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L'ECONOMIE Portrait d'entreprise du 20.2 au 26.2.2014 16 asque sur la tête, gilet fluo- rescent par-dessus le man- teau et lunettes de protection sur le nez. «Ce sont les consignes de sécurité d'ArcelorMittal que nous devons respecter puisque nous travaillons dans ses halles», explique d'abord Myriam Mul- ler, la directrice de Swirl (Smart wind integrated renewables Lët- zebuerg), avant d'entrer dans le vif du sujet: «Regardez comme elle tourne, ma belle», sourit-elle en pointant du doigt l'Estreya L2, une éolienne à axe vertical. Estreya la belle, c'est un projet que la start-up Swirl développe de- puis 2009. Une éolienne à axe ver- tical n'est en soi pas très révolu- tionnaire. Ce qui l'est en revanche dans le projet de la start-up, c'est la conception minutieuse qui tient compte du moindre détail. La sé- curité bénéficie ainsi d'une atten- tion toute particulière. Dans l'ate- lier de Swirl dans les halles d'Arce- lor à Dommeldange, l'éolienne tourne inlassablement. A l'aide d'une carte SIM et de plusieurs capteurs, fixés à différents endroits de cet engin aux allures de radar, Estreya communique en temps réel avec un ordinateur, lequel en- registre une foultitude de mesures. «Une éolienne qui se désagrège peut causer des dégâts énormes. Il faut sa- voir que le poids d'une aile atteint deux tonnes lorsqu'elle tourne à plein régime», note Myriam Mul- ler. Ce souci et cette précision sont uniques dans le domaine de l'éner- gie éolienne. Ainsi, Estreya est la C première turbine à être équipée d'un frein à disque qui permet d'interrompre le mouvement de rotation en un laps de temps très court. De plus, Swirl offre des contrats de maintenance et une ga- rantie de cinq ans. Une approche inédite dans ce secteur. Les maîtres mots dans la concep- tion de cette turbine sont perfor- mance, beauté et sécurité. La forme élégante et épurée des ailes ne peut cependant pas être réduite à un souci esthétique: «Il n'y a rien de mieux pour se servir de la force du vent qu'une aile. Ce sont les lois de la nature qui nous l'enseignent, nous n'inventons rien», dit Joseph Hess, le PDG de Swirl. Exportation Se lancer dans les éoliennes au Luxembourg est toutefois un pari osé, car le Grand-Duché n'est pas la terre la plus propice à l'exploita- tion de turbines. L'étude de l'ingé- nieur allemand Volker Kassera sur le potentiel éolien du site Belval en est un exemple: «C'est vrai qu'au Luxembourg, le vent n'atteint pas la puissance requise pour rendre les turbines vraiment rentables. Mais ponctuellement, l'on trouve des en- droits propices à l'installation d'une éolienne», précise Joseph Hess. De toute façon, la start-up mise essen- tiellement sur l'exportation d'Es- treya: «Il y a des marchés en Eu- rope qui sont faciles d'accès et où il existe des tarifs adaptés à l'énergie renouvelable. Les pays scandinaves, le Royaume-Uni et l'Irlande en font partie. Mais l'Afrique du Nord et l'Amérique latine sont également des marchés prometteurs, notam- ment parce que les infrastructures y sont peu développées», affirme le PDG. Et d'ajouter que le projet prend alors tout son sens, car per- mettre l'accès à l'électricité grâce à une énergie verte et peu coû- teuse peu contribuer à un déve- loppement positif dans ces pays. Le souci de produire de l'énergie durable est d'ailleurs au cœur des préoccupations des responsables de Swirl. «Estreya peut servir une vingtaine d'années. Ensuite, elle peut être entièrement recyclée. L'acier peut être fondu et réutilisé, brûler les ailes permet de produire de l'énergie et les composantes élec- triques peuvent également être récu- pérées ou recyclées. C'est l'idée d'une économie circulaire qui commence tout doucement à se frayer un che- min», explique Joseph Hess. Et ce cycle, Swirl veut pouvoir le mener du début à la fin. Mais Swirl a également l'ambi- tion de montrer la voie à la réin- dustrialisation du pays. Le fait de pouvoir travailler avec Arcelor- Mittal est d'ailleurs un atout ma- jeur. Swirl, qui paie les ouvriers d'Arcelor à l'heure, dispose de sou- deurs, de tourneurs et d'autres spé- cialistes de l'acier. «La qualité du travail de ces ouvriers est absolu- ment incroyable. Ils font de la den- telle avec de l'acier. Ce sont des mé- tiers qu'il faut revaloriser», s'en- thousiasme Myriam Muller. Si Swirl n'en est qu'au début, ses responsables voient déjà loin. Le but est d'arriver à un rythme de production industriel tout en maintenant les exigences en ma- tière d'efficacité et de sécurité. Jo- seph Hess et Myriam Muller y croyent d'ailleurs dur comme acier d'Arcelor: «Nous sentons que notre projet est soutenu tant par les auto- rités politiques qui nous aident que par nos partenaires. Tous les intéres- sés sont d'ailleurs les bienvenus pour nous rejoindre.» Dans les halles d'ArcelorMittal à Dommeldange se développe une start-up qui pose les jalons d'une nouvelle industrie. Une entreprise dans le vent Swirl construit des éoliennes belles, performantes et sûres MAURICE MAGAR - [email protected] Les ailes turquoises d'Estreya ne pèsent que 27 kilos chacune L'axe de rotation provient des ateliers d'ArcelorMittal Estreya servira bientôt pour la première fois. A la mi-mars, l'installa- tion d'une éolienne de Swirl est prévue sur le château d'eau de Ber- dorf. Un premier aboutissement après presque cinq années de tests et de perfectionnement. Une entreprise périlleuse, car il faut que le béton du château d'eau soit assez résistant pour accueillir Estreya. La commune de Berdorf, qui finance le projet, bénéficiera également d'un système de surveillance automatique pour assurer la sécurité de l'éolienne. Evidemment, en cas de pépin majeur, l'équipe de Swirl peut, grâce à un logiciel spécial, intervenir à distance. PREMIERE

U n e en trep rise d an s le ven t - swirl.energyswirl.energy/documents/MauriceMagar16LeJeudi2014.pdf · 16 L' E C ON OM IE Portrait d'entreprise du 20.2 au 26.2.2014 asque sur la

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L'ECONOMIE Portrait d'entreprise du 20.2 au 26.2.201416

asque sur la tête, gilet fluo-rescent par-dessus le man-

teau et lunettes de protectionsur le nez. «Ce sont les consignesde sécurité d'ArcelorMittal quenous devons respecter puisquenous travaillons dans ses halles»,explique d'abord Myriam Mul-ler, la directrice de Swirl (Smartwind integrated renewables Lët-zebuerg), avant d'entrer dans le vifdu sujet: «Regardez comme elletourne, ma belle», sourit-elle enpointant du doigt l'Estreya L2, uneéolienne à axe vertical.Estreya la belle, c'est un projet

que la start-up Swirl développe de-puis 2009. Une éolienne à axe ver-tical n'est en soi pas très révolu-tionnaire. Ce qui l'est en revanchedans le projet de la start-up, c'est laconception minutieuse qui tientcompte du moindre détail. La sé-curité bénéficie ainsi d'une atten-tion toute particulière. Dans l'ate-lier de Swirl dans les halles d'Arce-lor à Dommeldange, l'éoliennetourne inlassablement. A l'aided'une carte SIM et de plusieurscapteurs, fixés à différents endroitsde cet engin aux allures de radar,Estreya communique en tempsréel avec un ordinateur, lequel en-registre une foultitude de mesures.«Une éolienne qui se désagrège peutcauser des dégâts énormes. Il faut sa-voir que le poids d'une aile atteintdeux tonnes lorsqu'elle tourne àplein régime», note Myriam Mul-ler.Ce souci et cette précision sont

uniques dans le domaine de l'éner-gie éolienne. Ainsi, Estreya est la

C

première turbine à être équipéed'un frein à disque qui permetd'interrompre le mouvement derotation en un laps de temps trèscourt. De plus, Swirl offre descontrats de maintenance et une ga-rantie de cinq ans. Une approcheinédite dans ce secteur.Les maîtres mots dans la concep-

tion de cette turbine sont perfor-mance, beauté et sécurité. Laforme élégante et épurée des ailesne peut cependant pas être réduiteà un souci esthétique: «Il n'y a riende mieux pour se servir de la forcedu vent qu'une aile. Ce sont les loisde la nature qui nous l'enseignent,nous n'inventons rien», dit JosephHess, le PDG de Swirl.

ExportationSe lancer dans les éoliennes au

Luxembourg est toutefois un pariosé, car le Grand-Duché n'est pasla terre la plus propice à l'exploita-tion de turbines. L'étude de l'ingé-nieur allemand Volker Kassera surle potentiel éolien du site Belval enest un exemple: «C'est vrai qu'auLuxembourg, le vent n'atteint pas lapuissance requise pour rendre lesturbines vraiment rentables. Maisponctuellement, l'on trouve des en-

droits propices à l'installation d'uneéolienne», précise Joseph Hess. Detoute façon, la start-up mise essen-tiellement sur l'exportation d'Es-treya: «Il y a des marchés en Eu-rope qui sont faciles d'accès et où ilexiste des tarifs adaptés à l'énergierenouvelable. Les pays scandinaves,le Royaume-Uni et l'Irlande en fontpartie. Mais l'Afrique du Nord etl'Amérique latine sont égalementdes marchés prometteurs, notam-ment parce que les infrastructures ysont peu développées», affirme lePDG. Et d'ajouter que le projetprend alors tout son sens, car per-

mettre l'accès à l'électricité grâceà une énergie verte et peu coû-teuse peu contribuer à un déve-loppement positif dans ces pays.Le souci de produire de l'énergiedurable est d'ailleurs au cœur despréoccupations des responsablesde Swirl. «Estreya peut servirune vingtaine d'années. Ensuite,elle peut être entièrement recyclée.

L'acier peut être fondu et réutilisé,brûler les ailes permet de produirede l'énergie et les composantes élec-triques peuvent également être récu-pérées ou recyclées. C'est l'idée d'uneéconomie circulaire qui commencetout doucement à se frayer un che-min», explique Joseph Hess. Et cecycle, Swirl veut pouvoir le menerdu début à la fin.Mais Swirl a également l'ambi-

tion de montrer la voie à la réin-dustrialisation du pays. Le fait depouvoir travailler avec Arcelor-Mittal est d'ailleurs un atout ma-jeur. Swirl, qui paie les ouvriersd'Arcelor à l'heure, dispose de sou-deurs, de tourneurs et d'autres spé-cialistes de l'acier. «La qualité dutravail de ces ouvriers est absolu-ment incroyable. Ils font de la den-telle avec de l'acier. Ce sont des mé-tiers qu'il faut revaloriser», s'en-thousiasmeMyriamMuller.Si Swirl n'en est qu'au début, ses

responsables voient déjà loin. Lebut est d'arriver à un rythme deproduction industriel tout enmaintenant les exigences en ma-tière d'efficacité et de sécurité. Jo-seph Hess et Myriam Muller ycroyent d'ailleurs dur comme acierd'Arcelor: «Nous sentons que notreprojet est soutenu tant par les auto-rités politiques qui nous aident quepar nos partenaires. Tous les intéres-sés sont d'ailleurs les bienvenus pournous rejoindre.»

Dans les hallesd'ArcelorMittal àDommeldange se

développe unestart-up qui poseles jalons d'une

nouvelle industrie.

Une entreprisedans le vent

Swirl construit des éoliennesbelles, performantes et sûres

MAURICE MAGAR - [email protected]

Les ailes turquoises d'Estreya ne pèsent que 27 kilos chacune

L'axe de rotation provient des ateliers d'ArcelorMittal

Estreya servira bientôt pour la première fois. A la mi-mars, l'installa-tion d'une éolienne de Swirl est prévue sur le château d'eau de Ber-dorf. Un premier aboutissement après presque cinq années de testset de perfectionnement.Une entreprise périlleuse, car il faut que le béton du château d'eausoit assez résistant pour accueillir Estreya.La commune de Berdorf, qui finance le projet, bénéficiera égalementd'un système de surveillance automatique pour assurer la sécurité del'éolienne.Evidemment, en cas de pépin majeur, l'équipe de Swirl peut, grâce àun logiciel spécial, intervenir à distance.

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