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239 Ann Dermatol Venereol 2006;133:239-42 Articles scientifiques Mémoire original Manifestations cutanées des inhibiteurs du récepteur du facteur de croissance épidermique S. HANNOUD (1), O. RIXE (2), J. BLOCH (2), F. LE PELLETIER (3), B. LEBRUN-VIGNES (4), A. DOARIKA (1), D. KHAYAT (2), O. CHOSIDOW (1) Résumé Introduction. Les inhibiteurs du récepteur du facteur de croissance épidermique (rEGF) représentent une nouvelle stratégie pour traiter certains cancers solides à des stades avancés (côlon et rectum, ovaire, pancréas…). Leurs effets secondaires cutanés commencent à être décrits. Observations. L’étude concernait 2 femmes et 2 hommes, sans antécédents d’acné, inclus dans un protocole thérapeutique utilisant les inhibiteurs du rEGF. L’âge moyen était de 52 ans. Les cancers primitifs étaient : cérébral, ovarien, mammaire et indéterminé. Les inhibiteurs du rEGF étaient le gefitinib (ZD1839) (2 cas), le carnetinib (CI1033) et le cétuximab (IMC-C225). L’éruption a débuté 7 jours après l’initiation du traitement et était faite de papulo-pustules folliculaires et de papules érythémateuses, monomorphes, prédominant au visage, au décolleté et au dos. Il n’y avait pas de comédons ni d’éléments nodulaire ou kystique. La sévérité de l’éruption a conduit à l’arrêt du traitement chez 2 malades, suivi d’une régression complète des lésions cutanées. Chez un malade, la réduction des doses de gefitinib (IMC-C225) a conduit à la résolution progressive de l’éruption. L’examen anatomopathologique des papulo-pustules montrait une folliculite aiguë suppurée. Chez les 2 malades prélevés, l’écouvillonnage d’une lésion pustuleuse et du nez a mis en évidence des colonies de staphylocoque doré coagulase positive. Un traitement associant une doxycycline (100 mg/j) et un peroxyde de benzoyle a été prescrit pour une durée de 3 mois. L’évolution a été favorable, en moyenne en 2 semaines. Discussion. Les inhibiteurs du rEGF agissent en bloquant les mécanismes de la prolifération tumorale dans le traitement de certains cancers à des stades avancés ou résistants aux autres thérapeutiques. Notre série de quatre malades se rapproche des cas publiés, par la rapidité de survenue et le caractère monomorphe, papulopustuleux folliculaire, sans comédons, de l’éruption. Une réponse rapide aux cyclines et au peroxyde de benzoyle a également été observée dans la littérature. Ce traitement doit être rapidement mis en place et le malade préalablement informé des risques cutanés des inhibiteurs du rEGF. La physiopathologie de l’éruption reste inconnue. Les manifestations cutanées résulteraient probablement de l’interaction avec les fonctions des rEGF. Le mécanisme pourrait impliquer entre autres une surexpression des rEGF au niveau des kératinocytes et du follicule pileux. Summary Background. Inhibitors of epidermal growth factor receptors (EGFR) constitute a new alternative treatment for patients presenting certain advanced stage solid cancers (bowel, breast, ovary). Adverse cutaneous effects of these drugs are now starting to be described. Observations. Our study involved 2 men and 2 women with no previous history of acne included in a treatment protocol comprising EGFR inhibitors. Mean age was 52 years. The primary cancers were breast, ovary, bowel and unidentified. The EGFR inhibitors used were gefitinib (ZD1839) (2 cases), carnetinib (CI1033) and cetuximab (IMC-C225). Skin lesions appeared after 7 days and included erythematous papules and follicular pustules of the face, back and upper chest. No comedons were seen, and there were no nodules or cysts. The severity of the rash resulted in discontinuation of treatment in 2 patients with complete disappearance of skin lesions in both cases. In one patient, reduction of the dosage of gefitinib (IMC-C225) led to gradual resolution of the rash. Histological examination of papules and pustules concluded on an acute suppurative folliculitis. Smears and cultures of a nasal lesion and pustules revealed coagulase-positive Staphylococcus aureus in 2 patients. Combined doxycycline 100 mg daily and benzoyl peroxide was prescribed for 3 months and a favourable outcome was achieved after a mean 2 weeks. Discussion. EGFR inhibitors act by inhibiting mechanisms of tumour proliferation in certain cancers at advanced stages or refractory to other treatments. Our findings in these four patients are similar to the published cases in terms of rapid onset of monomorphous, papulopustular, follicular eruption without comedons. Rapid response to cyclines and benzoyl peroxide is also reported in literature. This treatment must be instituted rapidly and patients must be informed about the cutaneous side-effects of EGFR inhibitors before the start of therapy. The pathophysiology of these eruptions is still unknown. Skin signs are probably due to interaction with EGFR functions, including overexpression of EGFR in keratinocytes and hair follicles. (1) Service de Médecine Interne, (2) Service d’Oncologie, (3) Service d’Anatomie Pathologique, (4) Service de Pharmacologie Clinique, AP-HP et Université Paris VI, Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris. Tirés à part : S. HANNOUD, Service de Médecine Interne, AP-HP et Université Paris VI, Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière, 47, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris. E-mail : [email protected] Skin signs associated with epidermal growth factor inhibitors. S. HANNOUD, O. RIXE, J. BLOCH, F. LE PELLETIER, B. LEBRUN-VIGNES, A. DOARIKA, D. KHAYAT, O. CHOSIDOW Ann Dermatol Venereol 2006;133:239-42

Manifestations cutanées des inhibiteurs du récepteur du facteur de croissance épidermique

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Ann Dermatol Venereol2006;133:239-42Articles scientifiques

Mémoire original

Manifestations cutanées des inhibiteurs du récepteur du facteur de croissance épidermiqueS. HANNOUD (1), O. RIXE (2), J. BLOCH (2), F. LE PELLETIER (3), B. LEBRUN-VIGNES (4), A. DOARIKA (1), D. KHAYAT (2), O. CHOSIDOW (1)

Résumé

Introduction. Les inhibiteurs du récepteur du facteur de croissance

épidermique (rEGF) représentent une nouvelle stratégie pour traiter

certains cancers solides à des stades avancés (côlon et rectum, ovaire,

pancréas…). Leurs effets secondaires cutanés commencent à être décrits.

Observations. L’étude concernait 2 femmes et 2 hommes, sans

antécédents d’acné, inclus dans un protocole thérapeutique utilisant les

inhibiteurs du rEGF. L’âge moyen était de 52 ans. Les cancers primitifs

étaient : cérébral, ovarien, mammaire et indéterminé. Les inhibiteurs

du rEGF étaient le gefitinib (ZD1839) (2 cas), le carnetinib (CI1033)

et le cétuximab (IMC-C225). L’éruption a débuté 7 jours après l’initiation

du traitement et était faite de papulo-pustules folliculaires et de papules

érythémateuses, monomorphes, prédominant au visage, au décolleté

et au dos. Il n’y avait pas de comédons ni d’éléments nodulaire ou

kystique. La sévérité de l’éruption a conduit à l’arrêt du traitement chez

2 malades, suivi d’une régression complète des lésions cutanées. Chez

un malade, la réduction des doses de gefitinib (IMC-C225) a conduit à la

résolution progressive de l’éruption. L’examen anatomopathologique

des papulo-pustules montrait une folliculite aiguë suppurée. Chez les

2 malades prélevés, l’écouvillonnage d’une lésion pustuleuse et du nez a

mis en évidence des colonies de staphylocoque doré coagulase positive.

Un traitement associant une doxycycline (100 mg/j) et un peroxyde de

benzoyle a été prescrit pour une durée de 3 mois. L’évolution a été

favorable, en moyenne en 2 semaines.

Discussion. Les inhibiteurs du rEGF agissent en bloquant les

mécanismes de la prolifération tumorale dans le traitement de certains

cancers à des stades avancés ou résistants aux autres thérapeutiques.

Notre série de quatre malades se rapproche des cas publiés, par la

rapidité de survenue et le caractère monomorphe, papulopustuleux

folliculaire, sans comédons, de l’éruption. Une réponse rapide aux

cyclines et au peroxyde de benzoyle a également été observée dans la

littérature. Ce traitement doit être rapidement mis en place et le malade

préalablement informé des risques cutanés des inhibiteurs du rEGF. La

physiopathologie de l’éruption reste inconnue. Les manifestations

cutanées résulteraient probablement de l’interaction avec les fonctions

des rEGF. Le mécanisme pourrait impliquer entre autres une

surexpression des rEGF au niveau des kératinocytes et du follicule pileux.

Summary

Background. Inhibitors of epidermal growth factor receptors (EGFR)

constitute a new alternative treatment for patients presenting certain

advanced stage solid cancers (bowel, breast, ovary). Adverse cutaneous

effects of these drugs are now starting to be described.

Observations. Our study involved 2 men and 2 women with no previous

history of acne included in a treatment protocol comprising EGFR

inhibitors. Mean age was 52 years. The primary cancers were breast,

ovary, bowel and unidentified. The EGFR inhibitors used were gefitinib

(ZD1839) (2 cases), carnetinib (CI1033) and cetuximab (IMC-C225). Skin

lesions appeared after 7 days and included erythematous papules and

follicular pustules of the face, back and upper chest. No comedons were

seen, and there were no nodules or cysts. The severity of the rash resulted

in discontinuation of treatment in 2 patients with complete

disappearance of skin lesions in both cases. In one patient, reduction of

the dosage of gefitinib (IMC-C225) led to gradual resolution of the rash.

Histological examination of papules and pustules concluded on an acute

suppurative folliculitis. Smears and cultures of a nasal lesion and

pustules revealed coagulase-positive Staphylococcus aureus in 2 patients.

Combined doxycycline 100 mg daily and benzoyl peroxide was prescribed

for 3 months and a favourable outcome was achieved after a mean

2 weeks.

Discussion. EGFR inhibitors act by inhibiting mechanisms of tumour

proliferation in certain cancers at advanced stages or refractory to other

treatments. Our findings in these four patients are similar to the

published cases in terms of rapid onset of monomorphous,

papulopustular, follicular eruption without comedons. Rapid response to

cyclines and benzoyl peroxide is also reported in literature. This treatment

must be instituted rapidly and patients must be informed about the

cutaneous side-effects of EGFR inhibitors before the start of therapy.

The pathophysiology of these eruptions is still unknown. Skin signs are

probably due to interaction with EGFR functions, including

overexpression of EGFR in keratinocytes and hair follicles.

(1) Service de Médecine Interne, (2) Service d’Oncologie, (3) Service d’Anatomie Pathologique, (4) Service de Pharmacologie Clinique, AP-HP et Université Paris VI, Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière, Paris.

Tirés à part : S. HANNOUD, Service de Médecine Interne,

AP-HP et Université Paris VI, Groupe Hospitalier Pitié-Salpêtrière,

47, boulevard de l’Hôpital, 75013 Paris.E-mail : [email protected]

Skin signs associated with epidermal growth factor inhibitors.S. HANNOUD, O. RIXE, J. BLOCH, F. LE PELLETIER, B. LEBRUN-VIGNES, A. DOARIKA, D. KHAYAT, O. CHOSIDOW

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S. HANNOUD, O. RIXE, J. BLOCH et al. Ann Dermatol Venereol2006;133:239-42

e récepteur du facteur de croissance épidermique

(rEGF) a été identifié dans plusieurs types de cancers

solides. Lorsqu’il est activé, il stimule les mécanismes

de la prolifération tumorale. Le blocage du rEGF constitue

une nouvelle stratégie dans le traitement de certains cancers

à des stades avancés (tête et cou, colon et rectum, ovaires,

prostate) ou résistants aux autres thérapeutiques [1, 2].

Les effets secondaires cutanés des inhibiteurs du rEGF

commencent à être décrits, l’éruption acnéiforme médica-

menteuse étant la plus connue [3]. Nous rapportons,

4 observations de complications cutanées chez des malades

traités par inhibiteurs du rEGF.

Observations

L’étude rétrospective concernait 4 malades inclus dans un

protocole thérapeutique utilisant les inhibiteurs du récepteur

du facteur de croissance épidermique (tableau I). Tous les

malades étaient traités pour des cancers solides métastati-

ques. Aucun malade n’avait d’antécédents d’acné, ni de prise

de médicaments inducteurs d’acné, sauf l’association de cor-

ticoïdes avec la chimiothérapie chez un malade. Tous ont dé-

veloppé une éruption acnéiforme dans un délai allant de 7 à

14 jours après l’instauration du traitement. Cette éruption

était faite de papulo-pustules folliculaires et érythémateuses,

monomorphes, prédominant au visage, au décolleté et au dos

(fig. 1, 2). Il n’y avait pas de comédons ni d’éléments nodulai-

res ou kystiques. Ces lésions étaient prurigineuses dans 2 cas.

Il n’y avait pas de signes généraux associés, notamment pas

de fièvre ni de myalgies ni d’arthralgies. La sévérité de l’érup-

tion cutanée conduisait à l’arrêt du traitement chez 2 mala-

des, suivi d’une régression complète des lésions cutanées. La

réintroduction du traitement induisait la réapparition de

l’éruption dans les mêmes délais. Chez un malade, la réduc-

tion des doses de gefitinib (IMC-C225) permettait la résolu-

tion progressive de l’éruption.

L’examen anatomopathologique des papulo-pustules mon-

trait un infundibulum folliculaire dilaté, comblé et parfois dé-

truit par un infiltrat polymorphe riche en polynucléaires

neutrophiles altérés. Cet aspect était évocateur de folliculite

aiguë suppurée (fig. 3). Il n’y avait pas de bactéries ni de levu-

res à la coloration au PAS. Chez les 2 malades prélevés,

l’écouvillonnage d’une lésion pustuleuse et du nez a mis en

évidence des colonies de staphylocoque doré coagulase positi-

ve. Un traitement associant une doxycycline (100 mg/j) et du

peroxyde de benzoyle était prescrit pour une durée de 3 mois.

L’évolution favorable, en moyenne en 2 semaines, permettait

Tableau I. – Caractéristiques des malades inclus.

Malades 1 2 3 4Âge (ans) 64 59 41 45Sexe F F M MCancer primitif cérébral ovarien colorectal indéterminéMétastases viscérales + + + +Inhibiteur du rEGF carnetinib gefitinib cétuximab gefitinib

(CI 1033) (ZD 1839) (IMC-C225) (ZD 1839)Chimiothérapie associée - + + -Délai d’apparition de l’éruption après traitement (jours)

7 7 7 14

Fig. 1. Papulo-pustules du décolleté.

Fig. 2. Éruption papulo-pustuleuse du visage.

L

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Manifestations cutanées des inhibiteurs du récepteur de l’EGF

la poursuite des inhibiteurs du rEGF. Chez un malade, l’arrêt

prématuré des cyclines a conduit à une récidive de l’éruption.

Celle-ci a été à nouveau sensible à la reprise de ce traitement.

D’autres signes cutanés étaient présents : une xérose chez

tous les malades, une alopécie diffuse chez 2 malades et des

paronychies des doigts et des mains dans 2 cas.

Discussion

À la liste déjà longue des médicaments inducteurs d’acné

(hormones, stéroïdes, dioxine, dérivés halogénés, antiépilep-

tiques, antituberculeux, vitamine B-12, disulfirame, lithium,

quinine, soufre,…), il faut ajouter les inhibiteurs de la voie de

transduction tyrosine kinase du récepteur du facteur de crois-

sance épidermique (rEGF).

Trois inhibiteurs du facteur de croissance sont fréquem-

ment utilisés en monothérapie ou en association à une chi-

miothérapie ou à une radiothérapie :

– le cétuximab (ICM-C225, Erbitux ®) est un anticorps mo-

noclonal dirigé contre le domaine extra-cellulaire du récep-

teur. En se liant à celui-ci, il empêche sa liaison à l’EGF,

bloque l’activation du récepteur et ainsi la chaîne de réactions

aboutissant à la prolifération cellulaire. Il est administré sous

forme d’injections intraveineuses, à la dose de 250 mg/m2 de

surface corporelle par semaine. Il est indiqué dans les tu-

meurs malignes à des stades avancés de la tête et du cou, du

colon et rectum, des ovaires et de la prostate [4, 5] ;

– le gefitinib (ZD 1839, IRESSA ®) est un inhibiteur sélectif

de la tyrosine kinase du récepteur. Il est prescrit par voie orale

à la dose de 250 à 500 mg par jour, dans les cancers pulmonai-

res à petites cellules, de la tête et du cou et des ovaires [6, 7] ;

– le carnetinib (CI 1033) est un inhibiteur de tous les types

de récepteurs. Les doses varient de 2 à 750 mg par jour. Il est

utilisé dans le traitement des cancers cérébraux, pulmonaires

à petites cellules, de la tête et du cou et colorectaux [8].

Les effets secondaires généraux surviennent chez 5 p. 100

des malades à type de fièvre, fatigue, nausées, vomissements

et diarrhées [7]. Plusieurs types de réactions cutanées secon-

daires ont été décrits.

ERUPTION ACNÉIFORME

C’est la réaction cutanée la plus commune, survenant chez

55 à 75 p. 100 des malades [9, 10]. Notre série de 4 malades se

rapproche des cas publiés par la rapidité de survenue et le ca-

ractère monomorphe, papulo-pustuleux, folliculaire, sans co-

médons de l’éruption [11, 12]. Ce n’est donc pas une acné à

proprement parler. En effet, l’effet antiprolifératif de ces trai-

tements empêche la formation d’une kératinisation infundi-

bulaire. Cette réaction survient précocement, le plus souvent

1 à 2 semaines après l’instauration du traitement. Elle reste

principalement localisée au visage et au tronc et épargne en

règle le cuir chevelu [13]. Les formes graves représentent

10 p. 100 des cas environ. L’évaluation de cette gravité prend

en compte l’intensité inflammatoire, l’extension des lésions

et le retentissement sur la qualité de vie. Ces trois paramètres

permettent de définir une gravité mineure, intermédiaire ou

majeure. La sévérité est dose-dépendante et plus importante

à fortes doses. Certains auteurs rapportent des formes plus

sévères avec le cétuximab avec la présence de croûtes hémor-

ragiques. Ils n’ont pas trouvé de corrélation avec le type tumo-

ral ni avec le phototype des malades [9]. Dans une étude

récente, les auteurs émettent l’hypothèse d’une corrélation

entre la réponse tumorale et la sévérité de l’éruption. Dans

une autre étude, ils ont cherché la relation entre la présence

et la sévérité de l’éruption et la survie [14].

Plusieurs traitements ont été testés. La réponse rapide aux

cyclines et/ou au peroxyde de benzoyle semble assez caracté-

ristique. Cependant, une résolution complète après réduc-

tion des doses et même une régression spontanée malgré la

poursuite du traitement ont été décrites [9]. Les rétinoïdes to-

piques en première intention ne devraient pas être utilisés

car ils seraient trop irritants. D’autre part, un essai de traite-

ment préventif par érythromycine locale à 4 p.100 et par aci-

de fusidique oral a été associé à un érythème facial, sans

lésions papuleuses ni pustuleuses. Les données actuelles ne

permettent pas de conseiller un traitement préventif des lé-

sions cutanées. La physiopathologie de l’éruption reste in-

connue. Elle pourrait faire intervenir la surexpression des

rEGF au niveau des kératinocytes basaux et des follicules pi-

leux. On a aussi évoqué l’induction d’une folliculite suppu-

rée à staphylocoque avec portage nasal.

SÉCHERESSE CUTANÉE

Elle est rapportée dans 36 p. 100 des cas. Le délai d’apparition

de la xérose après traitement est de 20 jours. Le traitement de

première ligne fait appel aux émollients. Les antihistamini-

Fig. 3. Image histologique d’une papulopustule : folliculite à polynucléaires neutrophiles.

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ques anti-H1 sont efficaces contre le prurit souvent associé.

Le mécanisme serait une perturbation de l’équilibre entre

prolifération et différenciation kératinocytaire [12].

PARONYCHIE ET GRANULOMES PÉRIUNGUÉAUX

Ce sont d’autres effets secondaires dermatologiques surve-

nant dans 10 p. 100 des cas. Des papules érythémateuses

granulomateuses indolores des doigts et des orteils peuvent

apparaître 2 à 12 mois après le début du traitement [15]. Ces

manifestations rappellent celles survenant après l’utilisa-

tion des rétinoïdes ou des inhibiteurs des protéases pour le

VIH-1 [16, 17]. Le mécanisme reste inconnu. Il pourrait être

en rapport avec la sécheresse cutanée. Les antiseptiques et

les dermocorticoïdes semblent efficaces. L’électrosection est

recommandée pour les lésions larges.

AUTRES EFFETS INDÉSIRABLES

Les autres effets indésirables décrits comprennent les ulcéra-

tions aphtoïdes des muqueuses orale et nasale (6 p. 100), une

alopécie, une éruption urticarienne (4 p. 100) [12].

Au total, les manifestations dermatologiques de ces traite-

ments anticancéreux sont fréquentes, avec un retentisse-

ment psychologique non négligeable et parfois des

conséquences sur l’observance du traitement. Il est impor-

tant de prévenir les malades de la forte probabilité de surve-

nue de ces effets secondaires avant la mise en route du

traitement. L’intervention thérapeutique face à une toxicité

cutanée doit être précoce. Elle est simple dans la majorité des

cas (peroxyde de benzoyle, cyclines, émollients).

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