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Page 1: Conduite à tenir devant une toxidermie aux corticoïdes

Disponible en ligne sur

www.sciencedirect.com

(2013) 298–303

Revue française d’allergologie 53

Conduite à tenir devant une toxidermie aux corticoïdes

Management of severe cutaneous adverse drug reactions to corticosteroids

J. Waton a,*, M. Baeck b, M. Torres c, A. Barbaud a

a Service de dermatologie, CHU de Nancy, 36, quai de la Bataille, 54000 Nancy, Franceb Service de dermatologie, hôpital Saint-Luc, Bruxelles, Belgique

c Service d’allergologie et immunologie, clinique de Malaga, Malaga, Espagne

Disponible sur Internet le 16 fevrier 2013

Résumé

Les toxidermies aux corticoïdes (CS) sont des réactions paradoxales et rares. Une étude clinique portant sur 64 patients (plus grosse sériemondiale) ainsi qu’une revue de la littérature permettent de déterminer des caractéristiques qui leur sont propres : une prédominance féminine, uneplus grande propension aux réactions médicamenteuses multiples, la possibilité de survenue tardive des urticaires et des réactions avec les CSretards injectables, l’existence de DRESS ou PEAG. Ces hypersensibilités sont constatées avec l’ensemble des CS. Utiliser les classifications del’allergie de contact n’est pas suffisant. Notre analyse (à partir de nos 64 cas) permet de décrire la réalisation des tests cutanés, de guider lesréintroductions et de proposer une conduite à tenir devant une allergie aux CS pris par voie systémique.# 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.

Mots clés : Corticoïdes ; Allergie ; Systémique ; Toxidermie ; Tests ; Réactions croisées ; Classification ; Conduite à tenir ; Présentation clinique ; Analysechimique

Abstract

Cutaneous adverse drug reactions to corticosteroids (CS) are rare and unexpected. A clinical study including 64 patients (largest global series)plus a review of the literature has allowed us to determine the specific characteristics of this group of patients: majority feminine, a strongpredisposition to multiple drug reactions, the possibility of late-onset urticaria, reactions due to systemic long-acting CS, and the existence ofDRESS or acute generalized exanthematous pustulosis. These hypersensivities are observed with all CS. Diagnosis cannot be based on commonclassifications of contact allergy. Our study of the 64 cases provided guidelines for skin testing, re-introduction of CS, and future management ofallergic reactions to systemic CS.# 2013 Elsevier Masson SAS. All rights reserved.

Keywords: Corticosteroids; Cutaneous adverse drug reactions; Diagnosis; Management

Les réactions d’hypersensibilité aux corticoïdes (CS) sontparadoxales puisque les CS sont un traitement des allergies.Savoir diagnostiquer et explorer ces réactions rares est pourtantessentiel car les CS sont des traitements vitaux pouvantnécessiter une administration en urgence. Faute de sérieimportante, il est actuellement proposé d’explorer les réactionscroisées dans les allergies systémiques aux CS par homologieavec les allergies de contact, qui sont elles bien connues [1–3].Une étude des cas de la littérature ainsi qu’une étude portant sur

* Auteur correspondant.Adresse e-mail : [email protected] (J. Waton).

1877-0320/$ – see front matter # 2013 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservhttp://dx.doi.org/10.1016/j.reval.2013.01.005

l’agrégation de trois populations de Nancy (France), Malaga(Espagne), Bruxelles (Belgique) (64 patients) permet de décrireles caractéristiques cliniques et de proposer une conduite à tenirpour explorer une allergie aux CS systémiques.

1. Épidémiologie des toxidermies dues aux corticoïdes

La prévalence des allergies systémiques aux CS est évaluéepour les réactions immédiates entre 0,1 et 0,3 % à partir des caspubliés et est inconnue pour les réactions retardées [4,5]. Padialet al. montrent une prédominance féminine [1], retrouvée aussidans notre série (15 hommes pour 49 femmes). Les patients

és.

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sensibilisés aux CS semblent plus à risque de réactivitémédicamenteuse multiple (20 % des patients dans notre étude)que les patients ayant des toxidermies à d’autres classesmédicamenteuses (0,6 %) [6]. Aucun de nos 64 patients n’avaitd’asthme avec intolérance à l’aspirine, facteur de risqued’hypersensibilité aux CS décrit dans la littérature, qui n’est enfait pas si fréquent [7]. Les CS de la catégorie A de Goossenset al. (ou I de Baeck et al.) [8,9] sont souvent incriminés commegrands pourvoyeurs de toxidermie. Dans notre série, quasimentla moitié des patients avaient pris un CS d’une autre classe ;tous les CS sont donc de potentiels allergènes, quelle que soitleur classe chimique.

2. Mécanisme des toxidermies dues aux corticoïdes

Il existe aussi bien des hypersensibilités immédiates (HSI)que retardées. Des réactions d’intolérance, hypersensibilitésnon allergiques, sont suspectées quand les patients ont un testde provocation positif mais des tests cutanés demeurantnégatifs [10]. Néanmoins, les tests cutanés aux CS sont parfoisfaussement négatifs s’ils sont réalisés à trop forte concentra-tion, ce qui pourrait expliquer des tests de provocation positifsaprès tests négatifs. Des études in vitro et in vivo (IgEspécifiques ou basophil activation tests, expression d’interférongamma et régulation négative de l’interleukine 4 et GATA-3)fournissent de nombreux arguments pour l’existence dans ungrand nombre de cas, de mécanismes IgE-médiés pour lesurticaires ou d’hypersensibilité cellulaire retardée dans lesEMP et les PEAG [11].

3. Hypersensibilité immédiate : urticaire, angiœdème etanaphylaxie

Plusieurs cas de choc anaphylactiques aux CS, dont certainsmortels, ont été décrits, montrant la potentielle gravitél’hypersensibilité aux CS [12]. Les HSI peuvent survenir trèstardivement, plus de six heures après la prise du CS [1,13].Dans notre expérience 25 % des HSI apparaissent six à24 heures après la prise du CS. Cette survenue tardive des HSIaux CS est à connaître pour ne pas sous diagnostiquer l’allergieau CS (un traitement pris 24 heures avant un angiœdèmepouvant paraître non imputable).

4. Hypersensibilité retardée (HSR) : exanthèmemaculopapuleux (EMP), pustulose exanthématiqueaiguë généralisée, DRESS, syndrome de Stevens-Johnson, érythème pigmenté fixe

Contrairement aux HSI, le délai d’apparition des toxider-mies retardées aux CS ne semble pas allongé puisqu’il est de24 heures à 15 jours.

La manifestation d’HSR aux CS la plus fréquente est l’EMPqui peut prendre un aspect annulaire (comme décrit dansl’allergie de contact aux dermocorticoïdes) ou érythrodermiquevoire flexural (cas personnels), se rapprochant d’un cas deSymmetrical Drug-Reladed Intertriginous and FlexuralExanthema (SDRIFE) publié par Armingaud et al. [14]. Cette

présentation clinique de SDRIFE peut faire évoquer une« systemic contact dermatitis » [15]. La PEAG aux CS ne paraîtpas exceptionnelle (sept cas publiés et deux cas dans notre série,avec des CS de différentes catégories, patch tests [PT] positifsavec le CS suspecté dans huit cas sur neuf) [16–21]. Dans lalittérature un cas d’érythème pigmenté fixe et deux cas deStevens-Johnson ont également été décrits [22–24]. Au décoursd’une chimiothérapie une allergie aux CS doit être évoquéechez les patients développant un EMP (deux patients de notresérie), la chimiothérapie risquant d’être suspendue à tord carelle paraît toujours très imputable [25]. Nous avons observé lepremier cas de DRESS aux CS. Le DRESS aux CS n’est peutêtre pas si rare et probablement sous diagnostiqué. Méconnaîtrel’imputabilité d’un CS dans une telle toxidermie expose aurisque d’aggravation lors du traitement du DRESS par CS.

La méconnaissance des classes de CS auxquelles le patientest sensibilisé gêne le traitement de l’épisode de toxidermie auxCS. Les tests d’usage d’un CS topique ou une cure brève deciclosporine A (deux de nos patients) sont alors utiles.

5. Analyse en fonction de la voie d’administration ducorticoïde

La toxidermie peut survenir suite à l’injection unique intra-articulaire d’un CS à demi-vie longue. Dans notre série, lecortivazol et la béthamethasone dipropionate semble donnerdes toxidermies très tardives (neuf à 15 jours après l’injectionunique pour les EMP et plus de 24 heures après l’injection pourles urticaires). Ces délais peuvent être expliqués par lalibération progressive et prolongée du CS. Ils exposent aurisque de sous diagnostic car le CS pourrait sembler peuimputable car arrêté depuis parfois 15 jours.

En cas d’absolue nécessité de reprendre le CS responsabled’hypersensibilité et en l’absence de toxidermie grave, unchangement de voie pourrait être essayé puisque dans lalittérature, quatre patients ne tolèrent pas la méthylprednisoloneIV mais supportent la méthylprednisolone per os [26–28]. Pourtrois de nos patients l’essai de changement de voie a été unéchec (deux tests de provocation orale à la méthylprednisoloneet un test de provocation intramusculaire à la dexaméthasoneont redéclenché une toxidermie).

L’administration d’un CS par voie muqueuse peut donnerdes allergies de contact [29] mais aussi de réelles toxidermiespuisque nos patients présentaient des EMP ou des urticairesgénéralisées, voir des angiœdèmes. Concernant la voie intra-articulaire, un passage systémique est possible puisque lesflushs sont fréquent après l’injection [30].

6. Intérêt des tests dans les suspicions d’hypersensibilitéaux corticoïdes systémiques

La valeur prédictive négative des tests cutanés toutes classesmédicamenteuses confondues a été estimée à 90 % [31] ;calculée chez nos 64 patients elle est de 71 % dans l’allergie auxCS. Padial et al. proposent des tests de provocationsystématiques, même en cas de très forte imputabilité duCS, obtenant une VPN plus faible (PT et IDR) à 34,3 % [1]. Un

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patient qui a des tests négatifs à un CS a donc 30 à 65 % derisque selon les études d’être tout de même allergique à ce CS.Il est donc essentiel de s’assurer de la bonne tolérance du CS enpoursuivant les tests cutanés négatifs par des tests deréintroduction sous surveillance hospitalière.

Ces tests sont néanmoins absolument nécessaires puisque47 % de nos patients et 57 % des cas de la littérature avaient destests positifs avec le CS initialement imputable (revue de 1974 à2012 : 78 toxidermies aux CS avec tests cutanés suivis deréintroductions de CS) [1,2,5,13,26–28,32–50].

7. Réactions croisées dans les allergies aux corticoïdespris par voie systémique

Les réactions croisées entre CS ne sont pas connues dansl’allergie aux CS pris par voie systémique. Faute d’étude et depopulation suffisamment grande, les classifications de l’allergiede contact sont utilisées [8,9]. Néanmoins, des cas de lalittérature montrent la tolérance d’un CS de la même classe quele CS responsable de la toxidermie [1,5,26,28,33–35,37,40–

42,44–56]. Dans notre série, quelle que soit la classificationutilisée, environ 40 % des patients avaient un test deprovocation négatif avec un CS appartenant à un groupe pourlequel des tests étaient pourtant positifs. Des réactions croiséesou des multisensibilisations à différents groupes étaientégalement observées pour près de 30 % des patients (tests

1)TD$FIG]

Tests, 6 semaines après la toxidermie

Suspicion clinique de toxidermie à un CS (y compris urticaires retardées, DRESS, PEAG, délais tardifs

avec les corticoïdes retards intra articulaires)

Eliminer un flush ou un syndrome de Tachon (non allergiques)

PATCH TESTS:

Chemotechnique diagnostics : Budesonide - 0,01% vas ; Tixocortol-21-pivalate -

0,1% vas ; Alclometasone-17,21-dipropionate - 1% vas; Dexamethasone-21

phosphate disodium salt - 1% vas

Trolab : Betamethasone - 0,12% vas ; Triamcinolone acetonide - 0,1% vas ;

Clobetasol-17-propionate - 0,25% vas ; Hydrocortisone-17-butyrate - 0,1% vas ;

Hydrocortisone - 1% vas ; Prednisolone - 1% vas ; Amcinonide - 0,1% vas

Médicaments commercialisés: Mométasone furoate - pur ; Méthylprednisolone –

0.1% alc ; Prednisone- 0.1% alc ; Cortivazol- 0.1% alc, Fluticasone pur

Béclomethasone pur*

PRICK TESTS PURS* : Méthylprednisolone, Hydrocortisone, Prednisolone, Prednisone, tixocortol, Triamcinolone,

Budesonide, Cortivazol, Betamethasone, Dexamethasone, Mometasone, Deflazacort (not disponible in France) (sauf si

positif en patch test)

IDR (concentration maximale testable, a tester avec une technique standardisée, n’utiliser que les formes

injectables du médicament): Méthylprednisolone 40mg/ml, Hydrocortisone 10mg/ml, Prednisolone 25mg/ml,

Triamcinolone 40mg/ml, Cortivazol 25mg/ml, Betamethasone 4mg/ml, Dexamethasone 4mg/ml (sauf si positif en

patch test ou prick test)

Si nécessaire, éliminer une

allergie immédiate ou retardée à

la CMC :

- patch test 10mg/ml

- prick test 10mg/ml

- IDR 10mg/ml

- si tests négatifs : test de

réintroduction oral ou

injectable

Lecture

48h, day

96h, 7 day

Lecture

20min,

24h

Lecture

20min,

24h

Réintroduction sous surveillance hospitalière d’un CS qui a des tests négatifs

*Patients explorés pour une toxidermie à des CS inhalés : rajouter des tests avec des CS inhalés

Fig. 1. Conduite à tenir devant un e suspicion d’allergie à un corticoïde pris par voie systémique.

[(Fig._

positifs à différentes catégories de CS). Cela montrel’insuffisance de ces classifications dans les toxidermies auxCS, d’où la nécessité d’une analyse chimique et d’une nouvelleclassification pour guider les tests, les réintroductions et trouverle CS toléré par le patient.

8. Comment réaliser les tests dans les toxidermies auxcorticoïdes

Comme cela est décrit pour l’allergie de contact, les PTdoivent être lus à 48 heures, 96 heures et à sept jours. Lesdilutions à l’éthanol à 0,1 % seraient plus sensibles que lesdilutions commerciales [15]. Pour plus de facilité, les tests auxCS commercialisés seront utilisés auquel seront ajoutés certainsmédicaments commercialisés (testés à 0,1 % dans l’alcool, saufpour les sprays testés purs) (Fig. 1). Pour les patients exploréspour une toxidermie à des CS inhalés, des tests complémen-taires à différents médicament devront être faits (Fig. 1).

Les prick-tests et IDR peuvent être réalisés aux concentra-tions pures, sans irritation, avec la technique décrite par l’ESCD[57] sauf pour l’hydrocortisone (concentration maximale enIDR 10�1). Un changement de technique de réalisation ou decritère de lecture pourrait rendre ces concentrations irritantes.En plus d’une lecture à 20 minutes, la lecture à 24 heures desprick-tests et IDR est incontournable puisque dans notre sérietrois prick-tests et 25 IDR étaient uniquement positives à

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24 heures. Des lectures encore plus tardives pourraient mêmeêtre intéressantes (deux prick-tests positifs à 48 heures, deuxIDR positives à 96 heures et une à sept jours). La positivitétardive des IDR ne se voit pas exclusivement dans les HSR etn’est pas non plus l’apanage des CS à forte activité anti-inflammatoire. Les sites d’IDR de nos 30 patients françaisétaient systématiquement vérifiés lorsqu’ils venaient àj15 pour leur test de réintroduction et aucune sensibilisationactive n’était suspectée. Soria et al. ont évalué l’intérêt desIDR dans l’allergie de contact aux CS, et ont alors étéconfrontés à des atrophies cutanées chez 14/22 patients [15].Cet effet secondaire peut être expliqué par la techniqueutilisée puisque Soria et al. injectaient 0,04 mL (alors quenous n’injections que 0,03 mL et que des atrophies cutanéesétaient notées chez seulement deux de nos patients et étaientrégressives) et utilisaient des produits non injectables pourles IDR. La standardisation des techniques d’IDR et lerespect des bonnes pratiques d’IDR en n’utilisant que desmédicaments injectables sont donc essentiels [57,58].D’après notre expérience, nous recommandons de testerdifférentes molécules en IDR pour pouvoir guider lesréintroductions (Fig. 1).

9. Diagnostic différentiel d’une hypersensibilité auxcorticoïdes administrés par voie systémique

Les diagnostics différentiels des toxidermies aux CS doiventêtre connus pour éviter la contre indication à tord du CS. Ils’agit essentiellement du flush retardé aux CS et du syndromede Tachon.

Le flush est un érythème du visage, du cou, du torse(généralisé dans 15 % des cas) associé à une sensation dechaleur qui survient en moyenne 19 à 27 heures aprèsl’injection intra-articulaire, IV ou per os d’un CS [30,59,60].Il est plus fréquent chez les femmes, n’est lié ni à la maladiesous-jacente, ni à une instabilité vasomotrice pré-existante [30].Le flush est résolutif en moyenne en 36 à 72 heures [59] et sereproduit lors d’injections ultérieures dans 62,4 % à 77,7 % descas, même lors de l’utilisation d’un CS différent [30,59]. Lechangement CS et la pré-médication par anti-histaminique nepermettent pas dans tous les cas de prévenir la rechute du flushet dans un petit nombre de cas, le flush ne récidive pas lors de laréadministration du même CS [59].

Le flush retardé est isolé mais il existe un flush immédiat quipeut être intégré dans un syndrome plus impressionnant : lesyndrome de Tachon. Ce dernier associe une douleur axialesuraiguë dans les 15 minutes qui suivent l’injection, avecanxiété (87 % des cas), souffle court sans asthme (64 % descas), flush ou érythème généralisé (64 % des cas), sueurs (41 %des cas), douleurs abdominales (20 %), hypo- (8 %) ouhypertension (15 % des cas) [61], est résolutif en 25 à71 minutes. Le syndrome de Tachon aurait une incidence d’uncas sur 8000 injections. Ce syndrome d’évolution favorablemais très impressionnant récidive lors de la réinjection de CSpour 14 % des patients. Il survient avec des CS de classeschimiques variées et son mécanisme reste obscur. Il est peuprobable qu’il soit allergique ou lié à l’injection intraveineuse

de CS mais pourrait être dû à une réaction aiguë du systèmeneurologique sympathique [61].

Il ne faut pas non plus méconnaître une allergie auxexcipients des CS. Dans les réactions immédiates aux CS ilexiste de nombreuses observations de réactions dues à lacarboxyméthylcellulose (CMC, gomme cellulosique, gommede cellulose, carmellose, cellulose sodium glycolate, E466)[62,63]. Des prick-tests peuvent être positifs avec le CSincriminé mais rarement positif avec la CMC (à 10 microg/mL)[64]. Pour Bigliardi et al. ou Grims et al. les IDR (à 0,075,0,75 mg/mL ou 10 microg/mL) paraissent sensibles [62,63].

Nous avons récemment rapportés les trois premiers casd’HSR à la CMC [65]. Un des ces trois cas était un homme de48 ans développant un EMP à prédominance flexurale troisjours après injection de Diprostène1, puis un EMP du tronc24 heures après prise de Feldène1, les deux médicamentscontenant de la CMC. Dans les réactions retardées à la CMC,les PT, prick-tests et IDR (1 mg/mL) peuvent avoir des résultatsnégatifs.

Que se soit dans les réactions immédiates ou retardées, encas de négativité des tests cutanés, il faut avoir recours à unTPO à la CMC ou un test de provocation avec un médicamentinjectable contenant de la CMC. En effet, plusieurs publicationsfont rapport de la bonne tolérance de la CMC orale (TPO de136 mg à 250 mg) chez les patients ayant eu une anaphylaxiedue à l’administration parentérale de CMC [64,66,67].

10. Conclusion

Les CS peuvent provoquer des hypersensibilités plusfréquemment immédiates que retardées et ont la particularitéde déclencher des urticaires de survenue tardive. Tous les CSsont potentiellement pourvoyeurs d’hypersensibilité, sansdistinction de catégorie chimique. Quelle que soit laclassification utilisée, ces patients ont fréquemment des testspositifs à plusieurs classes chimiques de CS. La part de lasensibilisation cutanée dans ces sensibilisations multiples estprobable. Les PT, prick-tests et IDR sont essentiels dansl’exploration de ces toxidermies ainsi que leur lecture tardive,quelle que soit la toxidermie initiale. Ils doivent ensuite êtrepoursuivis par des tests de réintroduction sous surveillancehospitalière vu leur valeur prédictive négative.

Déclaration d’intérêts

Les auteurs n’ont pas transmis de déclaration de conflitsd’intérêts.

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