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MEDECINE SCOLAIRE ET UNIVERSITAIRE LA SOUFFRANCE PSYCHIQUE DE L'ENFANT ET DE L'ADOLESCENT Actes de la journée du 20 janvier 2006 Editions AFPSSU

LA SOUFFRANCE PSYCHIQUE DE L'ENFANT ET DE L'ADOLESCENT n'importe quel domaine de la santé et de la maladie. Il faut toutefois souligner que sa principale caractéristique est de s'adresser

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MEDECINE SCOLAIRE ET UNIVERSITAIRE

LA SOUFFRANCE PSYCHIQUEDE L'ENFANT ET

DE L'ADOLESCENT

Actes de la journée du 20 janvier 2006

Editions AFPSSU

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Ce volume regroupe l'ensemble des textes remis pour la Journée du20 janvier 2006 à L'ASIEM, 6 rue Albert de Lapparent, Paris 7ème

"Médecine Scolaire et Universitaire"Collection de livres thématiques

Direction et Rédaction de la publication : Dr Marie Claude ROMANODr Claude BRAVARD

Secrétariat et Administration :A.F.P.S.S.U. 242 boulevard Voltaire 75011 ParisMél.: [email protected] : http://www.afpssu.com/Imprimeur : Dumas-Titoulet ImprimeursImpression n° 43443Dépôt légal : janvier 2006ISBN 2-9513364-1-1 EAN : 9782951336414

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Sommaire

Ouverture de la journée 4

La Présidente de l'AFPSSU, Madame le Docteur Claude BRAVARD.. 4

Connaissance de la pathologie mentale de l'enfant : l'apport de l'épidémiologie 6

Dr. Anne TURSZ pédiatre, épidémiologiste, Directeur de recherche. INSERM U750/Cermes. Site CNRS. 7 rue Guy Môquet. 94801 Villejuif, France 6

L'approche clinique chez l'enfant 17

Pr. Bernard GOLSE Pédopsychiatre -Psychanalyste, chef de service de pédopsychiatrie de l'hôpital Necker- Enfants malades / professeur de Psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'université René Descartes, Paris-V 17

Comment comprendre les pathologies mentales de l'adolescence ? 29

Pr. Philippe Jeammet, psychanalyste, professeur de psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'université Paris VI, chef du service de psychiatrie des adolescents et des jeunes adultes à l'Institut Mutualiste Montsou ris-Jou rda n 29

Le repérage, enquête sur les troubles mentaux chez les enfants scolarisés dans les écoles primaires de Provence Alpes Côte d'Azur

38

Dr. Viviane KOVESS, T. SHOJAE Fondation MGEN pour la santé publique, université Paris V 38

Mieux vivre ensemble dès l'école maternelle, un programme de développement des compétences sociales 52

Pr. Jacques FORTIN, pédiatre et professeur en sciences de l'éducation 52

Un exemple d'action de prévention mis en œuvre dans le cadre scolaire 60

Gérard CHAMPEYRACHE, Inspecteur de l'éducation nationale, circonscription Paris IIA-Voltaire 60

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Accueil et prise en charge de l'enfant dans les cas de suspicion de maltraltance, expérience d'une approche médico-psycho-sociale..66

H. Romano, V.Mingot, M. Van Scheck, P. Vasquez, J.L. Charritat. Unité d'Accueil des Jeunes Victimes de l'Hôpital Armand Trousseau -Paris 66

Orientation et stratégie thérapeutique pour les adolescents du secteur 15 74

Dr. Michel Fouillât, psychiatre à l'hôpital Sainte Anne 74 Dr Marie Jeanne GUEDJ, psychiatre, hôpital Sainte Anne 74

Secteur de psychiatrie infanto-juvénile du XVI ™ arrondissement, ses relations avec l'éducation nationale 78

Dr. Yves Contejean, pédopsychiatre, chef de service, hôpital Sainte Anne 78

Le Relais Etudiants Lycéens, clinique médico-universitaire Georges Heuyer Un modèle de dispositif de prévention, de dépistage et de traitement précoces des troubles psychopathologiques à l'adolescence, en milieu scolaire 83

Dr. Dominique Monchablon, psychiatre, chef de service, responsable médical du Relais Etudiants Lycéens de la clinique Georges Heuyer Catherine Giraud, psychologue au Relais Etudiants Lycéens 83

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Ouverture de la journée La Présidente de l'AFPSSU, Madame le Docteur Claude

BRAVARD

Le malaise de nos jeunes avec son cortège de manifestations de souffrance psycliique (désespérance, violence, tentatives de suicide, conduites addictives..) est pour beaucoup d'entre nous sujet de préoccupation.

C'est notamment le souci de tous les acteurs qui oeuvrent au sein de l'école avec une présence active auprès des jeunes scolarisés.

Quel est l'ampleur de ce problème reconnu comme une priorité de santé publique ?

Comment amener des jeunes en état de mal être à exprimer leur souffrance mais aussi à formuler leurs espoirs ?

Devant une demande implicite de ces jeunes qui dérangent et parfois font peur, comment agir ? Comment les écouter? Décoder leur message pour tenter d'y répondre pour leur faciliter l'accès aux aides et aux soins ?

Nous savons tous que les jeunes auteurs de violences agies sont fréquemment les mêmes que ceux victimes de violences subies et que l'agir agressif est mis en place dès les premières relations de l'enfance.

N'y a t il pas une réflexion à mener dans cette situation préoccupante pour créer une dynamique de prévention dès la petite enfance en y associant prioritairement les enfants, leur famille et leur environnement social et scolaire ?

Toutes ces questions vont être posées aux experts ici présents qui ont bien voulu nous consacrer un moment de leur temps précieux. Je les en remercie par avance très chaleureusement

L'Association Française de Promotion de la santé Scolaire et Universitaire qui regroupe des médecins, des infirmières, des assistantes sociales, des psychologues, des professionnels de l'Éducation et des représentants d'associations et d'institutions propose annuellement à ses adhérents des journées d'études et d'échanges sur des thèmes les plus proches possibles de leurs préoccupations et de l'actualité.

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Le sujet abordé aujourd'hui répond à votre attente, soucieux de confronter vos expériences à la réflexion des experts et désireux de vous retrouver entre acteurs de proximité pour une réflexion active avec des experts.

Merci d'avoir répondu si nombreux à notre initiative.

Excellente journée d'échanges à tous, en souhaitant que la souffrance psychique puisse un jour faire place au bien être des enfants et des adolescents.

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Connaissance de la pathologie mentale de l'enfant : l'apport de l'épidémiologie

Dr.AnneTURSZ pédiatre, épidémiologiste, Directeur de recherciie.

INSERIVl U750/Cermes. Site CNRS. 7 rue Guy IVlôquet. 94801 Villejuif France

Beaucoup de pédiatres ont le sentiment que les troubles émotionnels et du comportement constituent une large part des raisons profondes de recours aux soins dans leur clientèle. Pourtant, bien souvent, ils ignorent la magnitude du problème, de même que les facteurs de risque des troubles mentaux de l'enfant, ou la nature, la disponibilité et l'efficacité des services appropriés. Ces informations sont apportées par l'épidémiologie, discipline qui permet d'étudier la fréquence des maladies dans divers groupes de populations (épidémiologie descriptive), d'en rechercher les facteurs de risque (épidémiologie analytique), et d'aider à la mise en place et à l'évaluation des actions préventives ou thérapeutiques (épidémiologie d'intervention et évaluative). L'un des rôles principaux de l'épidémiologie est donc finalement celui d'outil d'aide à la planification et à l'évaluation des services de santé à partir de l'identification des besoins, et on ne saurait la réduire au calcul de taux de troubles, comme le souligne de façon très argumentée un récent article faisant une revue de la littérature (essentiellement nord-américaine) sur l'épidémiologie en santé mentale de l'enfant et de l'adolescent, et montrant bien que l'utilisation scientifique de l'épidémiologie peut améliorer les services de santé mentale et la prévention primaire [1].

L'épidémiologie est bien sûr applicable à la santé mentale, comme à n'importe quel domaine de la santé et de la maladie. Il faut toutefois souligner que sa principale caractéristique est de s'adresser à des populations, au contraire de la psychiatrie dont l'approche est essentiellement de type clinique et individuel. Ces différences de conception dans l'approche des problèmes de santé expliquent sans doute pour une large part pourquoi l'épidémiologie en santé mentale est si peu développée, notamment chez l'enfant, et tout particulièrement en

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France. En effet, jusqu'à très récemment, la seule étude rigoureuse de prévalence menée en France en population générale (l'étude de Chartres [2]) datait du début des années 1990.

Dans cet exposé qui ne s'intéresse qu'à l'enfant, à l'exclusion de l'adolescent, on insistera sur les aspects méthodologiques de l'épidémiologie en santé mentale, dans sa composante descriptive principalement, mais aussi dans ses aspects explicatif et d'évaluation, à l'aide de quelques exemples.

PEUT-ON IDENTIFIER ET MESURER LA FRÉQUENCE DES TROUBLES MENTAUX DE

L'ENFANT ?

La mesure de la prévalence de ces troubles suppose une grande rigueur

dans :

• les définitions et donc le choix des classifications diagnostiques • le choix des outils de repérage et de diagnostic

• la détermination des sources d'information et des populations enquêtées

• la compétence des investigateurs.

Les sources d'information et la nature de la population objet de l'enquête jouent un rôle considérable dans la fiabilité des chiffres produits. Ainsi, dans les études basées dans les services de santé, on ne connaît pas le taux de couverture de la population que les services de santé enquêtes sont sensés desservir, et on ignore donc tout des enfants atteints de pathologie mentale qui ne consultent pas. Il y a aussi des biais liés à la gravité de la pathologie, ou du moins à son appréciation par la famille ou toute autre personne responsable de l'enfant et susceptible de l'envoyer consulter (enseignant, médecin généraliste ou spécialiste...). Il peut exister pour les familles des problèmes d'acceptabilité des services (qualité de l'accueil, des soins...), d'accessibilité financière, ou géographique (certaines zones peuvent être très mal desservies, notamment en structures spécialisées : ceci est particulièrement vrai en France pour les services à même de prendre en charge certains troubles des apprentissages du très jeune enfant [3]). Enfin, pour qu'une famille vienne consulter, il faut qu'elle ait reconnu l'existence d'un trouble, ce qui n'est pas toujours le cas et varie selon le contexte socioéconomique et culturel.

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La non reconnaissance d'un trouble psychiatrique ë les réticences vis à vis des services de santé mentale peuvent également être le fait de soignants (généralistes ou pédiatres) qui n'adressent pas l'enfant dans le service approprié. Or les cabinets de médecine libérale sont très concernés par la pathologie mentale de l'enfant comme l'atteste une étude française, ayant porté sur une cohorte de 2700 enfants âgé de 4 à 16 ans [4], qui indique que les enfants présentant des troubles émotionnels et du comportement «banals » consultent prioritairement le généraliste, puis le pédiatre, puis le personnel de santé scolaire, puis l'orthophoniste, enfin le personnel de santé mentale (dans 6% des cas), les garçons recourant significativement plus au personnel de santé mentale et à l'orthophoniste que les filles. L'auteur précise toutefois qu'il ne s'agit pas de troubles psychiatriques sévères.

Seules les études menées sur des échantillons tirés au sort dans la population générale permettent une véritable représentativité, des calculs de fréquence et donc une évaluation des besoins en services, à condition toutefois que les techniques d'enquête permettent d'obtenir l'exhaustivité des cas. Par ailleurs, la fiabilité médicale des données recueillies est conditionnée par la compétence des investigateurs. Ces études sont donc généralement très coûteuses lorsqu'il s'agit d'enquêtes menées au domicile, telles les « household surveys » des pays anglo-saxons.

En France, l'obligation scolaire, le fait qu'à 3 ans 99% des enfants soient scolarisés, et la réalisation de bilans de santé obligatoires (lors de la sixième année et en classe de troisième) font de l'école un observatoire potentiel de la santé de toute la population des enfants et notamment de leur santé mentale. Dans un pays au système de santé complexe comme celui de la France, l'école représente un lieu de choix pour le dépistage, et notamment, avec l'aide de la Protection Maternelle ot Infantile (PMI), le dépistage précoce (dès 3-4 ans). Toutefois, il ne faut pas oublier qu'il y a un faible pourcentage d'enfants qui échappent au système scolaire et qui peuvent être les plus « à risque » sur le plan de la santé mentale (voire déjà porteurs de troubles les ayant exclus du système scolaire normal) : enfants en placement familial ou institutionnel (assez facilement identifiables); enfants «scolarisés » à domicile (difficiles à dépister, et éventuellement en situation délicate) ; enfants sans aucune scolarisation (appartenant à des familles marginales parfois impossibles à connaître). Enfin, le caractère superposable d'une population scolaire à la population générale des enfants dépend de variables propres à chaque pays

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(organisation du système scolaire, public et privé; âge de l'obligation scolaire; sexe des élèves véritablement scolarisés).

En France, en milieu scolaire, existe bien la double possibilité de dépistages en routine et d'études épidèmiologiques.

Quels outils utiliser?

Les outils diagnostics utilisés doivent être validés dans un contexte culturel donné. Ainsi, en France seuls deux instruments d'évaluation clinique ont été validés : le Child Behaviour Checklist (CBCL ; traduit en français et utilisé dans l'étude de Chartres [2]) et le test Dominic interactif. Le caractère universel, transculturel, d'une classification n'est pas admis par tous. Ainsi, en France, lintérêt pour les classifications n'est pas marqué chez les psychiatres d'enfants et d'adolescents, qui estiment que ce type d'outil se prête mal à la description d'une « psychopathologie mouvante » comme celle de l'enfance, d'où le rejet par beaucoup du DSM. La Classification Française des Troubles Mentaux de l'Enfant et de l'Adolescent (CFTMEA) a été élaborée avec pour objectif une meilleure reconnaissance des composantes multifactorielles présentes dans la psychopathologie de l'enfant, le DSM-III étant estimé par beaucoup comme trop orienté vers des aspects purement symptomatiques et comportementaux [5]. Un outil tel que la classification française présente l'intérêt d'entraîner l'adhésion d'une certaine communauté professionnelle nationale, mais a le désavantage (malgré des équivalences établies avec la CIM 10) de rendre les comparaisons internationales et la reconnaissance des travaux français malaisées. En effet, le DSM-IV est actuellement la classification de référence en pathologie mentale au niveau international. Notons par ailleurs que la cohérence est très bonne entre le DSM-IV et le CBCL et que la construction du Dominic repose sur le DSM-IV.

Quels chiffres de prévalence des troubles mentaux chez l'enfant ?

Finalement, les différences dans les termes choisis pour définir ces troubles, dans les catégories prises en compte, dans les tranches d'âge, les lieux et méthodes de collecte et dans les outils utilisés, expliquent les fréquentes difficultés d'interprétation des résultats de diverses études et surtout de comparaison des études entre elles (Tableau I). Par ailleurs, le

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contexte social et psychologique de vie des enfants a évolué, et il faut donc tenir compte du facteur temps dans les comparaisons.

L'analyse du Tableau I montre que la définition des troubles joue un rôle essentiel dans les taux de prévalence observés. Toutefois, pour une même définition (désordres psychiatriques [2, 6, 7, 8] ou troubles du comportement [9, 10]), certains faits paraissent bien établis : augmentation de la fréquence êtes troubles dans le temps, taux plus élevés dans les études en population générale que dans celles menées dans les services de santé, taux chez les garçons presque double de ceux des filles.

Les avantages des études longitudinales

Malgré leur relative rareté, les études longitudinales méritent une mention spéciale du fait de leur grand intérêt et des problèmes méthodologiques complexes qu'elles posent. Elles appartiennent à la fois à l'épidémiologie descriptive (elles décrivent l'évolution de phénomènes) et explicative (lorsque le suivi d'une cohorte d'enfants, a priori sains à l'origine, permet par la suite la comparaison de sujets sains et de sujets malades, à la recherche de facteurs de risque).

Plusieurs études longitudinales de cohortes abordent le problème des liens entre la santé mentale des enfants et leur devenir à l'adolescence et à l'âge adulte. Le principal problème méthodologique posé par ce type d'approche est celui des «perdus de vue ». Plus la période de suivi est longue, plus ce risque est important, rendant parfois les conclusions impossibles à tirer, d'autant qu'il existe habituellement des biais dans le fait de pouvoir être retrouvé ou non dans le cadre d'un suivi, les sujets manquants étant bien souvent les plus à risque des problèmes qu'on étudiait (marginalisation sociale, pathologie grave non traitée...). Pour qu'elles soient vraiment fiables, ces études doivent être prospectives, donc lourdes et coûteuses.

Une étude de cohorte menée en Suède [11] a montré que les conflits intra-familiaux et les ruptures de la famille jouent un rôle péjoradf sur la santé du futur adulte, bien plus que les facteurs économiques. Selon une étude longitudinale menée par Tremblay au Québec, l'agressivité et les comportements antisociaux des enfants de grande section de maternelle

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sont prédictifs de la violence de l'adolescent et de la délinquance du jeune adulte [12].

EPIDEMIOLOGIE EXPLICATIVE ET SANTE MENTALE DE L'ENFANT

Les études explicatives, visant à identifier des facteurs de risque de certains phénomènes pathologiques, utilisent des techniques de comparaisons de groupes. Dans les études cas/témoins (enfants porteurs de troubles psychologiques/enfants indemnes), on pratique un appariement des cas et des témoins sur un certain nombre de variables, afin déviter une trop grande disparité des deux populations pour les caractéristiques dont on ne veut pas étudier le rôle. C'est ainsi qu'on apparie en général sur l'âge et le sexe, deux des variables les plus discriminantes en matière de santé, parfois sur le statut socioéconomique si on pense qu'il peut jouer un rôle important, mais ne fait pas partie des facteurs de risque potentiels que l'on veut identifier et étudier.

Dans les études explicatives, le problème majeur que l'on rencontre est celui de l'élimination des facteurs de confusion lors de l'analyse des facteurs de risque. Ainsi, dans le domaine de la santé mentale de l'enfant, beaucoup d'études (principalement nord-américaines) s'intéressent au rôle des facteurs socioéconomiques et ethniques, ces deux types de facteurs étant d'ailleurs liés entre eux. Le lien entre difficultés socioéconomiques et troubles psychologiques chez l'enfant est très controversé. Pour certains, la pauvreté est un facteur de risque majeur [8, 9, 13, 14]. Dans une étude menée en grande section de maternelle au Québec, les enfants les plus hyperactifs et anxieux avaient plus souvent que les autres une mère seule ayant un bas niveau éducatif et de faibles revenus [12]. En revanct'e l'étude menée par Rutter et al dans l'île de Wight n'a pas détecté de différences quant à la classe sociale entre les 6 à 7% d'enfants présentant des troubles psychologiques et les autres [6],

Ce bref survol des études à visée «étiologique » des troubles mentaux montre bien l'existence de problèmes éthiques associés à la recherche de « facteurs de risque ». Par ailleurs les débats, parfois houleux, qui ont suivi la publication de certaines «Expertises collectives » de l'Inserm, soulèvent la question des problèmes éthiques liés à la diffusion des résultats, notamment à travers la grande presse (voire en particulier la faible acceptabilité d'un tableau regroupant des troubles de nature et de

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gravité très diverses, de l'autisme aux troubles anxieux, dans un chapitre dont le titre était : « 1 enfant sur 8 souffre d'un trouble mental en France» [15]).

EPIDEMIOLOGIE EVALUATIVE ET PRISE EN CHARGE DES TROUBLES MENTAUX

DE L'ENFANT

L'épidémiologie evaluative des interventions thérapeutiques en santé mentale (exceptionnellement réalisée en France) indique clairement que « tout n'est pas, à l'heure actuelle, évaluable ». Ainsi une tentative de mesure de l'efficacité des thérapies psychanalytiques se heurte au problème de l'absence de groupe témoin, et il apparaît pratiquement impossible de comparer entre elles certaines techniques de prise en charge. Par ailleurs, il existe en France une réticence évidente, chez certains psychiatres, à l'évaluation, comme à la standardisation de protocoles de prise en charge ou à l'utilisation d'outils, comme l'a très bien montré une récente étude des pratiques d'anamnèse des psychiatres, recevant des adolescents suicidants, à la recherche d'antécédents de maltraitance : « Le recours à la littérature est rarement cité (comme celui aux textes législatifs). Il existe néanmoins souvent une véritable hantise des «publications américaines », voire un rejet de la recherche, qui semblent vécues comme des outils de restriction de l'espace de liberté professionnelle. Le fait qu'il n'y a pas antinomie entre l'affirmation (issue de données de recherche) qu'il existe des facteurs de risque et des critères qui peuvent aider à une optimisation des pratiques, d'une part, et une liberté d'évaluer ses patients selon des procédures acquises à travers l'expérience professionnelle, d'autre part, ne semble pas une idée couramment admise. Il y a peut-être là une explication au désarroi manifeste qui ressort de beaucoup d'entretiens dès lors qu'on abordait les questions de la maltraitance et des décisions pratiques à prendre. C'est sans doute ce désarroi qui explique le climat de tension lors de certains entretiens, voire des réactions de colère quand les derniers thèmes étaient abordés » (extrait du rapport de recherche [16]).

En conclusion

L'approche épidèmiologique peut être un atout majeur dans la recherche en santé mentale de l'enfant. Elle peut permettre de calculer des fréquences et d'évaluer les besoins en services. En identifiant des groupes à risque, elle peut aider à cibler des actions ; elle permet des

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suivis de tendances et l'évaluation d'actions; elle propose une approche scientifique des facteurs explicatifs. Toutefois tout cela n'est possible qu'au prix de méthodes rigoureuses et d'indicateurs pertinents et il ne faut pas se dissimuler la lourdeur et le coût des grandes enquêtes en population.

L'analyse des données, notamment dans le domaine des facteurs de risque, doit être menée avec prudence, voire recul et scepticisme vis à vis de certains chiffres, afin, notamment, de ne pas attribuer certains troubles à des facteurs culturels ou sociaux qui ne sont en fait que des facteurs de confusion. Dans ce domaine, la méthode statistique, moyen essentiel d'analyse en épidémiologie, peut s'avérer un outil réducteur et les résultats doivent être lus à la lumière de la clinique. En effet l'approche clinique et l'épidémiologie doivent être considérées comme complémentaires, et les recherches développées dans une telle optique peuvent aussi bénéficier de l'apport d'autres disciplines, notamment celles des sciences sociales (sociologie, anthropologie par exemple) qui aident à resituer certains troubles de l'enfant dans un contexte social et culturel.

Dans une perspective d'avenir, on peut souhaiter que se développe sereinement une recherche épidémiologique qui ;

• affronte la complexité de l'approche étiologique des troubles mentaux de l'enfant par l'association d'une multiplicité de disciplines (épidémiologie, recherche clinique, psychologie, génétique, neurobiologie, imagerie...)

• porte sur des populations non sélectionnées et suivies de façon prospective (à ce titre m ne peut que se réjouir de la mise en place, en cours, de la grande cohorte de naissances Ined/Inserm/Insee/InVS)

• utilise des outils consensuellement acceptés permettant une évaluation des pratiques professionnelles et des comparaisons internationales

• et in fine ait de vrais objectifs de santé publique de renforcement

de la santé mentale dans l'enfance et de dépistage des cas à

prendre en charge.

Enfin une réflexion doit être engagée sur le rôle de l'école, seul lieu où passent tous les enfants, dans un tel effort de recherche.

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L'approche clinique chez l'enfant

Pr. Bernard GOLSE Pédopsychiatre -Psychanalyste, chef de service de

pédopsychiatrie de l'hôpital Necker- Enfants nnalades / professeur de Psychiatrie de l'enfant et de l'adolescent à

l'université René Descartes, Paris-V

Introduction

L'approche clinique de la souffrance de l'enfant pose un certain nombre de problèmes intrinsèques à la discipline pédopsychiatrique en tant que telle, mais elle soulève également un certain nombre de questions quant à la nature même de la collaboration entre les professionnels intervenant dans le champ de cette discipline (pédopsychiatres, psychologues et psychanalystes) et leurs différents partenaires intervenant dans le champ de l'éducation nationale (enseignants et médecins scolaires).

A ce titre, cette journée scientifique est importante, et ceci notamment à une époque où les demandes adressées à l'école quant à l'observation du comportement des enfants finissent par aller bien au-delà des fonctions habituelles des enseignants, soit bien au-delà de leur tâche primaire.

Après avoir rappelé brièvement l'évolution de la demande du corps social à l'égard de la pédopsychiatrie au cours des dernières décennies, nous rappellerons les bases du modèle poly-factoriel propre à la psychopathologie, avant de conclure en évoquant l'exemple, aujourd'hui paradigmatique, de l'hyperactivité.

L'évolution de la demande du socius à l'égard de la pédopsychiatrie

Les sociologues nous aident à repérer ce type de modifications

progressives.

Il est clair par exemple qu'en France, la demande sociale dans les années soixante/soixante dix, à l'égard de la pédopsychiatrie, était une

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demande centrée principalement autour de la question du sujet, de sa souffrance et de ses conditions de soin.

C'est dans cette perspective, que s'est joué, nous semble-t-il, tout le mouvement de sectorisation (en psychiatrie de l'adulte comme en psychiatrie de l'enfant) dont on sait par ailleurs qu'il renvoyait également à des objectifs égalitaires, et qu'il cherchait à tenir compte, pour lutter contre l'enfermement, de la terrible et douloureuse expérience concentrationnaire à laquelle la seconde guerre mondiale avait, hélas, donné lieu.

La politique de sectorisation est, on le sait, loin d'avoir été menée à son terme mais, à l'heure actuelle, il ne semble plus que les mêmes objectifs ou que les mêmes idéaux soient en jeu et, de ce fait probablement, la demande sociale a désormais changé.

On parle moins du sujet, on parle moins de souffrance, on parle moins d'enfermement et l'on parle davantage de symptômes à réduire ou à raboter pour favoriser l'adaptation socio-scolaire de l'enfant.

C'est ainsi, par exemple, que les projecteurs médiatiques ont pu se focaliser successivement sur la violence des adolescents, sur la maltraitance et les abus sexuels, sur les troubles obsessivo-compulsifs (TOC), sur la maladie de Gilles de la Tourette (maladie des tics), et sur les troubles oppositionnels avec provocation (TOP) enfin, plus récemment ...

La tentation est grande, alors, de rechercher la réponse médicamenteuse qui permettrait rapidement de supprimer le symptôme, sans avoir besoin de se livrer à une analyse psychopathologique complète de la situation, forcément lente et pluri-factorielle.

C'est ce que l'on a vu pour les TOC, les tics, les comportements psychotiques sans structure psychotique avérée et c'est, selon nous, dans cette dynamique des idées et des attentes que l'hyperactivité de l'enfant a acquis, peu à peu, un statut clinique particulier sur lequel nous reviendrons plus loin.

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Rappels sur le modèle polyfactoriel propre à la psychopathologie

Nombre d'auteurs s'accordent actuellement pour penser que le seul modèle étiologique plausible dans le champ de la psychopathologie est un modèle résolument polyfactoriel qui nous impose, de ce fait, une prise en charge thérapeutique toujours multidimensionnelle.

Dans cette perspective, toute situation psychopathologique - et notamment chez l'enfant - représenterait alors une sorte de « voie finale commune v de toute une série de configurations étiopathogéniques au sein desquelles les facteurs endogènes et les facteurs exogènes seraient toujours présents, mais en proportion variable dans chaque cas.

Personnellement, nous n'avons de cesse de rappeler cette quasi-évidence que le développement normal de l'enfant se joue toujours à l'exact entrecroisement, à l'interface, au carrefour des facteurs endogènes (soit la part personnelle du sujet, avec son équipement génétique, biologique, psychologique ou cognitif ...) et des facteurs exogènes (soit son environnement au sens large, métabolique, alimentaire, écologique ... mais avec aussi tous les effets de rencontre relationnelle, et les effets d'après-coup que cela suppose).

Ce schéma vaut aussi, nous semble-t-il, pour les troubles du développement et notamment du développement psychologique et affectif.

Aussi récent qu'il puisse paraître, il est en fait le strict héritier du concept freudien de « série complémentaire » (S. FREUD).

Ce qu'il faut ajouter, cependant, c'est que la polyfactorialité en jeu dans ce modèle se joue, en réalité, au double niveau des facteurs primaires (ou facteurs de vulnérabilité) et des facteurs secondaires (ou facteurs de maintien) qui sont probablement tous, les uns comme les autres, un mixte de facteurs somatiques et psychiques, ceci étant dit en rappelant que les facteurs primaires ne sont jamais que des facteurs de risque, alors que les facteurs secondaires sont des facteurs de figement d'une psycho-pathologie d'abord en partie réversible.

Le modèle polyfactoriel est donc beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît.

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Nombre des facteurs impliqués nous sont encore inconnus.

Ceux que nous pressentons ne sont sans doute, encore, que la partie émergée de l'iceberg ...

Autrement dit, l'honnêteté scientifique et épistémologique nous impose, certes, de continuer à réfléchir et à chercher mais, dores et déjà, elle nous oblige à recourir à une approche multidimensionnelle du soin qui est, sans conteste possible, la contrepartie absolument obligée de ce modèle polyfactoriel.

Tel est donc notre plaidoyer pour le modèle polyfactoriel, et pour la dimension multidimensionnelle du soin qui s'y attache inéluctablement selon nous.

Le paradigme de l'hyperactivité

Depuis les origines de la psychiatrie de l'enfant, différents auteurs ont décrit sous des noms variés des enfants présentant à la fois un comportement agité et des difficultés apparentes à maintenir leur attention sur une activité précise (chorée mentale, enfant turbulent ou instable, hyperkinésie, hyperactivité psychomotrice ...)

Les questions qui divisent actuellement les différents auteurs, concernent d'une part la (ou les) signification (s) pathologique(s) qu'on peut attribuer à de tels comportements ainsi que le (ou les) facteur(s) étiologique(s) sous-jacent(s), et d'autre part les interventions thérapeutiques, médicamenteuses ou autres qui apparaissent comme justifiées dans de telles situations, justification qu'il convient, bien entendu, d'apprécier en termes d'efficacité, de risque d'effets indésirables et de positionnement éthique.

Le concept de « trouble déficitaire de l'attention avec hyperkinésie » s'est aujourd'hui imposé à la plus grande partie de la médecine et de la psychiatrie mondiale, avec souvent pour corollaire, un traitement systématique par les psycho stimulants, mais si l'hyperactivité prend, désormais, une telle place dans nos débats, c'est sans doute parce qu'elle constitue un paradigme sur lequel convergent toute une série de problématiques fondamentales pour la pédopsychiatrie (organogenèse ou psychogenèse ; clivage entre corps et psyché ; approche

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pédagogique, rééducative ou psychothérapeutique ; vision linéaire ou multidimensionnelle de la psychopathologie ...)

Il faut toutefois relever les paradoxes des positions de notre société vis-à-vis de l'enfant devenu précieux, sujet à protéger, doté de droits nouveaux mais, en rrême temps, mis en devoir de combler, par sa réussite le narcissisme de ses parents, et, de ce fait, soumis très précocement à des exigences sociales assez contraignantes.

Ainsi, la question de l'hyperactivité met-elle nécessairement en jeu la tolérance variable de la société à l'égard de la mobilité de ses enfants, ainsi que les critères éducatifs de l'entourage familial et scolaire.

D'une certaine manière, plus une société est agitée, et moins elle semble

tolérer les enfants remuants, mais plus elle met ai place les conditions

mêmes de l'agitation I

Lors du dernier congrès de l'ESCAP (European Society for Chiidren and Adolescnt Psychiatry) qui s'était tenu à Paris, en 2003, nous avons bien senti la substitution de clivage qui s'était opérée avec le passage du clivage classique entre organogenèse et psychogenèse, à un nouveau clivage entre une « clinique de l'instant » et une « clinique de l'histoire ».

Il y avait déjà là une certaine bascule du point de vue épistémologique général, mais la réflexion épistémologique nous amène également, nous semble-t-il, à bien différencier, dans le champ spécifique de l'hyperactivité, les modèles endogènes, les modèles exogènes et les modèles interactifs, avec une sorte de gradient progressif quant à la composante interactive qui les imprègne.

Nous proposerions volontiers la classification suivante :

Les conceptions anglo-saxonnes renvoient, de fait, à des modèles endogènes On citera ici :

• Le modèle médical linéaire fondé sur la notion de « trou

métabolique » • L'hypothèse de la modularité des processus d'attention

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• Et même, le modèle, enfin, de l'hyperactivité en tant que « processus auto-calmant », notion ctière à l'Ecole de Psyctiosomatique de Paris

La psychopathologie réactionnelle renvoie, quant à elle, à des modèles exogènes

• Le passage d'une génétique déterministe (mendélienne) à une génétique dite de la vulnérabilité démontre désormais tout l'impact des facteurs environnementaux exogènes

• On sait, ici, l'importance des carences d'ambiance et des dépressions maternelles précoces quant à la structuration d'organisations abandonniques ou de « syndromes du comportement vide », au sein desquels l'hyperactivité peut parfois avoir valeur de défense maniaque, et fonctionner alors comme la recherche d'une «deuxième peau motrice » à visée substitutive (E. BICK)

• Les troubles de l'attachement et les réactions de stress post-traumatiques peuvent également être invoqués comme facteurs exogènes en jeu dans l'instauration d'un tableau d'hyperactivité

Il importe, toutefois, de laisser toute sa place à la théorie de l'après-coup, car il est clair que ces diverses conditions environnementales ne font pas la même chose à chaque enfant en fonction de son histoire trans et intergénérationnelle.

Les modèles interactifs, enfin, peuvent être compris en termes constructivistes

• Les corrélations qui existent entre le mode d'exploration de l'environnement (du visage maternel aux objets) et la qualité des interactions mère bébé plaident en faveur d'une co-construction dyadique de l'hyperactivité (E. FRIEMEL et Nguyên TRANH-HUONG)

• La co-construction des états d'attention a été soulignée depuis longtemps et très finement étudiée par les équipes de l'institut PIKLER-LOCZY, à Budapest

• On peut enfin évoquer, dans la genèse de l'hyperactivité, un échec de la oo-construction de la latence (conçue comme une rencontre entre la programmation pré-pulsionnelle de l'enfant, et

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le refoulement parental exercé par procuration), d'où l'émergence

de « latences à répression » (P. DENIS) plutôt que de « latences

à refoulement », les latences à répression ouvrant la voie d'une

évacuation des affects et des représentations par le biais de la

motricité.

Or, la stratégie thérapeutique que l'on choisit dépend fondamentalement

du modèle étio-pathogénique auquel on se réfère, explicitement ou

implicitement.

La raison voudrait que l'on se réfère aujourd'hui à un modèle interactif et

donc, par essence, polyfactoriel, d'où la nécessité absolue, nous l'avons

déjà dit, de recourir à une stratégie thérapeutique multi-dimensionnelle.

Peut-on imaginer qu'un jour, la prescription de substances

amphétamines-like puisse être obligatoirement couplée, de manière

réglementaire à la mise en place de mesures thérapeutiques,

rééducatives ou pédagogiques associées ?

Nous n'osons pas encore l'espérer, mais ceci supposerait sans doute

que l'information en matière de traitements médicamenteux ne soit pas

assumée par les seuls laboratoires pharmaceutiques, mais aussi par

d'autres instances, médicales ou universitaires, encore à définir.

Ce que nous souhaitions souligner en tout cas, c'est que le modèle

étiopathogénique que l'on se donne de l'hyperactivité (comme d'ailleurs

de tout trouble du fonctionnement psycho-affectif) renvoie à des choix

épistémologiques plus ou moins clairs, et que ceux-ci ont des enjeux

thérapeutiques et éthiques concrets qu'il serait malhonnête ou négligent

de sous-estimer.

La réflexion épistémologique n'est donc en rien un luxe gratuit.

Nous ne pouvons accepter que les traitements amphétaminiques

apparaissent comme la seule solution thérapeutique aux yeux des

médias et du grand public.

Il n'y a pas de place pour l'adage : « la Ritaline, sinon rien d'autre ! »

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A partir de l'hypothèse psychopathologique retenue, d'autres propositions thérapeutiques peuvent être faites, en fonction des spécificités de chaque histoire d'hyperactivité : des groupes thérapeutiques, des groupes à médiation corporelle, des approches psychomotrices, des relaxations, des psychodrames, des psychothérapies individuelles ...

Et il importe de toujours réaffirmer avec force que le traitement amphétaminique, s'il est parfois justifié, ne doit jamais être prescrit trop tôt (jamais avant quatre ans, car l'organisation cérébrale n'est pas encore achevée avant cet âge), et jamais de manière isolée (soit toujours au sein d'un programme thérapeutique multidimensionnel).

On sait aujourd'hui que les amphétamines ou les psychothérapies prescrites de manière isolée, sont moins efficaces que leur prescription de manière associée.

Nombre de praticiens disent accepter et suivre ces conseils de bon sens, mais les enquêtes récentes, ont révélé un décalage croissant aux USA entre la réalité des pratiques de terrain d'une part, et, d'autre part les recommandations officielles.

Il en résLilte une expansion considérable des prescriptions de psychotropes.

Fort heureusement, en France, à propos de l'hyperactivité, la situation n'est pas encore devenue aussi caricaturale que dans certains autres pays européens ou anglo-saxons, et les parents continuent à se poser souvent de bonnes questions quant à l'étiologie complexe d'un tel désordre, mais certains collègues et nous-rnême avions cru bon, cependant, il y a quelque temps, de tirer la sonnette d'alarme pour tenter d'éviter que ne se mettent en place d'éventuelles dérives irréversibles (Cl. BURSZTEJN, J.-CI. CHANSEAU, Cl. GEISSMANN-CHAMBON, B. GOLSE et D. HOUZEL).

Le risque de telles dérives doit donc nous inciter à maintenir les règles strictes qui encadrent les prescriptions de psychostimulants en France, et qui semblent avoir permis de maintenir l'usage de ces médicaments dans des limiter, acceptables (en dépit de toutes les précautions prises quant à la première prescription, la consommation de Ritaline a tout de même triplé au cours des quatre dernières années I)

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L'axe psychopathologique de nos réflexions ne saurait ainsi être sous-estimé, de même que l'approche psychanalytique de ces difficultés dont la mise en sens permet à l'enfant, non pas de modifier les événements relationnels auxquels il a été confronté, mais de changer le regard qu'il porte sur eux, c'est-à-dire d'en élaborer progressivement une narrativité différente et qui représente, en soi, une modalité efficace d'intervention parallèlement aux autres mesures disponibles.

Telle est, en tout cas, notre conception actuelle d'une approche pédo­psychiatrique raisonnée de l'hyperactivité dont les fondements épistémologiques demandent donc à être explicités avec la plus grande attention, précisément I

En guise de conclusion : retour sur la question de la souffrance psychique de l'enfant

La souffrance psychique de l'enfant est un fait clinique, mais un fait

clinique dont la quantification est évidemment difficile.

C'est d'ailleurs, là, que réside l'une des difficultés essentielles de l'évaluation des psychothérapies chez l'enfant, à côté de celles qui tiennent à l'aspect illusoire de la simple disparition des symptômes, ou à la complexité qu'il y a à préciser véritablement les modifications structurales chez un sujet en cours même de structuration.

Quoi qu'il en soit, la souffrance psychique de l'enfant existe, et elle doit, naturellement, être prise en compte.

Tous les moyens sont-ils bons pour autant ?

Il nous semble qu'une réflexion éthique se doit, ici, de venir sous-tendre la réflexion épistémologique proprement dite, et c'était, au fond, le but de ces quelques pages que d'en venir, finalement, à ce questionnement.

Que l'école, au même titre que tous les autres lieux de vie de l'enfant,

puisse être un lieu d'observation et de repérage d'une telle souffrance de

l'enfant, cela va de soi, et pourquoi faudrait-il s'en priver?

Mais qu'on en vienne à demander aux enseignants de fonctionner

comme des auxiliaires médicaux du diagnostic, ou que l'école s'arroge le

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droit, fût-ce par le biais du médecin scolaire, d'imposer aux parents une démarche pédo-psychiatrique, est une autre chose, et qui, elle, ne tombe pas sous le sens.

Tout est évidemment affaire de tact, et dans cette perspective, attirer l'attention des parents ou proposer une consultation n'a rien à voir avec le fait de forcer ou d'obliger quiconque, avec parfois, à la clef, des menaces d'éviction scolaire si les parents ne se plient pas aux conseils qui prennent alors la forme de véritables injonctions de soin ...

Bien entendu, nous n'en sommes pas encore, en France, au niveau de ce qui se passe aux Etats-Unis où l'on a vu des parents traduits en justice pour «non-assistance à personne en danger», sous le prétexte qu'ils avaient refusé de mettre leur enfant agité sous traitement amphétaminique I

Mais nous devons être vigilants, car si le pire n'est jamais sûr, il est

cependant toujours à redouter.

A un moindre degré, nous nous interrogeons par exemple sur l'usage

extensif qui est désormais fait des échelles de CONNERS dans le

dépistage de l'hyperactivité.

On sait que ces échelles se composent de deux parties, l'une devant être

remplie par les parents, et l'autre par l'enseignant.

Nous sommes-nous suffisamment interrogés, d'un point de vue éthique, sur les possibles conséquences qui peuvent découler du fait de faire peser un regard «médicalisé » sur l'enfant de la part de ses parents ou de ses enseignants ?

Selon nous, non, et il n'est pas exclu qu'à agir de la sorte, on ne finisse pas par créer cela même qu'on craint ou qu'on vise à prévenir, car l'agitation de l'enfant peut aussi, dans certains cas peut-être, venir exprimer une révolte de l'enfant à l'égard de ces regards qui pèsent sur lui et qui l'enferment dans un schéma contraignant, schéma rigide qui pourrait finir par le priver, en partie, de sa liberté développementale.

Soyons donc extrêmement prudents et véritablement soucieux de ne pas

créer de telles souffrances psychiques iatrogènes.

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La réflexion est certes exemplaire en matière d'hyperactivité, mais elle va, bien entendu, très au-delà de ce seul registre.

Ce ne sont pas moins la dignité et la liberté des enfants et des familles qui sont ici en cause.

A côté de son expression parfois directe sur un mode mentalisé (tristesse, angoisse, perplexité, douleur psychique ...), ou indirecte sur un mode corporel ou comportemental (retrait, agitation, troubles psychosomatiques divers ...), la souffrance psychique de l'enfant ne se révèle souvent qu'au travers d'une inflexion développementale concomitante de l'apparition d'un symptôme apparemment bénin.

Le diagnostic de souffrance psychique est alors difficile, et il réclame une

évaluation psychodynamique attentive qu'aucun questionnaire ne peut

venir remplacer, ni dans le milieu familial, ni dans le milieu scolaire.

Les parents doivent demeurer les parents, et les enseignants doivent

demeurer les enseignants.

Ne demandons aux parents que des informations concernant leurs difficultés à être les parents de cet enfant-là, et ne demandons aux enseignants que des informations concernant les difficultés scolaires de tel enfant et de leurs propres difficultés à lui apporter ce qui fait partie de leur fonction d'enseignant.

A partir de là, l'hypothèse d'une authentique souffrance psychique de l'enfant pourra tout doucement se forger, et c'est de cette concertation entre des adultes fidèles à leurs rôles spécifiques que pourra émerger l'éventualité d'une démarche envers le professionnel pédopsychiatrique, ou le soignant de la psyché.

En tout état de cause, hormis certaines situations extrêmes, la demande soins ne peut émaner que de l'enfant lui-même ou de sa famille, et cela nous préoccupe qu'il faille encore aujourd'hui rappeler de telles évidences, rappel dont cette journée scientifique nous donne ainsi l'occasion.

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Eléments bibliographiques

E. BICK. The expérience of the skin in early object-relations International Journal of Psychoanalysis, 1968, 49, 484-486, Traduction française in : « Explorations dans le monde de l'autisme » (D. MELTZER et coll.), Payot, Paris, 1980, 240-244

Cl. BURSZTEJN, J.-CI. CHANSEAU, Cl. GEISSMANN-CHAMBON. B. GOLSE et D. HOUZEL. Ne bourrez pas les enfants de psychotropes ! Le Monde, 56*™® année, n° 17211, Samedi 27 mai 2000, 20. Article republié dans : Enfances & PSY, 2004, 25, 42-45

P. DENIS. La dépression chez l'enfant : réaction innée ou élaboration?

La Psychiatrie de l'enfant, 1987, XXX, 2, 301-328

E. FRIEMEL et T.-H. NGUYEN. Exploration et interaction mère/bébé : du visage à l'objet. La Psychiatrie de l'enfant, 2004, XLVII, 2, 589-609

S. FREUD. Points de vue du développement et de la régression -Etiologie, 319-336. Les modes de formation de symptômes, 337-355 In : « Introduction à la psychanalyse » (S. FREUD). Petite Bibliothèque Payot, Paris, 1982

Adresse contact Pr Bernard GOLSE Service de Pédopsychiatrie Hôpital Necker-Enfants Malades 149 rue de Sèvres, 75015 Paris-Fr Tel : 01.44.49.46.74 Fax : 01.44.49.47.10 e-mail : bernard.aolse(5)nck.aphp.fr

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Comment comprendre les pathologies mentales de l'adolescence ?

Pr. Philippe Jeammet, psycinanaiyste, professeur de psyciiiatrie de l'enfant et de l'adolescent à l'université

Paris VI, chef du service de psychiatrie des adolescents et des jeunes adultes à l'Institut Mutualiste Montsouris-

Jourdan

Pour tenter d'éclairer notre compréhension des pathologies mentales à l'adolescence, à défaut de pouvoir véritablement les comprendre, il nous faut préalablement essayer de répondre à un certain nombre de questions :

• Qu'appelle-t-on pathologie mentale et quel est l'étendue du registre des conduites que l'on peut .regrouper sous cette appellation commune ? • Existe-t-il des pathologies propres à l'adolescence et/ou l'adolescence introduit-elle des caractéristiques spécifiques à des pathologies que l'on rencontre pendant l'enfance et à l'âge adulte ? • L'adolescence est-elle un facteur de risque d'émergence des troubles mentaux ? • Notre époque et en particulier l'évolution sociale et familiale ont-elles un effet sur la fréquence, la gravité et les modes d'expression de ces pathologies ?

On entend par pathologie mentale l'ensemble des troubles qui altèrent la vie émotionnelle, les cognitions et croyances du sujet, et qui ont des répercussions négatives sur sa vie relationnelle, ses relations à la réalité externe, à son image de lui-même et aux autres ainsi que sur ses apprentissages et le développement de sa personnalité. Tous troubles qui ne sont pas directement liés à une lésion cérébrale identifiable comme telle et à l'handicap qui pourrait en résulter mais qui peuvent parfois lui être associés. C'est tout le domaine des infirmités cérébrales et des débilités qui appartiennent davantage au champ de la

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neurologie que de la psychiatrie même s'il existe bien sûr des interférences et ce qu'on appelle des co-morbidités c'est-à-dire des troubles neurologiques et psychiatriques associés avec des conséquences sur le développement psychique des handicaps d'origine neurologique.

Parmi les pathologies plus spécifiquement psychiatriques que l'on rencontre à l'adolescence les unes sont apparues dans l'enfance, les autres au cours de l'adolescence. Parmi les premières on distingue deux groupes bien différents.

Le premier c'est celui des troubles graves du développement dont l'origine est encore mal connue, mais certainement multi-factorielle, et qui se présentent plus comme un spectre que comme dos entités pathologiques précises. C'est celui de l'autisme, des psychoses infantiles et ce qu'on appelle les dysharmonies du développement. Ces pathologies ont en commun de générer des entraves graves du développement cognitif et affectif de l'enfant dont le maximum constitue l'autisme dit de Kanner.

Le deuxième groupe est celui des troubles spécifiques des apprentissages (dyslexie, troubles et retard de langage (...) sans entrave majeure du reste de la personnalité et des troubles dits affectifs: angoisses de séparation, phobies et troubles obsessionnels compulsifs, somatisations. Ces troubles font souvent le lit de pathologies de l'adolescence, sur le même registre ou sur celui des troubles du comportement. Ils favorisent l'échec scolaire qui aura ses propres répercussions à l'adolescence notamment sur l'image et l'estime de soi de l'adolescent.

Quant au premier groupe, il organise progressivement une situation de handicap auquel l'adolescence va conférer toute une ampleur et de ce fait il vulnérabilise l'adolescent. C'est en effet à cet âge que l'écart entre les capacités d'acquisition, d'autonomie et d'adaptation de ces adolescents par rapport à leurs camarades va se révéler dans toute son ampleur malgré les efforts d'intégration, scolaire notamment, qui peuvent être entrepris.

Mais évidemment les pathologies plus spécifiques sont celles qui apparaissent à cet âge. C'est le cas notamment des deux grands groupes de pathologie psychiatriques les plus graves et les plus

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fréquents: les troubles de l'humeur et le groupe des schizophrénies. La difficulté est d'en faire le diagnostic alors qu'il n'existe que des signes prodromiques peu spécifiques et que dans ces formes initiales les symptômes appartenant à ces deux classes de pathologie sont souvent associés notamment dans les manifestations aiguës comme les épisodes psychotiques aiguës ou bouffées délirantes dont plus du tiers n'auront pas de suite au-delà de l'adolescence les autres pouvant évoluer vers des troubles de l'humeur plus ou moins cyclique ou une forme de schizophrénie.

Les troubles du comportement sont parmi les motifs de consultation ceux qui appartiennent le plus spécifiquement à l'adolescence. Ils expriment l'importance chez l'adolescent du rôle défensif de l'agir et de l'extéhorisation des conflits.

Tous les comportements peuvent être concernés mais sous cette rubrique sont essentiellement impliquées les conduites d'affrontement et d'opposition voire de rupture avec l'entourage dont la dimension agressive est immédiatement ressentie par celui-ci.

Conduites actives auto ou hétéro-agressives :

• fugues, vols, mensonges • crises clastiques, comportement d'opposition et ou

d'insolence, -conduites franchement délictueuses psychopathie, délinquance, prostitution. - Conduites auto-agressives ; scarifications, tentatives de suicide.

• Conduites d'addiction, toxicomanie, alcoolisme. -troubles des conduites alimentaires : boulimie et anorexie mentale. Conduites passives d'inhibition et de retrait :

• Evitement des contacts; peur des situations d'exposition en public qui sollicitent les pulsions exhibitionnistes ; simple timidité ou déjà erythrophobie, peur de rougir en public qui reflète une plus grande fragilité narcissique, voire restriction progressivement croissante des contacts ;

• Inhibition focalisée à tel ou tel secteur des activités cognitives praxiques du Moi: échec scolaire, limité à une matière, ou liée à la situation d'examen, ou

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échec global avec désinvestissement des apprentissages; maladresse physique, refus des sports, évitement des situations ou le corps peut être impliqué ;

• Refus scolaire complet, rupture des contacts, enfermement dans sa chambre avec clinophilie et bain musical permanent, apragmatisme.

Ces conduites d'inhibition et de restriction des activités du Moi apparaissent souvent dans un premier temps comme l'expression d'un choix volontaire de l'adolescent et d'une manifestation de ses goûts personnels : il préfère telle activité à telle autre, il n'aime pas sortir, il n'a pas trouvé de camarades qui lui plaisent... La faute est rejetée sur l'extérieur, l'adolescent nie son implication personnelle et le comportement est rattaché à des traits de caractère. En fait, ceux-ci n'apparaîtront vraiment qu'après l'adolescence et leur présence affirmée à cet âge comme leur brutale accentuation, doivent toujours faire craindre et rechercher une angoisse sous-jacente que le comportement mis en avant a pour fonction de neutraliser ou d'éviter.

Restrictions et inhibitions peuvent également porter sur la vie pulsionnelle et sur la vie imaginaire fantasmatique. Ascétisme et intellectualisme sont considérés comme des modes de défense classiques de l'adolescence. La répression pulsionnelle qui va parfois jusqu'à la perte de tout désir, peut dans un premier temps favoriser la disponibilité intellectuelle mais rapidement les contre-investissements nécessaires pour assurer le maintien de la répression deviennent trop dispendieux d'énergie et épuisent le sujet.

Ce processus, pourtant grave par ses conséquences, est trop bien toléré par tout le monde pour constituer un motif de consultation. Par contre, les conduites d'évitement finissent par aboutir à un comportement qui alarme l'entourage: baisse du rendement scolaire, refus scolaire, repli sur soi, refus de sortir

QUAND PEUT-ON PARLER DE PATHOLOGIE MENTALE?

La pathologie psychiatrique peut ainsi se définir comime la contrainte à adopter des attitudes ou des comportements qui ont pour effet d'amputer le sujet d'une part plus ou moins importante de ses potentialités et qui se répètent malgré ces effets négatifs.

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L'apparition d'un symptôme ou d'un trouble du comportement ne signe donc pas nécessairement une pathologie avérée. Ils peuvent avoir une valeur adaptative s'ils ne s'installent pas durablement et n'entravent pas le développement de la personnalité et en particulier n'empêchent pas les acquisitions propres à chaque âge, ni les intériorisations et les Identifications, c'est à dire s'ils n'ont pas d'effets dénarcissisants qui altéreront l'estime de soi et la confiance en soi. S'ils ne sont donc pas nécessairement pathologiques ils n'en demeurent pas moins toujours potentiellement pathogènes par leurs capacités d'auto-entretien et même d'auto-renforcement.

Tous les intermédiaires existent donc entre un symptôme ou un trouble du comportement qui relève d'une variation de la normale et ceux qui s'inscrivent dans le registre du pathologique. L'approche psychanalytique et psychodynamique plaidaient déjà dans le sens d'un continuum entre le normal et le pathologique. Mais paradoxalement l'approche catégorielle qui a présidé à la réalisation des nouvelles classifications internationales (DSMIV et ICD10) va aussi dans le même sens Elles s'appuient sur des critères quantitatifs de fréquence et de durée pour délimiter le champ du pathologique, avec ce qu'ils comportent d'arbitraire hévitable. De même les facteurs de vulnérabilité qui pèsent sur un sujet donné ne sont pas en tout ou rien mais représentent une combinaison très variable d'un individu à l'autre et selon les époques de son développement, les événements et le contexte dans lequel il évolue. Et ce aussi bien pour les vulnérabilités psychologiques ou sociales que biologiques. Même les vulnérabilités génétiques s'avèrent être multi-géniques et s'expriment davantage en termes d'héritabilité que d'hérédité de type mendélien Ces vulnérabilités génétiques s'expriment ainsi selon une logique plus dimensionnelle que catégorielle que ce soit la dimension thymique, impulsive, compulsive, anxieuse, négativiste. ..

La pathologie c'est l'enfermement du sujet dans la répétition de conduites mentales ou comportementales qui au lieu de se nourrir dans un échange enrichissant avec l'environnement l'appauvrissent et sabotent une part plus ou moins importante de ses potentialités. Ce n'est pas un choix. Ces contraintes s'Imposent à lui sans qu'il en ait toujours conscience ce qui fait qu'il peut y adhérer, y voir une expression de sa différence, de son originalité et en faire une force et une expression de son identité. Nous reviendrons sur ce point qui constitue un des dangers majeurs à cet âge et se présente comme une véritable fascination narcissique par les conduites négatives. Car le point commun à ces

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conduites, encore une fois, c'est qu'elles représentent un prix à payer considérable, injuste et en aucun cas nécessaire pour son développement futur. C'est cette dimension auto-destructrice qui échappe parfois au sujet prisonnier de ces formes qui s'imposent à lui mais aussi dans certains cas de cette fascination par le pouvoir d'emprise notamment sur les autres qui apportent ces conduites. I peut toujours être tentant qu'à défaut d'être grand dans la réussite on le soit dans l'échec. Dans ce dernier cas il n'y a pas de limite aux ambitions surtout si on s'inflige soi-même cet échec.

L'adolescence est-elle un facteur de risque d'émergence des pathologies mentales ? Si les troubles mentaux ne sont pas l'apanage de l'adolescence, comme nous venons de le voir, celle-ci est cependant particulièrement riche en émergence et en organisation de ces troubles, notamment les troubles du comportement. Si nous prenons les critères de conduites pathogènes, à défaut d'être nécessairement pathologiques, tels que nous les avons envisagés ci-dessus, c'est autour de 20% des adolescents qui sont concernés.

Il ne faut pas oublier que l'adolescence, du fait même cfe son lien avec la puberté, est un phénomène somatique, physiologique normal, mais qui va entraîner, en raison des changements de production hormonale, un remaniement complet de la relation au corps. Il ne faut pas oublier non plus la potentialité quasi traumatique que cela peut avoir : les traumatismes ne viennent pas que de l'extérieur, ils viennent à chaque fois que le moi se sent débordé, soit par une effraction de l'extérieur, soit par quelque chose qui vient de lui et qu'il ne commande pas. Or, on ne choisit pas le déclenchement de sa puberté, et il y a un énorme contraste entre ce qu'on appelle la phase de latence ou l'âge de raison -c'est-à-dire le moment où l'enfant commence justement à exercer la maîtrise sur son esprit, sur ses acquisitions, sur son corps- et l'arrivée de la puberté qu'on ne maîtrise pas.

L'adolescence est bien par excellence l'âge des attirances, des emballements et des coups de foudre. Mais c'est aussi celui, en miroir, des ruptures brutales, des fugues et des retraits.

L'adolescence est ainsi révélatrice de la qualité de ce que l'on a pu emmagasiner, intérioriser pendant l'enfance. Plus on arrive à l'adolescence pourvu d'une sécurité intérieure, d'une estime de soi suffisante, nourri de la qualité des liens avec l'environnement, plus on

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sera capable de gérer la distance avec une certaine souplesse. Mais plus on y accède avec un passif important, des traumatismes, une dépendance exagérée à l'environnement, plus ce sera difficile. Les jeunes ont d'autant plus besoin de se sentir reconnus qu'ils ne sont pas sûrs eux-mêmes de leur propre valeur.

L'une des grandes caractéristiques de l'adolescence est la nécessaire modification de la distance aux parents et aux adultes liée spécifiquement aux effets de la puberté. Celle-ci engendre ei effet une modification brutale et rapide du corps de l'enfant qui devient apte à agir sa vie pulsionnelle, en particulier la sexualité et l'agressivité. L'effet s'en fait immédiatement surgir sur la relation aux parents qui perd son naturel. La sexualisation du lien crée une gène que traduit l'apparition et la rougeur et de formations réactionnelles caractéristiques de l'adolescence qui expriment toutes les réactions de fuite voire de dégoijt à l'égard du corps des parents. L'inévitable sexualisation des liens crée les conditions d'une prise de distance d'avec les parents. Mais celle-ci génère à son tour une interrogation sur la capacité d'autonomie de l'adolescent et la qualité de ce qu'il a à l'intérieur de lui-même.

L'adolescence représente ce moment où le sujet doit s'autonomiser et faire la preuve de ses acquis, de la qualité de ce qu'il a au-dedans de lui et qu'il a intériorisé au cours de son développement antérieur. Il doit en particulier parachever ses identifications et ses besoins passifs de réceptivité font place à la recherche active de réalisation de ses désirs.

Mais ceci suppose la solidité des acquis antérieurs et la réussite de tout ce travail d'intériorisation évoqué précédemment. En leur absence, l'adolescence va révéler, brutalement et souvent crijment, la fragilité du monde interne et l'ampleur des besoins et des attentes à l'égard des objets externes, tout en conflictualisant ces liens.

Il y a là quelque chose qui peut être vécu comme une contradiction absolue: comment, pour trouver la sécurité, la force, les atouts qui manquent, se nourrir de ces adultes qui sont censés avoir tout cela sans être complètement dépendant d'eux ? C'est ce que traduit cette expression si parlante des jeunes disant d'un adulte qui lui «prend la tête». Mais la tête n'est prise que parce qu'elle est ouverte. Si l'adolescent n'était pas en attente de quelque chose des adultes, l'adulte ne le pénétrerait pas. Il ne le pénètre que parce qu'il y a une ouverture.

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Son propre ennemi est à l'intérieur de lui: c'est son désir lui- même, véritable cheval de Troie de l'objet à l'intérieur de lui.

Les conséquences s'en font sentir à deux niveaux : sur le développement de la personnalité en empêchant la poursuite des processus d'échanges et d'intériorisation et en bloquant les mécanismes d'identifications, nécessaires à la maturation du sujet ; sur ie fonctionnement mental lui-même, en entravant les possibilités de représentation, les situations paradoxales ayant des effets spécifiques de sidération de la pensée, comme l'ont montré, entre autres après G Bateson les études sur les systèmes et la pensée paradoxale.

On peut voir dans cette menace sur l'autonomie et la pensée du sujet une situation de violence qui attaque son intégrité narcissique et génère en retour une violence défensive que traduit la réponse par l'agir comportemental. Celui-ci tente de restaurer des limites, et une identité menacée, par la négation des désirs et des liens objectaux internes et par l'emprise sur les objets externes.

D'un point de vue psychopathologique on peut regarder l'ensemble des troubles de cet âge sous l'angle de l'aménagement de ce qui est ainsi perçu comme une dépendance dangereuse. De la nature des réponses offertes à cette situation dépend, pour une part, le destin de ces adolescents. Celui-ci se joue autour du dilemme suivant ; vont-ils pouvoir reprendre un commerce narcissisant avec leurs objets d'attachement et achever en particulier leurs identifications ou en tout cas les rendre syntones au Moi ? Ou vont-ils être contraints à développer des stratégies de lutte contre la dépendance qui, à des degrés divers, comportent toujours un processus d'attaque et de mise à distance des objets; processus qui concerne inévitablement une part plus ou moins importante des investissements et des potentialités des sujets eux-mêmes en tant que ceux-ci sont liés à ces objets.

Plus le jeune attend quelque chose de l'adulte, plus il se sent en menace de pénétration et cette menace génère une humiliation d'autant plus intense qu'il se sent prêt à céder. Le pla'sir de désirer se transforme en un pouvoir sur soi donné à l'autre. Il y a là quelque chose d'assez intolérable, avec toutes les gradations entre les relations normales -celles que l'on rencontre souvent dans les relations amoureuses- et les relations les plus psychopathologiques. Le piège et le drame, c'est que ce comportement négatif est pour l'adolescent un moyen d'affirmer son

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identité et sa différence. Quelqu'un qui est trop en attente ne sait plus où est son propre désir et celui des autres. Il est dans un état de gène et de confusion d'autant plus grand que ses relations de plaisir ou de satisfaction créent un rapproché exagéré avec un des adultes (le père ou la mère, avec toute la sexualisation de ce lien).

C'est cette soudaine attraction pour les personnes investies qui, dans le même temps, en fait tout le danger et ce d'autant plus que, comme nous venons de le souligner, cette nouvelle appétence objectale est aussi bien le fait de la sexualisation des liens et de leur surinvestissement pulsionnel que des exigences narcissiques de combler les manques internes et de renforcer les intériorisations. C'est cette conjonction de ces deux courants et de cette double pression qui spécifie l'adolescence. L'intensité de chaque courant contribue à conflictualiser l'autre; les failles narcissiques sexualisent les liens, tandis que l'accroissement des investissements pulsionnels objective le poids des objets d'investissement et augmente le sentiment de dépendance à leur égard. C'est ainsi que l'éclat incestueux des liens parents enfants révèle autant la fragilité des limites du Moi que la charge pulsionnelle des investissements.

Un tel antagonisme n'est évidemment pas perçu comme tel par le sujet. Il est vécu et subi comme une contrainte qui ne dit ni son nom, ni son origine, et qui ne peut être perçue que par ses effets. C'est d'autant plus le cas qu'il ne s'agit pas de conflits entre des désirs contradictoires ou un désir et un interdit, mais d'exigences internes qui ne peuvent être perçues par ces adolescents que comme s'annihilant entre elles. On est en fait dans le registre du paradoxe qui pourrait se formuler de la façon suivante: "ce dont j'ai besoin, parce que j'en ai besoin, et à la mesure même de ce besoin, est ce qui menace mon autonomie".

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Le repérage, enquête sur les troubles mentaux chez les enfants scolarisés dans les

écoles primaires de Provence Alpes Côte d'Azur

Dr. Viviane KOVESS, T. SHOJAE Fondation IVIGEN pour la santé publique, université Paris V

Introduction

En santé mentale, Il existe des situations cliniques très diverses qui vont du trouble mental caractérisé et sévère aux troubles caractérisés plus fréquents mais beaucoup moins Invalidants, à des états de souffrance mentale, parfois réactionnels à des situations difficiles qui peuvent évoluer ou non vers un trouble constitué. La psychopathologie de l'enfant est très évolutive et les troubles peuvent être fluctuants rendant leur appréciation difficile car elle do't tenir compte du milieu et d'éventuels facteurs déclenchants. La santé mentale recouvre aussi des aspects positifs : les sentiments de bonheur, de bien-être, les ressources de la personnalité, la résilience face aux difficultés grâce à la mise en place des mécanismes d'adaptation.

On distingue généralement les troubles dits envahissants (psychoses, autisme), les troubles extériorisés (troubles des conduites, de l'attention, oppositionnels, hyperactivité) et intériorisés (angoisse de séparation, anxiété généralisée, phobies, troubles dépressifs) bien caractérisés, et les symptômes ne constituant pas un syndrome avéré mais qui sont le signe d'une fragilité.

Plusieurs travaux conduits dans des populations d'enfants ont évalué la fréquence de ces troubles dans différents pays. Dans ces études résumées dans la figure suivante, la prévalence des troubles mentaux chez les enfants varie de 7% à 22%. Cette variation qui peut paraître très importante, est essentiellement due au fait que les populations d'enfants (modalités de sélection et âge de sujets étudiés), la méthode du

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recueil des données en particulier des différents types de questionnaires, la nature de l'informateur (enfants, parents, enseignants) la durée sur laquelle est évaluée le troublé (ponctuelle, sur un an ou sur la vie) et surtout la définition du trouble mental varient d'une étude à l'autre en particulier la mesure du retentissement du trouble sur la vie de l'enfant.

Rohcrtsnn et al, 1999

Jcllinck et al, 1999 [

Costcllo étal , 1996 [

Goinez-Beiieyto et al, 1994 "

Fonibonne. 1994

Bergeron et al, 1992

15,20%

3l,V(l%

11,9%

Il21,7%

Il 2.4%

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MacGce et al. 1984 r Dl7..1%

Rutter M. et al 1970 C

Table 1 Prévalences comparées des études des troubles mentaux chez l'enfant

La vulnérabilité aux troubles mentaux résulte toujours de l'interaction de plusieurs facteurs de risque, les uns individuels, les autres environnementaux. Ces facteurs de risque peuvent avoir un effet cumulatif, mais leur valeur prédictive n'est pas identique. Par ailleurs, l'impact de ces facteurs de risque sur la survenue ultérieure de troubles peut aussi varier en fonction de leur moment de survenue au cours du développement. La connaissance de ces facteurs de risque revêt une importance majeure dans une perspective de prévention.

L'approche épidémiologique a permis de constater des corrélations entre

les troubles mentaux et certains « facteurs de risque » généralement

évalués dans ces études.

Ainsi dans la plupart des études, la prévalence des troubles mentaux

varie :

Suivant l'âge et le sexe de l'enfant. Par exemple, l'angoisse de séparation est plus fréquente chez les enfants scolarisés en primaire que chez les enfants de 4 à 5 ans. Certains types de troubles comme les

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troubles extériorisés sont plus fréquents chez les garçons que chez les filles.

Suivant les caractéristiques socio-démographiques et socio-économiques de la famille. Par exemple, les troubles mentaux seraient plus fréquents dans les familles monoparentales, dans les familles où les parents ont un faible niveau de scolarité, sont au chômage ou ont des revenus bas.

Suivant d'autres caractéristiques concernant les parents. La prévalences des troubles mentaux est plus grande quand les parents ont eux-mêmes certains troubles mentaux, ou ont des relations inadéquates avec leur(s) enfant (s) (attitudes punitives/ négligence de soin) ces facteurs étant bien entendu souvent liés entre eux.

Suivant la présence d'événements traumatiques dits événements de vie (perte d'un parent, d'un membre de la fratrie ou maladie grave, handicap) Le Contexte français:

En France, il n'existe pas d'état des lieux sur la santé des enfants entre 6 et 11 ans. Une seule étude a été conduite auprès de 271 enfants âgés de 8 à 11 ans, scolarisés dans 18 écoles à Chartres (Fombonne, 1994). Dans cette étude, la prévalence globale des troubles mentaux est estimée de 12.4% à 5.9%, suivant la prise en compte du retentissement de ces troubles sur la vie quotidienne de l'enfant.

Plusieurs rapports ont souligné le manque d'informations sur la santé mentale des enfants dans notre pays et c'est pour pallier à cette carence que nous avons mené ,à titre pilote , cette enquête sur la santé des enfants dans les écoles primaires d' une région volontaire: la région PACA.

Cette enquête est le fruit de la collaboration d'une équipe de recherche appartenant à la Fondation MGEN pour la santé publique (Université Paris 5) , des deux académies Aix Marseille et Nice et de la Direction Régionale des Affaires Sanitaires et sociales de la région PACA Des personnes représentant ces institutions ont formé un comité de pilotage local dans lequel étaient réunis des personnels très divers du monde scolaire dont des représentants des associations de parents.

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Cette enquête a reçu l'approbation de la CNIL et a été régulièrement suivie, d'une part, par un comité de pilotage national composé de représentants de la DESCO et de la DGS, et d'autre part, par le comité de pilotage local. .

Ce projet s'est inscrit dans le cadre d'un commun accord entre tous ces acteurs sur le fait que les possibilités d'apprentissage des enfants en milieu scolaire étaient en étroite relation avec le bien-être mental des enfants. Ce point a été également souligné dans plusieurs rapports qui ont cherché à préciser le rôle de l'école dans le dépistage et la prévention des problèmes de santé des élèves dont les problèmes de santé mentale font partie bien évidemment.

Méthodologie

Généralités

L'enquête s'est penchée sur les problèmes les plus fréquemment rencontrés chez les enfants scolarisés en milieu ordinaire. Les problèmes les plus handicapants, comme les déficiences et les troubles graves du développement (par exemple, l'autisme ou les psychoses infantiles) ont été exclus de son champ. Pour avoir une vision complète de la santé mentale des enfants en région PACA, une exploitation conjointe de cette étude et des informations comme celles en provenance des intersecteurs infanto juvéniles de psychiatrie ainsi que du secteur médico-social ou encore des résultats des CDES, permettrait d'évaluer ces problèmes.

Bien que certaines personnalités de la pédopsychiatrie soient réticentes à cette approche, l'enquête qui a utilisé une approche épidémiologique, a cherché à évaluer des troubles mentaux se rapprochant autant que faire se peut de diagnostics DSM IV (classification des troubles mentaux qui définit les critères nécessaires pour considérer que l'enfant présente un trouble donné). Cette approche est rendue possible par l'utilisation de questionnaires spécialisés qui ont été calibrés pour ce faire.

Les questionnaires utilisés ne permettent d'ailleurs pas, à proprement parler, de porter de diagnostic mais d'évaluer la probabilité de présenter un problème de santé mentale tout en tenant compte du retentissement suffisamment important pour constituer une gène même passagère, sur la vie courante de l'enfant.

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L'étude a en effet cherché à évaluer l'ampleur des problèmes de santé mentale pouvant handicaper l'enfant dans sa vie quotidienne, notamment dans ses apprentissages, et constituer un éventuel besoin de soin. Ce besoin de soin en santé mentale n'est pas nécessairement psychiatrique mais peut être psychologique voire concerner d'autres intervenants dans les secteurs de l'éducation, le secteur social et le secteur judiciaire entre autres. Le recours aux soins a aussi été mesuré de sorte qu'il soit possible de quantifier la distance, si elle existe, entre les besoins de soin et la recherche effective d'aide.

De plus, un certain nombre de facteurs pouvant interférer avec la santé mentale des enfants, comme par exemple les désavantages sociaux ont été recherchés.

Enfin les problèmes ont été évalués sous l'angle de l'enfant lui même, du parent et de l'enseignant car chacune de ces perspectives a sa valeur propre et participe à la description des problèmes. I! existe en effet un consensus sur la nécessité de toujours évaluer plusieurs sources et surtout d'évaluer directement l'enfant : dans certains cas l'enfant identifie mieux que l'adulte certains de ses problèmes aussi cette information est nécessaire mais pas suffisante et le point de vue de chaque informateur, quel qu'il soit, doit être combiné à celui d'autres informateurs pour que l'évaluation de la santé mentale d'un enfant soit relativement complète.

L'approche épidémiologique implique que ies enfants tirés au sort dans des écoles, qui elles-mêmes étaient tirées au sort, ne soient jamais été identifiés en tant que tels. L'école n'a donc été en possession des résultats ni pour un enfant donné, ni pour l'ensemble des enfants qui ont répondu aux questionnaires.

Echantillon

Le recueil des données a été fait sur un échantillon représentatif de 2341 enfants scolarisés dans les écoles primaires de la région PACA (cf. E1). La base du tirage au sort était constituée de l'ensemble des écoles primaires publiques et privées, rurales ou urbaines, en ZEP ou non, des académies d'Aix-Marseille et de Nice. Ainsi, les service statistiques des deux académies ont tiré au sort une centaine d'écoles (60et 40 écoles

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respectivement). Au sein de ces écoles, le jour de l'enquête, les enquêteurs ont tiré au sort 5 enfants dans chaque niveau scolaire CP, CE1, CE2, CM1, CM2 (25 enfants par école)..

Les données recueillies ont été pondérées pour assurer la représentativité de l'échantillon. Les résultats présentés ici tiennent compte de la probabilité des enfants à être tirés au sort suivant qu'ils étaient dans une petite ou grande école.

E1 : Répartition géographique des écoles primaires tirées au sort en région PACA

milieu urbain milieu rural

écoles privées 10 2

écoles publiques 70 (dont 10 en ZEP) 17 (dont 1 en ZEP)

Les questionnaires

Questionnaire proposé à l'enfant

Le questionnaire destiné à l'enfant est le Dominique Interactif (Dl). Il s'agit d'un auto questionnaire comportant 94 dessins qui présentent des situations dans lesquelles peut se trouver un enfant dénommé Dominique qui peut être paramétré comme un garçon ou une fille. Le questionnaire se présente sous la forme d'un jeu vidéo au cours duquel un enregistrement sonore lui demandant s'il pense avoir été ou non dans la situation présentée, défile au fur et à mesure des questions. L'enfant clique sur « oui » ou « non » suivant la réponse qu'il souhaite donner (cf. E6 ). Les exemples présentés plus bas illustrent les questions sur les troubles oppositionnels et les phobies ainsi que les troubles des conduites et une des images évaluant la qualité de vie. Chaque diagnostic est évalué à partie d'une dizaine de questions mélangées entre elles. Un système de score permet de considérer le trouble comme : absent, probable ou presque certain, en fonction du nombre de questions répondues positivement dans chacun des diagnostics considérés.

Le Dominique interactif a été validé en France en 2003 (Chan Chee et al,

2003) grâce à la comparaison entre les diagnostics obtenus par ce

questionnaire et les diagnostics cliniques portés par une équipe de

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cliniciens spécialisés sur les mêmes enfants interrogés dans des consultations de pédopsychiatrie.

A noter que les enquêteurs chargés de proposer ce questionnaire aux enfants étaient des psychologues cliniciens qui avaient été recrutés par l'équipe de recherche sur avis du comité de pilotage local.

Echantillon d'images E6

Questionnaire proposé aux parents

Ce questionnaire rempli par un des parents comporte une dizaine de pages. Il est remis par l'enseignant aux parents par l'intermédiaire du cahier de correspondance de l'enfant tiré au sort. Il permet d'évaluer les principaux facteurs de risque ainsi que l'accès au système de soin spécialisé et non spécialisé.

Il comprend ainsi des questions sur les antécédents médicaux et les

accidents de la vie courante de l'enfant, le recours aux soins pour

l'enfant, la relation parent-enfant, les caractéristiques socio-

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démographiques des parents, les événements de la vie familiale, la santé mentale du parent et ses problèmes avec sa consommation d'alcool.

La santé mentale de l'enfant et son retentissement sur sa vie familiale et sociale, telle que perçue par son parent est mesurée à l'aide d'un questionnaire validé et largement utilisé en Europe : « perception de la santé mentale de l'enfant par le parent » (voir E3 : Strength and Difficulties questionnaire : Goodman, 1999).

vrai

n D

n n

un peu vrai

D

D

D

n

vrai

D

D

D

D

E3 : Questionnaire destiné aux parents (Strcngths and difficulties questionnaire)

Comportement de l'enfant perçu par le parent au cours des six derniers mois Pas Parfois ou Trcs

Echelle des troubles émotionnels (5 questions )

Ex : l:st sensible aux autres, lient compte de ce qu'ils pciisenl

Echelle des troubles comportementaux f5 questions)

Ex : Fait souvent des colères, s'énerve taeilcmciil

Echelle d'hvperactivitc (S questions)

Iix : Agité(e), turbulent(c), hypcractif(ve). ne lient pas en place

Echelle des troubles relationnels avec les paires (5 questions )

Kx : Aide volontiers quand quelqu'un s'est fait mal ou ne se sent pas bien

Score total des difficultés : obtenu en sommant les scores obtenus aux échelles, excepté celle de réchellc prosociale

Les {roubles émotionnels. re/Ièteni les irotihles dits inlériorisés cl les Iroiihles compor/cmenlaitx et l'hypenictivilê reflètent les troubles dits extériorisés de I 'enfant.

Questions sur le retentissement social et familial des difficultés de Penfant

Est-ce que ces difilcultOs interfèrent avec la vie quotidienne de votre cnfanl dans les domaines suivants ?

P;is du tout Un peu Assez Rcaucoup

U vie à la maison .. D D • - - . Q D Usamitics Q D D • D Les apprentissages il rccolc. D H D - • 1-csioisirs D-- n .. n n

Est-ce que ces difficultés pèsent sur vous ou sur b famille en (iéncral ? • Pas du toul n Un peu • Assez • Beaucoup

Questionnaire proposé aux enseignants

Ce questionnaire rempli par l'enseignant pour chaque enfant sélectionné dans sa classe, est très court (deux pages). Il comprend une liste de questions reflétant les critères DSM IV, sur la perception de l'enseignant de certains aspects de la santé mentale de l'enfant : troubles oppositionnels et hyperactivité /déficit de l'attention.

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L'enseignement évalue également le retentissement de ces troubles sur l'adaptation scolaire de l'enfant, sur son apprentissage et sur ses compétences scolaires, notamment en lecture et en mathématiques par comparaison du niveau avec celui des enfants de la classe.

Différentes mesures disponibles selon les sources d'information

L'ensemble de ces trois questionnaires permet donc d'obtenir deux catégories d'information : des informations sur la santé mentale de l'enfant (cf encadré), et des informations lié à l'enfant autre que sa santé mentale ou lié à la famille (cf encadré).

A noter que les parents ont été interrogés sur l'état de santé mentale de leur enfant au cours des 6 derniers mois. Alors que l'enfant lui-même et son enseignant ont fourni des informations sur l'état actuel de santé de l'enfant.

Tableau 2. Source d'information sur la santé mentale de l'enfant

source d'information

troubles intériorisés

anxiété de séparation

anxiété généralisée

dépression

ptiobie

troubles extériorisés

trouble oppositionnel

trouble des conduites

tiyperactivité/déficit de l'attention

retentissetr}ent darjs le domaine familial et scolaire

Enfants

X

X

X

X

X

X

X

X

X

Parents

X'

X

X"

X

X

Enseignants

X' [sans conduite)

X

X

X

* troubles émotionnels ** troubles du comportement : opposition ou conduites

46

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Tableau 3 Source d'information sur les caractéristiques propres à l'enfant ou à sa famille

Accidents domestiques et de loisirs de l'enfant Utilisation du système de soins par l'enfant

Relation parent-enfant

Evénements de vie stressants de l'enfant

Compétences scolaires de l'enfant

Situation géographique de l'école (ZEP ou hors ZEP/rural ou urbain)

Pays de naissance des parents

Niveau d'éducation des parents

Catégories socioprofessionnelles des parents

Statut des parents vis-à-vis de l'emploi

Détresse psychologique des parents

Composition familiale et niveau de revenus du foyer

Indicateurs pb alcool des parents

Ecole/ Enseignant

X

X

Parent

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

X

Résultats

Les taux de participation figurent dans l'encadré x. les résultats présentés ci-dessous ont porté sur les 1274 enfants pour lesquels les 3 questionnaires ont été complétés (54,4% de l'échantillon initial).

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E5 : bilan des données recueillies Sur les 100 écoles initialement prévue, 99 écoles ont participe à l'enquête Nombre total d'entants

tirés au sort : 2i4l enfanls (1000 : Nice+ 1341 AM)

Taux de refus des parents apiès réception des coupons réponses: /9,7%(n=462)

Nombre d'absents le jour J ; HH enfants (3.8%) Nombre d'enfants ayant passé Dominique :

1791 enfants inais données disponibles pr 1767 enfants Taux de retour questionnaires enseignants (sur 1767 enfants) :

1756 questionnaires (99.4%)

Taux de retour questionnaires parents (parmi ceux qui n 'ont pas refuse la participation de l'enfant à l'enquête) :

72.5% (1282 questionnaires reçus)

Taux de participation des 3 infonnateurs : 54.4% ( 1274 questionnaires)

Taux de prévalence des troubles mentaux chez les enfants

4.1.1 Taux globaux de prévalence

7,6% des enfants présenteraient un trouble intériorisé ou extériorisé ayant un retentissement sur leur vie quotidienne selon la perception des parents. Cette proportion monte à 22,6% d'après les enfants eux-mêmes et est à 5.54% d'après les enseignants à qui seuls certains diagnostics étaient proposés.

Ces différences de prévalences sont importantes et explicables en partie par le fait que le nombre de diagnostics mesurés n'est pas le même suivant les informateurs. De plus, le retentissement des troubles sur la vie familiale et sociale de l'enfant ne fait parti du questionnaire destiné à l'enfant lui-même. Un enfant avec un trouble passager aura un diagnostic positif selon le Dl alors qu'il aura un diagnostic négatif selon le parent ou l'enseignant qui n'évoquent que des troubles qu'ils estiment suffisamment importants pour gêner l'enfant. Les troubles évoquées par l'enfant ne doivent pas pour autant être négligés car l'étude de validation de Dl en France (Chanchee, 2003) a montré que les enfants évaluaient par eux mêmes assez précisément leurs problèmes et que bien qu'on ne puisse pas parler de troubles avérés, il s'agit certainement de troubles significatif.

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Si on s'intéresse à la perception de la santé mentale de l'enfant par les parents, nous avons des résultats similaires à l'étude de Fombonne (1994) estimant à 5,3% la prévalence des troubles mentaux avec retentissement sur la vie quotidienne de l'enfant dans son échantillon.

Les résultats obtenus à partir du questionnaire auprès des enfants, montrent une fréquence plus élevée des troubles intériorisés que des troubles extériorisés. Ceci est probablement lié au fait que les enfants perçoivent mieux leur mal-être « intérieur » que leur mal-être « extérieur ». En revanche, le phénomène inverse est observé quand les parents sont interrogés.

4.1.2 Concordance entre les 3 sources d'information

Non seulement les prévalences sont différentes suivant les sources d'information mais la perception des uns et des autres (enfant, parent, enseignant) sur la santé mentale de l'enfant peut être très différente. Par exemple pour l'hyperactivité avec troubles de l'attention (cf. graph ), et bien que la prévalence de ce trouble soit comprise entre 3,6% et 4,9% selon différentes sources, seuls 0,2% des enfants sont perçus comme ayant ce profil diagnostique par les trois sources d'information.

Si l'on considère seulement le pourcentage d'enfants perçus comme étant hyperactifs à la fois par le parent et par l'enseignant, seuls 0.9% des enfants présenteraient ce trouble car les enseignants ne rapportent pas les mêmes problèmes que les parents et vice versa. Ainsi, les parents et les enseignants identifieraient un nombre à peu près identique d'enfant ayant ce type de trouble mais il ne s'agit pas des mêmes enfants.

Il en est de même avec les troubles intériorisés bien qu' en fait plus du tiers des enfants que le parent a rapporté souffrant de ce type de problème le rapporte lui-même. Par contre de nombreux enfants qui ont été considérés comme ayant une probabilité d'avoir ce type de problème ne sont pas reconnus comme tels par leur parent.

Ces divergences d'évaluation sont bien documentées par les études qui considèrent comme essentielles de présenter les différents angles de vue sans vouloir à priori affirmer la supériorité d'un informateur sur un autre.

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Concordance entre différentes sources d'information : Troubles émotionnels j-lyperactivité avec trouble de l'attention

Enfants 4 48%

/

1 3 ^

\ \

Enfants ; 16.8%

I* : 3.53»/c

Parents* : 4.94%

* : avec retentissement

Tableau 5 comparaisons des évaluations des différents informateurs

Conclusion et perspectives

Cette enquête est le produit de la collaboration d'une équipe de recherche, de deux académies Aix Marseille et Nice et de la Direction Régionale des Affaires Sanitaires et sociales de la région PACA ; elle est aussi suivie par les autorités nationales des ministères concernés.

Elle est la première enquête française faite à cette échelle en population générale.

Les données qui ont été recueillies en 2005 sont en cours d'analyse et les résultats devraient être disponibles dans le courant du premier semestre 2006. S'agissant d'une collaboration, la production des résultats fera l'objet d'un texte consensuel en cours d'écriture et un texte présentant les premiers résultats devrait être diffusé dans le p^emier trimestre 2006.

Les résultats comprendront l'analyse des prévalences des différents

problèmes suivant les informateurs en fonction : -des différentes caractéristiques des enfants : sexe et âge

-du retentissement sur le fonctionnement scolaire

-des principaux facteurs de risque : facteurs sociaux, événements de vie et santé mentale des parents

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-l'utilisation du système de soin ; l'accès aux psychiatres, psychologues et autres intervenants sera présenté par type de problème et d'informateurs.

Enfin, cette enquête menée à titre pilote en région PACA a permis de faire le point sur l'acceptabilité et la faisabilité d'une étude de ce type en population générale. Les taux de participation des enfants, parents et enseignants en témoignent. L'extension de l'enquête à d'autres régions avec d'autres caractéristiques socio-démographiques et territoriales qu'il conviendra de déterminer en fonction des besoins des différents partenaires, parait donc aujourd'hui non seulement possible mais utile.

Lexique des troubles mentaux chez l'enfant (selon les critères BSMIV)

Troables dits intériorisés n^roupent :

a) phobies spécifiques :

Peur intense a irraisonn éË,déclanclice par Sapr&enced 'objets ou de siumiioBS spécifiques (ex: prendre

l'avion), pravoquanï une réaction anxieuse immédiate {exprimée cliez î 'enfant par pleurs, coiffes.,.) et

fthcm depuis au moins 6 mois. Elle inlcrfcre directement avec la vie familiale et sociale de l'enfant.

b) aDgoisse de séparation

Anxié^ excessive c oiiceriunt lasifparaîion d'avec la maison ou les pjrsonnes auxquelles le sujet est atlach é,

p'iJsente depuis au moins 4 seniaines et eniraiîiant une dâresse cliniquement significative, ou une alÉraîion

du fonciionnement social ou scolaire,

c) anxitégèiiéralisé e

Anxiété et soucis excessifs conceraanl un certain nombre d 'é\Énenients ou à 'activité (ex ; travail,

petformances scolaires) pré^nts au m&m depuis 6 mois. L'objet de l'anxiéë n'étant pas limité aux

Tnanife.ïtaiionsd'aulîestroublescûmmeranxiàédes éparaîion,phol3ies,dc, Eileenffaîneunedétiwe

cliniquement significative, ou une alëration du fonctionnement social ou scîilairc.

d) dËpression/dysthyniie

Petsisiance cfie; UJI individu de plusieurs symotômes, dont les principaux sont ; dinîiiiution marqué e de

l'inlsrêt, baisse d'éncrgieou fatigue, faible estime de soi. difficull; de conceiirration, qui durent au moins

(fcpiâs deux semaines, entraînant une détresse cliî'iquenient significative, m une altération du

fonctionnement social ou scolaire..

Troubles dits extériorisés regroupent ;

a ) éficit de Fattention / hyperactlvité

Persistance d'inattention et'ou hyperacti'iÉ/impulsiviti, [ ^ fréquente et plus sévère que ce qu' on observe

habitueileinent cheï les enfanR d'âge similaire. Une gène fonctionnelle si gnifïcativeesl pr&cnle dans au

moins deux environnements différents (par e\ : à l'école età la maison. )

b ) troubie des conduites

Ensemble de conduits, répétitives et persistantes, dan.î lequel sont bafoués les droits foiidatnentaux

d'auUui ou les normes et r ègles sociales corresîMindantà l'âge dii sujet, il existe quatre caÉgories

principales : agressions envers des personnes ou des animaux, destruction des bieus matériels, fraude ou

vol, violation grave des r èglesétablies (par ex : ftigues,.,)

c ) troubieoppos itiunneiavecprovocafioii

Ensemble r éciurent de comportements négaiivi,'itBs, provocateurs, ctsobdssani envers les personnes en

positiond 'autorife, qui persiste pendant au moins 6 mois, entraînant une altération significative du

fonctionnement social ousc olaire,.

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Mieux vivre ensemble dès l'école maternelle, un programme de développement des

compétences sociales

Pr. Jacques FORTIN, pédiatre et professeur en sciences de l'éducation

Il y a violence quand, dans une situation d'interaction, un ou plusieurs acteurs agissent de manière directe ou indirecte, massée ou distribuée, en portant atteinte à un ou plusieurs autres à des degrés variables, soit dans leur intégrité physique, soit dans leur intégrité morale, soit dans leurs possessions, soit dans leurs participations symboliques et culturelles.

Y. A. Michaud, 1978.

- La violence en milieu scolaire est un problème de santé publique, nié dans les années 80.

- Lien entre agressivité, conduites antisociales et difficultés scolaires

(Tremblay, Masse, Kurtz, 1996) Trajectoires d'adolescents

agressifs ciblent la petite enfance (Cairns étal., 1989)

Interventions éducatives précoces semblent infléchir la probabilité de comportements asociaux à l'adolescence (Me Cord, Tremblay, 1992

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Modèle écologique et violence Violence des jeunes scolarisés

- déculturation

- violence du mot

- impuissance sociale

- absence du futur

- culture narcissique du tout

possible

- jeux pervers autour des boucs

émissaires

Facteurs favorisant la violence

• Environnement précarité

• Sexe prédominance masculine (culture)

• Modèles identificatoires

-Valorisat ion, banalisation de la violence

• Vécu violences subies. Manifestations précoces et régulières d'agressions

• Repères éducatifs psychosociaux

- Faible estime de soi.

- Peu d'habiletés cognitives, comportementales et sociales

- Mépris et rejet subis

- Peu de réseaux sociaux. Rejet des pairs pro sociaux; fréquentation des pairs antisociaux agressifs

- Rapport instable à la règle et à la loi

Mieux vivre ensemble dès l'école maternelle

• Expérience de GASPAR: maîtrise des comportements violents

au sein des collèges et lycées par une réorganisation des

rapports interindividuels dans un contexte donné. (Fotinos,

Fortin, 2000)

• L'apprentissage précoce de la gestion des émotions et de l'accès

à des solutions négociées des conflits sont décrits comme des

démarches efficaces pour la prévention des comportements

asociaux (Fortin, Bigras, 1994)

• Le développement de compétences psychosociales contribue à

la promotion de la santé (OMS, 1999)

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Communication Gestion du stress Prise de décision Résolution des problèmes Assignation d'objectifs

Activer les facteurs de protection et les principes de résilience Apprentissage expérientiel Appui sur les programmes officiels Mots pour dire ses émotions Image de soi positive

Sentiment de sécurité pour aller vers l'autre Interactions d'entraide et de solidarités Temps forts hebdomadaires

Intégration dans les activités pédagogiques habituelles Activités choisies par l'enseignant Articulation avec les parents Programme élaboré et expérimenté avec un groupe d'une

trentaine d'enseignants volontaires

Programme au cycle 1

Les sentiments

Joyeux comme un pinson

Triste comme la pluie

Une peur bleue

Une colère noire

IVloi, j'aime aider

IVIa carte d'identité

Je connais tes qualités

Semblables et différents

Touche pas, c'est à moi !

Les consignes

Les disputes

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Programme au cycle 2

Mes qualités, mes compétences

Les sentiments

Joyeux

Furieux

Généreux et solidaire

J'apprécie les autres

Semblables et différents

Je t'écoute et je t'entends

On a besoin de respect

Je prends des responsabilités

Mon territoire

Se moquer ne fait pas rire

Le règlement

Finie la violence!

Le vol

Programme au cycle 3

Mes qualités et mes compétences

Ce que j'aime en toi

Les sentiments

La tristesse

La honte

Le droit à l'erreur

Vive la différence!

Sur qui je peux compter

L'affirmation de soi

Le souffre douleur

Publicité et liberté de choisir

Pas de justice sans régies

Etre médiateur

La bagarre

Intimidation, racket, vol

L'injure

La triche

La drogue, non merci!

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Evaluation - Année 2000

• 6 écoles primaires et maternelles en milieu précaire (Roubaix-Wattrelos)

• Directeurs volontaires pour l'expérimentation

• Septembre 2000 : sensibilisation des 75 enseignants

• Décembre 2000 : QECP rempli par chaque enseignant à partir de la GS maternelle

• Janvier, mars, juin : ajustements et synthèse

Evaluation - QECP

• Questionnaire validé par l'université de Montréal (R.E. Tremblay) explorant globalement la fréquence de certaines attitudes et comportements (absent, occasionnel, fréquent).

• 39 ou 61 questions en fonction de l'âge. • Permet le calcul d'un score d'agressivité et d'hyperactivité,

d'impulsivité, d'anxiété/retrait, de socialité.

• Rempli par l'enseignant.

Effectifs et scores

Mieux vivre ensemble dès l'école maternelle

Effectifs

n

garçons

filles

année 1

737

363

374

année 2

358

178

130

année 3

235

105

130

) Fortin. UiiiversilP Lille 2

Mieux vivre ensemble dès l'école maternelle

Scores selon la classe

GS

" " • " " ' " "

Agressivité

Anxiété/ Retrait

Prosocialité

4.19

2.04

1.96

5.41

CP

5.71

3.01

2.68

7.21

CE 1

6.84

3.52

2.87

8.79

CE 2

6.8?

2.72

2,11

7.55

CM 1

7.61

2.83

2.53

6.89

CM 2

6.55

2.61

2.63

10.29

Cycle2:diff.siqnif filtre ciosses CvcleS. ns.SQiif prosocDliTé

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Mieux vivre ensemble dès l'école maternelle

Scores selon le sexe

Cycle 2 Cyc le 3

g a r ç o n s f i l l e s g a r ç o n s f i l les

tiyperactJvité

Agressivité

Anxiété/ Retrait

Prosocialité

5.40

3.44

2.51

6.39

4.52

2.17

2.54

8.05

9.57

3.71

2.54

7.48

4.94

1.93

2.35

8.95

*** *** ns

Mieux vivre ensemble dès 1 école maternelle

Scores de l'année 1 des écoles qui ont arrêté et

poursu iv i le p r o g r a m m e

cycle 2 cycle 3

hyperactivité

agressivité

anxiété/ retrait

prosocialité

arrêté

5.55

2.89

2.56

6.ee

-"-'•'-"•'•'

p o u r s u i v i

4.10 *

1.96-*

2.18

6.71

arrêté

7.31

2.76

2.37

7.99

poursuivi

7,05

2.90

2,55

6,54

Mieux vivre c

Hyperactivité/

Agressivité

Anxiété/retrait

Prosocinlité

nsemble dès

Cycle 2 (5-8

Groupe référence

5,56

2,S5

2,52

7,19

l'école m

ans)

opr-Ès 1 on

4.02

2,31

1,94

7,58

iternelle

après Z ans

3,92

1,80

1,87

9,38

Mieux vivr

Hyperactivité/

''""'"" ""'""""'

Anxiétë/relroit

prasocioliîé

i ensemble dès l'école maternelle

Cycle 3

groupe référence après 1 an après 2 ans

7,01

2,72

3,29

2,43

8,28

5,95

2,27

2,45

2,33

8,76

5,62

1,72

3,17

2,43

10,57

Résultats

Intérêt des élèves de toutes les classes de toutes les écoles (participation, demande du temps hebdomadaire...). Réponse concrète au besoin de savoir verbaliser les émotions. Amélioration unanime du climat scolaire dès la première année dans 6 écoles sur 7. Conflits se terminent plus rapidement. Réduction du sentiment d'agressivité générale. Thèmes systématiquement abordés: sentiments, connaissance de soi et des autres. Puis bagarres, règles, racisme, respect. Plus les enseignants poursuivent le programme, plus ils diversifient les thèmes (importance du temps et de la formation) Parents informés mais peu associés Implication de l'enseignant est le facteur le plus déterminant:

Cohérence des pratiques éducatives antérieures: programme joue un rôle d'amplificateur et d'accélérateur Contradictions avec pratiques antérieures: refus

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Evaluation qualitative. Refus

En maternelle

- surcroît de travail (rapport) demandé par l'IEN à propos du programme et supervision hiérarchique pas toujours appréciée La non participation à l'évaluation et au programme n'implique pas toujours l'abandon des thématiques explorées (sentiments, connaissance de soi et des autres). Idem en primaire.

En primaire

- Dès la formation, désaccords exprimés sur l'origine de la violence scolaire et le principe de modification des pratiques

Dans une école manque d'efficacité perceptible (scores élevés d'hyperactivité et retrait, score moyen d'agressivité).

Dans 2 écoles, programme en fonction du volontariat des

enseignants, sans réunions trimestrielles de synthèse

(changements d'enseignants) ni QECP

Dans une école changements de projets chaque

Les 4 écoles rejettent surtout le remplissage du questionnaire

Evaluation - Scores

• Difficultés méthodologiques et admiinistratives pour une étude cas témoins (problème de l'appariement des enseignants à partir de leurs pratiques éducatives, élément-clé du développement des compétences sociales)

• Limites de l'étude

on postule que les scores des écoles qui n'appliquent pas le programme ne varient pas significativement Évaluation subjective des élèves par le QECP; problème des changements d'enseignants

• Résultats

Le programme facilite significativement des comportements altruistes.

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Conclusions

Le programme est d'autant plus facilement appliqué dans la durée :

Qu'il rencontre certaines des préoccupations, attentes, expérimentations des enseignants (notamment dans les pratiques inspirées des pédagogies institutionnelles). C'est un appui méthodologique et technique à l'amélioration des rapports interindividuels en classe dans une perspective de construction de la personnalité.

- Que les directeurs jouent un rôle d'animateur autour d'un projet d'école et la promotion de valeurs stables; projet englobant écoles maternelle et primaire

- Que les parents sont considérés avec respect par l'ensemble du personnel

- Qu'il apporte rapidement le sentiment d'amélioration du climat scolaire

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Un exemple d'action de prévention mis en oeuvre dans le cadre scolaire

Gérard CHAMPEYRACHE, Inspecteur de l'éducation nationale, circonscription Paris 11 A-Voltaire

Un milieu scolaire

Les écoles primaires de la 11®'"' circonscription d'inspection de l'Education nationale de Paris sont assez représentatives de la diversité sociale de la capitale. Si certaines écoles de cet arrondissement ressemblent fort à celles des quartiers dits privilégiés, d'autres - sans doute les plus nombreuses - accueillent une proportion parfois importante d'enfants à besoins particuliers.

De quels besoins s'agit-il ? Le terme "besoin éducatif" est évidemment trop vague. L'analyse des enseignants s'accorde sur une large demande :

-Comment amener les élèves, tous les élèves, à s'approprier les règles de la vie en collectivité? Comment faire en sorte que le règlement d'école soit la référence acceptée par toute la communauté éducative ?

-Comment amener les élèves à développer l'attitude de respect dont on parle tant ?

Les instructions officielles de l'Education nationale (loi du 14/02/02) prévoient la mission éducative des enseignants sous la rubrique "vivre ensemble ". Les textes officiels, les constats, les analyses ont conduits les enseignants à s'interroger sur les conditions qui favoriseraient l'acquisition des compétences sociales.

Ainsi, et depuis plusieurs années, dans, la n®'"^ circonscription (25 écoles primaires, 300 enseignants), la prise en compte de ces interrogations a donné lieu à de fréquentes réunions de travail et d'échanges entre enseignants des différentes écoles et avec les collèges ; les projets d'école ont bien intégré les problématiques ; des avancées intéressantes se sont manifestées.

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Mais il fallait aller encore plus loin : dans l'approfondissement théorique, dans la pérennité de l'action. Bref il fallait améliorer les résultats et les inscrire dans la durée. Eduquer, c'est éduquer pour la vie.

Un stage de formation continue

La rencontre que j'ai eu avec le docteur FORTIN a été déterminante. En tant que responsable d'une circonscription, j'étais porteur d'une demande bien précise. J'avais aussi l'intuition qu'un cadre théorique simple pouvait rendre la pratique plus forte, plus cohérente, plus efficace. La lecture des deux livres Vivre ensemble et Une école sans violence, étayée par les positions de leur auteur m'a fortement éclairé. En accord avec le Dr Fortin, j'ai organisé un stage au niveau d'un groupe scolaire " en phase" : le groupe 6 et 8 cité Voltaire, groupe relevant par ailleurs d'un REP dont je suis responsable.

Ce stage, organisé en 2003/2004, s'est adressé à la totalité des 45

adultes intervenant dans le groupe scolaire :

-personnels Education nationale : enseignants, aides éducateurs,

membres du RASED -personnels enseignants de la Ville de Paris : professeurs spécialisés -personnels péri-éducatifs : animateurs, intervenants du centre de

loisirs, représentants des personnels de service

En outre, tous les responsables locaux ont participé à l'intégralité de stage : l'IEN (moi-même), les conseillers pédagogiques de circonscription, le coordonnateur du REP, les responsables des personnels péri-éducatifs. Cette implication est évidemment déterminante pour la réussite de l'opération. Intéressés, d'autres directeurs d'écoles de la circonscription se sont aussi joints au groupe des stagiaires.

Intitulé " Vivre ensemble ", le stage avait pour objectif de mettre en place les actions pédagogiques destinées à développer les compétences sociales.

Déroulement du stage

La totalité du stage a été suivie par es 45 personnes. Venant de structures ayant rarement l'occasion de partager des actions de

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formation, ayant des exigences souvent trop étrangères les une aux autres, les stagiaires ont pu avoir un espace nouveau d'échanges et de construction. Le stage a naturellement débouché sur une meilleure cohérence de l'action, tant dans le domaine scolaire que dans le domaine périscolaire. Trois thèmes principaux ont été traités :

Le développement des compétences sociales, par le Dr Jacques FORTIN

" Mieux vivre ensemble " n'est pas un programme contre la violence, mais une attitude éducative que les enseignants peuvent miettre en œuvre : il s'agit d'éduquer en partant du positif plutôt que du négatif.

Le programme est développé dans le guide pédagogique paru aux éditions Hachette. Très accessible à tout enseignant, il détaille les objectifs, procédures et contenus à installer tout au long des enseignements. La base théorique est elle aussi décrite en termes opérationnels.

Le programme présenté par J FORTIN a été la partie principale du stage. Les perspectives introduites, en totale cohérence avec les programmes officiels, méritent une très large diffusion aussi bien dans les écoles primaires qu'en collège. L'investissement propre des enseignants doit porter essentiellement sur leurs représentations et leur volonté d'adopter une démarche réellement éducative. Les actions proposées sont assez facilement réalisables (il faut toutefois une formation spécifique) et contribuent très efficacement à l'amélioration du climat des écoles. Elles demandent un investissement professionnel sur le long terme ; les actions s'intègrent dans les activités scolaires. Le programme de J FORTIN correspond aux attentes profondes de tout enseignant.

La crise : comment l'éviter, comment la aérer ? par Danièle TRAUMAN, maître de conférences, et Jacques MORVAN, ingénieur, directeur d'exploitation Air France-Cargo (sécurité)

En se plaçant dans un cadre général, celui de l'analyse du risque

global ;

la sécurité renforce la crédibilité des acteurs et la légitimité des

institutions.

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les violences sont les révélateurs des dysfonctionnements de l'organisation.

La méthode constitue un guide pour l'identification du risque, l'analyse des retours d'expériences, l'élaboration d'un diagnostic, l'action à conduire, l'évaluation et la valorisation des performances. L'anticipation étant évidemment essentielle : simulation, évaluation, hiérarchisation, modélisation, apprentissage.

Ce point de vue est totalement novateur pour nos enseignants. S'appuyant sur une approche théorique solide et convaincante, les recommandations de conduite préconisées visent la cohérence du travail d'équipe et la solidarité à l'intérieur de celle-ci.

La relation avec les parents d'élèves, par Georges FOTINOS, ancien inspecteur général de l'Education nationale, conseiller du président de la MGEN

De façon très complémentaire aux deux intervenants précédents, Georges FOTINOS a redéfini les rôles respectifs des parents et des enseignants, soulignant leur complémentarité et en s'appuyant sur une analyse historique (initialement parents assujettis ; puis parents partenaires ; enfin parents clients). Aujourd'hui : comment mettre en place une co-éducation ? Il a ouvert des pistes concrètes pour une amélioration des relations, dans le cadre de projets partagés.

Là encore, les questions abordées ouvrent des perspectives enthousiasmantes : ne faudrait-il pas inventer " une formation des enseignants à la relation aux familles " ? La relation école/famille est un véritable fait de société qui nous touche tous : comment associer les parents à la gestion de l'école ? Dans quelles limites ?

Bilan général :

La formation a répondu aux attentes, au point que les programmes présentés font maintenant partie du projet d'école. Ils soudent la cohérence des comportements de tous les adultes qui composent l'équipe éducative. Ha apportent aussi un regard nouveau et généreux non seulement sur le métier d'enseignant, mais au-delà, sur les missions du système éducatif, sur la place de l'école dans le projet républicain.

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De feçon non négligeable, cette action de formation a en outre permis de renforcer la cohérence :

-d'une part entre l'école maternelle et l'école élémentaire (en allant plus loin que dans le cadre traditionnel de la liaison entre ces deux niveaux)

-d'autre part entre les personnels intervenant sur temps scolaire et les personnels intervenant dans le péri-éducatif, dont les emplois du temps sont par définition étrangers l'un à l'autre, alors que ces deux groupes de personnels interviennent auprès des mêmes enfants en quête de cohérence éducative.

Les résultats ont été observés dés la première année. L'action se poursuit maintenant pour la 3'^"^^ année.

Le stage a donné lieu à une présentation auprès des responsables de l'académie de Paris, des responsables de la DASCO de la Ville de Paris

Un tournage par une équipe de documentaristes professionnels a été effectué dans une classe tout au long de l'année 2004/2005. Le document, intitulé La république à petits pas, montre comment la laïcité est vécue par les élèves d'une même classe. L'observation porte sur le comportement des élèves (le regard est scientifique). Ce documentaire constitue à l'évidence un excellent outil de formation des maîtres. Une projection est prévue sur FR3 en février.

Perspectives plus générales envisageables:

Un stage du même type pourrait avantageusement être proposé aux équipes éducatives volontaires des écoles car il éclaire d'un jour nouveau, positif et constructif ce qu'il convient aujourd'hui d'instaurer avec réalisme le plus tôt possible. La rentabilité d'un tel stage me paraît exceptionnellement importante, sur le moyen terme (2-3 ans) et le long terme.

Les actions préconisées doivent engager les équipes dans leur intégralité, avec la mise en place d'un suivi dans le temps (de la maternelle au collège). Toute la communauté éducative est concernée.

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Des intervenants relais (enseignants pratiquant les programmes dans leur propre classe) pourraient être spécifiquement sollicités afin de démultiplier l'opération, en jouant le rôle de personnes ressources dans leur secteur géographique (groupe scolaire, circonscription, REP, bassin)

Dès 2005/2006, un stage d'information est organisé à l'intention des

directeurs d'école de Paris : plus de 10% d'entre eux se sont inscrits.

Références bibliographiques:

-Vivre ensemble. Jacques FORTIN, Ed Hachette, 2001 -Une école sans violence Georges FOTINOS, Jacques FORTIN, Ed

Hachette, 2000

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Accueil et prise en charge de l'enfant dans les cas de suspicion de maltraitance,

expérience d'une approche médico-psycho­sociale

H. Romano, V.Mingot, M. Van Scheck, P. Vasquez, J.L. Charritat. Unité d'Accueil des Jeunes Victimes de l'Hôpital

Armand Trousseau - Paris

Si la question des violences sexuelles à l'égard des enfants n'est pas récente, ces dernières années sont marquées par l'augmentation du nombre de plaintes et de signalements concernant des agressions sexuelles commises sur des mineurs. Face à ce problème de santé publique, de nombreuses études ont été publiées pour tenter de mieux comprendre les maltraitances sexuelles, mieux les évaluer, mieux les prendre en charge, mieux les prévenir (Conférence de consensus de 2003). Mais ces violences laissent rarement de traces et le plus souvent c'est un propos d'enfant, un changement de comportement qui amène la suspicion. La (sur)médiatisation actuelle de ce phénomène a pour conséquence de mettre la parole de l'enfant au centre de toutes les préoccupations cliniques, judicaires et médiatiques. Les débats se cristallisent sur des positions extrêmes allant du culte du doute et des fausses certitudes à celui do la sacralisation de la parole de l'entant. Dans ce climat, auquel s'ajoute une méconnaissance persistante de la sexualité infantile et de ses fantasmes, on constate une surenchère contusionnante de suspicions d'abus sexuels ; ces allégations étant d'autant plus importantes que l'enfant est jeune et sans grande capacité langagière. Le moindre mot, le moindre comportement à connotation sexuelle est, dans ce contexte, immédiatement perçu comme le signe d'une violence sexuelle que l'enfant aurait subie. Paradoxalement, nous ne pouvons que constater que cette attitude d'hyper-suspicion, porte préjudice aux enfants réellement victimes dont la parole se trouve discréditée car mise dans la nasse des «allégations » où se confondent allégations mensongères et avérées.

Si les projecteurs médiatiques se trouvent facilement braqués avec insistance sur certains procès de violences sexuelles, le quotidien

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des professionnels de l'enfance reste le plus souvent celui de situations où il n'existe pas de certitudes ou de preuves objectives de violence mais un faisceau de présomption que l'évaluation va devoir préciser. Quelles pratiques professionnelles proposer pour que l'accueil et la prise en charge de ces enfants ne constitue pas une violence supplémentaire ? C'est à cette question que répond la création d'une Unité spécialisée dans l'accueil des enfants victimes de maltraitance à l'hôpital Armand Trousseau.

OBJECTIFS DE L'UNITE tï ACCUEIL DES J EUNES VICTIMES

L'histoire de l'hôpital Armand Trousseau est marquée depuis de nombreuses années par une attention toute particulière portée à la question de la maltraitance et c'est dans la poursuite de cette dynamique que c'est inscrit la création, en septembre 2003, d'une Unité spécialisée dans l'accueil des enfants maltraités. L'Unité d'Accueil des Jeunes Victimes de l'Hôpital Trousseau est une consultation hospitalière qui accueille, avant toute démarche judiciaire, les enfants de 0 à 15 ans ayant été confrontés à tous type de situations de risque ou de maltraitance : physique, psychologique, sexuelle. Ses missions sont d'accueillir, d'évaluer les situations et de proposer une prise en charge la mieux adaptée à chaque enfant et à chaque situation, avec le concours d'un pédiatre, d'une psychologue et d'une assistante sociale.

Notre réflexion et notre travail de prise en charge s'étayent sur trois présupposés :

Le premier présupposé nous amène à dire qu'un enfant victime n'existe pas au sens où un enfant, quelles que soient les violences subies, reste ui enfant qui ne saurait être réduit aux traumatismes vécus où stigmatisé dans un statut de victime. Chaque enfant est différent, chaque situation est singulière, il est donc nécessaire de s'adapter aux besoins de chaque enfant, pris dans sa singularité, dans cette reconnaissance et ce respect de l'altérité.

Le deuxième présupposé propose de penser la violence, la maltraitance, l'événement traumatique non pas comme une maladie figée dans le temps mais comme un processus ce qui signifie qu'il y a un « avant » ce temps de la maltraitance et qu'il y aura un « après » au-delà de cet événement. Avant d'être victime de violence l'enfant, quelque soit son âge a une histoire, a établi un certain type d'interactions avec ses

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parents et son environnement, a développé un certain nombre de compétences. Après l'événement ou la situation de maltraitance, l'enfant se va reconstruire au-delà de ses blessures physiques ou/et de ses blessures psychiques invisibles, à partir de ses ressources propres et des liens qui se seront restaurés avec son environnement. Cette notion de processus suppose que la maltraitance n'est pas un phénomène individuel mais la manifestation d'un phénomène Interactionnel : elle ne trouve pas seulement du sens dans le fonctionnement intrapsychique de l'enfant victime ou de l'agresseur présumé, mais dans le contexte dans lequel cette violence vient s'inscrire. La mobilisation puis la collaboration des parents, séparés ou non, est donc toujours recherchée, même celle des parents supposés auteurs ; non seulement pour comprendre leur perception des événements ayant conduit leur enfant à l'UAJV, analyser le contexte relationnel (parents-enfant, enfant-fratrie, père-mère, enfant-institution, parents-institution) mais aussi évaluer leurs compétences à soutenir l'enfant et à lui garantir une sécurité.

Dans cette perspective l'évaluation plurielle du pédiatre, du psychologue et de l'assistante sociale permet de ne pas rester bloqué sur une seule interprétation de la situation mais d'en avoir une compréhension plus large garantissant la meilleure cohésion possible dans la prise en charge de l'enfant.

Dans le troisième présupposé nous convenons que dans cette prise en charge aucune « preuve » n'est recherchée. Il ne s'agit pas de savoir qui est coupable ni quels sont exactement les actes commis, même si c'est bien souvent la demande initiale des parents ou de l'entourage. Cette investigation est le travail de la justice (quand elle est saisie) et non celui d'un lieu de soin. Nous savons combien l'impact traumatique n'est pas proportionnel à la gravité matérielle ou pénale de l'événement et notre préoccupation est d'évaluer comment va l'enfant, comment s'exprime sa souffrance, comment l'événement vécu est-il en mesure d'être élaboré, quelle aide apporter à l'enfant. L'implantation de l'UAJV dans un hôpital pédiatrique, permet d'assurer à l'enfant une stabilité, un milieu relativement neutre, sécurisant où la position de soin, se centre sur l'enfant, ses souffrances physiques et psychiques. Les solutions peuvent ainsi s'élaborer grâce à cette unité de temps, de lieu et de compétences, hors des passions et des précipitations de tout genre habituellement à l'œuvre dans ce type de prise en charge.

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MODALITE DE FONCTIONNEMENT DE L'UAJV

Les situations où existe une certitude ou une preuve objective de la réalité de l'agression (traces ptiysiques comportements pathologiques graves) ou la nécessité d'une protection urgente de l'enfant sont rarement du ressort de rUAJV parce que, dans ces situations, prime la prise en charge de sa santé et de sa sécurité avec son éventuelle composante médico-judicaire. L'UAJV s'inscrivant en amont de toute démarche judiciaire est donc dans la grande majorité des cas confrontée à des situations où il n'existe pas de certitude objective mais un faisceau de présomptions que l'évaluation va devoir préciser : comportement sexualisé choquant l'entourage, découverte de lésions périnéales suspectes, propos inquiétants de l'enfant, doute sur le comportement au retour d'une garde au domicile d'une nourrice ou de garderie à l'école, interprétation anxieuse du comportement de l'enfant au retour d'une visite dans un contexte de séparation conjugale conflictuelle, contexte environnemental d'agressions sexuelles (mise en cause d'un membre de la famille ou d'un professionnel).

Les violences auxquelles nous sommes confrontées à l'UAJV sont de toutes sortes : violences psychiques invisibles ou traces somatiques ; violences intentionnelles, accidentelles ou instrumentalisées ; violences physiques, psychologiques, sexuelles d'un agresseur déterminé ou violence institutionnelle liée à l'incompréhension de certains professionnels ; violence des discours induits par les convictions absolues de mères ou de pères présentant des troubles de la personnalité ou de parents aveuglés par leur conflit conjugal et pour lesquels l'enfant n'est qu'un outil de vengeance.

L'UAJV peut être sollicitée par des professionnels comme à la demande spontanée de familles. Les parents ou les professionnels qui nous contactent sont souvent bouleversés dans leur capacité à intégrer véritablement le sens de ce qui leur est donné à voir ou à entendre et expriment leurs difficultés face à la souffrance qu'ils perçoivent chez l'enfant et face à ce qu'elle vient réactiver dans leur propre histoire. Certains parents ou professionnels témoignent de leurs certitudes, d'autres de leurs inquiétudes et de leurs craintes ; certains recherchent des réponses sur ce qu'ils perçoivent comme un comportement «anormal», une « étrangeté » de l'enfant; d'autres expriment leur culpabilité, leur désarroi ou/et leur sentiment d'impuissance face à la situation. Enfin certaines démarches s'inscrivent dans une logique

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procédurière où l'enfant est instrumentalisé dans le cadre d'un conflit conjugal ou inter-générationnel. L'inélaboration possible autour de la question des violences subies par l'enfant, quelles soient ou non intentionnelles, attestent de l'impact traumatique d'une telle situation.

La prise en charge fonctionne de façon pluridisciplinaire : médecin pédiatre, assistante sociale, psychologue. L'équipe est aussi complétée et indissociable d'une secrétaire accueillante qui garantit par sa présence continue le relais entre les intervenants et les familles. Au-delà de ses responsabilités au niveau du secrétariat elle assure une écoute toute particulière des enfants et des parents les jours de consultation comme lors du premier entretien téléphonique et des contacts ultérieurs. L'enfant et ses parents sont ainsi vus au moins une fois par tous les professionnels, dans un délai rapide (en cas d'urgence dans la journée) et exclusivement sur rendez-vous. Bien souvent des démarches sont à entreprendre auprès de différents services afin d'apporter à l'enfant la meilleure des protections possibles et plusieurs rendez-vous avec l'enfant et/ou ses parents sont généralement proposés.

Parce que la parole est le vecteur d'un vécu traumatique (de l'enfant et/ou de ses parents), parce le discours de l'enfant est souvent contaminé par la souffrance, le secret, le silence, les pressions de son environnement, l'évaluation diagnostique doit être réalisée de façon la plus experte possible. Médecin, assistante sociale et psychologue, utilisent donc des outils diagnostiques spécifiques permettant de repérer un certain nombre d'indicateurs recueillis à partir :

• d'un examen somatique de l'enfant • d'une analyse du contexte de la révélation des violences • d'une analyse des enjeux liés à cette révélation • d'une analyse du contenu du discours parental • d'une analyse de la collaboration parentale • d'une analyse du contenu du récit de l'enfant (caractéristiques générales de la déclaration, caractéristiques spécifiques du contenu) • d'une analyse des facteurs de risque de fragilisation de l'enfant suite à la révélation

• d'une étude du comportement de l'enfant : observation directe

en cours d'entretien et observations transmises par le(s) parent(s) • d'une connaissance plus précise de la personnalité de l'enfant via tests et épreuves projectives

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Le temps de synthèse qui fait suite à chaque évaluation met en commun l'ensemble de ces indicateurs. Il permet de confirmer ou d'infirmer les violences ; d'évaluer l'importance des troubles post-traumatiques et d'envisager la meilleure prise en charge possible. Si certaines situations imposent le signalement judiciaire, la réparation psychique de l'enfant ne se réduit pas à la restauration judiciaire et d'autres prises en charge sont habituellement proposées. L'évaluation de l'UAJV s'inscrit ainsi dans le temps : en immédiat au moment de la « crise » liée au temps de la révélation de l'enfant ou à celui de la certitude absolue d'une violence qu'il aurait subie et en post-immédiat dans les semaines, les mois qui suivent la demande d'évaluation par l'UAJV.

CONCLUSION

La triple expertise médico-psycho-sociale proposée par l'UAJV est un outil d'intervention au service de l'enfant qui s'inscrit comme un des maillons de la chaîne de la prise en charge. Il ne s'agit pas de l'utiliser de façon dogmatique ou idéaliste mais de l'inscrire dans l'histoire de vie de l'enfant comme un temps, un lieu où l'enfant aura été pris en charge dans sa globalité.

Le trauma ne s'oublie pas, il laisse une trace, une souffrance psychique trop souvent invisible, bien souvent secrète, que l'enfant va devoir intégrer. Etre attentif à la souffrance de l'enfant, le respecter dans sa parole, dans ses silences et dans son statut d'enfant, c'est être « suffisamment bon » et faire que l'enfant soit restaurer dans sa capacité à exister au-delà de la violence subie. L'enjeu est d'importance, il s'agit non seulement de soulager la souffrance de l'enfant mais aussi de lui donner la possibilité de vivre avec le traumatisme et non plus de survivre dans ce traumatisme.

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L'équipe de l'UAJV :

Jean-Luc Charritat : Responsable de l'UAJV - Pédiatre gastro-entérologue AP-HP, Véronique Mignot - Assistante sociale, Hélène Romano - Psychologue clinicienne, Marjianne Van Scheck - Accueillante, Pierre Vasquez - Pédiatre gynécologue AP-HP Adresse ; Hôpital Armand trousseau 26 avenue du Docteur Arnold Netter 75012 Paris tel. 01 44 73 54 13 courriel, [email protected]

Bibliographie

Conférence de consensus, 6-7 novembre 2003 ANAES, Paris

De BECKER E., HAYEZ JY, L'enfant en dessous de 3 ans maltraités sexuellement : comment les tout petits parlent d'un abus et comment y faire face ? Neuropsychiatrie de l'enfant et de l'adolescence, 2003 ; 51 : 105-110

CECI S.J., BRUCK M., L'enfant témoin : une analyse scientifique des témoignages d'enfants, Paris, Bruxelles, De Boeck Université s.a. 1995.

HAESEVOETS Y.-H., L'enfant victime d'inceste symptomatologie spécifique ou aspécifique ? , Psychiatrie de l'enfant, 1997, XL, 1.

HAESEVOETS Y.-H., L'enfant en questions, éd. De Boeck Université, 2000.

HAVELOCK ELLIS H., L'éducation sexuelle, Etudes de psychologie sexuelle, t.IV, Paris, Le Mercure de France, 1964.

HAYEZ J-Y., Les abus sexuels sur des mineurs : inceste et abus sexuels extra familiaux. Psychiatrie de l'enfant, XXXV, 1992, 1, p. 197-271

HAYEZ J-Y., De BECKER E., L'enfant victime d'abus sexuel et sa famille: évaluation et traitement, PUF, 1997.

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HAESEVOETS Y.-H., L'enfant victime d'inceste : symptomatologie spécifique ou aspécifique ? Psychiatrie de l'enfant, 1997, XL, 1.

HAESEVOETS Y.-H., L'enfant en questions, éd. De Boeck Université, 2000.

HAYEZ J-Y., Les abus sexuels sur des mineurs : inceste et abus sexuels extra familiaux, Psyctiiatrie de l'enfant, XXXV, 1992.

HAYEZ J-Y., De BECKER E., L'enfant victime d'abus sexuel et sa famille: évaluation et traitement, PUF, 1997.

ROMAND H., La prise en charge des enfants victimes d'abus sexuels. Hachette, 2004

VIAUX J.-L., Paroles d'enfants, paroles d'adultes : recueillir et valider la parole de l'enfant victime d'abus sexuels in Viaux J.-L. (Dir.), Victimes : actes et silences. Publications de l'Université de Rouen, 1995.

VIAUX J.-L., Diagnostiquer et évaluer les mauvais traitements, in Damiani C. (Dir.), Enfants victimes de violences sexuelles : quel devenir? Ed. Hommes et perspectives, 1999.

ZIGANTE F., DAVID D., GOLSE B., De quelques difficultés dans l'accueil des enfants présimés victimes d'abus sexuels, Psychiatrie de l'enfant XLIII, 1,2000, p.309-326

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Orientation et stratégie thérapeutique pour les adolescents du secteur 15^

Dr. Michel Fouillet, psychiatre à l'hôpital Sainte Anne Dr Marie Jeanne GUEDJ, psychiatre, hôpital Sainte Anne

(à. 1 LES ADOLESCENTS DU XV eme

Adolescents domiciliés sur le secteur

• Famille I Mission locale < Demande spontanée ' Autres professionnels,

médecins généralistes, services sociaux 2 CMPP

CMP Intersecteur Service d'AEMO :

Centre Emile Zola Injonctions Juge des enfants

Adolescents scolarisés domiciliés ou non sur

le secteur

CMP

• Stratégies spécifiques

• Orientation • Evaluation

'Etablissements scolaires : bassin Invalides Vaugirard

'Service de promotion de la santé en faveur des élèves

• Recoupage carte scolaire

. CIO

^ Docteur Michel FOUILLET - Colloque du 20 janvier 2006 organisé par

l'AFPSSU et l'AFPsyMed

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LE CMP ET L'ECOLE

Ecole Collège et Lycée

éviter

Service de promotion de la Santé en faveur des élèves : - Médecins scolaires - Assistantes sociales - Infirmières scolaires

CMP

• Evaluation

• Stratégie

• Orientation

• Evaluation cognitive du jeune • Maintien de la scolarité • Appréciation de la stratégie • Facilitation du contact avec les parents

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STRATEGIES THERAPEUTIQUES SPECIFIQUES AUCMP

• Stratégies de soins dans une structure polyvalente pôle Adolescent :

Psychothérapies Traitements Travail avec les familles :

Entretiens familiaux Thérapies familiales

Hospitalisation : Clinique Relais Centre Hospitalier Sainte-Anne

• Orientation / Liaison : Psychiatres libéraux « spécialisés ados » Médecins généralistes

Spécialistes : endocrinologues, gynéco-obstétriciens, pédiatres Services de médecine spécialisée

• Appui sur les structures intersectorielles : Consultations relais étudiants / lycéens (Clinique G. Heuyer)

- FEF Hôpital de jour intersectoriel

• Lieu d'évaluation des stratégies : Réunion mensuelle avec les médecins scolaires Réunion avec le service du Juge des Enfants Participation au CTE Participation de l'Intersecteur

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EVOLUTION DE LA PRATIQUE COMMUNE

QUALITATIF

• Adolescents domiciliés sur le secteur mission initiale de la sectorisation

• Adolescents scolarisés : Organisation de la répartition des établissements scolaires Mise en place des outils institutionnels

réunions mensuelles

fiches de liaison

• Articulation avec l'Intersecteur : Orientation des familles Mise en place d'une consultation commune

• Formation : Participation aux réunions d'information des parents dans les établissements des fédérations de parents d'élèves - Délégué local : FCPE, PEEP 3 journées nationales :

2000 : 1 ' '' rencontre avec les médecins scolaires du

2001 : Phobies sociales, phobies scolaires 2002 : L'exigence scolaire : quelles conséquences sur la

santé des jeunes Groupe Balint avec les médecins scolaires

Identification de sous-groupes : Classes préparatoires Collégiens (12-15 ans)

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Secteur de psychiatrie infanto-juvénile du ^y|eme arrondissement, ses relations avec

l'éducation nationale Dr. Yves Contejean, pédopsychiatre, chef de service, hôpital

Sainte Anne

Service de Psychopathologie de l'Enfant et de l'Adolescent

E3

r~^^^

UN CENTRE DE DIAGNOSTIC ET DE RECHERCHE 4 AXES THERAPEUTIQUES 2 RESEAUX DE PREVENTION

• CREDAT : Centre de Recherche et de Diagnostic pour l'Autisme

et Troubles Apparentés

• HOSPITALISATION A TEMPS COMPLET

10 lits de semaine CHSA : enfants 2-6 ans (autismes, troubles

apparentés)

• HOSPITALISATION DE JOUR : 22 PLACES

> HDJ - 6, rue Picot PARIS 16ème : 20 places enfants 6-

12 ans

'y (pathologies limiites, dysharmonies psychotiques)

V HDJ - CHSA : 2 places enfants 2-6 ans

> (autismes, troubles apparentés)

• SOINS AMBULATOIRES

> CMP - 6, rue Picot PARIS 16ème

• CATTP - 1 1 , rue du Général Niox 75016 PARIS

'r CATTP ENFANTS PREADOLESCENTS file active>50

> CATTP PETITE ENFANCE : 8 places

• RESEAU PETITE ENFANCE

• RESEAU ADOLESCENCE

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C.R.E.D.A.T UN CENTRE DE DIAGNOSTIC ET DE RECHERCHE DEUX UNITES THERAPEUTIQUES

1 CREDAT : Centre de Recherche et Diagnostic pour l'Autisme et Troubles Apparentés : consultations, bilans diagnostiques, orientations

2 HOSPITALISATION DE SEMAINE 10 lits : enfants de 2 à 6 ans

• Séquentielle continue ou discontinue • Cures institutionnelles

3 HOSPITALISATION DE JOUR : 2 places • Séquentielle continue ou discontinue • Cures institutionnelles à temps complet

UNITE A GEOMETRIE VARIABLE PASSAGES D 'UNE UNITE A L 'AUTRE

LE PÔLE NORD 6, rue Picot PARIS Xyf""'

• CENTRE MEDICO PSYCHOLOGIQUE INFANTO-JUVENILE Enfants et Adolescents jusqu'à 16 ans

- Toutes pathologies psychiques - Consultations bilans orientations

. HÔPITAL DE JOUR : 20 PLACES Enfants 6 à 12 ans

- Pathologies limites, dysharmonies d'évolution

LE PÔLE SUD : CENTRE DE GUIDANCE 11, rue du Général Niox 75016 PARIS

• ANTENNE CMP : Consultations, bilans, orientations.

. CATTP ENFANTS ADOLESCENTS (file active > 50) • Pathologies carentielles • Pathologies limites • Difficultés et échecs scolaires

USIS : unité de soins intensifs du soir

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CATTP PETITE ENFANCE : 8 PLACES Groupe thérapeutique jeunes enfants

POINTS FORTS - Lits d'Iiospitalisation - Variété des réponses thérapeutiques

- Deux orientations spécifiques Autisme Pathologies limites

- Pluridisciplinarité - Qualité des locaux

AUTISME ET TROUBLES APPARENTES

ÉVALUATIONS ET PRISES EN CHARGE PRÉCOCES

AU CENTRE HOSPITALIER SAINTE ANNE Dr Y. Contejean

DrC. Doyen Kelley Kaye, Ph.D.

Service de Psychopathologie de l'Enfant et de

l'Adolescent

UNE UNITE SPECIALISEE DANS L'EVALUATION TRAITEMENT DES TROUBLES DU DÉVELOPPEMENT

ET LE

1. Une unité spécialisée avec une approche thérapeutique pluridisciplinaire

10 enfants âgés de 2 à 6 ans en accueil thérapeutique à temps complet Possibilité d'accueil « séquentiel »

- 4 enfants accueillis en hospitalisation de jour 1 place réservée aux observations diagnostiques

2. Un personnel spécialisé dans les troubles du développement de la petit enfance : personnel infirmier, éducatrices de jeunes enfants ; assistante sociale; orthophoniste ; psychomotricienne ; psychologues ; pédopsychiatres

3. Une prise en charge d'une durée adaptée à chaque enfant.

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APPROCHE THERAPEUTIQUE 1. Un diagnostic précoce...

• Examen - pédopsychiathque - pédiatrique

- génétique • Évaluation

- infirmière et éducative - du développement psycho-affectif - psychomotrice - du langage - des facteurs psychosociaux

2. Pour une prise en charge précoce • La recherche d'une alliance thérapeutique avec les parents • Une évaluation précise du trouble et de son retentissement sur le développement qui orientera le schéma thérapeutique • Une approche pluri-disciplinaire • Une approche psychothérapique adaptée à l'enfant et sa famille • Des approches instrumentales et éducatives • Des liaisons multiples avec le médecin traitant, les pédiatres, les services de l'enfance, la crèche, la nourrice ... • Des rencontres avec les équipes enseignantes

THÉRAPEUTIQUE SPÉCIALISÉE • Une approche psycho-éducative via des ateliers à médiation

corporelle ou sensorielle et des soins quotidiens • Une approche instrumentale spécifique selon les enfants

- Orthophonie : communication facilitée avec support gestuel ou imagé ; travail sur le langage oral et écrits lorsqu'ils existent

- Psychomotricité : séances individuelles , de groupe ou de balnéothérapie

• Une approche pédagogique spécialisée et/ou classique en école maternelle de proximité

• Une approche médicale adaptée au trouble du développement de l'enfant

- Douleur, comitialité, auto-mutilations, soins en stomatologie

• Une approche psychothérapique adaptée à l'enfant et ses proches

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Thérapie cognitive après évaluation du développement et inspirée des travaux de S. Greenspan Thérapie d'inspiration analytique pour certains enfants en particulier ceux ayant accès au langage Une approche familiale dans le cadre d'une séparation aménagée ou de l'hospitalisation de jour

- Thérapie de soutien et guidance psycho-éducative Groupe de parents

Liens actuels avec l'éducation nationale Dépistage en Milieu Scolaire (CMP) Maintien de la Scolarité (CATTP) Intégrations Scolaires (CREDAT) Scolarisation en Hôpital de Jour (HdJ) Suivi des enfants en Classes Spécialisées (CMP) Participation aux CCPE/CCSD

Perspectives d'Avenir • Circulaire du 18 Octobre 2005: Mises en œuvre d'un dispositif de

partenariat entre équipes éducatives et de santé mentale pour améliorer le repérage et la prise en charge des signes de souffrances psychiques des enfants et des adolescents.

Dépistage et prévention précoces

^ Collaboration étroite entre établissements scolaires et services de soins spécialisés

^ Mise en place d'outils de repérage et de formation

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Le Relais Etudiants Lycéens, clinique médico-universitaire Georges Heuyer

Un modèle de dispositif de prévention, de dépistage et de traitement précoces des troubles

psychopathologiques à l'adolescence, en milieu scolaire

Dr. Dominique Monchablon, psychiatre, chef de service, responsable médical du Relais Etudiants Lycéens de la clinique

Georges Heuyer Catherine Giraud, psychologue au Relais Etudiants Lycéens

HISTORIQUE

La création du Relais Etudiants Lycéens s'est organisée autour de deux axes de réflexion :

- Nous étions dans l'obligation de répondre à la demande croissante de consultations bilan - diagnostic émanant des médecins scolaire et universitaire (avec lesquels nous travaillons régulièrement au sein de la clinique Georges Heuyer pour une meilleure insertion de nos patients). Ces demandes concernaient des jeunes qui n'avaient jamais bénéficié de prise en cliarge psychiatrique et qui d'ailleurs pour la plupart n'en exprimait pas le souhait malgré les signes de souffrance visibles dans un contexte de situations psychologiques et universitaires ou scolaires précaires.

- Nous observions pour nos patients admis à la clinique Georges Heuyer après une analyse méticuleuse de leur biographie, superposée à leur parcours scolaire un décalage important dans le temps entre les premiers signes de la maladie et les premiers soins. Les signes de souffrance psychologique semblent pourtant objectivables et lisibles à travers leurs péripéties scolaires, leur rapport aux enseignants et à l'école, à la lecture de leur bulletin scolaire et du parcours chaotique, soutenue par les parents, de changements successifs d'institutions scolaires.

Il nous semblait dès lors intéressant de comprendre ce hiatus entre le repérage voire le dépistage scolaire, et l'entrée tardive dans les soins. C'est après une longue consultation des services de médecine scolaire et préventive de différents établissements scolaires et universitaires, mais aussi et surtout du Rectorat de Paris, que nous décidons d'ouvrir en 1994

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une «structure Relais » permettant d'établir une passerelle plus aisée entre ces zones de dépistage en amont et les consultations spécialisées en aval (inter secteur infante juvénile, CMPP, CMP, BAPU, éventuellement structure hospitalière).

ETAT DES LIEUX

Nous connaissons collectivement quelques paradoxes de l'adolescent en

souffrance :

- Derrière l'expression bruyante de sa détresse l'adolescent éprouve le plus souvent une réelle Incapacité à conceptualiser et à verbaliser sa souffrance ou ses désirs avec prévalence de l'agir sur l'attente, la réflexion et le dialogue.

- S'ajoute à cela l'impossibilité ou le refus de formuler une demande explicite de conseils, de soutien et à fortiori de soins aux représentants du monde des adultes, qu'ils soient parents ou soignants.

- Le monde des adultes, carrefour de toutes les projections de l'adolescent, est tantôt ressenti hostile, tantôt présumé lointain et inaccessible.

- L'adolescent en difficulté se sent mal et incompris surtout quand il dissimule sa détresse affective derrière un banal cortège de plaintes vagues ou de revendications agressives ou de symptômes scolaires.

- L'échec scolaire est ici révélateur de difficultés psychologiques et relationnelles mais il va lui-même en retour aggraver la détresse de l'adolescent.

Du côté des familles

- Les familles de ces adolescents en difficulté sont le plus souvent elles-mêmes en souffrance.

- Indépendamment de leurs difficultés propres, psychologique ou économique, les parents et la fratrie sont pris dans la turbulence des troubles du comportement de l'adolescent « agitateur », qui parfois d'ailleurs n'est pas le plus en souffrance dans la famille

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- Ils sont toujours surpris puis décontenancés par la symptomatologie la plus visible du mal être de l'adolescent et s'avèrent finalement souvent impuissants à lutter contre l'échec scolaire, la déscolarisation progressive et à fortiori les troubles plus patents du comportement.

- Démobilisés par la répétition des symptômes et des situations, ils finissent par accepter passivement tous les excès de leur adolescent ou au contraire le rejeter en bloc.

Du côté de l'institution scolaire

- Elle ressent l'urgence d'une réponse appropriée, autre que l'exclusion, aux difficultés institutionnelles engendrées par des adolescents «hors normes », dont la désorganisation interne peut être tantôt explosive, tantôt silencieuse.

- Si l'intervention psychiatrique semble opportune dans certains cas, les différents intervenants scolaires sentent toute la difficulté à engager l'adolescent et sa famille dans ce projet ;

les consultations peuvent rester ponctuelles et mystérieuses dans le secret des cabinets médicaux alimentant un sentiment d'abandon et d'incompréhension chez les adresseurs scolaires, de plus ces consultations restent souvent sans suite. Sur le terrain, la plupart du temps, rien ne change, et l'intervention, espérée magique du psychiatre n'a pas répondu aux interrogations et aux difficultés des professionnels de lycées.

De ce constat est né le projet du F'elais Etudiants Lycéens avec un

accueil pluridisciplinaire.

LES OBJECTIFS

Analyser les situations de difficultés psychologiques en milieu scolaire avec évaluation diagnostique et pronostique. Amorcer une dynamique de changement en démêlant l'écheveau du scolaire, du familial, du psychologique et du social.

Les entretiens sont centrés sur les problèmes concrets de la vie

quotidienne d'un adolescent et de sa famille et plus spécifiquement les

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« symptômes scolaires » : les troubles plus ou moins graves de l'adaptation en milieu scolaire (troubles patents du comportement, plaintes somatiques, éctiecs scolaires itératifs, absentéisme massif) feront l'objet d'une analyse précise afin de déterminer l'ampleur ou la gravité des troubles psychologiques sous jacents.

Si cela s'avère nécessaire, cette analyse peut déboucher sur un choix de propositions thérapeutiques allant de la prise en charge ambulatoire dans une structure CMP jusqu'à l'orientation vers des structures de soins hospitalières. Elle pourra déboucher aussi sur une proposition de soutien pédagogique approprié par les intervenants pédagogiques du Relais.

Notre objectif de départ, à l'origine de cette consultation en 1993, était donc exclusivement un objectif de dépistage précoce, d'évaluation (évaluation essentiellement clinique mais aussi en partie pédagogique) et d'orientation vers des structures de soins en aval compte tenu de notre place institutionnelle privilégiée (au sein de la clinique Georges Heuyer) au croisement des réseaux de soins ambulatoires ou hospitaliers, publics ou privés, et des réseaux de dépistage (médecine scolaire, médecine préventive universitaire).

Rapidement, nous avons pu constater que cette évaluation interactive de la situation conflictuelle de l'adolescent s'est avérée en elle-même thérapeutique, du fait en particulier de la mobilisation familiale autour de cette consultation.

LA POPULATION

La population concernée : grands adolescents et adultes jeunes : lycéens

d'enseignement générai et lycéens post-bac (CPGE, BTS) et étudiants

du f cycle Age : 15 à 25 ans Lieu de résidence : Paris

Nous avons délibérément limité à Paris notre zone d'intervention possible souhaitant privilégier le travail en collaboration avec les structures sanitaires et scolaires que nous connaissons déjà.

Recrutement par l'intermédiaire des personnels de santé scolaire, de

médecine préventive universitaire, des personnels éducatifs et

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d'orientation des lycées et des universités, mais aussi à la demande des médecins de famille, Fil santé jeune, Ecole des Parents, C.I.O., psychiatres.

Consultation possible à la demande des familles ou du jeune.

LE FONCTIONNEMENT

Chaque consultation est précédée d'un ou plusieurs entretiens téléphoniques préalables avec nos correspondants scolaires ou médicaux et d'entretiens téléphoniques avec le patient lui-même et sa famille.

Ces entretiens nous permettent une enquête détaillée sur les références

du patient (âge, niveau d'étude, lieu de résidence) et surtout sur les

motifs de la consultation :

• plaintes de difficultés exposées par le patient lui-même et sa famille

• difficultés objectives rencontrées par la structure scolaire ou le correspondant : nature apparente du trouble de l'adaptation et du comportement.

Chaque demande constitue un dossier traité en réunion générale hebdomadaire où nous évaluons l'adéquation de la demande à notre structure de consultation et où nous proposons, en fonction des symptômes allégués, une stratégie de prise en charge (abord personnel, abord familial exclusif, abord médical ou pédagogique privilégié).

Cet examen de dossier est suivi d'une proposition de rendez-vous

Chaque proposition de rendez-vous non honorée par le patient est suivie

d'un courrier de relance et d'une réévaluation trimestrielle avec notre

correspondant.

La séance proprement dite est assurée conjointement par un psychiatre, une psychologue, (un thérapeute familial, le cas échéant) une infirmière et un enseignant. Elle dure 1 h 30

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Elle est suivie d'un recueil de données : données culturelles, situation familiale, symptômes allégés, symptômes perçus, diagnostic, mode de prise en charge proposée.

La consultation peut être unique ou suivie d'une proposition dune série

de rencontres qui n'excèdent pas six consultations.

LE DISPOSITIF

1 - Intervention d'une série limitée d'entretiens (4 à 6 maximums)

Ce dispositif doit prendre en compte une situation conflictuelle à un instant donné présentée par l'adolescent (et éventuellement par sa structure scolaire ou familiale) et non pas le patient dans son intégralité. Notre travail d'évaluation permet bien entendu de replacer ce problème dans son contexte complexe psychopathologique personnel, familial, et d'interaction environnementale et scolaire ; mais notre tâche est de l'aider à dénouer ce problème précis pour lequel il nous a été adressé.

Ainsi ce dispositif du Relais se démarque d'une proposition d'un suivi thérapeutique au long cours (sur le modèle psychothérapique). La séparation est inscrite d'emblée dès la première rencontre ; cela semble paradoxalement rassurant à l'adolescent et à sa famille. Cette prise en charge brève s'avère aussi extrêmement mobilisatrice : elle fait émerger rapidement un matériel fantasmatique riche qui sera évoqué mais non traité. La séparation prochaine impose la mobilisation rapide des ressources personnelles et familiales pour le traitement du problème annoncé.

Les intervenants du Relais travaillent d'emblée sur une problématique de séparation, qui renvoie à cet âge à la douloureuse distanciation d'avec le milieu familial, et pour les lycéens à la séparation d'avec l'institution dans ce passage ritualisé de l'enseignement secondaire à l'enseignement supérieur.

2 - Entretiens animés conjointement et en pluridisciplinarité par un psychiatre, un psychologue clinicien, un enseignant, et dans certains cas une infirmière ou un thérapeute familial.

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-L'accueil groupai est rassurant, il évite un ancrage transférentiel massif, parfois responsable de rupture de soins ou au contraire de prise en charge indéfinie. Il permet une dilution transférentielle et une offre d'une grande diversité de modèles identificatoires. Il offre une «sécurité de base » grâce à la cohérence du groupe.

- L'accueil groupai est rapidement renarcissisant pour l'adolescent, du fait de l'intérêt et de la réflexion conjointe de plusieurs « experts », de la prise en compte des difficultés telles qu'elles sont exprimées quelle qu'en soit la nature, et éventuellement du travail pédagogique spécifique sur les difficultés scolaires si celles-ci sont énoncées, dans l'intervalle des entretiens.

- L'accueil groupai permet un regard croisé des compétences dans nos différents champs d'investigation et d'empathie. Il répond à la demande groupale de l'institution scolaire représentée par une personne ou un groupe de personnes (CPE, infirmière, proviseur) ; il permet très aisément le recours en aval à un professionnel ou un groupe de professionnels compétents pour accompagner l'adolescent consultant dans la résolution de ses difficultés.

- La participation d'un enseignant permet toujours une élaboration du rapport au savoir et à l'institution scolaire grâce à la position décentrée de l'enseignant en particulier au décours des « dialogues » ou « ateliers » pédagogiques dans l'intervalle des consultations. Parallèlement, sont travaillés en consultation pluridisciplinaire, la place et le rôle dévolu à l'adolescent au sein de sa famille, en particulier dans le champ des représentations de l'avenir et des ambitions familiales (analyse de la « culture familiale »).

3 - La présence possible d'un ou plusieurs membres de la famille, en général le ou les parents au sein de la consultation : Le jeune est, dès le premier contact téléphonique, sollicité pour convier ses parents à la consultation. Chez les consultants plus âgés (les étudiants) la présence réelle des parents est parfois inutile, il est alors préférable de travailler sur les représentations internes parentales.

En revanche, chez les consultants plus jeunes, la présence des parents

s'avère souvent souhaitable et parfois tout à fait indispensable dans le

cadre de conflits familiaux patents (discorde, conflit d'autorité, conflit

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entre les parents, rivalité exacerbée dans la fratrie). La présence réelle des parents permet le plus souvent la mobilisation rapide des ressources familiales pour la résolution du problème annoncé ou dans certains cas l'aménagement temporaire parfois spectaculaire de conflits anciens (secrets familiaux, situation d'abandon implicite, difficultés scolaires transgénérationnelles).

La présence d'un ou des parents est indispensable pour soutenir affectivement et financièrement l'entrée de l'adolescent dans les soins quand ceux-ci semblent indispensables.

De manière occasionnelle un ou plusieurs intervenants familiaux ont pu, au décours de notre consultations, être adressés à des structures d'accueil et de soins en aval (proposition de thérapie familiale, entrée dans les soins d'un des membres de la fratrie, etc.)

INTERVENTIONS PEDAGOGIQUES SPECIFIQUES

On ne perd pas de vue pour autant les difficultés scolaires alléguées, elles sont parfois le fil conducteur de notre rencontre. Quelle qu'en soit la nature ou la cause psychologique présentée ou supposée, elles doivent être prises en compte pour elles-mêmes tant les défaillances scolaires restent une blessure narcissique pour l'adolescent et un facteur aggravant de sa dépression et de ses difficultés existentielles. Dans ce contexte, nous disposons d'un outil : le dialogue pédagogique proposé à l'adolescent pour nous aider à comprendre, avec lui, sa relation à l'apprentissage à travers un questionnement diversifié et approfondi. Il s'agit :

de questionner sa scolarité

de questionner son rapport aux différentes disciplines

de s'interroger sur sa démarche d'apprentissage et de possibilités de « transfert » de ce que l'on sait faire d'une

discipline à une autre.

Il est proposé au sein de la consultation pluridisciplinaire, mais sera

mené individuellement par l'enseignant seul, dans l'intervalle de ces

consultations.

Il n'est jamais présenté comme une injonction mais plutôt comme une

invitation à se découvrir dans les deux sens du terme, à découvrir son

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mode de fonctionnement cognitif à partir de ses stratégies. Ce dialogue pédagogique permet de décentrer le débat, de quitter l'alternative : soit « ce sont les professeurs qui sont nuls » soit «c'est moi qui suis nul » pour se donner des outils de réflexion permettant de reprendre l'initiative de son apprentissage.

Il est un nécessaire cétour, quand l'adolescent reste rivé sur le « blocage scolaire » dans l'incapacité d'évoquer un vécu autre que scolaire, par méfiance ou crainte à se livrer, pauvreté des associations d'idées ou fantasmatiques, gravité ou douleur des situations vécues. Pour tenter d'évaluer plus objectivement, face à une grande dévalorisation et démotivation, l'importance des difficultés cognitives ; le plus souvent les difficultés évoquées sont amplifiées par le vécu dépressif auto dépréciatif. On mettra ici en évidence les stratégies valides, les points forts scolaires, extra scolaires sur lesquels il pourrait prendre appui pour rebondir et travailler différemment. Cet axe de travail est immédiatement et formidablement renarcissisant pour le jeune en difficulté. Il permet d'ouvrir des pistes qui seront élaborées et soutenues sur la durée au sein de la consultation pluridisciplinaire. Pour mettre en lumière parfois, la performance des stratégies d'apprentissage, qui se trouve invalidée dans une situation de contrainte extérieure au sujet lui-même et imposée à lui : problèmes familiaux, soutien d'un copain ou d'un parent en difficulté, (processus de parentification).

Pour que le jeune soit accueilli « autrement », hors d'un contexte de mise à l'épreuve scolaire, par un enseignant qui occupe une place particulière et originale : il n'est pas en position d'enseignement ni d'évaluation, il ne connaît pas le jeune en tant qu'élève, mais le connaît mieux en tant que personne ; de la même façon l'élève connaît mieux l'enseignant en tant que personne au sein de la consultation pluridisciplinaire qu'en tant que pédagogue. Cet enseignant va l'inviter à faire des liens entre les stratégies de mémorisation, compréhension, attention, imagination, utilisées dans le quotidien et celles utilisées dans le monde scolaire.

Enfin, pour permettre l'émergence, voire l'inflexion de la tonalité de ses représentations de l'institution scolaire, des enseignants, du travail et de la culture, des loisirs et même de l'avenir.

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Il s'agit donc, à travers la relation privilégiée instaurée dans le cadre transférentiel de la consultation, de faire des liens entre les différents domaines d'activités et de laisser envisager des changements possibles et positifs dans le décor installé mais évolutif de la vie de l'adolescent

En conclusion : à partir des plaintes initiales de l'adolescent et de sa famille qui s'avèrent le plus souvent scolaires, se dégagent assez rapidement dans ce climat de confiance naissant entre les différents interlocuteurs de la consultation, d'autres difficultés d'ordre environnemental, familial et relationnel, conjoncturelles ou structurelles, ou des difficultés psychologiques personnelles anciennes ou récentes et réactionnelles (expériences amoureuses douloureuses, deuil, maladies, etc.). Un travail d'élaboration des difficultés psychologiques personnelles ou familiales peut s'initier à minima tout en respectant les réticences et à fortiori les défenses de l'adolescent qui sera invité ultérieurement, si besoin, à poursuivre ce travail avec d'autres professionnels dans le cadre de soins spécialisés.

En attendant, au sein du Relais, un lien retraçant une histoire et riche de sens commence à se nouer entre les différents domaines de la vie de l'adolescent grâce aux interventions croisées des différents interlocuteurs.

Un processus de réflexion s'amorce chez l'adolescent sur son fonctionnement psychique, sa relation à sa famille et à ses pairs, ses conduites de répétition dans le succès ou l'échec et son ambition pour l'avenir inscrite le plus souvent dans la culture familiale.

La découverte progressive de ses méthodes et faculté d'apprentissage, de son rapport au savoir et à la culture ainsi qu'à l'institution scolaire, permet la relance des investissements scolaires fragilisés par la souffrance psychique et entravés parfois par des dysfonctionnements cognitifs ou par des représentations de l'institution scolaire persécutrices.

Un tiers de ces adolescents poursuit en aval de notre consultation, un travail psychothérapique ou bénéficie d'un suivi psychiatrique.

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Impression : DUMAS-TITOULET IMPRIMEURS Dépôt légal : JANVIER 2006 - Numéro d'imprimeur : 43443

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