16
L’épaule douloureuse en rhumatologie L’épaule douloureuse en rhumatologie recouvre de multiples pathologies, la plus fréquente et la plus commune étant la pathologie dégénérative de la coiffe des rotateurs. Le surmenage fonctionnel, professionnel ou sportif, aboutit bien souvent à une défaillance de cet ensemble musculo-tendineux, source d’un déséquilibre articulaire. Il ne faut cependant pas oublier qu’il existe un vieillissement normal et que les perforations « trophiques » après 50 ans sont fréquentes et le plus souvent bien tolérées. L’évaluation de ces épaules douloureuses doit être rigoureuse, systématisée et aboutir à un diagnostic lésionnel précis, seul garant d’un traitement efficace. L’apport de l’« imagerie moderne » est essentiel, mais la prescription doit être judicieuse et non systématique, sans méconnaître le rôle indispensable du bilan radiologique standard et des clichés « sensibilisés » qui permettent d’évaluer l’arche acromio-coracoïdienne, l’espace sous- acromial et le centrage de la tête humérale. Le traitement médical et « conservateur » est indiqué dans de nombreux cas, associé à un programme de rééducation spécifique, concernant l’ensemble du complexe articulaire, mais il doit être régulièrement contrôlé car il ne faut pas laisser passer le moment du traitement chirurgical, ses indications étant précises et parfois précoces. L’évaluation de la trophicité musculaire, son évolutivité, sa réversibilité et le contrôle de la cicatrisation tendineuse après réparation sont des éléments pronostics essentiels, non encore résolus et font l’objet de nombreux travaux. Cette Lettre a été réalisée par l’Equipe médico- chirurgicale du Département du Pathologie de l’Appareil Locomoteur (R.O.R.) de l’Hôpital Purpan. Michel Mansat LETTRE D’INFORMATION (3 numéros par an) septembre 2010 N° 35 L A L E T T R E Éditorial Éditorial : M. Mansat 1 L’épaule douloureuse chronique : M. Mansat 1 Aspect médical de l’épaule douloureuse chronique : B. Fournié 7 Imagerie des ruptures de la coiffe des rotateurs et des conflits sous acromiaux : J.-J. Railhac 9 Place du traitement chirurgical (Bases, Indications, Résultats) : P. Mansat 13 Brèves 8, 16 Opinion : Ch. Mansat 16 SOMMAIRE Plusieurs notions méritent d’être soulignées d’em- blée : l’absence de parallélisme anatomo-clinique : une coiffe fonctionnelle n’est pas obligatoirement « hermétique »; il existe un vieillissement normal, et nombreuses perforations « trophiques » sont parfaitement tolérées, la nécessité d’un bilan lésionnel précis,suivi de l’utilisation judicieuse et non pas systématique des explorations complémentaires, le traitement doit être adapté à chaque cas parti- culier,en connaissant très exactement la place du traitement conservateur,mais aussi les indi- cations et le moment du traitement chirurgical. Les grandes dates 1 – Duplay S.(1872) De la périarthrite scapulo-humérale et des raideurs de l’épaule qui en sont la conséquence – Arch. Gen.Méd.,1872,20,513. L’un des patients chez qui Duplay avait réduit une luxation de l’épaule,a présenté une raideur sévè- re. Le sujet est décédé peu de temps après, une autopsie a été réalisée, permettant de découvrir une articulation scapulo-humérale normale, par contre des lésions essentiellement péri-articulai- res sous forme d’« adhérences fibreuses » au niveau de la bourse sous-acromio-deltoïdienne.Sur cette seule observation, l’école française accepta le dogme des lésions péri-articulaires et le terme de périarthrite scapulo-humérale (PSH) fut adop- té pendant de nombreuses années. L’épaule douloureuse chronique Les douleurs de l’épaule représentent l’un des motifs les plus fréquents de consultation en pathologie de l’Appareil Locomoteur.L’épaule douloureuse chronique recouvre un vaste spectre lésionnel et de multiples pathologies : infections,tumeurs,pathologies systémiques,affections neurologiques… Nous n’envisagerons que l’étiologie la plus fréquente à savoir la pathologie dégénérative de la coiffe des rotateurs et de la longue portion du biceps (LPB).

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L’épaule douloureuseen rhumatologie

L’épaule douloureuse en rhumatologie recouvrede multiples pathologies, la plus fréquente etla plus commune étant la pathologiedégénérative de la coiffe des rotateurs.Le surmenage fonctionnel, professionnel ousportif, aboutit bien souvent à une défaillancede cet ensemble musculo-tendineux, sourced’un déséquilibre articulaire. Il ne fautcependant pas oublier qu’il existe unvieillissement normal et que les perforations« trophiques » après 50 ans sont fréquentes etle plus souvent bien tolérées.L’évaluation de ces épaules douloureuses doitêtre rigoureuse, systématisée et aboutir à undiagnostic lésionnel précis, seul garant d’untraitement efficace.L’apport de l’« imagerie moderne » estessentiel, mais la prescription doit êtrejudicieuse et non systématique, sansméconnaître le rôle indispensable du bilanradiologique standard et des clichés« sensibilisés » qui permettent d’évaluerl’arche acromio-coracoïdienne, l’espace sous-acromial et le centrage de la tête humérale.Le traitement médical et « conservateur » estindiqué dans de nombreux cas, associé à unprogramme de rééducation spécifique,concernant l’ensemble du complexearticulaire, mais il doit être régulièrementcontrôlé car il ne faut pas laisser passer lemoment du traitement chirurgical, sesindications étant précises et parfois précoces.L’évaluation de la trophicité musculaire, sonévolutivité, sa réversibilité et le contrôle de lacicatrisation tendineuse après réparation sontdes éléments pronostics essentiels, non encorerésolus et font l’objet de nombreux travaux.Cette Lettre a été réalisée par l’Equipe médico-chirurgicale du Département du Pathologie del’Appareil Locomoteur (R.O.R.) de l’HôpitalPurpan.Michel Mansat

L E T T R E D ’ I N F O R M A T I O N ( 3 n u m é r o s p a r a n ) septembre 2010

N° 35

L A L E T T R E

Édi tor ia l

Éditorial : M. Mansat 1

L’épaule douloureuse chronique : M. Mansat 1Aspect médical de l’épaule douloureuse chronique : B. Fournié 7Imagerie des ruptures de la coiffe des rotateurs et des conflitssous acromiaux : J.-J. Railhac 9

Place du traitement chirurgical

(Bases, Indications, Résultats) : P. Mansat 13

Brèves 8, 16

Opinion: Ch. Mansat 16SOM

MA

IRE

Plusieurs notions méritent d’être soulignées d’em-blée :� l’absence de parallélisme anatomo-clinique:unecoiffe fonctionnelle n’est pas obligatoirement« hermétique »;il existe un vieillissement normal,et nombreuses perforations « trophiques » sontparfaitement tolérées,

� la nécessité d’un bilan lésionnel précis,suivi del’utilisation judicieuse et non pas systématiquedes explorations complémentaires,

� le traitement doit être adapté à chaque cas parti-culier,en connaissant très exactement la placedu traitement conservateur,mais aussi les indi-cations et le moment du traitement chirurgical.

Les grandes dates

1 – Duplay S.(1872)De la périarthrite scapulo-humérale et des raideursde l’épaule qui en sont la conséquence – Arch.Gen.Méd.,1872,20,513.

L’un des patients chez qui Duplay avait réduit uneluxation de l’épaule,a présenté une raideur sévè-re. Le sujet est décédé peu de temps après,uneautopsie a été réalisée,permettant de découvrir

une articulation scapulo-humérale normale,parcontre des lésions essentiellement péri-articulai-res sous forme d’« adhérences fibreuses » au niveaude la bourse sous-acromio-deltoïdienne.Sur cetteseule observation, l’école française accepta ledogme des lésions péri-articulaires et le terme depériarthrite scapulo-humérale (PSH) fut adop-té pendant de nombreuses années.

L’épaule douloureuse chroniqueLes douleurs de l’épaule représentent l’un des motifs les plus fréquents de consultation en pathologiede l’Appareil Locomoteur.L’épaule douloureuse chronique recouvre un vaste spectre lésionnel etde multiples pathologies: infections,tumeurs,pathologies systémiques,affections neurologiques…Nous n’envisagerons que l’étiologie la plus fréquente à savoir la pathologie dégénérative dela coiffe des rotateurs et de la longue portion du biceps (LPB).

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2 – Codman E.A.(1934)The shoulder-rupture of the supra-spinatus tendonant other lésions in or about the subacromial bursa.Edition privée parThomasTodd – Boston,1934.

Avec les auteurs américains commence véri-tablement l’analyse beaucoup plus précise deslésions causales. Codman en 1934 dans unouvrage mémorable attire l’attention sur la« tendinite » du supra-épineux,la présence defissurations,d’incrustations calcaires… Il fut lepremier chirurgien à réparer une lésion dusupra-épineux.D’autres auteurs commeMeyerA.W.(1931) et plus tard Lipman R.K. (1947),Hitchcock H.H et Betchol C.O.(1948),s’orien-tent plutôt vers la longue portion du bicepscomme élément responsable des douleurs etde l’enraidissement.De PalmaA.F. en 1950 dansson traité de Chirurgie de l’Epaule publie unchapitre remarquable sur le vieillissement dela coiffe des rotateurs et la fréquence des lésionsasymptomatiques.« The Aging shoulder ».

3 – De Sèze S.(1964)De Seze S,Ryckwaert A.,Welfling J,Caroit M,HubaultA.– Epaule paralytique,épaule doulou-reuse, épaule bloquée. Le démembrementanatomo-clinique de la « P.S.H. ».Presse Med.1964,72,1795-1799.

Description « princeps » de l’école françaisede rhumatologie avec corrélations anatomo-cliniques.L’épaule « en 4 maux » :�épaule « gelée » : rétraction capsulaire�épaule aiguë hyperalgique : tendinopathiecalcifiante

�épaule pseudo-paralytique : rupture massivede la coiffe des rotateurs

�épaule douloureuse simple : tendinopathiede la coiffe et de la longue portion du biceps.

4 – C.S.Neer II (1972)Neer C.S. II – Anterior acromioplasty for thechronic impingement syndrome of the shoul-der.J.Bone and Joint Surg. 54A:41,1972.

Avec C.S.Neer,commence véritablement l’èremoderne de la conception et du traitement del’épaule douloureuse chronique.A la suite d’untravail anatomique commencé en 1962, il aprécisé dans son article princeps en 1972 quela plupart des lésions « de conflit » surviennentsous la partie antérieure de l’acromion et nonpas latéralement.L’acromionectomie latéraleou totale enlève une partie « innocente » del’acromion et surtout fragilise le deltoïdemoyende manière conséquente.En effet, la plupartdes mouvements de l’épaule dans les diffé-rentes activités se fait dans le plan scapulaireou antérieur,mais pas dans le plan latéral.Lazone de « conflit » se situe sous le tiers anté-rieur de l’acromion,le ligament C/A et la faceinférieure de l’articulation acromio-clavicu-laire. Le rétrécissement du défilé du supra-

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épineux « supra-spinatus outlet » (1985) peutêtre dû à la forme ou à la pente de l’acromionantérieur,à un entésophyte sous-acromial dansla partie initiale du ligament coraco-acromial,ou à des ostéophytes de la partie inférieure del’articulation acromio-claviculaire.Une inci-dence Rx particulière permet de visualiserparfaitement ce défilé :« supra spinatus outletview ».Neer C.S.,Poppen N.K.(1987).

Une bonne compréhension du mécanismeconflictuel est essentielle pour le diagnostic etle traitement de l’épaule douloureuse.Des rela-tions étroites existent entre la voûte acromio-coracoïdienne, l’articulation acromio-clavicu-laire, la bourse séreuse sous-acromio-deltoï-dienne,la coiffe des rotateurs et la longueportiondu biceps. Il s’agit d’une pathologie « régiona-le » de l’espace sous-acromial,qui peut évolueren 3 stades de la tendinopathie à la rupture dela coiffe des rotateurs et de la longue portiondu biceps et parfois à une arthropathiecomplexe et invalidante « Cuff tear arthropa-thy ».Neer a décrit desmanœuvres spécifiquesd’examen,un test diagnostique et un traitementadapté au bilan lésionnel et au stade évolutif.

Préalables anatomo-cliniques

I – Un complexe articulaire (fig.1)L’épaule représente un véritable « complexe »composé de 3 articulations :� gléno-humérale (GH)� acromio-claviculaire (AC)� sterno-claviculaire (SC)

Et de 2 espaces de glissement :� scapulo-thoracique� sous-acromial

Lors du mouvement,ces différentes articula-tions interviennent de manière synchrone etsimultanée.Les variations individuelles sontimportantes,mais on peut schématiquementretenir que la mobilisation de l’humérus estdeux fois plus importante et deux fois plus rapi-de que celle du scapulum et que pour unmouvement d’élévation antérieure de 180°,120° se passent au niveau gléno-huméral et 60°au niveau scapulo-thoracique. L’acromionbascule vers le haut de manière à faciliter lepassage du tuberculemajeur en rotation exter-ne. La clavicule effectue un mouvement derotation sur son axe,contrôlé par les ligamentscoraco-claviculaires.La mobilité de l’articula-tion sterno-claviculaire est beaucoup plusimportante que celle de l’acromio-claviculai-re,multidirectionnelle,de manière à s’adapteraux 40° de rotation claviculaire.

Important:1 – toujours évaluer l’ensemble du complexe

articulaire et non pas la seulearticulation gléno-humérale,

2 – l’atteinte d’une articulation peutcompromettre l’ensemble du système,

3 – bien observer le rythme scapulo-huméral(2/1).

II – Un compromis permanententre mobilité et stabilité(fig.2)L’incongruence articulaire caractérise l’énar-throse gléno-humérale: la surface glénoïdien-ne est pratiquement plate,représentant environun quart de la surface articulaire de l’humérusproximal,avec un rayon de courbure légère-ment supérieur.Le bras en position anatomique,en rotation neutre,la tête humérale est dirigéeen arrière vers le scapulum avec une rétrover-sion d’environ 20 à 40°.La surface articulairede la glène est aussi rétroversée de 4 à 12°.L’articulation gléno-humérale est normalementlaxe, et le volume capsulaire est environ ledouble de celui de la surface articulaire

Fig.1 : Complexe articulaire et «couples»musculaires :- deltoïde antérieur et infra-spinatus,musclesclés de l’élévation antérieure,

- trapèze et serratus antérieur : suspension,stabilisation et orientation du scapulum(d’après C.S.Neer).

Fig.2 : Les surfaces articulaires gléno-humérales : incongruence et rétroversion

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N° 35 - PAGE 3 - LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE DU MOUVEMENT

humérale.La stabilité de l’articulation dépendessentiellement de 5 facteurs :1 – les ligaments GH qui fonctionnent comme

de véritables « rênes «2 – la capsule3 – les muscles de la coiffe des rotateurs,« liga-

ments actifs »4 – la version et l’action de « pivot » de la tête

humérale5 – le vide intra-articulaire

Important:1 – la laxité GH est normale et nécessaire2 – différencier l’hyperlaxité

« constitutionnelle » de l’hyperlaxité« acquise » (sportif : lancer, armé)

3 – savoir différencier la laxité qui estnormale ou une variation du normal, del’instabilité qui est pathologique etimpose la recherche d’une lésioncausale.

4 – lors de l’examen clinique, savoirdistinguer l’évaluation de la laxité: tiroir,signe du sillon… des tests d’instabilité:appréhension, recentrage…

III – Coiffe des rotateurs et longueportion du biceps (LPB):Stabilité,centrage,mobilitéPour permettre une très grande mobilité auniveau GH,les ligaments sont « laxes » dans laplupart des positions.Les muscles de la coiffedes rotateurs fonctionnent comme de vérita-bles « ligaments actifs »,pour stabiliser,main-tenir le centrage de l’articulation et éviter l’as-cension de l’humérus proximal lors de lacontraction du deltoïde.La LPB participe aussià la stabilisation de la tête humérale. Lesmuscles de la coiffe assurent un centrage dyna-mique permanent dans les différents plans del’espace.Il est important de souligner l’une descaractéristiques essentielles de l’épaule,à savoirle déséquilibre entre :� des stabilisateurs antérieurs et rotateurs inter-nes très puissants : sub-scapulaire et desmuscles « extrinsèques » : pectoralis major,terres major, latissimus dorsi,

� et des stabilisateurs postérieurs et rotateursexternes relativement « faibles »:terres minoret surtout l’infra-spinatus qui assure à lui seul90 % de la force de rotation externe,mouve-ment essentiel dans le fonctionnement del’épaule.

Important:1 – infra-spinatus muscle clé de la fonction

de l’épaule assurant la presque totalitéde la rotation externe et le centrage de latête humérale en élévation,

2 – savoir mettre en évidence et évaluer ledéséquilibre entre rotateurs externes etrotateurs internes, clé du programme de

rééducation de certaines instabilités« multidirectionnelles » (isocinétisme).

IV – L’espace « sous-acromial » (fig.3)L’espace sous-acromial et la bourse séreusesous-acromio-deltoïdienne ont été considéréscomme la « 2e articulation de l’épaule »(Duplay).La cavité articulaire est pratiquementaussi large que celle du genou.Sur le « plan-cher » se situe la coiffe des rotateurs et la LPB,la voûte est représentée par l’arche acromio-coracoïdienne:bord antéro-inférieur de l’acro-mion,ligament coraco-acromial et la face infé-rieure de l’articulation acromio-claviculaire.C’est dans cet espace particulièrement solli-cité dans les différentes activités,notammenten élévation et rotations qu’évolue la patho-logie dégénérative de la coiffe des rotateurs.

Important:1 – bien évaluer le « défilé » du supra-

épineux et les différentes causes deconflit (fig.4),

2 – rôle important de la bourse séreuse,3 – ne pas oublier l’articulation acromio-

claviculaire.

V – « L’articulation » scapulo-thoracique (fig.1)

A – SuspensionLe trapèze et l’angulaire de l’omoplate « leva-tor scapulae » supportent le poids du memb-re supérieur en position debout.Ils sont aidéspar la clavicule,véritable « barre de connec-tion » entre le scapulum et le squelette axial(thorax).Les ligaments coraco-claviculaires,« ligaments suspenseurs » supportent lememb-re supérieur dans la plupart des activités. Ilsont une insertion étendue sur la surface infé-rieure de la partie distale de la clavicule,depuisle tubercule coronoïde jusqu’à la capsule del’articulation AC.Quand ces ligaments sontrompus (luxations AC de grade III) on assisteà la « chute du moignon de l’épaule et duscapulum,par désolidarisation entre le memb-re supérieur et le squelette axial.

B – Mouvements scapulo-thoraciquesLa glène effectue un mouvement de rotationpour se situer en permanence en face de lasurface articulaire de l’humérus proximal,mouvement complexe et synchrone mettanten jeu des « couples » musculaires successifs.Les muscles « clés » dans l’élévation du brassont le faisceau supérieur du trapèze qui mobi-lise le scapulum vers le haut,le grand dentelé(serratus anterior) qui provoque la rotation duscapulum vers l’avant,et le deltoïde antérieurqui soulève l’humérus,l’infra-spinatus assurantla rotation externe.

Important:1 – évaluer le rythme scapulo-huméral lors

de l’élévation du membre supérieur(ratio ½),

2 – savoir dépister les dysfonctionnements etdéséquilibres musculaires (dyscinésies),à différencier des atteintes paralytiques(nerf de Charles Bell),

3 – dans les luxations AC de grade III, cen’est pas la clavicule qui se déplace,mais le membre supérieur qui sedésolidarise du squelette axial. Pousserle coude vers le haut pour réduire laluxation, plutôt que d’appuyer sur laclavicule. Caractère illusoire des« strappings » acromio-claviculaires.

Fig.3 :L’arc fonctionnel est antérieur parrapport à l’acromion et non pas latéral.La zonede «conflit» se situe en avant,sous le tiersantérieur de l’acromion et l’articulation A.C.

Fig.4 : Le défilé du supra-épineux de Neer«supra-spinatus outlet ».- L’incidence radiographique en défilé : «supra-spinatus outlet view» de Neer et Poppen.

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dienne,ainsi que le type et l’efficacité des trai-tements antérieurement prescrits.

La douleur s’associe parfois à une impotencefonctionnelle,avec des difficultés croissantesdans les différentes activités,ou à une fatiga-bilité importante surtout pour soulever despoids ou lors du travail prolongé en élévationdu membre supérieur, avec un manque deforce.

II - L’examen cliniqueL’examen d’une épaule doit s’effectuer sur unsujet torse nu,assis sur un tabouret,demanièrecomparative,en se plaçant en arrière du patient.

A – Savoir observer� L’inspection est souvent très évocatrice:défor-mation,ecchymose, tuméfaction ou amyo-trophie des fosses sus et sous-épineuses…

� très importante est l’observation du rythmescapulo-huméral lors de l’élévation dumembre supérieur.L’existence d’une E.D.C.entraîne bien souvent une inversion du ryth-me,comme si la scapulo-thoracique prenaiten charge une partie du secteur de mobili-té pour protéger et compenser l’articulationG.H.douloureuse,

� il faut aussi savoir dépister un décollementanormal du bord spinal du scapulum,« dysci-nésie »,l’évaluer et le différencier d’une attein-te neurologique.

B – la palpationLamise en évidence de points douloureux auniveau de certaines « zones critiques » estimportante :�colonne cervicale�défilé inter-scalénique�contracture trapèze�coracoïde...

Mais aussi en se plaçant en arrière du patient,la main gauche « coiffant » le moignon del’épaule, pouce en arrière, en mobilisant le

VI – L’arc fonctionnel d’élévationest antérieur (fig.5)Le plan d’élévation maxima est centré sur leplan du scapulum et non dans le plan coronal(ABD) ou sagittal (Flexion).Le plan scapulaireoffre le plus de facilités et de hauteur en éléva-tion,c’est le plan de mobilité fonctionnel,utili-sé dans la plupart des activités.Le deltoïde anté-rieur et l’infra-épineux sont les muscles « clés »de l’élévation et non pas comme longtempsenseigné,le deltoïdemoyen et le supra-épineux,de même que le serratus antérior et le trapèzequimobilise le scapulumen avant et en dehors.

Le bilan de l’EpauleDouloureuse Chronique(EDC)«Un traitement ne peut être efficace que s’il repo-se sur un diagnostic lésionnel précis ».L’approche clinique de l’EDC est essentielle,doit aboutir à une suspicion lésionnelle et àla prescription d’explorations complémentai-res spécifiques.

Le bilan radiographique standard fait partiede ce premier bilan et comprend:�bilan radiographique: « série coiffe »– face,double obliquité,3 rotations– incidence « en défilé » du supra-épineux(Neer-Poppen)

�des clichés « sensibilisés »– Abduction contrariée (Leclercq)– Face stricte en décubitus dorsal (Railhac)++

L’échographie par sa simplicité, son explora-tion « dynamique » est parfois demandée encomplément de la consultation.Jamais deTDMou d’IRM de première intention.

I – À l’écoute du patientLa douleur est le signe d’appel le plus fréquent,qui motive généralement la consultation :douleur lancinante,variable,à recrudescencenocturne,insomniante… Il faut en faire préci-ser le siège,les irradiations,la rythmicité et lesfacteurs aggravants. Il s’agit habituellementd’une douleur siégeant au niveau de l’épaule,irradiant sur la face externe du bras, remon-tant parfois vers le trapèze et la colonne cervi-cale,pouvant évoquer une névralgie cervico-brachiale type C5-C6.

« La tendinite du long biceps est la plus fréquen-te des névralgies cervico-brachiales ».

« La cervicarthrose a bon dos ».

Il faut resituer cette douleur dans le contextesocio professionnel,éventuellement sportif etapprécier ses conséquences sur la vie quoti-

N° 35 - PAGE 4 - LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE DU MOUVEMENT

RE1 Élévation antérieure RI

Fig.5 : Le secteur fonctionnel : le pland’élévation maximum est centré sur lescapulum

Important:1 – évaluer toujours l’élévation antérieure,

secteur fonctionnel et non pasl’abduction ou la flexion,

2 – tenir compte de ce plan d’élévationmaxima dans les différents programmesde rééducation et pour les incidencesradiographiques.

VII – Le membre supérieur :UnitéfonctionnelleLa finalité du membre supérieur est de situerla main dans les différents plans de l’espacepour assurer la fonction de préhension.L’élévation et la rotation de l’épaule,la flexionextension du coude et la prono-supination agis-sent de concert pour positionner la main dansles différents types d’activités : lancer,pousser,soulever,atteindre la face…Une douleur chro-nique au niveau de l’épaule peut avoir un effetdélétère sur l’ensemble de la fonction dumembre supérieur (attitude antalgique).

Important:1 – toujours considérer et évaluer l’ensemble

du membre supérieur,2 – donner la priorité aux lésions de l’épaule

en cas de pathologies pluri-articulaires.

Fig.6 : Mobilité active

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membre supérieur avec la main droite, il estpossible demettre en évidence des zones anor-malement « sensibles » : Sub-scapulaire,LPB,Supra-épineux,Infra-épineux…Parfois,lors dela mobilisation en élévation et en rotation,onperçoit des crépitations,voire un ressaut quel-quefois audible comme un « accrochage » aupassage sous la voûte acromio-coracoïdienne.

C – Etude la mobilité (fig. 6)Elle doit être évaluée en actif (sujet assis etdebout),en passif (position allongée) et mesu-re essentiellement 3 mouvements :� la rotation externe (RE1) coude au corps� la rotation interne (RI) niveaumain sur rachis� l’élévation antérieureSeule l’élévation antérieure dans le plan duscapulum,secteur « fonctionnel » est mesuréeet non pas la flexion ou l’abduction.Desmouve-ments contrariés peuvent aussi être réalisés àce stade,ainsi qu’un testing musculaire.

D – Tests spécifiquesL’interrogatoire et l’examen clinique initial orien-tent déjà bien souvent vers un type de lésion,que certainesmanœuvres spécifiques ou «testsprovocateurs» vont essayer de confirmer.1 – les signes de « conflit » (fig. 7).

Le principe est d’amener la zone pathologiqueen conflit avec la voûte acromio-coracoïdien-ne,en mobilisant le membre supérieur et dedéclencher ainsi ou d’aggraver les phénomè-nes douloureux.Différentes manœuvres ontété décrites :� signe de Neer « Impingement sign »� signe de Hawkins� signe deYocum…

Le test de Neer est aussi intéressant et a unevaleur à la fois diagnostique et thérapeutique:l’injection d’un Corticoïde avec ou sans anes-thésique local par voie supérieure sous-acro-miale,dans la bourse séreuse, fait disparaîtrerapidement tout phénomène douloureux encas de pathologie « conflictuelle », la bursiteétant en grande partie responsable desdouleurs,du moins à la période initiale.2 – l’articulation acromio-claviculaire (AC).L’articulation AC fait partie « à part entière »de cette pathologie et doit être évaluée systé-matiquement :palpation,mobilisation antéro-postérieure et supéro-inférieure « touche depiano », test des « bras croisés » en adductionforcée parfois positif,mais non spécifique.3 – Topographie lésionnelle.Il est essentiel à ce stade d’évaluer les diffé-rents muscles de la coiffe des rotateurs et lalongue portion du biceps :�coiffe supérieure : supra-épineux:– test de Jobe…

�coiffe postérieure : infra-épineux ++ et Teresminor

N° 35 - PAGE 5 - LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE DU MOUVEMENT

– « charnière » en RE1 et RE2 (fig.8)– « Lag signs »– signe du clairon…

�coiffe antérieure : sous-scapulaire (fig.9)– « Lift off » sign– « Belly-press » test– signe de Napoléon…

� longue portion du biceps :– « palm-up » test– test deYergason– manœuvre d’O’Brien (lésions type SLAP)

III – Bilan général� Toujours évaluer l’ensemble de l’axe cervi-co-scapulo-brachial,

� ne pas oublier que de nombreuses douleurs« extrinsèques » sont « rapportées » au niveaude l’épaule : angor, sous-diaphragmatiques,pleuro-pulmonaires (Pancoast-Tobias),neuro-logiques : névralgie cervico-brachiale,Parsonage et Turner…

� Terminer par un bilan neuro-vasculaire :– participation radiculaire?– défilé cervico-thoracique?– nerf axillaire?....

Fig.8 : Coiffe postérieure (infra-spinatus) : charnière en RE1

Fig.9 : Coiffe antérieure (supra-scapulaire) : A : «Belly-press» test - B : «Lift off» test

Fig.7 :A :“Impingement sign”de NeerB :“Impingement test”de Neer

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consultations en pratique médicale géné-rale et spécialisée,

2 – la pathologie dégénérative de la coiffe desrotateurs et de la LBP en est la cause la pluscommune,

3 – l’examen clinique et le bilan radiographique« standard » première étape incontourna-ble,permettent bien souvent une approchediagnostic et pronostic suffisante,

4 – pas d’examens complémentaires « spécia-lisés » de première intention,mais pres-cription « judicieuse » et orientée,

5 – un traitement ne peut être efficace que s’ilrepose sur un bilan lésionnel précis,

6 – le traitement conservateur est souvent utilemais ne pas laisser passer le « moment »chirurgical,

7 – enfin, se souvenir que « l’épaule est unensemble musculaire « et que,contraire-ment à la hanche et au genou, la stabilitén’est ni osseuse,ni ligamentaire.La qualitéde la fonction dépendra essentiellementde l’évaluation,du traitement et de la réédu-cation des muscles de la coiffe des rota-teurs et des couples péri-scapulaires.

� Pr.M.MansatHôpital Purpan,Toulouse

Autant de pathologies qu’il faut savoir évoquer,éliminer par l’examen clinique et des explo-rations complémentaires si nécessaire (EMG,angiographie…)

IV – Score fonctionnelAu terme de ce bilan,un score fonctionneldevra être établi pour juger ultérieurement del’évolution et de l’efficacité du traitementproposé.De nombreux scores ont été décrits ;nous avons choisi le score de Constant,adop-té par la SECEC (Société Européenne de chirur-gie de l’Epaule et du Coude).Il s’agit d’un scoresur 100 points avec une pondération possibleen fonction de l’âge et du sexe :�douleur : 15 pts�activité : 20 pts�mobilisé : 40 pts� force : 25 pts

En synthèseAu terme de ce bilan clinique et radiogra-phique « standard »,une orientation diagnos-tic se dégage et certains éléments pronostic :âge,contexte,signes déficitaires,espace acro-mio-huméral ++.On peut schématiquementdistinguer 2 tableaux:

1 – épaule douloureuse « simple »Douleur relativement récente,mobilités activeet passive proches de la normale, signes dis-crets de conflit,aucun signe déficitaire,extré-mité proximale de l’humérus parfaitementcentrée avec un espace acromio-huméralnormal…:� un traitement conservateur est prescrit:repos,antalgiques,AINS?....et début d’un program-me de rééducation spécifique visant àmain-tenir l’amplitude articulaire,à conserver ourétablir un rythme et un équilibre scapulo-huméral normaux.

� on peut discuter à ce stade de l’intérêt d’uneinfiltration de Corticoïdes par voie hautesous-acromiale,dans la bourse séreuse sous-acromio-deltoïdienne,dont l’effet est souventspectaculaire et confirme le diagnostic.

� un nouveau bilan de surveillance est réali-sé au bout de 3mois :en cas de non amélio-ration ou de récidive un avis spécialisé estsouhaitable.Mais la plupart de ces lésionsguérissent avec un traitement conservateurbien conduit,« si on leur en donne le temps ».Donc patience! informez,conseillez et rassu-rez le patient.

2 – Epaule douloureuse «complexe» et«suspecte»

Douleurs anciennes et rebelles, signes défici-taires à l’examen : supérieurs, supéro-posté-rieurs,antérieurs ou globaux,avec une amyo-trophie et un bilan radiographique standardévocateur : signes de conflit et surtout dimi-nution de l’espace acromio-huméral (< 7mm).

Bien différencier sur le plan pronostic l’ex-centration permanente de l’humérus proximalet l’excentration « fonctionnelle » lors de lacontraction du deltoïde, coude au corps(Leclercq) ou en décubitus dorsal.� un avis spécialisé est fortement conseillé demanière à préciser le bilan clinique et à choi-sir la meilleure exploration complémentairepour le cas particulier:(IRM,arthro-IRM,Arthro-scan…) ce qui permettra d’aboutir à undiagnostic précis et à un traitement adapté.

� si ce traitement reste parfois conservateur ilne faut pas laisser passer l’heure de la chirur-gie qui doit parfois être relativement rapideet répondre à des impératifs précis danscertains cas :– lésion traumatique du sujet jeune– lésion du sous-scapulaire– lésions supéro-postérieures…

Une expectative « intempestive » peut aboutirà l’extension des lésions avec une dégénéres-cence musculo-tendineuse irréversible et despossibilités chirurgicales limitées.

Conclusions1 – La pathologie douloureuse de l’épaule est

l’une des causes les plus fréquentes de

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� Fiches EFA,éditées par l’ODM : l’épaule

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L’anatomie et lamécanique de l’épaule condui-sent à la détérioration tendineuse progressivequi peut être suivie d’une arthropathie tardi-ve,que l’on peut appeler « omarthrose secon-daire à la détérioration de la coiffe » ou « cuff-tear arthropathy » (Neer).Il s’agit d’une patho-logie locale de l’épaule.La tendinopathie calcifiante et la rétractioncapsulaire ressortissent à des chapitres générauxdes maladies rhumatismales, le rhumatisme àapatite et l’algodystrophie.L’épaule n’y repré-sente qu’une localisation parmi bien d’autres.

A – La détériorationtendineuse chronique

La pathologie tendineuse de l’épaule d’essencemécanique peut traverser schématiquementtrois périodes.

La première période est la tendinite simple,inflammatoire,à coiffe intacte et à radiogra-phie normale.C’est un syndrome essentielle-ment douloureux ressenti généralement aprèsun effort et progressant vers une douleurpermanente,persistant au repos et trouvantune recrudescence nocturne. L’examenclinique est celui d’une épaule douloureusesimple, sans conflit antérieur,avec des signesdifférents selon qu’il s’agit d’une tendinite dusus-épineux ou du long biceps.

La deuxième période est la tendinose dégéné-rative pré-arthrosique qui crée une défaillan-ce progressive de la coiffe et du long biceps.Des perforations trophiques, complétées ounon de déchirures secondaires micro –oumacro– traumatiques,aboutissent à des ruptu-res partielles de la coiffe.Les tableaux cliniquessont variés avec une plus grande fréquencedes épaules douloureuses globales,des signesde conflit antérieur et de limitation articulai-re. La radiographie standard paraît encorenormalemais la manœuvre de Leclerc,ou l’in-cidence de Railhac,visualise l’ascension de latête humérale.

La troisième période est celle de l’omarthrosesecondaire et des luxations de l’épaule sénile.La perte du contact glénohuméral par la dispa-rition plus ou moins complète de la coiffeconduit à une arthrose glénohumérale de gravi-té variable,parfois curieusement bien tolérée,mais qui peut aboutir à une grande invalidité.

Trois aspects cliniques sont à reconnaître :� l’épaule douloureuse hémorragique prise àtort pour une fracture

� la fausse rétraction capsulaire,qui correspondà une incarcération de la tête dans l’espacesous-acromial contre l’acromion et non pasà une rétraction de la capsule (contrairementà une opinion répandue,la dégénérescencetendineuse ne s’associe pas habituellementà la rétraction capsulaire)

� la fausse paralysie de l’épaule,pouvant égarervers des hypothèses neurologiques.

La radiographie standard fait le diagnostic :�ascension de la tête humérale vers l’acro-mion, rétrécissant l’espace sous-acromial etpouvant mêmemontrer un contact acromio-huméral avec néarthrose

�modifications trochitériennes,à type d’atro-phie

�modifications de la glène et de la tête humé-rale qui sont parfois le siège de remaniementsarthrosiques.

Le traitement est tributaire du stade anatomo-clinique de la détérioration tendineuse qui peutêtre facilement établi –pour le rhumatologue–par la simple radiographie standard des épau-les,à condition d’être de bonne qualité.�Stade 1 de tendinobursite.Infiltration localed’un corticoïde en suspension.La techniquedoit être irréprochable et les cibles sont labourse séreuse sous-deltoïdienne et la cham-bre glénohumérale.Une seule infiltration suffitdans la grande majorité des cas.

�Stade 2 d’insuffisance de la coiffe.Le traite-ment est plus complexe car les infiltrationslocales de corticoïdes ne sont plus une solu-tion satisfaisante à elle seule.On a recours àune rééquilibration musculaire qui vise àredonner une bonne stabilité glénohuméralesans solliciter une coiffe «malade ».La réédu-cation desmuscles stabilisateurs et abaisseursde l’épaule doit être effectuéemanuellementpar le kinésithérapeute en éliminant tout exer-cice de mécanothérapie stéréotypée.En casd’échec se discute un geste chirurgical quisupprime le conflit acromio-trochitérien.

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Aspect médical de l’épauledouloureuse chronique

Nous ne nous intéresserons qu’aux seules périarthrites étant bien entendu qu’il existe denombreuses autres causes d’épaule rhumatismale (inflammatoire,infectieuse,omarthroseprimitive,etc).

Dissection anatomique montrant la coiffe desrotateurs et la voûte acromio-coraco-claviculaire avec les zones potentielles deconflits

Radiographie de face vraie de l’épaule endécubitus (incidence de Railhac)

Coiffe des rotateurs

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�Stade 3 d’omarthrose secondaire.Il n’est plusquestion d’orienter la rééducation vers unerécupération intégrale de la fonction del’épaule.La physiothérapie,la crénothérapieet l’adaptation des gestes fonctionnels de lavie courante en fonction du handicap sontla base du traitement. Les formes évoluéesinstables, pourvoyeuses de luxations nonréductibles,d’impotence fonctionnellemajeu-re du membre supérieur conduisent parfoisà proposer une arthroplastie totale.

B – La tendinopathiecalcifianteLa périarthrite calcifiante de l’épaule se rencon-tre chez le sujet jeune avec une nette prédo-minance féminine.Les calcifications sont leplus souvent bilatérales.Elles sont souvent asso-ciées à d’autres calcifications péri-articulaires,l’épaule n’étant que la localisation la plusfréquente et la plus évocatrice d’une maladieplus générale,le rhumatisme à apatite.

Sur le plan radioclinique,il convient d’opposer :� les formes stables,de découverte radiolo-gique,muettes ou paucisymptomatiques.Al’épaule,les calcifications siégeant sur la coif-fe et tout particulièrement sur le sus-épineuxpeuvent cependant,du fait de cette situationet d’un volume excessif, créer des phéno-mènes de conflits avec le ligament acromio-coracoïdien.Les signes cliniques et l’évolu-tion sont ceux décrits dans la détériorationde la coiffe sous le terme de conflit antérieur(impingement).

� les formes instables : l’originalité des calci-fications du rhumatisme à apatite est de sedéstabiliser brutalement et d’inonder lestissus mous avoisinants (le plus souvent unebourse séreuse) avec des microcristauxd’apatite, créant un accident aigu de typemicrocristallin.A l’épaule, il s’agit le plussouvent d’une migration vers la bourse sous-deltoïdienne donnant une bursite aiguë ousuraiguë réalisant le tableau de l’épaule aiguëhyperalgique.On en connaît certaines formesmajeures, pseudo-arthritiques ou pseudo-infectieuses car elles s’accompagnent designes inflammatoires locaux pouvant allerjusqu’à la rougeur cutanée avec tuméfactionde l’épaule, et de signes généraux fébrilesavec accélération de la vitesse de sédimen-tation globulaire. L’évolution est très carac-téristique sur les radiographies successives,montrant l’effacement progressif de la calci-fication qui devient plus floue et dont l’ima-ge s’étale en dessinant souvent la boursesous-deltoïdienne.La calcification disparaîtalors totalement ou partiellement.

Le traitement de la périarthrite calcifiante del’épaule est étroitement subordonné à laclinique :

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pas à des épaules entièrement bloquées.Cecin’est pas surprenant puisque l’on sait que ladéchirure de la chambre articulaire au coursd’arthrographies thérapeutiques amélioresensiblement la mobilité de l’épaule.

Le traitement est bien codifié : distension dela chambre articulaire au cours de l’arthro-graphie suivie d’une mobilisation immédiatede l’épaule. La rééducation doit être nondouloureuse et prolongée dans le temps.

� Pr.Bernard Fournié*Centre de Rhumatologie – CHU Purpan –Toulouse

�Abstention dans les formesmuettes ou pauci-symtomatiques

�Attitudes variables dans les formes stablesmaismécaniquement gênantes : tentatives médi-cales d’éradication de la calcification, traite-ments physiothérapiques symptomatiquescomportant notamment des exercices de faci-litation du passage du tendon et de sa calcifi-cation sous la voûte acromio-coracoïdienne,ablation chirurgicale de la calcification.Il faut insister ici sur la prudence avec laquel-le il faut interpréter l’existence d’une ouplusieurs calcifications radiovisibles chez unpatient souffrant de l’épaule.Il arrive souventqu’elles n’interviennent pas dans l’explica-tion de la gêne fonctionnelle dont la vraieraison doit être recherchée ailleurs (calcifi-cations innocentes).

�Attitudes univoques dans les accidents de lamigration aiguë de l’épaule hyperalgique :repos articulaire,glace,anti-inflammatoiresnon stéroïdiens et surtout infiltration localed’un dérivé cortisonique en suspension.Enprincipe,une seule infiltration suffit à maîtri-ser l’inflammationmicrocristalline de la bour-se sous-deltoïdienne.

C – La rétraction capsulaireLa rétraction capsulaire est une algoneuro-dystrophie sympathique réflexe de l’épauledont elle partage les étiologies dominées parles traumatismes,le terrain particulier,le tableauradioclinique et l’évolution générale.

Formes cliniques. Si l’atteinte de l’épaule dansun syndrome épaule-main fait évoquer rapi-dement l’algodystrophie,il n’en est pas demêmedans l’« épaule gelée » isolée,considérée à tortcomme une affection locale de l’épaule d’au-tant que dans la majorité des cas on ne retro-uve aucune circonstance étiologique et quel’on incrimine alors un terrain particulier,comme le diabète,l’hyperthyroïdie ou un étatpsychonévrotique.Il importe dans ce cas :�de réaliser un examen clinique soigneux dela main à la recherche de petits nodules derétraction palmaire et/ou de coussinetsphalangiens

�de rechercher,sur de bons documents radio-logiques comparatifs des deux épaules,unediscrète déminéralisation de la tête humérale

�de vérifier éventuellement par la scintigra-phie osseuse ou les moyens de l’imagerie(IRM) l’hyperfixation et/ou les signaux osseuxhabituels de l’algodystrophie

�de pratiquer une arthrographie qui visuali-sera la restriction de la chambre articulaireet éliminera toute autre cause de limitationdouloureuse de l’épaule.Il est intéressant denoter que la coiffe est toujours intacte dansles épaules très bloquées.L’association perfo-ration de la coiffe-rétraction capsulaire estrare et, lorsqu’elle existe,elle ne correspond

Capsulite rétractile. Traitementsmédicaux simples ou compliquésC. Palazzo, M. RevelRevue de Rhumatologie, vol. 77, juin 2010-09-07

Mise au point intéressante sur la capsuliterétractile et sur sa prise en charge qui n’est passimple.Les différentes méthodes thérapeutiques sontévoquées soit par voie générale (antalgiqueAINS), soit localement (corticoïdes ou acidehyaluronique).La physiokinésithérapie bien conduite semble lecomplément indispensable à tout traitement.Il faut se souvenir que, comme dans toutealgodystrophie, l’évolution reste favorale avec letemps.

Doit-on opérer toutes les luxationsgléno-humérales antérieures ?P. Mansat, N. BonnevialeRevue du Rhumatisme, Monographie, n° 77, 2010

Excellente mise au point sur un sujet toujours endiscussion. Compte tenu du risque de récidivechez des patients jeunes ayant une activité àrisque, la stabilisation chirurgicale réparatricedoit être conseillée pour prévenir le risque derécidive et surtout pour diminuer le caractèrearthrogène de ces épaules.

Efficacité et tolérance de l’acidehyaluronique au cours del’omarthrose sans rupture de coiffe(étude multicentrique).E. Noël et coll.,Revue du Rhumatisme, n° 76, 2009

Cette étude multicentrique (39 patients) montreque le traitement de l’omarthrose sans rupture decoiffe est intéressant (1 ou 2 injections d’acidehyaluronique), bien toléré et efficace.Le score moyen de douleur de l’épaule traitée estpassé de 61,2 à 37,1.

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Imagerie des ruptures de la coiffedes rotateurs et des conflits

sous acromiauxL’imagerie des lésions de la coiffe des rotateurs et des conflits sous acromiaux a beaucoupbénéficié de l’apparition des techniques d’imagerie en coupes,en particulier de l’échographieet de l‘IRM.Ces examens facilitent les diagnostics,mais ils permettent aussi de mieuxcomprendre la physiopathologie et le retentissement clinique des lésions rencontrées.Après un bref rappel d’anatomie et de biomécanique sur l’espace sous-acromial,nousenvisagerons les différents moyens d’exploration avec leur apport diagnostique.

Rappels anatomiques etbiomécaniquesL’espace sous-acromial est un défilé étroit,d’en-viron 1 cm de hauteur,occupé presque entiè-rement par la masse des tendons de la coiffedes rotateurs,celle-ci n’étant séparée de la faceinférieure de l’acromion et des autres élémentsde la voûte que par la fine bourse sous-acro-mio-deltoïdienne (fig.1).Lors desmouvementsdu bras,cette bourse facilite le glissement entrela face superficielle de la coiffe et la voûte supé-rieure constituée par les faces inférieures del’acromion,du ligament acromio-coracoïdien,de l’articulation acromio-claviculaire et la faceprofonde de l’apophyse coracoïde.La coiffedes rotateurs est unmanchon tendineux conti-nu,point de convergence des muscles supra-épineux en haut, infra-épineux et teres minoren arrière et sub-scapulaire en avant.L’intervalledes rotateurs, situé entre la partie antérieuredu tendon supra-épineux et la partie haute dutendon sub-scapulaire,comprend le tendondu long biceps recouvert par le ligament cora-co-huméral.Lors des mouvements de l’épau-le, les rapports entre la coiffe et la voûte semodifient.En raison de l’étroitesse du défilé,toute modification constitutionnelle ou acqui-se des éléments anatomiques de la région rétré-cissant l’espace,pourront induire des conflits

avec pour conséquence des bursites et/ou deslésions extrinsèques de la coiffe.

Moyens d’explorationLes examens d’imagerie complètent toujoursun examen clinique rigoureux ; celui-ci doittoujours orienter vers une ou plusieurs hypo-thèses diagnostiques. Les radiographies quirestent indispensables en première intention,bénéficient aujourd’hui des techniques numé-riques et du centrage radioscopique.En casde suspicion de conflit sous-acromial et delésions de la coiffe,le bilan radiologique comp-rend habituellement des incidences de l’épau-le de face en double obliquité avec le bras

successivement en rotation neutre, interne etexterne,ainsi qu’un profil sous-acromial (profilde Neer).Une autre incidence,validée par desconférences de consensus,doit être rajoutéeà ce bilan : la radiographie de face vraie endécubitus (incidence de Railhac) ; ce clichéoffre une bonne analyse de tous les élémentsosseux de la région,mais montre aussi l’arti-culation acromio-claviculaire de face et l’espa-ce sous-acromial en position de décubitus,sensibilisant ainsi l’ascension vers le haut dela tête humérale en cas de rupture étendue dela coiffe.Le scanner simple est avantageuse-ment remplacé par un arthroscanner ou parfoisun bursoscanner,qui renseignent mieux surles structures articulaires et péri-articulaires del’épaule (fig.2).Toutefois,aujourd’hui,ce sontles techniques non irradiantes, l’échographieet l’imagerie par résonancemagnétique (IRM)qui sont le plus utilisées en complément desradiographies.L’échographie,exploration peucoûteuse et d’accès facile,permet une analy-se parfaite des tendons et des bourses de glis-sement,de façon statique et dynamique (fig.3).Elle bénéficie aussi dumode doppler-énergiequi met en évidence les zones d’hypervascu-larisation « inflammatoire ».Par contre,l’écho-graphie reste très insuffisante pour l’étude del’articulation elle-même,des os et des rapportsanatomiques.L’IRM est de plus en plus deman-dée,surtout dans un contexte pré-chirurgicalet dans les cas où les radiographies et l’écho-graphie ne suffisent pas.Elle permet des coupesdans les plans coronal oblique,axial et sagit-tal,avec des images ayant un contraste élevéentre les différents tissus d’une part,les zones

Fig.1 : (a) radiographie de l’épaule de face en double obliquité,bras en rotation neutre,montrantun espace sous-acromial normal (b)correspondance anatomique avec le tendon supra-épineuxrecouvert de la bourse sous-acromio-deltoïdienne

Fig.2:arthro-burso-scanner avec reconstructioncoronale montrant une rupture du tendon supra-épineux avec dissection associée.

Fig.3 : échographies de l’épaule : tendon supra-épineux normal avec son insertiontrochitérienne (a) ; technique de doppler-énergie montrant des zones inflammatoires(en rouge) dans une rupture partielle d’untendon avec bursite associée (b)

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normales et pathologiques d’autre part (fig.4).Les coupes sont généralement effectuées enséquences T1, dites « anatomiques », et enséquences de type T2 avec suppression dusignal de la graisse (STIR,DP Fat Sat,T2 Fat Sat);ces dernières font apparaître en hypersignalnet les structures liquidiennes et œdémateu-ses qui sont le plus souvent pathologiques.L’utilisation de gadolinium par voie veineuseou intra-articulaire (arthro-IRM) peut sensibi-liser un diagnostic,mais elle n’est que rarementindiquée dans la pathologie sous-acromiale.

Apports de l’imagerieQuelle que soit la technique utilisée, l’image-rie doit répondre à trois questions :dans quelétat est la coiffe des rotateurs ? Les différentsconstituants de « la voûte acromio-coraco-clavi-culaire « sont-ils normaux ? La bourse sousacromio-deltoïdienne est-elle pathologique?

1 - Coiffe des rotateursChaque tendon de l’épaule sera analysé defaçon systématique.Nous prendrons l’exem-ple de la pathologie du tendon supra-épineux,en écartant les calcifications tendineuses durhumatisme à apatite,la capsulite rétractile etles instabilités,qui posent des problèmes spéci-fiques.Les lésions tendineuses dégénérativesou d’hypersollicitation évoluent souvent selonun schéma qui va d’une simple « tendinite »aux rupturesmassives de la coiffe,compliquéesd’une lésion du tendon du long biceps et d’unearthrose gléno-humérale secondaire.Tout débute généralement par une « tendini-

te », une « tendinose », une « tendinopathiesimple »,termes qui traduisent une souffranceou une dégénérescence du tendon,mais sanslamoindre solution de continuité anatomique.Les radiographies sont normales.L’échographiepeut montrer une petite zone hypoéchogènedans le tendon qui en IRM se traduira par unhypersignal modéré,mais non liquidien, surles séquences T2 FS ou T1 FS après injectionintra-veineuse de gadolinium.A ce stade de« tendinite clinique »,ces examens retrouventsouvent une bursite sous acromio-deltoïdien-ne associée, avec épanchement (« tendino-bursite ») qui explique en grande partie lesdouleurs et la gêne fonctionnelle. Dans laplupart des cas, la guérison survient avec lerepos et le traitement médical.

Fig.4 : IRM de l’épaule en coupes coronales :aspect normal en T1 (a) et rupture de la coiffedes rotateurs associée à une bursite et unearthrose acromio-claviculaire en DP FS (b)

Fig.5 : IRM en séquences DP FS d’unetendinopathie simple (a) et d’une rupturepartielle de la face profonde du tendon supra-épineux (b)

Fig.6 :perforation du tendon supra-épineux vueen échographie (a) et en IRM en DP FS (b)

Fig.7 : rupture complète de la coiffe desrotateurs : radiographie montrant l’ascensionvers le haut de la tête humérale (a) et l’IRM enT2 permettant d’apprécier la rétractionimportante du moignon tendineux (b)

Parfois, les douleurs sont plus tenaces, récidi-vantes et ceci peut traduire déjà une rupturepartielle, non transfixiante du tendon.A cestade, les radiographies sont toujours norma-les ; seules l’échographie et l’IRM montrent larupture partielle,de taille variable qui siègeselon le cas,à la face profonde du tendon,àsa face superficielle ou dans sa partie centra-le (fig.5).Ces ruptures qui peuvent aussi dissé-quer le tendon, correspondent à des zonesanéchogènes en échographie et de type liqui-dien,avec hypersignal net sur les séquencesde type T2 FS de l’IRM.En progressant ces ruptures partielles abou-tissent à une perforation,c’est-à-dire à une déhis-cence transfixiante du tendon.Cette brèche,évidente en échographique et en IRM sur lesséquencesT2,est entourée d’unmoignon tendi-neux qui par son épaisseur empêche l’ascen-

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sion vers le haute de la tête humérale etexplique la normalité des radiographies (fig. 6).Avec l’évolution,et parfois lors d’une contrain-te mécanique excessive,les ruptures partiellesévoluent vers une rupture complète du tendonsupra-épineux qui pourra aussi s’étendre auxautres tendons de la coiffe et à l’intervalle des

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rotateurs.Il s’agit du tableau clinique de « l’épau-le pseudo-paralytique »,décrit par De Sèze.Lesclichés de face de l’épaule peuvent montrerune subluxation vers le haut de la tête humé-rale avec conflit acromio-huméral (fig.7),cedéplacement étant parfois sensibilisé par unemanœuvre d’abduction contrariée ou par lamise en décubitus.Cette ascension vers le hautde la tête humérale ne s’observe toutefois quedans les ruptures étendues de la coiffe inté-ressant les tendons supra et infra-épineux.Dansces ruptures, le rôle de l’échographie,de l’ar-throscanner ou de l’IRM,est de fournir desrenseignements,à visée surtout chirurgicale,sur le siège, la taille et les berges de la ruptu-re, mais aussi sur les muscles des tendonsrompus.L‘excentration de la tête humérale en

décubitus et l‘existence d’une éventuelle arthro-se gléno-humérale débutante seront recher-chées.Tous les tendons et lesmuscles de l’épau-le devront être étudiés.La taille de la brèchetendineuse est quantifiée ainsi que le degréde rétraction du moignon tendineux parrapport à la tête humérale.L’involution grais-seuse des muscles des tendons rompus s’ana-lyse sur des coupes de scanner ou d’IRM (fig.8),l’échographie étant d’un apport moins fiable.L’excentration de la tête humérale s’étudie nonseulement dans le plan coronal,mais aussidans les plans sagittal et axial. L‘analyse desdonnées recueillies renseigne sur les possibi-lités chirurgicales ; il faut savoir qu’une ruptu-re conjointe des tendons supra et infra-épineuxassociée à une dégénérescence graisseuse desmuscles correspondants est toujours d’unpronostic fonctionnel péjoratif.

2 - « Voûte acromio-coraco-claviculaire»La voûte supérieure s’étudie sur des radiogra-phies de l’épaule de face et de profil,mais aussisur les images reformatées d’un scanner oud’un arthroscanner et sur les 3 plans de coupes

tendon supra-épineux (fig.11).Dans le plan coronal, l’IRM, le scanner et laradiographie de face vraie,permettent d’ap-précier la pente acromiale latérale ; habituel-lement la face inférieure de la partie antérieurede l’acromion est horizontale.Au-delà de 10°,une pente inféro-latérale peut être pathogène,mais c’est surtout à partir de 20° que celle-ci,en « fermant » la partie latérale du défilé sousacromial,entraîne des bursites et des lésionsextrinsèques de la coiffe (fig.12).Demême unacromion en position basse par rapport à laclavicule ou une hypertrophie de la face infé-rieure d’un os acromiale peuvent être à l’ori-gine des conflits.Le ligament acromio-coracoïdien,qui formela partie antéro-supérieure de la voûte,mesu-re moins de 2 mm d’épaisseur à l’état normal.Certains échographistes ont démontré qu’unligament hypertrophique est une source poten-tielle de conflit avec les éléments sous-jacents.Ce ligament est aussi très bien visualisé sur lescoupes sagittales de l’IRM.Une ossification ouune hyperostose de son enthèse acromiale,

Fig.8:coupe sagittale d’IRM enT1 montrantl’involution graisseuse des muscles supra-épineux,infra-épineux et teres minor,secondaireà une rupture des tendons correspondants.

Fig.10: acromion « crochu » de type 3entraînant un épanchement bursal sous-jacentsur une coupe sagittale d’IRM en séquence T2

Fig.9 : les 3 types d’acromion dans le plansagittal

de l’IRM.L’analyse de tous ses éléments serasystématique.Les anomalies de l’acromion sont recherchéessur les clichés en profil sous acromial,mais aussisur les plans sagittaux en IRM.Morisson etBigliani ont décrit trois types d’acromion:acro-mion plat (type 1),acromion à courbe conca-ve vers le bas (type 2),acromion « crochu» danssa partie antérieure (type 3) (fig.9).Plus récem-ment des auteurs ont attiré l’attention sur unacromion convexe vers le bas (type 4).Dans lalittérature et selon notre expérience,seuls lesacromions de types 3 et 4,qui par leur formerétrécissent l’espace sous-acromial,sont à l’ori-gine de lésions extrinsèques de la coiffe etsurtout de bursites (fig.10).Dans le plan sagittal, l’acromion présentenormalement une pente à direction antéro-supérieure,d’environ 10 à 20°.Un acromion àpente antéro-inférieure favorise les conflitsantéro-supérieurs avec la bourse sous acro-mio-deltoïdienne et la partie antérieure du

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N° 35 - PAGE 12 - LA LETTRE DE L’OBSERVATOIRE DU MOUVEMENT

mais aussi une insertion atypique sous l’acro-mion,favorisent les conflits.En scanner et en IRM, l’espace situé entre laface profonde de la coracoïde et la partie anté-rieure de l’humérusmesure auminimum 1 cmà l’état normal.Dans ce défilé glisse le tendonsub-scapulaire entouré de bourses synoviales;tout rétrécissement de moins de 8 mm de cetespace pourra engendrer un conflit antérieur,bien décrit par Gerber,avec bursite et rema-niements de structure,pouvant aller jusqu’à larupture du tendon sub-scapulaire (fig.13).L’arthrose acromio-claviculaire que l’on dépis-te facilement sur les radiographies de l’épau-le de face vraie,est à l’origine de nombreusesdouleurs antérieures de l’épaule,mais l’os-téophytose inférieure qu’elle induit, favoriseaussi les conflits avec les structures adjacen-tes que sont la face superficielle de la coiffe etla bourse sous-acromio-deltoïdienne (fig.14).

3 - Bourse sous-acromio-deltoïdienneA l’état normal la bourse est une cavité prati-quement virtuelle dont les parois de type syno-vial sont particulièrement fines.Entourant « encapuchon » la coiffe des rotateurs,elle permetle glissement entre celle-ci et la voûte.Dansl’espace sous acromial, toute irritation de labourse par une hypersollicitation répétée,unerupture complète de la coiffe ou de sa facesuperficielle,une anomalie constitutionnelleou acquise d’un élément de la « voûte acromio-coraco-claviculaire », pourra entraîner uneinflammation de ses parois et un épanchementplus ou moins important (fig. 15). Chez lespatients,cette bursite est à l’origine de la plupartdes douleurs de la pathologie sous-acromiale,mais aussi de la limitation fonctionnelle secon-daire à l’épanchement qui gêne les mouve-ments.L’hyperhémie des parois de la bourse sedépiste facilement par l’échographie enmodedoppler-énergie et les séquences T1 FS aprèsinjection intra-veineuse de gadoliniumde l’IRM.Ces deux examensmontrent aussi de façon trèsdistincte les épanchements bursaux.L’échographie est couramment utilisée dans leguidage des aspirations d’épanchement et lesinjections intra-bursales dedérivés cortisoniques.

ConclusionMême si elles sont très fréquentes, les lésionsde la coiffe des rotateurs ne résument pas lapathologie sous-acromiale. Il faut toujourspenser aussi à des anomalies de la bourse sousacromio-deltoïdienne et de la « voûte acromio-coraco-claviculaire «,qui sont à l’origine denombreux conflits.Aujourd’hui, devant desdouleurs persistantes de l’épaule, un bilananatomique précis est possible par les tech-niques non irradiantes que sont l’échographieet l’IRM. Toutefois les images doivent êtretoujours corrélées avec les données cliniquescar les « dissociations anatomo-cliniques « sontfréquentes.

� Pr.J.-J.RailhacHôpital Purpan,Toulouse

Fig.14:arthrose acromio-claviculaire avecostéophytose inférieure dépistée sur un clichéde face vraie en décubitus (a),responsabled’un conflit avec la bourse et la facesuperficielle du tendon supra-épineux commele montre ces coupes coronales d’IRM enséquencesT1 (b)

Fig.11: acromion à pente antéro-inférieure surune coupe sagittale d’IRM en séquence T2 FS,rétrécissant l’espace sous-acromial antérieur etentraînant une bursite liquidienne

Fig.12: « acromion plongeant » latéral avecune pente inféro-latérale favorisant un conflitavec bursite et anomalies de la facesuperificielle du tendon supra-épineux.Coupescoronales en séquence T1 (a) et T2 FS (b)

Fig.13: conflit antérieur dépisté par une coupeaxiale d’IRM en séquence DP FS: espace sous-coracoïdien de 5 mm associé à une rupturepartielle du tendon sub-scapulaire.

Fig.15: Epanchements de la bourse sous-acromio-deltoïdienne,révélés par des coupescoronales d’IRM en séquence T2,entraînantdes douleurs et une limitation fonctionnelle :tendino bursite (a),perforation du tendonsupra-épineux (b) et rupture complète (c)

a

b

a

b

a b c

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2.Chirurgie réparatriceLa réparation est le traitement spécifique destendinopathies rompues de la coiffe des rota-teurs.

a. Suture simpleLa suture simple peut être définie par la remiseen contact sans tension de 2 éléments tissu-laires macroscopiquement sains (réparationdirecte).Cette définition conditionne la limi-te du geste thérapeutique,à savoir la répara-bilité ou pas des ruptures dégénératives. Lasuture simple est réalisée lors d’une chirurgieà ciel ouvert,chirurgie assistée par arthrosco-pie (mini-open) ou exclusivement par arthros-copie.La réparation à ciel ouvert est pratiquée parune voie d’abord delto-pectorale ou latéraleou supérieure.La réparation assistée par arthros-copie consiste en un temps d’arthroscopiqueexploratoire et thérapeutique gléno-huméral,puis sous-acromial,auquel succède une répa-ration tendineuse par un abord chirurgicalréduit sans désinsertion du deltoïde.

IntroductionL’histoire naturelle des tendinopathies rompuesde la coiffe des rotateurs n’est actuellement quepartiellement connue.La prévalence et l’im-portancedes ruptures dégénératives des tendonsde la coiffe des rotateurs vont croissantes avecl’âge,et suggèrent une progression lésionnelleau cours du temps.Ces ruptures et leur évolu-tion ne sont pas toujours symptomatiques.Il n’ya pas de parallélisme anatomo-clinique.Douleuret incapacité peuvent correspondre à un étatinconstant ou transitoire dans l’histoire natu-relle des tendinopathies rompues.

Le principe du traitement médical de premiè-re intention peut donc être retenu pour lestendinopathies non rompues de la coiffe desrotateurs,mais également pour les tendino-pathies rompues.En effet 40 à 80 % des patientsayant une rupture dégénérative des tendonsde la coiffe des rotateurs s’améliorent de façonacceptable avec le traitement conservateur àmoyen et long terme,et ce d’autant que leurprise en charge a été précoce.

Le traitement chirurgical est une propositionconceptuellement logique dans un but de récu-pération fonctionnelle,en cas d’épaule doulou-reuse,faible ou invalidante,après échec du trai-tement conservateur.

Principes du traitementchirurgicalTrois types de chirurgie peuvent être propo-sés :�chirurgie « non réparatrice » à visée antal-gique portant sur la bourse sous-acromiale,le ligament coraco-acromial,la face inférieurede l’acromion, l’articulation acromio-clavi-culaire et le tendon du chef long du musclebiceps brachial ;

�chirurgie « réparatrice » si les conditions anato-miques et le contexte général le permettent :réinsertions tendineuses,transfert tendineux,lambeaux musculaires ;

�chirurgie prothétique.

1.Chirurgie non réparatrice oudébridement

La chirurgie non réparatrice ou débridementcomporte un ensemble d’actes dont les prin-cipaux sont : l’acromioplastie, la bursectomiesous-acromiale, la régularisation des lésionstendineuses, la section du ligament coraco-acromial,la ténotomie ou la ténodèse du cheflong du biceps brachial et les gestes sur l’arti-culation acromio-claviculaire.(Fig.1)

Cinq séries de cas décrivant le débridementarthroscopique ont montré une proportion debons et très bons résultats homogène et supé-rieure à 50 % et la possibilité de suites opéra-toires relativement courtes.En revanche,2 sériesde cas décrivant le débridement à ciel ouvertmontrent des résultats divergents.

En dépit de l’absence d’étude comparantchirurgie à ciel ouvert et arthroscopie, il estrecommandé de réaliser cette chirurgie nonréparatrice ou débridement par techniquearthroscopique.(Fig.2)

Place du traitement chirurgical(Bases, Indications, Résultats)

Fig 1: Principe de l’acromioplastie.

Fig 3: Réinsertion de la coiffe par des pointstrans-osseux.

Fig 4: Réinsertion de la coiffe sur des ancresintra-osseuses.

Fig 2:Vue de l’acromion sous arthroscopie (A)avant l’acromioplastie,et (B) aprèsl’acromioplastie.

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Néanmoins,tous ces gestes d’exploration et deréparation peuvent être réalisés exclusivementpar technique arthroscopique.Différents dispositifs médicaux sont utilisablespour réaliser les réinsertions tendineuses.Desimples points trans-osseux peuvent être utili-sés lors de la chirurgie à ciel ouvert (Fig.3) ;des ancres,des vis,des agrafes,ou des boutonssont indispensables pour la chirurgie arthros-copique (Fig.4).Aucune étude ne permet depréciser la supériorité d’un système de fixa-tion sur un autre,ni de définir un nombre opti-mal de dispositifs médicaux àmettre en placeen fonction de la taille de la rupture.

b. Avancements myo-tendineux et lambeauxL’avancement myo-tendineux a été proposépour les ruptures étendues du supra-épineuxet de l’infra-épineux n’autorisant pas une répa-ration directe sans tension.Le principe résidedans l’avancement du corps musculaire endirection de la rupture.

Les lambeaux sont proposés pour traiter lesruptures transfixiantes étendues et non répa-rables par suture ou réinsertion trans-osseusesans tension.Le principe réside dans la réali-sation d’une transposition tendino-musculai-re permettant l’apport d’un tissu de comble-ment actif dans la rupture. Les principauxlambeaux utilisés sont les lambeaux de del-toïde,grand dorsal,et grand pectoral.

Ces techniques ont été décrites uniquementdans des séries de cas de faible effectif et dansle cadre d’une chirurgie à ciel ouvert.

Le choix entre ces 2 techniques avancementmyo-tendineux ou lambeaux dépend de l’éten-due de la rupture,de l’importance de la rétrac-tion tendineuse et du degré d’infiltration grais-seuse du ou des corps musculaires.

3.Arthroplastie prothétiqueDeux types de prothèse sont utilisables : pro-thèse humérale (simple ou à cupule mobile)

(Fig. 5) et prothèse totale inversée (cupulehumérale concave et sphère glénoïdienne)(Fig.6).Cette chirurgie est exclusivement prati-quée à ciel ouvert.

Stratégie de prise en chargeselon le type de lésionsLe traitement médical est une étape initialeincontournable dans la prise en charge desruptures dégénératives des tendons de la coif-fe des rotateurs.Le traitement chirurgical peutêtre envisagé en aval de cette première sé-quence,dont la durée varie en fonction deséléments cliniques, généraux et morpholo-giques.

1.Ruptures partiellesLes traitements chirurgicaux proposés dansles ruptures partielles sont :� le débridement,� la réparation.Ces gestes peuvent être isolés ou associés,etil est recommandé de les pratiquer par tech-nique arthroscopique exclusive.

Malgré l’absence de données comparativesprouvant la supériorité de la réparation parrapport au débridement, il est recommandéde réparer une rupture touchant plus de 50 %de l’épaisseur du tendon plutôt que de réali-ser sa simple régularisation.Toutefois, cetterecommandation ne fait pas l’unanimité ausein des professionnels interrogés.

2.Ruptures transfixiantes

a. Ruptures transfixiantes accessibles à laréparation directe

Les ruptures transfixiantes,accessibles à la répa-ration directe,ont été définies par une réduc-tibilité per-opératoire du tendon sans tensionet une infiltration graisseuse de la coiffe destade ≤ 2.

Très peu d’études ont vraiment analysé lesfacteurs pronostiques de la réponse au trai-tement chirurgical.Quelques séries de cas avec analyse univariéeont montré que:� l’étendue de la rupture (extension à l’infra-épineux),

� la rétraction du tendon,� la diminution de la hauteur sous-acromialeradiographique préopératoire,

� la dégénérescence graisseuse (infiltrationétendue évaluée en tomodensitométrie),

� l’activité professionnelle (travail de force),apparaissaient associées à un taux de ruptu-re secondaire plus élevé et/ou à de moinsbons résultats cliniques après réparation,quecelle-ci soit pratiquée à ciel ouvert ou pararthroscopie.

Les données issues des résultats d’analysesmultivariées de la réparation directe à cielouvert de ruptures transfixiantes,suggèrent queles principaux facteurs pronostiques péjora-tifs du résultat clinique sont :�une longue durée d’évolution des signes pré-opératoires ;

�un état médical général altéré (évalué par legrade ASA);

� l’existence d’un tabagisme actuel ou passé(> 40 paquet-année) ;

� l’étendue de la rupture déterminée lors del’intervention (surface ≥ 5 cm2).

Par ailleurs, la présence d’une rupture dusubscapulaire peut être un facteur pronostiquepéjoratif des suites opératoires de la répara-tion.

Les procédés de réparation par chirurgie à cielouvert,mini-open ou par arthroscopie ont desrésultats comparables à travers des séries decas.Les 3 procédés sont acceptables actuelle-ment.Par conséquent le choix de la techniquedépend des habitudes du chirurgien,et despossibilités techniques locales.

Les indications des réparations tendineusesdes ruptures transfixiantes dégénératives sontles ruptures de coiffe symptomatiques,sur uneépaule souple,chez un patient actif et motivé,avec un bon état musculaire (infiltration grais-seuse de la coiffe de stade ≤ 2).

b. Ruptures transfixiantes non accessibles à laréparation directe

Les ruptures transfixiantes non accessibles àla réparation directe peuvent être définiescomme des ruptures « non réductibles sanstension » ou avec une dégénérescence grais-seuse > 2.

Un traitement envisageable dans cette indi-cation est le débridement par arthroscopie.Les facteurs pronostiques sur résultat cliniquedu débridement des ruptures transfixiantesdémontrés dans la littérature sont :Fig 5: Prothèse d’épaule anatomique Fig 6: Prothèse d’épaule inversée.

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� la dégénérescence graisseuse de l’infra-épineux et du subscapulaire (moins bon résul-tat clinique en cas d’infiltration étendue) ;

� le score de Constant initial (meilleur résultatclinique si score de Constant préopératoireplus élevé).La chirurgie prothétique peut être proposéedans les épaules pseudo-paralytiques par rup-ture massive de la coiffe des rotateurs.L’indication de prothèses dans ce cas doit êtremesurée et n’être retenue qu’après épuisementdes autres options thérapeutiques.

c. Ruptures transfixiantes avec omarthroseDeux types d’arthroplastie sont envisageablesdans cette indication:les prothèses huméraleset les prothèses totales inversées.Les prothèsestotales inversées dans cette indication ont étéactuellement les plus étudiées.

Les omarthroses excentrées sont des indica-tions d’arthroplasties humérales ou totalesinversées.

Il n’existe pas de données probantes dans lalittérature quant aux facteurs pronostiques durésultat clinique de ce type de chirurgie.Cependant,concernant la prothèse humérale,les études décrivent une faible proportion de

bons résultats cliniques postopératoires dansles conditions préopératoires suivantes :� la faible hauteur sous-acromiale ;� l’omarthrose excentrée ;� l’érosion de la glène ;� la subluxation gléno-humérale antérieure ;� la dégénérescence graisseuse de l’infra-épineux ou du subscapulaire.La fragilité des données sur la longévité prothé-tique à 10 ans incite à ne pas proposer l’ar-throplastie trop tôt dans l’histoire du patient,et à tenir compte de son espérance de vielorsque ce traitement est envisagé.

3.RééducationLa rééducation est recommandée pour tousles patients ayant bénéficié d’une chirurgie derupture de la coiffe des rotateurs de l’épauleou d’une arthroplastie,quelle que soit la tech-nique chirurgicale proposée.

� Pr.P.MansatHôpital Purpan,Toulouse(D’après H.A.S.Prise en charge chirurgicaledes tendinopathies rompues de la coiffedes rotateurs de l’épaule chez l’adulte.Recommandations,Mars 2008.)

Type de chirurgie Type de rupture Type d’études (n) Suivi (années) Score préop(Constant)

Score postop(Constant)

% résultats bonset excellents

% patientssatisfaits

Débridement pararthroscopie

Partielle

Transfixiante

2SRM/1SR(214)

2SRM/4SR(935)

2 à 10

2 à 5

50 et 54/100

38 à 48/100

82/100

58 à 68/100

79

51 à 72

82 à 89

78 à 94

Réparation directe- à ciel ouvert

- assistée pararthroscopie

- par arthroscopie

Transfixiante

Transfixiante

Partielle

Transfixiante

2SP/1SRM/11SR(1068)

3SR(175)

2SR(46)

2SP/1SRM/6SR(1079)

2 à 6

3 à 7

2 et 3

2 à 6

21 à 56/100

UCLA17 et 23/35

46 à 52/100

63 à 83/100

UCLA33/35

78 à 87/100

56 à 88

80 à 93

90 et 94

84 à 100

86 à 98

Avancementsmyo-tendineux

Transfixiante 1SP/1SR(46)

2,5 à 5 56 et 58/100 68 et 74/100 – –

Lambeaux Transfixiante 8SR(223)

3,5 à 10 22 à 46/100 47 à 74/100 – 75 à 90

Arthroplastie

- hémiprothèse

- prothèse totaleinversée

Transfixiante

Transfixiante

3SR (50)

2 SRM (120)

1 à 5

3

18 et 24/100

23 et 30/100

37 et 47/100

60 et 66/100

_

84 à 88

_

Tableau 1: Résultats de la littératureconcernant les différentes optionschirurgicales pour le traitement desépaules douloureuses chroniques.

Cotation des résultats selon le scorede Constant:excellents ≥ 80 points/100;bons 65 à 79/100;moyens:50 à 64/100;mauvais < 50 points/100

Cotation des résultats selon le scoreUCLA (séries américaines):très bons 34-35 points/35;bons 28 à 33/35;moyens 21 à 27/35;mauvais 0 à 20/35

n = nombre de patients;SP = série prospective;SR = série rétrospective;SRM = série rétrospectivemulticentrique;UCLA:University of California LosAngeles

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La lettre de l’Observatoire du Mouvementest une publication de

L’Observatoire du MouvementChez Bruno Mansat - Route de Gauré 31130 Balma

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Impression : SIAN° ISSN: 2105-7451

Dépôt légal : septembre 2010

L A L E T T R EProchain numéro de l’Observatoire du Mouvement :

Lettre n° 36Ostéoporoseen question

L E S I T E

www.observatoire-du-mouvement.com

Conseil d’administrationPrésident: ChristianMansatSecrétaire Général: Claude HuertasTrésorier:Michel Mudet

Conseil scientifiquePrésident: Jean-Jacques RailhacSecrétaire:Michel MansatSciences fondamentales: Jean-Pierre Bali, DragoslavMitrovic, Jean-Pierrre Pujol, Pierre ValdiguiéTraumatologie et Sport: François Bonnel, Michel Mansat, PierreMansat, Gérard Saillant, Christian BenezisOrthopédie pédiatrique: Jean-Philippe CahuzacUrgence: Jean-louis DucasséMédecine physique Rééducation: Pierre ChâImagerie: Julie Vial, Jean-Paul Barbut, Philippe Adam,Jean Prère, Gérard Richardi, Olivier LoustauGynécologie:Marie-Paule BersaniRhumatologie: Bernard Auvinet, Francis Blotman,Bernard Fournié, BernardMazières, AndréMonroche,Jacques Rodineau, Éric VignonPharmacie: Christianne DupeyronPodologie: Claude Huertas, Jean-Paul WeberKinésithérapie: Patrick Castel, Alain LapêtrePsychiatrie: PhilippeMost, Cécile LestradeGériatrie: Claude Jeandel, Yves RollandMédecine du Sport: Fabien Pillard, Daniel Rivière,Maryline SalvetatCardiologie du Sport: Jacques TricoireBiomécanique: Pascal Swider

Il fallait bien que le plus ancien des « Mansat » donne son avis sur ce sujet qui a fait,en 1967,l’objet de sa thèse « épaule douloureuse et enraidie,place de la chirurgie ».J’avoue,pour reprendre un terme rugbystique,avoir été très largement débordé par la familledepuis.À qui la faute ? Au genou,à la hanche,au pied ?L’épaule est une articulation passionnante mais complexe.Sa pathologie dégénérative,inflammatoire,microcristalline,neurotrophique et neurologique est un motif de consulta-tion très fréquent en rhumatologie,médecine du sport et orthopédique - traumatologique.La biomécanique de cet ensemble articulaire conditionne en grande partie les problèmesd’instabilité ou de conflit très en vogue.Pour comprendre et traiter ces désordres lésionnels et fonctionnels,il faut garder enmémoi-re plusieurs notions :� l’épaule est un complexe articulaire� c’est une énarthrose peu emboîtée où la mobilité prime sur la stabilité� les structures capsulo-ligamentaires sont laxes.� chacun des mouvements de l’humérus entraîne la participation des différents élémentsde ce complexe articulaire

� sa dynamique n’est possible que si l’importante musculature péri-articulaire assure simul-tanément la stabilité et la mobilité.

Les méthodes d’imagerie moderne et l’arthroscopie permettront de mieux connaître etcomprendre les causes et conséquences de cette pathologie,souvent conflictuelle,avec ousans instabilité,sur les structures anatomiques :bourrelet glénoïdien,capsule et ligaments,tendons et cartilage articulaire.Elles viennent confirmer l’examen fonctionnel de l’épaule basé sur de nombreux tests.La présence de la voûte acromio-coracoïdienne permet de séparer cette pathologie endeux groupes :� épaule conflictuelle supérieure observée surtout chez le sujet âgé (antérieur, supérieuret postérieur) avec des lésions de la coiffe

� épaule instable et douloureuse surtout inférieure (antéro-inférieur, inférieur et postéro-inférieur) observée surtout chez le sportif (technopathie ou accidents).L’absence de corrélation anatomo-clinique rend difficile la décision thérapeutique.

Avant tout traitement, il importe de faire un diagnostic fonctionnel et lésionnel,présent età venir et surtout d’adapter le geste thérapeutique,chirurgical,arthroscopique ou médicalà la gravité fonctionnelle.Les méthodes conservatrices en particulier la rééducation à base de travail gestuel et muscu-laire doivent occuper une large place avant toute tentative chirurgicale.

Christian Mansat

OpinionUn ami est partiFrancisque COMMANDREL’analyse de la bibliographie thématique dansde nombreux domaines concernant l’appareillocomoteur, le sport, le processus de vieillis-sement, m’a souvent permis de te rencontrer,d’apprécier tes idées novatrices, d’être séduitpar ton intelligence, l’originalité de tes propo-sitions et surtout d’avoir envie de mieux teconnaître.C’est ce que nous avons fait pendant denombreuses années.Ton aide a été précieuse dans la conceptionet la réalisation de l’ODM.Je n’oublierai jamais cette phrase que tu asécrite inspirée de Montaigne « Il n’est quel’on doive tant recommander que l’activité etla vigilance. Notre vie n’est quemouvement ».Nous nous sommes souvent rencontrés,parfois confrontés, j’ai toujours admiré la clar-té de ton intelligence.Tu as permis à l’OBSERVATOIREDUMOUVE-MENT d’exister, de collaborer avec leG.L.M.M.S.Ton souvenir restera très présent dans nosmémoires et dans nos cœurs.Ch. M.