Introduction Management interculturel

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    Introduction

    La culture marocaine suscite lintrt de nombreux chercheurs depuis fort longtemps.

    Paradoxalement, ce sont les chercheurs trangers qui y ont trouv un terrain fertile de fouilles

    anthropologiques, alors que lintrt de nombre de leurs homologues marocains sest plutt

    port, faute de financement, sur des recherches plus lucratives. l est curieux de constater que

    plusieurs chercheurs occidentaux qui tudient les cultures des pays en voie de dveloppement

    !P"#$, restent, en fin de compte, des % touristes sophistiqus & qui sintressent davantage au

    ct % fol'lorique & de la culture qu( la fixation des sens.

    "n fait, la culture marocaine est ( la fois simple et complexe. "lle est simple dans la

    mesure o) elle prsente des caractristiques saillantes qui la distinguent clairement des autres

    cultures. "lle est cependant complexe en raison de lenchevtrement en son sein denombreuses sous*cultures prsentant chacune des particularits qui lui sont propres et qui

    peuvent para+tre fort divergentes quand la sous*culture est compare ( dautres avec lesquelles

    elle cohabite dans le giron de la culture marocaine.

    #ans le prsent chapitre, nous allons ustement examiner comment ces sous*cultures

    fondes sur des apports ethniques et raciaux, dont la socit marocaine a fait la liti-re depuis

    des temps immmoriaux, se sont amalgames pour donner naissance ( la culture marocaine

    tout en continuant de graviter dans des orbites diffrentes. ous allons identifier le commun etle particulier ou encore, letic et lemic dans cette culture. ous allons galement montrer

    quelques*unes des implications de cette culture et de ses constituantes sur les modes de

    gestion et identifierons certains types de comportements quelles conditionnent.

    La culture marocaine : un mlange de sous cultures

    Le peuple marocain est fait dun mlange peu commun de races. "u gard ( sa position

    gostratgique, le /aroc a depuis touours suscit les convoitises des peuples marchands et

    guerriers. Plusieurs peuples se sont donc succd au /aroc 0 1omains, 2y3antins,

    4arthaginois, Phniciens, 5andales, 6rabes, "spagnols, Portugais, 7ran8ais, entre autres.

    4hacun de ces peuples a profondment, et dune mani-re indlbile, marqu la socit

    marocaine. #autre part, la traite des esclaves a fait venir au /aroc des tribus enti-res

    d6fricains. La reconqute espagnole en 9:;< (, elle aussi, chass vers le /aroc, outre les %

    =arrasins &, un nombre considrable de >uifs de l6ndalousie. 4es origines multiples sont

    venues se greffer aux autochtones berb-res qui constituent ( eux seuls plusieurs peuples,

    crant ainsi un amalgame exceptionnel de races et dethnies. 6insi constitue, la culture

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    marocaine para+t tre tantt un melting-pot ayant russi ( fondre en son sein toutes les cultures

    des peuples qui ont habit le pays, tantt une tour de 2abel dans la mesure o) lesdites cultures

    ont largement gard leurs spcificits et leurs caractristiques. 6fin daider le lecteur (

    rpondre ( cette question, nous allons rappeler dans la section suivante les fondements de la

    culture marocaine ainsi que son volution comme suite aux apports faits par les diffrentspeuples ayant habit le /aroc.

    Les fondements de la culture marocaine

    ous distinguons ( cet gard entre les fondements historiques et ethniques, les

    fondements religieux et cultuels et enfin, les fondements conomiques.

    volution historique et ethnique de la socit marocaine

    Les crits disponibles de mme que les preuves archologiques montrent que le /aroc

    tait d( peupl vers ?@@ @@@ avant >.*4. comme en tmoignent, entre autres, les outils

    retrouvs ( 4asablanca. 5ers A@@@ ans avant >.*4., de nouvelles populations arriv-rent au

    /aroc et se ml-rent aux descendants des premiers habitants. Les populations ainsi

    constitues ont t dsignes par la suite de % barbares &, puis de % berb-res & par les

    navigateurs et les 1omains.

    "ntre les 5e et 5e si-cles avant >.*4., lcriture libyque, invente par les 2erb-res,est apparue dans l6tlas marquant ainsi le dbut de lhistoire du /aroc. #epuis, la diversit

    ethnique de la population allait crescendo avec larrive de nouvelles peuplades. 6insi, des

    marques phniciennes datant du 5e si-cle avant >.*4. ont t trouves sur des poteries ( l+le

    d"ssaouira. #es peuples dits % les Bthiopiens & ou ceux qui sont brCls par le soleil,

    sinstall-rent au /aroc. Les 6tlantes occup-rent le centre de l6tlas et donn-rent leur nom (

    locan 6tlantique.

    Le royaume de /aurtanie a pris naissance au 5e si-cle av. >.*4. et a atteint son apoge

    sous le r-gne du roi >uba entre les annes .*4. et .*4., les armes romaines envahirent le /aroc, mettant ainsi fin

    au royaume de la /aurtanie Eingitane. #es vestiges sont encore debout des villes de Eingis,

    Lixus et 5olubilis attestant de la force de la prsence romaine au /aroc qui sest maintenue

    usquen lan :

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    "n G?

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    Eombouctou au /ali do) il a ramen or et esclaves augmentant ainsi la diversit ethnique de

    la population. Le r-gne d6hmed 6l /ansour a pris fin en 9G@

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    6uourdhui, le /aroc prsente une socit composite, o) presque la moiti de la

    population par le berb-re, langue ( lintrieur de laquelle se distinguent trois sous*groupes 0

    tarifit !1if$, tamazight !/oyen 6tlas$ et tachelhit!Oaut, 6nti*6tlas et =ouss$. La plupart des

    historiens saccordent dsormais pour reconna+tre que, les conqurants arabes du e si-cle

    ayant t peu nombreux, la tr-s grande maorit des /arocains a du sang berb-re. 4e qui nesignifie pas ncessairement quils sont berbrophones !/inist-re de la 4ommunication$.

    "n plus des 6rabes et des 2erb-res, nous avons vu que des apports ethniques fort

    diversifis ont contribu ( la mosaVque des populations au /aroc 0 Phniciens, 5andales,

    Wisigoths, 1omains, 2y3antins, 6ndalous !6rabes et >uifs$, entre autres, en plus des 6fricains

    ramens de l6frique de lHuest. X cette grande diversit, il convient galement daouter les

    apports espagnols et portugais favoriss par les mariages mixtes, les conversions ainsi que les

    contacts permanents avec les colonies parsemes sur le littoral. Plus rcemment, durant le

    protectorat franco*espagnol sur le /aroc, de nombreux mariages mixtes ont galement

    contribu ( augmenter davantage cette diversit de la population.

    6uourdhui, bien quil soit possible de distinguer encore des ancrages ethniques et

    culturels parfois tr-s forts comme che3 les 2erb-res et les 7assis dont plusieurs sont issus de

    limmigration andalouse, la culture marocaine prsente des spcificits qui transcendent les

    sous*cultures qui la composent. 6insi, malgr les traits universaux de la 4ulture marocaine

    que nous prsentons dans ce travail, lobservateur de la socit marocaine est parfois frapp

    par le cachet idiosyncrasique fort marqu de certaines sous*cultures. Un /arocain dorigine

    arabe se sentirait en effet plus tranger, du moins dun point de vue culturel, dans certaines

    rgions du /aroc que dans certains pays du /aghreb ou du /oyen*Hrient, voire d"urope.

    =ous cet angle, la 4ulture marocaine se prsenterait plutt comme une tour de 2abel que

    comme un melting-pot. =es paliers parlent des langues vernaculaires et sadonnent ( des

    traditions et ( des pratiques qui les distinguent nettement des autres et qui rendent parfois la

    communication fort complexe.

    Les fondements religieux et cultuels de la culture marocaine

    ous avons prcdemment expliqu que lislam est entr au /aroc vers la fin du 5e

    si-cle grYce ( H'ba bn afii. Lislam est la religion qui r-gne au /aroc. Le mot % islam &

    signifie % soumission ( #ieu &. #ieu est unique 0 % il ny a de #ieu qu6llah, et /ohammed

    est son proph-te &, dit la profession de foi musulmane. Lislam marocain est sunnite de rite

    mal'ite !fond par liman /ali', mam de /dine$. 6u /aroc, lislam est la religion de

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    lBtat et le roi /ohammed 5, lui*mme descendant du Proph-te, est le 4ommandeur des

    croyants !Amir Al*Mouminime$. Les /arocains, presque tous musulmans, sont fortement unis

    par le sentiment dappartenance ( la communaut des croyants, la Oumma.

    Les principales prescriptions islamiques sont contenues dans le 4oran rvl au

    Proph-te. Le mot 4oran est driv du mot arabe Quoran qui signifie lecture ou rcitation. l

    est compos de 99: sourates ou chapitres de longueur variable. 4haque sourate compte un

    certain nombre de versets appels ayats. X ct du 4oran, la Sunna ou tradition est le second

    fondement de lislam. La sunna est lensemble des hadiths !paroles et faits du Proph-te$

    authentifis par les exg-tes musulmans.

    Lslam est fond sur cinq piliers qui sont 0

    Z La profession de foi (Chahada) 0 il sagit de lobligation canonique la plus

    importante. "lle atteste % quil nest de divinit que #ieu & et que % /ohammed est le

    messager de #ieu &. 4elui qui prononce ces mots par conviction sengage dfinitivement (

    devenir musulman.

    Z La prire (Salat) 0 le mot Salat est driv du mot arabe !Sila$ qui signifie % le lien

    !avec #ieu$ &. 4inq fois par our, ( des horaires prcis, les musulmans proc-dent aux

    ablutions purificatrices !Oudoua$ et effectuent la pri-re. Eourn vers la /ecque, le musulman

    effectue, seul ou en groupe, une srie de prosternations en rcitant des versets du 4oran.

    4ependant, la pri-re du vendredi !salt al-jumu`a$ est obligatoirement collective.

    Z Le jene au mois de Ramadan 0 le ramadan est le neuvi-me mois de lanne lunaire.

    #-s son annonce, les musulmans adultes !( partir de la pubert$ sabstiennent de manger, de

    boire et de sadonner aux rapports sexuels de laube au coucher du soleil. 4ependant, les

    malades, les femmes enceintes, les gens sniles et les voyageurs sont autoriss ( ne pas le

    faire ( charge pour eux de compenser les ours non eCns d-s que possible. X la rupture dueCne, familles et amis se retrouvent autour dune table dcore de plats traditionnels

    succulents dans une atmosph-re conviviale et sympathique. Lobectif du ramadan est

    multiple 0 il vise dabord ( purifier ( la fois lYme et le corps[ il vise aussi ( entra+ner le

    musulman ( contrler ses caprices et envies[ il lui enseigne galement la gnrosit. "n effet,

    cest lune des rares occasions o) le riche souffre de la faim et de la soif au mme titre que le

    pauvre.

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    Z Laumne religieuse (Zakat) 0 il sagit dun impt sur la fortune destin ( financer

    des oeuvres de bienfaisance ainsi qu( aider les ncessiteux. l sapplique ( tout montant ou

    actif thsauris ou destin ( la vente ( condition quil dpasse un niveau dtermin !issa!$

    pendant toute une anne lunaire. =on taux est de

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    sorte dcole religieuse ou de monast-re, et le mausole ou darih. La diffrence entre les deux

    est de taille en ce sens que cest dans le second quon trouve le marabout. La 3aouVa est

    anime par un chei'h de la confrrie. #autre part, les 3aouVas nont t cres quen tant

    quinstitutions religieuses islamiques. 4omment donc peuvent*elles tre antrieures ( lslam]

    "lles ne sont pas non plus typiquement marocaines dans la mesure o) elles se retrouventpartout dans les pays islamiques o) sont tablies des confrries.

    =i ces 3aouVas ont traditionnellement ou un rle certain dans lenracinement des

    valeurs islamiques dans la culture marocaine, la construction des darihs de mme que leur

    frquentation aux fins de vnration sont, par contre, strictement interdites par la religion.

    Pourtant, beaucoup de chercheurs y voient une forme de pratique de lislam. 4rapan3ano

    !9;?@, p. 9G$ crit ( cet gard 0

    #ans le /aroc de Euhami, les lments dmoniaques sont immdiatement associs avec

    le maraboutisme, le culte des saints, considr comme une caractristique de lslam nord*

    africain R^S La campagne marocaine est parseme ddifices non habits avec des toits en

    dmes, qobbas, o) un saint, un Fali ou un sayyid, un homme vnr, dot dune grande

    bndiction ou bara'a, est suppos tre enterr.

    Lislam consid-re ce culte des saints comme chir#, qui est une forme dhrsie.

    anmoins, beaucoup de gens, mais nettement moins que par le pass, frquentent ces saintsen qute de bndiction et de bara'a. #es spcialits sont reconnues ( certains. Hn leur

    attribue, par exemple, le pouvoir de gurir linfertilit, de conurer un envoCtement. #aucuns

    sont mme visits pour acqurir des dons et talents artistiques. l nest pas surprenant alors de

    voir sy pratiquer des rituels dexorcisation ou des danses tranges accompagnes de chants et

    de voix incomprhensibles. 4rapan3ano !9;?@, p. 9I$ crit ( ce propos 0

    Eout un ensemble de rituels est associ avec le culte des saints. 4es rituels vont

    dincantations en choeur et des transes de haut style, ( des messages spciaux avec des pierres

    dotes de la bara'a, aux bains dans leau bnite du saint, ( la prise dune poigne de la terre

    du sanctuaire ou, simplement, la circonvolution autour de la tombe du saint. =ouvent, les

    p-lerins dorment dans le sanctuaire dans lespoir davoir un rve R...S Les sanctuaires tendent (

    avoir des spcialits.

    "n ce qui concerne la 3aouVa, les musulmans puristes ne lui reconnaissent que le rle

    dcole religieuse et lui refusent le statut de lieu public de pri-re qui revient ( la mosque.

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    #ailleurs, au /aroc dauourdhui, il nexiste plus que quelques di3aines de 3aouVas

    cantonnes dans un rle dapprentissage religieux et de dclamation du 4oran.

    Les confrries elles*mmes, malgr le nombre important de leurs adeptes, sont vues par

    les puristes comme des % innovateurs & de la religion quil convient de combattre. "n slam,

    seuls le 4oran et la =unna !tradition du Proph-te$ sont considrs comme des bases de la

    religion. X dfaut dy trouver des dispositions sappliquant ( un cas particulier, on recourt au

    Kiyas !une sorte dquivalence fonctionnelle avec les dispositions du 4oran ou de la =unna$

    ou au maa !consensus des rudits$.

    l faut reconna+tre que de nombreuses 3aouVas abritant des confrries se sont

    transformes au fil du temps en lieux dexercice de rituels trangers ( lislam bien quon

    veuille leur donner une coloration islamique. 4rapan3ano !9;?@, p. IG$ constate que 0

    Le cure des Omadcha implique une structuration ou restructuration symbolique des

    sentiments et sensations identifis au /aroc ( travers des saints mYles et des dmons femelles,

    avec la masculinit et la fminit. Les sentiments dimpuissance, dimpotence, de passivit

    de ne pas tre capable de se comporter en mYle sont identifis comme rapprochant le mYle

    dun tat semblable ( celui de la femme R...S Les relations entre le saint, la dinniya Rfemelle

    de dinnS et les tres humains sont articules de la mme mani-re que celles entre les tres

    humains et les actions prises pour influencer ces relations sont similaires dans les deuxsituations.

    La question du maraboutisme est, en consquence, beaucoup plus complexe que cela

    nappara+t de prime abord.

    7orce est de remarquer cependant que beaucoup de confrries, cres ( lorigine pour

    vulgariser lenseignement religieux et gnraliser la dclamation du 4oran, ont connu par la

    suite une dangereuse bifurcation quand elles ont commenc ( introduire des innovationsinterdites en slam. Leurs chei'hs se sont transforms en de vritables gurus ou leaders

    spirituels pour leurs adeptes !at!a$. 6pr-s leur dc-s, des mausoles sont parfois rigs sur

    leurs tombeaux. 4est lune des nombreuses mani-res expliquant lapparition et le

    dveloppement du % maraboutisme & au /aroc.

    Les fondements conomiques

    #ans toute culture, les fondements conomiques ou encore les mani-res dont les biens

    et services sont produits, rpartis et consomms, occupent une place de choix. "n effet, la

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    connaissance des conditions dans lesquelles les besoins naissent, voluent et sont assouvis,

    aide ( comprendre comment les gens interagissent les uns avec les autres, comment ils

    pensent et se comportent, senrichissent et sappauvrissent, comment ils adoptent un style de

    vie campagnard ou urbain. #ans le cas du /aroc, lconomie a touours ou un rle de

    premier plan dans le fa8onnement des aspects culturels. Par exemple, labandon progressif delagriculture comme fer de lance de lconomie marocaine au profit de lindustrie sest

    accompagn dun mouvement accru durbanisation qui, par ricochet, a eu des implications sur

    le niveau dducation de la population, sur sa fa8on de penser et de se comporter. #ans cette

    section, nous allons tudier ces fondements par rapports aux activits dagriculture, dartisanat

    et dindustrie.

    Lagriculture. 2ien quelle reste largement dpendante de lagriculture, lconomie

    marocaine a vu ses structures se mtamorphoser considrablement depuis linstauration du

    double protectorat fran8ais au centre et espagnol au nord et au sud en 9;9

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    une profonde mutation. "n effet, alors que cette activit rpondait aux besoins du pays en

    mati-re doutils et darticles utilitaires, elle a plong dans une crise profonde depuis son

    premier contact avec les produits industriels europens. Pire encore, les tentatives de son

    industrialisation ont largement chou ( tel point que le pays sest vite retrouv avec deux

    secteurs nentretenant entre eux que peu ou prou de relations 0 un secteur artisanal moribond,peu comptitif et mal structur dune part, et un autre lg-rement industriel !ou faut*il dire

    prindustriel$ mis en place surtout par les "uropens et certains capitalistes marocains, dautre

    part.

    Les principales villes du /aroc R...S ont connu autrefois une vie corporative tr-s active.

    Les petits fabricants, marchands et employs dune mme profession taient groups sous la

    direction dun chef de corporation appel amine, qui devait ( la fois veiller au respect des

    r-gles professionnelles, rgler les conflits survenant entre eux, et dfendre leurs intrts

    !O"/, 9;DI, p. D

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    mthode plutt que de sobstiner ( imposer leurs marchandises telles quelles sont, sans rien

    vouloir y changer, par certitude de leur supriorit, parfois aussi par aversion de leffort ( faire

    pour transformer leur outillage !O"/, 9;DI, p. 99@*999$

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    Les grandes valeurs de la culture marocaine

    #es valeurs fondamentales animent la socit marocaine dauourdhui en dpit de sa

    grande diversit. =ans prise en considration de ces valeurs, toute tentative de comprhension

    de la relation entre la culture nationale et la gestion au /aroc serait une entreprise vaine et

    infructueuse.

    l ne fait pas de doute quil existe une 'yrielle de valeurs qui conditionnent une telle

    relation. 4ependant, nous nous limiterons ici ( trois parmi elles qui nous semblent

    particuli-rement importantes eu gard ( limpact quelles peuvent avoir sur les pratiques de

    gestion. l sagit de la logique dallgeance, de la dimension familiste ainsi que de la sacralit

    de la dignit.

    La logique dallgeance

    Btant un pays musulman depuis plus de dou3e si-cles, le /aroc est rgi par une logique

    dallgeance qui constitue lun des fondements primordiaux de lislam.

    Le mot all$geance sentend ici dans le sens dobissance, de soumission et de sution.

    4eci nest gu-re surprenant si lon sait que le mot islam lui*mme est synonyme de

    soumission et dobissance. 4ela veut*il dire quallgeance et islam seraient la mme chose]

    =ans aller usqu( soutenir une telle communaut de sens, nous rappelons que la soumission (#ieu implique immanquablement lobissance ( =on messager porteur de =on message

    rvl. Pour tmoigner publiquement de cette obissance, les premiers musulmans devaient

    prter allgeance au Proph-te. Hn peut lire dans le =aint 4oran 0 % 4eux et celles qui te prtent

    allgeance R_ /ohammedS font en fait acte dallgeance ( #ieu. & 6vant de mourir, le

    Proph-te a recommand aux musulmans dobir aux califes pieux qui se sont succd apr-s

    lui. 6insi par extension, au moment de leur intronisation, les califes, mirs et autres dirigeants

    musulmans demandent ( leurs suets de leur prter allgeance.

    6u /aroc, ces liens dallgeance ont t repris et renforcs par le rgime monarchique

    depuis laccession au pouvoir de la dynastie des drissides moins de deux si-cles apr-s le

    dbut de l-re islamique. Btant pour la plupart des descendants du Proph-te, les rois du /aroc

    ont touours incarn limage du % commandeur des croyants & faisant ainsi de lallgeance

    non seulement un acte formel de subordination volontaire, mais galement et surtout une

    conscration de la r-gle religieuse. 4ependant, prter allgeance ne veut aucunement dire

    accepter de faire interposer quelquun entre soi et #ieu fut*ce le Proph-te lui*mme.Linvocation doit tre dirige directement ( #ieu. Eoute association de quelquun ou de

    13

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    quelque chose dans linvocation et dans la pri-re est considre comme %hir# !hrsie ou

    sortie de lislam$ sans quivoque. 4est ce qui explique lindividualisme et le sens de lthi*

    que personnel qui ont suscit ltonnement de dribarne !9;;?$ et dautres anthropologues

    avant lui comme O. Teert3 !9;I;, p. D9I$, qui crit 0

    Leurs normes les plus importantes sont personnelles et hautement sensibles aux

    conditions situationnelles subtiles. 4ette thique centre sur la personne a besoin dtre

    explicite si lon veut comprendre comment les /arocains eux*mmes per8oivent et

    interpr-tent les comportements de ceux qui les entourent. "lle fait partie dune vision plus

    gnrale du monde, une conception marocaine de la nature de la socit et de lindividu dans

    laquelle chaque personne est considre comme un agent actif qui cre une vie significative

    au sein dun monde essentiellement arbitraire.

    6u*del( de son caract-re formel, lallgeance stend ( la vie en socit et aux relations

    entre personnes. =ans crmonie solennelle, des personnes se trouvent consciemment ou

    inconsciemment amenes ( obir ( dautres, car elles incarnent ( leurs yeux la droiture et

    lintgrit ncessaires pour tre obies. 6insi, tant et aussi longtemps que ces % leaders &

    agissent dans un sens ug % uste & par les % suiveurs &, ces derniers leur doivent obissance

    et loyaut.

    Lexemple cit par dribarne !9;;?$ nous para+t fort appropri pour illustrer cettevaleur. "n effet, lauteur fut tonn de voir que les ouvriers de =T=*Ehomson 4asablanca se

    donnaient ( fond dans leur travail et parvenaient mme ( dpasser les obectifs fixs par le

    si-ge dans le cadre du programme de gestion de la qualit totale. 4ependant, nous nous

    cartons de lexplication donne par lauteur ( ce dvouement par une forme de

    maraboutisme. ous y voyons au contraire une manifestation de cette valeur dallgeance que

    le /arocain tmoigne ( toute personne qui en est digne en raison de sa position ou de son

    charisme bien que dans lexemple prcit, cette allgeance sinscrive dans un registre profanepuisque le directeur de =T=*Ehomson ntait pas musulman.

    Entre lindividualisme et le collectivisme le ! familisme "

    Les dimensions dindividualisme et de collectivisme dfinies par Oofstede !9;?I$

    sappliqueraient mal dans le cas de la plupart des /arocains. 6insi et bien que ces derniers

    soient loin de prsenter une population homog-ne comme nous lavons expliqu plus haut,

    trop peu dentre eux pourraient se reconna+tre dans lune de ces deux dimensions. "n effet, la

    plupart des /arocains ne peuvent pas tre qualifis dindividualistes dans le sens hofstedien

    14

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    dans la mesure o) ils ne sont que rarement anims par leur intrt personnel. Le caract-re de

    collectivistes leur conviendrait mal galement du fait que ce nest pas tout ( fait lintrt

    collectif qui expliquerait la maeure partie de leurs agissements.

    =e situant entre individualisme et collectivisme au sens de Oofstede !9;?I$, le /arocain

    est primordialement mC par ses intrts familistes. 6insi, sa petite famille passe avant tout.

    ous avons vu des /arocains trimer our et nuit et sendetter pour assurer ( leur progniture

    une scolarit de qualit. Le /arocain est vraiment prt ( tout pour ses enfants. l serait

    capable de dplacer les montagnes sil le faut pour que ses enfants vivent bien et mangent (

    leur faim. ous avons rencontr des p-res et des m-res de famille connus pour leur intgrit et

    leur droiture qui envisageaient des solutions ( la limite de lillgalit pour permettre ( un fils

    chmeur dimmigrer ( ltranger ou de se trouver un emploi au /aroc.

    4omme toute socit en mergence o) le taux de croissance dmographique reste lev

    par rapport ( ses moyens, le /aroc fait face depuis de nombreuses annes ( des probl-mes de

    chmage. Le nombre des sans*emploi, mme parmi les porteurs de diplmes suprieurs, ne

    cesse daugmenter malgr toutes les mesures mises en oeuvre par le gouvernement. 7ace ( ce

    flau national et en labsence dallocations de chmage et dautres aides sociales, la solidarit

    familiale reste le seul soutien dont disposent les sans*emploi. Le familisme sav-re sur ce plan

    au moins, un filet de scurit sociale qui soutient toute la socit. Les parents marocains ne se

    lassent pas de leurs enfants quel que soit leur Yge si, faute demploi, ils sont obligs de rester

    dans la maison paternelle.

    =ur un continuum allant dindividualiste ( collectiviste avec le familisme au centre,

    certains parents, bien quils soient en maorit familistes dans le sens expliqu plus haut,

    tendraient vers lun ou lautre des deux antipodes. 4ertaines tudes ont en effet montr que les

    gens de =ouss au sud sont anims par un fort sens daffiliation ( leur collectivit alors que

    ceux qui sont originaires de la rgion de 7-s au centre se montrent plus indpendants ou plusindividualistes !/amou, 9;?A$. 6insi, la solidarit familiale ou le familisme est beaucoup

    plus dveloppe che3 les 2erb-res quil ne lest che3 les 6rabes. Le sens de la famille

    transcende mme che3 cette population le sens strict du terme !parents et enfants$ pour

    englober les membres de la grande famille !par exemple, grands*parents, cousins, tantes et

    oncles, petits*enfants$. l va mme usqu( sentendre parfois dans un sens plutt proche de

    tribu ou de clan.

    15

  • 7/23/2019 Introduction Management interculturel

    16/33

    X titre dexemple, nous mentionnons le cas de ce chauffeur de camion qui touche (

    peine le =/T et qui a tenu ( envoyer son fils unique pour poursuivre ses tudes ( /ontral.

    Pour ce faire, il sest lourdement endett et a mme hypothqu la maison que lui avait lgue

    son p-re.

    l faut toutefois noter que les parents sattendent gnralement ( ce que leurs sacrifices

    soient rcompenss une fois que le fils ou la fille se serait assur une position sociale qui lui

    permettrait de leur venir en aide ( son tour. 4est certainement ce qui expliquerait la quasi*

    absence au /aroc dhospices pour personnes Yges. l appartient en effet aux enfants de pren*

    dre soin de leurs parents d-s quils se sentent capables de le faire.

    La sacralit de la dignit

    Le /arocain est tr-s fier de sa dignit et tient mordicus ( ce quelle soit respecte quand

    bien mme les apparences pourraient suggrer le contraire. "n effet, quand les conditions de

    son travail lam-nent ( faire des compromis ( ce suet, le /arocain chercherait la premi-re

    occasion pour raffirmer son attachement ( sa dignit. =i cette derni-re continue dtre

    bafoue, il pourrait chercher une compensation lgitime ou illgitime pour rtablir le respect,

    du moins le sien, de sa dignit. Par contre, quand il est respect, apprci et valoris, le

    /arocain ferait tout pour montrer sa reconnaissance et son dvouement. #ailleurs, lune des

    conditions implicitement associes ( lallgeance est le respect de la dignit comme nouslavons prcdemment expliqu dans lexemple cit par dribarne !9;;?$.

    Gestion la marocaine

    "u gard ( toutes les caractristiques et valeurs qui prc-dent, les pratiques de gestion

    des entreprises au /aroc prsentent un certain nombre de spcificits quil convient de

    comprendre. ous apprhendons ces derni-res du point de vue des modes et des syst-mes, des

    modalits ainsi que des rapports de gestion qui prvalent dans la socit marocaine et quenous prsentons apr-s une description sommaire de limage de lentreprise dans la

    reprsentation collective au /aroc.

    Limage de lentreprise et du patron dans la repr!sentation collective au "aroc

    Limage de lentreprise est tr-s mitige au /aroc !=Yadi, 9;?

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    17/33

    fortuns et chanceux senrichissent de plus en plus aux dpens de proltaires qui

    sappauvrissent, ou pour reprendre un verbe cher aux marxistes, se pauprisent our apr-s

    our. 6insi pour les premiers, le travail est sacr et fait mme partie des obligations religieuses

    alors que pour les seconds, il nest quexploitation et extorsion.

    Limage du patron est dailleurs le corollaire de celle de lentreprise. Pour les uns, il est

    un pourvoyeur indirect de moyens de subsistance permettant au travailleur de faire vivre les

    siens, alors quil est vu par les autres comme un opportuniste, un exploiteur, voire un voleur.

    #ans le parler marocain en effet, plusieurs patrons ventrus sont dsigns de #erch lahram, ce

    qui signifie littralement % ventre Rrempli du produit duS vol &. l sensuit pour la plupart de

    ces derniers que voler le voleur nest pas du vol, mais une action tout ( fait lgitime qui

    contribue ( rendre au travailleur une partie infime de ce qui lui est indCment et inustement

    vol 0 sa sant, son travail et surtout sa dignit.

    l est difficile dtablir une ligne de dmarcation nette entre ce qui est laVc et ce qui est

    religieux dans lentreprise marocaine. Teert3 et al. !9;I;$ met dailleurs en vidence la laVcit

    de lessentiel de la vie ordinaire et le cantonnement de linfluence religieuse dans des

    domaines de comportement peu nombreux et bien circonscrits. #e son ct, dribarne !9;;?$,

    essayant de comprendre le fonctionnement des entreprises marocaines ( travers ltude du cas

    de =T=*Ehomson, na pu sempcher de faire usage des deux registres 0 profane et religieux.

    l explique le succ-s de cette firme par %lirruption dans la vie de lentreprise de rfrences

    morales qui, tout en tant usuelles dans le domaine traditionnellement concern par la

    religion, sont normalement trang-res ( cette vie & !dribarne, 9;;?, p.

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    Limage du patron est dailleurs le corollaire de celle de lentreprise. Pour les uns, il est

    un pourvoyeur indirect de moyens de subsistance permettant au travailleur de faire vivre les

    siens, alors quil est vu par les autres comme un opportuniste, un exploiteur, voire un voleur.

    #ans le parler marocain en effet, plusieurs patrons ventrus sont dsigns de #erch lahram, ce

    qui signifie littralement % ventre Rrempli du produit duS vol &. l sensuit pour la plupart deces derniers que voler le voleur nest pas du vol, mais une action tout ( fait lgitime qui

    contribue ( rendre au travailleur une partie infime de ce qui lui est indCment et inustement

    vol 0 sa sant, son travail et surtout sa dignit.

    l est difficile dtablir une ligne de dmarcation nette entre ce qui est laVc et ce qui est

    religieux dans lentreprise marocaine. Teert3 et al. !9;I;$ met dailleurs en vidence la laVcit

    de lessentiel de la vie ordinaire et le cantonnement de linfluence religieuse dans des

    domaines de comportement peu nombreux et bien circonscrits. #e son ct, dribarne !9;;?$,

    essayant de comprendre le fonctionnement des entreprises marocaines ( travers ltude du cas

    de =T=*Ehomson, na pu sempcher de faire usage des deux registres 0 profane et religieux.

    l explique le succ-s de cette firme par % RlSirruption dans la vie de lentreprise de rfrences

    morales qui, tout en tant usuelles dans le domaine traditionnellement concern par la

    religion, sont normalement trang-res ( cette vie & !dribarne, 9;;?, p.

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    reprsentations culturelles que se font les gens de leur vcu quotidien. Plusieurs organismes

    donnent limage dun micro*royaume avec son autorit suprieure, ses distances

    hirarchiques, ses relais de pouvoirs et les suets de sa maest le patron. 4e dernier sattend (

    ce quon lui % prte allgeance & matin et soir et quon accepte son autorit sans contestation.

    Kuand il nincarne pas les valeurs de ustice et de ustesse, les employs contestentpassivement ou activement son autorit et surtout celle des relais au pouvoir, et cherchent

    refuge dans dautres pratiques !par exemple, labsentisme, le sabotage$ pour protger leur

    dignit ou en compenser la perte. Le climat autoritaire cre au sein de lentreprise une

    ambiance de tension, de mfiance et de suspicion, voire de crainte et de psychose. Lexemple

    dune entreprise de tissage ( 4asablanca est tr-s difiant ( cet gard. "n effet, layant re8ue en

    hritage, les fr-res =. navaient pour seul souci que de % tirer le maximum & de lentreprise et

    de ses employs pour lesquels ils navaient aucune considration. Peu de temps apr-s lareprise, la firme autrefois prosp-re et rentable, a commenc ( battre de laile. Les employs

    qui taient nagu-re fid-les au fondateur ne se sentaient plus attachs ( ses hritiers par les

    liens dallgeance. Les absences taient devenues tr-s frquentes[ les sabotages et pannes,

    autrefois rares et ma+triss, taient devenus la r-gle. Les fr-res =. ont fini par se dcider ( faire

    faillite pour chapper ( leurs cranciers.

    6insi, le sens du devoir est*il rgi dans lentreprise comme dans la socit marocaine

    par la volont de prserver sa dignit et dviter lignominie.

    Kuand lautorit reconna+t et est sensible ( cette dignit, elle obtient en contrepartie la

    dvotion des gens, leur gratitude et par consquent, leur allgeance. Les rapports

    hirarchiques, quand ils ne sont pas fonds sur cet quilibre fragile entre autorit et volont de

    prserver la dignit, crent des abris anti*autorit, des refuges o) les gens se retranchent pour

    mieux faire face ( lautorit. Kuand la dignit est reconnue, nul besoin de contrler. Hn ne

    badine pas avec les valeurs morales qui gouvernent son pays mme si comme le dit dribarne

    !9;?;, p. 9:$, % ^ chaque pays bafoue parfois ses propres valeurs &. La dfinition des

    responsabilits de chacun, quand elle est fonde sur cette reconnaissance, est touours per8ue

    comme un minimum auquel on doit sattendre de la part des gens ainsi responsabiliss. #ans

    le cas contraire, cette dfinition serait saisie comme un maximum que les gens ugent touours

    difficile ( atteindre, car il est fond sur les estimations irralistes de la direction. 4omme par

    enchantement, quand lordre tabli change et que lautorit devient plus reconnaissante de la

    dignit des gens, le maximum dhier se transforme en minimum dauourdhui, et les res*

    sources caches se mobilisent soudainement dune fa8on abracadabrante.

    19

  • 7/23/2019 Introduction Management interculturel

    20/33

    Les rcompenses, mme quand elles ne sont pas matrielles, sont tr-s apprcies dans la

    logique marocaine parce quon y voit ustement un indicateur de reconnaissance. Hn est tout

    autant reconnaissant que les sanctions, quand elles sont ustifies, se donnent en priv,

    contrairement aux rcompenses. Linverse rduit la valeur symbolique de la rcompense et

    exacerbe la sanction mme si elle est ustifie et largement mrite. Un technico*commercialdans une grande entreprise casablancaise de peinture a dcid de dmissionner de son poste

    en dpit dun salaire mirobolant, car son patron sest permis de lui faire des remontrances

    devant ses coll-gues. 2ien que le technico*commercial ait t dans son tort, il aurait prfr

    que les reproches lui soient faits en priv.

    /algr son caract-re individualiste, le /arocain a, en r-gle gnrale, un asse3 bon

    esprit dquipe ( condition de limiter le nombre de personnes par groupe et de veiller

    religieusement ( ce que ce dernier soit constitu de personnes qui sentendent. l prf-re

    cependant travailler seul et rpondre ainsi de la qualit de son travail.

    Llment rgulateur de la dyade autorit*dignit reste, dans une large mesure, la

    responsabilisation des individus et la prservation de leur dignit. 4est indubitablement la

    clef de lnigme quont dcouverte les responsables de =T=*Ehomson tudis par dribarne

    et qui leur a permis de sassurer la loyaut du personnel indpendamment de leur rang

    hirarchique et en dpit de la grande diversit culturelle qui marque la socit marocaine.

    Hn peut dire, en dfinitive, que grer ( la marocaine implique la recherche de

    ladquation entre deux tendances phares difficilement, mais % possiblement & conciliables 0

    la mise en oeuvre de r-gles dadministration et des normes de travail impliquant le contrle

    des ressources ( la disposition de lentreprise, dune part, et la ncessit de prserver la

    dignit de lemploy marocain vaille que vaille, dautre part. La rupture de lquilibre entre

    ces deux impratifs est dautant plus grave que les individus frustrs chercheront refuge,

    consciemment ou non, dans des pratiques et des comportements difficilement dcelables,parfois lgalement incontestables et hautement nocifs ( lentreprise.

    7ace ( ces comportements conscients ou inconscients de leurs employs, les patrons

    marocains adoptent des modes de gestion varis. La liste que nous prsentons ci*apr-s ne

    prtend pas tre exhaustive, et les modes sont loin dtre typiquement marocains. 4ependant

    et bien quils soient utiliss par dautres dirigeants dans dautres pays, ces modes sont tr-s

    influencs au /aroc par les caractristiques culturelles et sociales d( voques.

    Le mode de gestion #aternaliste

    20

  • 7/23/2019 Introduction Management interculturel

    21/33

    #e nombreux dirigeants marocains se comportent en entreprise comme sil sagissait de

    leur famille. os nombreuses interventions dans les entreprises nous am-nent cependant (

    prciser que ce mode est surtout le fait de dirigeants agissant dans un contexte organisationnel

    caractris par les spcificits suivantes 0

    Z #irigeant relativement Yg 0 en effet, tous les dirigeants de cette catgorie ont la

    cinquantaine passe[

    Z Personnel relativement ancien 0 dans les entreprises o) ce mode de gestion prvaut,

    lanciennet moyenne du personnel est denviron une di3aine dannes[

    Z 4aract-re familial ou tribal de lentreprise 0 en r-gle gnrale, les employs des

    entreprises o) ce mode est adopt appartiennent dans leur maorit ( la famille du dirigeant ou

    ( sa tribu dans le cas des dirigeants soussis.

    #ans ce mode de gestion, les conflits sont rares. Les dcisions du diri geant sont per8ues

    de la mme fa8on que les directives donnes par le p-re ( son enfant dans lanalyse

    transactionnelle. Les contestations sont rares et fort limites. Lesprit dquipe y est fort et

    dborde mme les fronti-res de lentreprise. 6insi, un employ sait pertinemment quil peut

    compter sur lentreprise et son dirigeant en cas de probl-mes, mme ( lextrieur de

    lorganisation. 4ela ne veut cependant pas dire quil ny a pas de licenciements ou, ( tout le

    moins, daccrocs. "n effet, il arrive que des employs insatisfaits de leurs conditions quittent

    lentreprise pour aller ailleurs. l est vrai aussi quen priode de rcession, les employs de ce

    genre dentreprises sont davantage sollicits ( % serrer la ceinture & que leurs coll-gues qui

    travaillent dans des entreprises gres diffremment.

    4est dans ce mode que lon rencontre le plus les manifestations des valeurs de la

    culture marocaine. 6insi, ce syst-me est largement fond sur lallgeance des employs ( leur

    patron. 4e dernier est per8u comme le garant du respect de la dignit de ceux qui travaillentavec lui. Les valeurs capitalistes de lucre sont dilues dans ce mode de gestion et sont

    remplaces par une solidarit ( toute preuve. Le cas de cette minoterie industrielle est tr-s

    parlant. "n effet, cette entreprise qui emploie une quarantaine douvriers provenant de la

    mme tribu est une vritable famille. Le patron oue le rle de chef de tribu. l est soucieux du

    bien*tre de tout un chacun. =es interventions transcendent le cadre organisationnel pour

    stendre au contexte familial. Les employs faisant face ( des difficults cononcturelles de

    toute sorte savent quils peuvent compter sur lentreprise. "n contrepartie, les employs se

    sentent moralement et religieusement tenus ( lobissance ( lgard de leur patron. 4est

    21

  • 7/23/2019 Introduction Management interculturel

    22/33

    grYce ( cette complicit que la minoterie a pu tenir le cap au moment o) dautres ont dC

    mettre la clef sous la porte durant la forte rcession qui a frapp le /aroc au dbut des annes

    ?@.

    Le mode de gestion familial

    4e mode ressemble beaucoup au prcdent ( ceci pr-s quil prvaut surtout dans les

    entreprises ( caract-re purement familial. ous entendons par caract-re familial ici les

    entreprises o) les postes de responsabilit ainsi que la proprit sont dtenus par les membres

    de la mme famille alors que dans les entreprises paternalistes, ces postes sont dtenus par des

    personnes en dehors de la famille du patron.

    #ans ce genre dentreprise, les considrations familiales lemportent largement sur

    celles dordre organisationnel. 6insi, lentreprise est*elle considre tre au service de la

    famille et non le contraire. Les ventuels conflits internes sont tranchs par lautorit familiale

    la plus coute. Les dcisions familiales sont prises sans possibilit de recours surtout dans les

    entreprises contrles par des familles dorigine berb-re.

    #ans ces entreprises, les liens dallgeance sont tr-s forts. "n effet, ( lallgeance

    religieuse saoute lallgeance due au chef de lentreprise qui se trouve tre souvent aussi le

    chef de famille. 6insi dans ces entreprises, on rencontre le moins de contestations et de

    probl-mes de gestion des ressources humaines. Lexemple de cette entreprise casablancaise de

    torrfaction de caf est tr-s intressant ( relater. "n effet, gre par deux fr-res soussis, celle*

    ci nest en fait que lextension de la famille. 2ien quil sagisse dune P/", elle assure le

    logement et le transport ( tous ses employs, leur donne des prts ( intrts nuls, les aide (

    dfrayer les frais de scolarit de leurs enfants, etc. X vrai dire, cest le fr-re a+n qui dtient

    les pleins pouvoirs dans lentreprise. Le cadet lui*mme agit sous la supervision de son fr-re

    aussi bien au travail quen famille.

    Le mode de gestion autoritaire

    4e mode est lun des plus frquents dans les entreprises marocaines. "n effet, forts du

    pouvoir que leur conf-re la proprit du capital ainsi que ltat du march du travail au /aroc,

    plusieurs dirigeants se comportent en tyrans dans leur entreprise. Hrdres et contre*ordres,

    ingrence dans toutes les tYches et oprations, contrle troit, centralisation des dcisions,

    sont quelques*unes des caractristiques de ce mode de gestion. "t comme la dignit des

    employs nest pas touours respecte dans ce type de gestion, ceux*ci font tout pour

    22

  • 7/23/2019 Introduction Management interculturel

    23/33

    compenser cette % rosion de respect & en utilisant des expdients comme le retard,

    labsentisme, la gr-ve, voire le sabotage. 4es moyens compensateurs entra+nent de la part du

    patron encore plus de contrle, dingrence et de manque de respect, et ainsi de suite.

    ous devons reconna+tre quil sagit ici du mode de gestion le plus loign des valeurs

    de la culture marocaine, mais, malheureusement aussi, le plus frquent. "n effet, labsence

    dune vritable allgeance ustifie par celle du respect de la dignit des employs, fait que le

    patron impose de plus en plus de contrles qui sont ressentis par les employs comme une

    exacerbation du manque de respect de leur dignit. X leur tour, ils singnient ( trouver des

    moyens de contournement de ces contrles. La rupture de la relation allgeance*dignit a

    alors pour implication les rsultats mdiocres que connaissent beaucoup de firmes

    marocaines. "ncore une fois, cest le rtablissement de cette relation qui explique les

    excellents rsultats constats par dribarne !9;;?$ dans lusine casablancaise de =T=*

    Ehomson.

    Le mode de gestion artisanal

    #ans le mode de gestion artisanal, le patron nest pas ncessairement autoritaire.

    4ependant, le syst-me de gestion mis en place nest pas appropri souvent parce que le

    dirigeant ne dispose pas des comptences ncessaires en gestion. "n effet, de nombreux

    dirigeants marocains sont danciens ouvriers, agriculteurs, voire chevillards qui se sontconvertis dans lindustrie sans avoir ncessairement les bagages ncessaires !Eangeaoui,

    9;;D[ 2errada, 9;G?$. 4ette reconversion a t favorise par plusieurs vnements histori*

    ques, tels que la fin du protectorat franco*espagnol et le dpart des dirigeants europens,

    lexode volontaire des dirigeants uifs en 9;GI ( la suite de la guerre arabo*isralienne, et la

    loi sur la marocanisation en 9;ID. 4ette loi a oblig les dirigeants non marocains ( cder la

    maorit du capital ( des ressortissants marocains et a fait que beaucoup de non*/arocains ont

    prfr vendre leurs entreprises et quitter le pays.

    Les dirigeants de ce type dentreprises doivent faire face ( de srieux probl-mes de

    gestion. ls ne disposent souvent pas de moyens de calculer leur prix de revient ni doptimiser

    la rentabilit de leurs actifs. Une tude conteste

  • 7/23/2019 Introduction Management interculturel

    24/33

    #ans ce mode, il est particuli-rement difficile de dterminer linfluence des valeurs de

    la culture marocaine sur la gestion. "n effet, comme il sagit dun groupe tr-s htrog-ne par

    rapport ( cette influence, certains dirigeants de cette catgorie sont tr-s respectueux de la

    dignit de leurs collaborateurs et re8oivent en retour lallgeance qui leur est due. Leurs

    probl-mes organisationnels proviennent cependant de leur incomptence en gestion. #autres,par contre, se trouvent confronts aussi bien ( des probl-mes causs par leur incomptence en

    tant que gestionnaires quaux consquences ngatives des valeurs culturelles quentra+ne le

    non*respect de la dignit de leurs collaborateurs.

    Le mode de gestion moderne

    4e mode de gestion est gnralement le fait de eunes dirigeants ayant fait des tudes

    avances au /aroc ou ( ltranger. Plusieurs de ces eunes dirigeants ont galement pris larel-ve dentreprises antrieurement gres par des parents qui adoptaient un mode de gestion

    parmi ceux voqus plus haut. 4est le cas galement de filiales dentreprises trang-res au

    /aroc.

    Les caractristiques de ce mode de gestion ne diff-rent pas beaucoup de celles qui

    prvalent dans des entreprises europennes ou amricaines (

    ceci pr-s que la gestion dun personnel marocain ncessite des adaptations culturelles et

    sociales importantes.

    Les entreprises gres par ce genre de gestionnaires sont organises dune mani-re tr-s

    formelle avec un organigramme officiel, des descriptions de tYches, des manuels de

    procdures. La plupart des entreprises marocaines oprant dans le milieu urbain sacheminent

    progressivement vers ce mode sous la double pression de l6dministration surtout du fisc

    qui les oblige ( tenir une comptabilit et de la concurrence internationale. #ans ce genre de

    firmes, les valeurs culturelles peuvent contribuer ( amliorer les rsultats ou, au contraire, (les affaiblir. "ncore une fois, lexemple de =T=*Ehomson sav-re excellent ( cet gard. La

    prise en considration de la dignit des gens qui les am-ne ( prter allgeance au patron peut

    en effet faire la diffrence.

    Les t#pes de gestionnaires au "aroc

    ous ne prtendons pas ici faire le point de toutes les caractristiques des types de

    gestionnaires connus au /aroc. otre obectif ici est de prsenter une typologie asse3

    24

  • 7/23/2019 Introduction Management interculturel

    25/33

    approximative de ces types sur la base de considrations lies ( lorigine ethnoculturelle des

    dirigeants.

    Le t$#e de gestionnaire fassi

    4e serait une lapalissade que de dire que tous les 7assis ne se ressemblent pas. ous nesaurions par consquent soutenir que ce type sapplique ( tous les dirigeants originaires de

    7-s. 4e quil faudrait peut*tre rappeler ( ce suet, cest que les 7assis, dans leur maorit,

    sont les descendants des 6ndalous chasss au 5e si-cle par les "spagnols. 4ertains dentre

    eux proviennent de familles uives islamises aux 5e et 5e si-cles. #ailleurs, certains

    noms ont conserv usqu( auourdhui leur consonance uive comme les noms de Jouhen, de

    2enhayoun et de 2enche'roun.

    Les 7assis sont connus pour avoir des tendances et des habilets marchandes tr-s

    marques. /me avant le protectorat, les commer8ants de 7-s visitaient rguli-rement les

    marchs europens et du /oyen*Hrient ( la recherche de produits ( importer ainsi que de

    dbouchs pour leurs propres biens. #( en 9;

  • 7/23/2019 Introduction Management interculturel

    26/33

    Linfluence des valeurs culturelles sur ce type de gestionnaire varie considrablement en

    fonction du mode de gestion choisi. 6insi, est*elle positive dans les modes paternaliste et

    familial alors que son impact est plutt ngatif quand le mode est autoritaire. ous avons

    galement vu prcdemment que la plupart des gestionnaires fassis tendent vers le syst-me

    moderne du fait de leur antriorit commerciale et de leur tendance ( envoyer leur progniturepoursuivre des tudes en "urope et en 6mrique du ord. anmoins, le 7assi tend

    gnralement ( tre individualiste. =on comportement, dun point de vue culturel, reste alors

    difficile ( cerner en entreprise.

    Le t$#e de gestionnaire soussi

    Le =oussi est anim par un sens tr-s aigu dappartenance familiale et tribale. 6insi, la

    solidarit entre entrepreneurs soussis et leurs employs est encore plus solide et souventindfectible. Les modes de gestion qui prvalent dans les entreprises soussies sont surtout les

    modes paternaliste et familial. Les =oussis sont connus pour tre dexcellents commer8ants.

    "n effet, la grande maorit des piceries au /aroc est gre par des =oussis. 4est la raison

    pour laquelle ils sont rests traditionnellement dans les activits commerciales. 6uourdhui et

    bien quils continuent dtre fortement prsents dans le commerce, les =oussis commencent (

    pntrer dautres domaines conomiques qui taient usqu( ces derni-res annes, lapanage

    de 7assis et de dirigeants provenant dautres ethnies. #es exemples de grands groupes

    industriels soussis comme celui des familles 6gou33al et Oad Hmar sont tr-s difiants ( cet

    gard.

    4e quil conviendrait de noter ( propos des entreprises soussies, cest quelles emploient

    surtout une main*doeuvre tribale et gnralement non syndique. "n priode de rcession,

    ces entreprises rsistent mieux que les autres en raison de % lesprit de tribu & qui y r-gne. "n

    plus, le =oussi est connu pour son pragmatisme et sa rationalit conomique souvent qualifis

    dexagrs. #ans les blagues populaires, le =oussi est le plus souvent prsent comme unepersonne pingre et trop pr-s de ses sous, alors que le 7assi y est dcrit comme une personne

    trop raffine qui cherche ( viter les conflits ouverts surtout lorsquil est oppos ( un arou!i.

    6yant des besoins personnels limits, le dirigeant soussi ne se lance que rarement dans des

    dpenses ostentatoires et rinvestit souvent ses gains dans son commerce. l ne paie pas non

    plus de gros salaires en r-gle gnrale. 4est peut*tre ce qui explique aussi la prpondrance

    de la main*doeuvre tribale dans son entreprise.

    26

  • 7/23/2019 Introduction Management interculturel

    27/33

    4omme nous lavons expliqu prcdemment, les valeurs culturelles sont tr-s prsentes

    dans les modes de gestion gnralement adopts par le gestionnaire soussi en raison de

    lemploi dune main*doeuvre familiale et tribale. Les valeurs dallgeance, de dignit et de

    familisme sont particuli-rement marques che3 les gestionnaires soussis comme nous lavons

    montr dans lexemple de lentreprise de torrfaction de caf.

    Le t$#e de gestionnaire ar%i

    l ne sagit pas ici dun type homog-ne. l conviendrait vraiment de parler de plusieurs

    types plutt que dun seul. ous pouvons en effet soutenir quil existe trop peu de

    caractristiques communes aux dirigeants de ce groupe. ous y trouvons en fait tous les

    modes de gestion prsents ( la section prcdente avec peut*tre une prpondrance du mode

    artisanal.

    Lune des caractristiques communes ( ce type consisterait en la tendance de ses

    dirigeants ( viter le risque et ( privilgier des investissements ( rentabilit immdiate comme

    ceux gnralement faits dans le foncier. "n plus, beaucoup de dirigeants appartenant ( cette

    catgorie ne rinvestissent que rarement et dune fa8on limite les bnfices raliss dans

    lentreprise.

    4omme il sagit dun groupe htrog-ne, linfluence des valeurs culturelles est tr-s

    difficile ( cerner ici. 4ependant, dans plusieurs entreprises gres par ce genre de

    gestionnaires, nous avons relev que la main*doeuvre provenait dhori3ons ethniques tr-s

    diversifis. "n effet, plusieurs des gestionnaires interrogs prf-rent ne se fier

    quaccessoirement ( des employs de leur famille ou de leur tribu. 4ertains auraient mme

    une prfrence pour un personnel soussi rput pour son pragmatisme, ses revendications

    limites et son intgrit ainsi que pour des travailleurs fassis rputs pour leur prestige et leur

    classe.

    Le t$#e de limmigrant revenu au #a$s

    l sagit dun type en mergence dans le /aroc dauourdhui. #e nombreux immigrants

    reviennent dans le pays pour y investir dans un domaine quils ont connu en immigration. ls

    emm-nent avec eux soit un capital constitu ( ltranger cest le cas notamment des

    immigrants dans les pays du Tolfe , soit une exprience quils cherchent ( valoriser au

    /aroc. Les domaines concerns par lesdits investissements sont tr-s varis. ls vont du

    foncier surtout pour les immigrants ayant ramen un capital de ltranger ( lindustrie et

    27

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    au commerce pour ceux revenant dans le pays avec une exprience importante et !ou$ des

    contacts prcieux.

    #u point de vue de linfluence culturelle, ce type combine en fait deux obdiences

    diffrentes 0 vis*(*vis de la culture marocaine dorigine !fassi, berb-re, arbi, etc.$ dune part, et

    ( lgard de la culture du pays dimmigration dautre part. Par exemple, de retour au pays, un

    investisseur soussi emploierait de prfrence une main*doeuvre familiale ou tribale et adopte*

    rait un mode de gestion paternaliste ou familial, mais mettrait en oeuvre son apprentissage

    acquis dans le pays dimmigration. 4est le cas par exemple de cet informaticien soussi

    revenu de 7rance pour crer une entreprise dassemblage dordinateurs. La main*doeuvre

    tait enti-rement soussie, le mode de gestion plutt paternaliste, mais aussi moderne puisque

    lentreprise tait organise dune mani-re tr-s structure. 4ependant, le formalisme ntait pas

    sclrosant. 6insi, alors que les employs ne pouvaient officiellement bnficier que des deux

    tiers de leur salaire mensuel ( titre davance, le patron consentait des avances dpassant

    parfois deux mois de salaire quand un ouvrier venait le voir pour un probl-me particulier.

    Les rapports organisationnels au "aroc

    #ans un contexte organisationnel, les employs entretiennent un certain nombre de

    rapports que nous qualifions ici dorganisationnels, aussi bien les uns avec les autres que vis*

    (*vis de la hirarchie. 4es rapports peuvent tre tendus ou conviviaux, constructifs oudestructifs dpendamment des perceptions que les uns et les autres en font et des valeurs

    quils leur donnent. l est certain quil existe une ribambelle de rapports organisationnels.

    4ependant, nous nous limitons ici ( ceux qui nous semblent les plus importants, compte tenu

    des perceptions culturelles des protagonistes. 6insi, prsentons*nous successivement les

    rapports ( lautorit, ( la hirarchie et au contrle[ les rapports ( la responsabilit et (

    linitiative[ et enfin, les rapports aux rsultats organisationnels.

    Le ra##ort & lautorit & la hirarchie et au contr'le

    #ans son tude de la culture marocaine ( travers le cas de =T=*Ehomson, dribarne

    !9;;?, p.

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    4ette combinaison dautorit et de simplicit serait*elle la rfrence morale dans le

    contexte marocain] Les propos dun chef de service pourraient le laisser penser 0 la rfrence

    est une autorit forte, mais la modestie est tr-s apprcie[ on na rien ( perdre ( descendre sur

    le terrain, on gagne du respect. Pourtant, avons*nous vu, cette forme dexercice du pouvoir est

    tout sauf banale dans les entreprises marocaines et ne rgnait nullement dans lentrepriseavant la transformation quelle vient de conna+tre. y a*t*il pas l( une contradiction]

    4onnaissant sa dmarche dans'a logi&ue de lhonneur !dribarne, 9;?;$, on aurait pu

    stonner de ne pas voir dribarne trouver une opposition fondamentale de ce genre.

    4herchant ( expliquer cette opposition, dribarne !9;;?, p.

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    ous ne pouvons rien dire ( propos du gouvernement. Kuelquun pourrait vous

    entendre et cela vous vaudrait un chYtiment. R^S "t il y a touours du travail ( faire pour le

    caVd. X nimporte quel moment ou quand vous vous carte3 du chemin, le chei'h Rlieutenant

    du caVdS pourrait vous trouver et vous dire 0 % alle3 chercher du bois pour la maison du caVd &,

    ou % alle3 apporter du fourrage pour Rle btail duS ^ caVdD: &.

    Une principale opposition fondamentale peut se dgager ( ce niveau danalyse 0 autorit

    /a'h3en ou % caVdalisme & contre % maraboutisme & ou % soufisme &. Hn peut auourdhui

    parler dune opposition autorit intgrisme ou autorit fondamentalisme.

    Une deuxi-me opposition fondamentale a t introduite par loccupation fran8aise.

    4ette derni-re a divis le /aroc, sur un plan conomique, en un % /aroc utile & par les

    richesses conomiques quil rec-le et un autre % inutile &. Leur plan de pntration duterritoire donnait donc la priorit aux rgions du /aroc utile et ne sest tendu au reste du

    pays que pour des raisons de % pacification &. #Fyer !9;?

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    Une nouvelle opposition fondamentale a pris donc naissance entre autorit ou /a'h3en

    infid-le et % caVdalis &, etsi!a ou insurrection contre cette forme dautorit. Lisons ce qua

    crit un historien fran8ais de lpoque !Oardy, 9;D@, p. ;G$ 0

    Le pouvoir des djema Rconseil tribalS est asse3 thorique. =i la tribu est soumise au

    /a'h3en et cest auourdhui le cas le plus frquent , le =ultanD? lui dl-gue un caVd[ si

    elle est indpendante, il arrive souvent et surtout en temps de crise, quun chef simpose (

    elle, accapare, de fa8on plus ou moins prolonge, toute lautorit et, comme le caVd, se fasse

    reprsenter dans chaque groupement par des hommes ( lui.

    La contestation de lautorit illgitime sest exacerbe ( plusieurs occasions 0 quand les

    7ran8ais ont voulu mettre en application une charte de sparation ethnique entre les 6rabes et

    les 2erb-res[ quand les soldats fran8ais venaient enlever de force des eunes pour lesembrigader dans larme fran8aise durant la Premi-re et la =econde Tuerre mondiale[ et

    surtout, quand les 7ran8ais ont exil le roi /ohamed 5 en 9;AD.

    Les caractristiques de cette forme dautorit mprise par les /arocains se sont

    malheureusement reproduites au dbut de l6dministration marocaine de lapr-s

    indpendance ainsi que dans plusieurs entreprises. "n effet, le mode de gestion autocratique

    dont nous avons parl prcdemment nest en fait que le prolongement au sein de lentreprise

    de cette confrontation autorit*hirarchie, dune part, contre dignit et recherche de valeursrefuges, dautre part.

    Le ra##ort & la res#onsa%ilit et & linitiative

    Le rapport que le /arocain entretient avec la responsabilit et linitiative est un rapport

    que nous pourrions qualifier dinsolite. "n effet, la plupart des /arocains naimeraient pas

    tre tenus pour responsables quand % 8a ne marche pas &. 4ela ne signifie pas pour autant

    quils nont pas un sens de la responsabilit. Eout au contraire. Kuand leur dignit est respec*te, comme nous lavons expliqu prcdemment, ils se donneraient totalement ( lentreprise

    et au dirigeant. Leur % vitement & de la responsabilit sexplique ustement par le fait que

    beaucoup de patrons les ont habitus uniquement ( la rtroaction ngative. Kuand les choses

    vont bien, personne ne leur dit rien, mais quand 8a va mal, % on leur fait porter le chapeau &.

    6insi, ils ont t amens ( dvelopper cette phobie de la responsabilit qui transpara+t

    dailleurs dans le parler marocain. Par exemple, le /arocain ne rate pas le train ou le bus,

    cest plutt ce dernier qui est parti sans lui. l ne heurte pas la porte, cest plutt elle qui la %

    31

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    frapp &[ ce nest pas lui qui a laiss tomber le verre, cest le verre qui lui est tomb des

    mains.

    4est dire que quand % 8a va mal &, cest touours la faute de quelque chose dexterne (

    la personne. Pourtant, le /arocain, en cherchant ( reeter la responsabilit hors de lui, ne le

    fait pas mchamment. l ne veut uste pas servir de bouc missaire. 4ependant, quand il est

    formellement responsabilis, il accepte volontairement dassumer les consquences aussi bien

    positives que ngatives de ses actes.

    nterrogs au suet de la rtroaction ngativeD;, un certain nombre de dirigeants

    soutiennent quils ne donnent pas de rtroaction positive de peur que louvrier en profite pour

    demander une augmentation de salaire ou tout autre avantage. Les ouvriers rtorquent de leur

    ct quils nacceptent pas de % porter le chapeau & seulement quand 8a va mal et que silsdoivent tre tenus pour responsables, il faut quils le soient aussi bien quand 8a va bien que

    quand 8a va mal.

    Le ra##ort aux rsultats organisationnels

    Un proverbe marocain dit 0 % X quoi bon compter les ours dun mois que e ne eCne

    pas et dont e nen encaisse pas le loyer] & Le /arocain nest concern par les rsultats de

    lentreprise que dans la mesure o) ils influencent directement sa situation financi-re. 6insi,

    dans toutes les entreprises o) le salari ne re8oit pas une part des gains sous forme de

    gratifications et de prime de rendement, il ne chercherait que rarement ( en amliorer les

    rsultats. 4ertains pourraient rtorquer que cela na rien ( voir avec la nationalit de

    lentreprise et de ses salaris et que l( o) les gains ne sont pas partags avec les employs, le

    devenir de lentreprise et lamlioration de sa situation financi-re seraient la derni-re de leurs

    proccupations.

    4ependant, dans le contexte de beaucoup dentreprises marocaines caractrises par unegestion souvent par (*coups et des rcessions rptitives, les ouvriers sont souvent sollicits

    pour faire des sacrifices. #evant cet tat de fait, ils refusent systmatiquement dassumer les

    pertes alors quils ne sont pas associs aux rsultats. Kuand ils sont syndiqus, ils se cachent

    gnralement derri-re le bureau syndical pour manifester ce refus par crainte de reprsailles

    individuelles ou collectives.

    Par contre, quand ils ne le sont pas, ce refus nest que rarement apparent. ls se

    cacheraient alors derri-re des pratiques que les annes dexploitation leur ont appris ( utiliser.

    32

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    ul besoin de souligner que ce genre de comportement se rencontre plus frquemment dans

    les entreprises appliquant un mode de gestion autoritaire. X loppose, la solidarit familiale

    ou tribale ainsi que lassociation des employs aux bnfices mettent les entreprises ( labri

    de ces agissements vindicatifs.

    4onclusion

    X la lumi-re de lexpos dtaill qui prc-de, nous avons vu que la culture marocaine

    est tr-s htroclite et quelle a t progressivement forge au gr des occupations qua

    connues le pays au fil de lhistoire. "lle est compose dune alchimie peu commune de

    cultures dont certaines ont tout de mme gard quelques*unes de leurs particularits. 6insi

    appara+t*elle ( la fois comme un melting-pot dans le sens o) elle prsente de nombreuses

    constantes gnralement incarnes dans les valeurs fondamentales de la culture marocaine, etcomme une tour de 2abel dans la mesure o) les sous*cultures qui la constituent refusent de se

    fondre enti-rement.

    Les valeurs fondamentales qui caractrisent la socit marocaine sont nombreuses, mais

    peuvent tre ramenes aux valeurs suivantes 0 la logique dallgeance qui lie les suets ( un

    leader religieux ou parfois profane[ le familisme se situant entre lindividualisme et le

    collectivisme et qui consacre la primaut de la famille dans les proccupations du /arocain[

    et la sacralit de la dignit qui, si elle nest pas respecte, peut amener le /arocain ( chercherdes voies de compensation, voire de revanche, comme labsentisme, la dmission, le

    sabotage, etc.

    =i ces valeurs sont communes ( la grande maorit des /arocains, leur mise en oeuvre

    dans une perspective de gestion se trouve combine aux particularits des sous*cultures qui

    composent la culture marocaine. #e cette combinaison aillissent des modes de gestion asse3

    varis, dont le mode paternaliste, le mode familial, le mode autoritaire, le mode artisanal et le

    mode moderne. 4ertains de ces modes sont plus prsents dans certaines sous*cultures. Par

    exemple, les modes paternaliste et familial se rencontrent plus souvent dans le cas de

    gestionnaires soussis alors que le mode moderne correspond davantage aux styles adopts par

    les 7assis. /ais en tout tat de cause, quand les valeurs culturelles fondamentales ne sont pas

    respectes et en particulier, le couple allgeance*dignit, lentreprise pourrait tre amene (

    prouver des difficults quel que soit son mode de gestion et son type de gestionnaire.