec le Pr Yves Agid, neurologue,Fédération de neurologie, hôpital Pitié-Salpêtrière (Paris).

On peut prévenir et traiter la maladie d’AlzheimerL’avis du Pr Françoise Forette, chef de service de Gérontologie à l’hôpital Broca (Paris).

Etude 3C : débusquer les facteurs de risqueAvec le concours du Dr Annick Alpérovitch, directricede l’unité Inserm 360, CHU Pitié-Salpêtrière (Paris).

Vivre chaque jour avec la maladie d’Alzheimer

VOS DONS EN ACTIONDans cette rubrique, la Fondation pour la RechercheMédicale présente chaque trimestre une sélection des 700 travaux qu’elle soutient annuellement.

Lutter contre la résistance aux antibiotiquesLe cœur : une pompe sous influence électrique

Des espoirs pour une maladie rareLa maladie des agglutinines froides est une formed’anémie rare et souvent grave.

POINT DE VUEPréparer l’avenir des jeunes chercheursEntretien avec Christian Bréchot, directeur général de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm).

LA FONDATION À L’ÉCOUTELa renaissance du comité de LyonDepuis quatre mois, le comité de Lyon a pris un nouveaudépart sous la direction du professeur Revol.

RencontreAvec François Guillot, docteur en biochimie.

Questions-réponsesAvec le professeur Philippe Chanson.

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S O M M A I R E

Page 26Le Dr Pourcel explique commentse déclenche la maladie des agglutininesfroides.

Page 4Un modèle pourles résistances aux antibio-tiques et auxanticancéreux.

BSIP

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ALLIN

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Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002

Page 8 - Maladie d’Alzheimer : quand le cerveau ne répond plus.

Dr. G

opal

Mur

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RI

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ÉCHOS SCIENTIFIQUES

Parce que nous souhaitons vous communiquer une informationde qualité, hors des «effets d’annonce», indépendante des intérêtsfinanciers, nous avons rassemblé, dans cette rubrique, les échosscientifiques et les faits les plus marquants de la recherche

médicale mondiale de ces derniers mois. Décryptage des mécanismes de la résistance aux antibiotiques, développement de la prévention contre les diabètes, identification d’une forme rare d’hypertensionartérielle, recherches sur le prion, production de cellules sanguineshumaines in vitro… Aperçu des derniers progrès de la recherche.

Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 20024

L’interruption de la vascularisationprovoquée par les accidents

vasculaires cérébraux (AVC) entraînela nécrose d’une partie du cerveau.Souvent, dans les heures qui suivent,la circulation se rétablit, grâce à destraitements qui dissolvent le caillotsanguin ou spontanément. Cette repriseest essentielle mais elle entraîne ce que l’on appelle un «stress oxydatif»,qui peut détruire les cellules. Trouverune molécule capable de limiter ce stress permettrait de réduire la taille de l’infarctus et le risque deséquelles. Une équipe japonaise vientd’expérimenter, chez l’animal, une molécule (U0126) qui inhibe une enzyme associée au stress oxydatif.Les résultats sont encourageants :l’administration d’U0126, même trois heures après le début de l’AVC, a entraîné une diminution de la taillede la nécrose. De plus, ajouté à desneurones de souris en culture, l’U0126protège ces cellules privées d’oxygènependant neuf heures. Si ces résultats

se confirment chezl’homme, l’U0126pourrait améliorersensiblement le pronostic des AVC. �

Source : PNAS, 14 août 2000. Source : Science, septembre 2001.

AVC ischémique vu en tomo-densitométrie.GJ

LP/C

NRI

en fait très proches. Après avoir établila structure d’une enzyme bactérienne(d’Escherichia coli) homologue de ces transporteurs, deux chercheursaméricains proposent un mécanismegénéral par lequel les transporteursexpulseraient les médicaments en les faisant passer du feuillet interneau feuillet externe de la membranecellulaire. Ce modèle commun aux multirésistances des bactéries et des cellules cancéreuses pourraitaider à comprendre et à surmonter de nombreux échecs thérapeutiques. �

Les chercheurs essaient de mieux comprendre les résistances aux antibiotiques.

Un modèle pour les résistances aux antibiotiques et aux anticancéreux

BSIP

/CM

SP

Les résistances aux antibiotiquespourraient, dans l’avenir, faire peser une menacemajeure sur la santé publique.

Selon l’Organisation mondiale de la santé, jusqu’à 60% des infectionshospitalières seraient multirésistantesaux traitements. Les cellulescancéreuses peuvent égalementdevenir multirésistantes, en raison de la présence de molécules«transporteurs» qui «pompent» les médicaments pour les rejeter horsde la cellule. C’est une cause très fréquente d’échec thérapeutique. Ces deux types de résistance semblent

Protéger le cerveau après l’AVC

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5Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002

Le pancréas (ici en vert) produit l’insuline,hormone régulatrice du taux de glucose sanguin.

Une hormone sécrétée par les tissus graisseux, l’adiponectine, joueraitun rôle important dans le développement du diabète de type 2.

Deux pas en avant contre les diabètes

Le diabète de type 2,

encore appelé

«diabète non

insulinodépendant»

(DNID) ou «diabète gras», est

le plus répandu et il est fréquent

chez les personnes obèses

ou en surpoids. Dans ce type

de diabète, l’insuline n’est

plus assez efficace pour réguler

le taux de glucose sanguin. Tout

se passe comme si les cellules

devenaient résistantes aux

effets de l’insuline. Les cellules

adipeuses semblent jouer un

rôle central dans le développe-

ment de ces troubles. On sait

qu’elles sécrètent plusieurs

hormones importantes pour

la régulation du métabolisme,

comme la leptine («hormone

de la satiété») ou la résistine

(impliquée dans la résistance

à l’insuline). Un travail interna-

tional, auquel a contribué

Philippe Froguel, de l’Institut

Pasteur de Lille, souligne le rôle

important d’une autre de

ces hormones : l’adiponectine.

Chez des souris obèses

et diabétiques, la sécrétion

d’adiponectine est diminuée.

Mais il a suffi aux chercheurs

de la restaurer pour améliorer

Source : Nature Medicine, septembre 2001.

la sensibilité à l’insuline

et diminuer le taux de glucose

dans le sang. De plus, la

résistance à l’insuline chez des

souris ayant une lipoatrophie

(absence de cellules graisseuses)

a pu être complètement

supprimée par administration

de leptine et d’adiponectine,

tandis que l’administration

d’une seule de ces hormones

n’a entraîné qu’une améliora-

tion partielle. Chez l’homme,

dans une étude en cours

de publication, réalisée dans

la population japonaise,

les auteurs ont observé que

le risque de diabète de type 2

était plus élevé parmi

les personnes ayant un profil

génétique associé à une

diminution de la sécrétion

d’adiponectine. Tout donne

à penser que la restauration

de concentrations satisfaisantes

de cette hormone pourrait

représenter une stratégie

pour traiter l’insulinorésistance

et le diabète de type 2. �

Une molécule capable de réguler les réactions immunitaires détruisantle pancréas pourrait aider à prévenir le diabète de type 1.

Chez la souris, on a pu démontrer que le diabète de type 1, dit aussi «insulino-dépendant» ou «maigre», est lié à l’action de certaines cellules immunitaires

(les lymphocytes T) qui provoquent la destruction des cellules sécrétricesd’insuline dans le pancréas. Supprimer cette réaction immunitaire permettraitsans doute de prévenir le diabète. Or, il semble que si les lymphocytes Ts’attaquent subitement aux cellules du pancréas, c’est parce que d’autres cellulesimmunitaires, dites «tueuses», les considèrent comme étrangères. Une équipevient d’expérimenter une molécule, l’alpha-galactosylcéramide (alpha-GalCer),qui se lie aux cellules tueuses et régule la fonction immunitaire. Chez la souris,cette molécule prévient le développement du diabète, même lorsque le traitementest entrepris après l’apparition des premiers signes d’atteinte du pancréas. Pour les auteurs, ce traitement pourrait se révéler également efficace chez l’homme, puisque les cellules tueuses humaines possèdent à leur surface les mêmes récepteurs pour l’alpha-galactosylcéramide. �

Source : Nature Medicine, septembre 2001.

BSIP

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Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 200266

ÉCHOS SCIENTIFIQUESP.

VOIS

IN/P

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Les cellules souchesembryonnaires (dites «cellulesES») sont issues d’embryons

et présentent de nombreusescaractéristiques intéressantes pour la recherche et la médecine. Tout d’abord, il s’agit de cellulesindifférenciées, n’ayant pas encoreacquis de spécialisation. Ensuite, elles sont pluripotentes, c’est-à-direqu’elles peuvent engendrer presquetous les types cellulaires de l’organismeen réponse à des stimuli spécifiques.Enfin, les cellules ES peuvent se multiplier indéfiniment in vitro.Des chercheurs ont réussi à faire se différencier ces cellules souches en cellules précurseurs hémato-poïétiques, c’est-à-dire à l’origine des diverses cellules sanguines, en les soumettant aux stimuliappropriés. Ils ont ensuite cultivé ces cellules en présence de facteursde croissance hématopoïétiques et les cellules précurseurs ont formédes colonies de cellules : précurseurs

Bientôt une source illimitéede produits sanguins?

des érythrocytes (globules rouges),myélocytes (cellules de la moelleosseuse, précurseurs de certainsglobules blancs) et mégacaryocytes(cellules précurseurs des plaquettessanguines). La différenciation in vitrode ces cellules ES offre la possibilitéde mieux comprendre la productiondes cellules sanguines humaines(hématopoïèse) et pourrait avoird’importantes applications théra-peutiques. Ces cellules pourraient en effet constituer une source de globules rouges et de plaquettespour les transfusions, et de cellulessouches hématopoïétiques pour les transplantations ; ceci, enquantités théoriquement illimitées ! De plus, ces cellules pourraient être facilement débarrassées de tout organisme pathogène etmême – si besoin est – modifiéesgénétiquement dans un butthérapeutique. �

Source : PNAS, septembre 2001.

Des chercheurs américains, anglaiset français (Inserm U.36) viennent

d’identifier deux gènes associés à une forme rare d’hypertensionartérielle : le pseudohypoaldostéro-nisme de type II. Ces gènes, appeléswnk1 et wnk4, codent des enzymes(de la famille des kinases) qui jouentun rôle important dans le transportdes sels de sodium et de chlore dans le rein. Les mutations semblentavoir pour effet d’augmenter l’activitéde ces enzymes, entraînant une augmentation de la concentrationde sodium (cause probable de l’hyper-tension) et de chlore, ainsi qu’unehyperacidité dans les cellules rénales.L’intérêt de ce travail ne se limite pas à cette forme rare d’hypertensioncar les mêmes anomalies se retrouventdans l’hypertension artérielle (HTA)commune. De plus, le gène wnk4 est situé sur le chromosome 17, à un emplacement qui semble êtreassocié aux variations de la pressionartérielle dans la population générale.Ainsi, la mise au point d’inhibiteursdes kinases impliquées pourrait aider à traiter précisément la cause de l’hypertension liée au pseudo-hypoaldostéronisme de type II mais aussi des formes plus courantesd’hypertension artérielle. L’enjeu estmajeur : problème important de santépublique dans les pays industrialisés, cette maladie représente l’une des principales causes d’insuffisancecardiaque, d’insuffisance rénale,d’infarctus et d’accident vasculairecérébral (AVC). �

De nouvelles pistes contrel’hypertension artérielle

parents soit porteur de la mutationpour que l’enfant héritant de ce gènesoit atteint. Les chercheurs ont comparél’ADN de chacun des membres atteintset non atteints d’une même famille, à la recherche de particularitésgénétiques communes aux individusmalades. Ils ont identifié le gèneSLC11A3 et vérifié qu’il était mutéchez toutes les personnes malades de cette famille et chez aucun de leurs parents sains. Ce gène code une protéine impliquée dans la circulation du fer entre des cellules de l’intestin grêle, appelées«entérocytes», et la circulationsanguine. Il est probable que ce gènedevienne une cible pour la recherchethérapeutique contre l’hémochro-matose mais aussi contre l’anémie. �

Source : Science, août 2001.

Surveiller sa tension est un geste préventif simplepour éviter les complications. Source : Nature genetics, juillet 2001.

A la recherche des mutations responsables de l’hémochromatose

Le fer est essentiel pour notresanté mais son accumulationdans le corps est responsable

de l’hémochromatose. Cette maladiehéréditaire engendre de nombreuseslésions tissulaires. Les personnesatteintes souffrent, généralementaprès 60 ans, de douleurs articulaires,de fatigue, de cardiomyopathies et de maladies endocriniennes.Plusieurs gènes qui permettent à notre organisme de contrôler ses besoins journaliers en fer ont déjàété mis en cause dans cette pathologie.Les chercheurs viennent d’identifierun nouveau gène, dont la mutationest responsable d’une forme d’hémochromatose «à transmissionautosomique dominante» : le gèneresponsable est porté par un chromo-some autre qu’un chromosomesexuel et il suffit que l’un des deux

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Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002 77

Des avancées contre le prion

Source : PNAS, août 2001.Source : The Journal of Clinical Investigation,septembre 2001.

Deux molécules se révèlentefficaces contre le prion dans descellules cultivées en laboratoire.L’intérêt de ce traitement reste à confirmer chez l’homme.

L’équipe du professeur

américain Stanley

Prusiner, prix Nobel

de médecine en 1997 pour

ses travaux sur le prion, a testé

les effets de deux médicaments

déjà anciens sur des cellules

de souris infectées par l’agent

de la tremblante du mouton,

une maladie à prion.

L’un de ces médicaments est

la chlorpromazine, un antipsy-

chotique, l’autre la quinacrine,

une molécule utilisée pour

ce qui est une condition

indispensable pour espérer

une action thérapeutique.

Par ailleurs, il s’agit de médi-

caments connus, déjà utilisés

chez l’homme dans d’autres

conditions thérapeutiques

et qu’il sera donc possible

de tester dans ces nouvelles

conditions chez l’homme,

sans doute plus rapidement

que d’autres produits.

Cependant, il faut insister

sur le caractère préliminaire

des données recueillies

en laboratoire. La prudence

est d’autant plus nécessaire

que les résultats ont été

obtenus sur des cellules

de souris infectées par l’agent

de la tremblante du mouton

et non par celui du nouveau

variant de la maladie

de Creutzfeldt-Jakob. �

Coupe de cerveau au microscope optique : les taches blanches sont les lésions causées par le prion.

L’identification de cellules immunitaires propageant le prion pathogènedans l’organisme ouvre de nouvelles voies de recherche thérapeutique.

On sait que, lorsqu’il est absorbé dans l’alimentation, le prion pathogènes’accumule dans des organes lymphoïdes, comme la rate, les ganglions

lymphatiques ou les amygdales, avant de gagner le cerveau, où il va exercerses méfaits. Mais comment le prion se propage-t-il jusqu’au cerveau, après cette étape de multiplication? Les travaux menés par l’équipe de PierreAucouturier (Inserm U.25), en collaboration avec des chercheurs américains,montrent pour la première fois le rôle clé de cellules immunitaires «nomades»présentes dans l’organisme, les cellules dendritiques. Les chercheurs ontprélevé des cellules dendritiques chez des souris infectées par la tremblante(dérivée de la tremblante du mouton). Ces cellules ont été injectées à des souris totalement dépourvues d’organes lymphoïdes donc normalementrésistantes à la maladie. Pourtant, dans ce cas, l’agent pathologique a bienenvahi le cerveau. Lorsque, dans une autre expérience, les auteurs ont injectéaux souris des cellules dendritiques infectées mais mortes, l’invasion cérébralen’a pas eu lieu. Ainsi, les cellules dendritiques semblent capables à elles seules de transporter le prion pathogène vers le cerveau. D’autres cellulesimmunitaires remplissent-elles le même rôle? Comment s’effectue la neuro-invasion? Autant de questions qui restent en suspens. Mais le systèmeimmunitaire apparaît désormais comme une cible thérapeutique potentielle. Il serait en effet très intéressant de pouvoir bloquer la migration vers le cerveau des cellules immunitaires portant l’agent infectieux. �

le traitement du paludisme.

L’administration de chacun

de ces produits a entraîné

une diminution importante

de la concentration du prion

pathologique dans les cellules

cultivées en laboratoire.

Ces deux médicaments passent

facilement dans le cerveau,

BSIP

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AKOF

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Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 20028

D O S S I E RVO

ISIN

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Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002 9

Obésité :

La maladie d’Alzheimer est la maladie neurodégénérative

la plus fréquente. Elle atteint surtout des personnes âgées

de plus de 65 ans, mais peut se manifester plus tôt.

Avec quelque 350000 personnes touchées en France

et l’augmentation de son incidence avec l’âge, elle est devenue

un véritable problème de santé publique. Longtemps

incomprise, elle fait aujourd’hui partie des maladies

du système nerveux dont la connaissance a le plus progressé

ces dix dernières années. Ses deux problématiques majeures,

diagnostic et prise en charge, constituent actuellement

des préoccupations médicales et sociales de premier plan.

UNE MALADIE BIEN CONNUE MAIS PAS ASSEZ RECONNUE p. 10

ON PEUT PRÉVENIR ET TRAITER LA MALADIE D’ALZHEIMER p. 15

ÉTUDE 3C : DÉBUSQUER LES FACTEURS DE RISQUE p. 16

VIVRE CHAQUE JOUR AVEC LA MALADIE D’ALZHEIMER p. 18

La maladie d’Alzheimer

ENJEU MÉDICAL ET SOCIAL

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Neuronesain

Formation dela plaque sénile

Neurofibrillesorganisées

Prolongements nerveux contenant de la protéine Tau anormale

Protéine Tau normale

Synapse

Dépôt diffus de peptide béta-amyloïde

Dépôt focal de peptidebéta-amyloïde

Neurofibrillesdésorganisées

Protéine Tau anormale

(torsadée et surabondante)

Dégénérescence neurofibrillaire

D O S S I E R

L a m a l a d i e d ’ A l z h e i m e r

Dossier réalisé avec la collaboration du Pr Yves Agid, neurologue, Fédération de neurologie, Hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris

’est en 1907 qu’Alois Alzheimerdécrivit le premier cas de la maladiequi devait porter son nom. Un siècleplus tard, elle représente un enjeucollectif qui mobilise chercheurs,médecins et pouvoirs publics. Alorsque ses mécanismes sont en coursd’élucidation, chacun prend de plusen plus conscience de la nécessité et

de la complexité de sa prise en charge.Liée à des lésions neurologiques localisées dans lecortex cérébral, la maladie d’Alzheimer entraîneune déchéance progressive des capacités men-tales et physiques. L’épidémiologie, la biologiemoléculaire, la génétique, la neuropsychologieet l’imagerie médicale permettent aujourd’hui dedistinguer nettement cette affection du vieillis-sement naturel ou de toute autre démence.

Des lésions bien caractéristiques

L’observation des lésions post mortem a permisde distinguer les différentes formes de la

maladie et d’acquérir une meilleure compréhen-sion de ses mécanismes. Chez les malades, unecascade d’événements entraîne deux types delésions morphologiques : des plaques séniles etdes dégénérescences neurofibrillaires (accumu-lation de débris filamenteux à l’intérieur desneurones). Les premières sont constituées essen-tiellement d’un dépôt anormal, dans l’espaceentre les cellules, de protéine bêta-amyloïde,laquelle est issue de la dégradation d’une pro-téine, normalement fabriquée dans l’organisme,baptisée APP (amyloid precursor protein). Quantaux dégénérescences neurofibrillaires, elles sontconstituées de protéines tau anormalement phos-phorylées. L’implication respective de ces pro-téines dans la maladie reste discutée mais l’inter-vention des deux est nécessaire à sa survenue.Elle se traduit par la dégénérescence des neu-rones et par la destruction de leurs connexions,les synapses. La progression des lésions estaujourd’hui assez bien connue (voir infographieci-contre) mais on ignore encore leur origine.«Pour aller plus loin, nous avons besoin de cerveaux,les autopsies étant rares. C’est pourquoi un projet deréseau de dons de cerveaux est en train de se mettre enplace. Par ailleurs, les souris transgéniques qui déve-loppent des plaques séniles constituent un modèled’étude fécond», explique le Pr Charles Duyckaerts,anatomopathologiste au laboratoire de neuropa-thologie de l’hôpital de la Salpêtrière, à Paris.

Si les causes précises de la maladie restentméconnues, les études génétiques ont

conduit à distinguer les très rares cas où l’atteinted’un gène est nécessaire et suffisante pour pro-duire la maladie (un apparenté sur deux dans lesfamilles porteuses du gène, soit moins de 1000cas en France), des formes liées à un facteur

Une maladie bien connuemais pas assez reconnue

● ● ●

C

Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 200210

La consultation mémoire est fondée sur un principe : voir le maladeet sa famille séparément, puis les deux ensemble. Le vécu quotidienpeut engendrer certains «secrets» que le médecin doit connaître et préserver. Le malade n’ayant pas conscience de son état, la famille doit rétablir la réalité. Ce type de consultation a souventplusieurs objectifs : identifier les antécédents familiaux, repérer les facteurs associés (prise de calmants ou d’hypnotiques, état dépressif), reconstituer l’évolution des troubles et mesurerl’altération cognitive par des tests. Lors d’une deuxième visite, des examens biologiques et radiographiques complémentaires sont pratiqués. Le moment de l’évocation du diagnostic est laissé à l’appréciation du médecin, l’annonce de la maladie pouvantplonger la famille dans le désarroi, alors que le traitement d’un des facteurs associés peut apporter un réel mieux-être au patient. Le programme thérapeutique est défini par le médecinspécialiste (gériatre ou neurologue) et suivi par le médecingénéraliste. «Il est essentiel que le suivi de ces patients fasse certes appel à des savoirs professionnels mais ne réponde jamais à un “dogme”. En effet, face à des situations familialesdouloureuses, la compassion est la règle», conclut le Pr FrançoisPiette, chef du service Gérontologie 3 à l’hôpital Charles-Foix d’Ivry.

A quoi sert la consultation mémoire?

Causes et susceptibilité génétiques

Vous retrouverez les professeurs Yves Agid et Bruno Dubois pour un débat sur France Culture,le jeudi 24 janvier à 10 h dansl’émission «Visitemédicale».

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Neuronesain

Formation dela plaque sénile

Neurofibrillesorganisées

Prolongements nerveux contenant de la protéine Tau anormale

Protéine Tau normale

Synapse

Dépôt diffus de peptide béta-amyloïde

Dépôt focal de peptidebéta-amyloïde

Neurofibrillesdésorganisées

Protéine Tau anormale

(torsadée et surabondante)

Dégénérescence neurofibrillaire

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2

1

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Dépôt diffus de peptide bêta-amyloïde Neurone

sain

Synapse

Dépôt focal de peptidebêta-amyloïde

Formation de la plaque sénile

Neurotubules organisés

Protéine tau normale

Neurotubulesdésorganisés

Prolongements nerveux contenant de la protéine tau anormale

Protéine tau anormale

(torsadée et surabondante)

Dégénérescenceneurofibrillaire

Evolution supposée des lésions dans la maladie d’Alzheimer

Des observations cliniques et pathologiques permettent de reconstituer par corrélation la progression des lésions dans le cortex cérébral de patients atteints de la maladie d’Alzheimer à différents stades. Ces lésions sont de deux types : il s’agit des plaques séniles et des dégénérescencesneurofibrillaires. Elles entraînent la mort des neuroneset la destruction de leurs connexions, les synapses.

➊ Chez les personnes les moins touchées, on observe des dépôts diffus et focaux de peptide bêta-amyloïde. Ce peptide est issu du clivage d’une protéine normalementprésente dans la membrane des neurones appelée APP (amyloid precursor protein).

➋ Pour une raison inconnue, ce peptide bêta-amyloïde s’accumule dans le cerveau. A un stade ultérieur, il précipite pour former le cœur de la plaque sénile. Des prolongements nerveux viennent au contact de ce cœur mais leur ossature, constituée par un réseaude neurotubules, dont l’un des éléments est la protéine tau, reste normale.

➌ A un stade plus avancé, certains prolongementsnerveux présents au niveau de la plaque sénile se chargent en protéine tau anormalement phosphorylée. Elle est alors torsadée et devient surabondante.

➍ La désorganisation interne due à la protéine tauanormale gagne le corps cellulaire du neurone et conduit à l’apparition de dégénérescences neurofibrillaires, autres lésions caractéristiques de la maladie d’Alzheimer.

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comme facteur de risque de la détériorationcognitive (voir pp. 16-17). Toutefois, d’après lesrésultats de l’étude épidémiologique PAQUID,menée sous l’égide de chercheurs bordelais, uneconsommation modérée d’alcool semble jouer unrôle protecteur.Enfin, trois groupes pourraient bénéficier d’uneprévention ciblée : les femmes, certaines étudessuggérant le rôle protecteur des œstrogènes ; lespersonnes atteintes d’hypertension artérielle(HTA), le traitement de l’HTA diminuant lerisque de maladie d’Alzheimer ; les personnesatteintes de rhumatismes inflammatoires, le rôleprotecteur des anti-inflammatoires non stéroï-diens (AINS) sur la maladie étant à l’étude.

La maladie d’Alzheimer suit donc un parcourssystématisé au sein des aires du cerveau.

«Compte tenu de la durée de son installation, la mala-die s’exprime essentiellement chez la personne âgée;mais il s’agit avant tout d’une maladie du cerveau»,souligne le Pr Bruno Dubois, de la Fédération deneurologie de l’hôpital de la Salpêtrière. La dégra-dation des facultés intellectuelles et cognitivesévolue en trois phases. La phase asymptomatiqueinitiale peut durer plus de vingt ans. Elle est sui-vie par une phase symptomatique non démen-tielle, qui correspond à l’atteinte de l’hippocam-pe, région impliquée dans la mise en mémoire.Cette phase se caractérise d’abord par des troublesdiscrets de la mémoire des événements récents,puis par des difficultés à fixer son attention et destroubles de la mémoire de travail. «On peut aujour-d’hui reconnaître ces patients par des tests spécifiquespermettant de distinguer l’erreur attentionnelle dudéfaut d’enregistrement», précise le Pr Dubois.Enfin, la phase démentielle résulte de l’extensionprogressive des lésions à l’ensemble du néo-cortex associatif. Elle est caractérisée par des dé-ficits du langage (perte des mots, aphasie), destroubles de la reconnaissance des objets ou despersonnes (agnosie), des troubles visuels et l’in-capacité à associer un mouvement à une action(apraxie). A ce stade, le patient perd son autono-mie et son comportement s’altère profondément(apathie, agressivité). D’autres tests permettent dereconnaître facilement ces troubles.

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de susceptibilité géné-tique, lequel doit être asso-cié à d’autres facteurs pouraccroître la probabilité desurvenue de la maladie.Apparaissant en généralavant 60 ans, les formes raressont sous la responsabilitédirecte de deux gènes : celuide l’APP, codant le précur-seur de la protéine amyloïdeet situé sur le chromosome21; celui de la préséniline 1,situé sur le chromosome 14.Elles sont rares mais leurétude est importante carelle permet de mettre en

évidence le rôle des gènes dans la maladie.«C’est en observant que la présence de mutationssur ces gènes était responsable d’une augmentationde la production du peptide bêta-amyloïde présentdans les plaques séniles que l’on a pu comprendreque ce dépôt était le point de départ de la maladie»,souligne le Dr Dominique Campion, de l’EMIInserm 9906 (Rouen).Un variant (ou allèle) du gène de l’apolipopro-téine E (apoE), situé sur le chromosome 19, a étéidentifié comme le principal facteur de suscepti-bilité génétique. Il s’agit de l’allèle 4, présent chezplusieurs millions de personnes en France et parailleurs associé à une élévation du taux de choles-térol et à un accroissement du risque d’infarctusdu myocarde et d’accident vasculaire cérébral.

C’est le vieillissement qui arrive au premierrang des facteurs de risque de la maladie bien

que les études génétiques montrent que lesformes les plus graves sont aussi les plus pré-coces. Pour limiter ce risque, le maintien d’uneactivité sociale et intellectuelle est recommandé,un haut niveau d’éducation retardant la dégra-dation des capacités intellectuelles. Des facteurssocio-environnementaux ont également étéidentifiés, comme l’alcool, le tabac ou l’alumi-nium. L’impact de l’abus d’alcool est à corréleravec l’incidence de sa consommation sur la sur-venue des maladies vasculaires, considérées

«Des tests spécifiques permettent de distinguerl’erreur attentionnelle du défaut d’enregistrement.»

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Conserver une activité intellectuelle diminue le risque de voir s’installer la maladie.

BSIP

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Certaines personnes sont plus exposées que d’autres

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Les symptômes évoluent avec la progression des lésions

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effectuées. Autant de précieux indicateurs del’évolution de la maladie d’Alzheimer…

Face à une maladie cliniquement “homogène”,l’objectif actuel de la recherche est de pouvoir

poser un diagnostic le plus précocement possible afinde prévenir son évolution», explique le Pr Dubois.En effet, de nombreux arguments militent enfaveur d’un diagnostic précoce. Les premiers trai-tements commencent à apparaître (voir plusloin) ; les proches ont besoin d’une «identifica-tion» de la maladie pour pouvoir mieux gérer lesdifficultés qu’elle engendre ; son coût social élevé(environ 28300 euros, soit 120000 francs, parpatient et par an) pourrait être réduit par uneprise en charge mieux ciblée.Pourtant, seul un cas sur deux est actuellementdiagnostiqué. En effet, les réseaux spécialisés

réunissant les compétences multi-disciplinaires nécessaires à l’établis-sement du diagnostic sont encorepeu développés. En outre, la popu-lation des personnes qui exprimenten consultation une plainte rela-tive à la perte de mémoire est trèshétérogène, cette plainte pouvantêtre révélatrice, dans certains cas,d’une baisse des performancesmnésiques et/ou cognitives.Or, on estime qu’environ une per-sonne sur deux au sein de cettepopulation est atteinte de la mala-die d’Alzheimer à un stade

Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002

Chiffres à l’appui• 550000 cas de démence en France,dont 350000 avec maladied’Alzheimer.

• 140000 nouveaux cas de démence par an en France, dont 100000 avec maladied’Alzheimer (les 2/3 chez les personnes de plus de 79 ans).

• Prévalence(1)

des démencesentre 65 et 69 ans :3%; de la maladied’Alzheimer : 1%.

• Prévalence des démencesaprès 90 ans : 30%; prévalencede la maladied’Alzheimer après85 ans : 15%.

• Incidence(2)

de la démence en France : 1,6%.

• Incidence de la maladied’Alzheimer : 1,2%(0,8% chez leshommes et 1,4%chez les femmes).

• Perspectives2020 : chiffresdoublés.

1 - Nombre de casanciens ou nouveauxrencontrés dans unepopulation donnée.2 - Nombre de nouveauxcas survenus dans une population donnéepour une période donnée.

Accumulation anormale de peptide bêta-amyloïde dans une plaque sénile.

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E/CN

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Depuis les années 1990, l’imagerie par réso-nance magnétique (IRM) a permis de

grandes avancées dans le domaine de la volumé-trie des petites structures du cerveau. Ainsi, lamesure de l’atrophie de l’hippocampe, présentedès le début de la maladie (la baisse du volumede l’hippocampe étant d’environ 20% à 40%),fournit-elle des indices prédictifs très utiles dansla perspective d’un diagnostic précoce.«Les apports de l’IRM sont d’autant plus importantsque des études ont montré que, d’une part, plus le volu-me de l’hippocampe est faible chez un patient qui pré-sente des troubles de mémoire, plus le risque de dévelop-per la maladie est fort et, d’autre part, que les troublesmnésiques de la maladie d’Alzheimer sont corrélés à unvolume hippocampique faible, même si l’inverse n’estpas vrai», précise le Dr Stéphane Lehéricy, du ser-vice de neuroradiologie de l’hôpital de laSalpêtrière. Le recours en routine à ce type d’exa-men (IRM morphométrique) dépendra de la miseau point de nouveaux logiciels facili-tant leur interprétation, actuellementen cours de développement.L’IRM peut aussi être utilisée pourévaluer le fonctionnement même ducerveau. Ainsi l’imagerie dite «fonc-tionnelle» permet-elle de visualiserla diminution de l’apport sanguincérébral (IRM de perfusion), l’aug-mentation de la diffusion des mo-lécules d’eau (IRM de diffusion), ladiminution d’autres moléculescomme la N-acétylaspartate (spec-troscopie) ou le niveau d’activitécérébrale en fonction des tâches ● ● ●

Zone de contact entre lesneurones, la synapse permetà l’influx nerveux de circuler.

Un outil prometteur, l’IRM

La nécessité d’un diagnostic précoce

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prédémentiel. «La nécessité de détecter la mala-die à ce stade a abouti à la mise en place d’un pro-gramme de recherche national visant à définir une bat-terie de critères prédictifs permettant la mise en œuvrede prises en charge thérapeutiques et psychosocialespertinentes», conclut le Pr Bruno Dubois, coordon-nateur de ce programme.

Pour l’instant, il existe trois traitements symp-tomatiques qui, prescrits à un stade précoce,

sont capables de stabiliser la maladie. Il s’agit detraitements dits «anticholinestérasiques», quicorrigent le déficit en acétylcholine (un neuro-transmetteur impliqué dans l’activité cérébrale)observé chez les malades. Ces substances ont uneaction significative sur les troubles de la mémoireet de la cognition. On peut compléter le traite-ment par des médicaments ciblant des troublesassociés : psychotropes, anxiolytiques, antidé-presseurs ou antipsychotiques.L’action limitée et les effets secondaires de ces trai-tements, à l’origine de troubles digestifs, imposentla recherche d’autres stratégies thérapeutiques. La

première vise à ralentir l’évolution de la maladiechez les populations à risque. La deuxième a pourbut de bloquer le processus de la maladie enagissant sur ses mécanismes. Deux voies sont àl’étude. En premier lieu, on cherche le meilleurmoyen de bloquer l’action de l’enzyme (décou-verte récemment) responsable de la synthèseanormale de la protéine bêta-amyloïde. En secondlieu, les scientifiques explorent la possibilité d’im-muniser l’organisme contre cette même protéine.Après des études chez la souris, les premiers tra-vaux réalisés chez l’homme sont prometteurs(voir Echos scientifiques dans Recherche & Santénos 86 et 87). Actuellement, les essais de phase IIvisent à mettre au point un vaccin susceptible defaire régresser les lésions existantes ou d’empê-cher leur survenue. «Cette piste est à envisager avecprécaution mais constitue malgré tout un grand espoirde pouvoir un jour conduire une démarche curative etéventuellement préventive ciblée en direction des sujetsà risque», conclut le Dr Jacques Touchon, de l’uni-té de neurologie comportementale du Centre hos-pitalier universitaire de Montpellier.

Quelque 70% des personnes atteintes de lamaladie d’Alzheimer vivent avec leur

conjoint ou chez leurs enfants. Cette situation,qui témoigne du grand investissement affectif desproches, suscite aussi de nombreuses difficultésrelationnelles. Elle entraîne souvent un effondre-ment progressif de l’entourage, tant physique quepsychologique, et porte finalement atteinte àl’intérêt médical du malade, que l’on ne veut pas«abandonner» aux professionnels. Lorsque ladécision d’entrée en institution est prise, c’estsouvent aussi la famille qu’il faut secourir…Indispensable au malade, l’intervention précocedes professionnels permettra de différer puis depréparer l’institutionnalisation, ainsi que de sou-lager les «aidants». A un stade évolué, la priseen charge institutionnelle associe diverses stra-tégies de soins, comme la relaxation, la stimula-tion cognitive ou la musicothérapie, de manièreà favoriser une meilleure insertion.Eviter la médicalisation excessive tout en main-tenant le recours médical, privilégier le lien socialtout en préservant la famille : cette approche com-plexe interpelle médecins, aidants professionnels,familles, institutions et société tout entière. �

Tissus cérébraux vus en microscopie optique : en haut, coupe de cerveau malade;en bas, coupe de cerveau normal.

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Des traitements en évolution

Associer proches et professionnelsà la prise en charge

BSIP

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L’avis du Pr Françoise Forette, chef du service de Gérontologie à l’hôpital Broca (Paris).

Depuis quelques années, de réels progrès ont été accomplis dans laprévention et le traitement de la maladie d’Alzheimer. Sur le planpréventif, deux études ont montré que la prise en charge de l’hypertensionartérielle fait diminuer de 30% à 50% l’incidence des démences liées auxaccidents vasculaires cérébraux et celle des démences dégénératives. Surle plan thérapeutique, trois inhibiteurs de l’acétylcholinestérase sont surle marché, dont l’efficacité est modérée mais significative. Cependant, laportée préventive de ces études est encore peu prise en compte par lespraticiens ; quant aux médicaments, faute de diagnostic précoce, ils nebénéficient pas aux patients autant qu’ils le devraient. En outre, lesstructures de prise en charge sont insuffisantes ou inadaptées : centresmémoire trop peu nombreux, services de jour éloignés du domicile,hôpitaux de long séjour coûteux, aides médico-sociales dispersées.Un bilan encourageant donc, du point de vue des possibilités préventiveset thérapeutiques. Quant au diagnostic et aux modes de prise en charge,des voies d’amélioration commencent à émerger.Ainsi les capacités diagnostiques sont-elles appelées à augmenter grâce à lamise en œuvre d’une prise en charge coordonnée en réseau. Les praticiens(premier maillon) prennent en effet conscience de la nécessité d’orienter lespatients vers des consultations mémoire (deuxième maillon) qui, par leurssynergies de compétences (neuropsychologues, gériatres, psychiatres,psychologues, neurologues, assistantes sociales, plateaux techniquesd’imagerie), sont à même de diagnostiquer 95% des cas. Si des examenscomplémentaires se révèlent utiles, une nouvelle orientation peut êtreopérée vers des centres multidisciplinaires experts (troisième maillon).La recherche en matière de traitements préventifs et thérapeutiques estégalement active (expérimentation en cours d’un vaccin et d’un inhibiteurde sécrétase). D’autres pistes, en cours d’évaluation, ouvrent la voie à uneprévention multiciblée sur les œstrogènes, les antioxydants (vitamine E)et les anti-inflammatoires.Dernier élément de cette prise de conscience généralisée : une refonte du 2e cycle des études médicales a permis la création d’un module«Vieillissement» qui intègre une sensibilisation des médecins audiagnostic et à la prévention de la maladie d’Alzheimer. En outre, leministère de la Santé a mis la dernière main à un plan Démences, quidevrait être mis en œuvre dès le début de cette année. Reste le problèmede l’assistance à la prise en charge de la perte d’autonomie. Dans cedomaine, l’aide personnalisée à l’autonomie (APA) est un premier élémentde réponse pour les familles.Familles, praticiens, chercheurs et pouvoirs publics sont donc aujourd’huimobilisés pour une prise en charge coordonnée, garante d’un réelsoulagement des personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer et deleurs proches.

O p i n i o n

On peut prévenir et traiter la maladie d’Alzheimer

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DR

Tandis que la recherche et les traitements progressent, une amélioration de la prise en charge se dessine. La prise de conscience s’est enfin amorcée…

«Un bilan

encourageant

du point de vue

des possibilités

préventives

et thérapeutiques.

Quant au diagnostic

et aux modes

de prise en charge,

des voies

d’amélioration

commencent

à émerger.»

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D O S S I E R

uggérée par plusieurs travaux, l’hypothèse de cette étude estque les pathologies

vasculaires, cliniques ou infracliniques, ainsique certains facteurs de risque qui leur sontassociés, peuvent jouer un rôle dans la survenuede la maladie d’Alzheimer.

Un recueil de donnéesmultiples et précisesL’objectif est donc d’estimer le risque de détérioration cognitive attribuable à des facteursvasculaires et de contri-buer ainsi à la compré-hension des mécanismesreliant risque vasculaire et risque de démence.Le projet a vu le jour dans

L a m a l a d i e d ’ A l z h e i m e r

Avec le concours du Dr Annick Alpérovitch, directrice de l’unité Inserm 360, CHU Pitié-Salpêtrière, Paris

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(en cours), un deuxièmeexamen à la fin de l’étude(2002-2003).Particulièrement lourde et complexe, la logistique mise en œuvre est garante de la qualité des infor-mations recueillies : caractéristiques générales et antécédents médicaux,capacités cognitives, handicaps et incapacités,état vasculaire et bio-logique. De plus, une échographie carotidienne et un examen cérébralIRM sont réalisés chez les personnes de moins de 85 ans.L’étude présente donc l’intérêt majeur de permettre la constitu-tion de deux importantesbanques de données :l’une issue de l’ensemblede la population étudiée,recueillant les facteurs

le cadre du programme«Action Recherche Santé2000» lancé fin 1997 par la Fondation pour la RechercheMédicale. Recrutées dans«trois cités» – Bordeaux,Dijon et Montpellier –,10000 personnes de 65 ans et plus ne vivant pas en institu-tion figurent dans l’étude.Celle-ci consiste à suivreles participants pendantquatre ans sur la based’un protocole communprévoyant trois examensdestinés à évaluer leur évolution clinique,vasculaire, biologique et cognitive : un examendescriptif, réalisé lors du recrutement(1999-2000), un premier examen de suivi

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Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002

La tribune presse organisée le 8 octobre 2001 par la Fondation pour la RechercheMédicale sur l’étude 3C a montré l’importance de l’apport de l’IRM dans l’étude de la maladie d’Alzheimer. Ainsi, le recueil d’images cérébrales réalisé auprès de 3500 personnes de moins de 80 ans, au début et à la fin de l’étude, constituera-t-illa plus grande base de données IRM au monde. Cette technique d’imagerie permet, en les traduisant en hypersignaux, de localiser et de quantifier les lésions de la substance blanche cérébrale, lésions associées à la détérioration des performances cognitives. Elle fournit aussi des cartes en trois dimensions de la densité de matière grise locale. Elle apparaît donc comme un outil de prévention, à partir duquel pourraient être dégagés les facteurs de risque associés à la quantité des hypersignaux de substance blanche et de la densité de matière grise. Les images sont traitées par des logiciels automatiquesgarantissant la reproductibilité des résultats. Incluses dans l’InternationalConsortium of Brain Mapping, ces données sont utilisables pour les besoins de l’étude mais aussi, au niveau international, pour des applications élargies.

Une base de données IRM exceptionnelle

Etude 3C : débusquer les facteurs de risqueExiste-t-il un lienentre le risquecardio-vasculaire et le risque de détériorationcognitive ? C’est ce quecherche à éluciderl’étude nationale3C, soutenue par la Fondationpour la RechercheMédicale etcoordonnée parl’unité Inserm 360.

Le Dr Février, responsable pourDijon de l’étude 3C.

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ou pas du tout de donnéesaussi précises ; c’est là l’un des bénéfices particulièrementimportants de l’étude. C’est pourquoi, à terme, ce recueil peut non seulementpermettre de confirmer notre hypothèse de départmais aussi contribuer à définirdes stratégies de prévention de l’ensemble des détériora-tions cognitives», souligne le Dr Annick Alpérovitch,directrice de l’unité

biologiques ou génétiquespotentiellement liés à la détérioration cognitive,l’autre issue d’un échan-tillon de 3500 personnes,recueillant des imagescérébrales d’imagerie par résonance magnétique(cf. encadré).

Un bénéfice précieuxpour d’autres maladies«A une telle échelle, on nedisposait encore que rarement

Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002

«A une telle échelle, on ne disposait encore que rarement ou pas du tout de données aussi précises.»

Le Dr Annick Alpérovitch, qui dirige l’unité Inserm 360, coordonne l’étude 3C avec le Dr Christophe Tzourio.

Téléphone : ne l’utilise plus, a des difficultés

à trouver un numéro, ne peut plus composer un numéro.

Transports :ne veut plus conduire

sa voiture, ne prend plus les transports en commun.

Argent :ne sait plus remplir un chèque

ou régler une facture, ne peut plus gérer seulson budget.

Médicaments :ne prend plus seulses médicaments.

Quatre grandssignaux d’alerteSelon l’étude Paquid, ils doiventêtre associés chez un même patient pour être significatifs.

Inserm 360. En outre,l’étude 3C est la premièreétude de cohorte (1)

prospective française sur les accidents vasculairescérébraux et est appelée à devenir un observatoireunique de l’état de santédes personnes de 65 ans et plus en France. Face à la complexité de certainesaffections qui, comme la maladie d’Alzheimer,font intervenir une multi-

tude de facteurs différents, une étude comme 3C, par sa taille, sa précision et la rapidité de ses résul-tats, constitue aujourd’huiun outil indispensablepour progresser dans la connaissance des méca-nismes de survenue de ces pathologies. �

1 - Groupe de personnes qui se prête à des études épidémiologiques suivies au cours du temps.

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Avec le concours du Pr François Piette, chef du service de Gérontologie 3 de l’hôpital Charles-Foix d’Ivry, et d’Huguette Dréra,présidente de l’Union nationale des associations France-Alzheimer.

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La maladie d’Alzheimer a de forts retentissements sur la vie sociale du malade.

Pour celui-ci, un suivi médico-social approprié permet de gérer les troubles sur

les plans thérapeutique et domestique. Pour sa famille, ces aides sont un soutien

nécessaire à la prise en charge quotidienne.

Vivre chaque jour avec la ma l

Une assistante sociale peut accompagner les démarches.

Ticket modérateur pour une prise en charge à 100% (à demander par le médecin traitant).Aide au logement : allocation à caractère social oufamilial (à demander auprès des caisses d’allocations familiales).Aide sociale pour les familles ne pouvant assumer les chargesfinancières (se renseigner auprès du conseil général).Carte d’invalidité pour les personnes invalides à 80% au moins;abattements d’impôts.Depuis le 31 décembre 2001, la prestation spécifique dépendance(PSD) est remplacée par l’aide personnalisée à l’autonomie (APA); aide financière à la prise en charge des personnes âgéesdépendantes vivant à domicile ou en institution (à demanderauprès du conseil général).

Vie pratique

Aides financières et administratives

L’affection des proches est irremplaçable, c’est pourquoi l’aidant

principal ne devrait vivre avecle malade que des momentsprivilégiés. La réalisation des soins quotidiens doit par contre être professionnelleet il faut accepter de se faireaider. A un stade modéré,l’aidant doit passer un «relaispartiel» aux services de maintien à domicile, au reste de la famille et aux institutions (accueilthérapeutique de jour…). Au stade terminal, le placement est parfois vécu comme un abandon, avecun fort sentiment de culpabilité contre lequel il faut lutter. Une évolution harmonieuse de la vie avec une personneatteinte de la maladied’Alzheimer est favorisée par une certaine acceptation de la réalité – il s’agit de faireun nouveau deuil à chaquenouvelle dégradation. Participer à des groupes de parole de familles, créés par les associations et animés par des psychologues, permet d’accompagner ce douloureux cheminement.

Au quotidien

Aider l’aidant

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AdressesutilesASSOCIATIONS• Union nationale des associations France-Alzheimer 21, bd Montmartre 75002 ParisTél. : 0142975241www.francealzheimer.com

• Fondation nationale de gérontologie (FNG) 49, rue Mirabeau 75016 ParisTél. : 0155746714www.geronto.com

• Fédération nationale des associations d’aide à domicile en activitésregroupées (FNADAR) 68, rue d’Hauteville 75010 ParisTél. : 0155331430www.fnadar.org

• Union nationale des associations de soins et de servicesà domicile (UNASSAD) 108-110, rue Saint-Maur 75011 ParisTél. : 0149238252www.unassad.net

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a ladie d’AlzheimerA domicileSoins d’hygiène générale par une infirmière : prise en charge à 100%.Aides ménagères pour les tâches quotidiennes : aide possible des caisses de retraite et de l’aidesociale.Auxiliaires de vie : tout acte ne pouvant êtreaccompli par une personne dépendante ; de 3 heures à 6 heures par jour ; prise en chargepar l’aide personnalisée à l’autonomie (APA);supplément en heures à la charge de la famille.Autres aides (pour les malades vivant seuls) :services divers (portage des repas, lavage de linge, courses à domicile…), téléalarme.

En institutionMaison de retraite ou long séjour hospitalierpour personne semi-valide (avec sectionmédicale) ; hors partie médicale, à la charge totale

de la famille (10000 à 20000 francs par mois).Appartements pour séjours temporaires : 1 mois à 3 moisrenouvelables («soulagement familial»); non pris en charge.Hôpitaux de jour : accueil ambulatoire dans le cadre d’un projetthérapeutique limité dans le temps ; prise en charge par laSécurité sociale.Centre d’accueil thérapeutique de jour : activité occupationnellethérapeutique visant à stimuler les fonctions cognitives du malade;prise en charge possible par l’APA.

Aides médico-sociales

Lorsque les facultés mentales d’une personne sont altérées par la maladie, il est pourvu à ses intérêts par l’un des trois

régimes de protection prévus par la loi et mis en application par le juge des tutelles (tribunal de grande instance).Sauvegarde de justice : mesure de protection légère, parfoissollicitée par le médecin. Le malade conserve l’ensemble de ses droits, seuls ses actes juridiques peuvent être modifiés ou annulés.Curatelle : destinée aux malades qui, sans être hors d’état d’agir par eux-mêmes, ont besoin d’être contrôlés et conseillés dans l’accomplissement des actes juridiques.Tutelle : mesure de protection complète du malade.

Actions administratives

Protections juridiques

VOIS

IN/P

HAN

IE

BSIP/MENDIL

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VOS DONS EN ACTION

Vos dons jouent un rôle capital dans l’avancement des travaux de recherche médicale. Explorer de nouvelles pistes de recherche, multiplier les échanges entre les disciplines et les chercheurs, déceler plus précocement certaines pathologies

graves pour mettre en place plus rapidement les traitements, découvrirla meilleure prise en charge diagnostique puis thérapeutique…, tels sont les principaux objectifs que s’est fixés la Fondation pour la Recherche Médicale en multipliant ses programmes. Cette rubrique«Vos dons en action» présente quelques exemples des 700 projets que vous soutenez chaque année à travers la Fondation.

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spécialiste de la mucoviscidose à l’hôpital Armand-Trousseau (Paris).Autre élément : l’inflammation est caractérisée par l’accumulationde cellules du système immunitaireappelées «polynucléairesneutrophiles», qui participent à l’altération du tissu respiratoire.Plusieurs études ont tenté d’évaluerl’efficacité des glucocorticoïdes,molécules utilisées habituellementcontre les réactions inflammatoiresen général et plus particulièrementlorsqu’elles atteignent les voiesrespiratoires, mais, jusqu’à ce jour,des résultats très contradictoires ontété obtenus dans la mucoviscidose.Est-ce à dire que les polynucléairesneutrophiles (globules blancsimpliqués dans l’inflammation) des bronches des enfants atteints de mucoviscidose fonctionneraientdifféremment de ceux du sang et des voies respiratoires de sujetssains? Pour résoudre cette énigme,«nous avons commencé par élaborerune technique de mise en culture depolynucléaires neutrophiles des bronches,ce qui n’avait jamais été fait auparavant»,rapporte Harriet Corvol, dont letravail a été soutenu par la Fondationgrâce à vos dons. «Nous avons alors constaté que les polynucléairesneutrophiles du sang mais aussi

ceux des voies respiratoires des enfantsmalades produisent in vitro unemolécule pro-inflammatoire appeléeinterleukine 8 (IL-8), en excès par rapportà un groupe témoin de sujets sains»,poursuit-elle. «Mais les polynucléairesneutrophiles des bronches produisentautant d’IL-8 en présence d’un certainglucocorticoïde (la dexaméthasone), alors que l’on observe une réduction des taux d’IL-8 pour les polynucléairesneutrophiles du sang», précise la spécialiste. Il apparaît donc que les polynucléaires neutrophilesdes voies respiratoires dans la mucoviscidose présentent des caractéristiques fonctionnellesdifférentes de celles des poly-nucléaires neutrophiles sanguins. En outre, l’absence de réponse à la dexaméthasone expliquerait les effets limités des glucocorticoïdesemployés dans le traitement de la mucoviscidose. «Toutefois, nous ne baissons pas les bras, lance HarrietCorvol. Les glucocorticoïdes restent une thérapeutique à envisager dans lamucoviscidose. Il n’existe pour le moment pas de consensus quant aux modalitésd’administration et aux posologies à utiliser. Aussi avons-nous commencé de nouvelles études afin de tester l’effetde différentes doses et d’autres moléculesanti-inflammatoires.»

Maîtriser l’inflammation des bronches dans la mucoviscidoseLa mucoviscidose est

une maladie génétique gravese manifestant par une dégra-

dation progressive de la fonctionpulmonaire. Chaque année, elle touche 250 nouveau-nés en France. Si la découverte du gèneà l’origine de la maladie a suscité en 1985 de formidables espoirs, il n’existe à l’heure actuelle aucun traitement spécifique.Une seule chose est sûre, «l’infectionet l’inflammation des voies respiratoiressont deux éléments clés de la pathologie»,explique le Dr Harriet Corvol,

BSIP

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Altération des bronches (bronchophagie) chez un sujet atteint de mucoviscidose.

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Il s’agissait, notamment, d’évaluercomment ces interactions peuventinterférer dans les résultatsdes recherches de gènes de susceptibilité pour ces maladies.Puis Alexis Elbaz a souhaité appliquer ces méthodes à un exemple concret, la maladie de Parkinson. «Grâce à un financement de la Fondation pour la RechercheMédicale, j’ai pu mener à bien ce projet et montrer, dans le cadre de la grande étude européenneEuroparkinson, comment le tabagismeet les antécédents familiaux de maladie de Parkinson sont associésà un risque augmenté de survenue de cette maladie chez les sujets de plus de 75 ans», explique-t-il. Ce travail s’inscrit plus largementdans une recherche sur l’influence des interactions gène-environnement dans la maladie de Parkinson, menée au sein de l’unité Inserm U.360 sous l’égide du Dr Annick Alpérovitch. Cette étude achevée, Alexis Elbaza pu poursuivre ses recherchespendant un an aux Etats-Unis,dans le département d’épidé-

miologie de la clinique Mayo, à Rochester (Minnesota). «J’y ai travaillé sous la direction du Dr Walter Rocca, toujours sur l’épidémiologie de la maladie de Parkinson. J’ai participé en particulier à une étude de grande taille sur l’agrégation familiale dans la maladie de Parkinson et à un autre projet relatif à l’évaluation du risque de maladie de Parkinson.»De retour en France, Alexis Elbazréussit le concours d’entrée à l’Inserm et rejoint l’unité InsermU.360 à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, avec de nouveauxprojets, toujours relatifs à l’étudedes facteurs de risque de la maladiede Parkinson. En particulierl’achèvement d’une étude, TERRE, menée avec le concoursde la Mutualité sociale agricole et de deux autres laboratoires de recherche de l’Inserm et destinée à évaluer si l’expo-sition aux pesticides constitue un facteur de risque de maladie de Parkinson et si des facteurs de susceptibilité génétique modifient cet éventuel effet.

Maladie de Parkinson : à la recherche des interactions gène-environnement

La maladie de Parkinson est, après la maladied’Alzheimer, la plus fréquente

des affections neurodégénératives.En France, elle frappe plus de 100 000 personnes. Son origine reste mal connue mais elle est vraisemblablementplurifactorielle, faisant intervenirdes facteurs de susceptibilitégénétique qui s’exprimeraientpréférentiellement dans certainesconditions d’environnement.L’étude des interactions gène-environnement présente donc un intérêt majeur dans la compréhension fine de cette maladie. C’est à ce sujetque se consacre Alexis Elbaz. A l’aide de différentes méthodes épidémiologiques, il a d’abordétudié les conséquences des interactions gène-environnement dans les maladiesmultifactorielles liées à l’âge.

La maladie de Parkinson frappe plus de 100000 personnes en France.

A gauche, un cerveau ayant une activité normale. A droite, on observe la baisse d’activité d’un cerveau atteint par la maladie de Parkinson.

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V O S D O N S E N A C T I O N

Lutter contre la résistance aux antibiotiquesSi l’usage généralisé

des antibiotiques a éloigné de notre mémoire le danger

mortel que représentaient, dans notre pays, les maladiesinfectieuses voici un demi-siècle,l’apparition de bactéries résistantesa vite assombri ce tableau.Ainsi, les pneumocoques (germesimpliqués dans les méningites et la majorité des infectionsrespiratoires, ainsi que dans les otites de l’enfant) posentaujourd’hui un sérieux problèmede santé publique. «Dans le cadre de l’Observatoire de la résistance du pneumocoque dans la région Basse-Normandie, nous avons observé que près de 50% de ces bactéries sont devenues résistantes à unantibiotique très fréquemment utilisé,appelé l’érythromycine», signale le Pr Roland Leclercq, codirecteurde l’unité de recherche CNRS Upresa 2128 au CHU de Caen.Pire encore, l’arsenal antibiotique

utilisé contre les entérocoques,germes mortels sévissant dans certains services hospitaliers,s’épuise. «Aux Etats-Unis, plus de 15% des Enterococcusfæcium sont résistants à “tout”,y compris à la vancomycine qui était un antibiotique de dernierrecours encore récemment, précise

le spécialiste. Les entérocoques sont beaucoup moins fréquents en France, mais ce qui se passe outre-Atlantique n’est guère rassurant.»Face à cette nouvelle menace, la recherche tente d’élucider les mécanismes moléculaires et génétiques mis en place par les bactéries pour devenirrésistantes aux antibiotiques.L’objectif ? Aider les chimistes à concevoir de nouveauxantibiotiques qui échappent à ces mécanismes. Soutenue grâce à vos dons, l’équipe du Pr Leclercq, pionnière et novatrice,a franchi ces dernières années des étapes décisives dans le domaine. «Il y a trois ans, nous avons montré que la résistancedes pneumocoques à l’érythromycineest presque toujours inductible, c’est-à-dire qu’elle n’est expriméequ’en présence de l’antibiotique. Puis nous avons également découvertque ce phénomène d’induction n’a paslieu avec les kétolides, des antibiotiquesdérivés de l’érythromycine»,rapporte le Pr Leclercq. Dès lors,l’idée d’utiliser cette familled’antibiotiques comme nouvellearme thérapeutique contre les pneumocoques s’est imposée.Des firmes pharmaceutiques y travaillent déjà… Sur le front des entérocoques, l’équipe de Caen a également marqué des points. «Nous avons constaté que l’utilisation d’un mélange de deux nouveaux antibiotiques, la quinupristine et la dalfopristine,freine l’émergence de germes résistants.Pourquoi ? Parce que la bactérie a besoin d’au moins trois gènes pour devenir résistante au mélange,explique le spécialiste, alors qu’il lui en suffit d’un pour être résistante à un seul des deux antibiotiques.»Un résultat extrêmementimportant pour les scientifiques,mais aussi un progrès pour les malades hospitalisés en soins intensifs, qui peuventdésormais bénéficier de cette avancée thérapeutique.Mise en culture d’Enterococcus faecium, une bactérie résistante à tous les antibiotiques.

Les streptocoques, associés ici en chaînettes,sont impliqués dans de nombreuses infections.

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DR

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Expliquer l’effet délétère du LDL cholestérol,dit «mauvais» cholestérol

Les complications de l’athéro-sclérose demeurent toujours la première cause de décès

dans les pays riches. Au départ, la formation et la progression,dans les parois des artères, de plaques constituées de dépôtsde cholestérol et de lipides restesilencieuse. Les années passant, il arrive un moment où ces «plaquesd’athérome» rompent brutalement et provoquent la formation d’un caillot susceptible d’obstruerles vaisseaux. C’est l’accidentcardio-vasculaire. On sait depuislongtemps que les lipoprotéines de basse densité (LDL ou low densitylipoproteins), particules assurant le transport du cholestérol dans les cellules de la paroi artérielle (le cholestérol lié aux LDL estcommunément appelé «mauvaischolestérol»), sont fortementimpliquées dans la formation et le développement des plaques

d’athérome. «En s’agglutinant dans la paroi de l’artère, ces particulessubissent des réactions d’oxydation, ce qui stimule la progression de la plaque d’athérome», expliqueLaurent Chancharme, chercheurdans le laboratoire Inserm U.551 à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière(Paris) dirigé par le Dr Chapman.Or, il existe trois groupes de LDLcirculant dans le sang : les LDLlégères, les LDL intermédiaires, et les LDL petites et denses. «Les proportions de ces sous-fractionsvarient selon les patients. Mais ceux qui ont beaucoup de LDL denses ont plus de risques de présenter des problèmes cardio-vasculaires»,précise Laurent Chancharme.Comment l’expliquer ? L’oxydation des LDL densesdonnerait-elle des substanceschimiques plus toxiques que lesLDL intermédiaires, par exemple? C’est cette idée précisément

Le Dr Chapman dirige le laboratoire Inserm U.551 qui a accueilli Laurent Chancharme pour ses recherches.

David

Car

r

que Laurent Chancharme s’estproposé de vérifier au cours de son étude soutenue par la Fondation pour la RechercheMédicale. «Nous avons effectivementmontré que les LDL denses oxydéesgénèrent des produits d’oxydation des lipides, les hydroperoxydes, qui ont une durée de vie réduite, ce qui va de pair avec leur athéro-génicité accrue.» Les LDL oxydéesexercent de nombreuses actions sur les cellules qui composent la paroi artérielle. «Elles induisentnotamment leur destruction selon un mécanisme dit d’apoptose»,commente Laurent Chancharme.Les sous-fractions de LDL oxydées– intermédiaires ou denses – ont-elles la même toxicité sur les cellules ? «Contrairement à ce que l’on pouvait penser, révèle-t-il, les LDL intermédiairesoxydées sont plus toxiques sur les cellules que les LDL denses.» Bien qu’ils aient une actiondélétère différente, les deux typesde fractions semblent donc aussi dangereux l’un que l’autre.Comment enrayer le processusd’oxydation? Quels antioxydantsbiologiques pourraient nous protéger? La vitamine E? La vitamine C? Ou, plusglobalement, un régime alimentairede type méditerranéen? «C’est ce qu’il faut maintenant essayer de découvrir», conclut le chercheur.

Une plaque d’athérome obstruant la crosseaortique et provoquant un caillot.

BSIP

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V O S D O N S E N A C T I O N

Ce laser CO2 permet d’étudier de manière expérimentale la douleur.

Mieux comprendre les mécanismes de la douleurgrâce au laser CO2

Les mécanismes neurophysio-logiques de la douleur sontdifficiles à étudier faute

de modèle expérimental précis. La plupart des travaux de recherche sont menés en provoquant des stimulithermiques douloureux mais les performances des lampesutilisées sont insuffisantes pour analyser avec précision la transmission des messagesdouloureux par les fibresnerveuses spécialisées, A delta et surtout C. En Belgique, l’équipedu Pr Léon Plaghki étudie depuisplusieurs années les réactionsprovoquées chez l’homme par une autre source thermique,le laser CO2. Très énergétique, ce rayonnement laser permet

d’appliquer un stimulus intense de très courte durée. Il est constituéd’ondes invisibles, toutes de même fréquence, qui pénètrentensemble dans la couche cutanéesupérieure et stimulentsimultanément lesrécepteurs à la douleur. Ces propriétés, quipermettent d’analyseret de quantifier la relationentre l’intensité du stimulus et la réactiondes différentes fibres,devraient faire du laserCO2 un outil précieux d’étudeexpérimentale de la douleur. Grâce à la Fondation pour la Recherche Médicale, Dominique Bragard, jeunechercheur, a pu, après sa thèse

dirigée par le Pr Plaghki, rejoindrel’unité de recherche U.161 de l’Inserm, spécialisée dans l’étude de la douleur, pour y mettre en application son expérience du laser CO2.

Il a d’abord transformé cet appareil industrielen un outil de rechercheexpérimentalepermettant de maîtriserparfaitement tous les paramètres du stimulus douloureuxet de mesurer

de manière précise la réaction des fibres nerveuses impliquées.Puis il a étudié chez le rat la réponseà ce stimulus. Elle n’implique que les fibres C et s’opère en deux temps : d’abord une réponse réflexe – le retrait de la patte – qui ne met en jeu que la moelle épinière et peut être analysée en enregistrant l’activité électrique du muscle de la cuisse ; puis, avec un décalage de 30 millisecondesenviron, une réponse cérébraleliée à la perception de la douleur, avec l’émission d’un petitcouinement. «Ce système permet donc d’étudier séparément les réponsesspinale et cérébrale à la douleur. Dominique Bragard a aussi montréque ces deux réponses sont bloquées par la morphine, la réponse vocalel’étant pour de faibles doses, explique le Dr Daniel Le Bars, qui a supervisé ce travail.On dispose avec ce modèle d’un outil permettant de dissocierl’effet sur la réaction motrice de l’effet sur la sensation, et d’étudier plusfinement d’autres substances actives sur la douleur.» A plus long terme, d’éventuelles corrélations entre pathologies des fibresnerveuses et propriétés du signaltransmis pourraient déboucher sur une utilisation diagnostique de ce stimulus laser.

Un outil pour mesurer

la réactiondes fibresnerveuses

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Le cœur : une pompe sous influence électrique

Un cœur en bonne santé se contracte en moyenne 70 fois par minute.

Les battements sont déclenchésdans l’ensemble des cellules du muscle cardiaque par un courant électrique entraînantaussitôt la contraction coordonnée des quatre cavités du cœur. Or, la qualité de cet influxélectrique est fondamentale pour le fonctionnement de la pompe. C’est ainsi qu’une fréquence trop basse ou trop élevée peut entraîner une insuffisance cardiaque. «La fréquence et le décours des signauxélectriques sont contrôlés par les ionspotassiques K+», précise le Pr Guy

Vassort, directeur du laboratoire de physiopathologie cardio-vasculaire (Inserm U.390) au CHU de Montpellier, spécialisé dans l’étude des caractéristiques des courants ioniques au cours des troubles du rythme cardiaque.Une aventure scientifiquepassionnante… «Il y a trois ans, nous avons démontré par des expériences chez la souris et le ratque les courants de K+ traversant les cellules cardiaques sont fortementdiminués après un infarctus, ce qui induit des troubles du rythmecardiaque (arythmies) pouvant être mortels chez certains patients»,rapporte Guy Vassort. «Dès lors,nous nous sommes intéressés aux effets

Le professeur Vassort a encadré les recherches de Frank Aimond sur les troubles du rythme cardiaque.

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de l’ATP (adénosine triphosphate)extracellulaire sur les courants K+.»En effet, ce neurotransmetteurpeut aussi être relargué en grandequantité par les cellules cardiaques au cours de l’ischémie (manqued’oxygène) générée lors d’un infarctus du myocarde.Utilisant des techniques d’électrophysiologie appropriées sur les cellules cardiaques, Frank Aimond, dont le travail de recherche a été soutenu par vos dons, a réussi à obtenir des résultats remarquables, publiésdans une revue scientifiquerenommée (1). «Ses expériences ont montré que l’augmentation des concentrations d’ATP entraînel’activation d’une enzyme ditephospholipase A2 cytosolique (cPLA2),engendrant aussitôt la synthèse d’acidearachidonique.» Etape importante,car cet acide va provoquerl’activation de courantspotassiques particuliers, attribuésaux canaux TREK bien connus des biochimistes et biologistesmoléculaires. Cette découverteouvre de nouvelles perspectivesthérapeutiques contre les troublesdu rythme cardiaque. «L’idée serait de trouver des molécules qui bloqueraient spécifiquementl’activation de l’enzyme cPLA2 par l’ATP», explique le Pr Vassort.Mais, l’affaire est encore loind’être gagnée… En effet, «l’ATP extracellulaire est une molécule clé de l’organisme, qui intervient aussi dans de nombreux mécanismescellulaires du système nerveux central. Comment bloquer son action dans le cœur sans toucher le cerveau ?C’est là tout le problème !»Pour l’heure, les scientifiquesmontpelliérains continuent leurs recherches par l’étuded’analogues de l’ATP et celle d’autres neurotransmetteurs, telle l’adrénaline, connus euxaussi comme pouvant régulerl’activité des canaux ioniques.

1 - Journal of biological chemistry, décembre 2000.

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Une souris transgéniquecomme modèle d’étude

La maladie des agglutininesfroides est une anémieauto-immune d’origineinconnue. Cette pathologie

rare – 5 cas par million d’habitants –frappe essentiellement des personnesâgées. Les lymphocytes B du maladeproduisent des quantités considé-rables d’auto-anticorps dirigéscontre des molécules de glycolipide(1)

présentes à la surface de ses propresglobules rouges. Ces anticorps ontreçu le nom d’agglutinines froidescar, à basse température, ils se fixentsur leur cible – appelée antigène de surface – et provoquent l’agglu-tination des globules rouges. Parfois,la seule conséquence clinique de cette «hémagglutination» est une cyanose au froid des extrémités(nez, doigts, orteils…), qui prennentune coloration mauve ou bleutéedu fait de l’obturation des capillairessanguins. Lorsque la température

du sang augmente à nouveau sous l’effet de la circulation, les globules rouges (ou hématies)liés aux agglutinines sont détruits.Lorsque la production d’auto-anticorps est importante, ce phénomène, appelé hémolyse, peut provoquer l’apparition d’une anémie grave, incurable.

Dérèglement immunitaireL’hyperproduction d’agglutininesfroides provient d’un dérèglementimmunitaire encore mal compris.L’immense majorité des auto-anticorps est, normalement, détruitelors de la maturation du systèmeimmunitaire, même s’ils persistentchez toute personne en bonne santéà un taux très faible, non pathogène.«Chez certains malades, la quantité de ces auto-anticorps est telle que, lorsd’examens sanguins, il faut diluer leur sérum jusqu’à plus de 16000 foispour faire disparaître la réactiond’hémagglutination. Souvent, la maladiedes agglutinines froides est associée à un lymphome, c’est-à-dire à une prolifération de lymphocytes B dont la production massive d’auto-anticorps pourrait être la cause ou la conséquence»,explique le Dr Pourcel, de l’unitéd’Immuno-hématologie et d’immu-nopathologie de l’Institut Pasteur(Paris), dirigée par le Pr Dighiero.«L’augmentation du taux d’agglutininesfroides peut aussi survenir à la suite de l’infection par un virus comme le cytomégalovirus ou le virus d’Epstein-Barr, et surtout d’une infection par

V O S D O N S E N A C T I O N

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Maladie rare : agglutinines froides

La maladie des agglutininesfroides est une formed’anémie rare et souvent grave. Un modèle de cette pathologiechez une souristransgénique va favoriser sa compréhension et la mise au pointd’un traitement.

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Le virus d’Epstein-Barr observé en microscopie électronique. L’infection par ce virus peut entraîner une augmentation du taux d’agglutinines froides.

Entretien avec le Dr Christine Pourcel, de l’unité d’Immuno-hématologieet d’immunopathologie de l’Institut Pasteur.

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Séverine Havouis (à gauche) a pu, sous la direction du Dr Christine Pourcel (à droite) et avec Gérard Dumas (au centre), développer ses recherches sur le dérèglement immunitaire qui provoque l’hyperproduction d’agglutinines froides.

de déclenchement de la maladie des agglutinines froides, ainsi que celle de l’éventuel processus de transformation maligne vers un lymphome. «Toutefois, les mécanismes mis en jeu dans notre modèle animal et dans l’anémie

hémolytique auto-immunehumaine ne sont peut-êtrepas strictement les mêmes,précise l’immunologiste. En particulier, les tauxd’agglutinines obtenus chez ces animaux restentinsuffisants pour provoquerune anémie grave.»

Ensuite, ce modèle sera très utilepour la mise au point d’un vaccincontre l’agglutinine froide humaine et les lymphocytes B qui la produisent. «Nous avonscommencé à produire l’anticorps capable de reconnaître l’agglutininefroide et nous devrions pouvoir étudier la faisabilité d’un tel vaccin chez la souris dans les prochains mois.»

David

Car

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un micro-organisme, le mycoplasme. Elle constitue donc aussi un modèleprécieux pour mieux comprendre le rôle des infections dans l’apparition de maladies auto-immunes.»

Un modèle expérimentalPour pallier l’absence de modèleanimal, ce qui freine l’étude de la maladie et la mise au point d’un traitement, l’équipe du Dr Pourcel a voulu créer une souris transgénique dont les lymphocytes B expriment une agglutinine froide humaine,capable d’agglutiner les globulesrouges de souris. Durant son travail,soutenu par la Fondation pour la Recherche Médicale, SéverineHavouis a participé, sous la directiondu Dr Pourcel, à la constitution de cette souche de souris et a étudié sa réponse à une infection expérimentale par le mycoplasme.«L’élévation de la production des agglutinines froides observée parSéverine Havouis lors de cette infectionchez ces souris ressemble à celle qui est

décrite dans la maladie humaine, avecune hémagglutination près de 1000 foissupérieure à celle observée chez les sourisnon infectées», explique le Dr Pourcel.Il existe probablement une similitudeentre une molécule présente à lasurface du mycoplasme et l’antigènecible naturel desagglutinines froides à la surface des globulesrouges. Ce mimétismemoléculaire serait àl’origine d’une réactionimmunitaire croisée,l’infection par le myco-plasme provoquant la stimulation des lymphocytes Bproducteurs d’agglutinines.

Un outil précieuxCe modèle animal constitue un outil précieux pour deux raisons. Tout d’abord, pour la compréhensiondes mécanismes d’instauration de la tolérance immunitaire et de la reconnaissance du soi.Surtout, sa mise au point va faciliter l’étude des phases initiales

Prochaineétape : étudier

la faisabilité d’un vaccin

chez la souris

1 - Molécule associant un lipide et un sucre.

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P O I N T D E V U E

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Alors que la population des chercheurs français vieillit

et que les jeunes médecins se détournent de la recherche

publique, comment séduire et retenir dans l’Hexagone

les talents de demain? Pourrelever ce défi, en liaison avec

la Fondation pour la RechercheMédicale qui en a été l’initiatrice,le Pr Christian Bréchot, directeur

général de l’Institut national de la santé et de la recherche

médicale (Inserm), lance le programme Avenir.

Entretien avec CHRISTIAN BRÉCHOT, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L’INSERM

Parmi les problèmes que rencontre larecherche en France figure, on lesait, la faible attractivité de nos orga-nismes de recherche. S’agissant de laformation des jeunes chercheurs

– DEA, thèse, post-doctorat –, notre pays estplutôt en bonne position. Mais beaucoup de cesétudiants formés en France partent à l’étrangerà l’issue de leur doctorat et beaucoup d’entreeux ne reviennent pas. Ce problème ne concernepas seulement l’Inserm, il touche aussi le CNRSet d’autres structures de recherche publique. Enrevanche, l’Inserm est concerné par un problèmespécifique, celui des médecins. Placée sous ladouble tutelle des ministères de la Recherche etde la Santé, cette institution a en effet vocationà encourager la recherche biomédicale, clinique,et en santé publique. Or, sur les 182 candidatsqui ont postulé cette année auprès de l’Institut,18 seulement étaient médecins. Sur 95 chargésde recherche titularisés, 5 étaient médecins. Sepose également la question du prochain départ

Préparer l’avenirdes jeunes chercheurs

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à la retraite d’une partie importante des cher-cheurs de l’Inserm. Entre 2005 et 2010, 27%des collaborateurs de notre organisme sont eneffet appelés à se renouveler.

Un programme complet et innovantC’est dans ce contexte que nous venons de lan-cer le programme Avenir. En quoi consiste ceprogramme de soutien aux jeunes chercheurs?D’une part, il vise à aider les jeunes titulaires,médecins, pharmaciens, chercheurs, en leurpermettant, grâce à des contrats de trois ansrenouvelables une fois, de développer de façonprécoce une recherche indépendante. D’autrepart et c’est là une véritable innovation, nousattribuons les mêmes moyens à des post-doctorants non titulaires. Nous estimons eneffet que l’on peut, si un jeune chercheur est degrande valeur, ne pas attendre sa titularisationpour lui apporter une aide. Les jeunes scienti-

fiques retenus disposeront d’un budget de61000 €, soit 400000 francs, par an. Ils dispo-seront aussi d’un espace d’environ 50 m2 pourexercer leur activité, auront le libre accès à dumatériel de pointe et la possibilité de monterleur propre équipe de recherche. En ce quiconcerne les post-doctorants, ils se verrontattribuer une allocation mensuelle. Au total,45 projets pourront être soutenus en 2002,10 étant initiés par les hospitalo-universitaires,10 autres émanant des chercheurs statutaires et20 à 25 relevant des post-doctorants.

Un choix multicritèreCe programme suppose naturellement une trèsforte sélection des meilleurs dossiers. Cettesélection sera effectuée, sur la base d’entre-tiens, par une commission nationale mise enplace par l’Inserm à laquelle participeront desexperts étrangers. L’évaluation, en particulier laprésentation des dossiers, sera réalisée en par-tenariat avec la Fondation pour la RechercheMédicale, fortement impliquée dans ce pro-gramme. Les candidats seront retenus sur labase de plusieurs critères. Ils devront non seu-lement posséder une très grande compétencescientifique mais aussi être dotés d’une person-nalité forte et indépendante, et de réelles capa-cités d’animation et d’interaction. Même s’ilsdisposent de moyens importants et d’une réel-

le autonomie, nous veillerons à ce qu’ils ne secoupent pas de la communauté des chercheurs.La remise des dossiers par les candidats s’esteffectuée jusqu’au 29 octobre 2001. Une pre-mière réunion de la commission aura lieu dèsjanvier 2002. Les premiers candidats serontainsi à pied d’œuvre en septembre 2002.Avenir doit être considéré comme un program-me de recrutement, les chercheurs présélec-tionnés étant destinés à être recrutés commetitulaires dans les années qui sui-vent la fin de leur contrat.

Des partenariats indispensablesUn tel programme ne peut seconcevoir sans une diversité departenaires, comme les associa-tions, dont la Fondation pour laRecherche Médicale, le ministèrede la Santé, les hôpitaux, l’Agence

nationale de recherche sur le sida,l’Etablissement français du sangou encore des partenaires indus-triels. Par ailleurs –et je m’en féli-cite– ce programme va aussi faireintervenir nos sites en région, quiauront la possibilité de soumettredes dossiers à l’évaluation natio-nale. La Fondation pour laRecherche Médicale avait déjàdéveloppé un programme fort desoutien aux jeunes chercheurs.Avenir va permettre, tout en ren-forçant les liens de l’Inserm avecses partenaires, d’aller encore plusloin, en proposant un dispositif degrande ampleur.Enfin, le programme Avenir ne seconçoit pas sans la mise en placede mesures qui amélioreraientl’attractivité des carrières scienti-fiques dans notre pays. En ce sens,ce programme ne constitue que lepremier étage d’une fusée. Il restedésormais à travailler, avec lesministères de la Recherche, de laSanté et de l’Education nationale,pour proposer à l’ensemble desscientifiques des formules de car-rière réellement motivantes.

Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002

Les candidats devront réunir à la foisune très grande compétence scientifique

et une personnalité forte et indépendante.

Agé de 49 ans,Christian Bréchota été nommédirecteur généralde l’Inserm en février 2001.Spécialiste des hépatites B et C, et des méca-nismes qui sont à l’origine des cancers du foie, il dirigeaitdepuis 1993 l’unité Inserm 370 – «carcinogenèsehépatique et virologiemoléculaire» –associée à l’Institut Pasteuret, depuis 1998, le Centre nationalde référence sur l’épidémiologiemoléculaire des hépatitesvirales. Christian Bréchotest également un praticienhospitalier, chef de service en hépatologie à l’hôpital Necker-Enfantsmalades depuis 1997.

DR

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LA FONDATION À L’ÉCOUTE

Fondat ion pour la recherche médica le • numéro 79 • 3 e t r imestre - ju i l le t 199930 Fondat ion pour la recherche médica le • numéro 79 • 3 e t r imestre - ju i l le t 19993030

Vous faire partager l’enthousiasme et l’énergie déployée par les bénévoles des Comités régionaux pour réunir les donateurs et les chercheurs autour et en faveur de la FRM. Etre présentsdans les moments d’émotion, d’espoir et de réussite, être

ensemble pour mieux encourager la recherche et mieux se connaître.Tel est l’objectif de la rubrique «la Fondation à l’écoute», qui, chaquetrimestre, nous réunit autour de quelques temps forts. Rejoignez-nous…

Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002

La renaissance du comité de LyonVoici maintenant quatre mois que le comité de Lyon a pris un nouveau départsous la direction du professeur Revol. Cet enseignant-chercheur a déjà réuni une équipe de huit bénévoles. Les idées et les projets sont nombreux et n’attendent qu’une chose pour se concrétiser : disposer d’un local.

Depuis mai 2001, le comité de Lyon de la Fondation pour la Recherche Médicale

a repris ses activités sous la houlettedu professeur André Revol,enseignant-chercheur, professeurémérite de biochimie, domaineRockfeller, faculté de pharmacie de l’université de Lyon I. «Les projetsne manquent pas, ce qu’il nousmanque pour l’instant, c’est un siège, regrette le Pr Revol.

Tant que nousn’aurons pasun local et uneadresse, il noussera difficile de les mener à bien. Je souhaiteraisque ce soitl’université de Lyon I,spécialisée en médecine,pharmacie,odontologie et sciences,

qui nous accueille, d’autant qu’elle se situe à proximité d’un grand pôle médical. Depuis quatre moismaintenant, je suis en concertation avec les responsables de l’université et en attente d’une réponse.»

Une histoire tournée vers l’avenirPassé une période d’intense activitédans les années 80 – divers travaux,tels que ceux du professeur Françoissur le diabète de type 1, avaient étéfinancés –, l’antenne s’était en effetréduite à son ancien directeur,le professeur Mornex. C’est à sa demande et sur les conseilsde l’un de ses collègues proche de la Fondation que le Pr Revol a repris les rênes du comité. «J’ai accepté cette charge très volontiers car je savais qu’il s’agissait d’un organisme de rigueur et, depuis mon arrivée, j’ai pu constater le sérieux de sa gestion,reprend ce dernier. Bien entendu, j’ai trouvé que ses objectifs – soutenir des équipes de recherche

et informer le public sur les problèmesde santé – étaient très intéressants.»

Des bénévoles indispensables Au terme de sa carrière de chercheur,le Pr Revol connaît bien les problèmesliés à la recherche et avoue que ces connaissances lui sont très précieuses pour assumer sa nouvelle mission. Toutefois, il assure que la présence de bénévoles issus de secteurs divers (bancaire,juridique, industriel, etc.) est essentielle au bon fonctionnementdu comité : «Sur les huit membres que nous avons réunis, seulement deuxne sont pas issus du secteur de la santé. Notre objectif est d’amener d’autresbénévoles d’horizons différents. L’étape suivante consistera à trouver des donateurs. Une fois ce budget localconstitué, nous pourrons faire connaître l’action de la Fondation auprès du public, notamment en organisant des expositions sur certaines maladies.»

Pour joindre le comité de Lyon,

Pr Revol : 1, place Louis-Chazette, 69001 Lyon

Le Pr Revol se réjouitd’assumer ses nouvellesfonctions au sein ducomité régional de Lyon.

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31Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 83 • 3 e t r imestre - ju i l le t 2000 31Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002

L’actualité met périodiquement la maladied’Alzheimer en pleine lumière. On parle

beaucoup de la nécessité d’établir un diagnostictoujours plus précoce. On insiste également sur «l’aide aux aidants», avec l’aggravation des problèmes d’ordres familial et psychosocial liés à l’accroissement de la longévité. Du point de vuethérapeutique, les recherches en cours sur un vaccin et les perspectives annoncées de la thérapie cellulaire font naître quelques espoirs. En revanche, la prévention est peu évoquée. C’est pourquoi, lors du congrès international sur la maladie d’Alzheimerqui s’est tenu à Bordeaux du 9 au 13 octobre 2001, la Fondation pour la Recherche Médicale (FRM) a parrainé un symposium spécifiquesur l’étude épidémiologique dite «3C» (voir pp. 16-17), poursuivantainsi sa participation active dans la lutte contre cette maladie. Une présentation des premiers résultats partiels à la communautéscientifique a été réalisée par le docteur Annick Alpérovitch (InsermU.360), coordonnatrice de cette étude. Le professeur Roger Marthan,responsable scientifique du Comité aquitain de la Fondation, présentaitl’implication de la FRM, tant au niveau national que local.

L’actualité des comités

«L’os vivant» : itinérance régionale des deux versions de l’exposition

Un partenariatbasé sur la confiance,formalisé par une convention

ponctuelle et personnalisée,nous a permis de nouer desrelations avec les responsablesdes affaires sociales de CRICAPrévoyance du groupeRetraites unies. L’intérêtmanifesté à l’action menée par la Fondation pour la Recherche Médicale est de nature à mobiliser l’ensembledes adhérents et à les associerà une participation active aux progrès et aux avancéesde la recherche médicalefrançaise. La présence à nos côtés de CRICAPrévoyance méritait d’être soulignée et de figurer en bonne place dans les colonnes de la revueRecherche & Santé. C’est l’occasion de remercierpubliquement ce partenairequi a financé récemment deux études portant sur la maladie d’Alzheimer et sur les accidents vasculairescérébraux, et de l’assurer de notre reconnaissance pour son engagement et son soutien. Indépendammentdes retombées positives des travaux des chercheurspour les malades, être partenairede la Fondation, c’est permettreà la recherche médicalefrançaise de se maintenir à un niveau d’excellence sur le plan international.

Une nouvelleconvention

Après Rennes, Laval, Paris (Palaisde la découverte), Montbéliard

et Bourges, la version principale de l’exposition «L’os vivant» est présentée, depuis le 17 octobre2001 et jusqu’au 27 janvier 2002, au Muséum d’histoire naturelle de Nantes. Pour tout renseignement,vous pouvez contacter Marie Dartigeau 0240992620. Quant à la version légère, après Monaco,Grenoble, Lille, Nancy (Comitélorrain de la Fondation) et Paris (ordre des pharmaciens), elle circule depuis le 16 novembre2001 dans plusieurs villes de la région Languedoc-Roussillon grâce au comitéLanguedoc-Roussillon-Rouergue de la Fondation pour la RechercheMédicale. Vous pouvez la retrouverjusqu’au 15 janvier 2002 à l’office du tourisme de Palavas-les-Flots et obtenir de plus amplesinformations auprès de Marie-Laure Anselme-Martin en téléphonant au 04 67 52 44 24.Ensuite, elle sera présentée à Paris,

au salon professionnel du Medec, du 12 au 15 mars 2002, puis, du 6 au 26 avril 2002, au Musée belge de radiologie, à Bruxelles (pour en savoir plus appelez le Dr Van Tiggelen au 00 32 226440 97).

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Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 200232

L A F O N D A T I O N À L ’ É C O U T E

Rencontre

Implanter l’ingénierie cellulaire en Europe

Entret ien avec François Guillot , docteur en biochimie et spécial iste de la cul ture cel lu la i re

François Guillot, après une expérience acquise aux Etats-Unis et en Suisse, a implanté en France le premier laboratoire de culture de cellules de la peau, destiné à produire des greffonsautologues (provenant du sujet lui-même) pour le traitementdes brûlures graves ou des plaies chroniques.

EDDY

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TAZ

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Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002 33

Depuis quand vous intéressez-vous à la culturecellulaire?

François Guillot : Après des études de biochimiedébutées à Nice, j’ai eu l’occasion de partirpour un an aux Etats-Unis dans le cadre d’un programme d’échange. J’y suis finalementresté quatre ans, le temps de mener à bien un doctorat à l’université du Kansas. Dès cette époque, le fil conducteur de mes recherchesa été la culture cellulaire. Au début, il s’agissaitde mettre au point des modèles de prédictiondu comportement de molécules dans l’organisme.Aux Etats-Unis, j’ai développé un modèle de culture de cellules endothéliales(1) provenantdes microcapillaires du système nerveux central,permettant de recréer in vitro la barrière hémato-encéphalique séparant le sang du cerveau.

Vous êtes ensuite revenu en Europe, mais pas en France…

F. G. : En 1990, un laboratoire pharmaceutiquem’a proposé de poursuivre ces travaux à Bâle,en Suisse, où j’ai été chargé de créer un labo-ratoire de culture cellulaire pour comprendre et prédire la pénétration de médicaments dans le cerveau. A partir de 1992, j’ai travaillésur des cultures de cellules épithéliales (2)

gastriques ou de la peau dans un centre de recherche privé. Je menais des études dans le domaine de la cancérogenèse portant,par exemple, sur les propriétés des antioxydantsnaturels comme le thé vert ou sur la nocivité de certains cafés pour l’estomac…

Qu’est-ce qui vous a amené à la recherche thérapeutique?

F. G. : Dès que je me suis engagé dans la voiede la culture de cellules de la peau, je me suisintéressé à leur potentiel thérapeutique.J’ai notamment présenté, à Lausanne, un courssur les grands brûlés à des techniciens de labo-ratoire. Et en 1996, j’ai eu la chance d’êtreengagé, à Sophia-Antipolis, dans le premierlaboratoire pharmaceutique français ayantdécidé de créer un département spécialisé dans la culture de cellules de l’épiderme. C’était un retour aux sources mais aussi un défi technique extraordinaire. On m’a confié un volume vide et j’ai eu carte blanche pour l’occuper. Le pragmatisme du technicien –je suis titulaire d’un baccalauréat technique –m’a permis de surveiller personnellement et étroitement les travaux; j’ai aussi mené de front toute la partie réglementaire. En un an, les salles blanches (3) étaientopérationnelles pour la culture des cellules.

Objectif recherche1986 Sa licence de biochimie en poche, FrançoisGuillot s’envolepour les Etats-Unis. Il y préparesa maîtrise puisson doctorat à l’université du Kansas et y faitses armes dans le domaine de laculture cellulaire.1990 Retour en Suisse pour un stage post-doctoral au seindu départementBiopharmaceutiquedu laboratoireSandoz Pharma, à Bâle.1992-1996Chercheur en toxicologie au Centre de rechercheNestlé. Premierstravaux dans le domaine de laculture de cellulesde la peau.1996-2001Conception et implantation duplateau techniquedu départementBiotechnologie des LaboratoiresGenévrier,spécialisé dans laculture de cellulesépidermiquesautologues.

Inse

rm

Quels sont les avantages et les limites des cultures cellulaires?

F. G. : A partir d’un échantillon de peau prélevésur le malade lui-même, elles permettentde préparer des greffons qui ne suscitent pas de rejet chez les grands brûlés, chez les personnesprésentant des plaies chroniques… Je me souviensd’un garçon de 18 ans, brûlé à 85%, à l’hôpitalmilitaire de Budapest, en Hongrie. A partird’une biopsie de 7 cm2, nous avons produit une surface d’environ 12000 cm2 d’épiderme pour ce patient. L’inconvénient principal de cette technologie est son coût élevé, lié à l’importance des moyens mis en œuvre. Il faudrait obtenir un remboursement par la Sécurité sociale dans toutes les indications…

Vous avez de nouveaux projets…F. G. : Je souhaite continuer à développer

les techniques de culture cellulaire en Europe,pour les rendre plus accessibles. Les perspectivessont multiples. A Sophia-Antipolis, nous avonsmis au point un substrat dermique type éponge,qui peut être utilisé en tant que «pansementbiologique» pour couvrir les ulcères profonds ou être colonisé par des cellules de la peau et servir de «derme équivalent». Un autre bio-matériau de type gel, dans lequel peuvent êtreincorporés des chondrocytes – les cellules du cartilage – a été breveté. J’assure désormais le suivi de ces recherches en tant que consultant,car je suis retourné vivre en Suisse, où j’ai desattaches familiales. J’y ai un projet d’installationd’un autre laboratoire, où je compte poursuivremes travaux en ingénierie tissulaire et cellulaire.

Quel regard portez-vous sur la recherche française?

F. G. : Etre resté onze ans à l’étranger me permetd’avoir un regard extérieur. Aux Etats-Unis, j’aisuivi le cursus typique d’un étudiant américain.Ce qui m’a beaucoup plu, c’est le contact directavec les professeurs. Cela peut paraître un lieucommun mais le travail y est mieux récompenséqu’en Europe. La recherche publique française a des atouts mais elle ne peut offrir les mêmessalaires. Il faudrait mieux accompagner les jeunes chercheurs et favoriser leurs prises de responsabilité. Je pense aussi qu’il faudraitinstaurer une meilleure synergie entre labo-ratoires ayant des thématiques similaires.

1 - Cellules tapissant la paroi interne des vaisseaux sanguins.2 - Cellules formant un tissu de revêtement externe ou interne.3 - Plateau technique destiné à la production de culturescellulaires, strictement protégé des contaminations et soumis à une réglementation très stricte.

Culture de cellules de la peau.

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Depuis quand vous intéressez-vous à la culturecellulaire?

François Guillot : Après des études de biochimiedébutées à Nice, j’ai eu l’occasion de partirpour un an aux Etats-Unis dans le cadre d’un programme d’échange. J’y suis finalementresté quatre ans, le temps de mener à bien un doctorat à l’université du Kansas. Dès cette époque, le fil conducteur de mes recherchesa été la culture cellulaire. Au début, il s’agissaitde mettre au point des modèles de prédictiondu comportement de molécules dans l’organisme.Aux Etats-Unis, j’ai développé un modèle de culture de cellules endothéliales(1) provenantdes microcapillaires du système nerveux central,permettant de recréer in vitro la barrière hémato-encéphalique séparant le sang du cerveau.

Vous êtes ensuite revenu en Europe, mais pas en France…

F. G. : En 1990, un laboratoire pharmaceutiquem’a proposé de poursuivre ces travaux à Bâle,en Suisse, où j’ai été chargé de créer un labo-ratoire de culture cellulaire pour comprendre et prédire la pénétration de médicaments dans le cerveau. A partir de 1992, j’ai travaillésur des cultures de cellules épithéliales (2)

gastriques ou de la peau dans un centre de recherche privé. Je menais des études dans le domaine de la cancérogenèse portant,par exemple, sur les propriétés des antioxydantsnaturels comme le thé vert ou sur la nocivité de certains cafés pour l’estomac…

Qu’est-ce qui vous a amené à la recherche thérapeutique?

F. G. : Dès que je me suis engagé dans la voiede la culture de cellules de la peau, je me suisintéressé à leur potentiel thérapeutique.J’ai notamment présenté, à Lausanne, un courssur les grands brûlés à des techniciens de labo-ratoire. Et en 1996, j’ai eu la chance d’êtreengagé, à Sophia-Antipolis, dans le premierlaboratoire pharmaceutique français ayantdécidé de créer un département spécialisé dans la culture de cellules de l’épiderme. C’était un retour aux sources mais aussi un défi technique extraordinaire. On m’a confié un volume vide et j’ai eu carte blanche pour l’occuper. Le pragmatisme du technicien –je suis titulaire d’un baccalauréat technique –m’a permis de surveiller personnellement et étroitement les travaux; j’ai aussi mené de front toute la partie réglementaire. En un an, les salles blanches (3) étaientopérationnelles pour la culture des cellules.

Objectif recherche1986 Sa licence de biochimie en poche, FrançoisGuillot s’envolepour les Etats-Unis. Il y préparesa maîtrise puisson doctorat à l’université du Kansas et y faitses armes dans le domaine de laculture cellulaire.1990 Retour en Suisse pour un stage post-doctoral au seindu départementBiopharmaceutiquedu laboratoireSandoz Pharma, à Bâle.1992-1996Chercheur en toxicologie au Centre de rechercheNestlé. Premierstravaux dans le domaine de laculture de cellulesde la peau.1996-2001Conception et implantation duplateau techniquedu départementBiotechnologie des LaboratoiresGenévrier,spécialisé dans laculture de cellulesépidermiquesautologues.

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Quels sont les avantages et les limites des cultures cellulaires?

F. G. : A partir d’un échantillon de peau prélevésur le malade lui-même, elles permettentde préparer des greffons qui ne suscitent pas de rejet chez les grands brûlés, chez les personnesprésentant des plaies chroniques… Je me souviensd’un garçon de 18 ans, brûlé à 85%, à l’hôpitalmilitaire de Budapest, en Hongrie. A partird’une biopsie de 7 cm2, nous avons produit une surface d’environ 12000 cm2 d’épiderme pour ce patient. L’inconvénient principal de cette technologie est son coût élevé, lié à l’importance des moyens mis en œuvre. Il faudrait obtenir un remboursement par la Sécurité sociale dans toutes les indications…

Vous avez de nouveaux projets…F. G. : Je souhaite continuer à développer

les techniques de culture cellulaire en Europe,pour les rendre plus accessibles. Les perspectivessont multiples. A Sophia-Antipolis, nous avonsmis au point un substrat dermique type éponge,qui peut être utilisé en tant que «pansementbiologique» pour couvrir les ulcères profonds ou être colonisé par des cellules de la peau et servir de «derme équivalent». Un autre bio-matériau de type gel, dans lequel peuvent êtreincorporés des chondrocytes – les cellules du cartilage – a été breveté. J’assure désormais le suivi de ces recherches en tant que consultant,car je suis retourné vivre en Suisse, où j’ai desattaches familiales. J’y ai un projet d’installationd’un autre laboratoire, où je compte poursuivremes travaux en ingénierie tissulaire et cellulaire.

Quel regard portez-vous sur la recherche française?

F. G. : Etre resté onze ans à l’étranger me permetd’avoir un regard extérieur. Aux Etats-Unis, j’aisuivi le cursus typique d’un étudiant américain.Ce qui m’a beaucoup plu, c’est le contact directavec les professeurs. Cela peut paraître un lieucommun mais le travail y est mieux récompenséqu’en Europe. La recherche publique française a des atouts mais elle ne peut offrir les mêmessalaires. Il faudrait mieux accompagner les jeunes chercheurs et favoriser leurs prises de responsabilité. Je pense aussi qu’il faudraitinstaurer une meilleure synergie entre labo-ratoires ayant des thématiques similaires.

1 - Cellules tapissant la paroi interne des vaisseaux sanguins.2 - Cellules formant un tissu de revêtement externe ou interne.3 - Plateau technique destiné à la production de culturescellulaires, strictement protégé des contaminations et soumis à une réglementation très stricte.

Culture de cellules de la peau.

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Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 200234

La Fondation pour la Recherche Médicale (FRM) participait activement les 17 et 18 novembre à la Cité de la réussite réunissant 15000 personnes à Marseille. Elle proposait deux débats animés par Emmanuel Hirsch, directeur de l’Espace Ethique à l’AP-HP.

L A F O N D A T I O N À L ’ É C O U T E

Colloque

Une Cité de la réussiteentre éthique et recherche

Les nouveaux territoires de l’éthiqueAu cœur des pratiques de la FRM, la réflexion éthique était aussi au cœurde ce débat réunissant trois éminentsprofesseurs. Ni science ni discipline,l’éthique permet à chacun de s’interroger en puisant dans ses propres références pour faire émergerdes valeurs. Le débat démocratiquedoit s’emparer de ces questionséthiques sans dramatiser ni diaboliser.Pourtant, les progrès de la sciencesont indissociables de ses dérives.Faut-il alors fournir une norme ? «Certainement pas, dit Jean-FrançoisMattéi, professeur de pédiatrie et de génétique médicale et députédes Bouches-du-Rhônes, il n’y a pasd’éthique absolue, chacun répondant au questionnement selon ses propres références.» Pas d’universalité

non plus. Tenter de se rapprochersur les valeurs essentielles fondant la dignité humaine permet d’établirdes règles communes. «La recherchedoit conserver sa liberté, condition de son progrès, mais parfois la machines’emballe, faisant passer la techniquedevant l’éthique», souligne IsraëlNisand, professeur de gynécologie-obstétrique au CHU de Strasbourg. Si on sait identifier nombre de gènes,on ne peut pas prédire l’avenir en regardant le génome. Même avec un risque accru de développerune maladie, environnement et modede vie peuvent considérablementchanger la donne. Le probabilismeserait-il alors un nouveau territoirepour l’éthique? «Je le souhaiterais,conclut Arnold Munnich, directeurdu laboratoire de génétique de l’hôpital Necker-Enfants malades(Paris), la part du doute devrait êtreplus grande et inspirer davantage les scientifiques, mais notre société ne tolère plus le doute aujourd’hui.»

La recherche changera-t-elle le cours des maladies mentales?Comme le souligne d’emblée Pierre Joly, Président de la FRM,c’est là un débat opportun dans un monde où 450 millions de personnes souffrent de troublesmentaux, alors que quatre pays sur dix n’ont pas de politique de santémentale. Ces maladies restent une faiblesse de la médecine,

Participaient au 2nd débat (de gauche à droite) :E. Hirsch, M.-J. del Volgo, M. Rufo et P. Joly.

même si les trente dernières années ont été marquées par desprogrès considérables, en matière de médicaments notamment. La psychiatrie est surtout le parentpauvre de la recherche, qui s’estdéveloppée dans les neuroscienceset sur la piste génétique au détrimentde la clinique. Avec Marcel Rufo,pédopsychiatre et écrivain marseillais, et Marie-José del Volgo,professeur à la faculté de médecined’Aix-Marseille II, Pierre Joly plaidedonc pour une véritable rechercheen psychiatrie, comme en témoignele programme de la Fondation«Action dynamique en psychiatrie»,premier et seul du genre en France. «Pour que l’esprit soit pour le XXIe siècle ce que le gène a été pour le XXe», selon le souhait de Kandel, psychiatre et prix Nobel.

Le 1er débat réunissait (de gauche à droite) : E. Hirsch, A. Munnich, J.-F. Mattéi et I. Nisand.

DR

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Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002 35

Léguer l’espoir

Henri et Marie-Louise P. ont vécu la douloureuse expérienced’avoir une enfant malade. En mémoire de ses souffrances, ils ontfait don de leurs biens à la Fondation pour la Recherche Médicale.

Nous rendons hommage à Henri etMarie-Louise P. et nous voudrionsy associer également tous les mal-heureux parents qui ont consacré,comme eux, une vie d’abnégation

à soigner et à soutenir leur enfant malade.Se souvient-on aujourd’hui combien la tuber-culose touchait cruellement les familles avant-guerre ? Cette maladie, difficilement enrayée,avait rendu la petite Jeanine, l’unique enfantd’Henri et de Marie-Louise P., à jamais fragile.Malgré les soins prodigués à l’époque, elle restavulnérable à toutes les infections. Des momentsde répit donnaient l’espoir de la santé recou-vrée, espoir malheureusement très vite balayépar de nouvelles et nombreuses rechutesaggravées par des otites sévères, des mastoï-dites, une méningite laissant des séquelles neu-rologiques. Jeanine, devenue adulte, n’a cesséde consulter médecins et services hospitaliers.Ses parents et son entourage ont terriblementsouffert et ont beaucoup espéré pour elle.Ainsi, peu à peu, Henri et Marie-Louise P.s’étaient-ils intéressés à la recherche médicale.Aider les chercheurs à lutter contre la souffranceet la maladie s’était imposé à eux et, tout na-turellement, ils étaient devenus donateurs de laFondation pour la Recherche Médicale, répon-dant à l’un de nos appels il y a de nombreusesannées. Dès lors, leur générosité et leur fidélitén’ont jamais failli, confirmant régulièrementleur engagement auprès des chercheurs.Au fil du temps, leur amour impuissant face àla douleur de leur fille les avait repliés sur eux-mêmes, ils avaient peu d’amis, préféraients’adonner à la lecture et au jardinage. Cettedernière activité leur avait permis de se lierd’une amitié sincère et réciproque avec M. etMme R., les voisins de leur maison mitoyenne.Au travers de multiples petits services de voi-sinage, bien appréciables quand on dépasse80 ans comme Henri P. (tondre la pelouse, éla-guer, tailler les rosiers…), leurs rapports s’étaientvite transformés en échanges qui réchauffent

Des parents exemplaires

HARL

INGU

E/VI

OLET

les cœurs meurtris par la vie. «C’étaient des genscharmants, très sensibles, très cultivés, particulière-ment passionnés par l’histoire de France. C’était unplaisir de les écouter», nous a confié Mme R., etd’ajouter, «nos amis avaient tant souffert à causede la maladie de leur fille qu’ils avaient décidéensemble de léguer leurs biens à la Fondation pourla Recherche Médicale.»C’est avec beaucoup de respect et d’émotionque nous recevons le legs de Henri et Marie-Louise P., dont le montant est affecté, selonleurs souhaits, à la recherche biomédicale.

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Q U E S T I O N S R É P O N S E S

L A F O N D A T I O N À L ’ É C O U T E

Le Pr PhilippeChanson,du serviced’endocrinologie et des maladies de la reproductionau CHU Bicêtre,donne une information, mais en aucuncas un diagnostic, un pronostic ou un conseild’ordre thérapeutique. Seul le médecintraitant esthabil ité à le faire,et c’est lui que vous devezconsulter.

Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 200236

Luc

Bene

vello

Qu’est-ce que la maladie de l’oreillette? M.-L. B., 47000

Pour comprendre le terme de «maladiede l’oreillette»,

il faut d’abord comprendre la façon dont le courantélectrique se propage dans le cœur et commentil aboutit à la contractiondu muscle cardiaque.L’influx nerveux qui va parcourir le tissunerveux du cœur naît de façon rythmique au niveau d’une régionappelée «nœud sinusal»,située dans le cœur, entrela veine cave supérieure et l’oreillette droite. Puis l’influx nerveux va transiter par des voiesnerveuses reliant le nœudsinusal au nœud auriculo-

C’est un influx électrique qui permet au cœur de battre. De sa régularitédépend la régularité de ses battements.

BSIP

/JOU

BERT

ventriculaire, situé à la jonction des oreilletteset des ventricules. L’influxnerveux va circuler dans un nerf cheminantdans le septum interven-triculaire (paroi qui sépareles deux ventricules), puis va se diviser en une branche droite et une branche gauchepour innerver chacun des deux ventricules et provoquer leur contrac-tion. Dans la maladie de l’oreillette, une inadap-tation intrinsèque du nœudsinusal à produire de façonrégulière un influx nerveuxs’associe à des troubles du passage de l’influx entrele nœud sinusal et le reste

de l’oreillette. Dans cette maladie, coexistent, en alternance, des périodesde bradycardie (c’est-à-direde ralentissement extrêmedu cœur, pouvant parfoisaboutir à un véritable arrêt cardiaque) et despériodes de tachyarythmierécidivante (c’est-à-dire des périodes pendant lesquelles le cœur s’accélèrede façon irrégulière). Les symptômes de la maladie sont souventintermittents et variés :syncopes, malaises,palpitations. Si le cœur est particulièrement lent et ce de façon persistanteavec symptômes, on propose la mise en placed’un stimulateur cardiaque(pacemaker). Ceci permetd’obtenir en permanence,dès que le cœur se ralentit,un relais qui envoie l’influx nerveux et permetau cœur de se contracterde façon plus régulière et moins lente. Comme il existe aussi des périodesd’accélération irrégulière du rythme cardiaque(tachyarythmie), on associesouvent à la mise en placed’un pacemaker la pres-cription de médicamentscomme les digitaliques,dérivés de la digitale, quisont connus pour ralentirle cœur… Ce qui n’a pas d’inconvénient danscette situation puisque le stimulateur cardiaqueprend le relais lorsquel’activité rythmique du cœur est trop basse.

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Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002 37

Qu’est-ce que l’anémie réfractairesidéroblastique? J. R., 83860

B U L L E T I N D ’ A B O N N E M E N T

Oui, j’offre un abonnement d’un an à Recherche & Santé (4 numéros) pour 9,15 e (60 FRF) que je joins par chèque bancaire ou postal libellé à l’ordre de : Fondation pour la Recherche Médicale. Voici les coordonnées de l’ami(e) à qui j’offre cet abonnement.

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Merci de retourner ce bulletin accompagné de votre règlement à l’adresse suivante :Fondation pour la Recherche Médicale - Recherche & Santé - 54, rue de Varenne 75335 Paris Cedex 07Conformément à la loi Informatique et Libertés du 6 janvier 1978, en vous adressant au siège de notre Fondation, vous pouvez accéder aux informations vous concernant, demanderleur rectification ou suppression ou vous opposer à ce qu’elles soient échangées ou cédées. Dans ce dernier cas, les informations vous concernant seraient alors réservées à l’usageexclusif de notre Fondation.

Les anémies sidéroblastiques

sont des causes raresd’anémie qui ont pour origine l’altération de la production d’un des composants de l’hémoglobine, appelé «hème». Lorsque l’organismefabrique de l’hème, il incorpore du fer dans une structureappelée «protopor-phyrine», synthétisée

dans les précurseurs des globules rouges (les érythroblastes). Toute anomalie dans la synthèse très précise de cette protoporphyrine crée un déséquilibre entre l’arrivée du fer et son incorporation dans l’hème. Il existe donc une surcharge en fer du globule rouge, avec une productioninsuffisante d’hémoglobineet donc une anémie.

Ilots de moelle osseuse saine avec érythroblastes, précurseurs des globules rouges.

BSIP

Je souffre de spondylolisthésis.De quoi s’agit-il? E. M. F., 11100

Le spondylolisthésis est un déplacement

vers l’avant d’une vertèbrepar rapport à celle du dessous. Généralement,il touche le niveau des 4e et 5e vertèbreslombaires ou 5e vertèbrelombaire et 1re sacrée. Ce spondylolisthésis peutêtre marqué par des accèsde douleurs sévères,parfois, en ceinture,aggravées par l’activitéphysique et soulagées par le repos. Le plussouvent, des radiographies

simples permettent de faire le diagnostic. Le spondylolisthésis est lié à un défaut entre les facettesarticulaires qui assurent le contact et l’articulation entre deux vertèbres.L’essentiel des soins vise à renforcer la musculaturepérivertébrale afin de soulager au maximum le rachis et d’éviter ainsiles douleurs. Si nécessaire,des traitementsantalgiques sont prescrits.

Radio d’un spondylolisthésisentre la 5e vertèbre lombaire et la 1re sacrée, chez un adolescent. ● ● ● ✁

GJLP/C

NRI

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L A F O N D AT I O N À L ’ É C O U T E

Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 200238

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4 numéros par an pour9,15 e, soit 60 FRF. Vouspouvez ainsi faire le pointsur les dernières avancéesde la recherche médicaleet sur ses applicationsthérapeutiques futures.Voir bulletind’abonnement au verso.(Tirage : 285000 ex.)

LA FONDATION POUR L A RECHERCHE MÉDIC ALE, VRAIE SOURCE D’INFORMATIONS SCIENTIFIQUES

FRM

89 -

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Qu’apporte la rééducation respiratoire dans la bronchite chronique? G. M., 60430

Le traitement repose bien sûr sur l’arrêt du tabac, mais égalementsur un certain nombre de techniques de kinési-thérapie et de rééducationrespiratoires ayant pourobjectif de contrôler la toux et l’expectoration.Ces techniques consistentà améliorer l’efficacité de la toux pour quel’expectoration soit la plus importante possible et libère ainsi au mieux les bronches, à augmenter

la tolérance à l’exercice en proposant une réédu-cation physique graduelle,à apprendre aux patients à respirer de façonefficace, harmonieuse,pour mettre en jeu des muscles respiratoiresconsidérés habituellementcomme accessoires.Lorsque les problèmesrespiratoires sont tropimportants, il peut être nécessaire d’avoirrecours à l’administrationd’oxygène.

Le tabac joue souvent un rôle dans la bronchite chronique.

On parle d’«anémiesidéroblastique», du nomdes cellules sanguinesappelées «sidéroblastes»car elles sont remplies de fer, en particulier leurs mitochondries, qui se distribuent autour du noyau. L’anémiesidéroblastique réfractaireest de cause inconnue. Elle apparaît chez les sujets le plus souventâgés, elle est chronique et reste souvent limitée aux globules rouges sans toucher les globulesblancs ou les plaquettes.Différents traitements sont testés de façon un peu empirique dans la mesure où l’on ne connaît pas la cause de ces anémiessidéroblastiques. Ainsi, l’administration de vitamines,d’érythropoïétine ou d’androgènes(hormones mâles) a étéessayée avec des résultatslimités. Le plus souvent,on en est donc réduit à proposer des transfusionsafin de maintenir le taux d’hémoglobine à une valeur satisfaisanteet d’éviter ainsi la fatiguechez les patients.

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Les problèmes de bronchite

chronique, ou plutôt de broncho-pneumopathiechronique obstructive,sont des problèmes parfois graves, pouvantaboutir à une insuffisancerespiratoire. Le tabac joue souvent un rôle dans l’installation de cette bronchitechronique obstructive,mais d’autres mécanismessont aussi probablementen cause chez un certainnombre de patients.Les manifestations de la bronchite chroniquesont une gêne respiratoire,une toux, des sifflements,des infections respiratoiresrécidivantes et parfois une fatigue. La toux est souvent productive,avec une expectorationépaisse. Un bilanrespiratoire avec radio-graphies du thorax et épreuves fonctionnellesrespiratoires est nécessaireafin de connaître l’altération des capacitésrespiratoires et la gêne aussi bien à l’inspirationqu’à l’expiration.

ZEFA

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-Qui

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S P É C I A L E U R O

Fondat ion pour la Recherche Médica le • numéro 89 • 1er t r imestre - janvier 2002 39

Luc

Bene

vello

Merci de surmonter la difficulté de l’euro

pour ne pas priver les chercheurs d’une aide quileur est indispensable aujourd’hui.

ujourd’hui, votre générosité est doublement mise à l’épreuve : elle n’en a que plus de mérite !.

Il vous faut, en effet, surmonter la difficulté de l’euro.

Mais, pour vous y aider, nous avons traduit ci-contre vos dons de francs en euros. Et nous l’avons fait, bien sûr, dans un esprit de totale transparence, puisque cette conversion est effectuée au centime d’euro près.Il vous suffit donc de vous reporter à cette table de conversion pour rédiger votre chèque en toute confiance.

Encore merci pour votre fidélité à l’égard des chercheurs.

Eric Palluat de BessetDirecteur général de la Fondation pour la Recherche Médicale

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