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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie UNESCO 2009 CL/RA/MA/2009/PI/H/7

Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie ...unesdoc.unesco.org/images/0021/002146/214646f.pdf · 6.3. L’artisanat : ... en Tunisie, tout en tenant compte du rôle

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Secteur de la Culture

Bureau multipays del’UNESCO à Rabat

Diversité culturelleet dialogue interculturel

en Tunisie

UNESCO2009

CL/RA/MA/2009/PI/H/7

Diversité culturelleet dialogue interculturel

en Tunisie

UNESCO2009

CL/RA/MA/2009/PI/H/7

CADRE DE L’ÉTUDE :

Sur la base des expériences menées par le Bureau de l’UNESCO à Rabat dans le domaine de la diversité culturelle et les résultats de la rencontre sur le dialogue interculturel par le biais du patrimoine culturel au Maghreb qui s’est tenue du 29 novembre au 1er décembre 2007 à Casablanca1, le Bureau de l’UNESCO et l’ISESCO ont souhaité la réalisation d’une étude nationale sur le thème : « la diversité culturelle et le dialogue interculturel en Tunisie». Le but recherché est de développer d’une part un document de référence théorique sur les divers aspects liés à la diversité culturelle, aux valeurs universelles et au dialogue interculturel, et d’autre part de décliner certaines idées en outils didactiques pour des actions concrètes de sensibilisation.

La présente étude a pour objectif de :

- exposer la diversité culturelle en Tunisie, sa nature, ses composantes, ses caractéristiques, ses spécificités,… ;

- démontrer l’important potentiel qu’elle constitue pour le dialogue interculturel pour les pays du Maghreb entre eux et avec leurs voisins;

- identifier des modalités d’actions d’éducation et de sensibilisation à la diversité culturelle, au dialogue interculturel au niveau national, maghrébin et plus largement en relation avec les espaces africains et européens voisins ;

L’étude a été réalisée à la demande du Bureau de l’UNESCO à Rabat par M. Ahmed Benabdalah, Chef du Service UNESCO à la Commission Nationale Tunisienne pour l’UNESCO

DROITS D’AUTEUR

Tous droits réservés. Cette information peut être utilisée et reproduite sans frais pour tout usage éducationnel ou non commercial à condition de joindre à toute reproduction la mention de l’UNESCO

comme source. Tout autre usage doit faire l’objet d’une autorisation préalable de l’UNESCO. La demande doit être adressée à :

Bureau de l’UNESCO pour le Maghreb Secteur Culture,

35, avenue du 16 novembre Agdal, Rabat 1777, Maroc Tél : (212) 5 37 73 56 89 Fax : (212) 5 37 73 56 91

[email protected]

1. Rencontre « le dialogue interculturel par le biais du patrimoine culturel au Maghreb », Casablanca, décembre 2007

CL/RA/MA/2009/PI/H/7

Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

Introduction ...................................................................................................5

I. Diversité culturelle et culture nationale ...................................................9

1. Diversité culturelle et identité nationale : fondements historiques et principales caractéristiques..................................................................... 10

1.1. Composante démographique : .......................................................... 111.2. Composante linguistique : ................................................................. 141.3. Expressions culturelles : Arts et artisanat ......................................... 18

2. Caractéristiques de la politique culturelle en Tunisie : ......................... 212.1. Cadre juridique et institutionnel ......................................................... 212.2. Orientations politiques : .................................................................... 222.3. Le dixième Plan de développement : ................................................ 222.4. Financement de la culture ................................................................. 24

3. Les institutions culturelles ....................................................................... 253.1. L’action et la communication culturelles : .......................................... 253.2. Bases juridiques de l’action et la communication culturelles : ........................................................................................ 253.3. Belles lettres, livre et lecture : ........................................................... 273.4. La musique, la danse et les arts populaires : .................................... 283.5. Le théâtre : ........................................................................................ 303.6. Les arts plastiques : .......................................................................... 32

4. La protection du patrimoine culturel : .................................................... 33

5. Condition des artistes et encouragements de la créativité : ......................................................................................... 34

6. Les industries culturelles :....................................................................... 356.1. L’édition : ........................................................................................... 356.2. Le cinéma : ....................................................................................... 366.3. L’artisanat : ........................................................................................ 36

II. Diversité culturelle et dialogue interculturel : analyse de l’interaction de la politique culturelle tunisienne avec la Convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité culturelle (UNESCO, 2005) et la Déclaration Islamique su la diversité culturelle (ISESCO, 2004). .......................................................................................... 37

1. Développement des industries culturelles : ........................................... 38

2. Diversité culturelle et cohésion sociale .................................................. 39

3. Modalités d’action et de sensibilisation à la diversité culturelle et au dialogue interculturel ................................................................................ 40

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3.1. Rôle de l’éducation : culture du dialogue pour le dialogue des cultures ....................................................................................... 403.1. Rôle de l’action culturelle : ................................................................ 44

Conclusion ................................................................................................. 49

Recommandations ..................................................................................... 50

Annexes ...................................................................................................... 51

Bibliographie : ............................................................................................ 67

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

La richesse culturelle de la Tunisie et ses traditions artistiques et intellectuelles mettront ce pays en mesure de coopérer très étroitement aux travaux de l’Organisation dans l’esprit de compréhension internationale et de libre communication des cultures qui est celui de l’Organisation2.

Introduction

La notion de « dimension culturelle du développement » date de la Conférence mondiale sur les politiques culturelles (MONDIACULT) qui s’est tenue à Mexico en 1982 sous les auspices de l’UNESCO. Cette Conférence a réalisé deux objectifs majeurs : le premier consiste à redonner à la culture, la place qui lui revient dans les sociétés contemporaines ; le second est la sensibilisation des décideurs et du grand public au rôle de la culture dans l’ensemble des politiques de développement. C’est dans ce contexte qu’a été proclamée le Décennie mondiale du développement culturel pour la période 1988-1997.

Depuis, les résultats de cette Conférence servent de référentiel aussi bien à l’UNESCO et plus particulièrement dans le cadre de ses programmes culturels, qu’à ses Etats membres. La notion de diversité culturelle s’est approfondie suite aux résultats des travaux de la Commission mondiale de la culture et du développement (Notre diversité créatrice, 19953) et de la Conférence intergouvernementale sur les politiques culturelles pour le développement (Stockholm, 1998).

L’UNESCO et ses Etats membres n’ont pas cessé de développer et d’affiner l’approche entre les problèmes fondamentaux en relation avec la dimension culturelle du développement, ainsi que les rapports entre tradition culturelle et stratégies de développement. Résumant cette approche, Mervyn Claxton dit : « Il ne peut y avoir de développement vraiment réussi et durable s’il n’admet pas et n’utilise pas la force vivifiante de la culture et s’il ignore les styles de vie, les systèmes de valeur, les traditions, les croyances, les savoirs et les talents de la communauté(…) Les planificateurs du développement doivent avoir une connaissance approfondie de leur société et de leur culture, pour pouvoir non seulement faire en sorte que leur politique économique réponde aux besoins et aux aspirations des communautés concernées, mais encore mobiliser, afin d’appliquer ladite politique avec succès, cette force indéfinissable et pourtant dynamique que constitue l’identité d’un peuple et qui est l’élément stratégique de toute culture »4. Les questions « d’identité culturelle », de « diversité culturelle » et de « dialogue interculturel » sont désormais au cœur du débat.A la fin du XXè siècle, la notion de mondialisation a commencé à prendre de l’ampleur pour finir par être perçue, au début du XXIème siècle, comme une véritable menace pour les cultures qui ne sont pas prémunies de moyens de grande diffusion.En effet, l’accès d’un nombre croissant d’individus à des réseaux d’information et de communication communs (notamment INTERNET, la télévision satellitaire…), conduit à deux effets :

Une prise de conscience accrue de la diversité culturelle et de l’interdépendance de l’ensemble des individus. Du fait de la multiplication des sources d’information, cela s’exprime par une meilleure connaissance de l’environnement et des enjeux mondiaux. Le patrimoine culturel mondial change de visage : l’UNESCO en dresse

2. Résolution d’admission de la Tunisie à l’UNESCO (9C/Résolution 18)

3. UNESCO, 1995, Notre diversité créatrice: rapport de la Commission mondiale de la culture et du développement, Paris (France).

4. in La Décennie mondiale du développement culturel, dossier d’information, UNESCO, mai 1994.

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une image plus documentée (liste Mémoire du monde) et plus vivante (patrimoine oral et immatériel). Des cultures minoritaires ont ainsi pu trouver une visibilité nouvelle, tandis que les questions à dimension internationale voient la montée en puissance des ONG comme acteurs de premier plan. De même, le fort brassage des courants religieux et philosophiques a stimulé l’œcuménisme et le dialogue interreligieux. Mais, inversement, des communautarismes identitaires fondés sur un refus du relativisme et l’affirmation de la supériorité d’une culture sur les autres, se sont développés de manière concomitante.L’émergence d’une sorte de « culture commune » marquée notamment par le recours à un « anglais de communication », version appauvrie de la langue anglaise, des références culturelles américaines ou occidentales portées par des produits culturels (cinéma, musique, télévision) ou des modes de vie (sports occidentaux, fast food, cuisine italienne, chinoise…) ; ce qui représente un sérieux risque d’appauvrissement de la diversité culturelle, voir la domination d’une certaine conception des rapports économiques et sociaux. Le terme de civilisation universelle est en soi objet de polémique.

Pour faire face à un tel risque la Conférence générale de l’UNESCO a adopté la Déclaration Universelle sur la Diversité Culturelle. L’adoption de cet instrument a eu lieu moins de deux mois après les événements du 11 septembre 2001 qui ont entraîné une vive réaction contre l’intégrisme islamiste et, par assimilation, contre l’Islam dans sa globalité. L’atteinte portée à l’image de l’Islam ne pouvait pas laisser indifférente la communauté islamique. Ainsi, les Ministres de la culture des Etats membres de l’Organisation Islamique pour l’Education, les Sciences et la Culture (ISESCO), réunis à Alger en 2004, ont adopté la Déclaration Islamique sur la Diversité Culturelle5 ; instrument qui met l’accent sur le dialogue et la coopération avec les autres cultures et civilisations, sur la base des valeurs de tolérance et de paix, pour promouvoir une image de l’Islam conforme à la réalité et aux valeurs intrinsèques de l’identité islamique.

Les tensions qui ont caractérisé la conjoncture politique économique et sociale internationale, confortées par une montée des théories favorables à la mondialisation, qui, cette fois, visaient directement les biens et services culturels (la question devait être débattue à l’OMC), ont amené l’UNESCO à concevoir un nouvel instrument normatif qui engagerait davantage les Etats membres à mettre en application les principes énoncés dans la Déclaration sur la Diversité Culturelle. C’est ainsi que la Conférence générale a adopté, le 20 octobre 2005, la Convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles6.

Il est à noter que les deux instruments de l’UNESCO, aussi bien que la Déclaration de l’ISESCO, concordent pour mettre en valeur la notion de « dialogue interculturel » en tant qu’instrument fondamental pour la paix et la compréhension internationale. Consciente de la haute importance des enjeux qui ont donné lieu aux Déclarations de l’UNESCO et de l’ISESCO, la Tunisie n’a pas manqué de marquer son engagement à tenir compte du contenu de ces textes. Cet engagement a été réaffirmé par la ratification de la Convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, (entrée en vigueur en mai 2007). C’est dans ce contexte que s’inscrit la présente étude dont l’objectif est :

d’examiner les points de concordance de la politique culturelle tunisienne – qui considère que la culture est un élément fondamental du développement durable – avec ces instruments ;

5. ISESCO, Déclaration islamique sur la diversité culturelle (adoptée par la 4ème Conférence islamique des Ministres de la Culture) Alger - Décembre 2004. Cf. http://www.isesco.org.ma/francais/culture/culturalDiversity/Diversité%20culturelle.pdf

6. UNESCO, Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, paris, 2005. Pour plus d’information sur la Convention : Cf. http://unesdoc.unesco.org/images/0014/001495/149502F.pdf

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

de déterminer les types d’action et d’information, en relation avec la politique culturelle, aptes à assurer la promotion de la diversité culturelle et du dialogue interculturel en Tunisie, tout en tenant compte du rôle des relations culturelles du pays avec ses environnements immédiats : maghrébin, méditerranéen, arabo-islamique et africain. Environnements qui s’interpénètrent et se confondent, notamment en tant qu’éléments constitutifs de l’identité culturelle du pays.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

I. Diversité culturelle et culture nationale

Il n’est pas dans notre intention de passer en revue tous les aspects constitutifs de l’identité culturelle tunisienne. En ces temps de remise en question, semblable entreprise serait trop hasardeuse. Nous estimons plus sage de limiter l’investigation à l’évocation de cette quête d’identité culturelle issue des interrogations que se pose le tunisien d’aujourd’hui sur son identité et sur la destinée de sa communauté. Cette démarche procède, bien entendu, d’un retour aux origines, d’un ressourcement, mais elle n’exclut pas pour autant la prospective, ainsi que l’observation du présent.

Aussi loin qu’on remonte dans l’histoire, la Tunisie présente les caractéristiques et les attributs d’une nation. En premier lieu, un territoire dont les contours ont peu changé au cours de l’histoire, habité depuis des temps immémoriaux par les berbères qui ont cohabité avec des populations d’origines diverses, ont influencé ou subi l’influence de ces populations, se sont mêlés à elles à divers degrés, ont combattu avec ou contre elles pour défendre ce territoire. Avec l’avènement de l’Islam, à la seconde moitié du VIIe siècle, les berbères ont progressivement adopté la nouvelle foi et la langue qui la véhicule : l’arabe. L’invasion hilalienne, au XIe siècle, a ouvert la voie à un grand brassage ethnique et acheva d’arabiser le pays. Les tribus berbères vont soit s’intégrer soit se réfugier dans les hauteurs et hors des frontières. Au fil des siècles ce brassage qui va se renforcer et même intégrer d’autres apports ethniques, tels les turcs, ou les éléments d’origine européenne, donnera lieu à une homogénéité ethnique et linguistique liée au territoire national qui explique la réalité d’aujourd’hui. Cependant, la véritable conscience de l’identité nationale trouve son origine dans le mouvement national tunisien, terme qui désigne dans sa globalité le mouvement sociopolitique né au début du XXe siècle et qui mena la lutte contre le protectorat français7 en Tunisie pour obtenir finalement l’indépendance du pays le 20 mars 1956.

Inspiré de l’idéologie des Jeunes Turcs et par des expériences réformistes menées en Tunisie dans la deuxième moitié du XIXe siècle, le rassemblement de notables traditionalistes – avocats, médecins et journalistes- cède peu à peu sa place à une organisation politique de mieux en mieux structurée par les nouvelles élites formées en France et capables de mobiliser ses partisans pour affronter, si le besoin s’en fait ressentir, les autorités du protectorat afin de faire avancer ses revendications auprès du gouvernement français. La stratégie adoptée par le mouvement alternera entre négociations et affrontements armés, au gré des événements touchant le bassin méditerranéen dans la première moitié du XXe siècle.

L’appui fourni au mouvement politique par les puissants syndicats ouvriers et les mouvements féministes, dans le contexte d’un renouveau de la culture tunisienne, aux plans intellectuel et social, contribue à l’affirmation de l’identité nationale qui sera renforcée par les systèmes politiques, éducatifs et culturels après l’indépendance.

Ainsi, le mouvement national fut l’œuvre d’un ensemble composé de groupes très divers mais unis car il était le fait de forces sociales montantes à partir des années 1930 : petite bourgeoisie engagée dans l’économie capitaliste, une élite zeintounienne notamment influencée par les idées de renouveau de la culture arabo-islamique diffusées par Mohammed Abdou et Jameleddine El Afghani, la nouvelle intelligentsia « occidentalisée » et la classe ouvrière organisée et donc sensible aux revendications sociales ; sans compter l’apport considérable d’un mouvement féministe montant, qui préludait à la promulgation, dès l’indépendance, du Code de statut personnel donnant à la femme une place de premier plan dans la bataille pour le développement.

7. La Tunisie passe sous Protectorat français le 12 mai 1881 (Traité du Bardo).

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Cette identité nationale fut définitivement scellée à l’indépendance de la Tunisie par la création de l’Etat-nation. La préoccupation majeure des tunisiens est désormais d’enraciner la conscience nationale au sein de toutes les composantes du peuple afin de fructifier et de sauvegarder les acquis de l’indépendance. La généralisation de l’éducation devait transformer en citoyens, les membres des communautés restreintes et particulières pour les faire participer à l’universalité de la citoyenneté nationale.

En effet, le mouvement national ne fut pas seulement la contestation d’une souveraineté politique étrangère sur le pays. Il apparaît aussi comme une revendication de la spécificité nationale. C’est au nom des valeurs de la citoyenneté que le peuple tunisien s’est révolté ; le slogan « Pour un parlement tunisien » est une revendication qui a accompagné toute la durée de mouvement national. La démocratie est née sous une forme nationale. Il était donc prévisible que la Tunisie fit dans le domaine culturel des choix décisifs qui lui permettraient de se réconcilier avec son identité nationale, tout en accédant à la modernité.

Mais la situation socioculturelle en 1956 était caractérisée par une tension entre deux courants aussi influents l’un que l’autre : le courant zeitounien insistant sur le caractère arabo-musulman du pays, et le courant « moderniste » représenté par l’intelligentsia de double culture et la bourgeoisie européanisée pour lesquels l’indépendance ne devrait pas marquer une rupture avec les idées et les valeurs « occidentales » perçues à travers la langue et la culture française.

Le 1er juin 1959 fut promulguée la Constitution de la République qui proclame dans son préambule la volonté du peuple tunisien de demeurer fidèle « aux valeurs humaines qui constituent le patrimoine commun des peuples attachés à la dignité de l’homme » ainsi « qu’aux enseignements de l’Islam, à l’unité du Maghreb, à son appartenance à la famille arabe ».Les mêmes principes inspirèrent la réforme de l’enseignement de 1958 qui, tout en visant à la scolarisation totale, elle avait pour objectif la création d’un enseignement unique à la fois moderne et tunisien. Du coup, la Mosquée de la Zeitouna, en tant qu’institution éducative, perdait sa prépondérance jalousement conservée des siècles durant. Ses sections secondaires furent intégrées à l’unique enseignement national, tandis que son cycle supérieur devenait une faculté de théologie et sciences religieuses dans le cadre l’université de l’Etat. C’est désormais dans ce contexte « d’authenticité et d’ouverture » que s’inscrivent les options fondamentales de la politique culturelle de la Tunisie.

1. Diversité culturelle et identité nationale : Fondements historiques et principales caractéristiques

« La culture prend des formes diverses à travers le temps et l’espace. Cette diversité s’incarne dans l’originalité de la pluralité des identités qui caractérisent les groupes et les sociétés composant l’humanité. Sources d’échanges, d’innovations et de créativité, la diversité culturelle est, pour le genre humain, aussi nécessaire qu’est la biodiversité dans l’ordre du vivant. En ce sens, elle constitue le patrimoine commun de l’humanité et elle doit être reconnue et affirmée au bénéfice des générations présentes et des générations futures ».8

Figure 1: Convention surla protection et la promotionde la diversité culturelle, © UNESCO, 2005

8. Déclaration universelle de l’UNESCO sur la Diversité Culturelle (2001), Article 1.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

La Tunisie est un carrefour des civilisations et sa culture est une synthèse des différentes influences cumulées au fil de 3000 ans d’histoire et qui, par sa position géographique centrale dans le bassin méditerranéen, à seulement 140 km de l’Europe par le détroit de Sicile, ancré au continent africain, rattaché au Maghreb, au monde arabe et au monde islamique, a été au cœur du mouvement d’expansion des grandes civilisations de la Méditerranée et des principales religions monothéistes. Son histoire révèle ce passé où les cultures méditerranéennes se sont succédées. Les berbères –Amazighs- représentent une constante ethnique et culturelle à laquelle se sont ajoutées, au fil des siècles, d’autres composantes ethnoculturelles qui ont été intégrées et assimilées à différents degrés et qui ont laissé des empreintes plus ou moins fortes. Ainsi, la culture de la Tunisie actuelle est une synthèse de cet héritage métissé des cultures berbère, punique, romaine, arabe, turque, européenne, noire africaine, juive, chrétienne et islamique. Ces différentes influences se retrouvent aujourd’hui dans des éléments aussi variés que les sites du patrimoine, l’architecture, la musique, les us et coutumes, les habits traditionnels, la musique, la cuisine… Mais l’élément le plus révélateur de l’identité culturelle tunisienne demeure, certes, la langue. Le parler tunisien qui, bien qu’étant une variante parlée de l’arabe qui partage de nombreux points communs avec les autres variétés modernes de l’arabe, en particulier celles du Maghreb, comporte de nombreux éléments d’influence euro-méditerranéenne comme l’italien, le français, l’espagnol et le turc, profondément assimilés et « arabisés ».

Ainsi, la diversité est une caractéristique de l’identité culturelle tunisienne et, partant, un signe de prédisposition au dialogue interculturel.

1.1. Composante démographique :

La Tunisie compte 10 millions d’habitants (recensement de 2005) dont 98 % s’identifient culturellement aux arabes. Ethniquement parlant, être tunisien est beaucoup plus complexe que ce raccourci. Au fil des siècles, le tissu démographique s’est enrichi et diversifié par voie d’intégration et de métissage pour donner naissance à un produit culturellement spécifique : le tunisien.

Les principales composantes de ce produit qui ont laissé une forte empreinte culturelle sont (par ordre chronologique) :

1.1.1. Les Berbères-Amazighs :Ce sont les plus anciens habitants du pays. Cohabitant avec les carthaginois

(phéniciens) dits aussi « puniques », puis avec les romains, ils ont, pour la plupart, conservé l’essentiel de leur identité propre, en particulier la langue et les coutumes et, à certains moments de l’histoire, ils ont pris leur destinée en main en fondant des royaumes, tel les numides au IIIe siècle av. J.C. Les berbères représentent aujourd’hui moins de 1% de la population tunisienne.

A l’avènement de l’Islam, les berbères se sont convertis et, au fil du temps, ont adopté l’arabe, langue du Coran. Certaines tribus, arabisées, vont jusqu’à se chercher une lointaine et mythique origine arabe avec le mythe d’Ifriquich, dont la vraisemblance est critiquée par Ibn Khaldoun.

Aujourd’hui, les berbères représentent en Tunisie une petite minorité. Leur dialecte, le chelha, n’est pratiqué qu’à Jerba et quelques régions du sud tunisien, il tend à disparaître faute de locuteurs.

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1.1.2. Les puniques et les romains :

Figure 2: Joueurs de cartes, mosaïque, Musée du Bardo, Jasmina Sopova, © UNESCO

Les puniques (les carthaginois) ont « disparu » à la destruction de Carthage. Tout porte à croire que ceux qui échappèrent au massacre se fondirent avec la population berbère ou quittèrent le pays, tout comme firent les chrétiens- aussi bien les berbères que les romains et les byzantins- face à la conquête arabe.

1.1.3. Les juifs :Si les origines de la communauté juive en Tunisie demeurent sujettes à controverse,

il est certain que leur présence est très ancienne et qu’un bon nombre d’entre eux descendent de berbères convertis (notamment les juifs de Jerba). Si leur nombre augmenta avec l’arrivée de juifs andalous, et livournais, il subit un premier fléchissement entre 1948 et 1955 (25 000 juifs ont quitté la Tunisie). Une nouvelle vague d’émigration (40 000 juifs) a suivi la crise de Bizerte (1961) et la guerre des six jours. La communauté juive représente aujourd’hui près de 1% de la population tunisienne.

1.1.4. Les arabes :Les premiers conquérants arabes ne représentaient que quelques milliers, leur

présence se renforça par des apports successifs, en particulier à travers l’invasion hilalienne au XIème siècle. Les conséquences sociales et ethniques de cette migration massive marquèrent définitivement l’histoire démographique de la Tunisie : la progression diffuse de familles entières a rompu l’équilibre traditionnel entre nomades et sédentaires berbères et favorisa le métissage de la population ainsi que l’arabisation du pays.

Figure 3: Sousse, le Ribat, INP, Tunisie Figure 4: Kairouan, La Grande Mosquée, salle de prières, colonnes marbre et porphyre, architecture islamique, Maghreb, Alcoceba, Felipe © UNESCO

1.1.5. Les turcs :Appelé au secours du pays envahis par les espagnols, Khaireddine Barberousse

s’empare de Tunis en 1534. Les soldats turcs s’implantent en Tunisie. Leur nombre reste minime (10 000 environs). La carte de leur répartition est celle des garnisons. Suite à

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

une révolte en 1811, le bey de Tunis dissout la milice mettant fin aux nouveaux apports massifs de turcs.

Cependant, détenant le pouvoir, les turcs étaient considérés au sommet des catégories ethniques. Ils diffèrent de la masse de la population par leur langue et par leur rite (rite hanéfite). Les Kouloughlis, issus de mariages entre turcs et indigènes, sont sans doute plus nombreux, mais ne partagent ni le prestige ni les fonctions des turcs venus du levant, ils portaient cependant le titre honorifique de « chelebi » (Monsieur).

1.1.6. Les andalous : Descendants des arabes et des berbères, chassés d’Andalousie suite aux

persécutions de 1391, ils arrivèrent à point nommé alors que le pays avait subi une grave crise démographique suite à une succession d’épidémies et de famines. Ils s’installèrent dans les grandes villes et fondèrent des villages égrenés au nord du pays. Au XVIIème

siècle, les morisques (Andalous restés après la « reconquista » chrétienne de l’Espagne) sont venus en nombre apportant avec eux une culture espagnole que trahissaient leurs habitudes quotidiennes, des modes vestimentaires qu’ils n’abandonnèrent que lentement, et une langue qu’ils pratiquèrent jusqu’au XVIIIème Siècle, jusqu’à leurs noms que certaines familles conservèrent à nos jours (tels : Merrichko, Blanco, Mouro, Nigro, Kristou…)

Figure 5: Maurisque

1.1.7. Les européens :Depuis la conquête arabe, on a toujours noté la présence d’un groupe humain plus

ou moins important, provenant de l’Europe voisine. Au XVIème siècle, Jean-Léon l’Africain qui visitait Tunis notait la présence de quelque 1500 soldats chrétiens au service du roi Hafside.

Au XVIIème siècle, avec l’installation des Ottomans et le développement de la course le nombre d’européens convertis à l’Islam ou captifs devint un véritable phénomène démographique - en particulier à Tunis - car pour un grand nombre d’entre eux, notamment les convertis qui sont assimilés aux turcs et dont certains arriveront aux plus hautes fonctions de l’Etat, (tel Osta Muratto Corso, fondateur de la dynastie Mouradite qui régna de 1613 à 1705), leur installation dans le pays est souvent définitive et ce, malgré l’espoir entretenu par les captifs d’être un jour affranchis et retourner dans leur pays. Beaucoup de convertis épousèrent des femmes tunisiennes et dès la génération suivante leurs enfants bénéficièrent d’une sorte d’anonymat que leur assurait l’indication de la filiation du père en « bin abdallah » qui caractérisait les convertis.

Figure 6 : Tunis, rue d’Italie, début du XXème siècle

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Cette présence européenne se développa parallèlement au développement des relations économiques avec l’Europe, et notamment au XIXème siècle avec le projet de modernisation du pays et d’ouverture sur la culture européenne. Elle atteint son apogée avec l’instauration du protectorat français en 1881, jusqu’à l’indépendance en 1956.

1.1.8. Les noirs africains :La situation géographique de la Tunisie la met à l’écart des courants transsahariens.

De ce fait les caravanes amenant poudre d’or et esclaves d’Afrique noire (venant notamment de Tombouctou et du Royaume de Bornou) à travers les centres de Fezzan et de Ghadamès n’étaient pas très fréquentes. Aussi, les esclaves arrivaient-ils à Tunis à un rythme annuel, leur nombre oscillant entre 500 et 1500, dont une partie est réexpédiée vers les ports du Levant. Il était fréquent que des affranchissements collectifs d’esclaves noirs aient lieu à l’occasion du décès d’un prince, d’une princesse ou d’un notable.

Dans sa chronique (cf : Histoire de Tunis, éditions Bouslama, Tunis, 1979) le Dr. Louis Frank (1761-1825), médecin du Bey de Tunis, remarque à propos des conditions des esclaves noirs africains à Tunis « la coutume répandue parmi les Tunisiens d’affranchir quelques uns de leurs esclaves, qui une fois libres, sont bien loin d’avoir la moindre envie de retourner dans leur pays natal, où sans doute les attendrait un nouvel esclavage, et préfèrent rester à Tunis, devenue pour eux une seconde patrie : ils se répandent ainsi dans la ville, soit pour y débiter en détails quelques marchandises, soit pour s’y procurer du travail » (Cf. Chapitre XVII). Par ailleurs, la Tunisie a définitivement aboli l’esclavage le 26 juin 1846. De ce fait, les tunisiens d’origine noir- africaine constituent une minorité parfaitement intégrée dans le tissu démographique, notamment dans les régions du sud tunisien. Leur influence est essentiellement manifeste à travers des apports culturels spécifiques à la culture noir-africaine (tel le Stambali où, à travers les chants et les danses, les rites religieux se mêlent aux rites païens proches du vaudou).

Figure 7: Décret promulgué les 26 juin 1846 abolissant l’esclavage en Tunisie

1.2. Composante linguistique :

Au cours de sa riche histoire, la Tunisie a subi différentes influences linguistiques. Avant la fondation de Carthage, le pays était berbérophone puis il fut punicisé, avant d’être latinisé. C’est en latin que les berbères Saint Augustin et Apulée de Madaure avaient consigné leurs pensées.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

Aujourd’hui, l’Arabe est la langue officielle de la Tunisie. Il faut entendre par là l’arabe littéral, qui est la première langue de l’enseignement et connue par la quasi-totalité de la population musulmane. La population non musulmane, notamment les juifs tunisiens, ont pour partage avec les tunisiens musulmans l’arabe tunisien. L’usage de l’hébreu se limitant à la pratique religieuse. La Chilha est parlée par une minorité de berbérophones (moins de 1% de la population), et son usage reste limité et tend à disparaître, faute de locuteurs.

Depuis la fin du XIXème siècle, on a commencé à enseigner les langues étrangères (italien et français) à l’école militaire et au Collège Sadiki, dans un vaste projet de modernisation à travers l’ouverture sur les savoirs et les sciences modernes.

Quant à la langue française, celle-ci a été imposée au cours de la période coloniale (1881-1956) comme langue administrative et dans l’enseignement. Après l’indépendance, elle continua à bénéficier d’un statut privilégié en tant que seconde langue dans l’enseignement. L’anglais y occupe la troisième place. Cet état de fait concrétise le slogan officiel de la politique éducative et culturelle : authenticité et ouverture.

Toutefois, le tourisme et la migration vers l’Europe ont favorisé la connaissance d’autres langues comme l’allemand, l’italien et l’espagnol.

1.2.1. L’arabe tunisien :Reflet de la diversité culturelle tunisienne, l’arabe tunisien mérite qu’on s’y attarde : L’arabe tunisien est un groupe de dialectes arabes rattachés à l’arabe maghrébin,

parlés par quelque neuf millions de personnes vivant principalement en Tunisie, bien que la langue officielle soit l’arabe littéral. Il est généralement connu de ses locuteurs sous le nom de darija, afin de le distinguer de l’arabe littéral. L’arabe tunisien est parlé à travers tout le pays mais se retrouve comme partie d’un continuum linguistique, dans des variétés similaires parlées dans l’est de l’Algérie et l’ouest de la Libye (régions parfois rattachées, parfois séparées de la Tunisie, au fil des péripéties de l’histoire). Sa morphologie, sa syntaxe, sa prononciation et son vocabulaire sont assez différents de l’arabe littéral.

En Tunisie, on distingue principalement six grandes aires dialectales, selon que les populations soient sédentaires (principalement urbaines) ou nomades d’origine bédouine (rurales). Les variétés urbaines sont parlées dans les grandes villes ou celles situées à proximité des côtes comme Tunis, Bizerte, Nabeul, Hammamet, Sousse, Monastir, Mahdia, Kairouan et Sfax. Le reste du pays utilise les variétés rurales, que ce soit à Gabès, Gafsa, Tozeur, Le Kef et Béja ou dans les petites villes, même peu éloignées des centres urbains.

Ces aires dialectales sont :Aire nord-est : Tunis, Bizerte et Cap BonAire nord-ouest : Le Kef, Béja, Tabarka et SilianaAire sahélienne : Sousse, Monastir et MahdiaAire sfaxienne : Sfax et campagnes environnantesAire sud-est : Gabès, Médenine et TataouineAire sud-ouest : Gafsa, Tozeur et Nefta.

Région la plus peuplée du pays, l’aire nord-est peut elle-même être subdivisée en plusieurs sous-aires.

Le dialecte tunisois est la forme dialectale la plus simplifiée et la plus influencée par les langues euro-méditerranéennes comme l’italien et le français. Elle comporte un nombre important d’expressions et de mots d’origine italienne mais aussi française, espagnole et turque. Fortement influencé par la lingua franca en vigueur jusqu’au XIXe siècle, le dialecte tunisois tire son dynamisme de la dimension interculturelle et

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cosmopolite qui caractérise cette métropole. L’italien y tient une place fondamentale. Porté par une colonie italienne qui représentait jusqu’à 40% de la population urbaine tunisoise, il influence durablement la musicalité du dialecte tout en l’alimentant en vocabulaire technique : termes professionnels liés aux activités exercées jadis par l’importante colonie italienne comme menuisiers, maçons, architectes, pêcheurs, garagistes, négociants, commerçants, entrepreneurs, etc. Il pousse finalement à la création d’un dialecte arabe unique car plus souple, intégrateur et modulable. Il est aujourd’hui le dialecte de référence et assimilé au « tunisien standard ».

1.2.1.1. L’usage de l’arabe tunisien :Bien que langue du parler quotidien, l’arabe tunisien est considéré comme variante

inférieure dans un exemple de diglossie classique où l’arabe littéral représente la variété de prestige. Ainsi, l’usage du tunisien est principalement limité aux domaines oraux. Cette dualité est manifeste dans les panneaux publicitaires où l’on peut voir les slogans rédigés en dialecte tunisien, mais pas le nom de l’entreprise. Très peu d’ouvrages littéraires sont écrits en dialecte tunisien. Les rares tentatives dans ce sens ont donné lieu à de grands débats entre les « puristes de la langue », en particulier les universitaires, et les rares écrivains qui osaient introduire –partiellement dans les dialogues ou intégralement- le parler tunisien.

Langue de l’oralité, le parler tunisien se retrouve dans les contes et poèmes folkloriques jadis racontés lors des veillées familiales ou par les conteurs publics (fdaoui) dans certains cafés de Tunis, sur les places publiques ou à l’occasion du jour de marché dans la campagne. Il se retrouve également dans le théâtre, le théâtre de marionnettes et dans la chanson. Dans certaines œuvres théâtrales comiques, l’amalgame entre dialectes urbains et dialectes ruraux est utilisé pour créer le comique. Dans les moyens d’information, l’information officielle s’exprime en arabe littéral. Le parler tunisien demeure la langue d’une certaine presse satirique. A la radio et à la télévision il est fréquent d’utiliser une langue intermédiaire où les mots d’origine euro-méditerranéenne sont remplacés par des mots d’origine arabe ou des néologismes répandus par les académies arabes. L’usage du dialecte est réservé aux sitcoms, talk shows et feuilletons tunisiens. Les documentaires, reportages et doublages de dessins animés sont presque exclusivement en arabe littéral.

1.2.1.2. Quelques caractéristiques de l’arabe tunisien :L’une des différences les plus flagrantes entre le tunisien et l’arabe littéral est

l’usage étendu de mots d’emprunt à l’italien, au français, à l’espagnol, au berbère et au turc. Ces emprunts ne doivent pas être confondus avec l’usage direct de mots ou de locutions du français dans le parler quotidien des tunisiens (alternance de code linguistique), surtout ceux du nord du pays. Toutefois, beaucoup de mots français sont utilisés dans le discours des tunisiens sans être adaptés à la phonologie tunisienne.

Un autre phénomène fréquemment observé est le glissement sémantique de certains mots d’origine arabe. Par exemple macha qui signifie au sens strict l’action d’aller à pied, a évolué en tunisien en m’cha qui est utilisé dès lors qu’il y a une notion de déplacement, là où l’arabe utiliserait le verbe dhahaba (aller). On observe aussi le même phénomène pour certains mots d’origine étrangère. Toutefois, le plus grand nombre de différences entre le tunisien et l’arabe littéral n’est pas lié à l’emprunt de mots étrangers mais à un glissement de sens de racines arabes et à la présence de néologismes. La grammaire des dialectes tunisiens est globalement proche de la grammaire de l’arabe littéral, à quelques simplifications près. Quant à la conjugaison, on constate des différences significatives de morphologie entre le tunisien et l’arabe

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

littéral. Ce dernier marque treize distinctions de personnes, nombres et genres dans la flexion verbale alors que le dialecte de Tunis en marque seulement sept, la distinction de genre se trouvant seulement à la troisième personne du singulier. Les dialectes ruraux ou d’origine berbère de l’intérieur du pays marquent aussi le genre à la deuxième personne du singulier tout comme la plupart des variétés parlées ailleurs dans le monde arabe.

1.2.2. L’usage du français :Le français a été imposé comme seconde langue depuis que la France a instauré

son protectorat sur la Tunisie en 1881, particulièrement à travers les institutions administratives et l’éducation qui deviennent un fort vecteur de diffusion. Il devient rapidement un marqueur de promotion sociale et d’ouverture aux valeurs de modernité et de libéralisme. Durant la période coloniale et aux premières années de l’indépendance, la majorité des cadres et des enseignants sont formés dans les universités européennes, en particulier en France. A partir de l’indépendance (1956), l’administration et l’enseignement s’arabisent peu à peu et, paradoxalement, la connaissance des langues européennes se renforce sous l’influence du tourisme et de l’ouverture économique et culturelle à l’Europe.

Dans un contexte de réhabilitation du référent arabo-islamique dans l’espace public, les années 1990 marquent un tournant avec l’arabisation des cours de sciences jusqu’à la fin du collège. Depuis octobre 1999, les établissements commerciaux sont appelés à accorder deux fois plus de place aux caractères arabes qu’aux caractères latins. Dans le même temps, l’administration est appelée à communiquer exclusivement en arabe.

Malgré ce contexte qui devrait marquer une régression de l’usage du français, cette langue est encore largement pratiquée dans les milieux des affaires, l’univers médical et le monde culturel. L’usage du français continue à être considéré par certains milieux urbains comme un signe de promotion sociale.

1.2.3. Bilinguisme et biculturalisme :C’est dans le milieu scolaire et universitaire que le bilinguisme trouve sa pleine

correspondance avec la définition de cette notion : le bilinguisme scolaire n’est pas le fait d’enseigner ou de connaître deux langues mais l’usage de deux langues comme vecteurs de l’instruction, lorsqu’on enseigne les disciplines dans les deux langues. Jusqu’aux années 1970, l’enseignement des matières scientifiques, de l’histoire, de la géographie et de la philosophie se faisait en langue française. Malgré les mesures d’arabisation de nombreuses matières, le bilinguisme reste de vigueur, notamment dans l’enseignement des matières scientifiques dans le cycle secondaire et à l’université.

Plus personne ne contesterait aujourd’hui que la langue n’est pas un simple vecteur arbitraire de la pensée, mais qu’elle se rapporte automatiquement à la culture. La langue est marquée par la civilisation, d’une part parce qu’elle est un produit socio-historique et d’autre part parce qu’elle est toujours une pratique sociale. L’individu bilingue et biculturel est quelqu’un qui non seulement parle plusieurs langues mais qui est aussi capable de passer d’une culture à une autre. C’est le cas en particulier de ceux qui font un long séjour à l’étranger pour études ou dans le cadre des flux migratoires. Ils contribuent largement à la diffusion du comportement biculturel et à l’ouverture à l’autre et au monde. Cela transparaît de manière très claire dans le milieu culturel où l’adaptation au contexte national des idées novatrices et des courants de pensées prennent une dimension d’innovation et d’enrichissement du cadre culturel national : tels les cas de la littérature d’expression française ou du cinéma d’art et d’essai qui permettent une nouvelle approche de la diffusion de la culture nationale.

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Dans ce contexte de bilinguisme et de biculturalisme nous constatons une volonté de changer les rapports de force entre la culture française et la culture nationale. Cette volonté s’exprime d’une manière semi-officielle à travers la revue Echanges, publiée dans les années 1980 par le Service culturel de l’Ambassade de France à Tunis, qui se présente ainsi : « La revue Echanges, témoin et symbole de la coopération Franco-Tunisienne, veut favoriser le dialogue des cultures dans le respect de l’identité spécifique des deux peuples. En ce sens elle est ouverte, mieux elle appartient à tous ceux qui persuadés que l’amitié ne peut se maintenir sans la connaissance de l’autre, souhaitent en renforcer l’expression et la portée par leurs écrits. « Echanges » parait à raison d’un volume par an comprenant trois fascicules et recueille notes, articles originaux ou de synthèse, en arabe et en français, sur les arts, la littérature, les sciences humaines, exactes, biologiques ou médicales concernant plus particulièrement la Tunisie. Contes, nouvelles, récits, poèmes peuvent également y être insérés, »9. Cet exemple illustre la nouvelle relation dynamique qui s’établit entre diversité culturelle et dialogue interculturel, ne serait-ce que pour le cas de la culture française. Nous aurons l’occasion, à travers l’analyse des différents aspects des manifestations de la vie culturelle, de montrer l’importance de cette dynamique aussi bien au plan national qu’au niveau des relations interculturelles.

1.3. Expressions culturelles10 : Arts et artisanat

Les différents éléments ethniques installés en Tunisie vont contribuer au développement des arts et de l’artisanat. Les produits les plus significatifs en matière d’artisanat sont :

1.3.1. Le tapis : La tradition attribue à une fille d’un gouverneur ottoman de Kairouan, l’introduction

en Tunisie, vers 1830, du tapis à points noués d’inspiration anatolienne. Toutefois, les plus anciennes traces de tapis remontent au Ve siècle av. J.-C. avec les célèbres tapisseries carthaginoises teintées de murex. Au VIIIe siècle, l’émir aghlabide payait le tribut au calife de Baghdad en tapis. Les utilisations du tapis sont multiples, que ce soit dans les milieux citadins, campagnards ou nomades : tapis de sol, de selle, de prière, tapis de décoration, etc. On distingue aujourd’hui plusieurs types de tapis typiques de l’artisanat tunisien.

1.3.2. La poterie :La Tunisie connaît un artisanat de la céramique ancien et notoire. L’exploitation de

la pâte d’argile remonte à l’époque du Néolithique. Elle s’est enrichie par la suite grâce à l’apport des civilisations punique, romaine, chrétienne, musulmane, turque, persane et italienne que connaît la Tunisie. Les objets typiques des civilisations antiques étaient la lampe à huile et l’amphore dont les archéologues peuvent suivre l’évolution pour les périodes punique et romaine : le modelage, la cuisson et le décor des poteries sont demeurés primitifs.

9. (Cf . Note aux auteurs, Echanges, Volume II – N° 2, juillet 1980).

10. « Expressions culturelles » sont les expressions qui résultent de la créativité des individus, des groupes et des sociétés, et qui ont un contenu culturel. (Convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, Article 4, § 3)

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

1.3.3. La mosaïque :La Tunisie possède la plus riche collection de mosaïques antiques du monde

principalement exposée dans les musées tunisiens au premier rang desquels se trouve le musée national du Bardo. C’est à l’époque romaine et surtout à partir du IIème siècle que cet art se développe au point qu’on puisse parler d’une véritable école africaine marquée par la maîtrise de la représentation figurée. Aujourd’hui, on constate un certain regain d’intérêt pour cet art. Les plaques de mosaïque sont utilisées pour orner les demeures bourgeoises, les hôtels… reprenant les thèmes voire copiant les plus célèbres fragments connus.

Figure 8 : Mosaïques romaines, art romain, site archéologiqueCarthage, 1971, Roger, Dominique, © UNESCO

1.3.4. La ferronnerie :C’est aux andalous que l’on attribue la décoration des portes cloutées et les grilles

en fer forgé qui ornent les fenêtres et balustrades. Leurs entrelacs de motifs floraux tranchent avec la sobriété des façades blanchies à la chaux. Destinées à embellir les maisons et à préserver la sécurité et l’intimité des habitants, ces grilles apportent une note esthétique et décorative au tissu urbain sobre de la Médina.

1.3.5. Les bijoux :Le commerce de l’or d’Afrique et de l’argent d’Espagne vaut à Carthage, dès

l’antiquité punique, une part substantielle de sa prospérité. Utilisés aussi bien pour la fabrication de bijoux que pour la frappe de monnaies, ces métaux sont également utilisés pour les besoins locaux et pour le commerce.

La bijouterie artisanale répond à plusieurs types de demande (qui souvent se confondent) :

1.3.5.1. La bijouterie d’apparat :Parures, boucles d’oreilles, bracelets… caractérisés par leur finesse et leur

esthétique, comportant souvent des incrustations de pierres précieuses, sont recherchés particulièrement en milieu urbain. L’art du filigrane déjà maîtrisé par les carthaginois a été revivifié à partir du moyen orient par la conquête arabe. Pourtant, la bourgeoisie tunisoise issue des cadres ottomans va progressivement délaisser le travail artisanal traditionnel tunisien au bénéfice du travail d’inspiration italienne car plus élaboré et diffusé par une importante et active colonie de juifs livournais accueillie et installée à Tunis.

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1.3.5.2. La bijouterie de thésaurisation :Le monde agricole transforme les excédents des années fastes en bijoux d’argent

ou d’or. Ces bijoux sont souvent rustiques, aux formes simples et géométriques, ciselé ou rehaussés d’un simple grenetis. On rencontre souvent des monnaies en or ou en argent directement réemployés comme éléments de bijoux.

1.3.5.3. La bijouterie talismanique :L’artisanat a su longtemps perpétuer la tradition du porte bonheur, ancrée dans

la plupart des cultures méditerranéennes. La main (khomsa) est le plus typique de ces symboles, il remonte à la civilisation punique dont il symbolisait la déesse Tanit. Autres symboles : les plus répandus sont le poisson, la corne de corail ou l’étoile à cinq branches.

1.3.5.4. La bijouterie utilitaire :La fibule « berbère » utilisée par les femmes comme fermoir est l’élément le plus

représentatif de ce type de bijoux.

1.3.6. La dinanderie et cuivre martelé :

Les ustensiles en cuivre martelé sont surtout une spécialité de Kairouan. Malgré la fréquente utilisation d’ustensiles modernes, il demeure de tradition que la mariée (du moins tunisoise) ait dans son trousseau la batterie de cuisine kairouanaise, parfois héritée de mère en fille.

1.3.7. L’architecture :

L’architecture demeure l’indicateur par excellence des influences culturelles et des échanges interculturels. Les sites de Kerkouane, de Carthage, de Dougga, l’Amphithéâtre d’El Jem et bien d’autres nous renseignent sur l’architecture antique des carthaginois et des romains. Les médinas de Tunis, Kairouan, ou encore Sousse et Sfax présentent les influences qui ont marqué l’architecture arabo-islamique.

Figure 9 Minaret de la mosquée Hamouda Pacha, art islamique,Médina de Tunis, 1971, Perez, Jacques © UNESCO

Cependant, à partir du XVIIè siècle, les monuments, les maisons et palais de la Médina de Tunis, présentent un style typique et original considéré comme représentatif d’un véritable art « national » où se mêlent, dans un raffinement harmonieux, les styles

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

local, andalous, ottoman et européen (en particulier le style ornemental vénitien). Ce style de synthèse inspira directement les monuments construits dans les siècles suivants aussi bien à Tunis que dans les différents centres urbains du pays.

La diversité est un élément constitutif de l’identité culturelle nationale. Elle est vécue en tant que richesse de cette identité et représente une caractéristique de la personnalité tunisienne qui favorise l’ouverture à l’environnement géographique de la Tunisie, aussi bien maghrébin, et arabo-islamique, que méditerranéen et africain. Où qu’il soit, le Tunisien retrouve certains des éléments constitutifs de sa propre culture et de son environnement culturel national.

Figure 10 : Mosquée Hamouda Pacha, art islamique, Médina de Tunis, 1971, Perez, Jacques, © UNESCO

2. Caractéristiques de la politique culturelle en Tunisie :

« Tout en assurant la libre circulation des idées et des œuvres, les politiques culturelles doivent créer les conditions propices à la production et à la diffusion de biens culturels diversifiés, grâce à des industries culturelles disposant des moyens de s’affirmer à l’échelle locale et mondiale. Il revient à chaque Etat, dans le respect de ses obligations internationales, de définir sa politique culturelle et de la mettre en œuvre par les moyens d’action qu’il juge les mieux adaptés, qu’il s’agisse de soutiens opérationnels ou de cadres réglementaires appropriés »11.

Figure 11 Affiche de « Tunis,capitale culturelle régionale, 1997 ».

« Politiques et mesures culturelles » renvoie aux politiques et mesures relatives à la culture, à un niveau local, national, régional ou international, qu’elles soient centrées sur la culture en tant que telle, ou destinées à avoir un effet direct sur les expressions culturelles des individus, groupes ou sociétés, y compris sur la création, la production, la diffusion et la distribution d’activités, de biens et de services culturels et sur l’accès à ceux-ci »12

2.1. Cadre juridique et institutionnel

La politique culturelle relève du Ministère de la Culture, créé par décret N° 61-346, en date du 7 octobre 1961, sous la dénomination de Secrétariat d’Etat aux affaires culturelles et à l’Information, et devenu depuis novembre 2004 Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine. Le décret n° 2005-1707 stipule que ce Ministère est

11. Déclaration universelle de l’UNESCO sur la Diversité Culturelle (2001), Article91.

12. Convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, Article 4, § 6

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« chargé, dans le cadre de la politique générale de l’Etat, d’exécuter les choix nationaux dans les domaines de la culture et de la sauvegarde du patrimoine et d’établir les plans et les programmes en vue de promouvoir ces domaines ».Cette mission du département culturel de l’Etat est mise en œuvre à travers une large panoplie d’institutions et de textes juridiques.

2.2. Orientations politiques :

Le cadre référentiel de la politique culturelle de la Tunisie est exposé à travers l’ensemble des objectifs définis dans le programme électoral du Président Zine El Abidine Ben Ali (2004 – 2009) visant à « renforcer l’identité nationale, approfondir le dialogue civilisationnel universel et promouvoir les valeurs d’ouverture, de tolérance et de solidarité ». Autre objectif de ce programme : intégrer la culture dans le processus de développement global et durable du pays, en termes de promotion des industries culturelles, de mise en valeur du patrimoine national et de diffusion de la culture numérique.

2.3. Le dixième Plan de développement 13:

Le dixième plan de développement (2002-2006) fait état des principales orientations panifiées dans le domaine culturel. Le chapitre VIII du plan, consacré à « la jeunesse, l’enfance et la culture » rappelle que :

« une consultation nationale sur la culture a été organisée [de novembre 2001 à mars 2002] en vue de recueillir les opinions et propositions de l’élite intellectuelle pour tout ce qui touche à l’avenir de la Tunisie et aux perspectives de l’action culturelle », « L’attention accordée à ce secteur s’est également concrétisée à travers les réformes qui sont régulièrement introduites (…) visant à mieux intégrer la culture dans l’activité de développement (…) Les axes discutés dans cette consultation ont touché sept domaines tels que la production et la diffusion culturelles, l’industrie des contenus, la culture numérique, la formation, la recherche, la présence culturelle à l’extérieur, la culture populaire, la décentralisation culturelle et les associations culturelles. Les principales recommandations et propositions de cette consultation se résument dans les points suivants :

développer davantage la politique de diffusion théâtrale et poursuivre le soutien à l’industrie cinématographique ;mettre en place une stratégie nationale de la traduction et soutenir la stratégie nationale d’incitation à la lecture et à la presse culturelle ;développer et renforcer la présence culturelle dans les institutions d’information audio-visuelles ;faire participer davantage les associations dans l’animation de la vie culturelle ;faire connaître davantage la Tunisie et sa culture à l’extérieur et diffuser des films documentaires à travers les chaînes de télévision satellitaires.

« …Sur la base du Programme présidentiel, des résultats de cette consultation et de l’adhésion de la Tunisie aux différentes conventions internationales (…) les orientations du Xème Plan sont centrées sur les principaux axes suivants : enrichir le contenu des actions culturelles, ancrer l’identité, développer la culture nationale et conquérir les marchés culturels extérieurs dans le cadre d’une approche considérant la culture comme une base et un soutien au développement (…) Les orientations et objectifs inscrits pour le secteur

13. Dixième Plan de développement 2002-2006, Volume I, Contenu global

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

de la culture durant la période du Xème plan se basent sur le programme prospectif, la consultation nationale sur la culture et sa contribution dans l’action de développement, la stratégie nationale de mise à niveau des maisons de culture ainsi que l’annonce de l’année 2003 comme année nationale du livre. Sur cette base, l’action visera à affermir la présence de la culture nationale et son rayonnement dans l’espace mondialisé de la communication, l’établissement d’industries de la culture évoluées et la dynamisation de l’investissement privé dans ce secteur, en plus de l’exécution de la stratégie nationale de mise à niveau des maisons de la culture et la création progressive d’une maison de culture par délégation. L’effort sera également renforcé pour intégrer pleinement la culture dans l’action de développement à travers la sauvegarde du patrimoine archéologique et historique et des arts traditionnels, la promotion des sources de la mémoire et de l’identité nationales et le soutien à la créativité, au tourisme culturel et aux institutions culturelles de référence, en plus de la protection de la propriété culturelle et artistique, des droits d’auteur et la promotion de l’artisanat afin qu’il acquière les capacités d’exportation et de résistance face à la concurrence ».

« Dans le cadre de l’affermissement des initiatives relatives à l’intensification du dialogue entre les cultures, le Centre de Carthage pour le dialogue des civilisations sera créé pour concrétiser la vision de la Tunisie dans le domaine de l’ouverture sur les autres civilisations et l’interaction positive avec elles ».

« La décision présidentielle d’accroître progressivement le budget de la culture pour atteindre 1% du budget global de l’Etat à l’horizon de l’année 2004 permettra de réaliser ces objectifs et constituera une incitation aux intellectuels à adhérer à la stratégie de promotion de l’action culturelle de manière plus efficiente et plus large ».

Les options fondamentales de cette politique sont reprises dans le site consacré au 21ème anniversaire du changement (www. Changement.tn) en ces termes :

« Depuis le changement du 7 novembre 1987, la culture occupe, dans la politique du pays, une place de choix. Elle est considérée comme l’un des principaux piliers du Changement, l’un des facteurs décisifs d’un développement équilibré propre à enraciner l’identité nationale et à permettre au pays de s’intégrer dans le processus de la mondialisation…Ce choix procède d’une conscience nette de l’importance du rôle que, tout au long de sa glorieuse histoire, la Tunisie a joué dans l’enrichissement de la civilisation humaine. Ce choix traduit également l’importance accordée à la part prise par la Tunisie dans la diffusion des valeurs et des principes universels. Cet apport considérable favorise grandement la culture du dialogue, de la tolérance et renforce l’esprit de coopération et de solidarité entre les peuples.La politique de promotion de la culture se développe selon trois axes :

élaboration d’un cadre législatif et mise sur pied de grandes institutions de référence ;mise en place des conditions qui favorisent la créativité et l’innovation ;encouragement aux hommes de la culture à qui sont garanties les conditions de production dans les divers domaines culturels et de rayonnement.

Dans cet ordre d’idées, la culture a débordé les frontières traditionnelles. Son rôle est allé bien au-delà des domaines classiques de la création artistique pour constituer désormais un secteur dynamique occupant une place stratégique dans la société et dans la politique de l’Etat. Elle se situe ainsi au cœur d’une approche intégrant l’action culturelle dans le dispositif de développement global et réalisant un juste équilibre entre ouverture et authenticité, et entre valorisation du patrimoine et attachement à la modernité. C’est ainsi que la Tunisie s’est constituée en éminent pôle culturel dans la région ».

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2.4. Financement de la culture

Entre 1987 et 2008 le budget alloué par l’Etat au secteur culturel est passé de 17,429 MDT à 133,495 MDT.Il est prévu que ce budget atteigne 1,25 % du budget de l’Etat en 2009. En outre, cet effort de l’Etat est soutenu par les initiatives des investisseurs privés, motivés par les encouragements et les facilités que garantit le Code d’incitation aux investissements qui a intégré le secteur culturel parmi les secteurs prioritaires, lui permettant, ainsi, de bénéficier d’un important apport du capital privé.

Attributions du Ministère de la Culture (évolution chronologique)

Note préliminaire : A l’indépendance (20 mars 1956) et jusqu’au mois d’octobre 1961, la culture relevait du département de l’éducation nationale

Décret N° 61-346du 7 octobre 1961

Décret portant création du Secrétariat d’Etat aux Affaires Culturelles et à l’Information. (*)(*)Les départements ministé-riels étaient appelés « Secrétariat d’Etat »

Décret N° 61-426du 11 décembre 1961

Décret fixant les attributions du Secrétariat d’Etat aux Affaires Culturelles et à l’Information.

Décret N° 63-377du 25 décembre 1963

Décret relatif au Secrétariat d’Etat aux Affaires Culturelles et à l’Orientation.

Décret N° 75-773du 30 octobre 1975

Décret fixant les attributions du Ministère des affaires culturelles.

Décret N° 81-1637du 1ER décembre 1981

Décret complétant le décret N° 75-774 du 30 octobre 1975 portant organisation du Ministère des affaires culturelles.

Décret N° 82-1027du 8 juillet 1982

Décret modifiant l’article 11 du décret N° 75-774 du 30 octobre 1975 portant organisation du Ministère des affaires culturelles.

Décret N° 83-1084du 17 novembre 1983

Décret portant réorganisation du Ministère des affaires culturelles.

Décret N° 87-106du 24 janvier 1987

Décret modifiant le décret N° 83-1084 du 17 novembre 1983 portant réorganisation du Ministère des affaires culturelles.

Décret N° 93-2378du 22 novembre 1993

Décret portant organisation du Ministère de la culture.

Décret N° 94-1639du 1 août 1994

Décret modifiant et complétant le décret N° 93-2378 du 22 novembre 1993 portant organisation du Ministère de la culture.

Décret N° 96-1875du 7 octobre 1996

Décret portant organisation du Ministère de la culture.

Décret N° 2003-1819du 25 août 2003

Décret modifiant et complétant le décret N° 96-1875 du 7 octobre 1996, portant organisation du Ministère de la culture.

Décret N° 2004-760du 15 mars 2004

Décret fixant les attributions du Ministère de la Culture, de la Jeunesse et des Loisirs.

Décret N° 2005-1707du 6 juin 2005

Décret fixant les attributions du Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

3. Les institutions culturelles

3.1. L’action et la communication culturelles :

L’action et la communication culturelles sont réalisées à travers des institutions telles que les comités culturels, les maisons de culture, le Centre national de communication culturelle et le Centre culturel international de Hammamet.

3.1.1. Le comité culturel national, Le comité culturel national est un organisme rattaché au Ministère de la Culture et

de la Sauvegarde du Patrimoine, chargé notamment de contribuer à l’élaboration et à la réalisation des programmes d’animation culturelle et artistique à Tunis et à l’intérieur de pays, de veiller à la consolidation des relations culturelles avec l’étranger et d’assister les associations et les clubs culturels. Le Comité est doté dans l’exécution de ses programmes d’un Secrétaire général.

3.1.2. Les comités culturels régionaux et locaux : Au nombre de 24 comités culturels régionaux et de 348 comités culturels locaux

répartis sur tout le territoire national, ils constituent un large réseau qui contribue activement, avec le soutien du ministère et des instances régionales et locales, au développement et l’animation de la vie culturelle régionale et locale durant toute l’année.

3.1.3. Le Centre national de communication culturelle:Créé sous l’ancienne appellation de « Centre d’Etudes et de Documentation sur le

Développement culturel (CEDODEC), en application de l’article 77 de la loi des Finances de l’année 1984, il fut organisé par le Décret N° 1353 du 10 décembre 1987, et devient « le Centre national de communication » en 1994. Il s’agit d’un établissement public à caractère administratif, doté de personnalité civile et de l’autonomie financière, sous la tutelle du Ministère de la Culture et de Sauvegarde du Patrimoine. Le Centre est chargé d’effectuer tous les travaux d’études et de recherches, de collecte, de sélection, de traitement et de diffusion de la documentation et de l’information culturelles. Il a notamment pour missions :

3.2. Bases juridiques de l’action et la communication Culturelles :

Conseil supérieur de la culture

Décret N° 82-1629du 20 décembre 1982

Décret portant organisation du Conseil supérieur de la culture.

Arrêté du Ministre des affaires culturellesdu12 février 1983

Arrêté fixant les attributions des commissions spécialisées du Conseil supérieur de la culture.

Décret N° 2007- 4203du 11 décembre 2007

Décret portant création du Conseil supérieur de la Culture et fixant ses attributions, sa composition et les modalités de son fonctionnement.

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Comités culturels et Commissariats régionaux de la culture (décentralisation)

Décret N° 63-114du 19 avril 1963

Décret portant création des Comités culturels

Décret N° 65-286du 31 mai 1965

Décret relatif aux Comités culturels

Décret N° 68-50du 8 mars 1968

Décret relatif aux Comités culturels

Décret N° 83-18du 14 janvier 1983

Décret fixant l’organisation, les attributions et la gestion des Comités culturels régionaux. et locaux .

Décret N° 83-19du 14 janvier 1983

Décret relatif au Comité culturel national.

Décret N° 83-658du 5 juillet 1983

Décret modifiant le Décret N° 83-19 du 14 janvier 1983 relatif au Comité culturel national.

Décret N° 85-1487du 30 novembre 1985

Décret relatif à la création et à l’organisation des conseils régionaux de la culture.

Décret N° 94-560du 15 mars 1994

Décret fixant l’organisation administrative et financière et les modalités de fonctionnement des commissariats régionaux à la culture.

Décret N° 2004-1214 du 25 mai 2004

Décret portant changement d’appellation des commissariats régionaux à la culture et fixation de leurs attributions.

Décret N° 2004-1430 du 22 juin 2004

Décret portant modification du décret N° 94-560 du 15 mars 1994, fixant l’organisation administrative et financière et les modalités de fonctionnement des commissariats régionaux à la culture.

Décret N° 2005-2125 du 14 janvier 2005

Décret modifiant le Décret N° 83-18 du 14 janvier 1983, fixant l’organisation, les attributions et la gestion des comités culturels régionaux et locaux.

Décret N° 2006-1434 du 22 mai 2006

Décret portant changement d’appellation des commissariats régionaux à la culture et à la sauvegarde du patrimoine.

Infrastructures culturelles

Loi N° 82-89du 20 décembre 1982

Loi relative à l’infrastructure culturelle.

Décret N° 83-20du 14 janvier 1983

Décret fixant les statuts particuliers aux maisons du peuple et de la culture dépendant du Ministère des affaires culturelles.

Décret N° 86-837du 29 août 1986

Décret fixant les conditions d’octroi de l’aide de l’Etat aux équipements culturels.

Décret N° 86-838du 29 août 1986

Décret relatif aux équipements culturels des entreprises économiques.

Arrêté du Ministre des affaires culturellesdu 29 août 1986

Arrêté fixant les modalités pratiques relatives à la constitution du dossier technique, en vue de bénéficier de l’aide de l’Etat pour la réalisation des équipements culturels.

Arrêté du Ministre des affaires culturellesdu 29 août 1986

Arrêté fixant le contenu de la déclaration d’infrastructure culturelle.

Arrêté du Ministre des affaires culturellesdu 29 août 1986

Arrêté fixant la nomenclature des équipements culturels pour les différentes catégories d’entreprises économiques.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

3.3. Belles lettres, livre et lecture :

3.3.1. Beït El-Hikma : Académie Tunisienne des sciences, des lettres et des arts : Créée en 1983, la Fondation « Beït El-Hikma » devenue depuis 1992 l’Académie

Tunisienne des Sciences, des Lettres et des Arts, Beït El-Hikma, est un établissement public doté de la personnalité civile et de l’indépendance financière. L’Académie Beït El-Hikma a notamment pour missions14 de soutenir et promouvoir la recherche et l’échange dans les différents domaines d’activités de l’esprit et de la science, de promouvoir la langue arabe, de traduire des ouvrages et élaborer des encyclopédies et dictionnaires.

A ce titre, l’Académie a édité de nombreux ouvrages constitués en séries :établissement de textes ; traductions ; connaissances pour tous ; Bibliothèque

culturelle maghrébine ; recherches et études ; colloques ; index et références ; romans ; poésie et encyclopédie de la civilisation tunisienne.

3.3.2. La Bibliothèque Nationale15 :En 1885 un décret institua « la bibliothèque française de Tunis ». A partir de

1910, celle-ci fut installée dans l’ancienne Caserne d’El-Attarine (édifiée au début du XIXème siècle par le Bey Hammouda Bacha) et prit le nom de Bibliothèque publique de Tunis, avant de devenir, à partir de 1965 la Bibliothèque Nationale (Dar el-kutub al-wataniya). En vertu du décret N° 67-296 du 7 septembre 1967 les manuscrits publics conservés dans toutes les bibliothèques publiques, les mosquées et zaouias sont placés à la Bibliothèque nationale. Le statut de la Bibliothèque nationale mis à jour le 15 mars 1994, fixe ses attributions et son organisation comme suit :

de collecter le patrimoine national, manuscrit, imprimé et autre par la voie de dépôt légal, de l’échange et des dons et d’assurer sa sauvegarde ;d’apporter aux chercheurs et aux associations de savants l’aide nécessaire à la publication et à la diffusion de leurs travaux ;de mettre les fonds de documentation au service de la recherche scientifique ;d’organiser et de gérer un système d’échange et de prêt au niveau national et international ;d’assurer des travaux de recherche et de conseil dans les domaines de ses compétences ;d’œuvrer à introduire la technologie moderne dans le secteur des données et de la documentation ;d’assumer des services de conseil et d’orientation ;de contribuer au recyclage des professionnels et de promouvoir leur niveau ;d’appliquer les législations relatives au patrimoine et d’œuvrer à leur actualisation ;

14. Textes relatifs à Beït El-Hikma.− Loi N° 82-90 du 20 décembre 1982 : Loi portant création de la Fondation Nationale pour la Traduction, l’Etablissement des textes et les Etudes.− Décret N° 83-1109 du 3 décembre 1983 : Décret portant organisation du conseil scientifique de la Fondation nationale pour la traduction, l’établissement des textes et les études.− Décret N° 87-52 du 13 janvier 1987 : Décret modifiant le Décret N° 83-1109 du 3 décembre 1983 relatif à l’organisation du conseil scientifique de la fondation nationale pour la traduction, l’établissement des textes et les études « Beït El-Hikma »− Décret N° 93-2145 du 25 octobre 1993 : Décret portant organisation et modalités de fonctionnement de l’Académie tunisienne des sciences, des lettres et des arts « Beït El Hikma ».

15. Textes relatifs à la Bibliothèque nationale Décret N° 67-296 du 7 septembre 1967 : Décret relatif au regroupement des manuscrits Décret N° 79-756 du 31 août 1979 : Décret fixant les attributions et portant organisation de la Bibliothèque nationale.Décret N° 94-559 du 15 mars 1994 : Décret portant organisation de la Bibliothèque nationale et fixant ses attributions.

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de réaliser des études bibliographiques et de documentation ;de participer à la promotion de la culture nationale ;de collecter, traiter, sauvegarder les documents et de les mettre à la disposition des chercheurs.

Le fonds de la Bibliothèque nationale se compose de manuscrits (40 000) titres ; monographies (2 000 000) ; ouvrages périodiques (13 000 titres) ; et cartes (5000)La Bibliothèque Nationale dispose de deux bases de données : la base de données MAGHREB pour la période d’avant 1966 et la base de données TUNISIE depuis 1997.La bibliothèque compte 4 types de publications :

les index des manuscrits ;la Bibliographie Nationale (cumulatif annuel) ;une liste bibliographique annuelle des travaux universitaires ;des bibliographies spécialisées.

3.4. La musique, la danse et les arts populaires :

Les secteurs de la musique, de la danse et des arts populaires bénéficient de nombreuses mesures et d’institutions réalisées au profit de l’art et des artistes, dont on peut citer :

3.1.1. Le Centre des musiques arabes et méditerranéennes (Ennejma Ezzahra) :Etablissement culturel multidisciplinaire consacré à la musique. Il réunit dans le

cadre d’une vision globale et intégrée les activités scientifiques et intellectuelles avec une programmation musicale de qualité. Le Centre a pour missions de :

contribuer à la sauvegarde du patrimoine musical ;promouvoir les études et les recherches en la matière ;animer le Palais « Ennajma Ezzahra » en tant que monument ;collecter, sauvegarder et étudier les instruments de musique ;superviser le dépôt légal des phonogrammes ;préparer des programmes à caractère artistique et intellectuel dans les divers domaines de la musique ;œuvrer à la concrétisation de la complémentarité entre la musique et les autres expressions artistique ;œuvrer à l’établissement du patrimoine musical, à la réalisation et à la diffusion de toute recherche ou étude y afférant ;encourager la création, l’édition et la réédition d’œuvres musicales de qualité.

3.1.1. La Rachidia : Association créée en 1934, est le fruit de la volonté d’une élite de mélomanes et,

à leur tête, Mustapha Sfar, à l’époque Cheikh de la ville de Tunis (Maire). L’appellation de cette association fait référence à Mohamed Rachid Bey, troisième prince régnant husseinite, amateur de musique éclairé. Mustapha Sfar, en étroite collaboration avec Mohamed Triki et Khémaies Tarnane (musiciens émérites), voulait faire revivre la musique andalouse dans les règles de l’art.

L’institution a ainsi assumé une double fonction : la collecte et la transmission d’un patrimoine musical et son enseignement et le fonctionnement en tant que conservatoire appelé à répertorier la tradition musicale andalouse : le Malouf.

A cet effet, la Rachidia a aménagé des structures de conservation, a assuré la transcription des œuvres et en a assuré la survie. A partir de 1940, « l’effet » Rachidia a inspiré de nombreux créateurs. La réalité musicale de la Tunisie en fut transformée.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

Depuis, la Rachidia continue toujours à assumer ses vocations d’école et de référence, elle contribue en outre par ses concerts mensuels à animer la vie musicale à Tunis et dans les autres villes du pays.

3.1.2. Le Centre national de la danse : Créé en 1998 dans le cadre de la promotion des arts de spectacle, il a pour mission

première la formation des jeunes dans les différentes disciplines ayant trait à la danse traditionnelle, classique (européenne) et moderne.

L’encadrement artistique et pédagogique est assuré par un personnel enseignant qualifié ; les cours sont ouverts à tous les jeunes. Le centre est par ailleurs habilité à proposer les mesures et les actions susceptibles de promouvoir la danse en Tunisie : stages de courtes durées, ateliers, animation, échange d’expériences avec des institutions similaires.

3.1.3. La troupe nationale des arts populaires :Formée en 1963, elle relève de la tutelle du Ministère de la Culture et de la

Sauvegarde du Patrimoine. Ses principales missions consistent à préserver le patrimoine national de danse populaire, à le valoriser, en rehausser le niveau tout en sauvegardant son authenticité. La troupe continue depuis sa création à présenter en Tunisie et à l’étranger des œuvres représentatives et rénovées de danses populaires exprimant le patrimoine des différentes régions du pays avec leurs gestuelles, leurs rythmes et leurs costumes riches et variés. Actuellement, la troupe poursuit un programme de rajeunissement de ses effectifs et d’élargissement de son répertoire.

3.1.4. L’Orchestre symphonique Tunisien : Symbole de l’ouverture de la Tunisie à la culture universelle, l’O.S.T a été créé en

1969. A ses débuts, il eut recours à quelques professeurs instrumentalistes bulgares et à un chef d’orchestre français. L’Orchestre symphonique Tunisien se compose actuellement de 45 musiciens, d’un chef d’orchestre, d’un directeur et d’un régisseur général. Dans le cadre de la coopération culturelle, l’orchestre invite des solistes et des chefs de renommée internationale pour participer à ses concerts mensuels donnés au Théâtre municipal de la ville de Tunis ou dans d’autres espaces de la capitale et de l’intérieur du pays. Les objectifs de l’OST sont d’intégrer des jeunes instrumentalistes tunisiens au sein de l’orchestre et encourager les plus talentueux d’entre eux à jouer en tant que solistes, de présenter des compositions de musique tunisienne sous forme d’œuvres symphoniques, et de faire connaître les œuvres maîtresses de la musique symphonique universelle au public tunisien.

3.1.5. L’Institut supérieur de musique :Il est créé par décret (n˚ 862 de l’année 1984, daté du 26 juillet 1984). Sa création

traduit l’importance du secteur culturel et artistique. Elle répond aux besoins du pays en matière de cadres spécialisés qualifiés dans le domaine musical et à la volonté de contribuer à hausser le niveau des travailleurs et autres acteurs agissant dans ce domaine. L’ISM est placé sous la double tutelle du ministère de la culture et de la sauvegarde du patrimoine et du ministère de l’enseignement supérieur (Université de Tunis I). Cet institut forme les cadres supérieurs et approfondit leurs spécialisations dans les domaines de l’interprétation (instrumentale et vocale), de la composition, de l’enseignement, de l’éducation et de la musicologie. Il les prépare à la recherche scientifique.

En rapport avec ses intérêt d’ordre scientifique et artistique et en guise de contribution dans l’enrichissement de la vie culturelle, l’ISM organise différentes

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manifestations (rencontres, colloques, expositions, concerts, etc.) ouvertes au public. En outre, l’ISM met à la disposition des chercheurs, des musiciens, des étudiants et des élèves quelques unes parmi ses cellules, comme - La médiathèque : elle compte une sélection d’enregistrements audiovisuels en rapport avec des activités scientifiques et artistiques d’une valeur scientifique ou pédagogique assurée, organisées à l’institut ou dans d’autres institutions spécialisées. La médiathèque compte également un grand nombre d’enregistrements musicaux divers, en rapport avec différentes traditions ou écoles musicales.

3.1.6. Les conservatoires de musique Ils ont pour principales missions de fournir aux jeunes et aux moins jeunes un

enseignement musical théorique et pratique de base, de découvrir et d’encadrer les talents et de diffuser dans leurs environnements une culture musicale de qualité.

Les conservatoires se répartissent en deux catégories :i. le Conservatoire national et le Centre national de musique et d’arts populaires :

ces deux institutions relèvent du Ministère de la Culture et de la sauvegarde du patrimoine, ils ont chacune sa propre autonomie administrative et financière.

ii. les conservatoires régionaux : 16 conservatoires régionaux sont créés et gérés par le Ministère ou avec son appui.

En ce qui concerne le soutien apporté à la présence de la chanson et de la musique dans les diverses manifestations et festivals, l’Etat le concrétise par un programme d’acquisition des représentations musicales (plus de 2000 représentations par an). Ces représentations sont données dans toutes les régions. Par ce moyen, on atteint quatre objectifs : animation culturelle ; consolidation de la présence de l’art tunisien ; diffusion de la culture dans les régions ; aide aux créateurs. A tout cela viennent s’ajouter la création du concours de la chanson tunisienne, l’augmentation de la valeur du prix réservé aux groupes, aux auteurs, aux compositeurs et aux artistes chanteurs.

3.5. Le théâtre :

Les initiatives de soutien, prises par l’Etat comme base permettant de stimuler et d’encourager la production et la diffusion des œuvres théâtrales, sont à l’origine de la création de plusieurs groupes et de nouvelles sociétés de production privées qui se consacrent à la production et à la diffusion théâtrale. Ces institutions qui opèrent tout au long de l’année, animent les manifestations, les festivals et les événements culturels et présentent leurs productions à un public intéressé et connaisseur. Certains de ces groupes font partie du secteur public et sont sous la tutelle d’institutions et d’établissements publics, comme le Théâtre national, les centres d’arts dramatiques et scéniques et le Centre national des arts de la marionnette.

3.1.1. Le théâtre nationalCréé en 1983, le Théâtre National Tunisien (TNT) est une institution publique

rattachée au Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine avec une gestion de type indépendant.

Le TNT loge depuis 1988 dans un palais historique du milieu du XIXème siècle situé à Halfaouine dans le faubourg nord de la Médina de Tunis.

Sa mission principale est de :diffuser la culture théâtrale et artistique dans le pays et créer un cadre institutionnel et professionnel propice pour favoriser la création théâtrale ;contribuer au développement du goût du public pour le théâtre ;

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

créer et proposer des œuvres classiques tunisiennes et universelles et des œuvres magistrales de manière à enraciner une tradition d’exigence de qualité.

Outre ses studios de danse et d’exercices physiques, ainsi que ceux destinés aux répétitions et à l’entraînement des jeunes acteurs, le TNT dispose d’ateliers de création d’habits et de décors.

En 1993, le Président de la République met à la disposition du TNT une salle de représentation en plein centre de Tunis, devenue depuis la salle du 4ème Art.

3.1.1. L’Ecole nationale des arts du cirque de Tunis : Créée le 1er octobre 2003 au sein du Théâtre national et installée dans son siège de

Halfaouine, l’École nationale des arts du cirque de Tunis (ENACT) bénéficie du soutien du Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine, de l’Institut français de coopération, ainsi que de la collaboration du Centre national français des arts du cirque de Châlons-en-Champagne et de l’Ecole du cirque de Rosny-sous-Bois (France).

L’ENACT se donne pour objectif de créer le jeune cirque tunisien en formant des artistes de cirque de haut niveau, dotés d’une polyvalence artistique. L’école privilégie un contexte de formation favorisant la recherche et la créativité en restant en prise directe avec la culture du pays. Le cycle des études comprend quatre années. Les deux premières années du cursus privilégient l’enseignement des bases fondamentales en acrobatie, danse, jeux d’acteur, musique et techniques du cirque. L’objectif est d’amener le futur artiste à un niveau d’aptitude physique et psychologique qui favorise son épanouissement. L’élève suivra en plus un programme socio-éducatif et de connaissances générales (langues vivantes, histoire des arts…)

Durant la troisième et la quatrième année, l’accent est mis sur les techniques de cirque avec une spécialisation pour chaque élève (trapèze, fil, trampoline, jonglerie) selon ses aptitudes et les résultats obtenus durant le premier cycle.

Par ailleurs un « cycle loisirs » est ouvert à tous les âges (adultes, adolescents et enfants). Il se limite à deux séances par semaine. Le but recherché à travers ce cycle est de développer chez les élèves des capacités physiques, artistiques et humaines, ainsi que l’imaginaire, le rapport avec l’autre, le plaisir de transmettre une sensation, la solidarité, la conscience de son corps, le contrôle de soi.

3.1.2. Les centres des arts dramatiques et scéniques Créés en 1993 à l’occasion de la journée internationale du théâtre, dans le cadre

d’un ensemble de mesures présidentielles en faveur de ce secteur.Les centres ont pour missions :

de développer des traditions théâtrales à l’intérieur du pays à partir de grands pôles régionaux ;de former et recycler artistes et techniciens de la scène ;de produire et coproduire des œuvres dramatiques et scéniques de qualité ;de programmer des cycles de représentations dramatiques et scéniques destinés au public des régions ;d’inciter aux travaux de recherches dans le domaine des arts dramatiques et scéniques.

Les centres bénéficient de la tutelle du Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine et de son appui financier, administratif et logistique. Chaque centre est dirigé par un directeur, secondé par divers services (production, gestion des espaces, relations publiques et exploitation…) aux côtés de techniciens et de comédiens permanents. Les trois centres actuellement constitués sont :

le Centre des Arts dramatiques et scéniques du Kef (créé en 1993)le Centre des Arts dramatiques et scéniques de Gafsa (créé en 1993)le Centre des Arts dramatiques et scéniques de Sfax (créé en 1997).

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3.1.1. Le Centre national des arts de la marionnetteCréé le 27 mars 1993, ce centre vient couronner les efforts de l’ex troupe de théâtre

des marionnettes de Tunis, fondée depuis 1976 par une élite d’artistes convaincus du rôle de cet art comme expression culturelle et comme support ludique et éducatif de grande portée. Depuis sa fondation le centre œuvre à créer, produire et présenter au public un produit de qualité en adéquation avec l’évolution des besoins et les attentes de l’enfance et de la jeunesse. Le centre participe également, à travers ses créations, à l’élaboration d’une esthétique spécifique inspirée du patrimoine culturel tunisien, tout en étant ouverte sur les expériences mondiales les plus en vue dans le domaine.

3.6. Les arts plastiques :

L’Etat a veillé à créer les conditions d’un climat propice à la floraison des arts plastiques. La première de ces réformes porte sur les textes législatifs organisant le secteur. Des incitations sont mises en œuvre pour stimuler l’activité artistique. Elles prennent des formes diverses :

Prix et subventions (comme le Prix annuel des arts plastiques : décret n° 1703-1994) ;Institution, à partir de1989, de commissions afin d’organiser les acquisitions de l’Etat ;Arrêtés et cahiers des charges qui organisent la création de galeries privées d’expositions et d’ateliers privés d’art plastique.

Parmi les résultats de ces initiatives il y a lieu de souligner :l’accroissement du nombre d’œuvres d’art acquises par l’Etat, résultat de l’augmentation des fonds alloués à cet effet ;la multiplication des espaces, galeries et salles d’exposition, ce qui a influencé le paysage culturel en multipliant les occasions de faire le point sur les différents courants, les écoles et les formes d’expression graphique et plastique.

Sur le plan économique, ces espaces, dont le nombre atteint 70, participent à la dynamisation des industries et du marché culturels et à la création de sources de revenus.

Figure 12 : peinture Yahia Turky Figure 13 : peinture A.Gorgi

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

4. La protection du patrimoine culturel :

« Protection » signifie l’adoption de mesures visant à la préservation, la sauvegarde et la mise en valeur des expressions culturelles16.

L’accroissement de l’intérêt accordé par l’Etat à la question du patrimoine s’exprime clairement à travers la promulgation de la Loi N° 94-35, en date du 24 février 1994, Relative au Code du patrimoine archéologique, historique et des arts traditionnels, et l’adoption (en novembre 2004) de la dénomination du Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine.

Il est intéressant de noter que cet intérêt s’inscrit dans une continuité historique, tel l’exemple de Rachid Bey (il régna de 1756 à 1759) qui laissait son frère gérer les affaires politiques du pays pour se consacrer à la collecte et à la codification du patrimoine musical, acte qui inspira, en 1934, les fondateurs de l’association musicale de la Rachidia (nom choisi en hommage à Rachid Bey) dont l’objectif principal s’inscrit dans le renouveau culturel et social mené par l’élite de l’époque, consciente des risques de déperdition du patrimoine musical considéré comme l’un des fondements de l’identité nationale en construction.

Fondée en 1896, la Khaldounia (dont le nom réfère à Ibn Khaldoun) est une association qui prend le caractère d’un institut d’enseignement libre. Elle se proposait de compléter et de diversifier, tout en lui donnant un caractère de modernité, l’enseignement prodigué par la Zeitouna. Parallèlement à son programme de cours officiels, l’association avait une participation culturelle très active par des cycles de conférences portant sur différents aspects du patrimoine culturel, en mettant l’accent sur la relation dynamique entre patrimoine et identité nationale. La même orientation est prise par l’Association des anciens élèves du Collège Sadiki, (établissement fondé en 1875 par le Ministre réformateur Khareddine Pacha afin de former les jeunes tunisiens aux carrières libérales et administratives et de leur assurer un enseignement moderne et ouvert sur le monde occidental).

Un autre cas significatif est celui de Hassan Hosni Abdalwahab, érudit et historien, qui a assumé différentes charges politiques et administratives. Il rachetait manuscrits et différents objets du patrimoine pour alimenter les musées dont un certain nombre, dans différentes régions du pays, sont de sa création. A l’indépendance, il a été chargé de la direction de l’Institut National d’Art et d’Archéologie (l’actuel Institut National du Patrimoine). A son décès il léga à la Bibliothèque nationale un très important fonds de manuscrits dont certains sont rares, voire même uniques, donnant ainsi un exemple qui sera suivi par d’autres personnalités intellectuelles.

Le lancement de la campagne internationale pour la sauvegarde de Carthage et de la Médina de Tunis, solennellement proclamée par M. René Maheu, Directeur général de l’UNESCO, sur le site de Carthage (mai 1971) marque un tournant décisif en matière d’action pour la sauvegarde, de mise en valeur du patrimoine culturel et de coopération internationale dans ce domaine. Sept sites culturels seront inscrits sur la prestigieuse liste de l’UNESCO du patrimoine de l’humanité (Carthage, El Jem, Dougga, Kerkouane, Médina de Tunis, Médina de Sousse et Médina de Kairouan).

16. Convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, Article 4, § 7

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Par ailleurs, la Tunisie a ratifié les textes normatifs de l’UNESCO relatifs au patrimoine culturel matériel et immatériel, marquant ainsi son engagement à accorder à ces secteurs tout l’intérêt requis. Ainsi ont été ratifiées les conventions internationales suivantes17 :

Convention pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé. La Haye, 14 mai 1954 et Protocole pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé. La Haye, 14 mai 1954.Convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriétés illicites des biens culturels. Paris, 14 novembre 1970.Convention pour la protection du patrimoine mondial culturel et naturel. Paris, 16 novembre 1972Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel. Paris, 17 octobre 2003.Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles. Paris, 2005Convention internationale pour la protection du patrimoine subaquatique. Paris, 2001

Figure 14 : Sites tunisiens inscrits sur la liste UNESCO du Patrimoine mondial

5. Condition des artistes et encouragements de la créativité :

De nombreuses mesures incitatives ont été prises en faveur des artistes et de la créativité, telles que :

la garantie de la liberté de création dans tous les domaines de l’art ;la couverture sociale accordée aux artistes et aux hommes de lettres ;les initiatives de soutien aux projets artistiques et aux œuvres d’art, aux niveaux de la production, de l’édition et de la diffusion ;la création d’une Organisation tunisienne de protection des droits d’auteur. Il s’agit d’une institution nationale, sous tutelle du Ministère de la Culture et de la sauvegarde du patrimoine, qui s’est substituée à l’Association tunisienne des auteurs. Elle se charge de défendre les droits matériels et moraux de ses adhérents, sur la base d’un ensemble de lois et de textes législatifs nouvellement promulgués qui se rapportent à la propriété artistique et intellectuelle.

17. Cf. Textes juridiques relatifs au patrimoine culturel (en annexes)

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

6. Les industries culturelles :

« Activités biens et services culturels » renvoie aux activités, biens et services qui, dès lors qu’ils sont considérés du point de vue de leur qualité, de leur usage ou de leur finalité spécifiques, incarnent ou transmettent des expressions culturelles, indépendamment de la valeur commerciale qu’ils peuvent avoir. Les activités culturelles peuvent être une fin en elles-mêmes, ou bien contribuer à la production de biens et services culturels18.

« Industries culturelles » renvoie aux industries produisant et distribuant des biens ou services culturels tels que définis au paragraphe 4 ci-dessus.19

6.1. L’édition :

Le secteur de l’édition a connu un remarquable essor à la fin des années quatre vingt dix. Il est le fruit de la nouvelle politique culturelle de l’Etat qui a fait de la culture l’un des principaux fondements du développement et qui a procédé à la décentralisation du secteur de l’édition, permettant aux privés de prendre part à ces activités. Cette orientation s’imposait d’autant plus après la disparition de la Société Tunisienne de Diffusion et de la Maison Tunisienne d’Edition, au début des années quatre-vingt-dix.

Le Ministère a multiplié les subventions octroyées au livre culturel, ainsi que les incitations pour stimuler la création, la lecture et le développement de l’infrastructure et des équipements, accordant un intérêt accru à la culture de l’enfance et de la jeunesse et à la promotion du patrimoine, comme l’attestent les statistiques suivantes (*) :

Les achats d’encouragement

Année Budget alloué en Dinars Nombre de titres achetés

1988 183.000 306

2006 1.078.667 992

Taux d’évolution : 224,18 %

Subvention du papier du livre culturel

Année Budget alloué en DinarsNombre de titres subventionnés

1988 113.530 91

2006 746.559 944

Taux d’évolution : 937,36 %

Production du livre culturelAugmentation du nombre de

maisons d’éditionRéseau des bibliothèques

publiques

Année Nombre de titres AnnéeNombre de

maisons d’éditionAnnée

Nombre de bibliothèques

1988 389 1988 40 1988 247

2006 1500 2006 125 2006 378

Taux d’évolution :285,60 % Taux d’évolution : 212,5 % Taux d’évolution : 53,04 %

(*) Source : www.changement.tn

18. Convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, Article 4, § 4

19. Convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, Article 4, § 5

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6.2. Le cinéma :

Le cinéma tunisien a connu un développement notable, du fait, notamment d’un intérêt de la part des pouvoirs publics.

Prenant en considération les exigences matérielles de la production et de la diffusion cinématographiques, l’Etat accorde à ce secteur d’importantes subventions aux niveaux de la production, de la diffusion, de la réhabilitation des salles de cinéma, et mis en place un certains nombres de mesures telles que la caisse de compensation pour la production cinématographique nationale, l’ exonération d’impôts pour les films tunisiens, et la participation automatique de la SATPEC (Société anonyme de production et d’expansion cinématographique). Néanmoins, dans les années 1980, on assiste à l’émergence du secteur privé qui entraîne la liquidation de la SATPEC, désormais remplacée par une société mixte « Carthage-Images ». Le budget alloué par l’Etat au soutien de la production cinématographique est passé de 0,220 millions de Dinars en 1987 à 5 millions de Dinars en 2005.

Enfin, il est intéressant de mentionner que les Journées Cinématographiques de Carthage, crées en 1966, constituent le plus ancien festival cinématographique dédié à la promotion du cinéma arabe et africain.

6.3. L’artisanat :

L’artisanat est issu de l’évolution, à travers trois millénaires d’histoire, de l’art de vivre des différentes composantes ethnoculturelles du peuple tunisien et reflète l’esprit culturel national. Son impact économique en fait le plus important secteur parmi les industries culturelles..Les encouragements de l’Etat sont aussi diversifiés que : la formation aux métiers d’artisanat, l’aide aux jeunes artisans pour la création d’entreprise (fonds 26 – 26), l’exonération d’impôts de certaines matières premières, l’encouragement de l’innovation et de la créativité dans ce domaine (diverses foires et expositions dont notamment le salon annuel de la créativité artisanale, qui a lieu au mois de mars chaque année), institutionnalisation de la Journée nationale de l’habit traditionnel (le 16 mars de chaque année).

Ce secteur emploie environ 300 000 personnes (ce qui représente 11% de la population active tunisienne) et contribue pour 3,8% du PIB et 2,2% des exportations.

L’Etat intervient à travers l’Office national de l’artisanat, entreprise publique créée en 1959 et placée sous la tutelle du Ministère du commerce et de l’artisanat, dont les fonctions principales sont le renforcement du secteur – par la formation, les études économiques, la promotion, l’assistance aux artisans, le développement de la coopération internationale, etc.- et la commercialisation des produits issus de l’artisanat, à destination des touristes. En 1990, ses fonctions strictement commerciales sont confiées à une société distincte : la Société de commercialisation des produits de l’artisanat (SOCOPA).

Témoin de l’efficacité de cette politique : le nombre de lauréats tunisiens au Prix UNESCO pour la promotion de la créativité artisanale pour les Etats arabes20.

20. Cf. Annexe 7 : Lauréats Prix UNESCO

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

II. Diversité culturelle et dialogue interculturel : analyse de l’interaction de la politique culturelle tunisienne avec la Convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité culturelle (UNESCO, 2005) et la Déclaration Islamique sur la diversité culturelle (ISESCO, 2004).

La Convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité culturelle (UNESCO, 2005) aussi bien que la Déclaration Islamique sur la diversité culturelle (ISESCO, 2004), tout en se référant à la Déclaration universelle de l’UNESCO sur la diversité culturelle, constituent une réponse à la menace de la « mondialisation » de la culture qui se précisait par :

l’approche de la fin de la période de grâce accordée aux pays en développement (10 ans à partir de 1995) pour la non soumission de plaintes à leur encontre dans le cadre de leur politique commerciale, secteur culturel inclus 21 ;la tendance à « incriminer » la culture arabo-islamique suite aux événements du 11 septembre 2001 et à survaloriser la culture anglo-saxonne en général et la culture américaine en particulier ;le flux incontrôlable de produits culturels émanant des pays à grande capacité de production et de diffusion culturelle. Les statistiques internationales sur le commerce des biens culturels montrent une balance déficitaire en termes d’importation et d’exportation des produits et services culturels pour la plupart des pays en développement22. Ce flux représentait un double danger : uniformiser et/ou modifier les valeurs inhérentes aux cultures nationales et locales. l’agenda de l’OMC prévoyait l’ouverture en 2005, du débat sur les services culturels au niveau de l’Accord général sur le commerce et les services (AGCS), ce qui a suscité la réaction de plusieurs pays qui ont appelé à la création d’une « exception culturelle » internationale pour les produits et services culturels, visant à garantir leur non soumission totale au droit commercial international ; d’où la recherche à instaurer un cadre international tenant compte aussi bien du rôle des produits et services culturels en tant que véhicules des valeurs culturelles identitaires, que de leurs caractéristiques commerciales.

Partant du principe que la préservation de la diversité culturelle nécessite la reconnaissance du droit de souveraineté nationale pour développer les expressions culturelles (dans toutes leurs formes), sans qu’il soit une entrave à l’égard du concept du libre marché et de concurrence, la Tunisie a participé activement à l’élaboration et à la promotion de la Convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles, notamment par l’organisation, en collaboration avec l’AIF, l’ISESCO et l’ALECSO du Séminaire sur la diversité culturelle (Tunis, 8-9 septembre 2003).

La position de la Tunisie a été centrée sur les spécificités culturelles du monde arabo-islamique, notamment le droit des Etats de protéger leurs cultures nationales et la liberté de formuler leur politique culturelle nationale, position émanant des principes et

21. cf. Accord général sur le commerce et les services – AGCS

22. cf. « International flows of selected cultural goods and services », ISU, 2005

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orientations fondamentaux de la politique culturelle nationale, et en parfaite harmonie avec la Convention de l’UNESCO et les deux Déclarations de l’UNESCO et de l’ISESCO.

Afin d’affirmer cet engagement, la Tunisie a, d’une part, adhéré aux instruments normatifs de l’UNESCO (Convention internationale sur la protection et la promotion de la diversité culturelle, Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel) et, d’autre part, promulgué une batterie de dispositions pratiques destinées à appliquer les termes de ces instruments.

1. Développement des industries culturelles :

Dans la perspective d’intégrer davantage la culture dans le processus de développement global du pays, l’Etat tunisien ne cesse d’accroître les conditions favorables à l’encouragement de l’initiative privée. Cet intérêt est reflété à travers l’insertion, depuis 1999, des industries culturelles dans la liste des activités prévues par le Code d’incitation aux investissements23.

Ainsi, les sociétés de production théâtrale et d’édition du livre ont été intégrées dans la liste des industries culturelles qui bénéficient des dispositions de ce Code24 .

La politique d’encouragement de l’initiative privée établie depuis 2004 s’articule autour des mesures incitatives suivantes :

l’allègement des procédures de création de plusieurs catégories d’entreprises culturelles privées par la suppression de l’agrément préalable et son remplacement par des cahiers des charges, ainsi que la suppression de toute procédure administrative liée à la création (principe de la liberté d’initiative économique) ;la création de mécanismes de financement en harmonie avec les spécificités économiques et financières des entreprises culturelles privées ;l’intégration des entreprises culturelles privées dans le mécanisme des industries et services nationaux ;l’intensification de la coopération internationale pour améliorer les capacités des entreprises culturelles privées et instaurer des mécanismes à même de permettre la diffusion de la production culturelle ;la promotion de la protection des droits d’auteur et des mécanismes de valorisation du capital immatériel des entreprises culturelles privées ;l’instauration d’un système de statistiques adéquat lié aux spécificités des entreprises culturelles.

Sur un plan pratique, cette politique a permis :la création de 14 cahiers de charges incluant les volets liés à la formation artistique et la valorisation du patrimoine ;l’extension de la liste relative à l’exonération de la TVA pour certains équipements destinés à la production culturelle ;la création du « Fonds de Garantie des Industries Culturelles » en coopération avec l’Agence Intergouvernementale de la Francophonie (opérationnel depuis 2004) ;l’instauration d’un service de conseil et d’encadrement au profit des opérateurs culturels privés, auprès du Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine ;la sensibilisation des investisseurs privés culturels quant à l’usage de leur droit

23. Cf. Décret n° 94-492 du 28 février 1994, portant fixation des listes des activités relevant des secteurs prévus par les articles 1, 2, 3 et 27 du Code d’incitation aux investissements.

24.Cf. Décret N° 2003-1676 du 11 août 2003 et Décret N° 2004-1630 du 12 juillet 2004.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

à recourir aux mécanismes déjà établis au profit des industries manufacturières et des services nationaux (Fonds de promotion des exportations, Fonds d’accès aux marchés d’exportation, l’Assurance crédit pour l’exportation, l’Assurance du crédit commercial…)

Compte tenu de l’importance accordée au secteur de la production cinématographique, et dans le but de la doter des atouts nécessaires à sa promotion, de nouvelles mesures ont été instituées en sa faveur :

l’encouragement de l’investissement extérieur et du partenariat dans les domaines de la production cinématographique ;la création d’un guichet unique pour faciliter les démarches administratives relatives à la réalisation des films cinématographiques étrangers en Tunisie ;l’élaboration d’un guide d’information sur les capacités nationales dans le domaine du cinéma (potentialités naturelles, compétences techniques et humaines…) ;l’institution d’une subvention au profit des salles de cinéma en vue de leur mise à niveau ;l’augmentation du budget alloué au soutien de la production cinématographique.

2. Diversité culturelle et cohésion sociale

La société moderne n’est pas formée de groupes juxtaposés auxquels « appartiendraient » les individus, mais de personnes dont les rôles sociaux sont multiples. Selon les circonstances historiques, ils choisissent, en fonction de leur passé individuel et collectif, des formes de références et d’identifications, qu’ils sont libres de réélaborer.

Le risque majeur concerne la cohésion sociale. La reconnaissance publique des groupes particuliers risque de cristalliser et de consacrer les particularismes aux dépens de ce qui unit les citoyens, à organiser les replis des individus sur leur communauté d’origine au lieu de leur donner les moyens de la dépasser et d’entrer en relations avec les autres. Les groupes culturels ne sont pas donnés une fois pour toutes, ils sont le produit d’une construction historique. En leur accordant à un moment donné des droits particuliers, la reconnaissance publique contribue à les faire exister de manière permanente. Elle risque de les conduire à la fragmentation sociale en juxtaposant des « communautés », fermées les unes aux autres, sans échanges entre elles.

Comment inscrire à la fois l’égalité du citoyen et la reconnaissance de la diversité des droits des cultures dans des institutions politiques ? Quel peut être le contenu de ces « droits culturels » ?

La construction de l’Etat-nation fondée sur l’émergence d’une société démocratique organisée comporte de manière indissoluble des éléments dits ethniques – une culture, une langue, une histoire commune et la conscience de partager cette culture et cette mémoire – et un principe civique, selon lequel les individus sont également citoyens par delà leurs diversités. Le partage par tous les nationaux d’une même culture et d’une mémoire historique singulière, la participation aux mêmes institutions, qu’il s’agisse de l’école ou de l’entreprise en passant par l’ensemble des pratiques politiques (tel le suffrage). La familiarité établie entre les nationaux, quelles que soient par ailleurs les différences qui les séparent, est le produit de cette socialisation spécifique et de la vie commune à l’intérieur d’une société nationale concrète. C’est ce concept de l’Etat-nation – dans lequel s’inscrit le concept de citoyenneté – qui est désormais garant de la cohésion sociale par sa neutralité vis-à-vis des pratiques intellectuelles dont la liberté est garantie pour tous. Chacun est libre de respecter des fêtes particulières et d’adopter les formes

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de la vie collective qui ne sont pas contradictoires avec les valeurs communes. Mieux encore, l’Etat devient protecteur des religions minoritaires, tel le cas du judaïsme (l’Etat tunisien accorde aux juifs la liberté du culte, subventionne partiellement la restauration et l’entretien de synagogues et autorise les enfants juifs de l’île de Jerba à partager leur journée d’étude entre les écoles publiques séculaires et les écoles religieuses privées).

Reste le problème de la minorité berbérophone, qui représente moins que 1% de la population tunisienne. Si chacun, cela va de soi, parle la langue qu’il veut chez lui ou avec ses amis, doit-il avoir le droit de la parler dans l’école, devant la justice, dans les instances politiques ? Jusqu’à quel point un espace public commun peut-il être organisé sans que les citoyens communiquent par une langue publique commune ?

La réalité sociopolitique et culturelle de la Tunisie non seulement, ne s’oppose aucunement à l’existence de cette minorité linguistique et lui garantit la libre pratique de sa langue maternelle, mais reconnaît pleinement la présence de cette population minoritaire, et souligne sa contribution à la vie collective.

C’est l’histoire de la formation sociale, telle qu’exposée dans le premier chapitre et qui a abouti à la naissance de l’Etat-nation, qui justifie et légitime l’adoption de la politique de reconnaissance des droits culturels.

3. Modalités d’action et de sensibilisation à la diversité culturelle et au dialogue interculturel

3.1. Rôle de l’éducation : culture du dialogue pour le dialogue des cultures :

3.1.1. La loi sur l’éducation : La Loi d’orientation de l’éducation et de l’enseignement scolaire25 définit dans

son Titre I la mission de l’éducation comme suit :

Article premierL’éducation est une priorité nationale absolue et l’enseignement est obligatoire de

six à seize ans.L’enseignement est un droit fondamental garanti à tous les Tunisiens sans

discrimination fondée sur le sexe, l’origine sociale, la couleur ou la religion ; c’est aussi un devoir qu’assument conjointement les individus et la collectivité.

Article 2L’élève est au centre de l’action éducative.

Article 3L’éducation a pour finalité d’élever les élèves dans la fidélité à la Tunisie et la

loyauté à son égard, ainsi que dans l’amour de la patrie et la fierté de lui appartenir. Elle affermit en eux la conscience de l’identité nationale et le sentiment d’appartenance à une civilisation aux dimensions nationale, maghrébine, arabe, islamique, africaine et méditerranéenne, en même temps qu’elle renforce l’ouverture sur la civilisation universelle.

L’éducation a aussi pour but d’enraciner l’ensemble des valeurs partagées par les Tunisiens et qui sont fondées sur la primauté du savoir, du travail, de la solidarité, de la tolérance et de la modération. Elle est garante de l’instauration d’une société

25. Loi n° 2002-80 du 23 juillet 2002

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

profondément attachée à son identité culturelle, ouverte sur la modernité et s’inspirant des idéaux humanistes et des principes universels de liberté, de démocratie, de justice sociale et des droits de l’homme. »

Par ailleurs, il est stipulé dans l’Article 56 de cette loi que l’école a principalement pour mission de faire acquérir aux jeunes « des compétences comportementales qui, outre le développement du sens de la responsabilité, englobent un ensemble de savoir être fondamentaux : savoir compter sur soi, coopérer avec autrui, accepter la critique et un point de vue différent du sien ».

Cette loi définit le statut des langues dans l’enseignement :

Article 9[…] « L’école est essentiellement appelée à donner aux élèves les moyens :

de maîtriser la langue arabe, en sa qualité de langue nationale ;de maîtriser deux langues étrangères au moins…

Article 51La langue arabe est enseignée dans tous les cycles de l’enseignement de façon

à garantir sa maîtrise à la fois comme moyen de communication et de culture, et son utilisation pour apprendre et pour produire dans les différents domaines du savoir.

Les langues étrangères sont enseignées dès le premier cycle de l’enseignement en tant qu’outils de communication et moyens d’accès direct aux productions de la pensée universelle et ce qu’elle véhicule comme techniques, théories scientifiques et valeurs civilisationnelles, afin de préparer les jeunes à suivre leur évolution et à y contribuer d’une manière qui permette à la fois d’enrichir la culture nationale et d’assurer son interaction avec la culture universelle ».

Il est entendu que l’ensemble de ces principes et de ces orientations se reflètent dans les programmes et dans l’organisation de la vie scolaire.

Ces actions et ces orientations sont renforcées à travers différentes actions de coopération entre le Ministère de l’Education et de la Formation et d’autres départements ministériels : tel l’accord avec le Ministère de l’Environnement et du Développement durable (projet des écoles pour le développement durable), ou avec le Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du patrimoine (projet d’éducation au patrimoine).

3.1.1. Exemple des Ecoles associées de l’UNESCOCréé en 1953, le Réseau du Système des Ecoles associées de l’UNESCO (réSEAU),

appelé plus couramment les Ecoles associées de l’UNESCO, est un réseau mondial de 8000 établissements scolaires répartis dans 177 pays (des écoles maternelles aux instituts de formation des enseignants en passant par les écoles primaires et secondaires) qui travaillent en faveur d’une éducation de qualité et dont les objectifs se déclinent en 3 niveaux :

au niveau national : Les Commissions nationales pour l ’UNESCO et les Ministères de l ’Éducation sont invités à créer un réseau d’écoles désireuses d’entreprendre des activités et des travaux expérimentaux en vue d’améliorer la qualité de l’éducation, en particulier ses dimensions éthique, culturelle et internationale, en développant des approches, des méthodes d’enseignement efficaces. Ce réseau est conçu pour avoir un effet multiplicateur à travers la diffusion des résultats obtenus. A ce titre, Le réSEAU a souvent contribué aux réformes éducatives mises en œuvre dans les différents États. La Tunisie adhère à ce réseau depuis 1982, et compte une soixantaine d’établissements répartis entre les trois niveaux d’enseignement : le primaire, le moyen et le secondaire.

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au niveau régional : en matière d ’éducation, malgré les particularités de chaque région, il existe des dénominateurs communs: culture, langue, religion, etc.. Par conséquent, chaque région du monde est invitée à élaborer un plan d’action avec un certain nombre de «Projets Phares», d’initiatives et d’événements. L’accent est mis sur le développement des échanges entre professeurs et élèves d’une même région. La Tunisie a pris l’initiative de réunir, pour la première fois, les coordonnateurs nationaux des Ecoles associées des cinq pays du Maghreb (2007) dans la perspective d’établir des projets communs. Les thèmes choisis portent sur la Décennie des Nations Unies d’éducation au développement durable ; la gestion de l’eau et l’éducation au patrimoine.au niveau international : des efforts sont déployés, d ’une part, pour faciliter l’échange d’informations sur le réSEAU, la mise en œuvre de projets pilotes internationaux, les événements, les campagnes et les concours et, d ’autre part, pour favoriser les contacts et développer la solidarité entre les écoles participantes membres de l ’UNESCO. Les Ecoles associées tunisiennes participent à l’initiative interrégionale « Projet de la Méditerranée de l’Ouest » (PMO), à laquelle participent neuf pays de la Méditerranée occidentale et dont l’objectif est d’établir des ponts entre les jeunes des deux rives de la Méditerranée pour une meilleure connaissance et « apprendre à vivre ensemble ». Tous les ans une rencontre des jeunes est organisée dans l’un des pays participants au projet, ce qui permet de connaître ce pays, échanger, comparer et évaluer les expériences menées tout au long de l’année scolaire, nouer le dialogue des cultures à travers un ensemble d’activités choisies à cet effet (expositions, défilé de costumes traditionnels, jeux typiques des différents pays…) et, surtout, à travers les amitiés qui se créent entre jeunes et entre enseignants.

Ainsi, les écoles affiliées sont invitées à lancer des projets pilotes sur les quatre thèmes de réflexion principaux qui englobent un large éventail de thèmes secondaires en rapport les uns avec les autres. Ces quatre thèmes constituent un point de départ mais n’excluent pas l’élargissement du débat en tenant compte de l’environnement, des préoccupations et des aspirations des élèves. Les thèmes présentés ci-après fournissent une base qui peut s’étendre à d’autres domaines :

problèmes mondiaux et rôle du système des Nations Unies : l’analyse de problèmes tels que la faim dans le monde, la maladie, le chômage, la pollution, l’analphabétisme, l’identité culturelle, la condition de la femme, la démographie, etc. est proposée aux élèves qui tentent de mesurer les répercussions de ces problèmes à l’échelle locale, nationale et internationale. En cherchant à trouver des solutions, les élèves arrivent à mieux comprendre de manière concrète le rôle actuel et futur de l’Organisation des Nations Unies et de ses institutions spécialisées. Les écoles peuvent également mettre à profit la célébration des années et des journées internationales des Nations Unies pour permettre aux élèves de replacer les problèmes dans leur contexte au regard de leurs activités présentes et futures.Droits de l’Homme, démocratie et tolérance : les écoles prennent souvent comme point de départ la Déclaration universelle des droits de l’Homme, la Déclaration des droits de l’enfant, la Recommandation de 1974 de l’UNESCO, la Convention des droits de l’enfant, la Décennie de l’éducation en faveur des droits de l’homme (1995-2004).Le débat doit se fonder sur l’expérience des élèves et s’élargir à celle des autres, afin de leur faire prendre conscience de leurs droits, mais aussi de leurs devoirs et de leurs responsabilités. Aujourd’hui, bon nombre d’activités relatives aux droits de l’Homme visent à éliminer tous les signes d’intolérance, de racisme, de discrimination et à renforcer l’éducation

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

pour la démocratie, le respect mutuel, le civisme, la tolérance et la résolution non-violente des conflits.apprentissage interculturel : dans des sociétés au caractère multiculturel et multiethniques de plus en plus prononcé, la connaissance d’autres pays et d’autres cultures peut déjà se faire aux niveaux local et national. Des contacts peuvent être établis avec des parents ou des élèves ayant d’autres origines, des populations autochtones, des groupes d’immigrés, des ambassades et des centres culturels étrangers auxquels on pourra demander de prendre part à des expositions ou d’envoyer des intervenants pour parler aux élèves de leur pays et du rôle qu’il tient dans le système des Nations Unies, afin de promouvoir une meilleure compréhension et une meilleure apprécia-tion des coutumes, des traditions et des valeurs d’autrui. Mais si la compréhension inter-nationale commence à la maison, à l’école et au sein de la communauté, le réSEAU permet néanmoins de faciliter les prises de contact avec des établissements scolaires à l’étranger.environnement : ce thème permet de faire le rapprochement entre les problèmes relatifs à l’environnement à travers le monde et les réalités sur le plan national, local et individuel. Dans cette perspective, on pourra proposer aux élèves d’y réfléchir au niveau local en les amenant éventuellement à formuler des stratégies pouvant s’appliquer à des situations équivalentes aux niveaux national et international. Les thèmes traités concernent, par exemple, la pollution, les énergies, la conservation des forêts, la recherche sur les océans et l’atmosphère, l’érosion des sols et la protection des ressources naturelles, la désertification, l’effet de serre, le développement durable, le recyclage, le «Plan d’action 21», etc. On peut aussi leur expliquer comment la science contribue à l’avenir de l’humanité. La réflexion en classe débouche souvent sur des projets à vocation communautaire destinés à répondre à des besoins locaux immédiats.

3.1.1. Projet éducatif sur le patrimoine mondial avec les écoles associées UNESCOLancé en 2004, le Projet UNESCO sur l’éducation des jeunes au patrimoine

mondial a été coordonné par le réSEAU et le Centre du patrimoine mondial, et financé par l’Agence norvégienne pour le développement international (NORAD) et la Fondation Rhône Poulenc (France).

A travers l’intégration de l’éducation au patrimoine mondial dans les programmes de l’enseignement secondaire, le projet a pour but d’inciter les jeunes à s’intéresser à la préservation du patrimoine mondial et à créer une nouvelle synergie entre les enseignants, les concepteurs des programmes scolaires, les spécialistes du patrimoine et les autres acteurs au niveau local et international. Cette démarche part du principe que c’est en instillant aux décideurs de demain le sens profond de la responsabilité envers notre patrimoine commun que la richesse et la diversité culturelle et naturelle de la planète pourront être sauvegardées.

Dans le même esprit, une expérience a été menée en Tunisie dans 12 écoles primaires sur l’ensemble du territoire national. Le principe est que chaque établissement « adopte » un élément significatif du patrimoine dans la région où il se situe. Une fois le choix fixé, une enquête de terrain, menée par les élèves, devra permettre de recueillir des renseignements sur l’origine, les fonctions, l’architecture, l’état de conservation, et aboutir à des propositions de solutions de préservation et sauvegarde de ce patrimoine. Des échanges entre établissements permettent de comparer les résultats et de mieux connaître le patrimoine national. La même

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démarche est appliquée au patrimoine immatériel (collecte, classement, comparaison des versions…). Le succès du projet a été démontré à travers diverses exemples dont :

une école de Tunis : les élèves de cette école ont travaillé sur un monument du quartier, restauré et transformé en bibliothèque publique. L’état de ce monument (récemment restauré par l’Institut National du Patrimoine) a servi de référence pour revendiquer la restauration d’autres monuments du même quartier (affiche ci-dessous), à prendre conscience que la sauvegarde du patrimoine doit obéir à des règles qui interdisent l’introduction d’éléments dissonants (une pièce de théâtre sur ce thème a été conçue et montée par les élèves).une école de Zaghouan (à 60 km de Tunis) qui s’est intéressée à un monument romain : le Temple des eaux, duquel partaient les aqueducs qui amenaient l’eau aux citernes de Carthage. Outre les aspects archéologique et historique du monument, l’expérience a permi de de faire decouvrir aux enfants les mytholigies liées au lieu. une école de la localité de Maouna à Tataouine (extrême sud tunisien). Les élèves ont tout mis à jour un site romain non répertorié, couvert de sable. Ils ont suscité l’intérêt des autorités locales (Commissariat régional de la culture) et les élèves sont associés, autant que les mesures de sécurité le permettent, à la prospection du site.

3.2. Rôle de l’action culturelle :

3.1.1. Echanges culturels / mobilité des artistes :Institutionnalisés dans le cadre des accords de coopération bilatérale, les

échanges culturels prennent différents aspects :

1. les échanges permanents, assurés par certaines missions culturelles relevant des représentations diplomatiques accréditées en Tunisie, notamment à travers les nombreux centres culturels ouverts au public et qui souvent organisent des manifestations : expositions documentaires et artistiques, projection de films, soirées de théâtre, de musique ou de danse, conférences… outre les activités permanentes comme les bibliothèques, ou les cours de langue. Ces centres contribuent souvent à la vie culturelle nationale en prêtant leur espace aux jeunes artistes tunisiens ;

2. les échanges d’activités culturelles à travers l’organisation de semaines culturelles comprenant diverses activités représentatives de la culture nationale;

3. la participation à différentes manifestations : expositions, festivals, concours…

Les modalités de prise en charge des artistes et des frais (transport, séjour, assurance…) sont déterminées dans le cadre des accords bilatéraux et sont soit entièrement assurées par l’Etat, soit partagées entre les pays partenaires, sur une base de réciprocité. Quant à la mobilité des artistes, elle entre soit dans un cadre d’échanges officiels ou à l’initiative d’institutions gouvernementales ou non gouvernementales, soit revient à l’initiative personnelle des artistes. Dans tous les cas, les artistes bénéficient de l’application de l’Accord de Florence relatif à l’importation des biens culturels, éducatifs et scientifiques pour la mobilité de leurs œuvres ou de leurs instruments et matériels nécessaires à l’exercice de leur art. Afin de permettre aux artistes créateurs tunisiens de perfectionner leur art en le confrontant à différents courants et écoles et de connaître les nouvelles tendances artistiques, l’Etat leur accorde des bourses de séjour à l’étranger,

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

comme le cas des séjours à la Cité des Arts à Paris (qui durent une année). Toutes ces actions sont autant d’occasions d’échanges et de dialogue aussi bien au niveau des personnes qu’au niveau des cultures.

3.1.1. Les industries culturelles :L’encouragement de l’initiative privée dans le domaine de la sauvegarde et de la

mise en valeur du patrimoine se base sur l’effort de l’Etat pour promouvoir l’investissement privé, l’emploi et l’exportation. Plusieurs mesures sont en cours d’exécution, dont notamment :

l’intégration des travaux relatifs à la préservation des sites archéologiques et des monuments historiques dans les projets financés par la Banque Tunisienne de Solidarité et le Fonds d’Emploi ;la concession des sites historiques aux privés pour leur exploitation et intégration dans le circuit de tourisme culturel ;la libre création des sociétés spécialisées dans la restauration des monuments ;la libre création de bureaux d’études spécialisés dans la promotion et la valorisation du patrimoine ;la libre création de bureaux d’architecture spécialisés dans les domaines de la restauration, de l’entretien et de la valorisation des monuments ainsi que l’aménagement des musées.

3.1.1. La promotion de la culture numérique :La Déclaration universelle de l’UNESCO sur la diversité culturelle, ainsi que la

Déclaration islamique de l’ISESCO sur la diversité culturelle, prônent la promotion de la culture numérique et son exploitation au service de la diversité des expressions culturelles.

Pour la Tunisie, la promotion de la culture numérique s’inscrit dans le cadre global de la politique de l’Etat pour la mise à niveau et la modernisation de l’administration tunisienne. L’intégration des technologies numériques apporte un soutien appréciable à l’industrie culturelle, à la sauvegarde du patrimoine, à améliorer les prestations des services culturels et permettre un meilleur accès aux produits culturels. Ont été institués dans cet esprit :

le programme relatif à l’informatisation et la connexion de toutes les bibliothèques et de toutes les maisons de culture au réseau Internet.le programme relatif à la création des clubs d’informatique et de multimédias dans les centres culturels.le recours aux nouvelles technologies pour créer de nouvelles capacités en matière d’animation culturelle, de créativité artistique et intellectuelle.

3.1.1. Dialogue des cultures et des civilisations :La promotion du dialogue entre les cultures et les civilisations constitue une

préoccupation fondamentale dans le cadre de la politique culturelle nationale qui accorde une haute importance aux valeurs universelles de la paix, de la solidarité et de la tolérance. Parmi les exemples qui soulignent l’attachement de la Tunisie à ces valeurs, on peut citer :

la Charte de Carthage sur la tolérance, adoptée en 1995 à l’occasion de la Conférence internationale sur la pédagogie de la tolérance dans le bassin méditerranéen organisée en coopération avec l’UNESCO.la création de la chaire Ben Ali pour le dialogue des civilisations et des religions (Décision présidentielle, 7 novembre 2001) a marqué l’institutionnalisation de la

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démarche pour le dialogue des cultures dans le cadre des valeurs universelles de la tolérance et la culture de la paix. la création du Centre de Carthage pour le dialogue des civilisations (2002). Ce centre est membre du réseau méditerranéen de la Fondation Anna Lindh pour le dialogue des cultures.

Toujours dans le cadre du dialogue interculturel, l’année 2006 a été marquée par la création du Centre national de la traduction26 qui vient renforcer le rôle de la traduction en tant que composante du développement culturel national et qui constitue un pont reliant la culture tunisienne aux courants de la pensée universelle. Les objectifs de ce Centre sont :

la consolidation de la présence de la culture tunisienne dans le paysage culturel mondial ;la mise en valeur des capacités d’expression de l’identité culturelle et de son insertion dans la modernité ;l’enrichissement de la mémoire nationale et de la communication avec les autres cultures ;le perfectionnement de la formation en matière de langues et l’ouverture sur les autres nations et peuples ;l’interaction féconde entre toutes les cultures, assurant un enrichissement mutuel dans un contexte d’échange et de dialogue.

Par ailleurs, afin d’encourager la créativité et l’effort pour la diffusion de la culture nationale à l’échelle internationale, l’Etat a institué Le Prix de la meilleure production culturelle ayant une portée internationale27 et Le Prix du meilleur exportateur de la production culturelle nationale28

Pour sa part, l’Académie tunisienne des sciences, des lettres et des arts « Beït El Hikma » contribue à la mise en œuvre de cette politique d’ouverture. Dans ce cadre, quelque 80 séminaires scientifiques et 75 conférences ont été organisées en coopération avec des institutions internationales et régionales (UNESCO, ISESCO, ALECSO…), dont :

La célébration de Tunis capitale culturelleLa rencontre pour le dialogue de la culture et civilisationLa rencontre : Ethiques universellesJournée de la calligraphie arabeLa rencontre sur la Pédagogie de la tolérance dans le bassin méditerranéenLa rencontre Tunisie / Japon portant sur le dialogue culturel.

3.1.1. L’exemple des festivals :Depuis son indépendance, la Tunisie a opté pour une politique culturelle devant

assurer la promotion des lettres et des arts et la participation créatrice des individus et des groupes à la vie culturelle de la communauté. Elle s’est attelée à la mise en place progressive de structures et de moyens adéquats, garantissant la démocratisation des œuvres et des biens culturels, ainsi que le dialogue des cultures et des civilisations.

Les célébrations, fêtes et festivals auxquels participe la foule populaire comptent parmi ces moyens. Un festival « peut être un important véhicule de la création, l’innovation et l’information. Dans la mesure où il est le moment culminant de l’activité culturelle, il constitue un instrument privilégié de la diffusion sous toutes ses formes », écrit Mustapha Mami dans son ouvrage intitulé « Action

26. Cf. Décret N° 2006-401 du 3 février 2006

27. Décret N° 888-2001 du 18 avril 2001,

28. Décret N° 889-2001 du 18 avril 2001.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

culturelle et développement. Une approche analytique des festivals en Tunisie29, dans lequel il distingue 3 catégories de festivals :

3.1.1.1. Les festivals comme « fête politique » :Dans la première catégorie, les festivals sont organisés pour commémorer un

événement politique important ou jugé comme tel (anniversaire de l’indépendance, proclamation de la république…). Les manifestations et compétitions sportives et culturelles, les galas et spectacles organisés sur la place publique, les défilés… constituent l’essentiel de ces fêtes.

Un document de l’UNESCO mentionne que « ces festivals font désormais partie des fêtes qui marquent l’anniversaire de l’indépendance et l’on a de plus en plus recours à eux pour favoriser l’intégration culturelle et la compréhension nationale », qu’ils « continueront à jouer un rôle vital dans l’édification de la nation et plus particulièrement dans le développement d’une expression culturelle valable »30.

3.1.1.2. Les festivals comme prolongement de la « fête traditionnelle » :On entend par « fêtes traditionnelles » notamment la fête à caractère spécifiquement

religieux organisée en l’honneur du marabout du village, qui est considéré comme l’ancêtre commun aux membres d’une même communauté et vénéré en tant que tel ou bien une fête célébrée par une confrérie religieuse. Dans cette catégorie, il y a lieu de mentionner le Pèlerinage à la synagogue d’El Ghriba à Jerba considérée comme lieu saint par la diaspora hébraïque du monde entier. Ce pèlerinage a lieu vers avril – mai chaque année et draine une importante affluence de pèlerins juifs du monde entier. Fête religieuse doublée de fête culturelle à laquelle se mêlent juifs et arabes, symbole de 2500 années de tolérance.

3.1.1.3. Les festivals comme « nouvelle fête » :C’est une fête de type nouveau, une « fête culturelle » organisée en l’honneur

d’un ou de plusieurs arts donnés. En Tunisie, ce type de « fête culturelle » bénéficie du maximum d’intérêt et de sollicitude de la part des autorités culturelles organisatrices. Ils bénéficient de subventions relativement importantes et proposent une vaste occupation à un public de plus en plus important. Elles ont pour buts l’animation culturelle, la diffusion culturelle et la conservation et la promotion du patrimoine culturel ainsi que la promotion d’un tourisme culturel.

Les Journées cinématographiques de Carthage constituent un exemple type de manifestation culturelle dont l’objectif est de promouvoir et développer une expression culturelle tant au niveau national qu’aux niveaux arabe et africain, voire même international. Ces journées dédiées au cinéma arabe et africain ont pour ambition de :

i. contribuer à l’épanouissement d’une culture nationale dans chacun des pays africains et arabes ;

ii. favoriser la promotion des cinémas africain et arabe tant au niveau de la production que la diffusion, en développant l’émulation créatrice ; en soutenant les films représentatifs de leur patrimoine culturel et de leur réalité sociale et en encourageant l’émergence d’un style original et spécifique, susceptible de contribuer à l’essor d’un nouveau modèle cinématographique ;

iii. permettre les rencontres et les débats fructueux entre les hommes de cinéma pour une meilleure connaissance mutuelle, pour une large confrontation

29. « Action culturelle et développement. Une approche analytique des festivals en Tunisie. éd. Beït Al-Hikma / MTE, Tunis, 1986.

30. Cf. Problèmes et perspectives, Conférence intergouvernementale sur les politiques culturelles en Afrique, Accra, 25 octobre – 6 novembre 1975.

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des expériences et des idées et tout particulièrement pour la promotion et le développement de structures cinématographiques viables dans les pays africains et arabes

iv. contribuer à la diffusion internationale des films africains et arabes ;v. faciliter le contact et le dialogue entre les diverses cultures africaines et arabes

et celles des autres pays».

3.1.1. Patrimoine culturel et tourisme culturel :Dans son Article 2, la Déclaration islamique sur la diversité culturelle appelle à

mettre l’accent sur « la promotion du tourisme culturel en tant que cadre propice au dialogue culturel et civilisationnel ».

L’UNESCO, pour sa part, « entend accompagner ses 191 Etats membres dans la formulation de leurs politiques en repensant la relation entre tourisme et diversité culturelle, entre tourisme et dialogue interculturel, entre tourisme et développement. C’est ainsi qu’elle pense contribuer à la lutte contre la pauvreté, à la défense de l’environnement et à une appréciation mutuelle des cultures ».

Le tourisme représente un secteur fondamental dans l’économie tunisienne (6,5% du PIB) et fournit 340 000 emplois dont 85 000 emplois directs, soit 11,5% de la population active. En 2006 la Tunisie a accueilli 6.7 millions de touristes ; et si un bon nombre parmi eux sont attirés par le soleil et la plage, ils s’intéressent tous, à un degré ou à un autre, aux nombreux aspects de la culture tunisienne présente à travers les spectacles d’animation organisés par les hôtels, l’artisanat omniprésent, les visites guidées aux nombreux sites romains, ou bien la découverte de la culture arabo-islamique à travers les médinas et leurs souks, ou encore le sud avec ses oasis et ses ksours… Mais tout cela représente des « raccourcis » hâtifs, souvent bâclés qui constituent à la limite un réel danger pour la culture nationale, ne serait-ce que par l’image « brouillon » qu’ils en donnent. Aussi, l’Etat prend-il des mesures incitatives pour promouvoir de plus en plus de produits culturels liés à ce secteur économique majeur, telle l’exploitation touristique du patrimoine monumental ou traditionnel.

Parmi ces mesures on peut citer :la création de L’Agence nationale de mise en valeur et d’exploitation du patrimoine archéologique et historique. la concession des sites historiques aux privés pour leur exploitation et intégration dans le circuit de tourisme culturel ;l’encouragement des manifestations culturelles liées aux sites du patrimoine et au développement régional et susceptibles de drainer un certain flux touristique. Les meilleurs exemples dans cet aspect est le Festival de Tabarka, avec son célèbre slogan : « Je ne veux pas bronzer idiot » ; le Festival du Sahara de Douz, le Festival d’Ulysse à Jerba, Pèlerinage à la synagogue de la Ghriba à Jerba, Festival de l’épervier à Haouaria, Festival de la musique arabe andalouse à Testour, Festival des arts plastiques à Mahrès, Festival du cheval pur sang à Batane, Festival de l’équitation à Moknassi, Festival de la musique classique internationale au Colisée d’El Jem… développement du réseau muséologique lié aux différentes expressions de la culture nationale et encouragement des initiatives privées allant dans ce sens.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

Conclusion

Pourquoi les notions de « mondialisation », de “diversité culturelle” sont-elles devenues aussi largement diffusées jusqu’à en devenir obsédantes? La réponse est qu’il s’agit de concepts qui soulèvent le problème de notre destin collectif ; ils nous invitent à une prise de conscience, à une réflexion sur ce qui nous permet de vivre ensemble, sur nos différences et nos valeurs partagées au nom desquelles on essaye de gérer les rivalités et les conflits qui opposent inévitablement les hommes.

Il s’agit, en fait, des deux courants de pensées les plus marquants de ce début du XXIe siècle, de deux thèses qui prétendent tracer les orientations de l’avenir de l’humanité.

La thèse de la « mondialisation » renvoie à une conception unitaire qui évoque la notion d’un monde uni, formant un village planétaire, sans frontières. Elle prône l’interpénétration des cultures, des technologies et, surtout, des économies (intégration dans l’économie mondiale). De ce fait, les expressions comme civilisation mondiale ou culture mondiale sont de plus en plus utilisées.

Or, les manifestations les plus spectaculaires de la mondialisation se résument d’une part, au niveau de l’expansion du capitalisme et de l’économie de marché en tant que système économique unique et, d’autre part, au niveau de l’utilisation des progrès des technologies de la communication pour renforcer la position d’une culture mondiale représentée par les seules références liées au capitalisme triomphant, largement représenté par l’exemple américain.

Ainsi, le marketing culturel impose, sous le nom de « culture mondiale » ou « civilisation mondiale », les produits des pays les plus puissants, au risque d’appauvrissement, voire même d’anéantissement, des expressions culturelles de tout pays qui ne serait pas capable de valoriser sa propre culture.

De ces faits naquit une nouvelle conscience de la nécessité d’étendre la notion de « développement durable » au domaine culturel, notion qui implique la nécessité de protéger la « diversité culturelle », avec ce qu’elle comporte comme valeurs universelles de tolérance, de cohésion sociale, de paix et de coexistence.

C’est dans ce contexte que se positionnent la Déclaration Universelle de l’UNESCO sur la Diversité Culturelle, La Déclaration Islamique sur la Diversité culturelle l’ISESCO et la Convention internationale sur la Protection et la Promotion de la Diversité des Expressions Culturelles, adoptée par la Conférence générale de l’UNESCO.

En Tunisie, la politique culturelle et la politique éducative ont réussi à intégrer les principales thèses de la diversité culturelle et du dialogue interculturel. L’effort déployé pour la promotion de la diversité culturelle est manifeste à travers les différents aspects de la politique culturelle et des contenus éducatifs. Cette concordance entre les options fondamentales de la politique nationale et les préoccupations de la communauté internationale explique la participation active de la Tunisie à l’élaboration de la Convention internationale pour la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles et son engagement à assurer sa promotion en y adhérant.

De même, elle a marqué son adhésion aux principes de la Déclaration islamique sur la diversité culturelle par sa participation aux activités de l’ISESCO dans le cadre du dialogue des cultures.

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Recommandations

De l’analyse des différents aspects de la politique culturelle tunisienne dans ses rapports avec la diversité culturelle et le dialogue interculturel, il ressort qu’il serait souhaitable de renforcer les aspects suivants :

Renforcer le rôle de la politique culturelle dans le contexte du « développement durable » en favorisant les approches multidisciplinaires et multisectorielles (créer de nouveaux partenariats en vue du développement des industries culturelles, du tourisme culturel, de la créativité artistique…)

Développer et promouvoir les industries culturelles, notamment à travers les programmes de coopération pour le développement.

Dans le cadre du développement du tourisme culturel :instaurer un « label de qualité » pour les différents produits et services à caractère culturel proposés aux visiteurs étrangers (guides touristiques, exhibitions culturelles dans les hôtels, produits de l’artisanat…)diversifier les produits à caractère culturel proposés aux touristes (circuits étudiés, expositions artistiques, informations sur les manifestations culturelles d’actualité, art culinaire (dégustations avec présentation des origines culturelles des mets), expositions documentaires sur la culture nationale dans les hôtels : les manuscrits, l’architecture, les habits traditionnels…), de manière à susciter la curiosité et l’intérêt des touristes et à favoriser leur participation au dialogue interculturel.

Renforcer chez les jeunes le concept d’identité culturelle nationale plurielle, à travers la valorisation de l’histoire culturelle du pays, (Que savent les jeunes maghrébins d’Apulée de Madaure ou de Saint Augustin ?) et en les impliquant davantage dans des entreprises de mise en valeur du patrimoine matériel (chantiers de volontariat pour la sauvegarde des sites et des monuments) et immatériel (collecte des expressions culturelles immatérielles : traditions, chants, danses, contes, proverbes, cuisine régionale, artisanat local…).

Valoriser le patrimoine culturel national et lui assurer une protection adéquate, tout en œuvrant à l’intégrer dans le cadre du développement régional global et durable. Encourager, dans cette perspective la promotion des artisanats locaux liés aux sites du patrimoine.

Créer, une institution nationale spécifiquement consacrée à la recherche, collecte, documentation, sauvegarde et mise en valeur du patrimoine culturel immatériel.

Encourager les initiatives des particuliers et de la société civile visant à exploiter les technologies des communications pour présenter, créer des réseaux de recherches, recenser et mettre en valeur les différents aspects des expressions culturelles nationales, notamment la valorisation du patrimoine matériel et immatériel, dans la perspective de dialogue interculturel.

Encourager davantage la créativité, y compris en luttant contre la piraterie.

1.

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3.•

4.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

Annexes

Annexe 1 : Références des différents textes juridiques relatifs à la culture.

1) Attributions du Ministère de la Culture (évolution chronologique)

Note préliminaire : A l’indépendance (20 mars 1956) et jusqu’au mois d’octobre 1961, la culture relevait du département de l’éducation nationale

Décret N° 61-346du 7 octobre 1961

Décret portant création du Secrétariat d’Etat aux Affaires Culturelles et à l’Information. (*)(*)Les départements ministériels étaient appelés « Secrétariat d’Etat »

Décret N° 61- 426du 11 décembre 1961

Décret fixant les attributions du Secrétariat d’Etat aux Affaires Culturelles et à l’Information.

Décret N° 63-377du 25 décembre 1963

Décret relatif au Secrétariat d’Etat aux Affaires Culturelles et à l’Orientation.

Décret N° 75-773du 30 octobre 1975

Décret fixant les attributions du Ministère des affaires culturelles.

Décret N° 81-1637du 1ER décembre 1981

Décret complétant le décret N° 75-774 du 30 octobre 1975 portant organisation du Ministère des affaires culturelles.

Décret N° 82-1027du 8 juillet 1982

Décret modifiant l’article 11 du décret N° 75-774 du 30 octobre 1975 portant organisation du Ministère des affaires culturelles.

Décret N° 83-1084du 17 novembre 1983

Décret portant réorganisation du Ministère des affaires culturelles.

Décret N° 87-106du 24 janvier 1987

Décret modifiant le décret N° 83-1084 du 17 novembre 1983 portant réorganisation du Ministère des affaires culturelles.

Décret N° 93-2378du 22 novembre 1993

Décret portant organisation du Ministère de la culture.

Décret N° 94-1639du 1 août 1994

Décret modifiant et complétant le décret N° 93-2378 du 22 novembre 1993 portant organisation du Ministère de la culture.

Décret N° 96-1875du 7 octobre 1996

Décret portant organisation du Ministère de la culture.

Décret N° 2003-1819 du 25 août 2003

Décret modifiant et complétant le décret N° 96-1875 du 7 octobre 1996, portant organisation du Ministère de la culture.

Décret N° 2004-760du 15 mars 2004

Décret fixant les attributions du Ministère de la Culture, de la Jeunesse et des Loisirs.

Décret N° 2005-1707du 6 juin 2005

Décret fixant les attributions du Ministère de la Culture et de la Sauvegarde du Patrimoine.

2) Bases juridiques de l’action et la communication culturelles :a. Conseil supérieur de la culture

Décret N° 82-1629 du 20 décembre 1982

Décret portant organisation du Conseil supérieur de la culture.

Arrêté du Ministre des affaires culturellesdu12 février 1983

Arrêté fixant les attributions des commissions spécialisées du Conseil supérieur de la culture.

Décret N° 2007-4203 du 11 décembre 2007

Décret portant création du Conseil supérieur de la Culture et fixant ses attributions, sa composition et les modalités de son fonctionnement.

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b. Comités culturels et Commissariats régionaux de la culture (décentralisation)

Décret N° 63-114du 19 avril 1963

Décret portant création des Comités culturels

Décret N° 65-286du 31 mai 1965

Décret relatif aux Comités culturels

Décret N° 68-50du 8 mars 1968

Décret relatif aux Comités culturels

Décret N° 83-18du 14 janvier 1983

Décret fixant l’organisation, les attributions et la gestion des Comités culturels régionaux. et locaux.

Décret N° 83-19du 14 janvier 1983

Décret relatif au Comité culturel national.

Décret N° 83-658du 5 juillet 1983

Décret modifiant le Décret N° 83-19 du 14 janvier 1983 relatif au Comité culturel national.

Décret N° 85-1487du 30 novembre 1985

Décret relatif à la création et à l’organisation des conseils régionaux de la culture.

Décret N° 94-560du 15 mars 1994

Décret fixant l’organisation administrative et financière et les modalités de fonctionnement des commissariats régionaux à la culture.

Décret N° 2004-1214 du 25 mai 2004

Décret portant changement d’appellation des commissariats régionaux à la culture et fixation de leurs attributions.

Décret N° 2004-1430 du 22 juin 2004

Décret portant modification du décret N° 94-560 du 15 mars 1994, fixant l’organisation administrative et financière et les modalités de fonctionnement

des commissariats régionaux à la culture.

Décret N° 2005-2125 du 14 janvier 2005

Décret modifiant le Décret N° 83-18 du 14 janvier 1983, fixant l’organisation, les attributions et la gestion des comités culturels régionaux et locaux.

Décret N° 2006-1434 du 22 mai 2006

Décret portant changement d’appellation des commissariats régionaux à la culture et à la sauvegarde du patrimoine.

c. Infrastructures culturelles

Loi N° 82-89du 20 décembre 1982

Loi relative à l’infrastructure culturelle.

Décret N° 83-20du 14 janvier 1983

Décret fixant les statuts particuliers aux maisons du peuple et de la culture dépendant du Ministère des affaires culturelles.

Décret N° 86-837du 29 août 1986

Décret fixant les conditions d’octroi de l’aide de l’Etat aux équipements culturels.

Décret N° 86-838du 29 août 1986

Décret relatif aux équipements culturels des entreprises économiques.

Arrêté du Ministre des affaires culturellesdu 29 août 1986

Arrêté fixant les modalités pratiques relatives à la constitution du dossier technique, en vue de bénéficier de l’aide de l’Etat pour la réalisation des

équipements culturels.Arrêté du Ministre des

affaires culturellesdu 29 août 1986

Arrêté fixant le contenu de la déclaration d’infrastructure culturelle.

Arrêté du Ministre des affaires culturellesdu 29 août 1986

Arrêté fixant la nomenclature des équipements culturels pour les différentes catégories d’entreprises économiques.

d. Conditions d’établissement d’institutions culturelles Étrangères en Tunisie

Décret-loi N° 74-1du 9 août 1974

Décret relatif aux établissements et centres culturels, d’information, d’enseignement, d’études ou de recherches, étrangers en Tunisie.

Décret N° 74-916du 14 octobre 1974

Décret fixant les conditions d’ouverture et de contrôle des établissements et centres culturels d’information, d’enseignement, d’études ou de recherches, étrangers en Tunisie.

Loi N° 74-77du 11 décembre 1974

Loi ratifiant le décret-loi N° 74-1 du 9 août 1974, relatif aux établissements et centres culturels, d’information, d’enseignement, d’études ou de recherches étrangers en Tunisie.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

3) Textes juridique relatifs à la promotion des industries culturelles et à l’organisation des secteurs de production et de diffusion culturels

a. Livre et édition

Décret N° 79-748du 21 août 1979

Relatif à la composition du Conseil national de l’édition.

Arrêté du Ministre de la culture du 2 janvier 2001

Arrêté portant approbation du cahier des charges relatif à la création d’une entreprise privée procurant les produits rentrant dans la fabrication du livre.

Arrêté du Ministre de la culture du 2 janvier 2001

Arrêté portant approbation du cahier des charges relatif à la création d’une entreprise privée d’impression de livres et de périodiques.

Arrêté du Ministre de la culture du 2 juin 1998

Arrêté portant approbation du guide des investisseurs et des promoteurs privés dans le secteur de la culture.

Arrêté du Ministre de la culture du 2 janvier 2001

Arrêté portant approbation du cahier des charges relatif à la création d’une entreprise privée d’édition et de diffusion du livre culturel.

Décret N° 2004-1847 du 2 août 2004

Décret portant création d’un comité consultatif pour l’octroi du taux unifié de la subvention applicable à toutes les catégories de papier utilisé dans l’industrie du livre culturel, du livre pour enfants et du livre d’art de luxe, et fixant sa composition et les modalités de son fonctionnement.

Arrêté du Ministre de la Culture et de la

Sauvegarde du Patrimoine du 20 avril 2005

Arrêté portant approbation du cahier des charges relatif à l’exercice des activités d’édition des livres.

b. Cinéma et audio-visuel

Décret N° 84-306du 21 mars 1984

Décret fixant les conditions d’importation et de distribution de vidéo-cassettes.

Arrêté du Ministrede la culture

du 10 juillet 2001

Arrêté portant approbation du Cahier des charges relatif à la création d’un organisme privé de production audio-visuelle.

Arrêté du Ministre de la culture du 10 juillet 2001

Arrêté portant approbation du Cahier des charges relatif à la création d’un organisme privé pour l’importation et la diffusion des œuvres audio-visuelles

c. Musique et danse / arts dramatiques /fêtes artistiques

Décret N° 89-397 du 15 mars1989

Décret fixant la composition de la commission de délivrance de la carte professionnelle des professions des arts dramatiques et les conditions de son octroi et de son retrait.

Décret N° 89-461du 22 avril 1989

Décret portant réorganisation de la commission nationale de l’orientation du théâtre.

Arrêté du Ministre de la culture du 2 janvier 2001

Arrêté portant approbation du cahier des charges relatif à la création d’un organisme privé de production et de diffusion d’œuvres se rapportant à la musique et à la danse.

Arrêté du Ministre de la culture du 2 janvier 2001

Arrêté portant approbation du cahier des charges relatif à la création d’un organisme privé d’enregistrement et de commercialisation des œuvres musicales.

Arrêté du Ministre de la culture du 10 juillet 2001

Arrêté portant approbation du Cahier des charges relatif à l’exercice de la profession d’imprésario ou d’intermédiaire dans l’organisation des fêtes artistiques.

Arrêté du Ministre de la culture du 8 septembre 2001

Arrêté portant approbation du cahier des charges relatif à l’exercice par les structures professionnelles de production et de diffusion des arts dramatiques, de leurs activités.

d. Musées / arts plastiques

Arrêté du Ministre de la culture du 2 janvier 2001

Arrêté portant approbation du cahier des charges relatif à la création d’un atelier privé pour la production et la mise en circulation de copies de pièces archéologiques.

Arrêté du Ministre de la culture du 2 janvier 2001

Arrêté portant approbation du cahier des charges relatif à la création d’un musée privé.

Arrêté du Ministre de la culture du 10 juillet 2001

Arrêté portant approbation du Cahier des charges relatif à la création d’un atelier d’arts plastiques privé.

Arrêté du Ministre de la culture du 10 juillet 2001

Arrêté portant approbation du Cahier des charges relatif à la création d’une galerie privée pour l’exposition et la vente des œuvres d’arts plastiques.

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4) Lois relatives à la condition des artistes et des créateurs culturels

Loi N° 2002-101du 17 décembre 2002, portant loi des finances

pour l’année 2003

Création d’un Fonds de soutien de la couverture sociale des artistes, créateurs et intellectuels et affectation des ressources à son profit (Articles 37 à 40).

Loi N° 2002-104du 30 décembre 2002

Loi relative au régime de sécurité sociale des artistes, des créateurs et des intellectuels.

a. Droits d’auteurs

Décret N° 68-283du 9 septembre 1968

Décret réglementant la gestion des intérêts moraux et matériels des auteurs et compositeurs de Tunisie.

Décret N° 87-483du 14 mars 1987

Décret relatif à la propriété scientifique pour les auteurs de découvertes archéologiques.

Loi N° 94-36du 24 février 1994

Loi relative à la propriété littéraire et artistique.

Décret N° 2008-128du 16 janvier 2008

Décret fixant l’organigramme de l’Organisme tunisien de protection des droits d’auteurs.

b. Encouragement de la créativité

Décret N° 79-749du 21 août 1979

Décret portant encouragement de l’Etat à la production littéraire et scientifique.

Arrêté du Ministre des affaires culturelles

du 24 octobre 1986

Arrêté modifiant l’arrêté du 10 août 1984, fixant les attributions et la composition de la commission consultative d’octroi d’aide du fonds du développement culturel.

Décret N° 89-396du 15 mars 1989

Décret fixant la composition et les attributions de la commission d’octroi des subventions d’aide à la production, à l’équipement ou au fonctionnement au profit des structures professionnelles de production et de diffusion des arts dramatiques.

Décret N° 89-732du 10 juin 1989

Décret relatif à la création de la commission d’acquisition des œuvres d’art plastique au profit de l’Etat et fixant sa composition, ses attributions et ses modalités de fonctionnement.

Décret N° 89-996du 20 juillet 1989

Décret portant modification et complétant le décret N° 81-823 du 23 mai 1981 fixant les modalités de gestion du fonds de développement de la production de l’industrie cinématographique.

Arrêté du Ministre des finances et du ministre

de la culturedu 21 février 1992

Arrêté fixant la liste des organismes, associations, œuvres sociales et programmes admis à bénéficier de dons et subventions déductibles de l’impôt sur le revenu des personnes physiques et de l’impôt sur les sociétés.

Décret N° 92-590du 16 mars 1992

Décret modifiant le décret N° 79-749 du 21 août 1979, portant encouragement de l’Etat à la production littéraire et scientifique.

Décret N° 92-591du 16 mars 1992

Décret modifiant le décret N° 89-1642 du 23 octobre 1989, portant institution du « Prix du 7 novembre pour la création ».

Décret N° 92-592du 16 mars 1992

Décret modifiant le décret N° 84-955 du 23 août 1984, portant création de prix nationaux dans les domaines des lettres et des arts.

Décret N° 92-1750du 28 septembre 1992

Décret portant institution d’un Prix de la meilleure création en architecture tunisienne.

Décret N° 92-1751du 28 septembre 1992

Décret relatif à l’organisation d’un concours annuel de la chanson patriotique.

Décret N° 92-1752du 28 septembre 1992

Décret portant institution d’un Prix national de littérature de jeunes.

Décret N° 92-1753du 28 septembre 1992

Décret portant encouragement d’ l’Etat à la production architecturale tunisienne.

Décret N° 92-1750du 28 septembre 1992

Décret portant encouragement de l’Etat dans le domaine des métiers d’art.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

Décret N° 93-588du 8 mars 1993

Décret portant institution du « Prix maghrébin de la culture ».

Décret N° 94-1703du 8 août 1994

Décret relatif à la création du Prix annuel des arts plastiques.

Décret N° 95-98du 16 janvier 1995

Décret modifiant le décret N° 92-590 du 16 mars 1992, portant encouragement de l’Etat à la production littéraire et scientifique.

Décret N° 95-890du 8 mai 1995

Décret modifiant le Décret N° 89-732 du 10 juin 1989, relatif à la création de la Commission d’acquisition des œuvres d’arts plastiques au profit de l‘Etat et fixant sa composition, ses attributions et ses modalités de fonctionnement.

Décret N° 2000-877du 24 avril 2000

Décret fixant les modalités d’octroi des subventions d’aide à la production d’œuvres nouvelles dans le domaine de la musique.

Décret N° 2001-717du 19 mars 2001

Décret fixant les modalités d’octroi de subventions d’encouragement à la production cinématographique.

Décret N° 2001-888du 18 avril 2001

Décret relatif à l’institution du prix pour la meilleure production culturelle tunisienne ayant enregistré un succès international.

Décret N° 2004-1477du 29 juin 2004

Décret portant institution du prix national d’architecture.

Décret N° 2004-1632du 12 juillet 2004

Décret portant modification du décret N° 84-955 du 23 août 1984, portant création de prix nationaux dans les domaines des lettres et des arts.

Décret N° 2008-787du 24 mars 2008

Décret portant institution du prix national de traduction.

Décret N° 2008-458du 18 février 2008

Décret portant institution du Prix du Président de la République pour la maison de culture qui se distingue plus que les autres par son activité.

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Annexe 2 : Textes juridiques relatifs au patrimoine culturel (Institut National du Patrimoine)

a. INP (Institut National du Patrimoine)

Décret N° 66-140du 2 avril 1966

Décret portant organisation de l’Institut National d’Archéologie et d’Arts.

Décret N° 73-291du 15 juin 1973

Décret portant création à l’Institut National d’Archéologie et d’Arts d’un Centre d’Etudes Hispano-Andalouses

Décret N° 73-292du 15 juin 1973

Décret portant fixation du Statut du personnel du Centre d’Etudes Hispano-Andalouses de l’Institut National d’Archéologie et d’Arts

Décret N° 82-269du 12 février 1982

Décret portant création au sein de l’Institut National d’Archéologie et d’Art, d’un Centre d’Etudes de la civilisation et des arts islamiques à Kairouan (Raqqada)

Décret N° 82-270du 12 février 1982

Décret portant création au sein de l’Institut National d’Archéologie et d’Art, d’un Centre d’Etude de la civilisation phénicienne punique et des antiquités libiques.

Décret N° 82-271du 12 février 1982

Décret portant création d’une nouvelle section au sein de l’Institut National d’Archéologie et d’Art,[Cette Section est dénommée : « Conservation de la Grande Mosquée « Zitouna » et des monuments religieux à caractère historique de la ville de Tunis ».]

Décret N° 83-15 du 8 janvier 1983

Décret portant création et organisation au sein de l’Institut national d’archéologie et d’arts d’un Centre d’histoire du mouvement national

Décret N° 83-1194 du 14 décembre 1983

Décret modifiant et complétant le décret N° 66-140 du 2 avril 1966 portant organisation de l’Institut national d’archéologie et d’arts.

Décret N° 93-1609 du 26 juillet 1993

Décret fixant l’organisation de l’Institut national du patrimoine et les modalités de son fonctionnement.

Décret N° 94-2367 du 18 novembre 1994

Décret portant création et organisation du Centre des sciences et techniques du patrimoine au sein de l’Institut national du patrimoine.

Décret N° 95-8 du 2 janvier 1995

Décret portant modification du décret N° 93-1609 du 26 juillet 1993, fixant l’organisation de l’Institut national du patrimoine et les modalités de son fonctionnement.

b. Sauvegarde du patrimoine (cadre législatif)

Décret N° 67-296 du 7 septembre 1967

Décret relatif au regroupement des manuscrits

Décret N° 85-1246 du 7 octobre 1985

Décret relatif au classement du site de Carthage.

Décret N° 87-1114 du 22 août 1987

Décret relatif à la commission consultative de classement des biens archéologiques et des sites naturels et urbains.

Décret N° 87-1266 du 27 octobre 1987

Décret relatif à la récompense attribuée pour remise, dans les délais réglementaires, aux autorités archéologiques, des biens archéologiques découverts fortuitement.

Loi N° 88-44du 19 mai 1988

Loi relative aux biens culturels.

Décret N° 89-127 du 14 janvier 1989

Décret relatif au Conseil Supérieur pour la sauvegarde des biens culturels de la Culture.

Décret N° 94-1475 du 4 juillet 1994

Décret relatif à la composition et au fonctionnement de la Commission nationale du patrimoine..

Loi N° 94-35 du 24 février 1994

Loi relative au Code du Patrimoine archéologique, historique et es arts traditionnels.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

Arrêté du Ministre de la culture du 8 avril 1996

Arrêté portant organisation des travaux se rapportant à l’élaboration de la carte nationale des sites archéologiques et des monuments historiques.

Loi N° 2001-118 du 6 décembre 2001

Loi portant modification de la loi N° 94-35 du 24 février 1994, relative au Code du Patrimoine archéologique, historique et des arts traditionnels.

c. ANEP

Décret N° 88-1591 du 24 août 1988

Décret portant organisation administrative et financière de l’Agence Nationale de mise en valeur et d’exploitation du patrimoine archéologique et historique.

Décret N° 93-12 du 4 janvier 1993

Décret modifiant le décret N° 88-1591 du 24 août 1988, portant organisation administrative et financière de l’Agence nationale de mise en valeur et d’exploitation du patrimoine archéologique et historique.

Loi N° 97-16 du 3 mars 1997

Loi portant modification de la loi N° 88-11 du 25 février 1988, portant création d’une Agence nationale de mise en valeur et d’exploitation du Patrimoine archéologique et historique.

Décret N° 2004-401 du 24 février 2004

Décret fixant l’organisation administrative et financière et les modalités de fonctionnement de l’Agence de mise en valeur du patrimoine et de promotion culturelle.

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Annexe 3 : Jalons historiques et étapes significatives ayant marqué les fondements de la diversité culturelle en Tunisie.

Dates clés Evènements historiques Faits culturels

… La Tunisie était peuplée depuis la préhistoire. Ses premiers habitants connus sont les Berbères.

Des traces de présence humaine ont été découvertes dans les couches profondes du paléolithique.

814 Av. JC : Fondation de Carthage par des colons phéniciens, conduits par la Reine Didon, appelée aussi ELYSSA.

La nouvelle cité se développe rapidement devenant un grand foyer de civilisation et une puissance redoutable qui inquiète Rome.

264 - 146 Av. JC:

Trois guerres contre Rome - passées à la postérité sous le nom des «guerres puniques»- sont engagées donnant lieu, entre autres, à la fantastique expédition conduite par Hannibal qui a traversé les Alpes avec ses éléphants (218- 202 Av. JC). Ces guerres s’achèvent par la défaite de Carthage.

Carthage fut détruite par les romains. Le peu de témoignages restés attestent d’une grande culture raffinée.

146 Av.JC- 439:

Etablissement de la première colonie romaine «Africa».

Le pays connaît une grande prospérité. L’agriculture et l’urbanisation se développent.

439: Conquête de Carthage par les Vandales.

533: Reprise de Carthage par les Byzantins

647-698 : Début de l’ère arabo-musulmane. Fondation de Kairouan par Oqba Ibn Nafaa (en 670) et prise de Carthage par les Arabes (en 698).

800-909 : Expansion de l’Islam et établissement de la Dynastie des Aghlabides. Kairouan est alors le centre politique et intellectuel du Maghreb.

(construction de la Mosquée Zitouna de Tunis). Cette mosquée jouera un grand rôle de foyer du savoir jusqu’au XXè siècle.

909-1159 : Dynasties Fatimide et Ziride. Mahdia, fondée en 921, devient la capitale du pays.

1159-1230 : Les Almohades unissent les pays du Maghreb et l’Andalousie musulmane.

1236 : Les Hafsides, vassaux des Almohades, se déclarent indépendants et fondent une nouvelle dynastie à Tunis qui règnera jusqu’en 1574

Tunis accède au rang de capitale du pays.1ère affluence des andalous qui contribuèrent au développement agricole, urbain et culturel.

1534. Khayr Al-Din (Barberousse), un corsaire ottoman, s’empare de Bizerte, La Goulette et Tunis. La Tunisie est déclarée territoire turc.

1535. Charles Quint chasse Khayr Al-Din de Tunis. La Tunisie passe sous domination espagnole.

Mise à sac de Tunis et destruction d’une grande partie de la ville.

1574. Prise de Tunis par les Turcs. La Tunisie est annexée à l’Empire ottoman.C’est le règne des Deys.

1613-1631 : Règne de la dynastie des beys Mouradites Sous l’impulsion des Deys et des Mouradites (notamment Hammouda Pacha), Tunis connut un grand essor urbain qui lui donna son aspect actuel.

1705: Fondation de la Dynastie des Husseinites (déchue le 25 juillet 1957).

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

1756-1759 Règne de Rachid Bey. Grand mélomane, il se consacra à la collecte des expressions musicales (notamment la musique andalouse) laissant à son frère Ali Bey (qui régna effectivement de 1759 à 1782) le soin de gérer les affaires du pays.

1837- 1855 Règne de Ahmed I Bey. Energique réformateur, il fonda l’école militaire sur le modèle européen. Institution qui contribua à dispenser un enseignement moderne et à la formation d’une intelligentsia nationale éclairée.

1857. Mohammed Bey promulgue, sur le modèle ottoman, un « pacte fondamental » qui établit l’égalité de tous les Tunisiens devant la loi, quelle que soit leur religion.

1861. Proclamation de la Constitution. (elle ne fut jamais appliquée, mais préluda à un état d’esprit favorable aux réformes).

1873. Fondation par le ministre réformateur Kheireddine Pacha du collège Sadiki, destiné à dispenser un enseignement public moderne, (qui deviendra le vivier du nationalisme tunisien), Introduction de l’imprimerie et édition du premier journal tunisien « Arraied » qui publiait les textes législatifs, et consacrait une partie à la culture (poésie, nouvelles traduites…)

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1881-1956 : Protectorat français, établi le 12 mai 1881. La résistance anticoloniale dure pendant pratiquement la totalité des 75 ans de domination française. Menée d’abord par le parti Destourien (1920), la lutte connaît un nouvel élan avec le néo-Destour à partir de 1934.

Développement de la presse découverte, adoption et adaptation au contexte national d’expressions de la culture jusque là inconnues (roman, peinture, théâtre…). Emergence des précurseurs de la culture tunisienne moderne.

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1956 (20 mars) :

La Tunisie obtient son indépendance.

1957(25 juillet) :

Proclamation de la République tunisienne. Habib Bourguiba devient président de la Tunisie indépendante.

Réforme du Système éducatifDéveloppement de la politique culturelle.Encouragement par l’Etat des différentes formes de créativité et d’expression culturelle.

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1959(1er juin) :

adoption de la première constitution de la République Tunisienne

1963(l5 octobre):

les troupes françaises évacuent Bizerte, leur dernière base dans le pays.

1987(7 novembre) …

conformément à la Constitution, le Premier ministre, Zine El Abidine Ben Ali, succède au Président Bourguiba, jugé par ses médecins dans l’incapacité de continuer à assumer ses fonctions. Le Président Zine El Abidine Ben Ali est investi par le Parlement en tant que Président de la République.

Réforme fondamentale du Système éducatif (2002).Nouvelle vision du développement culturel (liée au développement durable).Mesures en faveur de la condition de l’artiste créateur…

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Annexe 4 : Adhésion de la Tunisie aux textes normatifs de l’UNESCO

Date d’adoption

InstrumentDate

d’adhésion

1950 Accord pour l’importation d’objets de caractère éducatif, scientifique ou culturel, Florence, 17 juin 1950 14 mai 1971

1952 Convention universelle sur le droit d’auteur avec déclaration annexe relative à l’article XVII et Résolution concernant l’article XI, Genève, 6 Septembre 1952 (révisée à Paris le 24 juillet 1971)

Protocole Annexe 1 à la Convention universelle pour la protection du droit d’auteur concernant la protection des oeuvres des personnes apatrides et des réfugiés. Genève, 6 septembre 1952 (révisé en 1971) Protocole Annexe 2 à la Convention universelle pour la protection du droit d’auteur concernant l’application de la Convention aux oeuvres de certaines organisations internationales, Genève 6 septembre 1952. Protocole Annexe 3 à la Convention universelle pour la protection du droit d’auteur relatif à la ratification, acceptation ou adhésion conditionnelle, Genève 6 septembre.

19 mars 1969

1971 Convention universelle sur le droit d’auteur révisée à Paris le 24 juillet 1971. Déclaration annexe relative à l’article XVII et résolution concernant l’article XI – Paris, 24 juillet 1971Protocole annexe 1 à la Convention universelle sur le droit d’auteur révisée à Paris le 24 juillet 1971 concernant l’application de la Convention aux œuvres des personnes apatrides et des réfugiés – Paris, 24 juillet 1971Protocole annexe 2 à la Convention universelle sur le droit d’auteur révisée à Paris le 24 juillet 1971 concernant l’application de la Convention aux œuvres de certaines organisations internationales – Paris, 24 juillet 1971

10 mars1975

1954 Convention pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé. La Haye, 14 mai 1954

Protocole pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé. La Haye, 14 mai 1954

• 19 mars1969

1960 Convention concernant la lutte contre la discrimination dans le domaine de l’enseignement. Paris,14 décembre 1960.

20 août1969

1970 Convention concernant les mesures à prendre pour interdire et empêcher l’importation, l’exportation et le transfert de propriétés illicites des biens culturels. Paris, 14 novembre 1970.

10 mars1975

1972 Convention pour la protection du patrimoine mondial culturel et naturel. Paris, 16 novembre 1972

10 mars1975

2003 Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel (Paris, 17 octobre 2003)

12 juin2006

2005 Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles 2005

15 février2007

2001 Convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique. Paris, le 2 novembre 2001.

15 janvier2009

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

Annexe 5 : Liste de principaux musées

Musées nationaux : Musées archéologiques :

Musée national du Bardo (Tunis)Musée national de CarthageMusée national d’art islamique de Raqqâda (Kairouan)Musée national de la médecine (Tunis)

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Musée archéologique d’El JemMusée archéologique de GafsaMusée archéologique de KerkouaneMusée archéologique de LamtaMusée archéologique de SalaktaMusée archéologique de SfaxMusée archéologique de SousseMusée des arts islamiques de MonastirMusée paléochrétien de Carthage

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Musées patrimoniaux : Musées municipaux :

Musée des arts et traditions populaires de TunisMusée des arts et traditions populaires de JerbaMusée des arts et traditions populaires de MonastirMusée Dar Cheraït (Tozeur)Musée Dar EssidMusée Dar Jellouli (Sfax)Musée El KobbaMusée du patrimoine insulaire de KerkennahMusée du Sahara (Douz)Musée Sidi Amor Abada ( Kairouan)

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Musée de ChemtouMusée de DouzMusée d’EnfidaMusée du KefMusée de MahdiaMusée de MarethMusée de NabeulMusée de Zarziz

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Divers:

Musée de la mémoire nationaleMusée du cinémaMusée des finances

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Musée postal de TunisMusée océanographique de SalammbôMusée ethnographique de Gabès.

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Annexe 6 : Principaux organismes opérant dans le secteur culturel

Le Ministère de la culture et de la sauvegarde du patrimoine, duquel dépendent :Le Comité culturel nationalLes Comités culturels régionaux (un comité dans chaque gouvernorat)Les Comités culturels locaux (un comité dans chaque ville)

La Bibliothèque nationale (décret n° 756 du 31 août)L’Institut National du Patrimoine, précédemment Institut National d’Archéologie et d’Arts (décret de 30 mars 1957, puis organisé par le décret n° 140 du 2 avril 1966,…)Le Centre de l’histoire du mouvement national (décret du 8 janvier 1983)La Fondation nationale pour la traduction, l’établissement des textes et les études, dite Bayt al-Hikma, (Loi n° 90 du 20 novembre 1982)Le Centre d’études et de documentation sur le développement culturel (art. 77 de la loi des finances de l’an 1984, organisé par le décret n° 1353 du 10 décembre 1987)Le Théâtre national tunisien (loi n° 113-83 du 30 décembre 1983)L’Institut supérieur d’art dramatique (décret n° 1205 du 20 août1982)L’Institut supérieur de formation des animateurs culturels (décret n° 1204 du 20 août 1982)L’Institut supérieur de musique (décret n° 862 du 26 juillet 1984)L’Agence nationale de mise en valeur et d’exploitation du patrimoine archéologique et historique (Loi n° 11 du 25 février 1988)La Société anonyme tunisienne de production et d’expansion cinématographique (Loi n° 82 du 20 décembre1957)L’Organisme tunisien de protection des droits d’auteurs (Loi n° 94-36 du 24 février 1994 et décret n° 96-2230 du 11 novembre 1996)

Autres organismes gouvernementaux opérant dans le secteur culturel (avec qualité d’établissement d’enseignement supérieur) :L’Institut technologique d’art, d’architecture et d’urbanisme (reformulé depuis en deux établissement : L’Ecole des Beaux-arts de Tunis et l’Ecole supérieur d’architecture et d’urbanisme) (Arrêté du 1 octobre 1930, organisé par le décret n° 950 du 10 octobre 1979,…)L’Institut de presse et des sciences de l’information (décret n° 517 du 30 octobre 1973)L’Institut supérieur de la documentation (Loi n° 63 du 11 juillet 1981, organisé par les décrets n° 651 et 652 du 1 avril 1982)Le Centre africain de perfectionnement des journalistes et communicateurs (art. 133de la Loi des finances du 31 octobre 1982)La Société des auteurs et compositeurs de Tunisie (décret n° 283 du 9 septembre 1968)

Annexe 7 : Lauréats du Prix UNESCO de l’artisanat pour la région arabe

Ill 1 : Aicha Filali (1994) Ill 2 : Meriem Benrachid et Hela Annabi (1994)Ill 3 : Fatma Benadbdallah –redissi (2000)Ill 4 : Awatef Chenouffi Chekir (2000)Ill 5 : Mohamed Njah (2002)Ill 7 : Ali Nacef (1er prix, 2005)Ill 7 : Ali Nacef _détailIll 8 : N’ja Mahdaoui (2ème prix, 2005)Ill 9 : Lotfi Boughzala (3ème prix 2005)

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n

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

Les participants à la conférence internationale sur la «Pédagogie de la tolérance dans le bassin méditerranéen», tenue les 21 et 22 avril 1995 à l’Académie tunisienne «Beït AI Hikma «à Carthage, ville dont la civilisation trois fois millénaire a répandu ses lumières à travers les trois continents : l’Afrique, l’Europe et l’Amérique,

S’inspirant de la Charte des Nations Unies, appelant à la pratique de la tolérance, de l’acte constitutif de l’UNESCO et de la Déclaration universelle des droits de l’Homme ;S’inspirant également de toutes les résolutions de l’UNESCO portant sur l’éducation pour la démocratie, les droits de l’Homme et la paix, ainsi que pour la promotion de la tolérance ;Rappelant les recommandations adoptées par les réunions organisées par l’UNESCO et relatives à ce thème ;Prenant note avec satisfaction du discours inaugural de Son Excellence Zine El Abidine Ben Ali, Président de la République Tunisienne, pour sa portée humaniste et éthique, ainsi que du discours prononcé à la même occasion par M. Federico Mayor, Directeur Général de l’UNESCO,

Adoptent la présente Charte :A un moment du devenir de l’humanité

où les progrès des sciences et de la technologie rapprochent les hommes, imposent davantage d’ouverture des sociétés les unes sur les autres, rendant ainsi impératif l’examen critique de limage que l’on fait de soi et de son semblable, il est essentiel de reconnaître que nous sommes appelés plus que jamais à ériger la tolérance en principe universel, en idéal éthique et politique.

Il est à rappeler que la tolérance n’est pas une attitude spontanée, mais une vertu patiemment acquise. Aussi, les systèmes éducatifs en portent-ils la charge et la responsabilité. L’éducation à la tolérance doit être considérée comme un impératif urgent et c’est pourquoi il est nécessaire d’œuvrer à promouvoir une pédagogie de la tolérance qui, systématique et rationnelle, doit s’attaquer aux sources culturelles, sociales, économiques et politiques de l’intolérance, racine majeure de toutes les violences et forme majeure de l’exclusion.

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Afin de consolider cette éducation à la tolérance, la conférence de Carthage affirme les principes suivants :

1 - La lutte contre toutes formes d’intolérance exige que l’on pose la liberté, l’inviolabilité de la conscience au fondement même de l’existence humaine, ce qui rend nécessaire l’instauration de la démocratie, du pluralisme politique, de la reconnaissance et du respect mutuels.

2 - Le droit à la liberté, sous toutes ses formes, requiert l’existence d’un Etat de droit, la fonction d’un tel Etat étant de favoriser un art de vivre ensemble entre personnes de convictions différentes et non pas simplement entre porteurs des mêmes certitudes.

3 - L’existence de situations intolérables créées par des inégalités économiques et sociales, par des rapports internationaux inéquitables et par des politiques économiques imposées, exige des changements profonds, afin que soit édifié un environnement qui permette aux êtres humains de pratiquer la tolérance.

4 - La longue expérience de l’humanité montre à 1’évidence qu’il ne saurait y avoir de paix entre les hommes sans paix entre les croyances, politiques ou religieuses. Aussi, incombe-t-il aux trois religions monothéistes dans te bassin méditerranéen de promouvoir en leur sein, dans leurs rapports mutuels et dans les diverses sociétés, les valeurs de liberté, de tolérance et de droits de l’Homme.

5 - L’humanité étant une, ses valeurs fondamentales étant identiques, tout droit à la différence n’acquiert de sens authentique que dans le cadre d’une aspiration à 1’université. C’est pourquoi la diversité des cultures et la multiplicité des expressions de l’humain qui sont des facteurs d’émulation et d’enrichissement mutuels, ne doivent pas se transformer en obstacles de nature à empêcher l’épanouissement d’une culture des valeurs de progrès, de pair et de fraternité humaine. En conséquence, aucun droit n’est aliénable ; de même, ni le droit de citoyenneté agissante, ni celui de la pratique de la démocratie, ni celui de l’exercice de la pensée et de la liberté d’expression ne peuvent faire objet de discrimination.

Annexe 8 : La charte de Carthage : Sur la Tolérance en Méditerranée

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6 - Etant donné la nature éthique de ces principes, les participants à la Conférence de Carthage appellent les intellectuels, les hommes politiques, les responsables dans les réseaux de communication à faire de leur mieux pour contribuer à la promotion de l’éducation à la tolérance, à la consolidation des valeurs de liberté et de respect des droits de l’Homme, en répandant une culture de fraternité humaine.

7 - Les participants, prenant acte des nouvelles initiatives entreprises par des parties diverses pour favoriser le dialogue entre les différents pays des deux rives de la Méditerranée, appellent toutes les bonnes volontés à œuvrer davantage pour consolider la paix, la tolérance et la coopération entre les peuples du bassin méditerranéen. Les participants à la Conférence de Carthage, conscients des efforts

louables fournis pour l’organisation de cette manifestation, tiennent : - A rendre hommage à la Tunisie, qui a apporté sa ferme et précieuse contribution à la célébration de l’Année internationale de la Tolérance et à remercier les autorités tunisiennes pour la qualité de l’accueil et de l’organisation. - A féliciter l’UNESCO, pour le soutien apporté à l’organisation de cette conférence. - Ils sollicitent l’agrément de cette «Charte de Carthage pour la Tolérance» par la prochaine Conférence générale de l’UNESCO et appuient fermement le projet d’instituer une journée internationale de la Tolérance et proposent à l’UNESCO que cette journée soit l’occasion, à partir de 1995, de manifestations visant à la promotion de la tolérance et de la non-violence.

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

Annexe 9 : Le Pacte fondamental (Promulgué le 20 muharram 1274/10 septembre 1857)

Mohammed Bey

Le Pacte fondamental ou Ahd El Aman est promulgué le 10 septembre 1857 par Mohammed Bey devant une assemblée de ministres, caïds, oulémas, notables des souks et de consuls étrangers[]. Le pacte se place sous le double signe de la foi et de la raison, comme en témoigne le préambule :

« La mission que Dieu nous a donnée, en nous chargeant de gouverner ses créatures dans cette partie du monde, nous impose des devoirs impérieux et des obligations religieuses que nous ne pouvons remplir qu’avec son seul secours. Dieu est témoin que j’accepte ses hautes prescriptions pour prouver que je préfère le bonheur de mes États à mon avantage personnel. »

La sécurité est garantie à tous nos sujets et à tous les habitants de notre Régence quelles que soient leur religion, leur langue ou leur race. Cette sécurité s’étend à l’intégrité de leur corps, à la sacralité de leurs biens (possessions financières) et au respect de leur honneur. Cette sécurité ne souffrira d’exception que dans les cas déférés aux tribunaux ; la cause nous sera ensuite soumise, et il nous appartiendra soit d’ordonner l’exécution de la sentence, soit de commuer peine, soit de prescrire une nouvelle instruction.

IITous nos sujets sont assujettis à l’impôt tel qu’il est en vigueur - ou qui pourra - être établi plus tard - quelle que soit leur position de fortune, de sorte que les grands n’en seront nullement exemptés du fait de leur position élevée, ni les faibles accablés du fait de leur faiblesse. Ces dispositions seront clarifiées de manière precise.

IIILes musulmans et les autres habitants du pays sont égaux devant la justice, ce droit étant fondé sur le principe d’humanité à l’exclusion de toute autre considération. La justice sur terre est la balance d’équité qui distingue le juste de l’injuste et qui reconnaît le droit du moins fort face au plus fort.

IVNos sujets dhimmis (juifs ou chrétiens) ne subiront aucune contrainte pour changer de religion et ne seront point entravés dans l’exercice de leur culte ; leurs lieux de culte seront respectés et protégés contre toute atteinte ou offense, attendu que le statut de protection qui est le leur garantit les mêmes droits et les mêmes obligations pour eux comme pour nous.

VAttendu que l’armée est une garantie de sécurité pour tous et que l’avantage qui en résulte bénéficie à l’ensemble de la société ; considérant, d’autre part, que l’homme a besoin de consacrer une partie de son temps à sa subsistance et aux besoins de sa famille, les soldats ne seront enrôlés que suivant une procédure régulière et d’après le mode de conscription par tirage au sort. Le soldat ne restera point en service au-delà d’un temps défini, ainsi que nous le fixerons dans un code militaire.

VILorsque le tribunal criminel aura à se prononcer sur la pénalité encourue par un sujet dhimmi, il sera adjoint audit tribunal un membre que nous désignerons parmi les personnalités appartenant à sa communauté afin qu’il se sente en confiance et qu’il ne craigne aucune partialité. La loi religieuse, du reste, recommande la bienveillance à leur égard. VIINous établirons un tribunal de commerce composé d’un président, de greffiers et de plusieurs membres choisis parmi les musulmans et les sujets des puissances amies. Ce tribunal, qui aura à juger les litiges d’ordre commercial, entrera en fonction après que nous nous serons entendu avec les grandes

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puissances étrangères amies sur le mode à suivre pour que leurs sujets soient justiciables de ce tribunal. Les règlements de cette institution seront développés d’une manière précise afin de prévenir toute complication.

VIIITous nos sujets, musulmans ou autres, sont égaux relativement aux ordres traditionnels et aux jugements coutumiers ; nul ne jouira à cet égard de privilège sur un autre.

IXLe commerce est licite pour tous et sans exclusive. Le Gouvernement s’interdit toute espèce de commerce et n’empêchera personne de s’y livrer.

Le commerce, en général, sera l’objet d’une sollicitude protectrice et tout ce qui pourrait constituer une entrave sera levée.

XLes étrangers qui se rendent dans notre Régence pourront exercer toutes les industries et tous les métiers à condition qu’ils se soumettent aux lois établies et aux lois à venir, à l’égal des habitants du pays. Personne ne jouira, à cet égard, de privilège sur un autre. Cette liberté leur sera acquise après que nous nous serons entendu avec leurs gouvernements sur le mode d’application qui sera expliqué et développé ultérieurement.

XILes étrangers qui se rendent dans notre Régence et qui relèvent d’autres Etats pourront acheter toutes sortes de propriétés, telles que maisons, jardins, terres, à l’égal des habitants du pays, à condition qu’ils se soumettent sans réserve aux lois établies et aux lois à venir. La loi sera égale pour tous, sans aucune différence. Nous ferons connaître par la suite, en consultation avec les pays amis, les conditions de résidence de telle sorte que le propriétaire en aie une connaissance parfaite et qu’il en tienne compte à l’avance. Nous jurons par Dieu et par le texte sacré que nous mettrons à exécution les grands principes que nous venons de poser, suivant le mode indiqué, et que nous les ferons suivre des explications nécessaires. Nous en prenons l’engagement en notre nom et au nom de nos successeurs : aucun d’eux ne pourra régner avant d’avoir fait le serment d’observer ce Pacte qui résulte de nos soins et de nos efforts. Nous en prenons pour témoins Dieu et cette illustre assemblée composée de représentants des grandes puissances amies et des hauts fonctionnaires de notre gouvernement.

(Source : Les Archives Nationales)

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Diversité culturelle et dialogue interculturel en Tunisie

Bibliographie :

André Raymond : Tunis sous les Mouradites. La ville et ses habitants au XVIIe siècle, éd. CERES, Tunis, 2006

Lucette Valensi : Le Maghreb (1790-1830) avant la prise d’Alger, éd. CERES, Tunis, 2004

Paul Sebag : Histoire des juifs de Tunisie. Des origines à nos jours. Ed. L’Harmattan, Paris, 2000

Lucette Valensi : Esclaves chrétiens et esclaves noirs à Tunis au XVIIè siècle, Annales, Economies, sociétés, civilisation, n° 6. 1967

Ahmed Ibn Abi Dhiaf : Al Ithaf, Tome 4, pp. 89-90, éd. Maison Tunisienne d’Edition (non daté)

Dalenda et Abdelhamid Larguèche : Marginales en terre d’Islam, éd. CERES, Tunis, 1993

Ibn Khaldoun : Histoire des berbères (Kitab El Ibar), éd. Dar El Kitab El Loubnani, Beyrouth, 1981

Taïeb Baccouche : Le phonème g dans les parlers arabes citadins de Tunisie, in Revue tunisienne des sciences sociales, n°9 (30/31), 1972, pp. 103-137

Taïeb Baccouche, Hichem Skik et Abdelmajid Attia, Travaux de phonologie, Parlers de Djemmal, Gabès et Mahdia, in Cahiers du CERES, Tunis, 1969

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Michael Gibson, Dialect Contact in Tunisian Arabic. Sociolinguistic and structural aspects, éd. Université de Reading, Reading, 1998

CLT

Secteur de la Culture

Bureau multipays del’UNESCO à Rabat

Diversité culturelleet dialogue interculturel

en Tunisie

UNESCO2009

CL/RA/MA/2009/PI/H/7