17
 La religion La religion 1/ Foi et raison 2/ Dieu, ses preuves et sa critique 3/ Religion et foi Expressions : Croyances. Les religions du Livre. Les préceptes d'une religion. Histoire des religions. Religions animistes, religions savantes. Religion naturelle, religion révélée. Les secours de la religion... Religions. Pratiquer une religion. Entrer en religion. Voeux de religion. Rites et rituels religieux. Symboles religieux...

Notes EM TSTES Religion

Embed Size (px)

Citation preview

   

La religionLa religion

1/ Foi et raison

2/ Dieu, ses preuves et sa critique3/ Religion et foi

Expressions :

●Croyances. Les religions du Livre. Les préceptes d'une religion. Histoire des religions. Religions animistes, religions savantes. Religion naturelle, religion révélée. Les secours de la religion...

●Religions. Pratiquer une religion. Entrer en religion. Voeux de religion. Rites et rituels religieux. Symboles religieux...

   

Expressions:Expressions:

● Croire que.  Tenir  pour  vrai  ou  véritable.  Accepter, admettre. Je crois ce que vous dites. Ne croyez rien de ce qu'il vous raconte. Faire croire qqch. à qqn. Convaincre, persuader,  prouver.  Croire  naïvement,  sottement  une histoire.  Tenir  (qqn)  pour  sincère,  véridique;  ajouter foi  à  ce  qu'il  dit.  Se  fier  (à).  Vous  pouvez  croire  cet homme (crédible). Croire qqn sur parole. Tu me croiras si  tu  veux;  tu n'es  pas  obligé  de me  croire.  Crois­moi : fais­moi confiance.

● Croire  en,  à.  Croire  à  une  chose,  lui  accorder  son adhésion  morale  ou  intellectuelle.  Croire  au  progrès. Croire  à  l'astrologie.  Accorder  par  conviction  son adhésion; être persuadé de  l'existence et de  la valeur de  (un dogme, un  être  religieux). Croire à  l'Évangile. 

 ― Ne  croire  ni  à  Dieu,  ni  à  Diable.  Croire  en  Dieu : avoir la foi (credo). Croire au Père Noël : être très naïf, se faire des illusions.  Avoir la foi.

Le vocable de la croyance est pour le moins ambiguë : i l recoupe autant le domaine de l’opinion que celui de la foi rendant confuse la distinction entre une croyance et un acte de foi. Autrement dit, l’éclatement de la notion recouvre autant la dimension subjective du jugement que celle objective et culturelle de la religion.

Dès lors, s’interroger sur le sens et la finalité de la croyance, c’est poser le problème du statut de l’acte de croire : comme opinion, la croyance est un jugement indéterminé et incertain ; comme foi, elle est l’affirmation d’une adhésion à un dogme ou à un rite même en l’absence d’une certitude quant à la validité de cette croyance. L’ambiguïté de la croyance tient donc à sa familiarité avec la vérité ou plus précisément avec ce que les individus tiennent pour vrai. Dès lors, on peut se demander si l’objet de la croyance est toujours incertain ? Par ailleurs, est-ce que croire en dieu est une opinion irrationnelle, une illusion de la raison ?

La religionLa religion

1/ Foi et raison2/ Dieu, ses preuves et sa critique3/ Religion et foi

   

Texte 1|  Kant – Opinion, croyance, savoir

Croire ne relève pas seulement du domaine de la religion. Tant l’opinion que le savoir est d’une certaine manière, du point de vue du sujet pensant, un jugement plus ou moins assuré de sa propre certitude sur une chose. La différence tient cependant au degré d’assentiment à ce jugement. Mais l’assentiment ne dit pas la vérité de la chose, mais le degré de certitude qui lie une sujet pensant à un objet quelconque. Dès lors, l’opinion (croire que…) comme la croyance (croire en…) relèvent du même genre d’adhésion à ce qu’un sujet se représente comme vrai ; les distingue cependant la force de l’assentiment : l’opinion reste fragile là où la croyance est têtue.

Kant distingue ainsi trois degrés dans l'assentiment, c'est-à-dire trois modalités de l'adhésion subjective à une représentation quelconque : l'opinion est un jugement problématique, la croyance un jugement assertorique et le savoir un jugement apodictique. Et « les jugements sont problématiques lorsqu'on admet l'affirmation ou la négation comme simplement possibles, assertoriques quand on les y considèrent comme réelles (vraies), apodictiques quand on les y regarde comme nécessaires ». (Kant, Critique de la raison pure) Ainsi, l’opinion est problématique du fait de sa confusion, l’opinion contraire étant tout aussi possible tandis que la croyance est une forme de certitude quant au contenu de ce jugement.

Deux  remarques  s’imposent :  1/  l’assentiment  est  le  mode  d’adhésion  du jugement à son objet. Tout jugement se veut, par principe, vrai ou du moins fonde sa vérité sur  son  assentiment.  Aussi  la  croyance  ne  relève­t­elle  pas  de  la  seule    religion  mais  du jugement en général. Et cependant, les différentes sortes de jugements se distinguent par le degré  d’adhésion  d’un  sujet  à  ce  jugement  allant  du  préjugé  au  dogme  en  passant  par l’hypothèse,  la  conviction…etc.  2/ la croyance se distingue pourtant de l’opinion en ce qu’elle croit en quelque chose. Elle est un jugement qui s’assure subjectivement d’un objet de croyance qu’il lui semble de nature permettre un fort assentiment.

La religionLa religion

1/ Foi et raison2/ Dieu, ses preuves et sa critique3/ Religion et foi

   

Texte 2 |  Averroès – Foi et raison

La religionLa religion

1/ Foi et raison2/ Dieu, ses preuves et sa critique3/ Religion et foi

   

Texte 3 |  Pascal – Le pari

« Examinons donc ce point et disons : Dieu est, ou il n’est pas. Mais de quel côté pencherons-nous ? La raison n’y peut rien déterminer. Il y a un chaos infini qui nous sépare. Il se joue un jeu, à l’extrémité de cette distance infinie, où il arrivera croix ou pile : que gagerez-vous ? Par raison vous ne pouvez faire ni l’un ni l’autre, par raison vous ne pouvez défendre nul des deux.Ne blâmez donc pas de fausseté ceux qui ont pris un choix, car vous n’en savez rien ! - « Non, mais je les blâmerai d’avoir fait, non ce choix, mais un choix. Car encore que celui qui prend croix et l’autre soient en pareille faute, ils sont tous deux en faute. Le juste est de ne point parier ». Oui, mais il faut parier. Cela n’est pas volontaire, vous êtes embarqué. Lequel prendrez-vous donc ? Voyons. Puisqu’il faut choisir, voyons ce qui vous intéresse le moins. Vous avez deux choses à perdre : le vrai et le bien, et deux choses à engager : votre raison et votre volonté, votre connaissance et votre béatitude, et votre nature a deux choses à fuir : l’erreur et la misère. Votre raison n’est pas plus blessée, puisqu’il faut nécessairement choisir, en choisissant l’un que l’autre. Voilà un point vidé. Mais votre béatitude ? Pesons le gain et la perte, en prenant croix que Dieu est. Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien. Gagez donc qu’il est sans hésiter ! - « Cela est admirable. Oui, il faut gager. Mais je gage peut-être trop. » »

Pascal, Pensées 418

La question de la croyance ne peut se défaire de celle de la preuve de l’existence de Dieu. Croire en Dieu suppose d’abord que soit montré que Dieu existe, c’est là chercher une raison de croire. Cette foi à la St Thomas (ne croire que ce que l’on voit, c’est-à-dire que ce qui est l’objet d’une preuve) tend cependant à confondre la croyance et l’opinion, la foi et la raison. C’est ce que montrer l’argument du pari de Pascal s'adressant aux libertins (ou mécréants), c'est-à-dire à ceux qui ont besoin de raison pour croire.

Le pari est un calcul de probabilité. Vaut-il mieux croire ou ne pas croire en Dieu ?

La religionLa religion

1/ Foi et raison2/ Dieu, ses preuves et sa critique3/ Religion et foi

   

Texte 3 |  Pascal – Le pari

« Examinons donc ce point et disons : Dieu est, ou il n’est pas. Mais de quel côté pencherons-nous ? La raison n’y peut rien déterminer. Il y a un chaos infini qui nous sépare. Il se joue un jeu, à l’extrémité de cette distance infinie, où il arrivera croix ou pile : que gagerez-vous ? Par raison vous ne pouvez faire ni l’un ni l’autre, par raison vous ne pouvez défendre nul des deux.Ne blâmez donc pas de fausseté ceux qui ont pris un choix, car vous n’en savez rien ! - « Non, mais je les blâmerai d’avoir fait, non ce choix, mais un choix. Car encore que celui qui prend croix et l’autre soient en pareille faute, ils sont tous deux en faute. Le juste est de ne point parier ». Oui, mais il faut parier. Cela n’est pas volontaire, vous êtes embarqué. Lequel prendrez-vous donc ? Voyons. Puisqu’il faut choisir, voyons ce qui vous intéresse le moins. Vous avez deux choses à perdre : le vrai et le bien, et deux choses à engager : votre raison et votre volonté, votre connaissance et votre béatitude, et votre nature a deux choses à fuir : l’erreur et la misère. Votre raison n’est pas plus blessée, puisqu’il faut nécessairement choisir, en choisissant l’un que l’autre. Voilà un point vidé. Mais votre béatitude ? Pesons le gain et la perte, en prenant croix que Dieu est. Estimons ces deux cas : si vous gagnez, vous gagnez tout ; si vous perdez, vous ne perdez rien. Gagez donc qu’il est sans hésiter ! - « Cela est admirable. Oui, il faut gager. Mais je gage peut-être trop. » »

Pascal, Pensées 418

Mais l’argument du pari n’est qu’une préparation des hommes à l’apologie. S’adressant à ceux qui ont besoin de raisons pour croire, non à ceux dont le cœur est convaincu de l’existence divine, il ne propose qu'une apparence de raison, puisqu'il s'adresse à l'intérêt. s’adresse à l’intérêt. Pascal critique ici l’exigence de certitude que l’on adresse à la foi : la foi est affaire de cœur et non de raison. On n'a guère besoin de preuves pour croire.

La religionLa religion

1/ Foi et raison2/ Dieu, ses preuves et sa critique3/ Religion et foi

   

Texte 4 |  Descartes – Une preuve de l'existence de dieu

La religionLa religion

1/ Foi et raison

2/ Dieu, ses preuves et sa critique3/ Religion et foi

   

Texte 5 |  Spinoza – La superstition

 « La plupart des hommes semblent croire qu'ils sont libres dans la mesure où il leur est permis d'obéir à leurs penchants, et qu'ils abandonnent de leur indépendance dans la mesure où ils sont tenus de vivre selon la prescription de la loi divine. La moralité donc, et la religion, et, sans restriction, tout ce qui se rapporte à la force d'âme, ils les prennent pour des fardeaux qu'ils espèrent déposer après la mort, pour recevoir le prix de la servitude, à savoir de la moralité et de la religion ; et ce n'est pas cet espoir seul, mais aussi et surtout la crainte d'être punis par d'horribles supplices après la mort, qui les poussent à vivre selon la prescription de la loi divine, autant que le permettent leur petitesse et leur âme impuissante. Et si les hommes n'avaient pas cet espoir et cette crainte, s'ils croyaient au contraire que les esprits périssent avec le corps et qu'il ne reste aux malheureux épuisés par le fardeau de la moralité aucune survie, ils reviendraient à leurs naturels, voudraient tout gouverner selon leurs penchants et obéir à la fortune plutôt qu'à eux-mêmes. Ce qui ne me paraît pas moins absurde que si un homme, parce qu'il ne croit pas pouvoir nourrir éternellement son corps de bons aliments, préférait se saturer de poisons mortels ; ou bien, parce qu'il voit que l'esprit n'est pas éternel ou immortel, préfère être dément et vivre sans la Raison : absurdité telle qu'elle mérite à peine d'être relevée. »

Spinoza, Ethique, V, scolie, proposition 41

Spinoza montre combien de l'impuissance des hommes est source de leurs superstitions : parce que si leur intention était toujours réalisée ou si le hasard leur était toujours favorable, alors la superstition n'existerait pas. Lorsque le réel se dérobe, l'imaginaire s'invente une parade symbolique. Ainsi de la crainte et de l'espoir : elles sont les causes finales que l'on imagine pour justifier « le prix de notre servitude ».

Spinoza appelle magie ou superstition l'ensemble des moyens symboliques grâce auxquels l'être humain, en l'absence de technique matérielle directe, s'efforce d'agir sur le réel, soit pour obtenir un avantage, soit pour repousser un danger, soit encore pour attirer le malheur sur autrui. C’est donc du fait de leur impuissance à maîtriser leurs vies que les hommes laissent l’espoir et la crainte les gouverner. La croyance superstitieuse est ainsi un asile de l'ignorance.

La religionLa religion

1/ Foi et raison

2/ Dieu, ses preuves et sa critique3/ Religion et foi

   

Texte 6 |  Marx – L'aliénation

La religionLa religion

1/ Foi et raison

2/ Dieu, ses preuves et sa critique3/ Religion et foi

Van Gogh, La douleur du vieil homme (Aux portes de l'éternité), 1890

   

Texte 6 |  Marx – L'aliénation

La religionLa religion

1/ Foi et raison

2/ Dieu, ses preuves et sa critique3/ Religion et foi

   

Texte 6 |  Marx – L'aliénation

La religionLa religion

1/ Foi et raison

2/ Dieu, ses preuves et sa critique3/ Religion et foi

Aucune critique de la religion ne peut faire l'économie d'une définition normative de la religion, c’est-à-dire déterminer sa valeur et son mécanisme. Marx défend ici la thèse selon laquelle la religion est une forme d’aliénation en tant qu’elle est le rapport de l’homme à sa conscience comme à un être autre que lui-même (dieu). La conscience de soi, plutôt que d’être vecteur de libération, est vecteur d’aliénation dès lors qu’elle se rapporte à autre chose qu’elle-même. Le croyant enrichit par sa pensée un objet irréel aux dépens de lui-même qu’il appauvrie : plus l’homme dote dieu de qualités, plus il s’appauvrit lui-même. « L’homme pauvre possède

un dieu riche ». Aussi, la religion n’est-elle qu’une réalisation fantasmatique de l’être humain.

La fonction de la religion, comme forme d’aliénation, est ainsi expression et protestation contre la misère réelle de l’homme : expression car elle en est le reflet, c’est-à-dire la manière dont l’homme exprime sa misère dans la fuite vers une puissance extérieure à lui-même, et protestation car elle dissimule cette misère, c’est-à-dire qu’elle n’est qu’une fuite qui cache les vraies raisons de la misère réelle de l’homme.

Ainsi, Marx met en évidence ce mécanisme: la religion renvoie vers un autre monde les espoirs non réalisés dans celui-ci. Mais alors qu'est-ce qui fait la force des religions : est-ce parce qu’une aliénation est collective qu’elle peut passer pour une forme de liberté ? Est-ce parce qu’une illusion est collective qu’elle peut passer pour une vérité ?

   

Texte 7 |  Durkheim – La religion

La religionLa religion

1/ Foi et raison

2/ Dieu, ses preuves et sa critique

3/ Religion et foi

   

Texte 8 |  Ricoeur  – La critique et la conviction

La religionLa religion

1/ Foi et raison

2/ Dieu, ses preuves et sa critique

3/ Religion et foi

   

Texte 8 |  Ricoeur  – La critique et la conviction

La religionLa religion

1/ Foi et raison

2/ Dieu, ses preuves et sa critique

3/ Religion et foi

   

Texte 9 |   Kierkegaard –Le chevalier de la foi

La religionLa religion

1/ Foi et raison

2/ Dieu, ses preuves et sa critique

3/ Religion et foi

Chagall, Le sacrifice d'Abraham, 1972

   

Texte 9 |   Kierkegaard –Le chevalier de la foi

La religionLa religion

1/ Foi et raison

2/ Dieu, ses preuves et sa critique

3/ Religion et foi

   

Texte 9 |   Kierkegaard –Le chevalier de la foi

La religionLa religion

1/ Foi et raison

2/ Dieu, ses preuves et sa critique

3/ Religion et foi

Est-ce parce que les croyants sont plusieurs à croire à quelque chose que cette chose peut être autre chose qu’un jugement subjectif ? Car la croyance ne peut se défaire de ce qui la caractérise : elle est adhésion à un jugement sans certitude de sa vérité.

Aussi, on peut dire que, par nature, la foi comme acte de croyance est un acte paradoxal : elle est la collision entre une conviction et une incertitude, entre le fini ou l’infini comme le montre ce texte de Kierkegaard. La foi la plus haute n’est donc pas celle qui est sûre d’elle-même mais celle qui se fonde sur la plus grande incertitude. Autrement dit, ce n’est pas le degré d’assentiment qui fait la foi, mais sa force dans l’incertitude. Dès lors, la foi est affaire de risque et non de savoir, de cœur et non de raison.

Comment alors comprendre que la force d’un tel acte puisse donner lieu à autant de comportement aussi irrationnel ? Peut-être faut-il comme Nietzsche, affirmer que dans toutes les religions, « l’homme pieux

est une exception » là où le superstitieux est la règle.